Guillaume Gontard Sénateur de l' Isère
Permanences: 3, rue Gabriel Péri – 38000 Grenoble – Tél. 04 38 86 28 74Son activité au Sénat
Publié le 05.03.2025 à 15:43
Retrouvez mon intervention au nom du groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires lors du débat demandé par le Gouvernement sur l’avenir de l’Ukraine et de la sécurité de l’Europe :
Monsieur le Président,
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mes chers collègues,
Il est des moments de l’Histoire qui sidèrent le monde, des moments où chacun se souvient où il était et ce qu’il faisait.
Le vendredi 28 février 2025 était indubitablement l’un de ces moments où l’Histoire s’écrit au présent.
Le 28 février, chacun a pu constater l’effondrement, en germe depuis des années, de l’ordre international issu de la guerre froide, du multilatéralisme, du droit international.
Le 28 février, chacun a pu mesurer le glissement de la plus vieille démocratie du monde vers l’autoritarisme et le fascisme. Certains refusaient de le voir, ils sont tombés de leurs chaises. D’autres, dont nous faisons partis, l’annonçaient, ils ont tout de même reçu la violence de cette scène comme un coup poing à l’estomac.
Le 28 février, chacun a pu pleurer les valeurs de démocratie et de liberté abandonnées par l’un des pays qui les avaient érigées en principe d’existence.
Permettez-moi de remarquer que les fascistes au pouvoir appliquent des politiques fascistes.
La leçon vaut pour notre pays : lorsque l’on banalise les partis et idées fascistes, lorsqu’on brocarde le droit et qu’on piétine la fraternité, on prépare l’effondrement d’une autre démocratie historique.
Les Etats-Unis d’Amérique seront-ils encore une démocratie en 2028 ? Quelle que soit la réponse, cela change désormais peu de choses pour l’Europe. Au mieux, Washington n’est plus notre allié, au pire elle nous sera hostile. Le vertige saisit en prononçant ces mots. Mais si l’humiliation du héros Volodymyr Zelensky orchestrée par les médiocres ventriloques de Poutine peut servir d’électrochoc à l’Union européenne, alors nous n’aurons pas tout perdu.
L’extraordinaire dignité du président ukrainien, comme son extraordinaire courage depuis le premier jour de l’agression russe doivent être notre boussole collective.
Notre boussole pour bâtir enfin, au pied du mur comme à la désolante habitude, l’Europe puissance à même d’assurer sa sécurité collective. Une Europe de la Défense, pour la défense de ses valeurs, pour la défense de ses intérêts.
Ne nous y trompons pas. Ce qui est attaqué par la Russie et désormais par les Etats-Unis c’est le principe même de l’Union européenne : une coopération d’Etats reposant sur le droit, la démocratie et la liberté. Ce qui est attaqué c’est le potentiel politique et économique de notre Union. Pour résister à la vague des impérialismes américains, chinois et russes, nous n’avons pas d’autre alternative que d’opérer un indispensable saut fédéral. Unie l’Europe est en mesure de peser dans ce nouveau désordre mondial pour tenter de préserver ce qui peut encore l’être du droit international. Désunie elle est condamnée à l’impuissance voire à la dislocation si les ambitions russes ne rencontrent pas de digue.
A tous nos compatriotes, dont nous entendons l’inquiétude face à cet engrenage militaire qui semble implacable, nous écologistes, famille politique portant le pacifisme au cœur de son histoire et son projet, affirmons que malheureusement aucune paix ne sera atteignable dans un monde régi par les rapports de force entre les empires et qu’il nous faut consentir à ce rapport de force pour préserver notre sécurité, nos valeurs et nos idéaux. Nous avons construit l’Europe pour éviter la guerre, mais il nous faut désormais préparer l’Europe face au risque de guerre.
La position française de renforcer l’autonomie stratégique du continent et la position historique des écologistes de bâtir une Europe de la Défense trouvent aujourd’hui un nouvel écho. Nous appelons néanmoins l’exécutif français à se garder de tout triomphalisme et à remiser notre penchant national pour la vanité. Cette même vanité qui a conduit à croire qu’on pouvait raisonner Poutine et Trump. La période commande la modestie.
Nous souscrivons à la nécessité de renforcer nos arsenaux, à l’exclusion des dépenses militaires des critères des Maastricht, comme à la volonté d’un emprunt commun. Mais nous insistons sur la nécessité d’intégrer d’avantage nos dépenses militaires notamment nos achats pour réaliser des économies d’échelle. En ce sens, la première mouture présentée par la Commission prévoyant plus de 80 % d’efforts réalisés par les Etats ne nous satisfait pas. Nous devons évaluer nos besoins pour y répondre plutôt que de raisonner avec le seul et imparfait ratio budget de dépense/PIB.
Alors que l’effort national pour la Défense atteint déjà 15 % du budget général et est amené à s’amplifier, nous demandons que « l’économie de guerre » brandie par le président, se matérialise par un patriotisme fiscal bien plus important des plus fortunés. Il ne sera pas supportable d’accroitre nos dépenses militaires à budget constant. Sacrifier nos services publics sur l’autel de notre Défense conduirait la France au même destin électoral que les Etats-Unis.
Développer notre arsenal militaire pour le laisser entre les mains de dirigeants fascistes est un écueil que nous devons impérativement éviter. Ce qui vaut pour la France vaut naturellement pour toute l’Union européenne, qui doit préserver et amplifier ses politiques sociales.
Nous entendons l’appel à élargir le parapluie nucléaire français au reste du continent, jugeons que ce débat est une composante importante de notre future architecture de Défense commune et partageons les propos du président de la République, comme de ces prédécesseurs, affirmant que les intérêts vitaux de la France sont nécessairement des intérêts européens.
Nous alertons cependant sur la nécessité de conserver le cadre du Traité de non-prolifération et ne pas nous livrer à une course aux ogives aussi dispendieuse que dangereuse. Nous affirmons enfin que de futures négociations de paix avec Russie devront réenclencher le processus de désescalade des arsenaux nucléaires.
Mais l’autonomie stratégique européenne n’est pas qu’une question militaire.
Elle nécessite de diminuer drastiquement notre dépendance aux énergies fossiles et au engrais azotés russes. En premier lieu le GNL, sur lequel le Sénat recommande un embargo – et l’uranium enrichi par la Russie. Au passage, Monsieur le Premier ministre, est-ce bien le moment de courir à l’incident diplomatique avec l’Algérie alors que nous cherchons à nous passer du gaz russe qui faut couler le sang ukrainien et du gaz azéri qui fait couler le sang arménien ?
