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15.05.2024 à 06:00

Tunisie. Haro sur les migrants subsahariens et leurs soutiens

Lilia Blaise

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Avalanche d'arrestations, à commencer par celle de Saadia Mosbah, figure emblématique de la lutte antiraciste, suivie entre autres de celle de l'avocate Sonia Dahmani en raison d'un commentaire sur un plateau de télévision. Le monde associatif et les intervenants médiatiques critiques du discours présidentiel sont dans le viseur des autorités. Le tout dans une atmosphère de retour à la chasse aux migrants. Dans une vidéo postée lundi 6 mai sur la page Facebook officielle de la présidence (…)

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Avalanche d'arrestations, à commencer par celle de Saadia Mosbah, figure emblématique de la lutte antiraciste, suivie entre autres de celle de l'avocate Sonia Dahmani en raison d'un commentaire sur un plateau de télévision. Le monde associatif et les intervenants médiatiques critiques du discours présidentiel sont dans le viseur des autorités. Le tout dans une atmosphère de retour à la chasse aux migrants.

Dans une vidéo postée lundi 6 mai sur la page Facebook officielle de la présidence de la République, le président Kaïs Saïed annonce lors d'une réunion du Conseil national de sécurité que les autorités tunisiennes ont repoussé vers « la frontière Est », c'est-à-dire du côté de la Libye, près de 400 migrants subsahariens qui avaient tenté d'entrer en Tunisie par le pays voisin. Ces chiffres lui font réitérer que la Tunisie ne sera pas une terre d'accueil ni de transit pour les migrants en « situation irrégulière ». Une annonce qui advient plus d'un an après un communiqué de la présidence dénonçant la « horde de migrants subsahariens » visant à « modifier la composition démographique et l'identité du pays » et qui avait ouvert les vannes d'une campagne de racisme sans précédent.

Ce discours est prononcé après plusieurs jours de campagnes sécuritaires pour contrôler et arrêter les migrants en situation irrégulière. En cause, de multiples facteurs. Il y a eu la visite le 17 avril de la présidente du conseil italien Giorgia Meloni, la quatrième en moins d'un an pour parler, entre autres, des arrivées de migrants irréguliers à Lampedusa, la Tunisie étant depuis 2018 l'une des principales zones de départs des bateaux.

Sur le plan local, le mécontentement de nombreux habitants s'est amplifié dans la région de Sfax, près des oliveraies après la dégradation de biens agricoles et certaines tensions avec les migrants qui vivent depuis des mois sur place, dans une situation sanitaire et sociale plus que précaire. Durant la campagne sécuritaire de 2023, les migrants subsahariens – parfois même des immigrés en situation régulière — ont été chassés de leurs logements et beaucoup, dont le travail informel a longtemps été toléré par l'État, ont perdu leur emploi, ce qui a rendu leur situation encore plus fragile. Chassés des grandes villes, ils se sont retrouvés dans les zones rurales, comme dans la région de Sfax, où ils ont utilisé des bâches et autres matériels agricoles pour camper et se protéger des intempéries, provoquant ainsi la colère des habitants des oliveraies sur place. La majorité de ces derniers soutiennent d'ailleurs les opérations de police, et une manifestation de plusieurs centaines de personnes a eu lieu à Sfax samedi 4 mai pour réclamer le « départ » des migrants.

Une aide criminalisée

Mais cette fois, un autre élément s'est introduit dans le débat autour de la gestion des arrivées dans le pays. Les associations venant en aide aux migrants sont désormais dans le viseur des autorités. La militante tunisienne noire Saadia Mosbah, critique vis-à-vis de la politique migratoire du gouvernement et présidente de l'association de lutte contre les discriminations raciales Mnemty, a été arrêtée le jour du discours présidentiel, ainsi qu'un autre membre de l'association, sur fond de suspicions de « blanchiment d'argent ». Cette figure importante de la lutte antiraciste en Tunisie a contribué à l'élaboration de la loi pénalisant le racisme dans le pays votée en 2018. Elle a également fait partie des mobilisations contre la politique répressive à l'égard des migrants après le communiqué polémique de la présidence en février 2023.

En juillet, lors d'une manifestation pour dénoncer les déportations de migrants subsahariens dans le désert libyen, elle déclare : « Si la leçon d'humanité est de mettre les migrants aux portes du désert avec plus de 50 degrés à l'ombre, on se demande où on va ». Elle critiquait alors les propos tenus par Kaïs Saïed le 10 juin lors d'une visite dans la ville de Sfax où se trouvaient des migrants à la rue, expulsés de leur logement. Il avait en effet déclaré : « Nous sommes capables de donner des leçons d'humanité à ceux qui n'en ont pas », soulignant que la solution à la migration devait être « humaine et collective » et respecter la souveraineté de l'État. Durant l'été 2023, plusieurs milliers de migrants se sont retrouvés déplacés dans le désert libyen et à la frontière algérienne, laissés à l'abandon pendant plusieurs jours, souvent sans eau ni nourriture. Plusieurs dizaines sont morts selon les chiffres des ONG1. La photo d'une mère et de sa fille, Fati Dasso et Marie mortes de déshydratation dans le désert, avait particulièrement choqué. Des expulsions que l'État tunisien n'a jamais officiellement reconnus, remettant même en question la véracité de certains clichés.

