Lutte Hébergement - 21 déc. 2020

En IsĂšre au coeur de l'hiver, les associations de soutien aux personnes vivant en centre dâhĂ©bergement constatent des conditions de vie imposĂ©es aux personnes hĂ©bergĂ©es dĂ©plorables, au niveau de lâaccompagnement, de lâalimentation, des conditions dâhygiĂšne, de lâaccĂšs aux services publics.
Le plan hivernal de la prĂ©fecture de lâIsĂšre annoncĂ© dĂ©but novembre dĂ©clarait lâouverture de 700 places pour lâhiver 2020-2021, dont « 681 places sont dâores et dĂ©jĂ trouvĂ©es via la mobilisation dâhĂŽtels, de mobiles homes et autres bĂątis existants » [1]. Un mois plus tard, les associations de soutien aux personnes vivant en centre dâhĂ©bergement constatent :
Une grande partie (env 30%) des places sont laissĂ©es vides alors que de nombreuses personnes dorment toujours Ă la rue, y compris des familles avec enfants. La prĂ©fecture de lâIsĂšre a dâailleurs Ă©tĂ© condamnĂ©e par le tribunal administratif le 16 novembre 2020 pour avoir expulsĂ© une famille avec 7 enfants Ă la rue et refuser de les hĂ©berger
Les conditions de vie imposĂ©es aux personnes hĂ©bergĂ©es restent dĂ©plorables, tant au niveau de lâaccompagnement, de lâalimentation, des conditions dâhygiĂšne, de lâaccĂšs aux services publics.
Les chÚques services non distribués aux familles
Le ministĂšre chargĂ© de la Ville et du Logement avait mis en place un dispositif exceptionnel de distribution de chĂšques services. Ces chĂšques dâun montant de 7⏠avaient pour objectif de permettre « lâaccĂšs aux besoins de premiĂšre nĂ©cessitĂ© pour celles et ceux qui sont Ă la rue ou en centres dâhĂ©bergement et qui nâont plus rien. Cette action de lâĂtat sera complĂ©mentaire aux actions solidaires dĂ©jĂ menĂ©es par les collectivitĂ©s territoriales et les associations. »[2]. Aujourdâhui nous constatons que les chĂšques ne sont plus distribuĂ©s aux familles sur dĂ©cision de la DDCS arguant une mauvaise utilisation des chĂšques par les personnes, depuis lors laissĂ©es sans aucune ressource. Pire encore, lâassociation Ajhiralp nâa jamais distribuĂ© les chĂšques depuis le dĂ©but du dispositif, prĂ©tendant mieux connaĂźtre leurs besoins. DĂšs lors comment expliquer les manquements ci-dessous ?
Un manque crucial de nourriture
Alors que les familles ne disposent plus dâaucune ressource pour accĂ©der Ă lâalimentation, la distribution alimentaire est largement insuffisante au niveau quantitatif et qualitatif :
Barquettes en quantitĂ© insuffisante (10 barquettes distribuĂ©es pour 60 personnes pour 2 jours Ă lâhĂŽtel Gallia)
Du lait maternel distribué irréguliÚrement dans les centres et en faible quantité.
Pas de fruits et de légumes frais, donc aucun accÚs à des vitamines pour de nombreux enfants et personnes vulnérables ce qui a conduit à plusieurs hospitalisations
Un choix réduit ne prenant pas en compte les habitudes alimentaires, les régimes particuliers, les convictions religieuses
Des conditions sanitaires indignes
Encore une fois, alors que les familles sont sans ressources suite Ă la disparition des chĂšques, il manque aujourdâhui dans les centres des produits dâhygiĂšne de base, des couches pour bĂ©bĂ©s (non distribuĂ©es par les restos bĂ©bĂ©s du cĆur aprĂšs les 1 an de lâenfant), lâaccĂšs Ă une machine Ă laver. Dans certains centres, le papier WC nâest plus distribuĂ©, ou le choix est laissĂ© aux familles entre du savon et des protections menstruelles !
Un accÚs aux droits perpétuellement entravé
Lâisolement gĂ©ographique de plusieurs centres (Voreppe, Pont de Claix), et le dĂ©mĂ©nagement forcĂ© et rĂ©gulier de nombreuses familles rendent trĂšs difficile lâaccĂšs Ă lâĂ©cole et aux guichets de services publics. A Voreppe, les familles mettent 1h30 (dont 30â Ă pied sur le bord dâune nationale) pour se rendre Ă lâĂ©cole et au moindre rendez-vous mĂ©dical ou administratif. PrivĂ©es de ressource pour payer les transports publics ou dâabonnement prĂ©fĂ©rentiel, les personnes accumulent chaque jour plus dâamendes.
Par ailleurs, les associations hĂ©bergeuses qui jusquâĂ prĂ©sent Ă©taient censĂ©es assurer exclusivement le suivi social, se sont dĂ©chargĂ©es officiellement de cette mission le mois dernier. Pour autant le suivi nâest pas effectuĂ© par les SLS et le SILEF du dĂ©partement qui sont en manque de moyens priorisent les familles dĂ©jĂ accompagnĂ©es avant leur hĂ©bergement. Quid de lâaccompagnement social pour toutes les autres familles, ballottĂ©es dâune administration Ă lâautre ?
Dans cette situation critique, les Ă©quipes de travailleurs sociaux nâont absolument pas les moyens de faire leur travail en respectant lâĂ©thique de leur mĂ©tier.
« Veiller aux plus fragiles dâentre nous est aussi un devoir citoyen. »[3] nous assĂšne la prĂ©fecture le 4/11/2020, mais quâen est-il du devoir de lâĂ©tat pour proposer enfin un accueil digne ?
Signataires : Collectif Lutte HĂ©bergement Grenoble â AG du travail social en lutte de Grenoble â RUSF38 â Village 2 SantĂ© â Coordination IsĂ©roise de Soutien aux Ă©trangers et Migrant.e.s - DAL 38 - RESF