L’économie de guerre est donc indissociable d’une écologie de paix. Il est impératif de préserver le Pacte vert et de sortir également les investissements écologiques des critères de Maastricht.
Il nous faut aussi poursuivre l’effort pour mettre à bas les vecteurs de désinformation, de propagande fasciste et d’influence russe au premier rang desquels le réseau social X.
Le défi de l’autonomie européenne est colossal mais nous avons les moyens de nos ambitions.
Pour l’heure, notre urgence c’est la défense de l’Ukraine.
A son peuple combattant, à son peuple sous les bombes, à son peuple en exil nous réitérons l’expression de notre plein et entier soutien et de notre pleine et entière admiration à défendre leur liberté et la nôtre.
Nous appelons au renforcement de notre soutien militaire et financier pour compenser le désengagement américain et à sa poursuite aussi longtemps qu’il le faudra.
Ne soyons pas leurrés par le triomphalisme de Poutine. La position russe n’est pas confortable et nous devons poursuivre son affaiblissement international comme national. C’est une condition sine qua none de la construction d’une paix durable.
En tout état de cause, nous exigeons qu’aucun accord de cessez-le-feu et a fortiori de paix ne soit conclu sans l’accord des représentants du peuple ukrainien et sans la participation de l’Union européenne.
Tout accord de cessez-le feu devra inclure la libération de tous les prisonniers de guerre et civils ukrainiens détenus dans les prisons russes et exiger le retour des enfants Ukrainiens déportés.
Nous réitérons notre exigence de traduire Vladimir Poutine devant la justice internationale et de respecter toutes les décisions de la Cour pénale internationale, notamment celle visant le Premier ministre israélien d’extrême droite. Aucun double standard n’est plus toléré. Or si l’Europe s’érige pour résister aux impérialismes c’est pour faire prévaloir le droit, la paix et pour être pour être un point de repère et un appui pour l’ensemble du monde libre.
La tâche est considérable. Les actes doivent suivre les mots dès le sommet européen de jeudi que nous espérons à la hauteur du moment historique.
Je vous remercie
Publié le 19.02.2025 à 15:48
Le début de l’année 2025 a été le théâtre de nombreuses remises en cause de l’agriculture biologique : réintroduction des néonicotinoïdes, remise en cause de l’indépendance de l’Anses, assouplissement de la pulvérisation de pesticides par drone, recul de la loi EGAlim, vote du Sénat en faveur de la suppression de l’Agence BIO, etc
L’avenir de l’agriculture est au cœur des préoccupations politiques. Le Salon de l’Agriculture s’ouvre dans un climat de fortes tensions, de colère sourde du monde agricole, d’élections pour la représentation au sein des chambres d’agriculture et alors que la loi d’orientation agricole est sur le point d’être adoptée au Parlement.
A l’heure où les agriculteurs et agricultrices sont en proie à des difficultés financières croissantes et alors que la part du bio dans les achats alimentaires des Français·es recule depuis la fin de la pandémie, l’avenir de l’agriculture biologique interroge.
Dans ces conditions, ce mode de production peut-il devenir le modèle agricole de demain ? Pour répondre avec mon collègue sénateur Daniel Salmon, sénateur d’Ille-et-Vilaine, avec la participation de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique (FNAB), nous avons organisé ce colloque “Agriculture biologique, le modèle agricole de demain ?”, que vous pouvez revivre en intégralité ci-dessous.
Programme :

J’ai introduit le colloque en reprécisant les éléments de contexte politique, notamment le contenu de la loi d’orientation agricole sur le renouvellement des générations et la souveraineté alimentaire, tout juste votée au Sénat qui n’empêchera aucunement la disparition de la moitié des fermes d’ici 10 ans et aggrave notre dépendance aux pesticides et au engrais de synthèse.
J’ai précisé que l’agriculture bio allait devoir désormais progresser avec un fort vent de face, d’où le caractère indispensable de ce colloque pour se réunir, se serrer les coudes, réfléchir et avancer ensemble.
Philippe Camburet, président de la FNAB que je remercie vivement pour sa participation a complété cette introduction dessinant quelques perspectives plus réjouissantes pour la Bio après trois années difficiles :
Table-ronde n°1 : Quels leviers pour faire de l’agriculture biologique le modèle de production de demain ?
- Christian Huygue, président groupe de travail bio contrôle de l’INRAE
- Aurélie Catallo ,directrice agriculture France de l’IDDRI
- Olivier Chaloche, céréalier bio dans le Loiret, membre du bureau de la FNAB
- Sophie Tabary, éleveuse, présidente de Bio en Hauts de France
Animation : Daniel Salmon, sénateur d’Ille-et-Vilaine
Pour cette table ronde nous avons voulu nous projeter sur la problématique de la productivité et apporter des réponses à la principale critique formulée contre la Bio : l’insuffisance supposée de ses rendements et sa capacité à nourrir l’humanité. Nous connaissons les zones de force de la bio : maraichage, polycutlure-élevage, viticulture, petites exploitations bien implantées dans leur territoire et vendant en circuit-court, etc. Nous n’en parlerons pas ou peu ce matin.
L’objectif de la table ronde étant notamment de s’attarder sur l’enjeu productivité de l’agriculture biologique et l’enjeu de la conversion des grandes cultures qui était l’objectif de l’actuelle PAC.
Nous y avons évoqué l’avenir des produits phytosanitaires dans l’’agriculture en général et la nécessité économique de nous en passer.
Nous y avons envisagé les enjeux de bouclage de cycles, de fertilisation en bio des grandes cultures, de transition de territoires extrêmement spécialisés.
Nous avons enfin touché un mot des leviers, notamment le soutien public et la politique agricole commune.
Pour conclure la matinée nous avons écouté une carte blanche intitulée « La Bio pour la vie » de notre collègue député, mais également et surtout paysan et agronome, Benoît Biteau !
Table ronde n°2 : Les territoires au cœur de la transition agroécologique
- Michel Demolder, président de la Collectivité Eau du Bassin Rennais, pour l’initiative « Terres de Sources »
- Mathilde Roussel, vice-présidente en charge du Projet Alimentaire de Territoire, de l’Agriculture péri-urbaine et des circuits-courts alimentaires pour la Communauté d’agglomération de la Rochelle
- Gilles Pérole, maire adjoint de la ville de Mouans-Sartoux
- Jean-Luc Hallé, vice-président de Douaisis Agglo
Animation : Delphine Ducoeurjoly, chargée de mission Territoires à la FNAB
L’après-midi, nous avons tenu une 2e table-ronde consacrée à l’action des territoires pour favoriser la transition écologique.
