pour la lutte sociale
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Publié le 04.05.2024 à 13:33
Poutine entraîne la gauche vers l’extrême droite, par John Reimann
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Publié le 04.05.2024 à 10:34
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Publié le 03.05.2024 à 21:00
Soudan : guerre civile, multinationales et 9 millions de personnes déplacées, par Miguel Lamas
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Publié le 03.05.2024 à 20:00
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Publié le 03.05.2024 à 15:22
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Publié le 03.05.2024 à 14:57
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Publié le 04.05.2024 à 13:33
Poutine entraîne la gauche vers l’extrême droite, par John Reimann
Présentation
Nous publions cette analyse de John Reimann, animateur du blog Oakland Socialist, qui dépeint les conséquences de l’influence poutinienne au sein de la gauche US. Il est important d’exposer les effets pratiques des orientations campistes qui occupent une place encore trop importante au sein de la gauche internationale.
Contribution
Poutine, un fasciste russe, crée une grande confusion au sein de la gauche, y compris dans la gauche socialiste (1) [Notes en fin d’article – Ndr]. Lui, ses agents et ses soutiens (à la fois conscients et inconscients ) attirent un nombre important de personnes de gauche, dont des dizaines de milliers de jeunes à l’esprit internationaliste, dans ce qui est en réalité un vaste réseau d’extrême droite dirigé par Poutine.
Une avancée majeure dans cette tentative d’attirer la gauche dans les filets de l’extrême droite a été la confusion semée par les soutiens et les agents de Poutine autour de la révolution et de la contre-révolution syriennes. Depuis lors, lui et ses agents ont semé encore plus de confusion quant à la compréhension et à la réponse de la gauche à l’invasion impérialiste russe de l’Ukraine. Afin de réussir à nous opposer à ce processus contre-révolutionnaire, nous devons le comprendre ainsi que ses précédents historiques.
Gregor Strasser et le « Strasserisme »
Le précédent historique a commencé dans les années 1920 avec le nazi allemand nommé Gregor Strasser. Celui-ci a utilisé une rhétorique à consonance de gauche pour inciter les Allemands, y compris les travailleurs, à rejoindre le parti nazi. Le fascisme de Strasser avec sa rhétorique anticapitaliste est devenu connu sous le nom de strasserisme et il n’est pas unique dans l’histoire.
Aujourd’hui, nous voyons quelque chose de similaire dans ce qu’on appelle « l’alliance rouge-brun » (rouge pour la couleur des communistes et brun pour les « chemises brunes » nazies). Cela implique une alliance de groupes distincts, mais dans ce cas, ce qui se passe, c’est que des couches majeures de la gauche, y compris la gauche socialiste, utilisent un discours de gauche pour attirer les gens de gauche dans le réseau d’extrême droite de Poutine, de ses agents et de ses soutiens, de la même manière que Strasser a attiré les travailleurs dans le parti nazi.
Il n’y a pas deux événements identiques dans l’histoire, et il existe des différences entre le strassérisme et le poutinisme, mais ils ont aussi beaucoup de points communs. Si la version des années 1920 d’une « couverture de gauche » pour le fascisme pouvait être appelée « strasserisme », alors la version actuelle d’un développement similaire peut être appelée « poutinisme ».
Syrie
Le premier coup de semonce clair de la montée du poutinisme concernait la révolution et la contre-révolution syriennes. Tout comme les autres révolutions du Printemps arabe, la révolution syrienne était une révolution venue d’en bas pour chasser un dictateur égoïste et répressif – Assad. Ce qui était différent des autres révolutions, c’est qu’à partir de 2014 environ, le régime de Poutine est intervenu pour sauver Assad.
Certains à gauche décrivent Assad comme une sorte de combattant anti-impérialiste. Pourquoi, alors, l’écrasante majorité des groupes et individus fascistes et racistes soutiennent-ils Assad ? Il s’agit notamment de l’ancien leader du KKK David Duke, des manifestants racistes de « Unite the Right » à Charlottesville (2) et de Matthew Heimbach, fondateur de l’ancien Traditionalist Workers Party, parti raciste. Sur le plan international, les fascistes grecs d’Aube dorée et les fascistes italiens de Casa Pound soutiennent Assad.
David Duke, ex grand leader du KKK, en soutien au régime syrien.Mais il n’y a pas que l’extrême droite :
En septembre 2019, le British National Party(BNP) parti ultra-nationaliste britannique a été accueilli par Assad. La semaine suivante, un rassemblement de « gauche » a également été accueilli par Assad. Parmi eux figurent : Rania Khalek, fondatrice du site de propagande russe « Breakthrough News » et Max Blumenthal, tous deux journalistes « indépendants » pro-Assad ; Yasemin Zahra de la campagne US Labor Against War, Paul Larudee, ancien représentant du gouvernement américain en Arabie saoudite et actuellement membre de l’International Solidarity Movement (un groupe de soutien à la Palestine basé aux États-Unis) ; Ajamu Baraka du Green Party et du Black Agenda Report ; Rick Sterling, un agent de Poutine qui est apparu sur la chaîne russe Sputnik News et est un habitué du conspirationniste et pro-Poutine Mintpress ; Anya Parampil, qui écrit pour le site poutiniste Grayzone (3) et a travaillé auparavant pour la chaîne de télévision russe RT ; et Judith Bello, membre de l’United National Antiwar Coalition (UNAC) (4).
Eux aussi soutiennent Assad. Ils font partie de ce réseau poutiniste.
Ukraine
Le même groupe de personnalités d’extrême droite et racistes qui soutiennent Assad soutient également Poutine et défend ou excuse l’invasion de l’Ukraine par la Russie. À droite, on trouve Donald Trump, Tucker Carlson, le raciste America First, David Duke, Matt Heimbach, les suprémacistes virilistes de QAnon, le sénateur républicain américain Tommy Tuberville, Stephen Bannon et le raciste Richard Spencer. C’est la même chose en Europe, où des nationalistes d’extrême droite comme la Française Marine Le Pen ont exprimé à plusieurs reprises leur admiration pour Poutine.
Le mouvement anti-mondialisation de Russie et la « mondialisation »
Les rencontres compromettantes entre gauche et droite aux réunions de l’AGMRMais il ne s’agit pas seulement de l’extrême droite raciste et nationaliste. Un événement qui a vraiment contribué à cristalliser la collaboration de ces forces avec la gauche poutinisée a été la conférence du Mouvement anti-mondialisation de Russie (AGMR – Anti-Globalization Movement of Russia) tenue en décembre 2014. L’AGMR a été fondée par l’agent de Poutine Alexandre Ionov, qui, comme nous le verrons, a depuis lors été très actif dans la politique américaine.
Un programme raciste et nationaliste se cache derrière une opposition de tonalité gauchiste à la « mondialisation » (5) et le soutien à la « multipolarité ». Ce programme ultra nationaliste revient à encourager chaque groupe ethnique et national à chasser tous les membres des autres groupes de leurs « nations » traditionnelles. Il soutient également « l’eurasisme ». Ce concept a été proposé à l’origine par les fascistes européens et, dans le monde d’aujourd’hui, il signifie une Europe dominée par la Russie impérialiste.
Cette conférence AGMR de 2014 a réuni divers fascistes, racistes et nationalistes, notamment la Ligue raciste du Sud, le Mouvement nationaliste du Texas et le parti néo-fasciste italien Millenium. À leurs côtés se trouvaient des membres de la « gauche » poutiniste des États-Unis. Il s’agissait notamment de Margaret Kimberley du Black Agenda Report (BAR) (6) et de la United National Antiwar Coalition (UNAC) ; Joe Iosbaker du Comité pour mettre fin à la répression du FBI et de l’UNAC ; Bill Dores du Centre d’action international : Mo Hannah, militante des droits des femmes; Marina Nova de l’UNAC; et Joe Lombardo, co-coordinateur de l’UNAC. Ils ont publié plusieurs rapports sur la conférence, comme celui-ci de Workers World, et d’autres qui ont depuis été effacés, comme celui-ci de l’International Action Center. Dans aucun de ces rapports, la participation de racistes et de nationalistes d’extrême droite n’est mentionnée.
Aujourd’hui, cette même « gauche » poutiniste s’est jointe à la droite raciste et nationaliste pour défendre de fait l’invasion impérialiste russe de l’Ukraine. Bien qu’ils n’aient pas assisté à cette conférence, d’autres membres de la « gauche » poutiniste ont rejoint ce chœur. Il s’agit notamment de Jill Stein, du Parti Vert, qui a participé à un dîner tristement célèbre à Moscou avec Poutine et le fasciste Michael Flynn. Stein a soutenu Trump contre Hillary Clinton en 2016. Le Black Agenda Report fait également partie de cette « gauche » poutinisée. Il y a aussi Medea Benjamin et Code Pink (7), qui soutiennent également la théocratie iranienne répressive et corrompue. Il existe également le Parti socialiste du peuple africain/Mouvement Uhuru. Ceci n’est qu’un petit échantillon de ces forces.
En 2019, Fashbusters a publié un exposé sur le rôle du multimillionnaire technologique Roy Singham. Singham est lié au parti au pouvoir chinois et représente les intérêts des classes dirigeantes chinoise et russe. Comme vous pouvez le constater, sur une période de trois ans, de 2017 à 2019, Singham a fait don de plus de 100 millions de dollars à plusieurs groupes poutinistes aux États-Unis, le principal d’entre eux étant le Forum du peuple.
Les codirecteurs du Forum du peuple étaient Claudia de la Cruz et Manolo de los Santos. Tous deux sont des membres dirigeants du Parti pour le Socialisme et la Libération (8). De la Cruz a récemment démissionné de son poste de codirecteur du People’s Forum pour devenir le candidat du PSL à la présidence des États-Unis en 2024. Le PSL défend efficacement l’invasion impérialiste russe de l’Ukraine. Cependant, dans son rôle de l’un des principaux groupes s’organisant contre le soutien américain à Israël, il cache ce fait. Il en va de même pour la campagne présidentielle de Claudia de los Santos.
Il a également été démontré qu’Alexandr Ionov, du Mouvement anti-mondialisation de Russie, aidait à financer le Parti socialiste du peuple africain/Mouvement Uhuru, qui soutient l’invasion russe. Pendant ce temps, Ionov aurait financé Maria Butina, qui a rejoint et est devenue active au sein de la raciste National Rifle Association.
Journalistes et universitaires « indépendants de gauche » Il y a aussi des journalistes « indépendants » comme Max Blumenthal, qui fut autrefois un fervent critique d’Assad. Il se rend ensuite à Moscou et revient mystérieusement avec le point de vue opposé. Il y a eu beaucoup de spéculations sur la quantité d’argent qu’il pourrait recevoir du régime Poutine. Parmi les journalistes similaires figurent Rhania Khalek et Chris Hedges, qui ont tous deux travaillé à un moment donné pour la télévision RT de Poutine, liée aux fascistes.
Putine vise le « Sud global » En mars de cette année, le Conseil atlantique a publié un rapport approfondi sur la campagne de Poutine visant à influencer l’opinion publique dans le « Sud global ». Le rapport détaille comment Poutine utilise les mêmes types d’agents et de fronts dans le monde cybernétique pour obtenir du soutien à l’invasion impérialiste russe de l’Ukraine. Le rapport est une révélation.
Nous devons accepter le fait que la « gauche » poutinisée ne peut pas être redressée.
Dans le monde naturel, une espèce peut évoluer sur une certaine voie et lorsque l’environnement change, cette espèce doit disparaître parce qu’elle a évolué trop loin sur cette voie et ne peut pas revenir. Il en va de même de l’évolution de la « gauche » poutiniste. Ils ont franchi un rubicon. Ils ne pourront jamais s’en remettre et un mouvement socialiste entièrement nouveau devra se développer complètement en dehors et en opposition à eux.