Moins d'un an plus tard, en plus de la reprise des évacuations forcées de migrants subsahariens, les membres des associations qui leur viennent en aide sont considérés comme des « traîtres » et des « mercenaires » selon les mots du président, qui a accusé dans son discours — sans les nommer – les organisations qui reçoivent d'importants financements étrangers et « ne devraient pas se substituer à l'État tunisien ». Avant son arrestation, Saadia Mosbah a été la cible de campagnes de haine sur les réseaux sociaux. Elle et son collègue ont été questionnés sur la base de la loi relative à la lutte contre le terrorisme et au blanchiment d'argent. La garde à vue de Saadia Mosbah a été prolongée de cinq jours le samedi 11 mai. Son collègue a quant à lui été libéré.

Des hommes cagoulés pour une arrestation musclée

Le président du Conseil tunisien pour les réfugiés et son vice-président sont également arrêtés le 3 mai après la publication d'un appel d'offres destiné à des hôtels pouvant héberger des personnes en situation irrégulière. Ils ont été placés sous mandat de dépôt et accusés d'associations de malfaiteurs dans le but d'aider des personnes à accéder au territoire tunisien.

L'ex-directrice de la branche tunisienne de l'ONG française Terre d'asile, Cherifa Riahi est également placée en garde à vue, bien qu'elle ait quitté ses fonctions depuis 2022. D'autres associations venant en aide aux migrants ou travaillant sur la question migratoire ont reçu des visites des autorités et ont été questionnées. Depuis plusieurs mois, une grande majorité travaille d'ailleurs sans exposition médiatique afin d'éviter les campagnes de diffamation sur les réseaux sociaux, mais aussi parce que l'aide aux migrants est désormais criminalisée.

Un homme a été arrêté le 7 mai à Thala, au centre-ouest du pays, pour avoir hébergé des migrants en échange d'une compensation financière. Idem à Monastir où la garde nationale a arrêté deux Tunisiens pour les mêmes raisons. Les campagnes sécuritaires se poursuivent, 24 migrants en situation irrégulière ont été arrêtés à Monastir, et 60 à Sousse. Ils font l'objet d'un mandat de dépôt pour « entrée illégale » sur le territoire tunisien et « avoir fait partie d'un rassemblement de nature à troubler l'ordre public ».

Dans ce contexte déjà tendu, durant le week-end du 10 au 12 mai, la répression est montée d'un cran sur le plan politique. L'avocate et chroniqueuse Sonia Dahmani, sous le coup d'un mandat d'amener pour des propos sarcastiques tenus sur la situation en Tunisie, s'est réfugiée à la Maison de l'avocat à Tunis vendredi soir. Le lendemain, elle y a fait l'objet d'une arrestation musclée par des hommes cagoulés. L'opération a été filmée en direct sur la chaîne France 24, dont le journaliste a ensuite été pris à partie par la police, toujours en direct, et sa caméra cassée. Quelques heures après cette intervention, les journalistes de la radio IFM, Borhen Bsaiess et Mourad Zeghidi ont été également arrêtés et sont actuellement toujours en garde à vue. Ils ont été questionnés sur le contenu de leurs analyses politiques effectuées sur les plateaux de la radio.

Alors que les avocats sont montés au créneau lundi pour dénoncer l'arrestation de leur collègue, appelant à une grève générale de leur secteur, l'étau se resserre sur la profession qui avait déjà protesté et décrété une journée de grève le 2 mai pour dénoncer les pressions grandissantes sur leur profession et le sort de certains de leurs confrères qui se trouvent en prison. Dans la nuit du lundi au mardi, une nouvelle descente a été effectuée à la Maison de l'avocat par les forces de l'ordre qui y ont arrêté maître Mehdi Zagrouba pour le motif d'« outrage à un fonctionnaire ».

Interrogations au parlement

Ces coups de filets à l'encontre de la société civile qui aide les migrants, mais aussi contre les robes noires et les journalistes témoignent de la volonté des autorités de contenir un débat de plus en plus sensible, celui de la gestion de la migration, facteur de tensions au sein d'une population en grande majorité encore acquise à Kaïs Saïed.