Des perspectives réjouissantes, loin de la morosité sénatoriale et nationale, pour évoquer la protection de notre eau, de nos zones de captage grâce à la conversion des pratiques agricoles ou l’implantation de producteurs en bio.
Nous y avons évoqué également les efforts pour faire évoluer la restauration collective vers le maximum d’utilisation de produits biologique, voire vers le 100 %
Nous avons envisagé les bénéfices du bio, « les externalités positives » en bon jargon et la nécessité de les rémunérer pour les massifier grâce notamment au Paiement pour service environnementaux.
Le panel d’élu.es à cette table ronde est transpartisan de gauche à droite ne comptait pas pas de représentants des « Ecologistes ». C’est parfaitement volontaire, si nous sommes historiquement d’ardents défenseur de la bio, nous souhaitions illustrer que le soutien à l’agriculture biologique dépasse largement nos rangs.
Nos collectivités ne sont naturellement par en reste…
- La métropole de Lyon, qui a quadruplé le budget consacré à l’agriculture en 3 ans pour accompagner 80 projets d’installation en agriculture bio et durable, pour atteindre l’an prochain le 100 % bio dont 50 % local frais et de saison dans les 66 cantines de ses collèges.
- Strasbourg qui a lancé 33 PSE pour accompagner des agriculteurs bio.
- Tours qui exonère de taxe foncière les agriculteurs bio.
- Grenoble qui vise aussi le 100 % bio dans les cantines et expérimente la sécurité sociale de l’alimentation.
Table-ronde n°3 : Comment démocratiser l’accès aux produits biologiques ?
- Pascale Hebel, Directrice associée chez C-Ways,
- Jean Verdier, président de l’Agence Bio
- Christelle le Hir, présidente du Directoire de La Vie claire
- Christophe Barnouin, PDG d’Ecotone
Animation : Vincent Rozé, ex-président du Réseau “Mangez Bio”
Avec cette dernière table ronde, nous avons essayé de comprendre la dynamique de marché derrière la consommation de produits bio et tracer des pistes de solutions pour que la Bio ne soit plus un acte d’achat occasionnel mais bien un réflexe du quotidien.
Nous y avons évoqué les habitudes et la perception des consommateurs, et avons fait état des données de la consommation de produits bio à date et envisagé les perspectives de sa distribution en grande en moyenne surface via des marques industrielles dont nous avons interrogé la capacité à devenir grand public.
Une fois encore, l’idée était de se projeter au-delà des circuits courts et de la vente directe pour envisager la bio comme le modèle alimentaire global de demain.
Enfin, en conclusion, Juliette Duquesne, journaliste indépendante, autrice, conférencière qui a écrit de nombreux ouvrages notamment sur l’agriculture et sur l’eau a bien voulu officier comme grande témoin de ce colloque, a proposé une synthèse d’une riche journée d’échanges et ouvrir quelques perspectives bienvenues.
Publié le 19.02.2025 à 14:57
A la suite de l’adoption du budget 2025 par 49.3, de très nombreux auto-entrepreneurs ont contacté les parlementaires pour sonner l’alerte. Ce budget prévoit en effet que le seuil d’assujettissement à la TVA soit abaissé à 25.000€, ce qui pose de très nombreuses difficultés pour les auto-entrepreneurs, à la fois en termes de pertes de revenus, de mise en danger de leur entreprise et de bureaucratie supplémentaire.
Cette disposition était jusqu’ici passée sous les radars et la presse ne l’avait pas mentionnée, mais le groupe écologiste du Sénat, que j’ai l’honneur de présider, y a été particulièrement attentif durant les débats sur le Projet de Loi de Finances et a voté contre cette disposition.
Tout d’abord, je tiens à rappeler que le statut d’auto-entrepreneur pose de vrais problèmes, notamment car la protection sociale qui y est attachée est extrêmement faible. Le risque de dumping social est donc réel et il nous faudrait réformer ce statut.
Cela étant dit, il est clair que l’abaissement du seuil d’imposition à la TVA ne va pas dans le bon sens. Non-concertée, cette mesure va s’abattre d’un seul coup sur nombre de personnes qui ont déjà des revenus relativement faibles, leur imposer de revoir leurs tarifs en catastrophe et engendrer une charge bureaucratique très importante, pour seulement quelques milliers d’euros supplémentaires par auto-entreprise perçus par l’Etat.
Pour trouver des recettes supplémentaires pour financer nos services publics et réduire le déficit, il nous faut en priorité s’attaquer aux grosses entreprises et aux ménages les plus riches, dont les bénéfices et la fortune se sont considérablement accrus ces dernières années. Tel est le sens de nombreux amendements proposés par le Nouveau Front Populaire adoptés en Commission des finances à l’Assemblée nationale, qui allaient vers plus de justice fiscale, en faisant porter l’effort sur les gros revenus et les gros patrimoines. Malheureusement ces évolutions ont été rejetées en séance plénière à l’Assemblée nationale, grâce à une alliance de vote entre le bloc central (Renaissance, Horizons, Modem et LR) et le Rassemblement national. Ce dernier proposait même d’abaisser encore davantage le seuil de TVA sur les auto-entreprises, à 18.750 euros.
Ainsi, le groupe écologiste du Sénat a voté contre cette disposition lors de l’examen de la partie recettes du Projet de Loi de Finances (PLF) 2025 à l’automne dernier. Durant la séance en question, où peu de sénateurs étaient présents, l’abaissement du seuil de TVA avait été rejeté et quelques mesures de justice fiscale, notamment le rétablissement de l’exit tax, avaient été adoptées. Mécontent, le gouvernement de Michel Barnier a ensuite fait revoter le Sénat sur 27 dispositions, dont celles-ci, pour revenir à sa copie initiale et la droite sénatoriale, majoritaire, l’a suivi. Nous avions alors dénoncé ce mépris du travail parlementaire et cette injustice fiscale.
Pris de court par la contestation des auto-entrepreneurs ces derniers jours, le gouvernement a depuis annoncé un gel de cette évolution et une “concertation” pour trouver des solutions. Si je salue cette pause nécessaire, elle témoigne de l’amateurisme du gouvernement sur ce budget et de son dogmatisme fiscal, refusant toujours de faire payer ceux qui gagnent et possèdent le plus. Nous resterons attentifs quant aux évolutions de ce seuil et continuerons de réclamer plus de justice fiscale.