Malheureusement, parce que la « gauche » poutinisée a beaucoup d’influence, certains socialistes et d’autres à gauche s’opposent à la propagande poutiniste, mais refusent d’accepter que les poutinistes aient commis plus qu’une « erreur » isolée. Ces militants de gauche font continuellement des compromis et des concessions aux poutinistes parce que la « gauche » poutiniste est plus importante et mieux financée. Les conciliateurs jouent un rôle double et contradictoire. D’une part, ils s’opposent au soutien des poutinistes à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. D’un autre côté, ils refusent de dévoiler les poutinistes tels qu’ils sont réellement. Ils le font parce qu’ils ne reconnaissent pas que la « gauche » poutiniste a trahi le principe fondamental de la solidarité internationale de la classe ouvrière et qu’une fois qu’ils ont commis cette trahison, ils ne peuvent plus revenir en arrière.
Le candidat du Parti Vert à la présidentielle de 2020, Howie Hawkins, en est un exemple. Lors d’un débat avec Margaret Kimberley, il a prétendu que la différence résultait simplement d’une interprétation différente des faits. Il a refusé de révéler le fait que Kimberley avait effectivement collaboré avec des fascistes lors de la conférence du Mouvement anti-mondialisation en Russie d’Alexandre Ionov. Cette incapacité à expliquer les liens de Kimberley aura inévitablement laissé des auditeurs non informés, dans la confusion face à la vaste présentation des « faits alternatifs » de Kimberley, incapables de distinguer qui était quoi.
Il en a été de même pour le débat entre Hawkins et Jill Stein. Il n’y a eu aucune explication sur le lien de Stein avec Poutine, aucune mention, par exemple, de son tristement célèbre dîner à Moscou avec Poutine, Michael Flynn et autres. Hawkins n’a pas non plus mentionné le fait que, lors de sa campagne pour la présidence américaine en 2016, Stein avait effectivement soutenu l’allié de Poutine, Donald Trump.
Lors d’une discussion ultérieure avec l’auteur de ces lignes, Hawkins a expliqué son échec comme étant dû au fait qu’il ne voulait pas couper les ponts avec ces personnes. Bill Fletcher Jr. fait preuve d’une approche similaire lorsqu’il qualifie la gauche poutinisée de « nos amis de gauche » et qu’il dit combien il respecte Medea Benjamin.
Le cas de l’USN (Ukraine Solidarity Network / Réseau de solidarité avec l’Ukraine)
Plusieurs de ceux qui oscillent entre le soutien à l’Ukraine et le maintien des liens avec la « gauche » poutiniste sont des membres dirigeants du Réseau de solidarité avec l’Ukraine (USN). L’USN a récemment publié une déclaration à l’occasion du deuxième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
La déclaration ne s’ouvre pas sur une dénonciation de l’invasion ou un appel au soutien à l’Ukraine mais sur une dénonciation del’hypocrisie de Biden soutenant l’Ukraine tout en soutenant Israël. Il est vrai que Biden & Co. font preuve d’hypocrisie dans leur soutien à l’Ukraine, mais même là, le point principal est la lenteur et l’insuffisance de ce soutien militaire. La déclaration de l’USN ne le mentionne pas. Ils ne mentionnent pas non plus que l’USN soutient le droit de l’Ukraine de se procurer des armes auprès de n’importe quelle source disponible. L’accent mis sur l’hypocrisie de Biden est exactement la position adoptée par la gauche poutinisée. À cela s’ajoute l’incapacité de la déclaration à souligner le refus de Biden de fournir toutes les armes dont l’Ukraine a besoin, quand elle en a besoin. Le communiqué mêle cela à une dénonciation des frappes aériennes américaines en Syrie, tout en ignorant le fait que c’est majoritairement la Russie qui a mené de telles frappes depuis 2015 jusqu’à aujourd’hui. Dans l’ensemble, il oscille entre dénoncer Biden et Zelensky et s’opposer à l’invasion malgré eux. L’insistance erronée de la déclaration de l’USN vient de sa tentative de soutenir l’Ukraine sans rompre les liens avec la « gauche » poutiniste.
Cette même réticence erronée à rompre les liens ou à entrer en conflit avec la gauche poutinisée peut également être constatée dans un discours prononcé par Blanca Missé lors d’un rassemblement « Labor for Palestine » (le mouvement ouvrier pour la Palestine) à Oakland début janvier 2024. Blanca, qui est un autre membre dirigeant de l’USN, avait l’occasion idéale de faire le lien entre la guerre contre Gaza, l’occupation de Gaza et l’invasion et l’occupation de l’Ukraine par la Russie. Cependant, établir ce lien l’aurait mise en conflit avec les poutinistes qui avaient organisé l’événement. De toute évidence, elle n’était pas disposée à ce conflit, c’est pourquoi elle n’a jamais mentionné le lien entre Gaza et l’Ukraine.
L’approche compromettante de l’USN s’est également révélée dans plusieurs forums auxquels des membres dirigeants ont participé et, dans un cas, ont même aidé à organiser. Le premier a eu lieu le 29 janvier 2023, dans lequel Bill Fletcher jr. a débattu avec Médée Benjamin à propos de l’Ukraine. Fletcher s’est opposé aux opinions pro-Poutine de Benjamin, mais a en même temps souligné combien il respectait les partisans de Poutine et de la théocratie iranienne. Plus récemment, un groupe « marxiste » a organisé un forum sur le « nouveau » mouvement ouvrier . Les trois intervenants – dont deux sont des membres dirigeants de l’USN – étaient des partisans des bureaucrates syndicaux « progressistes ». Cependant, ce sont les mêmes dirigeants syndicaux qui veillent à ce qu’il n’y ait pas d’alternative socialiste ou ouvrière au Parti démocrate, parti contrôlé par les grandes entreprises et qui soutient Israël. Ces dirigeants syndicaux sont aux mains du Parti démocrate et constituent donc un obstacle à l’organisation politique socialiste et de gauche au sein des syndicats. Ces dirigeants ne devraient pas être félicités. Aucun des représentants présents à ce forum n’a non plus mentionné la question du mouvement ouvrier aux États-Unis et l’Ukraine. Le troisième était un forum : Axe de réaction : Poutine et l’extrême droite mondiale . L’un des intervenants, John Feffer, a minimisé les liens de Poutine avec l’extrême droite mondiale, et aucun autre ne l’a contredit. Blanca Missé, une autre membre éminente de l’USN, était également l’une des oratrices. Elle et l’ensemble des intervenants ont complètement échoué à aborder la poutinisation de la gauche, qui était censée être le sujet central du forum. Ce faisant, Blanca Missé a assuré qu’elle ne s’opposerait pas à cette « gauche » poutinisée.
Des différences au sein d’une campagne comme celle visant à défendre l’Ukraine existeront inévitablement. Il faut en discuter ouvertement, sinon les divergences surgiront par une entrée dérobée.
Les racines de la dégénérescence du mouvement socialiste aux États-Unis
Dans le passé, le mouvement socialiste a joué un rôle important dans le mouvement ouvrier américain, et il est donc important de comprendre les racines de sa dégénérescence actuelle. Voici quelques points généraux :
- En raison de la manière spécifique dont le capitalisme s’est développé aux États-Unis, la conscience de classe a toujours eu tendance à être un peu plus faible ici qu’ailleurs. Dans le même temps, le pragmatisme (recherche de raccourcis faciles et « pratiques ») et l’anti-intellectualisme ont tendance à y être plus forts. Cela a ouvert la voie aux mouvements populistes de gauche pour leur transformation en populisme d’extrême droite, y compris raciste.
- La perversion de la Révolution russe et la montée du stalinisme ont eu un impact désastreux. D’une part, cela a encore induit en erreur et même trahi le socialisme. D’un autre côté, cela a contribué à isoler davantage non seulement les partisans de la bureaucratie soviétique, mais aussi tous les socialistes dans la classe ouvrière.
- Une fois isolés de la classe ouvrière américaine, il était inévitable que ces socialistes soient isolés de la classe ouvrière internationale. Cela signifie qu’ils ne voient pas la classe ouvrière de l’ancien monde colonial comme autre chose que des objets passifs plutôt que comme des sujets de l’histoire. Cela signifie également qu’ils ne tiennent pas compte de l’expérience réelle vécue par les masses ouvrières et qu’ils n’écoutent pas leurs voix.
- L’un des effets du stalinisme a été d’inscrire dans le mouvement socialiste la priorité mise sur « l’opposition à l’impérialisme américain » à l’exclusion de tout le reste, y compris la lutte des classes en dehors des États-Unis. Le résultat fut que les socialistes de tous bords avaient tendance à s’opposer automatiquement à tout ce que soutenait le gouvernement américain et à soutenir tout ce que défendaient les rivaux impérialistes du capitalisme américain comme Poutine. Cela a été un facteur important dans leur soutien ou leur défense effective apportée à Assad et à l’invasion de l’Ukraine.
Pour une explication plus approfondie, voir cet article sur les idées fascistes à gauche .
Une future régénération du mouvement socialiste
Un mouvement socialiste sain sera créé par des développements objectifs. L’un de ces développements est la guerre génocidaire menée par Israël à Gaza. Cela amène toute une couche des jeunes générations à l’activité politique. Cette jeune génération apportera de nouvelles idées et positions au mouvement. En raison des sombres perspectives économiques et du fait que l’ancienne bureaucratie soviétique, qui se présentait faussement sous le nom de « socialisme », a disparu, la jeune génération est bien plus ouverte aux idées socialistes.
De plus, en raison de la mondialisation du capitalisme et de la crise climatique – qui est une crise mondiale s’il en est – la nouvelle génération d’activistes politiques de gauche a tendance à avoir une vision fortement internationaliste. Ils apporteront également au mouvement une libération de bon nombre des vieux préjugés capitalistes. Cela comprend une émancipation plus profonde vis à vis de la suprématie masculine et du carcan de genre imposé par le capitalisme, ainsi que du traitement validiste des personnes handicapées. De cette manière, ils ajouteront beaucoup aux vieilles traditions socialistes.
Ces traditions socialistes perdurent, même si de nombreuses générations plus âgées se sont ralliées au poutinisme, ont adopté une attitude arrogante ou ont complètement abandonné la lutte. Mais si ceux qui maintiennent encore ces anciennes traditions peuvent apprendre des jeunes générations tout en leur apportant le meilleur des vieilles traditions, cela sera extrêmement positif.
Il est naturel d’introduire dans le mouvement de solidarité avec la Palestine la question de l’invasion et de l’occupation de l’Ukraine. Il est tout aussi facile et nécessaire d’aborder la question de la nécessité de construire un parti de masse de la classe ouvrière opposé aux Républicains et aux Démocrates.
Le fait que des conditions objectives soient nécessaires pour créer un nouveau mouvement socialiste plus sain ne signifie pas que nous pouvons simplement attendre que celui-ci se développe tout seul. Au contraire. Nous pouvons jouer un rôle modeste mais vital en aidant à préparer le terrain pour ces évolutions.
Les socialistes et les travailleurs du monde entier ont beaucoup à apprendre les uns des autres. Il en va de même pour les générations plus âgées – ou du moins pour les quelques rares personnes qui ont maintenu l’étendard de l’indépendance de la classe ouvrière et de la solidarité internationale de la classe ouvrière – et pour les jeunes générations nées dans un monde très différent. Le meilleur des vieilles traditions socialistes et ouvrières ne doit pas être écarté. La combinaison du meilleur des traditions avec ce qu’offrent les nouvelles générations peut jouer un rôle essentiel dans la reconstruction d’un nouveau mouvement socialiste dynamique, basé avant tout sur la solidarité internationale de la classe ouvrière. Même si ce sont des événements objectifs qui créeront un nouveau mouvement, cette combinaison peut et doit aider à préparer le terrain. En hommage à ceux qui nous ont précédés et par souci de ceux qui sont encore à venir – y compris toutes les espèces de la planète – nous n’avons d’autre choix que de poursuivre ce processus et de lutter ensemble.