Au parlement – élu avec 11 % des suffrages et dénoncé comme illégitime par l'opposition -, pendant une séance plénière le mardi 7 mai, certains députés ont par exemple questionné l'efficacité de la gestion sécuritaire de la migration, même si beaucoup soutiennent le président et optent pour la même rhétorique sur la migration irrégulière. « Nous avons vu des files d'attentes devant les guichets de Western Union où les migrants reçoivent des fonds de l'étranger, a déclaré la députée Besma Hammami, nous voyons bien qu'ils sont financés et diligentés par l'extérieur (…). Il y a un plan pour qu'ils s'installent en Tunisie durablement ». Un autre député, Fadhel Ben Torkia, réclame plus de transparence de la part des autorités sur le nombre de migrants en Tunisie :

Pourquoi le gouvernement ne nous répond pas ou ne nous rencontre pas pour parler de ce problème ? (…) on entend parler de 20 000 migrants, voire 60 000, sans jamais avoir de chiffres exacts.

Certains députés ont aussi demandé la publication du contenu de l'accord bilatéral signé en avril, à l'occasion de la visite de Giorgia Meloni2, entre la Tunisie et l'Italie pour lutter contre la migration, de même que la publication des résultats du sommet tripartite entre la Tunisie, la Libye et l'Algérie tenu le 25 avril à Tunis, pendant lequel les chefs d'État ont assuré vouloir coordonner leurs efforts en vue de lutter contre la migration irrégulière.

Ce questionnement sur le déni de communication des autorités par un Parlement dont les pouvoirs demeurent très restreints selon la Constitution montre que la question migratoire suscite également des critiques au sein d'une classe politique habituellement alignée sur la ligne de Kaïs Saïed. L'ancienne députée Leila Hadded, membre du parti nationaliste arabe et du mouvement Echâab, a déclaré à la radio privée IFM le 9 mai3 qu'il fallait s'interroger sur un possible « échec sécuritaire » à contrôler la vague migratoire en Tunisie. « Où sont nos forces de sécurité, notre armée ? Il n'y a aucune réponse qui éclaire les Tunisiens (…). Il faut expliquer pourquoi nous en sommes arrivés là », interpelle-t-elle.

Importation de la théorie du Grand remplacement

Pour l'historien spécialisé dans la migration et maître de conférences à l'université de Tunis Riadh Ben Khalifa, ces débats montrent bien les problèmes de perception et de représentation de la question migratoire en Tunisie.

Étant donné qu'il n'y a pas de politique migratoire en Tunisie mais plutôt une gestion sécuritaire qui fonctionne au coup par coup, les représentations sont faussées. Par exemple, la question de « l'invasion » des migrants qui est souvent agitée et les différents chiffres sur le nombre de migrants subsahariens faussent la perception. On voit beaucoup de migrants concentrés dans un lieu et notamment dans les zones urbaines, d'où le sentiment d'un très grand nombre.

Sans compter les débats sur les réseaux sociaux qui ne cessent de véhiculer les théories complotistes autour de la migration, des « théories elles-mêmes importées d'Europe, proches de celles du Grand remplacement », précise Riadh Ben Khalifa4.

Alors que les campagnes sécuritaires actuelles donnent cours à l'incurie raciste, les vraies questions peinent à être posées selon Riadh Ben Khalifa, notamment sur le rôle des associations dans la gestion migratoire et les amalgames : « Il faut faire la différence entre celles qui travaillent et qui sont reconnues et celles qui font le jeu des autorités européennes en poussant la Tunisie à devenir une sorte de hotspot pour la migration ». L'enseignant-chercheur ajoute que la Tunisie n'ayant pas de loi relative à la demande d'asile et au statut de réfugié, le gouvernement a confié à des représentations onusiennes le rôle de se charger de cette question. Or, « certaines de ces organisations ont vu leur budget se réduire avec la guerre en Ukraine et assurent de moins en moins leur rôle ».

« Ici c'est l'Algérie, va-t'en »

Alors que vendredi 3 mai au soir, les camps de fortune de migrants installés devant le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) étaient démantelés par les autorités, « le silence de ces organismes était assez assourdissant », se désole Romdhane Ben Amor du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES). Notamment sur le sort des réfugiés soudanais présents parmi les migrants, et éligibles à une demande d'asile. Selon les chiffres du HCR, ils sont de plus en plus nombreux depuis 2023 à arriver en Tunisie en raison de la guerre civile au Soudan. « Aucune solution durable n'a été trouvée pour les Soudanais, et pour nous, il y a une responsabilité partagée entre l'État mais aussi les représentations onusiennes qui ne réagissent pas », constate Romdhane Ben Amor.

L'OIM a communiqué le 9 mai sur les retours volontaires de migrants en situation irrégulière qu'elle facilite avec les autorités tunisiennes, notamment celui de 161 Gambiens ayant accepté une prise en charge d'aide au retour volontaire. La communication était identique l'année passée après les expulsions de leur logement de migrants subsahariens. En 2023, l'OIM a aidé 2 557 migrants à rentrer volontairement depuis la Tunisie vers leur pays d'origine, une augmentation de 45 % par rapport à 2022.