Crédit photo en une : Kelly Sikkema
Publié le 19.02.2025 à 13:23
Après de nombreux mois d’attente suite aux péripéties de l’examen du budget, et alors que notre agriculture traverse une grave crise, le Sénat a enfin examiné la loi d’orientation agricole, désormais dénommée “Loi pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations”. Celle-ci fait notamment suite aux manifestations des agriculteurs début 2024, où les questions de rémunération des paysans et d’exposition au libre-échange étaient centrales dans le mal-être exprimé.
Pourtant, ce projet de loi ignore superbement toutes ces questions de fond. Jamais nous n’avons pu parler sérieusement du revenu des agriculteurs et de leur protection face aux produits importés beaucoup moins cher, cultivés dans des conditions souvent catastrophiques sur le plan social et environnemental. A la place, le gouvernement et ses alliés de la droite sénatoriale ont préféré reprendre les obsessions exportatrices de la FNSEA et ont choisi de faire de cette loi une occasion pour déréguler dans tous les sens, espérant ainsi que la production décollera et que tous les problèmes des agriculteurs seront résolus.
Cette loi se résume donc à aller toujours plus dans le même modèle qui ruine les agriculteurs, conduit à leur disparition progressive dans nos campagnes, empoisonne leur santé, mais aussi celle de toute la population, et bien sûr cause des dommages environnementaux considérables. Pour donner un peu de cohérence aux différentes mesures de cette loi, qui viennent directement des lobbys de l’agro-industrie, le gouvernement et le rapporteur LR au Sénat, M. Laurent Duplomb, ont axé celle-ci autour de l’objectif de “souveraineté agricole”.
En affichant cet objectif noble et consensuel, le but est cependant d’empêcher toute réflexion et proposition de modèle alternatif. Avec mes collègues du groupe écologiste du Sénat, notamment Daniel Salmon, sénateur d’Ille-et-Vilaine et chef de file sur les questions agricoles, nous avons malgré tout porté de nombreux amendements et propositions pour faire en sorte que ce texte serve vraiment nos agriculteurs, en les aidant à changer de modèle et en facilitant leur installation. Nous aurions aimé pouvoir aborder plus directement les questions de revenus et de libre-échange, mais le texte ne s’y prêtait malheureusement pas et nos amendements auraient été irrecevables.
Sur le fond, voici les amendements que j’ai défendu. Vous pouvez en retrouver la liste complète, ainsi que le sort qui leur a été réservé lors des votes – très largement défavorable – sur le site du Sénat.
L’article 1er, qui élève la souveraineté alimentaire au rang « d’intérêt fondamental de la Nation » et introduit un principe – impossible à appliquer strictement – de non-régression de la production agricole française, a suscité des débats intenses. J’ai notamment dénoncé le flou juridique autour de ces objectifs et la suppression de toute référence à la transition agroécologique, notamment par la suppression de l’objectif de 21% d’ici 2030 de la part des surfaces agricoles en bio.
J’ai également critiqué la conception de la souveraineté alimentaire par le gouvernement et la droite sénatoriale, qui voient celle-ci uniquement par le prisme de la compétitivité et de la balance commerciale. En visant avant tout l’exportation, la France n’est donc pas réellement auto-suffisante. Pour les écologistes, le sujet n’est pas la compétitivité, mais l’adéquation entre notre production et nos besoins, et ce n’est pas aux marchés mondiaux d’imposer leurs règles.
Or, cette conception passe à côté de l’essentiel : si la France est, sur le papier, autosuffisante dans la plupart des productions agricoles, elle exporte énormément de produits bruts et importe ensuite énormément de produits transformés. Le tableau suivant, produit par France Agri Mer en 2023, démontre l’ampleur du phénomène.
Cette aberration est dûe à la fois au libre-échange, mais aussi au manque d’usines capables de transformer les produits agricoles.
Par ailleurs, notre agriculture a beau produire beaucoup, elle le fait en utilisant des engrais et produits phytosanitaires très majoritairement importés. La guerre en Ukraine, qui a fait exploser le prix des engrais, nous l’a récemment rappelé. Afin d’être véritablement souverains, j’ai donc plaidé pour engager de vrais plans de réduction de notre dépendance aux engrais azotés et aux produits phytosanitaires.
A la place de cette conception faussée de la souveraineté alimentaire, j’ai rappelé celle de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), pour qui la souveraineté alimentaire d’un pays ne se construit pas contre le reste du monde. Elle doit également prendre en compte les droits humains pour les paysans, le droit à l’alimentation de toute la population et les droits environnementaux. Autant d’aspects ignorés dans ce projet de loi.
Il a aussi été question de la planification de la production agricole future, à 20 ans. Si celle-ci est évidemment nécessaire, le gouvernement et la droite sénatoriale n’ont en réalité aucune vision sur le sujet, puisque cette planification se résume d’après eux à de la prospective de marché. A l’inverse, nous pensons que l’Etat doit intervenir pour encadrer le marché et organiser l’agriculture de demain.
La façon dont les enjeux d’installation des agriculteurs ont été abordés est également scandaleuse. En se contentant de créer un “bachelor agricole” principalement tourné vers le management, le gouvernement et la droite sénatoriale considèrent que l’agriculteur est uniquement un chef d’entreprise. Alors que nos agriculteurs vieillissent et que nombre de jeunes actifs souhaitent cultiver des terres, rien n’est fait pour lutter contre la concentration et la financiarisation des terres. En promouvant des exploitations toujours plus grandes, cette loi va accentuer les problèmes de dépopulation de nos campagnes et de mécanisation à outrance de l’agriculture, au détriment d’autres modèles. A l’inverse de cette logique, j’ai plaidé pour un plafonnement du nombre d’hectares lors des transmissions de terres agricoles, afin d’aller vers de plus petites exploitations.
Ce projet de loi a aussi été marqué par l’influence des discours techno-solutionnistes, qui voient dans la technologie la solution à tous les maux de l’agriculture, alors même que celle-ci endette lourdement nos agriculteurs et pose de nouveaux problèmes. J’ai ainsi dénoncé cette vision bornée, qui voit notamment dans le progrès technique la solution au changement climatique. Si la technologie peut bien sûr aider l’agriculture, son usage doit être réfléchi et maîtrisé et le changement climatique implique avant tout une adaptation des cultures et de l’élevage. Nous avons donc proposé une autre rédaction, axée autour de la sobriété et de l’agro-écologie.
Nous avons aussi discuté de la question de l’eau, fondamentale alors que cette ressource cruciale se raréfie du fait du changement climatique. A l’inverse des techno-solutionnistes qui espèrent un salut par le progrès technique, j’ai rappelé qu’il nous adapter nos cultures au nouveau régime hydrique. Il ne s’agit pas veut pas d’interdire toutes les retenues collinaires et l’irrigation, mais d’encourager l’indispensable adaptation, pour être prêts pour les prochaines sécheresses.