Lectures complémentaires
- Voici une version beaucoup plus détaillée de ce même article.
- Voici un lien vers une brochure d’Oakland Socialist : Poutine, Assad et le désastre syrien. Celle-ci explique l’évolution politique du régime Poutine et de ses premiers supporters de « gauche » aux États-Unis.
- Voici un lien vers mon article S’opposer aux apologistes de Poutine – un parcours personnel. Même si je n’ai jamais été un apologiste de Poutine, ma pensée a changé au fil du temps. Cet article explique pourquoi et comment.
Notes des éditeurs
1) Dans le contexte US, le terme gauche englobe aussi bien l’aile libérale (au sens politique en usage dans le mode anglo-saxon) dans le parti démocrate que la gauche en dehors de ce parti et en relation avec la tradition de gauche (socialiste, communiste, révolutionnaire) telle qu’on l’entend en Europe. Ici gauche socialiste doit s’entendre dans le sens européen de gauche (des réformistes social-démocrates à la gauche radicale).
2) A Charlottesville (Virginie – USA) en août 2017, un face à face violent a opposé les manifestants racistes, mobilisés sous le prétexte de la défense d’une statue à la gloire d’un général sudiste, et des contre-manifestants anti-racistes et de gauche. Un raciste a tué une manifestante en lançant son véhicule contre un cortège anti-raciste et antifa.
3) Grayzone est un site particulièrement important dans ce paysage politico-médiatique : se présentant comme anti-impérialiste, il sert à recycler auprès d’un public de gauche des thématiques d’extrême droite « anti-système ». Voir l’article de Dan La Botz « Contre les calomnies campistes » de 2019.
4) L’UNAC proclame « combattre les guerres à l’étranger comme à domicile », elle présente une façade tout ce qu’il y a de plus gauche mais sa ligne basée sur le principe « ceux qui sont les ennemis des USA sont nos amis », a commencé à dérailler sérieusement à partir du soulèvement populaire en Syrie où les diverses composantes se voulant révolutionnaires (PSL, Workers World Party, Socialist Action, Freedom Road Socialist Organization, etc …) ont pris fait et cause pour le régime assassin de Bachar présenté comme une victime d’une intervention US.
5) L’AGMR – Anti-Globalization Movement of Russia – prétend agir « contre la domination mondiale des sociétés transnationales et des institutions commerciales et financières supranationales ». Il est financé par l’État russe et comprend parmi ses membres honoraires Bashar Al-assad et Mahmoud Ahmadinejad. Son créateur et animateur Alexandre Ionov affiche sans complexe son vote Trump.
6) Black Agenda Report se présente comme un média fournissant « des informations, des commentaires et des analyses depuis un point de vue noir de gauche ».
7) Code Pink se présente comme un groupe féministe pacifiste (Code rose : femmes pour la paix) qui de l’opposition à la guerre en Irak (2003) est passé du soutien à Bachar Al-assad présenté comme victime d’une intervention US. Dès 2014, Code Pink a pris le parti de Poutine dans le conflit ukrainien, portant la demande de cessez-feu et imputant le conflit « à l’OTAN ».
Medea Benjamin est une dirigeante de premier plan de Code Pink. Après de nombreuses années de militantisme alter-mondialiste, elle vire au campisme, menant une campagne « pacifiste » au profit du gouvernement des mollahs iraniens au mépris des opposants et des femmes iraniennes subissant la répression du régime.
8) Le PSL (Party for Socialism and Liberation) et le Workers World Party sont deux partis frères ennemis issu de la même tradition politique créée par Sam Marcy (1911-1998) et Vince Copeland (1915-1993). Marcy et Copeland ont été membres du SWP des années 40 jusqu’à 1956. La fraction de Marcy a soutenu l’intervention soviétique contre la révolution hongroise et fondait le WWP en 1959. Durant les années 60, celui-ci se construisit dans la radicalisation étudiante de l’époque avec une orientation ultra-gauchiste priorisant une intervention anti-raciste et anti-fasciste. Son idéologie est fondée sur un campisme célébrant Cuba, la Chine, le Vietnam et la Corée du Nord comme phares de l’anti-impérialisme. Le PSL est né d’une scission en 2004 et présente le même programme porté par d’autres gens. En 2020, le WWP a soutenu Loukachenko contre le mouvement démocratique accusé d’être « contre-révolutionnaire » et soutenu par « les fascistes du Maïdan et l’impérialisme US ». Sans surprise, PSL et WWP soutiennent la guerre de Poutine contre l’Ukraine dès l’annexion de la Crimée en 2014.
Publié le 04.05.2024 à 10:34
Dans un long interview accordé à Politis, Rima Hassan, en position éligible sur la liste LFI aux européennes, développe longuement les raisons de son engagement : « Les Écologistes m’avaient proposé de venir sur leur liste, mais en position non éligible. Avec LFI, je peux espérer défendre directement mes dossiers sur la scène européenne » .
Et d’ajouter « il ne s’agit pas seulement de la question palestinienne… J ‘ai par exemple soutenu les travaux de Raphaël Glucksmann sur le génocide des Ouïgours. Fort heureusement, on ne lui a jamais dit que ce n’était pas un enjeu européen. Or la question palestinienne est mille fois plus européenne que celle des Ouïgours. »
De la souffrance du peuple ukrainien, peuple européen s’il en est, de son courage héroïque, de ses luttes sociales et de sa résistance à l’oppresseur russe, de sa défense des droits inaliénables des femmes et des personnes LGBT, silence assourdissant de la candidate.
Que dire à Rima Hassan?
Que les luttes d’émancipation des peuples face à un oppresseur impérialiste, quel qu’il soit, qui cherche à asseoir sa domination tant économique que politique, ne sont pas hiérarchisables.
Que ces luttes de libération font partie d’un tout géopolitique, d’une compréhension globale de la situation internationale.
Qu’en France, dans la mouvance qui émarge traditionnellement à gauche, un désaccord de fond persiste entre une « solidarité internationale sélective » et l’exigence d’une solidarité effective, agissante envers tous les peuples opprimés quelle que soit la puissance opprimante.
Et qu’il est fortement souhaitable de dessiner correctement à gauche les contours d’une solidarité de classe, sans faille, indispensable aux peuples subissant une oppression impérialiste, d’où qu’elle vienne.
Ghislaine Zaparty
Publié le 03.05.2024 à 21:00
Soudan : guerre civile, multinationales et 9 millions de personnes déplacées, par Miguel Lamas
Publié à titre de tribune libre.
Il y a un an, le 15 avril, commençait la lutte armée entre les deux camps militaires qui se disputent le Soudan et ses richesses, tout d’abord l’or. Les deux camps s’affrontent, mais répriment sauvagement la majorité des travailleurs soudanais.
Le conflit, qui oppose les forces armées soudanaises (SAF), dirigées par le général Abdelfatah al Burhan, aux forces paramilitaires de soutien rapide (RSF) du général Mohamed Hamdan Dagalo, connu sous le nom d’Hemedti, a entraîné le déplacement de plus de 9 millions de personnes de leurs maisons et leurs lieux de résidence, et d’innombrables civils ont été tués ou gravement blessés.
En réalité, la plupart des déplacements et de la famine dont souffre la moitié des 45 millions d’habitants du Soudan sont largement dus à la répression brutale de la population civile par les deux camps militaires. La grande majorité d’entre eux ne sont pas impliqués dans le conflit entre les deux camps. Cependant, ils sont chassés par les militaires qui pénètrent dans leurs maisons, violent les femmes et volent leurs biens, ou subissent des bombardements aériens sur leurs logements.
Comme l’indique un article du quotidien espagnol El Salto, « la confrontation entre l’armée et les milices au Soudan implique une guerre contre la population qui s’est soulevée pour la démocratie et qui lutte maintenant pour sa survie ».
Le soulèvement populaire de 2019 et la contre-révolution
En 2019, le Soudan a connu un soulèvement populaire qui a mis fin à 30 ans de régime militaire islamique du dictateur Omar Al Bashir, et des promesses de démocratie et d’élections libres ont été faites. Mais, en 2021, a eu lieu un nouveau coup d’État militaire et la répression s’est déchaînée contre la population. Depuis avril 2023, ce chaos a laissé une grande partie de la population sans nourriture, sans soins de santé et presque sans écoles ni universités. Des milliers de travailleurs de la santé et de l’éducation ont été licenciés. En effet, ils étaient à l’avant-garde, avec les jeunes des « comités de résistance révolutionnaire », de grandes luttes contre la dictature.
Ce qui a existé pendant toutes ces années et existe encore, ce sont les « comités révolutionnaires de résistance », qui se sont unis aux organisations populaires des quartiers, qui ont également mené la rébellion de 2019 et qui ont chassé la dictature des 30 dernières années. Aujourd’hui, ils persistent dans une grande partie du pays comme réseaux locaux de survie et d’entraide, canalisant les efforts pour collecter de la nourriture, de l’argent et des médicaments afin d’aider les personnes dans le besoin. Ces comités sont attaqués et persécutés à parts égales par les factions militaires des FAS et des FAR dans les endroits où chacune d’elles domine.
Extraction d’or et pillage impérialiste
Ce désastre social dont souffre le Soudan, pays d’origine et de langue arabe comme la Palestine, n’est pas propre au Soudan. Cependant, il touche de nombreux pays africains qui étaient autrefois des colonies européennes jusqu’aux années 1950 et qui ont historiquement souffert du pillage de leurs pays par l’Europe. Aujourd’hui, ils souffrent tous d’une semi-colonisation par des entreprises étrangères et impérialistes qui s’emparent de leurs richesses par l’intermédiaire d’organisations locales associées, subordonnées et armées. Outre les entreprises européennes, il y a aussi la pénétration des entreprises américaines, israéliennes, arabes, chinoises et russes qui se battent pour les richesses naturelles du Soudan.
Le Soudan est un pays arabe qui a été une colonie britannique jusqu’en 1956. En 2011, sa région méridionale, peuplée de différents groupes ethniques et de langues semblables aux populations africaines du sud et du centre de l’Afrique, est devenue indépendante, avec une population d’environ 11 millions d’habitants. C’est dans le sud indépendant que se trouve la plus grande partie de la production pétrolière, principale source de richesse du Soudan. Mais, dans le secteur nord qui reste le Soudan d’aujourd’hui, des richesses aurifères ont été découvertes il y a une vingtaine d’années.
L’année dernière, bien que les chiffres varient considérablement et qu’il n’y ait aucun contrôle de l’État sur l’extraction de l’or, on parle de 233 tonnes d’exportations d’or. Cela place le Soudan parmi les principaux producteurs et exportateurs d’or au monde. Mais, il n’en reste que peu ou n’en reste rien pour sa population.
Cet or est en grande partie accaparé par des sociétés telles que le groupe paramilitaire russe Wagner, aujourd’hui reconverti en African Corps, par l’intermédiaire de la société M-Invest, qui appartenait au chef du groupe Wagner, Yevgeny Preghozin, décédé en Russie, apparemment assassiné par Poutine. Mais cette société est très importante dans l’extraction de l’or du Soudan, qu’elle achemine vers la Russie. Les paramilitaires des FAR qui dominent les principaux territoires d’extraction de l’or sont les alliés de la société russe. Il en va de même pour les entreprises des Émirats arabes, qui sont également alliées aux FAR. Quant au gouvernement des FAS, qui domine d’autres régions du pays, il est davantage allié à Israël et aux États-Unis.