Devant le siège de l'organisme ce 9 mai, alors que des maçons sont en train de repeindre la façade d'une maison en face de l'OIM, dont le mur tagué a servi pendant des mois de support pour les tentes des migrants, plusieurs Subsahariens attendent un rendez-vous. Rachid, la vingtaine, est originaire de Centrafrique. Il dit avoir été arrêté par les autorités après le démantèlement du campement dans la nuit du 3 au 4 mai : « On nous a mis dans des bus et on nous a jetés 3 heures plus tard sur un terrain. On nous a dit "voilà, ici c'est l'Algérie, va-t'en" ».

Certains ont franchi la frontière tandis que lui et un petit groupe se sont cachés le temps que les autorités partent. Ils ont ensuite repris à pied le chemin de Tunis en suivant les lumières des villages et les rails de train, tout cela « pendant la nuit, car en journée, on essaye de dormir et d'éviter de se faire repérer », raconte-t-il. Son cheminement de trois jours vers la capitale explique en partie les vidéos qui ont circulé sur les réseaux sociaux, des images de migrants éparpillés dans le nord-ouest du pays et passant à travers champs. Un périple que Rachid ne veut pas réitérer. Après un parcours migratoire très difficile, les derniers évènements l'ont convaincu de quitter le pays définitivement :

Moi je suis revenu à Tunis parce que je veux faire un retour volontaire et d'ailleurs, cela fait plusieurs mois que je l'ai demandé. Mais en attendant, je n'ai nulle part où dormir ni aller, et cela fait des mois que ça dure. Je n'ai pas eu de soucis avec la population tunisienne, toutefois j'ai compris que ça ne sert à rien de rester ici. Je n'arrive pas à me stabiliser dans un travail malgré tous les petits boulots que j'ai faits. J'ai même passé un mois en prison. C'est devenu trop difficile.


1« Au moins 25 corps découverts : le sort terrible des migrants abandonnés dans le désert tunisien », France Inter, 8 août 2023.

2NDLR. Les autorités tunisiennes n'ont publié aucun communiqué officiel à la suite de cette visite.

3« Leila Hadded sur la migration : jusqu'à quand va durer cette hémorragie ! », Business News, Tunis, 9 mai 2024.

4NDLR. En février 2023, Éric Zemmour n'a pas manqué de saluer sur Twitter le communiqué de la présidence sur les migrants subsahariens.

15.05.2024 à 06:00

« Ces humanitaires sont morts dans le même silence qui nous enveloppe »

Rami Abou Jamous

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Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter son appartement de la ville de Gaza avec sa femme et son fils Walid, deux ans et demi. Il partage maintenant un appartement de deux chambres avec une autre famille. Il raconte son quotidien et celui des Gazaouis de Rafah, coincés dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Cet espace lui est dédié. Lundi 13 mai. (…)

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Texte intégral (1526 mots)

Rami Abou Jamous écrit son journal pour Orient XXI. Ce fondateur de GazaPress, un bureau qui fournissait aide et traduction aux journalistes occidentaux, a dû quitter son appartement de la ville de Gaza avec sa femme et son fils Walid, deux ans et demi. Il partage maintenant un appartement de deux chambres avec une autre famille. Il raconte son quotidien et celui des Gazaouis de Rafah, coincés dans cette enclave miséreuse et surpeuplée. Cet espace lui est dédié.

Lundi 13 mai.

Aujourd'hui je voudrais rendre hommage à cet employé des Nations unies qui a été tué par l'armée israélienne, et à sa collègue qui a été blessée.

Leur voiture clairement siglée ONU a été visée par des tirs. Ils ont été frappés par les mêmes balles que les Palestiniens, et dans le même silence qui émane du monde entier. Bien sûr, les Nations unies ont publié un communiqué exprimant leur tristesse et condamnant ce qui s'est passé. L'homme qui a été tué appartenait à l'UNDSS, le Département de la sécurité et de la sécurité des Nations-Unies. La voiture se dirigeait vers l'Hôpital européen de Rafah, sur la route Salaheddine.

L'ONU n'a mentionné ni les noms ni la nationalité de ses deux employés. Pareil pour la plupart des médias, qu'ils soient occidentaux ou arabes. Selon mes sources, le mort était indien, ancien colonel de l'armée de son pays et père de deux enfants. Sa collègue est jordanienne. Tout le monde sait qu'ils ont été visés par les Israéliens.

Comme d'habitude, Israël est au-dessus des lois

Plus de 250 travailleurs humanitaires sont morts depuis le début de la guerre. Ils étaient membres des Nations unies, notamment de l'Unrwa, ou d'ONG internationales comme Medical Assistance International (MAP) ou Médecins sans frontières (MSF). La plupart d'entre eux étaient palestiniens, donc ça passe. On donne l'info, et ça s'arrête là. Quand il s'agit de Français ou de Britanniques, comme ce fut le cas avec World Central Kitchen (WCK), le monde s'est ébranlé, cela a un peu changé la direction de la guerre et il y a eu des conséquences au niveau humanitaire. Mais là, on en parle peu. Peut-être à cause de la nationalité des victimes ? Cet homme était ici pour une bonne cause, et il est mort en martyr, comme les autres humanitaires tués à Gaza. Mais comme d'habitude, Israël est au-dessus des lois. Les Israéliens « feront une enquête », concluront que les tirs venaient sans doute des combattants du Hamas et on refermera le dossier.