Là encore, le gouvernement est resté inflexible. Il a notamment voulu transférer la compétence eau aux départements, sans doute afin de faciliter la construction de méga-bassines. Au contraire, j’ai plaidé pour qu’elle reste gérée au niveau du bloc communal, à savoir à l’échelle intercommunale lorsque c’est possible, sinon à l’échelle communale. Tel est finalement ce qui a été retenu, venant clore un sujet d’inquiétude des communes depuis près de 10 ans.
Toujours en matière de fuite en avant, le gouvernement et la droite sénatoriale ont voulu supprimer toute “sur-transposition” de normes européennes, ce qui revient à autoriser toutes sortes de molécules et de produits chimiques extrêmement dangereux pour notre santé, celle des agriculteurs, nos sols et notre eau. J’ai rappelé que la “sur-transposition” n’est pas un problème, elle permet au contraire à la France de montrer la voie pour faire interdire des molécules dangereuses dans le reste de l’Europe, comme cela a souvent été le cas. Alors que les débats regorgent de formules sur “l’excellence agricole française”, il aurait été opportun de continuer à montrer l’exemple.
J’ai également dénoncé le scandaleux “avis de sagesse” de la ministre sur un amendement visant à réintroduire des produits phytosanitaires pourtant interdits par l’ANSES. Non seulement, le fait de refuser d’écouter le travail indépendant des scientifiques est absolument délirant, mais la ministre a également reconnu à demi-mot que ce qui était proposé était hors la loi…
Pire, le gouvernement et la droite sénatoriale ont réécrit l’article 13 de la loi pour dépénaliser des atteintes à l’environnement “non intentionnelles”. Une régression très grave, car elle permettra à des pollueurs de se dédouaner des conséquences de leurs actes. J’ai ainsi pris l’exemple de chasseurs qui tueraient “involontairement” des animaux ou d’industriels qui rejetteraient “involontairement” des eaux usées dans l’environnement, comme c’est le cas de l’usine Lactalis de “l’étoile du Vercors”, et qui bénéficieraient alors d’une relaxe.
Concernant toujours les atteintes à l’environnement, les apiculteurs sont en première ligne. Alors que la pollinisation est indispensable à la production agricole, et plus généralement à l’équilibre de la biodiversité, 30% des abeilles meurent chaque année. Cette hécatombe, qui place notre apiculture dans une grande crise, est directement liée à l’usage massif de pesticides. Alors que le Sénat souhaite réintroduire des néonicotinoïdes, j’ai rappelé ces faits et appelé à mieux protéger notre apiculture.
Enfin, j’ai également porté des amendements sur plusieurs aspects qui me semblaient oubliés dans ce texte. Alors que ce projet de loi prétend vouloir aider les agriculteurs à s’installer, la question du handicap n’a pas du tout été abordée. Le jour même du vingtième anniversaire de la loi de 2005, j’ai appelé à adapter les métiers agricoles au handicap, en offrant des moyens pour acquérir des machines adaptées et aménager les temps de travail, y compris en permettant d’embaucher des salariés agricoles. J’ai appuyé cette demande sur le témoignage d’un agriculteur drômois, qui a les deux membres inférieurs sectionnés.
J’ai également déposé un amendement pour encourager l’habitat réversible – également appelé habitat léger – sur les terrains agricoles, qui a malheureusement été jugé irrecevable. Je le regrette car cette solution est intéressante à double titre. En effet, elle permet à la fois de répondre aux difficultés de logement des agriculteurs, qui sont un frein important à l’installation, tout en évitant l’artificialisation des terres, ce qui est compatible avec le cadre du ZAN et la nécessité de préserver nos terres agricoles.
J’ai également porté plusieurs amendements pour aider nos éleveurs, car l’élevage pastoral traverse une crise importante. Il faut un véritable plan d’aide pour la filière.
Plus spécifiquement, j’ai de nouveau rappelé la nécessité d’avancer sur un statut juridique des chiens de protection, alors que de nombreux éleveurs rencontrent des problèmes judiciaires et des difficultés d’assurance en raison de ces chiens de protection, indispensables pour organiser la cohabitation avec le loup. J’ai donc proposé d’instaurer une présomption d’absence de vigilance des éleveurs et des maires, pour mieux les protéger en cas d’accident dus à des chiens de protection. C’est mon seul amendement qui a été adopté.
Toujours pour mieux aider nos éleveurs, j’ai également demandé la création d’une cinquième école de vétérinaires en France. Cette profession est en effet indispensable à l’élevage, mais plus de la moitié sont désormais formés à l’étranger, l’offre éducative en la matière étant insuffisante dans notre pays.
Enfin, j’ai également déposé un amendement pour demander un plan pour notre filière laine, alors que les éleveurs français se détournent de plus en plus de cette production peu rentable, pour favoriser la production de viande et de lait. Cela est regrettable, car la laine pourrait apporter un complément de revenus à nos éleveurs et permettre de réduire nos importations de textile depuis l’Asie, en fournissant un matériau naturel, maîtrisé depuis des siècles, plutôt que des tissus élaborés grâce à la pétrochimie, particulièrement polluante.
Malheureusement, l’écrasante majorité de nos propositions ont été rejetées par le gouvernement et la droite sénatoriale. Le texte a été entièrement réécrit par la chambre haute, pour aller vers un modèle encore plus productiviste que ce que prévoyait le texte initial. Comme l’ensemble du groupe écologiste, ainsi que les groupes socialiste et communiste, j’ai bien évidemment voté contre. Sous la pression du gouvernement, qui souhaitait une adoption avant le Salon de l’agriculture, la Commission Mixte Paritaire a été organisée dans la foulée, et celle-ci a été conclusive. Malgré cette défaite, soyez certain de ma mobilisation totale pour répondre aux vrais problèmes de l’agriculture française.
Crédit photo en une : Chris Ensminger
Publié le 13.02.2025 à 14:39
Depuis 2017, le transfert de la compétence « eau et assainissement » des communes vers les intercommunalités inquiète fortement les maires. A l’époque, nouvellement élu sénateur de l’Isère, j’avais alerté le gouvernement sur les nombreuses implications de cette décision, en l’invitant à changer de méthode pour parvenir à une loi plus adaptée aux réalités des territoires, tenant notamment compte des communes isolées. Mais l’exécutif, alors dirigé par Edouard Philippe, avait préféré passer en force ce transfert lourd de conséquences, sans prendre le temps de la concertation, en fixant une échéance à 2026.