Outre la répression anti-populaire et la guerre entre secteurs militaires, l’exploitation de l’or, avec l’utilisation massive de mercure, détruit l’agriculture et plonge 25 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population soudanaise, dans la famine. Tout d’abord, les 9 millions de personnes déplacées de leurs maisons par l’invasion de l’une des factions militaires, partent presque toutes sans rien, sans argent, sans nourriture bien sûr, et sans travail. Les réfugiés arrivent dans des endroits, que ce soit dans les pays voisins ou au Soudan même, souvent avec rien d’autre que les vêtements qu’ils portent sur le dos, et où ils ne reçoivent quasiment aucune aide non plus, parce qu’il s’agit de population très pauvre.
La nécessité d’une solidarité internationale avec le peuple soudanais
La grande expérience de lutte du soulèvement populaire de 2019 à 2021 a montré tout d’abord l’énorme force des travailleurs lorsqu’ils s’organisent, s’unissent et se mobilisent, mais également que les partis bourgeois et les factions militaires cherchent à conclure un pacte avec certains impérialistes européens, arabes ou russes, afin de préserver l’ordre capitaliste et le pillage du pays dont ils sont également les bénéficiaires avec cet ordre. Les promesses de démocratisation sont sans cesse bafouées. Ce capitalisme semi-colonial avec un peuple très pauvre qui détruit le pays et provoque une misère effroyable et une famine populaire, est aujourd’hui largement centré sur l’or. Les exigences économiques du peuple face à la crise chronique historique du pays et une véritable solution démocratique rendent nécessaire une direction alternative des travailleurs et de la jeunesse, pour réorganiser les comités révolutionnaires de résistance, pour obtenir à l’avenir le renversement des deux factions de la dictature militaire, pour expulser les transnationales minières russes, européennes, sionistes ou arabes pilleuses et pour gagner une solution et un gouvernement en faveur des travailleurs, de la jeunesse et des femmes du peuple.
En tant qu’Unité internationale des travailleuses et travailleurs – Quatrième Internationale (UIT-QI), nous appelons à la solidarité internationale avec la lutte actuelle du peuple soudanais pour sa survie. En même temps que la solidarité avec la lutte des peuples travailleurs et de la jeunesse arabes et africains et leur unité dans la solidarité dans la lutte pour mettre fin au capitalisme impérialiste, aux gouvernements des patrons et aux dictatures en Afrique, ainsi qu’au colonialisme sioniste génocidaire d’Israël au Moyen-Orient. Depuis ses origines, le capitalisme impérialiste, l’esclavage et le colonialisme ont conduit le continent africain, y compris son Nord arabe, à la pire pauvreté, au pillage et à l’oppression du monde.
Miguel Lamas, le 20 avril 2024.
L’auteur est membre de la direction de l’Unité internationale des travailleuses et travailleurs – Quatrième Internationale (UIT-QI)
Publié le 03.05.2024 à 20:00
Présentation
Nous publions à titre de document pour la discussion sur les perspectives mondiales cette interview de Pierre Rouset, vétéran de l’ex « Secrétariat Unifié » de la Quatrième Internationale, menée par Jaime Pastor, pour la rédaction de la revue hispanique Viento Sur.
Assurément, on peut constater que dans le « SU », il y a des secteurs qui tiennent des discours distincts ou divergents. Le secteur « incarné » par Pierre Rousset va assurément dans la bonne direction, ce qu’il faut saluer. Ce qui n’empêche pas des nuances et divergences comme sur le rôle de « mouvements pacifistes » dont nous doutons de l’efficacité dans le contexte de militarisation croissant. Alors que la question de la survie de l’humanité dans le contexte de la « polycrise » se pose, il ne peut y avoir de voie autre que la prise du pouvoir à l’échelle mondiale par ceux d’en bas pour résoudre conjointement les crises écologique et sociale en brisant la résistance de ceux d’en haut, pour réorganiser toute la société humaine sur des bases vivables par tous et toutes, humanité et biosphère.
Document
Jaime Pastor – Il semble évident que nous nous trouvons dans le contexte d’une crise mondiale multidimensionnelle, dont l’une des caractéristiques est un relatif chaos géopolitique, dans lequel on assiste à une multiplication des guerres et à une aggravation des conflits inter-impérialistes, comment définirais-tu cette phase ?
Pierre Rousset –Vous vous référez à la « crise mondiale multidimensionnelle » (je dirais plutôt une crise planétaire). Je pense qu’il est important de s’y arrêter, avant d’aborder les questions géopolitiques. Cette crise surdétermine tout et nous ne pouvons plus nous contenter de faire de la politique comme avant. Nous atteignons en effet le « point de bascule » que nous redoutions depuis longtemps, et ce bien plus vite que prévu.
Jonathan Watts, rédacteur en chef sur l’environnement global du Guardian, tire la sonnette d’alarme en titrant son article du 9 avril « Le dixième record mensuel consécutif de chaleur alarme et déconcerte les climatologues. ». En effet, « Si l’anomalie ne se stabilise pas d’ici au mois d’août, « le monde se retrouvera en territoire inconnu », déclare un expert en climatologie. […]. Cela pourrait signifier que le réchauffement de la planète modifie déjà fondamentalement le fonctionnement du système climatique, et ce bien plus tôt que les scientifiques ne l’avaient prévu ».
L’expert cité juge que cette stabilisation d’ici août est encore possible, mais quoi qu’il en soit, la crise climatique fait d’ores et déjà partie de notre présent. Nous sommes dedans et ses effets se font déjà dramatiquement sentir (le chaos climatique).
La crise globale à laquelle nous devons faire face affecte tous les domaines de l’écologie (pas seulement le climat) et leurs conséquences sur la santé (dont les pandémies). Elle concerne l’ordre international dominant (les dysfonctionnements insolubles de la mondialisation néolibérale) et la géopolitique des puissances, la multiplication des conflits et la militarisation du monde, la fabrique sociale intime de nos sociétés (fragilisée par la précarisation généralisée nourrie par tout ce qui précède)…
Qu’y a-t-il de commun à toutes ces crises ? Leur origine « humaine », en tout ou en large partie. La question de l’impact humain sur la nature n’est évidemment pas nouvelle. Quant à la croissance des émissions de gaz à effet de serre, elle remonte à la révolution industrielle. Cependant, cette « crise générale » est étroitement corrélée au développement du capitalisme d’après la Seconde Guerre mondiale et puis à la mondialisation capitaliste. Elle est caractérisée par la synergie entre un ensemble de crises spécifiques qui nous plonge dans une situation sans précédent aucun, à la frontière de multiples « territoires inconnus » et d’un point de bascule global.
Pour la qualifier de façon concise, j’aime le terme de « polycrise ». Il est certes un peu déroutant, étranger au langage du quotidien, mais il souligne, étant au singulier, que nous parlons d’UNE crise aux multiples facettes, qui résulte de la combinaison de multiples crises spécifiques. Nous n’avons donc pas à faire à une simple addition de crises, mais à leur interaction qui démultiplie leur dynamique, nourrissant une spirale mortifère pour l’espèce humaine (et pour une bonne partie des espèces vivantes).
Ce qui s’avère particulièrement révoltant, et pour tout dire hallucinant, est que les pouvoirs établis annulent aujourd’hui les maigrelettes mesures qui avaient été prises pour tenter de limiter un tant soit peu le réchauffement climatique. C’est le cas notamment des gouvernements français et britannique. C’est aussi le cas des grandes banques aux États-Unis, ou celui des compagnies pétrolières. Au moment où il était évident qu’il fallait les renforcer, et diablement. Les très riches dictent leur loi. Ils ne considèrent pas que nous sommes tous dans le même bateau. Des régions entières de la planète sont en passe de devenir invivables, là où les hausses de température se combinent à des taux très élevés d’humidité dans l’air. Qu’à cela ne tienne, ils iront vivre là où il fait encore bon.
Nous sommes entrés de plain-pied dans l’ère des pandémies. La destruction des milieux naturels a créé les conditions de promiscuités favorables à la transmission inter-espèce de maladies dont Covid est devenu l’emblème. La fonte du permafrost sibérien est annoncée et pourrait libérer des bactéries ou virus anciens contre lesquels n’existe ni immunisation ni traitement. En ce domaine nous risquons aussi d’entrer en territoire inconnu : la crise climatique est porteuse d’une crise sanitaire multidimensionnelle.
La catastrophe était prévisible et a été prévue. Nous savons maintenant que les grandes compagnies pétrolières avaient commandité dès le milieu des années 1950 une étude qui avait décrit avec une précision remarquable le réchauffement climatique à venir (dont elles ont néanmoins nié des décennies durant la réalité).
Nous n’avons pas fini de faire le tour des milles et une facettes de la « polycrise », mais il est peut-être temps d’en tirer quelques premières implications.
C’est autour des pôles que l’impact géopolitique du réchauffement climatique est le plus spectaculaire, surtout dans l’Arctique. Une voie de navigation interocéanique s’ouvre au nord, ainsi que la perspective d’exploitation des richesses du sous-sol. La compétition inter-impérialiste dans cette partie du monde prend une dimension nouvelle. La Chine n’étant pas un pays riverain de l’Antarctique, elle a besoin de la Russie pour y opérer. Elle fait payer à Moscou à l’est du continent eurasiatique le prix de sa solidarité sur le front ouest (Ukraine) en assurant son libre usage du port de Vladivostok.
En termes de géopolitique mondiale, je voudrais pointer l’importance de deux sujets qui ne sont pas mentionnées dans les questions qui suivent.
L’Asie centrale tout d’abord. Elle occupe une place pivot au cœur du continent eurasiatique. Pour Vladimir Poutine, elle fait partie de la zone d’influence privilégiée de la Russie, mais pour Pékin, c’est l’un des passages clés du versant terrestre de ses nouvelles « routes de la soie » en direction de l’Europe. Une partie complexe est actuellement engagée dans cette partie du monde, mais fort peu intégrée à nos analyses.
Par ailleurs, le réchauffement climatique nous rappelle l’importance cruciale des océans qui couvrent 70% de la surface du globe, jouent un rôle décisif dans la régulation du climat, abritent des écosystèmes vitaux, le tout étant menacé par la hausse de température des eaux. La surexploitation des ressources océaniques est, comme on le sait, un enjeu majeur, ainsi que l’extension des frontières maritimes qui ne posent pas moins de problèmes que les frontières terrestres. Une réflexion géopolitique globale ne peut faire l’impasse sur les océans, ainsi que sur les pôles.
Un autre aspect clef de la « crise multidimensionnelle » à laquelle nous sommes confrontés concerne évidemment la mondialisation et la financiarisation capitalistes. Elles ont abouti à la formation d’un marché mondial plus unifié que jamais dans le passé, afin d’assurer la liberté de mouvement des marchandises, des investissements et des capitaux spéculatifs (mais pas des personnes). Plusieurs facteurs sont venus perturber cette « mondialisation heureuse » (pour les grands possédants) : une stagnation des échanges marchands, l’ampleur prise par la finance spéculative et les dettes, la pandémie Covid qui a révélé les dangers de la division internationale des chaînes de production et le degré de dépendance de l’Occident vis-à-vis de la Chine, contribuant à la modification rapide des relations entre Washington et Pékin (de l’entente cordiale à la confrontation).
Ce sont les grandes entreprises occidentales qui ont voulu faire de la Chine l’atelier du monde, afin d’assurer une production à faible coût et de casser le mouvement ouvrier dans leurs propres pays. C’est l’Europe qui a été à la pointe de la généralisation des règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à laquelle Pékin a adhéré. Elles étaient toutes convaincues que l’ancien Empire du Milieu leur serait définitivement subordonné, et il aurait pu en être ainsi. Si ce ne fut pas le cas, c’est que l’aile marchante de la bureaucratie chinoise, une fois les résistances populaires brisées dans le sang (1989), a réussi sa mutation capitaliste, donnant naissance à une forme originale de capitalisme d’État.