J'aimerais bien parler de cet homme-là, dont je ne connaissais même pas le nom. Il est venu ici pour aider la population gazaouie. Il savait très bien que c'était risqué. Il travaillait dans un département de sécurité, il savait qu'il allait se trouver dans une zone de guerre. Pourtant il avait fait ce choix. Qui était-il ? Jusqu'ici, je n'ai pas vu grand-chose sur lui.

Cet homme et cette femme étaient là par sens de l'honneur, par humanité. Ils étaient venus tous les deux en risquant leur vie, juste pour aider les Palestiniens. Mais devant Israël, personne n'ose dire qu'ils ont été visés directement. Ils se contentent de dire : il faut faire une enquête. Comme tous les humanitaires, ils avaient donné leurs coordonnées GPS à l'armée israélienne. À chaque fois que celle-ci bombarde des personnes localisées par GPS, elle prétend que c'est une bavure. Personne ne réagit, sauf si Israël touche des ressortissants de l'une des cinq grandes puissances mondiales. Là au moins on a quelques déclarations.

Matador et taureau

Ces deux employés avaient laissé leurs enfants, leurs familles et sont venus pour arrêter la guerre ici, pour soutenir les blessés, les malades, les infrastructures, pour faire ce qu'ils pouvaient. Pour moi, ce qui se passe à Gaza, c'est comme une corrida. Israël est le matador, il est bien habillé, respectable, il plante ses banderilles, et la population de Gaza est le taureau. En Occident, on contemple l'agonie de la bête et certains s'indignent même de la rage du taureau. Et si quelqu'un vient en aide au taureau, le matador le blesse avec ses banderilles, ou le tue avec son épée. Parce que le but, c'est d'anéantir le taureau, et à la fin, le public applaudit. Le matador est toujours le gagnant, il est toujours respecté, parce qu'il était « en train de se défendre ».

Toutes les guerres sont bonnes contre ce pauvre peuple palestinien : la guerre des bombes, la guerre des soldats, la guerre de la famine, la guerre psychologique, la guerre de la cigarette… Et personne ne bouge. Quand les grands pouvoirs bougent, ils le font pour leur intérêt, parce qu'ils ont des élections, ou parce qu'il y a une mobilisation dans leur pays, ou en fonction de l'évolution de leurs intérêts dans la région, ou des intérêts personnels de leurs dirigeants. Mais ils ne bougent pas par humanité, même devant ces massacres, ni devant ce que tout le monde voit : la famine qui est en train d'étrangler maintenant le sud de la bande de Gaza depuis la fermeture des terminaux de Rafah et de Kerem Shalom.

On a appris lundi que des camions d'aide humanitaire étaient entrés au Nord, par le terminal de Zikim, mais ils sont seulement destinés à la ville de Gaza et au nord de l‘enclave. Je crois que le Sud entre Rafah et la route de Netzarim va vivre ce qu'a vécu le Nord auparavant. Mais cette fois, la famine va concerner beaucoup plus de gens. Au nord, on parle d'environ 500 000 à 700 000 personnes, alors qu'au Sud on parle de 1,5 million de personnes, qui sont déjà en train mourir, pilonnées chaque nuit par les bombes. Et maintenant, la faim et la soif, avec ces terminaux toujours fermés.

Étranglement financier

Le pire, c'est que si l'attention se concentre sur Rafah, les bombardements continuent au Nord. L'armée israélienne occupe Jabaliya, le quartier de Zeitoun où se déroulent de nouveaux massacres sans pitié, de nouveaux déplacements de la population.

Le monde est en train de regarder ce qui se passe à Rafah, mais ailleurs, c'est pire. On parle peu de la Cisjordanie. Là-bas, pas de F-16 qui bombardent. Mais c'est juste parce que la Cisjordanie est pleine de colonies, et que les Israéliens ont peur d'utiliser leur aviation quand il y a des colonies. À Gaza, ils ne l'ont fait qu'après le retrait des colons en 2005, notamment en passant le mur du son qui faisait exploser les vitres, même celles des voitures.

L'autre méthode, c'est l'étranglement financier. Les Israéliens refusent de transmettre à l'Autorité palestinienne (AP) l'argent des taxes qu'il prélève en son nom aux frontières. Ce qui fait que celle-ci ne peut plus verser à ses fonctionnaires que la moitié de leur salaire. C'est valable aussi pour les fonctionnaires de l'AP à Gaza, qui continuent à être payés même s'ils ne travaillent plus depuis la prise de pouvoir du Hamas en 2007. Alors que les prix ont été multipliés par dix ou par vingt.