Depuis le Sénat, chambre des territoires, a plusieurs fois fait remonter ce sujet en alertant sur le fait que de nombreuses communes ne parviendraient pas à tenir ce délai. Finalement, une proposition de loi mettant fin à cette obligation, tout en rendant impossible le retour en arrière pour les communes ayant déjà effectué ce transfert, a été adoptée par le Sénat à l’automne 2024. J’ai évidemment voté pour, même si je considère que le transfert vers un EPCI présente aussi des avantages.
Plutôt que d’attendre la navette parlementaire et l’examen de ce texte à l’Assemblée nationale, cette disposition a finalement été ajoutée à la loi d’orientation agricole débattue en ce début février 2025 à la chambre haute. Etant donné qu’elle devrait être conservée en commission mixte paritaire (instance regroupant 7 sénateurs et 7 députés cherchant des compromis entre les versions adoptées par les deux chambres), sa promulgation ne devrait plus être qu’une question de mois, juste à temps avant 2026 donc.
Ce stop and go réglementaire est regrettable au vu des enjeux considérables. La question de l’eau, de son usage, de sa qualité et de sa disponibilité, est aujourd’hui centrale : au-delà des besoins pour la consommation humaine (pour boire, se laver, cuisiner…), elle est indispensable à notre industrie, à notre agriculture et à la production électrique, par le biais de l’hydroélectricité. Alors que la demande augmente et que la ressource tend à baisser du fait du changement climatique, les tensions entre les différents usages ne vont faire que croître.
Pour répondre à ces défis, la mutualisation avec les communes alentour présente certains avantages : dans un contexte de raréfaction de l’eau et au vu des montants très importants pour étendre, réparer et améliorer nos réseaux d’eau et d’assainissement, la mise en commun de moyens financiers et d’ingénierie est souvent bienvenue. Par ailleurs, cette mutualisation permet aussi de réfléchir à une harmonisation des tarifs entre communes, et d’envisager une tarification progressive, plus juste et plus écologique, qui rend les premiers mètres cubes d’eau gratuits ou presque et renchérit les consommations excessives pour des usages non-indispensables.
Néanmoins, la carte administrative des intercommunalités n’est pas toujours celle des bassins versants et des infrastructures d’eau potable et d’eaux usées. Dans certains cas, ce transfert de compétence a donc plus de sens vers d’autres échelles que l’intercommunalité. Il était donc primordial de laisser une certaine souplesse aux communes pour coopérer ensemble sur cette compétence cruciale.
L’assouplissement de la loi est donc positif, mais il démontre surtout l’échec d’une méthode, celle du passage en force sans écouter ou consulter qui que ce soit. En ne comprenant pas la spécificité des territoires et en ne prenant pas le temps de la concertation, le gouvernement nous a fait perdre beaucoup de temps, de nombreuses communes ayant préféré reporter des investissements pourtant essentiels au vu de l’incertitude et de la complexité du dossier.
Je reste persuadé que plus de souplesse dans le dispositif aurait permis à chaque territoire, avec sa spécificité d’inventer des partenariats innovants. Des collectivités ont déjà engagés des études et engagé des frais important pour réfléchir à cette prise de compétence. Je les invites à poursuivre leur réflexion et à analyser la meilleur solution en tenant compte des investissements nécessaires sur le temps long au regard de l’impérieuse nécessité à préserver une ressource commune et vitale.
Crédits photo en une : Ivan Bandura
Publié le 10.02.2025 à 11:44
Ces derniers mois, les difficultés des stations de ski ont fait l’objet d’une attention de plus en plus importante de la part de la presse et des institutions. En raison du changement climatique, nombre de petites stations n’ont en effet plus assez de neige pour assurer leurs saisons touristiques (même avec des canons) et les coûts d’exploitation grimpent en flèche. L’équation financière devient de plus en plus insoluble pour nombre d’entre elles.
L’Isère est évidemment particulièrement concernée :
-en février 2024, la Cour des Comptes a rendu un rapport majeur sur l’avenir des stations, où elle fait état des nombreuses difficultés auxquelles elles vont devoir faire face.
-à l’automne, la station de l’Alpe du Grand Serre a failli fermer. Elle sera finalement ouverte cet hiver pour une dernière saison.
–le maire de Gresse en Vercors a annoncé son intention de démissionner en raison de fortes tensions au sein du conseil municipal concernant l’avenir de la station. Un référendum sur l’installation de canons à neige avait eu lieu il y a quelques années (le « oui » l’avait emporté), mais la baisse de l’enneigement et le coût de ces canons remet ces questions sur la table.
-la station de Chamrousse vient quant à elle d’être ciblée par la Cour régionale des comptes d’Auvergne-Rhône-Alpes, qui l’encourage à diversifier ces activités au plus vite. La maire de la commune a annoncé la tenue d’un référendum sur « l’avenir organisationnel et partenarial » de la station d’ici la fin de l’année.
-Enfin, le SCOT (schéma de cohérence et d’orientation territorial) de la communauté de communes de l’Oisans est toujours âprement débattu, après le rejet de deux versions précédentes par les commissaires enquêteurs. Si une nouvelle version plus équilibrée vient d’être présentée, son avenir est encore incertain.
Autant d’éléments qui illustrent l’urgence de la situation. Impliqué de longue date sur ce sujet, je n’ai cessé de me mobiliser pour encourager la transition de nos stations. Outre des interpellations du gouvernement sur des projets dépassés, comme celui du téléphérique sur le glacier de la Girose, et sur les conditions de vie des saisonniers, j’ai aussi organisé cet été une table ronde pour débattre de ces enjeux avec des spécialistes de la montagne. J’avais également suivi de près le travail du député Joël Giraud, auteur d’un rapport (toujours non paru) sur l’avenir de la montagne française.
Plus récemment, j’ai pris part à un colloque sur les Jeux Olympiques d’hiver 2030 dans les Alpes françaises, pour débattre des enjeux qu’ils posent. Surtout, je me suis mobilisé à l’occasion du budget 2025 pour donner des moyens aux communes concernées :
–D’abord en reprenant par un amendement une demande forte de l’ANEM (association nationale des élus de montagne), à savoir la préservation du FNADT, outil essentiel de financement de l’aménagement de la montagne. Grâce à notre mobilisation, les crédits ont été préservés. Ce sont 15 millions d’euros qui pourront venir financer des projets indispensables de transition.
-Par ailleurs, avec mon collègue Thomas Dossus, nous avons déposé un amendement pour établir un fonds de péréquation entre les stations, financé par une part de la taxe sur les remontées mécaniques. L’idée est simple : que les grosses stations financent une partie de la transition de celles qui sont en difficulté. C’est d’ailleurs une des recommandations phares de la Cour des Comptes. Celui-ci a malheureusement été rejeté.