Le capitalisme d’État a une longue histoire en Asie orientale, sous l’égide du Kuomintang (Guomindang) en Chine ou à Taïwan, en Corée du Sud… De par son histoire, la formation sociale chinoise est évidemment unique, mais elle combine assez classiquement le développement d’un capital privé et l’appropriation capitaliste des entreprises d’État. Nous n’avons pas à faire à deux secteurs économiques séparés (une économie fondamentalement duale) ; ils sont en effet étroitement liés par de multiples coopérations, ainsi que par le biais de clans familiaux présents dans tous les secteurs.
Sous l’égide de Deng Xiaoping tout d’abord, la Chine convertie au capitalisme a discrètement amorcé son envol impérialiste et a pu bénéficier de l’éloignement géographique des États-Unis, longtemps incapables de réaliser leur recentrage sur l’Asie (il n’a été assuré que par Joe Biden, dans la foulée de la débâcle afghane).
En conclusion de ce point, notons que :
• La situation géopolitique internationale reste dominée par le face-à-face entre un impérialisme établi (les États-Unis) et un impérialisme montant (la Chine). Ce ne sont bien entendu pas les seuls acteurs du grand jeu mondial entre puissances, petites et grandes, mais aucune autre ne pèse d’un poids comparable aux deux « super-puissances ».
• Ce conflit a pour particularité un degré très élevé d’interdépendance objective. Certes, la crise de la mondialisation néolibérale est patente, mais son héritage est toujours là. Il n’y a plus de « mondialisation heureuse », mais il n’y a pas non plus de « démondialisation (capitaliste) heureuse ». Les conflits géopolitiques sont à la fois le symptôme de cette situation de crise structurelle et en accentuent les contradictions. Dans une certaine mesure, nous sommes ici aussi entrés en « territoires inconnus », sans précédent.
• Tout en restant la principale « super puissance », l’hégémonie des États-Unis a subi un déclin relatif. Ils ne peuvent continuer à gendarmer le monde sans l’aide d’alliés fiables et efficaces qui manquent à l’appel. Ils sont affaiblis par la crise politique et institutionnelle provoquée par Donald Trump et ses conséquences diplomatiques durables (perte de confiance de leurs alliés). On peut dire qu’il n’y a plus d’impérialisme « classique », vu l’ampleur de la désindustrialisation qu’a connue le pays. Joe Biden mobilise aujourd’hui des moyens financiers et légaux considérables pour tenter de redresser la barre en ce domaine, mais ce n’est pas une tâche facile. Rappelons qu’un pays comme la France était incapable, même face à une urgence vitale (Covid), de produire du gel hydroalcoolique, des masques chirurgicaux et des FFP2, des blouses pour le personnel soignant. Cela ne relève pourtant pas de la technologie de pointe !
• La Chine était, en ce domaine, en bien meilleure position. Elle avait hérité de l’ère maoïste une base industrielle autochtone, une population au taux d’alphabétisation élevée pour le tiers monde, une classe ouvrière formée. Devenue atelier du monde, elle a assuré une nouvelle vague d’industrialisation (en partie dépendante, mais pas seulement). De gros moyens ont été investis pour assurer la production de technologies de pointe. Le parti-Etat a pu organiser le développement national et international du pays (il y avait un pilote dans l’avion). Ceci dit, le régime chinois est aujourd’hui plus opaque et secret que jamais. On sait comment la crise politico-institutionnelle affecte l’impérialisme US. Il est bien difficile de savoir ce qu’il en est en Chine. Cependant, l’hypercentralisation du pouvoir sous Xi Jinping, devenu président à vie, semble bien être maintenant un facteur de crise structurelle.
• Le déclin relatif des États-Unis et la montée en puissance inachevée de la Chine ont ouvert un espace dans lequel des puissances secondaires peuvent jouer un rôle significatif, au moins dans leur propre région (Russie, Turquie, Brésil, Arabie saoudite…). Ainsi, je pense que la Russie n’a pas cessé de placer la Chine devant une succession de faits accomplis aux frontières orientales de l’Europe. En agissant de concert, Moscou et Pékin étaient largement maîtres du jeu sur le continent eurasiatique. Cependant, il n’y a pas eu de coordination entre l’invasion de l’Ukraine et une attaque effective sur Taïwan.
JP : Dans ce contexte, précisément, peut-on considérer que l’invasion russe de l’Ukraine et le soutien des puissances occidentales à l’Ukraine pour y faire face font de cette guerre une guerre inter-impérialiste qui nous amène à évoquer la politique de Zimmerwald (guerre à la guerre) pour y répondre ? Ou, au contraire, sommes-nous face à une guerre de libération nationale qui, bien que soutenue par les puissances impérialistes, oblige la gauche occidentale à se solidariser avec la résistance du peuple ukrainien contre l’invasion russe ?
PR : La politique de Zimmerwald était de demander une paix, sans annexions. Or, certaines des personnes qui se présentent comme des héritiers de Zimmerwald proposent de céder tel ou tel morceau de l’Ukraine à la Russie, d’y organiser des référendums pour valider leur séparation de l’Ukraine, etc., mais passons.
Le plus simple, pour répondre à cette question, est de reprendre le déroulé des événements. Une invasion se prépare en mobilisant aux frontières des moyens militaires considérables, ce qui prend du temps et se voit. C’est Poutine qui l’a fait. A ce moment-là, l’OTAN était en pleine crise politique, après l’aventure afghane, et le gros de ses forces opérationnelles en Europe n’avait pas été redéployé à l’Est. La préoccupation principale de Biden était la Chine et il essayait même encore de jouer Moscou contre Pékin. Les services secrets US ont été les premiers à alerter qu’une invasion était possible, mais l’avertissement n’a été pris au sérieux ni par les États européens ni même par Zelinsky lui-même.
En Europe occidentale, la plupart d’entre nous avions alors peu de contacts avec nos camarades est-européens (en particulier ukrainiens) et nous avons été nombreux à analyser les événements en termes uniquement géopolitiques (une erreur à ne jamais commettre), pensant que Poutine se contentait d’exercer une forte pression sur l’Union européenne pour attiser les dissensions post-afghanes au sein de l’OTAN. Si tel avait été le cas, l’invasion ne devait pas avoir lieu, car elle aurait l’effet inverse : redonner un sens à l’OTAN et lui permettre de resserrer les rangs. C’est bien ce qui s’est passé ! De plus, avant l’invasion russe, une majorité de la population ukrainienne souhaitait vivre dans un pays non aligné. Aujourd’hui, seule une très petite minorité envisage leur sécurité autrement qu’en alliance étroite avec les pays de l’OTAN.
Pour ma part, ce n’est que très peu de temps avant l’invasion que j’ai eu le sentiment qu’elle était possible, alerté par mon ami Adam Novak.
Nous en savons maintenant beaucoup plus : l’invasion avait été préparée depuis plusieurs années. Elle s’inscrit dans un grand projet de restauration de l’Empire russe dans les frontières de l’URSS stalinienne, avec Catherine II pour référence. L’existence de l’Ukraine n’était qu’une anomalie dont Lénine était coupable (selon les termes mêmes de Poutine) et elle devait réintégrer le giron russe. En fait, les Ukrainien.nes l’appellent l’invasion à grande échelle et soulignent que la subversion et l’occupation militaire du Donbass, Luhansk et Crimée en 2014 constituaient une première phase de l’invasion. L’« Opération spéciale » (le mot « guerre » était prohibé jusqu’à tout récemment et le reste en pratique) devait être très rapide et se poursuivre jusqu’à Kiev, où un gouvernement aux ordres serait établi. Les forces occidentales, prises de court, ne pourraient alors que s’incliner devant le fait accompli – et prises de court, elles le furent. Même Washington n’a réagi politiquement qu’avec un temps de retard.
Le grain de sable qui a fait s’enrayer la machine de guerre fut l’ampleur de la résistance ukrainienne, imprévue par Poutine, mais aussi en Occident. On peut vraiment parler d’une résistance massive, populaire, en osmose avec les forces armées. C’était une résistance nationale, à laquelle beaucoup de russophones ont participé (et tout l’éventail politique, à l’exception des obligés de Moscou). Pour qui en doutait, il n’y avait pas de preuve plus éclatante que celle-ci : l’Ukraine existe bel et bien. Nous sommes dans le second cas de figure que vous évoquiez.
Le temps n’efface pas cette vérité « originelle » et notre obligation de solidarité. Une double obligation de solidarité, j’ajouterais. Avec la résistance nationale du peuple ukrainien et avec les forces de gauche qui continent à lutter, en Ukraine même, pour les droits des travailleurs et des syndicats, pour les libertés d’association et d’expression, contre l’autoritarisme du régime Zelynsky et contre les politiques néolibérales (prônées par l’Union européenne)…
Bien évidemment, l’Ukraine est devenue un point chaud du conflit de puissances russo-occidental. Sans la fourniture d’armes par les États-Unis, notamment, les Ukrainien.nes n’auraient pas pu tenir de « fronts ». Cependant, avec constance, les fournitures d’armes ont toujours été en deçà de ce qu’il aurait été nécessaires pour mettre décisivement en échec Moscou. Jusqu’à aujourd’hui la maîtrise de l’air par l’armée russe n’a pas été contrée. Et les pays de l’OTAN se divisent à nouveau, alors que la crise préélectorale aux États-Unis bloque le vote des fonds à destination de l’Ukraine.
Après avoir eu la possibilité de construire des défenses en profondeur et de se réorganiser, Moscou continue à être le moteur de l’escalade militaire en Ukraine, avec l’aide des obus nord-coréens et des financements fournis par l’Inde ou la Chine (via la vente de produits pétroliers), et elle pousse la politique du fait accompli jusqu’à l’ignoble : la déportation d’enfants ukrainien.nes et leur adoption dans des familles russes.
JP : Si oui, que répondre à ceux qui considèrent que le soutien à la résistance sert les intérêts des puissances occidentales (avec l’approbation du gouvernement Zelenski) qui veulent prolonger la guerre, sans se soucier des ravages (humains et matériels) qu’elle produit, et qu’il est donc nécessaire de promouvoir une politique active de défense d’une paix juste ?
PR : Je ne suis pas moi-même engagé activement dans la solidarité Ukraine. Je maintiens, à contre-courant de l’actualité, mes activités de solidarité Asie. Je me suis immergé dans la question israélo-palestinienne (c’est dur à vivre). Alors je resterais prudent.
Nous ressentons toutes et tous l’ampleur des ravages de cette guerre, d’autant plus importants que Poutine mène une guerre qui cible sans vergogne la population civile. C’est insupportable.
Cependant, ce n’est pas notre soutien, mais Poutine qui prolonge cette guerre. Il ne faut quand même pas diluer les responsabilités. Si par le terme de « paix juste » on entend une trêve indéfinie sur la ligne de front actuel, cela condamnerait cinq millions d’Ukrainien.nes dans les territoires occupés à vivre sous un régime d’assimilation forcée, avec en plusieurs autres millions déporté.es vers la Fédération russe proprement dite.
Je pense que le rôle du notre mouvement de solidarité est, avant tout, de contribuer à créer les meilleures conditions pour la lutte du peuple ukrainien et, en son sein, pour la gauche sociale et politique ukrainienne. Ce n’est certainement pas à nous de déterminer ce que pourrait-être les termes d’un accord de paix. Je pense qu’il nous faut être à l’écoute de ce que demandent la gauche ukrainienne, le mouvement féministe, les syndicats, le mouvement des Tatars de Crimée, les écologistes (entre autres), et de répondre à leurs appels.
Il nous faut aussi écouter la gauche et les mouvements contre la guerre en Russie même. La plupart des composantes de la gauche anticapitaliste russe pensent que la défaite de la Russie en Ukraine pourrait constituer l’élément déclencheur ouvrant une porte vers la démocratisation du pays et l’émergence de divers mouvements sociaux.
Celles et ceux qui dans la gauche occidentale prétendent que la gauche en Europe de l’Est « n’existe presque pas » se trompent.