Mahmoud Abbas a accepté de continuer à suivre une voie politique, et non militaire. Et malgré cela, les Israéliens le considèrent comme un ennemi et lui font la guerre. Ils ont violé tous les accords.

Ce mercredi, c'est le 76e anniversaire de la Nakba, la Catastrophe, la création d'Israël qui entérina l'expulsion de la majorité des Palestiniens. À l'époque, les Palestiniens s‘étaient réfugiés à Gaza, en Cisjordanie ou dans les pays voisins. Aujourd'hui, ils fuient d'un endroit à un autre à l'intérieur de la bande de Gaza. C'est toujours le même matador, et toujours le même taureau.

14.05.2024 à 06:00

Nord de la France. Les musulmans entre autocensure et départ à l'étranger

Nadia Daki

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Soupçonnés en permanence d'islamisme radical et craignant d'être accusés d'apologie du terrorisme, une partie des Français musulmans et/ou d'origine maghrébine choisissent de se taire. D'autres, souvent parmi les plus qualifiés, décident de quitter leur pays. Le nord de la France apparait comme un laboratoire de cette ambiance délétère par bien des aspects. Une succession d'affaires, de suspicions, de polémiques ou de lois (adoptées ou en projet) conduisent un certain nombre de Français (…)

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Soupçonnés en permanence d'islamisme radical et craignant d'être accusés d'apologie du terrorisme, une partie des Français musulmans et/ou d'origine maghrébine choisissent de se taire. D'autres, souvent parmi les plus qualifiés, décident de quitter leur pays. Le nord de la France apparait comme un laboratoire de cette ambiance délétère par bien des aspects.

Une succession d'affaires, de suspicions, de polémiques ou de lois (adoptées ou en projet) conduisent un certain nombre de Français musulmans et/ou d'origine maghrébine à se demander s'ils ont bien leur place ici. Pour Mouloud1, quarantenaire né dans le nord de la France et fonctionnaire dans cette région, « nous avons été, en quelque sorte, précurseurs avec des associations musulmanes fortes portées par des musulmans engagés. C'est pourquoi les pouvoirs publics tentent depuis quelques années de les mettre à mal ». Une « attaque systémique et structurelle », assure-t-il en égrenant la liste des institutions mises en cause : « Le lycée Averroès, la radio Pastel FM, la mosquée de Villeneuve-d'Ascq. Le préfet et la région ont redoublé leurs efforts pour les empêcher d'exister. »

Ainsi, les dirigeants de la mosquée de Villeneuve-d'Ascq ont été poursuivis pour abus de confiance, avant d'être finalement relaxés mi-mars. « Le tribunal a estimé qu'il ne ressortait aucun élément de radicalisation », a déclaré le président du tribunal2.

De son côté, depuis 2017, la radio Pastel FM à Roubaix s'est vue amputer des subventions de la Région qui l'accuse de prosélytisme religieux. Pourtant, dans son arrêt rendu le 14 mars dernier, la Cour d'appel de Douai a tranché en faveur de la radio, faute d'éléments probants. Le conseil régional, présidé par Xavier Bertrand (Les Républicains) a, depuis, annoncé sa volonté de se pourvoir en cassation.

Dernier exemple local cité : le lycée Averroès. Orient XXI a exposé, en février, les conditions de l'annulation de son contrat le liant à l'État. Et Mouloud de s'interroger :

Si ce n'est pas une attaque organisée en règle contre les musulmans, de quoi s'agit-il alors ? Il y a un climat délétère pour nous, Français musulmans issus de l'immigration, et ce, depuis de nombreuses années. Cela en devient étouffant.

Il décrit l'autocensure à laquelle il s'astreint sur la guerre en Palestine. Faisant allusion à Jean-Paul Delescaut, secrétaire départemental de la CGT Nord, condamné le 18 avril à une peine d'un an d'emprisonnement avec sursis par le tribunal correctionnel de Lille pour apologie du terrorisme3, il précise :

Ce serait suicidaire de s'exprimer publiquement sur la situation en Palestine. Quand on voit ce qu'ils sont capables de faire à un Blanc non musulman qui a osé faire un rappel historique de l'occupation illégale, imaginez ce qu'ils pourraient faire à un bronzé comme moi.

En tant que fonctionnaire, il s'interdit toute discussion sur le conflit. « Si je le fais, je dois donner une version "officielle" qui plaît, donc je m'autocensure pour ne pas me retrouver dans un charter ». Il en est convaincu : « Pour nous (arabo-musulmans), il n'y a aucune nuance possible. Si l'on s'émeut de la situation en Palestine, on nous taxe de soutenir le Hamas. Et les conséquences de mise à mort sociale, juridique et professionnelle sont immédiates ».