Soyez certains que je poursuivrai ma mobilisation sur ces sujets de haute importance pour l’avenir de nos montagnes.
Crédit photo en une : Joan Oger
Publié le 05.02.2025 à 12:36
Les débats budgétaires de fin d’année au Parlement ont toujours été un moment fort de la vie politique : c’est l’occasion pour chaque famille politique et chaque parlementaire de faire remonter des préoccupations territoriales et sectorielles, d’esquisser une autre vision de la fiscalité, du fonctionnement de l’Etat et de son périmètre. D’ordinaire sous la Vème République, ces vastes débats se tiennent néanmoins dans un cadre contraint : le gouvernement disposant d’une majorité absolue, il peut faire passer sans grande difficulté sa version du budget, amendée à la marge par les propositions d’autres groupes.
Depuis les élections législatives de 2022, où Emmanuel Macron et Renaissance ont perdu la majorité absolue, cet exercice était devenu plus difficile et la Première ministre de l’époque, Elisabeth Borne, avait dû recourir massivement à l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer les budgets 2023 et 2024. Cette année, après les révélations d’un emballement du déficit public dissimulé par Bruno Le Maire et Gabriel Attal et suite à l’absence de majorité depuis la dissolution de l’été 2024, l’examen du budget était encore plus compliqué.
Alors que le Nouveau Front Populaire était arrivé en tête lors des élections législatives, le Président de la République a fait le choix de nommer Michel Barnier comme Premier ministre. Celui-ci a repris la copie budgétaire préparée par le gouvernement démissionnaire et a voulu engager un grand plan d’austérité, de 40 milliards d’euros. Il souhaitait également trouver 20 milliards de recettes supplémentaires, parfois en faisant des choix de justice fiscale – comme à travers une contribution exceptionnelle sur les 0,3% des ménages les plus riches, mais aussi à travers des choix régressifs.
Nous avons dénoncé cette orientation pour deux raisons : tout d’abord car il existe de vraies possibilités pour réduire le déficit sans faire payer les plus défavorisés, en mettant à contribution les grandes entreprises et les ménages les plus aisés. D’autre part, car une réduction drastique de dépenses aura un effet récessif désastreux sur l’économie, obligeant ensuite à de nouvelles cures d’austérité.
Les ménages aisés et les multinationales ont été choyés de cadeaux fiscaux depuis 7 ans par Emmanuel Macron, au point que le CAC40 a pu reverser 100 milliards à ses actionnaires en 2024. Il était donc nécessaire de les mettre à contribution. C’est justement ce qu’a fait la commission des finances de l’Assemblée nationale, où le Nouveau Front Populaire a réussi à dégager 50 milliards de recettes supplémentaires, à travers dix mesures fortes adoptées en commission :
-le rétablissement de l’ISF avec un volet climatique
-la hausse de la taxation du transport aérien
-le recentrage du crédit impôt recherche
-le rétablissement de l’exit tax
-une taxation des gros héritages
-une taxation des superprofits et des superdividendes
-la suppression de la flat tax pour revenir à une taxation plus progressive du capital
-le renforcement de la taxe sur les transactions financières, pour inclure notamment le trading haute-fréquence (vente et revente d’action en une journée, voire quelques secondes, purement spéculatif)
-la suppression des exonérations de cotisations employeur au-dessus de 2 SMIC
-et enfin le rétablissement CVAE et hausse des versements mobilité, afin de redonner des moyens aux collectivités
Malheureusement, cette partie recettes a ensuite été rejetée en séance, grâce à une alliance entre le bloc central (Renaissance, Modem, Horizons et Les Républicains) et le Rassemblement national. Privé de ces recettes supplémentaires, le budget de l’Etat a dû être amputé dans tous les domaines, excepté la défense, l’intérieur et la justice. Nous ne pouvions l’accepter et nous avons donc déposé une motion de censure commune au NFP, qui a été adoptée. Le gouvernement de Michel Barnier est donc tombé, dès le recours au 49.3 sur le budget de la Sécurité Sociale (PLFSS).
La censure n’a jamais été une fin en soi, mais elle s’est avérée la seule solution pour exprimer notre rejet profond des orientations budgétaires et de la surenchère de mesures de droite extrême, notamment de la part du ministre Bruno Retailleau. Contrairement à ce qu’ont prétendu les membres du bloc central, la censure n’a jamais causé de risque d’arrêt de l’Etat et de la Sécurité sociale, comme le fait un shutdown du gouvernement fédéral américain. Une loi spéciale a très vite été adoptée avant Noël pour continuer à lever l’impôt et les budgets 2024 ont été reconduits, en attendant l’adoption d’un nouveau budget. A court terme, il s’agissait de la meilleure option, étant donné que cela évitait des coupes drastiques dans de nombreux postes de dépenses profondément utiles pour le pays.
Après la censure, Emmanuel Macron a décidé de consulter les différentes forces politiques et les présidents de groupes parlementaires pour tenter de trouver une porte de sortie. Avec la présidente du groupe écologiste et social à l’Assemblée nationale, Cyrielle Chatelain, et la secrétaire fédérale des Écologistes, Marine Tondelier, nous avons joué le jeu de ces rendez-vous, puis de ceux avec François Bayrou, devenu Premier ministre, et Eric Lombard, nommé ministre de l’economie et des finances. A chaque fois, nous avons rappelé que nous sommes favorables à un compromis sur le budget, mais à condition que les plus riches soient mis à contribution et que des postes essentiels de dépenses (éducation, santé, écologie, cohésion des territoires…) ne soient pas sacrifiés.
Le gouvernement Bayrou n’a pas tenu compte de ces demandes. Il a décidé de reprendre l’examen du texte au Sénat là où il s’était arrêté. Après une partie recettes revenue à la copie initiale de Michel Barnier, notre groupe, ainsi que les autres groupes de gauche du Sénat et quelques alliés centristes ponctuels, avaient réussi à faire passer quelques mesures positives de justice fiscale, notamment le rétablissement de l’exit tax, la hausse de la taxe sur les dividendes, l’amélioration de l’IFI (impôt sur la fortune immobilière), une taxe sur les GAFAM et la hausse de la taxation sur les transactions financières. Bien qu’insuffisantes, ces mesures avaient une majorité et indiquaient un changement de cap. Pourtant, le gouvernement s’est entêté et a fait revoter le Sénat pour supprimer ces amendements de bon sens.