Croire qu’un mauvais compromis ‑ sur le dos des Unkrainien.nes ‑ pourrait mettre fin à la guerre est une illusion qui me paraît dangereuse. C’est oublier les raisons pour lesquelles Poutine est entré en guerre : liquider l’Ukraine et poursuivre la reconstitution de l’Empire russe, mais aussi s’emparer de ses richesses économiques (dont son agriculture) et instaurer un régime de nature coloniale dans les zones occupées.
L’appareil d’État poutinien est gangrené par les hommes des services secrets (KGB-FSB). Il est déjà intervenu dans toute sa zone de proximité, de la Tchétchénie à l’Asie centrale et à la Syrie. Il n’existe internationalement que par ses capacités militaires, ses ventes d’armes, de produits pétroliers ou agricoles…
J’ai une défiance totale envers « nos » impérialismes dont je connais les fortraitures et que je n’ai de cesse de combattre. Je ne m’en remettrai jamais à eux pour négocier ou imposer un accord de paix. Voyez ce que sont devenus les accords d’Oslo en Palestine !
Alors, il n’est pas question pour moi que les mouvements de solidarité « entrent dans la logique des puissances » (quelles qu’elles soient). Ils doivent garder leur complète indépendance vis-à-vis, notamment, des États et gouvernements (y compris celui de Zelensky). Je le répète, nous sommes à l’écoute des forces de gauche ukrainiennes ainsi que de la gauche antiguerre en Russie.
JP : D’autre part, les États-Unis et l’UE utilisent la guerre russe en Ukraine et l’augmentation des tensions internationales comme alibi pour le réarmement et l’augmentation des dépenses militaires. Peut-on parler d’une « nouvelle guerre froide » ou même de la menace d’une guerre mondiale dans laquelle l’utilisation d’armes nucléaires n’est pas exclue ? Quelle doit être la position de la gauche anticapitaliste face à ce réarmement et à cette menace ?
PR : Je suis contre le réarmement et l’augmentation des dépenses militaires par les États-Unis et l’Union européenne.
Ceci étant dit, je pense qu’il faut élargir le propos. Une nouvelle course aux armements est engagée dans laquelle la Chine (et même la Russie) semble avoir l’initiative en plusieurs domaines, dont celui des armes hypersoniques qui rendraient inopérants les boucliers antimissiles existants ou permettraient de cibler de très loin l’armada d’un porte-avion. Rien n’a été véritablement testé, à ma connaissance, et je ne sais pas ce qui est vrai ou relève de la science-fiction, mais d’autres camarades sont certainement plus savants que moi en ce domaine.
Cependant, la course aux armements est en elle-même un problème majeur. Pour les raisons usuelles (militarisation du monde, capture par le complexe militaro-industriel d’une part exorbitante des budgets publics…), mais aussi du fait de la crise climatique, qui rend encore plus urgente la sortie de l’ère des guerres en permanence. La production d’armement et leur utilisation n’entrent pas dans le calcul officiel d’émission des gaz à effet de serre. Un terrible déni de réalité.
La menace d’utilisation de l’arme nucléaire a été plusieurs fois brandie par Poutine, sans effet (je ne lui demande pas d’être cohérent avec ses déclarations). Je doute que la menace de guerre nucléaire découle directement du conflit ukrainien en cours (j’espère ne pas me tromper), mais je pense néanmoins que c’est (malheureusement) un vrai sujet. Là aussi je vais élargir le propos.
Il y a déjà quatre « points chauds » nucléaires localisés. L’un est situé au Moyen-Orient : Israël. Trois le sont en Eurasie : Ukraine, Inde-Pakistan, péninsule coréenne. Ce dernier est le seul à être « actif ». Le régime nord-coréen enchaîne périodiquement les essais et les tirs de missiles dans une région où stationne l’aéronavale US et se trouve le plus grand complexe de bases US à l’étranger (au Japon, surtout dans l’île d’Okinawa). Joe Biden a déjà fort à faire avec l’Ukraine, la Palestine et Taïwan et se passerait bien d’une aggravation de la situation dans cette partie du monde (la Chine aussi), situation dans laquelle la responsabilité de Trump a été lourdement engagée, mais celle du dernier rejeton de la dynastie héréditaire nord-coréenne aussi.
Petit problème : il faut vingt minutes à un missile nucléaire nord-coréen pour atteindre Séoul, la capitale du Sud. Dans ces conditions, l’engagement à ne pas utiliser le premier l’arme nucléaire devient difficile à appliquer.
La France fait partie des pays qui préparent politiquement l’opinion publique à l’usage éventuel d’une bombe nucléaire « tactique ». Il faut nous opposer vigoureusement à cette tentative de banalisation. Malheureusement, il y a une sorte de consensus politique national qui fait que l’on ne fait pas de « notre » arsenal nucléaire une question de principe pour conclure des accords politiques, y compris à gauche et même quand on est pour son abolition.
La question du réarmement, de la nouvelle course aux armements, du nucléaire doit impérativement faire partie de l’activité des mouvements antiguerres de part et d’autre des frontières. Ainsi, malgré les terribles violences intercommunautaires qui ont accompagné la partition de l’Inde en 1947, la gauche pakistanaise et indienne fait conjointement campagne pour le désarmement.
Peut-on parler de « nouvelle guerre froide ». Je trouvais dans le temps cette formule très eurocentrée. En Asie, la guerre était torride (l’escalade US au Vietnam). Aujourd’hui, que voudrait-elle dire, à l’heure de la guerre russe en Ukraine ? Je comprends qu’elle soit reprise dans la presse, dans un débat, mais je pense que nous ne devrions pas l’utiliser, et ce pour deux raisons principales :
• Elle rabat l’analyse sur une approche très limitée de la géopolitique. La guerre n’est en effet « froide » que du fait qu’il n’y a pas confrontation directe entre grandes puissances. Cela n’empêche pas, mais cela ne contribue pas à une analyse concrète des conflits « chaud ».
• De façon générale, je ne suis pas féru d’analogies historiques : « sommes-nous en… ». On n’est jamais « en… », mais dans le présent. Je sais que l’histoire contribue à expliquer le présent et que le présent contribue à revisiter le passé, mais la formule « nouvelle guerre froide » illustre bien ma réticence. La « première » Guerre froide opposait le « bloc occidental » au « bloc oriental ». A cette époque, le bloc soviétique et la Chine n’entretenaient que des rapports économiques limités avec le marché mondial capitaliste. La dynamique révolutionnaire se poursuivait (Vietnam…).
Aujourd’hui, le marché mondial capitaliste s’est universalisé. La mondialisation est passée par là. La Chine en est devenue l’un des piliers. L’interdépendance économique entre elle, les États-Unis et les pays ouest-européens est étroite. On ne peut rien comprendre à la complexité du conflit sino-étatsunien sans prendre pleinement en compte ce facteur. Pourquoi alors recourir à une vielle formule pour ajouter après : mais tout est différent, bien entendu.
Je dirais que le thème de la nouvelle guerre froide convient aux campistes des deux camps. Aux campistes qui veulent justifier leur soutien à Moscou et Pékin. Ou à celles et ceux qui veulent se ranger dans le camp de la Démocratie et des Valeurs occidentales contre les autocrates.
Un petit contrepoint pour terminer : Biden est un homme du passé. Il a appris à négocier les menaces nucléaires au travers de plusieurs crises majeures. Cette expérience peut aujourd’hui lui être encore utile.
JP : Concernant la guerre d’extermination menée par l’État d’Israël à Gaza, quels sont les enjeux de cette guerre ? Pourquoi les États-Unis, malgré leur récente abstention au Conseil de sécurité de l’ONU, continuent-ils à soutenir Israël ? Quel rôle doit jouer notre solidarité internationaliste avec le peuple palestinien ?
PR : Quels sont les enjeux de cette guerre ? La survie même des Gazaouis. Un spécialiste de ces questions (l’élimination de populations) a eu une formule qui me paraît très juste. Il n’avait vu une situation aussi grave par son « intensité ». Dans d’autres cas, un plus grand nombre de personnes sont mortes, mais Gaza est un territoire minuscule qui subit une attaque multiforme d’une intensité inégalée. Même si les bombardements cessaient et que l’aide arrivait en masse, les décès se poursuivraient dans la durée.
La population entière vivra avec des stress post-traumatiques répétés, à commencer par les enfants dont le taux de mortalité est effarant. Les plus jeunes, victimes de malnutrition, n’auront jamais droit à une vie « normale ».
Autres enjeux, l’existence même de la Cisjordanie où les Palestiniens sont soumis à la violence quotidienne des colons suprémacistes juifs, appuyés par l’armée et les paramilitaires. Les Gazaouis survivants vont-ils être forcés à l’exil via l’Égypte ou la voie maritime ? Les Palestiniens de Cisjordanie survivants vont-ils être expulsés en Jordanie ? Le projet du Grand Israël va-t-il s’imposer ?
On peut inscrire dans le temps long la colonisation de la Palestine, mais nous vivons un terrible point tournant. Netanyahou n’a jamais défini ses objectifs de guerre (à part la destruction totale du Hamas, une entreprise qui n’a pas de fin). Je ne vais pas essayer de les définir à sa place, d’autant plus que la situation est volatile.
Le bombardement du consulat iranien à Damas, le 1er avril, est un exemple de la fuite en avant dans laquelle Netanyahou est engagé au-delà des frontières de la Palestine. C’est une violation flagrante de la Convention de Vienne qui protège les missions diplomatiques. La cible de l’attentat était de hauts dirigeants du Hezbollah qui s’y trouvaient, mais cela ne « justifie » rien. Il y a toujours des « ennemis » de choix dans les missions diplomatiques, dont des officiers supérieurs. Les Israéliens le savent bien, les agents du Mossad déguisés en diplomates, ayant assassiné ou enlevé plus d’une personne en pays étrangers. Il est curieux et inquiétant que ce bombardement n’ait pas suscité plus de protestations.
Téhéran ne veut pas la guerre, mais doit réagir. On est sur un fil du rasoir.
Joe Biden a construit son propre piège en assurant d’emblée son soutien inconditionnel au gouvernement israélien, par sionisme intime et sans consulter les experts de sa propre administration, ce qui lui vaut une série de démissions fracassantes. Il ne peut plus soutenir l’insoutenable, mais ne cesse pas pour autant la fourniture d’armes et munitions en Israël. Je me trompe peut-être, mais j’ai l’impression qu’il a tout simplement perdu la main diplomatique dans le monde arabe et s’occupe pour l’heure de blinder des accords de défense avec le Japon et les Philippines, au cas où Trump emporterait la prochaine présidentielle.
[Une mise à jour : l’Iran a mené une attaque aérienne contre Israël dans la nuit du 13 au 14 mars. Selon un décompte israélien, plus de 300 projectiles ont été tirés : 170 drones, 30 missiles de croisière et 110 missiles balistiques. Téhéran avait annoncé l’opération, confirmée par les États-Unis. Il faut plusieurs heures pour que ces armes atteignent Israël, ce qui laissait tout le temps nécessaire en abattre en bonne partie sur le trajet. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Jordanie y ont contribué. Une base militaire israélienne a néanmoins été touchée. L’objectif de cette opération était clairement politique, un avertissement en réponse à l’attentat de Damas. C’était la première fois que le régime iranien s’attaquait ainsi directement à Israël. Téhéran a annoncé que son opération n’aurait pas de suite, si du moins les Israéliens s’en tenaient là. Face à l’Iran, Joe Biden est toujours en mesure d’activer un front de pays occidentaux et arabes. La dépendance d’Israël envers ses protecteurs se confirme.]
Venons-en à la dernière question. Quelles sont, à mon sens, les tâches d’une solidarité internationaliste avec le peuple palestinien ?