Racisme décomplexé et islamophobie

Alors Mouloud s'investit ailleurs. « Je participe à des manifestations et au boycott des produits venant d'Israël. J'informe mes enfants et c'est ça le plus important pour moi. Peu importe si je dois baisser la tête au boulot ». Néanmoins, pour lui, l'autocensure ne se limite pas à la question palestinienne. Il pointe un climat général qui tendrait à réduire au silence tout ce qui aurait trait à la culture arabo-musulmane. Il raconte :

De manière isolée, tout va bien. Je m'entends très bien avec mes voisins et avec tous ceux que je peux croiser dans mon quotidien. Mais sur le plan politique, la libération de la parole islamophobe est prégnante, que ce soit chez les politiques ou dans les médias. En réalité, on n'en est plus au stade de la parole, dans les actes aussi ça se ressent.

Il faut dire que dans le Nord, l'affaire du lycée Averroès a beaucoup marqué les esprits, en raison de son caractère injuste et disproportionné. Surtout lorsque la comparaison est faite avec le lycée catholique Stanislas à Paris, dont les manquements à la laïcité ont été démontrés. Cela indigne Madjid, 42 ans, conseiller en insertion professionnelle qui, comme Mouloud, tient à garder l'anonymat : « Ils ont voulu faire un exemple et mettre au pas les bougnoules. Averroès c'était un modèle qui marchait bien et ça posait problème. Pour moi, il y a un racisme totalement décomplexé dans ce genre d'attaques ».

Pour Mohamed, 63 ans, conseiller à l'emploi à Lille, cette affaire est la goutte de trop :

Je suis de culture musulmane mais je ne suis pas la meilleure âme sur le plan religieux. Quand je vois ce genre d'attaques injustes se répéter, ça me révolte. C'est ce genre d'injustice qui me pousse à prendre fait et cause pour les jeunes filles voilées, alors qu'il y a quelques années, j'avais une position radicalement différente sur la question.

La circulaire Castaner en 20194 provoque chez lui « une prise de conscience ». « Sous couvert des signes ostentatoires de religion, tout le monde a en fait compris qu'il s'agissait d'une chasse aux musulmans », tranche-t-il. Alors à « sa grande surprise », il se voit soutenir financièrement le lycée Averroès5.

Né en France, il a l'impression de suffoquer de plus en plus. « Même si je ne mets pas tous les Français dans le même sac, il y a une sorte de haro sur les Arabes et/ou les musulmans surtout dans certains médias ». Lui aussi dit éviter d'évoquer la situation palestinienne dans son milieu professionnel. Pourtant, « considérer que l'histoire ne démarre pas le 7 octobre ne veut pas dire que nous sommes avec le Hamas. Il y a, en réalité, de très grandes lacunes dans l'enseignement de l'histoire sur cette réalité du monde ». Il craint, entre autres, les clichés et la déformation de ses propos. « Si je dis réellement ce que je pense, je suis sûr de choquer certains collègues qui vont vite faire l'amalgame : "c'est un arabe, forcément il est avec les terroristes puisqu'eux-aussi, ce sont des arabes" ». Il préfère donc se taire. « Je suis dégoûté de cette situation. Jamais je n'aurais pensé être obligé de travestir ma pensée en France. Je vois déjà certains dire : "retourne dans ton bled". Mais mon bled, c'est ici ».

À 30 ans, Tarik, chercheur en sciences politiques a déjà vécu dans d'autres pays. Il ne s'est jamais senti « aussi pleinement français qu'en dehors de la France ». Cependant, il en est convaincu : « Je sais pertinemment que je ne serai jamais membre de la communauté nationale en France. J'ai grandi dans une culture à la fois arabe et très occidentale dans sa manière de vivre. Pourtant, je serai toujours un indigène, un étranger aux yeux de certains ». En cause selon lui, « une construction de l'État profondément raciste, attestée notamment par la succession de lois sur le séparatisme. J'ai beau chercher, je ne trouve pas d'éléments qui pourraient me faire penser le contraire ». Il évoque, lui aussi, un sentiment d'étouffement qu'il fait remonter aux années 2014-2015. « Depuis, il y a une accumulation. L'approche autoritaire installe un climat de suspicion généralisée à l'égard des Arabes, des personnes qui ont un patronyme et un pedigree marqués. » Pour ce jeune papa, son avenir est à Lille. « Je suis né ici, j'ai grandi ici. Mes parents ne m'ont jamais parlé arabe. Ma langue maternelle est le français. Ma vie est ici avec ses malheurs et ses bonheurs. »

La tentation de l'ailleurs

Mouloud, lui, a plus de mal à se projeter en France. « Le pays va de plus en plus mal économiquement. Quand on aura atteint un point de non-retour, on sera montrés du doigt et on sera les boucs émissaires. Il n'y a aucun voyant au vert pour nous », craint-il. Alors il envisage fortement de s'installer ailleurs. Un ailleurs de moins en moins hypothétique, mais un ailleurs contraint. « Je trouve ça dingue : nos parents ont émigré et nous l'envisageons aussi. Certes, les raisons ne sont pas les mêmes. Finalement, nous autres nés en France ne sommes-nous pas voués à être juste une parenthèse historique ? », se demande-t-il. Avec sa femme, ils font des tableaux pour évaluer leurs besoins et préparer au mieux leur départ, sans doute au Maroc. Il analyse :

Les raisons sont multifactorielles, toutefois la plus importante est l'islamophobie. On a été élevés à la méritocratie, on a travaillé et redoublé d'efforts et on a obtenu des postes importants. La désillusion est d'autant plus forte.

