121 liens privés
LePartisan.info
« L’incertitude de nos pouvoirs supérieurs nous ouvre aussi bien le chemin du cannibalisme que celui de la Critique de la raison pure »,
Robert Musil
Les GAFAMs, et singulièrement Facebook (en 97 langues) dont il est le plus question ici, trompent les gens sous l' apparence d'un service public universel. Ils en ont acquis les attributs, mais nulle part le statut, pas même aux USA. Ces multinationales n'ont en effet de comptes à rendre qu'à leurs actionnaires, en bonne intelligence avec la NSA. La plupart des victimes consentantes de la loi de Metcalfe (ou effet de réseau) qui s'évertuent à remonter le défilé perpétuel des notifications le savent, mais n'en ont cure.
Les problèmes fondamentaux que posent les GAFAMs ont trait avant tout à l'appropriation et la vente consenties de nos données personnelles. Ils ne se réduisent pas aux arguties mises en avant sur "la censure" réelle et plus ou moins arbitraire qu'ils exercent sur les messages échangés et les contenus mis en ligne, ni même à la fraude fiscale scandaleuse qu'ils pratiquent à grande échelle. La solution ne se résûme pas non plus -le cas d'Amazon et ses salariés précaires mis à part- à leur passer une ceinture de contention juridique qu'il suffirait de boucler en cliquant sur le bouton "accepter" ou "refuser" pour se protéger de leur voracité.
A l'hiver 2018-2019 on a pu observer nettement les effets pervers, directs ou indirects, de FB dans le mouvement des Gilets Jaunes en France. FB y tint le double rôle d'indicateur de police et de grand «organisateur» : pugilat virtuel permanent, main-mise des "admins", exclusions, éclatement en listes concurrentes, diffusion de fakes à vitesse intersidérale, manipulations diverses. Tout ceci contrebalançant largement l'effet "mobilisation": le mouvement s'est pour ainsi dire auto-intoxiqué, malgré les avertissements et diverses tentatives de démocratie directe minoritaires (Assemblée des Assemblées) qui résultaient d'une exigence tout-à-fait légitime, mais étaient loin d'être représentatives.
Aux origines gît un énorme mensonge, qui prospère sur l' incompréhension profonde et l' indifférence à l'égard de l'idéologie libertarienne qui est leur source d'inspiration. Pour mieux en prendre la mesure, lire par exemple Eric Sadin ou d'autres essais de la même veine. L'idéologie libertarienne, celle-là même qui baigne le mouvement trumpiste (mâtiné de racisme) depuis sa naissance y est omniprésente et archi-dominante.
Aux marges des réseaux (privés) et du web (public), des rêveurs, des fascistes avec ou sans barbe, des antifa aussi, utilisent divers scénarii de contournement technique de la censure privée ou d'Etat (VPN, Tor ...). Zéro impact sur le grand public. Le darknet est un bac à sable. Et pendant que ces tribus échangent ou complotent entre elles, le populo gavé de Netflix peut s'endormir sur ses deux oreilles. Parfait.
Le boycott de ces réseaux privés marchands tentaculaires nous semble être la seule option individuelle possible, et rien ne dit que ce sera efficace. La tendance est lourde et multiforme, les enjeux particulièrement mal évalués, voire niés par des demi-malins sous prétexte de "paranoïa conspirationniste". A de rares exceptions près (Aaron Swartz, Snowden, Assange...) la marginalisation des voix critiques éliminées ou noyées dans la masse est assurée. Et pour les dominants, c'est bien la seule chose qui compte.
Il faut réguler répètent en coeur les mieux-disants de tous bords. Ok, mais quand 6000 tweets et des centaines de milliers de post FB sont émis dans le monde chaque seconde, l'urgence technique commande. Et dans l'urgence, le processus de prise de décision s'embarrasse le moins possible de questions philosophiques, politiques, ou juridiques complexes, qui devraient demeurer publiques et ouvertes. Il ne s'agit plus désormais que de maintenir le système en état de marche en lui évitant de s'effondrer sur lui-même. Pas le temps de rêvasser : La gestion des foules impose de gérer les flux à la vitesse de la lumière, tache dont seule l'Intelligence Artificielle peut s'acquiter à moindre coût .
La gestion des foules sentimentales requiert la mise en oeuvre de moyens techniquement incompatibles avec le temps humain. Le mieux est donc de confier à l' I.A la gestion du chaos général afin de permettre au système de continuer à croître et propérer sans exploser. Associée au deep learning l'I.A est imbattable. Génial !
Pourquoi les proprios s'empressent-ils d'investir massivement dans l'I.A ? Parce qu'ils n'entrevoient aucune autre solution ... De leur point de vue, ils ont entièrement raison. C'est çà, ou il faudrait tout débrancher au bout de 3 jours. Idée inconcevable dans la tête d'un big boss libertarien mégalo. Autant suggérer à Jeff Bezos de se reconvertir dans le macramé artisanal au Wyoming, ou à Elon Musk d'aller cultiver des poireaux dans la Drôme. Accélérer encore, virtualiser et automatiser la vie à outrance en entraînant avec eux l'humanité dans la course à l'abîme, c'est leur dope.
RIP Aaron Swarz.
LP. 13.01.21
Facebook-sans-boussole-morale par Tristan NITOT
Facebook m'a banni par P.O.L - Blog Mediapart
Critique de facebook Wikipedia