Le gouvernement Bayrou a ensuite voulu concéder quelques mesures aux socialistes afin d’éviter une censure. Mais la partie recettes étant restée inchangée, chaque “concession” obtenue sur un budget devait se traduire par des coupes supplémentaires ailleurs. S’est alors engagé un vaste jeu de surenchère austéritaire dans toutes sortes de dépenses : 6 milliards rabotés via des amendements de dernière minute ! Tout y est passé :
-1,3 milliards pour l’écologie, alors que les besoins sont considérables et que le stop and go en matière de transition ne fonctionne pas. Les aides à la rénovation, à l’achat de voitures électriques, l’agence bio… ont été laminées.
-630 millions pour l’enseignement supérieur et la recherche, alors que la précarité étudiante est déjà au plus haut
-781 millions supplémentaires de coupes dans l’aide publique au développement, précédemment déjà amputée de centaines de millions. Cet outil central de notre diplomatie, que j’ai fermement défendu lors des débats budgétaires, a été désossé.
-535 millions supprimés pour France 2030, c’est-à-dire les programmes de recherche d’avenir.
-180 millions en moins pour le sport, alors que “l’héritage” des jeux olympiques de 2024 est sur toutes les lèvres.
-80 millions en moins pour l’audiovisuel public, déjà mal en point.
-Et même 50 millions en moins pour la sécurité civile, alors que les catastrophes climatiques se multiplient sur tout le territoire, du cyclone Chido à Mayotte aux inondations en Ille-et-Vilaine.
Tous ces budgets sont des investissements pour l’avenir. Voir notre pays les défaire les uns après les autres indique donc un sacrifice du futur, que nous refusons.
Suite à cette nouvelle copie du Sénat, 7 députés et 7 sénateurs (notre groupe au Sénat n’était pas représenté, mais le groupe écologiste de l’Assemblée était représenté par la députée Eva Sas) se sont réunis pour trouver un accord dans une commission mixte paritaire (CMP). Cette négociation à huis clos a accouché de quelques modifications mais le budget reste dans son ensemble, toujours marqué par la même logique austéritaire. Pour finir le parcours parlementaire du texte, François Bayrou est passé en force en recourant à l’article 49.3 de la Constitution. Au passage, le gouvernement s’est permis d’ultimes modifications sur le texte issu de la CMP. La démocratie parlementaire aura donc été piétinée et méprisée à toutes les étapes.
Dans ces conditions, nous avons évidemment voté contre le budget lors du vote solennel au Sénat le 23 janvier 2025. Le groupe écologiste de l’Assemblée nationale votera à nouveau la censure, ainsi que les groupes communistes et insoumis, afin d’exprimer notre rejet le plus ferme de cette méthode associant mensonges et passages en force, et surtout du fond du budget, qui va encore aggraver la crise économique et affaiblir nos services publics.
Le groupe socialiste et le Rassemblement National ayant décidé de ne pas voter la censure, ce budget va s’appliquer. Nous regrettons profondément ce choix des socialistes, qui fracture le Nouveau Front Populaire et aboutit à soutenir un budget très négatif pour la France. Quant au Rassemblement National, il prouve à nouveau qu’il soutient en réalité le même agenda économique et budgétaire inégalitaire que le bloc central. Nous avons évidemment entendu les inquiétudes des collectivités, des associations, de divers agences et de nombreux Français sur l’impact d’une nouvelle censure. Soyez certains que notre décision a été mûrement réfléchie : la censure n’est pas une obsession ou une fin en soi, elle n’est que la dernière possibilité qui nous reste face à un gouvernement toujours resté sourd à nos demandes et à celles des Français, qui réclament majoritairement de la justice fiscale et des moyens pour nos services publics.
Crédit image en une : association Amorce
Publié le 04.02.2025 à 01:05
Ce mardi 4 février, le Sénat s’est prononcé en faveur de la proposition de loi intitulée “Sortir la France du piège du narcotrafic”. Même si le texte est incomplet, et que nous avons proposé de supprimer certains articles, le groupe écologiste a voté favorablement, pour enfin diriger la lutte contre le narcotrafic vers les criminels du haut du spectre.
Cette PPL est la résultante d’une commission d’enquête demandée par trois sénateurs écologistes et de gauche des Bouches-du-Rhône : Guy Benarroche, Marie-Arlette Carlotti et Jérémy Bacchi. Le constat de la commission d’enquête est celui de l’échec de la politique du chiffre, des opérations “Place nette” et autres opérations XXL que le gouvernement et la droite affectionnent tant… toujours plus de saisies et d’interventions sur la voie publique, une incarcération massive des petites mains du narcotrafic, mais aucun impact réel sur le démantèlement des réseaux. Nous devons sortir de cette doctrine.
Ainsi, notre groupe s’associe à la volonté nouvelle de s’attaquer enfin au haut du spectre, au blanchiment, aux entreprises du narcotrafic. Nous saluons l’adoption des articles pour créer un parquet national pour la criminalité organisée, lutter contre la corruption ou sécuriser le statut des repentis.
Mais comme nous l’avons répété en commission et en hémicycle, par la voix de notre chef de file Guy Benarroche, sénateur des Bouches-du-Rhône, ce texte manque d’un grand volet social et sanitaire. Nous regrettons donc que rien n’apparaisse dans le texte sur le volet prévention, rien sur les parcours de soins, sur la prise en charge des addictions, sur l’intérêt de légaliser ou dépénaliser certains usages. Rien sur la politique de la ville, rien sur la lutte contre la précarité, sur le logement, sur l’insertion par l’école et le travail. Enfin, rien sur l’accompagnement et le traitement social des personnes enrôlées dans le narcotrafic comme de celui des familles endeuillées.
Nous le regrettons et demandons au gouvernement d’être à l’initiative de propositions sociales et sanitaires courant 2025, comme semblait le laisser entendre le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, lors du vote en séance.
Enfin, nous restons très vigilants aux ajouts de Bruno Retailleau, en particulier l’article 24, qui permet notamment de faciliter les expulsions locatives, sans aucune mesure de protection pour les enfants et personnes fragiles. Au-delà de l’atteinte portée aux libertés individuelles, notamment au droit au logement, ces mesures seront surtout inutiles pour éloigner des quartiers les réseaux criminels qui savent se réorganiser et trouver des nouvelles petites mains. Elles risquent au contraire de fragiliser des personnes vulnérables aux réseaux. Nous pensons aussi aux mesures d’activation à distance des appareils électroniques, ajoutées durant la séance. Nous espérons que la navette parlementaire viendra à bout de ces articles dangereux.
Crédit photo en une : Gras Grün