Il ne veut surtout pas « arnaquer ses enfants. Je ne vais pas leur servir les mêmes salades que nos parents nous ont servis ».

« La France se prive d'une partie de ses élites »

Julien Talpin, Olivier Esteves et Alice Picard ont publié fin avril, un livre au titre évocateur, La France, tu l'aimes mais tu la quittes (Éditions Seuil, Paris, 320 pages, 23 euros). Nous avons rencontré Julien Talpin, chargé de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) à l'université de Lille, qui nous a d'abord expliqué comment lui et ses collègues ont mené leur enquête, de 2020 à 2022.

Nous avons recueilli, compilé et analysé les réponses de mille personnes et de deux cent cinquante entretiens auprès de ceux partis récemment ainsi que d'autres ayant quitté la France il y a près d'une vingtaine d'années. Parmi les raisons évoquées, la volonté de mettre à distance les discriminations vécues en tant que musulman arrive en tête (70 % des cas). La deuxième (63 %) est de pouvoir vivre sa religion sereinement. Vient ensuite l'épanouissement professionnel.

Talpin estime que les éléments déclencheurs du départ sont l'élection présidentielle de 2022, « le rôle de certains médias comme Cnews ou la présence surmédiatisée d'Eric Zemmour ». Cela contribue à créer « une atmosphère diffuse », davantage évoquée que « les expériences directes de discrimination ».

Contrairement aux idées reçues,

les pays de destination ne sont pas majoritairement musulmans. On retrouve en premier les pays du Nord comme l'Angleterre, puis le Québec et Montréal, et enfin les Émirats arabes unis. Le départ n'est pas vécu comme une hijra [départ vers la terre d'islam]. D'ailleurs, les personnes sondées ne se définissent pas comme extrêmement religieuses.

Ceux qui partent sont le plus souvent des Français binationaux de deuxième ou troisième génération, et plus de 53 % de ceux qui ont répondu à l'enquête sont diplômés du supérieur (bac +5). Leur trajectoire est différente de celle de leurs parents, notamment du fait d'une ascension scolaire. « Ils partent souvent lorsqu'ils accèdent au marché du travail, car les progressions de carrière sont plus compliquées pour eux que pour leurs camarades de promo non musulmans ou blancs. Autrement dit, c'est d'une partie de ses élites dont la France se prive. » Beaucoup ont déjà fait des expériences à l'étranger au cours de leurs études, des stages, des années de césure, etc. Pour partir, il faut en avoir « les moyens financiers et relationnels. Il faut un emploi, un logement. Cela constitue un risque. Et puis, il y a un coût émotionnel avec une mise à distance de sa famille et de ses amis ».

La plupart des personnes qui quittent la France ont fréquenté des universités publiques. « Au fond, note Talpin, le système éducatif et social français leur a permis de s'élever socialement, mais cette focalisation constante sur l'islam et les musulmans fait qu'elles ne peuvent pas s'épanouir autant qu'elles le voudraient ». Deux choses se télescopent : la situation personnelle et la situation globale.

Les personnes enquêtées nous disent : « Il y a la situation de ma famille, de mes enfants, et c'est pour ça que je m'en vais. Non seulement on est discriminés, mais toutes les formes d'organisation de l'islam qui avaient permis des avancées, sont remises en cause ». La dissolution du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) a été parfois évoquée avec au fond cette idée : on ne peut même plus s'organiser pour lutter contre les discriminations.


1Le prénom a été changé.

2Magalie Ghu, « Relaxe générale pour les responsables du Centre islamique de Villeneuve-d'Ascq », La Voix du Nord, 15 mars 2023.

3Il lui est reproché d'avoir publié, le 10 octobre 2023, sur le site internet de la CGT59 un message avec ce passage : « Les horreurs de l'occupation illégale se sont accumulées. Depuis samedi (7 octobre 2023), elles reçoivent les réponses qu'elles ont provoquées ».

4Une circulaire du 27 novembre 2019, envoyée à l'ensemble du corps préfectoral, demandant de faire du « combat » contre « l'islamisme », non défini et contre le « communautarisme », le « nouvel axe » fort de l'action de l'État.

5Pour tenter d'assurer sa réouverture à la rentrée prochaine, le lycée a ouvert une cagnotte en ligne juste avant ramadan, espérant récolter un million d'euros. Elle comptabilise à ce jour 474 125 euros.

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