Tout d’abord, l’urgence absolue, sur laquelle une très large unité peut se faire : cessez-le-feu immédiat, entrée d’une aide massive par toutes les voies d’accès à la bande de Gaza, protection des convois et des travailleur.es humanitaires (nombreux sont celles et ceux qui ont été tués), reprise de la mission de l’UNRWA dont le rôle est irremplaçable, arrêt de la colonisation en Cisjordanie et rétablissement dans leurs droits des Palestien.nes spolié.es, libération des otages israélien.nes et des prisonnier.es politiques palestinien.nes…
Nous défendons sans « mais » le droit à la résistance, y compris armée, des Palestiniens ; mais cela n’implique ni un soutien politique au Hamas ni de nier que des crimes de guerre ont été commis le 7 octobre, ce dont attestent de nombreuses sources indépendantes. Parmi ces sources mentionnons l’association Physicians for Human Rights-Israel (Médecins pour les Droits Humains, PHRI) ; des villageois bédouins du Néguev qu’Israël refuse de protéger, mais qui ont subi des attaques répétées de la part du Hamas ; des militantes et militants israélien.nes qui ont consacré leur vie à défendre les droits des Palestinien.nes…
Le Hamas est aujourd’hui la principale composante militaire de la résistance palestinienne, mais est-il porteur d’un projet émancipateur ? Nous avons toujours analysé les mouvements engagés dans les luttes de libérations que nous soutenions. Pourquoi serait-ce différent aujourd’hui ?
Notre rôle d’internationaliste est, aussi, de tracer un fil, aussi ténu soit-il entre les tâches présentes et un avenir émancipateur. Nous défendons le principe d’une Palestine où pourront vivre ensemble les habitant.es de cette contrée historique « entre la mer et le fleuve » (inclus le retour des réfigié.es palestinien.nes). Cela n’arrivera pas sans de profonds bouleversements sociaux dans la région, mais nous pouvons donner corps à cette perspective en soutenant les organisations qui agissent aujourd’hui ensemble, juives/juifs et Arabes/Palestinien.nes, envers et contre tout. Toutes et tous prennent de gros risques pour continuer à afficher cette solidarité judéo-arabe dans le contexte actuel. Nous leur devons la solidarité.
La solidarité judéo-arabe est aussi l’une des clés de développement des mobilisations internationales, notamment aux États-Unis où le mouvement Jewish Voice for Peace a joué un rôle très important pour contrer la propagande des lobbies pro-israéliens et ouvrir l’espace de la contestation.
Comment analyses-tu la stratégie de politique étrangère de la Chine et son conflit avec Taïwan ?
Je pense que Xi Jinping a pour priorité la poursuite de l’expansion mondiale de la Chine et sa consolidation, la compétition avec les États-Unis dans le domaine des hautes technologies à double usage civil et militaire, la recherche d’alliances diplomatiques significatives (un talon d’Achille face aux États-Unis), le développement de ses propres zones d’influences dans des régions jugées à ce stade stratégique (comme le Pacifique sud), le renforcement de ses capacités militaires aéronavales et spatiales ou de surveillance et de désinformation. L’invasion de Taïwan ne serait pas à l’ordre du jour.
Les voies d’expansion de la Chine diffèrent de ses prédécesseurs. L’époque a changé. Pékin ne possède qu’une grande base militaire classique, à Djibouti. Cependant, elle signe des accords avec un nombre croissant de pays pour avoir accès à leurs ports. Mieux, elle en prend possession en tout ou partie, ce qui lui assure un réseau maritime étendu de points d’attache à double usage civil et militaire. Les services de sécurité présents dans les entreprises chinoises à l’étranger sont assurés par des militaires, ce qui permet à l’armée de s’informer et d’établir des contacts.
La politique chinoise est de caractère impérialiste et on voit mal comment il pourrait en être autrement. Toute grande puissance capitaliste se doit de garantir la sécurité de ses investissements et de ses communications, la rentabilité politique et financière de ses engagements.
Pékin a proclamé sa souveraineté sur l’entièreté de ladite mer de Chine du Sud, une zone de transit international majeure, qu’elle a militarisé sans tenir compte des droits maritimes des pays voisins. Elle s’approprie les richesses halieutiques et prospecte les fonds marins. Un régime autoritaire emploie des méthodes autoritaires partout où il pense pouvoir le faire. Certes, un régime impérialiste dit démocratique peut faire de même…
JP : Outre la prolongation des situations de guerre en Syrie, au Yémen, au Soudan ou en République démocratique du Congo, il existe une guerre dont on parle peu en Occident, en Birmanie. Pourriez-vous commenter l’état actuel de ce conflit ?
PR : Un mot sur le Soudan. Il y a dans ce pays une riche expérience de résistances populaires « à la base », dans des conditions extrêmement difficiles, qui mériterait d’être mieux connues (et soutenues).
La Birmanie a constitué un cas d’école. Les militaires ont assuré leur mainmise exclusive sur le pouvoir à l’occasion d’un putsch, le 1er février 2021. Le lendemain, le pays entrait en dissidence sous la forme d’un arrêt de travail généralisé et d’un immense mouvement de désobéissance civile. Le putsch avait avorté, mais l’armée n’a pas pu être chassée, faute d’un soutien international immédiat. Les militaires ont pu reprendre progressivement l’initiative par une répression sans merci. Dans la région centrale, initialement pacifique, la résistance populaire a dû entrer en clandestinité, puis s’engager dans la résistance armée. Elle a recherché l’appui de mouvements ethniques armés opérant dans les États de la périphérie montagnarde du pays.
Il est difficile d’imaginer un mouvement de résistance civique plus ample que celui qu’a connu la Birmanie – mais l’entrée dans la lutte armée s’est imposée comme une nécessité vitale, fondant sa légitimité sur l’évidence de l’autodéfense. Cela lui a permis de traverser l’épreuve du feu et de s’organiser progressivement sous forme de guérillas indépendantes ou liées au Gouvernement d’Unité nationale, expression du parlement dissous par les militaires et (enfin) ouvert aux minorités ethniques.
Le conflit a pris des formes terriblement dures, l’armée ayant notamment le monopole de l’aviation. Il était aussi complexe, chaque État ethnique ayant ses propres caractéristiques et choix politiques. Peu à peu, cependant, la junte a perdu la main. Elle avait l’appui de la Chine (pays frontalier) et de la Russie, mais s’est révélée incapable de garantir à Pékin la sécurité de ses investissements et la construction d’un port donnant accès à l’océan Indien. Son isolement international s’est accentué et ses alliés de l’ASEAN se sont divisés.
Aujourd’hui, l’armée cède du terrain dans de nombreuses régions et le front d’opposition à la junte s’est élargi. La Birmanie est un pays à l’histoire très riche, mais malheureusement méconnue en Occident.
JP : Pour conclure, l’aggravation de la crise économique et la multiplication des conflits tant au niveau international que régional semblent indiquer un tournant dans le contexte international qui nécessite de repenser les politiques de solidarité internationaliste. Quelles sont les pistes pour construire un internationalisme en phase avec l’évolution des conflits internationaux au XXIe siècle ?
PR : Il y a une recomposition en profondeur avec pour ligne de force l’opposition entre « campisme » et internationalisme. Nous pouvons avoir de nombreuses différences d’analyses, mais la question est de savoir si nous défendons toutes les populations victimes.
Chaque puissance choisit les victimes qui lui conviennent et abandonnent les autres. Nous nous refusons à entrer dans ce type de logique. Nous défendons les droits des Kanaks en Kanaky quoi qu’en pense Paris, les Syrien.nes et les peuples de Syrie face à l’implacable dictature du clan Assad, les Ukrainiennes et Ukrainiens sous le déluge de feu russe, les Palestiniennes et Palestiniens sous le déluge des bombes US, les Portoricain.es sous l’ordre colonial étatsunien, les peuples de Birmanie même quand la junte est soutenue par la Chine, les Haïtiens à qui protection et asile sont refusés par ladite « communauté internationale ».
Nous n’abandonnons pas des victimes au nom de considérations géopolitiques. Nous soutenons leur droit à décider librement de leur avenir et, quand telle est la question, leur droit à l’autodétermination. Nous nous retrouvons avec les mouvements progressistes qui, de par le monde, récusent la logique de « l’ennemi principal ». Nous ne sommes dans le camp d’aucune grande puissance, qu’elle soit nippo-occidentale, russe ou chinoise. L’occupation est un crime en Ukraine comme en Palestine.
Face à la militarisation du monde, nous avons besoin d’un mouvement antiguerre mondial. C’est vite dit, mais bien difficile à faire. Pouvons-nous nous appuyer sur des solidarités transfrontalières locales (Ukraine-Russie, Inde-Pakistan) pour ce faire ? Ou sur l’immense mouvement de solidarité avec la Palestine ? Sur les forums sociaux comme celui qui vient de se réunir au Népal ?
Il nous faut aussi intégrer la question climatique à la problématique des mouvements antiguerres et, réciproquement, les mouvements écologistes militants gagneraient, si ce n’est déjà fait, à intégrer la dimension antiguerre à leur combat. Idem concernant l’arme nucléaire.
La personnalité de Greta Thunberg me semble incarner le potentiel des jeunes générations confrontées à la violence de la « polycrise ». Mais ses engagements demandent de la ténacité, ce dont elle ne manque certes pas, une capacité à agir dans la durée, ce qui n’a rien d’évident. Ma génération militante avait été lancée sur orbite par la radicalité des années 1960 et, pour nous en France, par l’expérience fondatrice de Mai 68. Une sacrée impulsion. Qu’en est-il aujourd’hui ?
• Interview à paraître dans le prochain numéro de Viento sur.
Une mise à jour a été introduite le 14 avril à 16h30 concernant l’attaque aérienne lancée par Téhéran contre Israël dans la nuit du 13 au 14 avril.
Une correction a été apportée le 15 avril 2014.
Paru dans Viento Sur, 16 avril 2024 :
Crisis mundial, conflictos y guerras: ¿qué internacionalismo para el siglo XXI? – Viento Sur
Publié le 03.05.2024 à 15:22
Le 5 avril 2024, le Mouvement socialiste russe a été reconnu comme « agent étranger ». Quel rôle cette organisation a-t-elle joué dans la politique de gauche russe ? Qu’est-ce qui lui a valu d’être reconnue comme « agent étranger » ? Avec les participants du Mouvement, nous nous souvenons de son histoire de la dernière décennie.
Le 5 avril 2024, le Mouvement socialiste russe a été reconnu comme « agent étranger ». C’est le premier précédent où les autorités interdisent effectivement une organisation de gauche : il est évident que la loi répressive et antidémocratique de Poutine ne laisse aucune possibilité d’activité politique sous ce nom. Néanmoins, si l’on considère l’« agence étrangère » comme une sorte d’évaluation de la part du régime, alors c’est bien mérité. Au cours des treize années de son histoire, le MSR s’est toujours opposé à l’agression militaire, à la dictature et au manque de droits de la majorité ouvrière. La rédaction de Posle.Media s’est tournée vers trois membres de l’organisation pour rappeler toutes les étapes de son parcours, qui coïncide en grande partie avec l’histoire politique de la Russie de la dernière décennie.
Ilya Budraitskis, philosophe politique, historien
Le congrès fondateur du Mouvement socialiste russe (RSM) a eu lieu au printemps 2011. C’est le moment qui précède des événements politiques majeurs qui changent largement le cours de l’histoire du pays : en septembre, Poutine annoncera son retour à la présidence, et en décembre, des manifestations « de masse » commenceront à Moscou. Il est symbolique que le congrès de la nouvelle organisation, qui regroupait plusieurs groupes socialistes, se soit tenu dans la salle du Centre Sakharov, qui a ensuite été détruit par les autorités.
Le manifeste du MSR, adopté à l’époque, déclarait : « le mouvement de gauche russe se trouve dans une situation où… la crise du système politique s’aggrave, la demande d’une alternative politique augmente dans les couches les plus larges de la société. » Le mouvement créé n’a donc pas essayé de se présenter comme le porteur du seul véritable programme révolutionnaire et n’a pas considéré sa propre construction organisationnelle comme une fin en soi. Notre tâche était de relancer le processus de création d’une large union des forces de gauche, qui deviendrait un pôle socialiste indépendant dans le futur mouvement d’opposition de masse. Le futur proche a prouvé la validité de cette analyse.
Le 10 décembre 2011, lors du premier rassemblement de plusieurs milliers de personnes sur la place Bolotnaïa, le MSR était représenté par une colonne impressionnante, et le tirage d’un numéro spécial de notre journal s’est épuisé en quelques minutes. Au cours des mois suivants, le MSR a pris une part active à tous les événements clés du mouvement de protestation naissant : des représentants de l’organisation ont pris la parole lors de rassemblements à Moscou et à Saint-Pétersbourg, pendant les deux semaines du célèbre « Occupy Abai », nous avons publié un quotidien, participé aux élections du Conseil de coordination de l’opposition et même mené des raids de propagande lors de rassemblements de soutien à Poutine (au cours desquels, à l’époque comme aujourd’hui, les travailleurs des institutions budgétaires étaient rassemblés sous la contrainte en masse). Durant cette période, la composition de l’organisation a beaucoup changé : à la suite des manifestations, nous avons attiré de nouveaux camarades, mais avons perdu un certain nombre d’anciens qui critiquaient la tactique de participation active au mouvement démocratique de masse. Notre position – l’inséparabilité de la lutte pour le changement social et des droits démocratiques fondamentaux – se démarquait déjà fortement sur fond de groupes staliniens et sectaires, qui sous-estimaient le danger de voir le pays glisser vers une dictature ouverte.
Après l’annexion de la Crimée et l’intervention russe dans le Donbass, le MSR s’est opposé sans équivoque aux aventures impériales du régime Poutine, dont les victimes n’étaient pas seulement les Ukrainiens mais aussi les Russes ordinaires. Lors de la marche contre la guerre à Moscou au printemps 2014, la colonne du MSR a défilé sous le slogan « Le peuple paie toujours pour la guerre » – aujourd’hui, dans la troisième année d’une guerre à grande échelle qui a coûté des centaines de milliers de vies, cette affirmation sonne particulièrement vraie. En 2014-2015, sur fond d’hystérie chauvine dispersée par les autorités, le MSR n’a pas eu peur d’aller à contre-courant, répétant sans cesse dans sa propagande : « le principal ennemi siège au Kremlin ».
Kirill Medvedev, poète, traducteur, musicien
Depuis 2017, le MSR connaît un revirement municipal et électoral. En 2017, nous avons participé aux élections municipales à Moscou et en 2019, nous avons rejoint la campagne de Sergueï Tsukasov pour la Douma municipale de Moscou. Tsukasov, un démocrate de gauche qui, à l’époque, était actif avec succès dans la politique régionale depuis plusieurs années, était à la tête du conseil du district d’opposition d’Ostankino. Sergueï était soutenu par le Parti communiste de la Fédération de Russie, il avait toutes les chances de gagner, c’est pourquoi peu avant le jour du vote, il a été exclu de la course sur la base d’accusations forgées de toutes pièces. Nous avons participé à de grands rassemblements à Moscou pour exiger sa réintégration ainsi que celle d’autres candidats de l’opposition démis de la participation au scrutin. En conséquence, le quartier général de Sergueï a soutenu le candidat de Yabloko, qui, grâce à des efforts communs, a vaincu l’odieux candidat des autorités. C’était un bon exemple de coopération entre les oppositions dans le district. Depuis, nous avons beaucoup participé aux événements régionaux à Ostankino.
En 2021, nous avons rejoint la campagne de Mikhaïl Lobanov pour la Douma municipale de Moscou. Nos militants ont fait diverses choses – depuis la définition de l’ordre du jour et la rédaction du journal du district jusqu’au travail sur le terrain. La campagne de Lobanov a montré qu’un socialiste qui a rassemblé pour sa campagne diverses personnes constructives et partageant les mêmes idées peut devenir un leader de l’opposition générale dans une immense région d’un million d’habitants. Nous avons également travaillé avec d’autres députés et hommes politiques de gauche, par exemple avec Vitaly Bovar à Saint-Pétersbourg, et avons présenté nos propres candidats, par exemple Kirill Shumikhin à Ijevsk. En 2022, nous avons soutenu le projet « Promotion » qui est proche de nous.
Les élections sont l’occasion de travailler sur un projet avec un calendrier fixé et un résultat réalisable. Il s’agit d’une expérience nécessaire pour les groupes de gauche, qui agissent généralement en mode de réaction d’urgence, essayant de répondre à des initiatives gouvernementales bien planifiées et soutenues par d’énormes ressources. De plus, les élections sont l’occasion de contacter les habitants qui, malgré une dépolitisation massive, ont beaucoup plus de confiance et d’intérêt pour le candidat à la députation et son équipe que pour les militants tiers, dont les objectifs et les motivations sont le plus souvent incompréhensibles et suspects pour les gens…
Sasha Davydova, militante MSR
Le jour où commença l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, des membres du MSR manifestèrent dans la rue contre la guerre. Je me souviens de la façon dont nous avons imprimé à la hâte des tracts et les avons distribués dans les rues, en formant des piquets individuels. […]. Les protestations ont passé, mais dès le même jour, il était évident que la guerre changeait radicalement les conditions du jeu. Les changements politiques intervenus dans le système ont placé toute action politique organisée dans un cadre encore plus répressif que jamais.
Agissant dans le cadre d’une législation de guerre, nous avons dû nous adapter aux nouvelles réalités. Depuis le 24 février, l’une des tâches principales a été de ne pas piéger nos camarades, d’assurer la sécurité et de préserver l’organisation. La question se pose de savoir comment agir, mais le MSR reste fidèle à lui-même pendant la guerre. Les participants au mouvement ont fait un choix : quitter la Russie ou ne pas la quitter, mais la plupart d’entre eux sont restés actifs.
Depuis 2022, le MSR s’est développé en tant que média de gauche et notre agenda s’est également élargi. Nous avons commencé à réfléchir et à parler davantage de décolonisation, en essayant de déplacer l’optique du débat au sein de l’opposition vers la gauche. Nous avons continué à investir dans l’agenda syndical et à soutenir les syndicats indépendants. Nos militantes ont défendu avec vigueur l’agenda social féministe. Elles ont participé à des actions contre la violence sexiste et organisé des campagnes contre les attaques conservatrices visant l’autonomie corporelle des femmes. Dans le domaine éducatif, le MSR organisait des écoles pour les étrangers et des séances de lecture. Nous avons travaillé pour ne pas nous replier sur nous-mêmes, pour ne pas rester isolés, mais pour déplacer le discours de l’opposition vers l’agenda démocratique de gauche : parler d’inégalités flagrantes, écrire sur les grèves et les violations des droits du travail, faire campagne contre la violence d’extrême droite, etc…
À l’étranger, le MSR a noué des liens de solidarité internationale avec d’autres organisations de gauche. Hors de Russie, les militants pouvaient se permettre de lancer ouvertement des slogans contre l’impérialisme, de s’aligner sur les syndicats le 1er mai, d’organiser des manifestations antifascistes et des actions de solidarité avec les prisonniers politiques russes.
Nous avons organisé l’action pour un « Monde Juste » lors des « élections » présidentielles. Cette campagne était un vote contre tous [les candidats officiels] et en même temps un programme socialiste minimum qui unissait la gauche en une coalition (et unir la gauche est un succès en soi). La campagne pour un monde juste a combiné une action politique légale et une campagne active sur le terrain, ce qui n’a pas légitimé les soi-disant élections, entièrement orchestrées par le Kremlin. Je crois que leurs résultats montrent que notre position s’est avérée la meilleure possible, car s’appuyer sur l’un des candidats artificiels (en particulier Davankov) n’aurait jamais pu devenir le miroir des sentiments de protestation. La Campagne pour un monde juste visait à unir et à politiser les voix réclamant la paix, l’égalité et la justice. Et ce potentiel ne sera pas perdu.
Source : https://posle.media/soczializm-zapreshhaetsya/
Document transmis par l’équipe du Samizdat 2.0
Publié le 03.05.2024 à 14:57
Lyon, le 02 mai 2024
Semaine de mobilisation du collectif 69 de soutien au peuple ukrainien
Le 26 avril, journée du 38ème anniversaire de l’explosion de Tchernobyl, le collectif Ukraine 69 était présent avec la coordination antinucléaire du Sud est sur le pont Wilson à Lyon. Il a pris la parole pour rappeler le danger qui demeure 38 ans après dans la zone large de Tchernobyl.
Il a dénoncé le danger du chantage nucléaire de « Poutine, Medvedev et Lavrov [qui] banalisent l’utilisation du nucléaire, en envisageant des frappes sur l’Ukraine, voire sur des capitales européennes. Ils habituent ainsi les Russes et les Biélorusses à cette utilisation de l’arme nucléaire, qui pourrait très bien survenir avec l’explosion de la centrale de Zaporijjia ».
Le 26 avril au soir, c’était un débat à l’aquarium café à la Croix Rousse autour du film de Loup Bureau « Tranchées » qui raconte la vie des soldats ukrainiens et d’une soldate qui, sur la ligne de front du Donbass, affrontent des séparatistes soutenus par la Russie. Ce film âpre, touchant avec une photo soignée nous montre la guerre au quotidien : des bombardements, des tirs de riposte, mais surtout de l’attente. Il montre aussi les espérances, les coups de blues de soldats qui défendent leur pays. Le film fut suivi d’un débat animé par le collectif avec Wanda Mykola et Philippe.
Et le 1er mai le collectif a affiché le long du défilé des manifestants une banderole « Troupes russes, hors d’Ukraine » en distribuant un tract affirmant notamment notre soutien aux syndicats ukrainiens qui luttent ainsi sur 2 fronts : en défense des droits sociaux et contre l’invasion des troupes de Poutine.
Notre tract dénonçait « l’invasion impérialiste de l’Ukraine par la Russie…. qui commet des crimes de guerre à caractère génocidaire ». Il demandait entre autre « des sanctions économiques réelles », « l’interdiction des exportations des biens à double usage ( civil et militaire) […] la confiscation des avoirs en France de Poutine et de ses amis oligarques afin de financer et de reconstruire les espaces dévastés en Ukraine, ce qui serait une première étape dans les réparations. »
Cette banderole et notre tract furent bien accueillis avec des manifestants qui venaient nous féliciter, des syndicalistes de Solidaires, de la CGT ou de la FSU, militants politiques ou associatifs et même une jeune ukrainienne qui est venue nous dire merci en criant « Slava Ukrayïni ».
Cette semaine de mobilisation nous montre qu’il y a une évolution des consciences, sans doute parce que le vrai visage du gouvernement de Poutine révèle ses intentions bellicistes pas seulement en Ukraine. C’est pour cela que le collectif Ukraine doit se renforcer et renforcer son soutien au peuple ukrainien.
Et les Ukrainiens aussi ont besoin de notre soutien, d’autant plus, comme le disait notre tract « qu’ils savent qu’une victoire de Poutine signifierait la fin de l’Ukraine, une régression sociale d’ampleur, la destruction de leurs organisations syndicales et des libertés démocratiques. »
Et nous savons que leur défaite signifierait une extension de la guerre avec d’autres annexions en Europe centrale.
SLAVA UKRAYINI !
Collectif 69 de soutien au peuple ukrainien
- Contact : Ligue des Droits de l’Homme
- 34 Cours de Verdun 69002 Lyon – fede.rhone@ldh-france.org
Le tract du Collectif 69 distribué à la manifestation syndicale
tract-Collectif-69-Ukraine_pour-1er-mai-2024Télécharger