pour la lutte sociale
BLOG COLLECTIF - L.N Chantereau, Olivier Delbeke, Robert Duguet, Alexis Mayet, Luigi Milo, Vincent Presumey ...
Publié le 08.03.2025 à 11:47
Menaces contre les femmes militantes pendant la guerre. Par Olena Rasenko.
aplutsoc
Publié le 05.03.2025 à 17:27
D’un singulier tournant gaulliste et des devenirs de la gauche en Europe. Par Martin Vander Elst.
aplutsoc
Publié le 08.03.2025 à 11:47
Menaces contre les femmes militantes pendant la guerre. Par Olena Rasenko.
122 militantes ont participé à l’enquête et 31 entretiens approfondis ont été menés. L’enquête en ligne a duré du 28 novembre 2024 au 19 février 2025.
Le Centre des droits humains ZMINA, en collaboration avec la Fondation des initiatives démocratiques Ilko Kucheriv, a présenté les résultats d’une étude sociologique consacrée aux risques auxquels sont confrontées les femmes militantes en Ukraine, ainsi qu’à l’impact d’une invasion à grande échelle sur leurs activités.
Voici quelques conclusions clés de l’étude :
1. Types de persécution et expériences personnelles
La majorité des répondantes ont signalé des formes de harcèlement telles que des menaces en ligne et de l’intimidation sur les réseaux sociaux (80,3 %), du discrédit dans les médias et les cercles publics (75,4 %) et de la discrimination fondée sur le sexe (72,9 %). Les types de harcèlement les moins courants étaient la violence physique (42,6 %), le harcèlement juridique (31,9 %), les dommages matériels (28,7 %) et la violence sexuelle (23,8 %).
Plus d’un tiers (37,7 %) des femmes militantes déclarent avoir été victimes de harcèlement en raison de leur engagement civique actif. Il convient de noter que dans les petites localités, la probabilité de devenir l’objet de harcèlement est beaucoup plus élevée : dans les grandes villes, 30,3 % des répondants y ont été confrontés, dans les petites villes – 52 % et dans les zones rurales – 63,6 %. Ainsi, dans un village, la probabilité d’être victime de harcèlement est deux fois plus élevée que dans une grande ville.
2. Protection de l’État
La plupart des femmes militantes estiment que l’État ne protège pas suffisamment leurs droits : 49,2 % affirment que les efforts ne sont pas suffisants et 27,9 % affirment que l’État n’assure aucune protection. Les évaluations négatives sont le plus souvent données par les répondants les plus jeunes.
Parmi les mesures que l’État devrait prendre pour améliorer la situation, la plus grande attention est accordée aux suivantes : enquêter efficacement sur les menaces et les attaques (86,9 %), prévenir et répondre au harcèlement en ligne (81,1 %), augmenter le niveau de sécurité numérique (66,4 %), fournir un soutien psychosocial (63,9 %) et assurer la sécurité physique en cas de menace (56,5 %).
3. Activisme pendant la guerre
Actuellement, les domaines d’activisme les plus courants parmi les femmes militantes sont liés aux droits des femmes, au soutien aux forces armées ukrainiennes et aux activités visant à faire face aux conséquences d’une invasion à grande échelle.
7 mars 2025
Source : RESU / PLT
Publié le 08.03.2025 à 11:38
Échos du 8 mars 2025 à Kharkiv.
Le 8 mars, lors de la journée internationale des droits des femmes, Sphère, association de femmes a organisé une action à laquelle ont participé plusieurs dizaines de personnes. La première partie de l’action était dédiée à honorer la mémoire des défenseurs et défenseuses de l’Ukraine tombées, et la deuxième, visant la question de la sécurité de la ville.
L’action a commencé avec une minute de silence à 9 h du matin au centre de Kharkiv. Les participantes ont apporté des portraits de défenseuses mortes, de drapeaux ukrainiens et féministes. L’hommage s’est tenu sous le slogan « Gloire aux héroïnes !».
Ensuite, elles ont placé des affiches et des autocollants sur les installations « festives » mises en place par le conseil municipal pour souligner : face à la guerre, la priorité est la sécurité des femmes, pas les décorations symboliques.
Des femmes ont pleuré et ont dit des mots de soutien aux participantes, certains hommes au contraire ont été outrés par l’inutilité de cette action.
« Aujourd’hui, nous sommes descendues dans les rues de la ville pour honorer les femmes qui ont donné leur vie pour l’Ukraine Et aussi pour rappeler que la sécurité de la ville doit être une priorité dans les autorités de la ville, pas des fleurs artificielles » a partagé Anastasia Popova, une participante.
Nous soulignons que la lutte pour les droits des femmes est toujours actuelle et devrait être une priorité même pendant la guerre
8 mars 2025
Sphère, association de femmes.

Source : RESU /PLT
Publié le 08.03.2025 à 00:28
Gerry Healy contre les femmes, par Vincent Presumey.
J’ai commencé à écrire le présent travail comme une sorte de parcours biographique concernant Gerry Healy, qui devait donc être logiquement titré Gerry Healy. Ce qui l’avait suscité est la parution, en 2024, chez Pluto Press, d’un livre de l’universitaire irlandais Aidan Beatty, The Party is always right. The Untold Story of Gerry Healy and British Trotskysm, qui tente de faire une mise au point d’ensemble sur ce personnage, le pire personnage de l’histoire du trotskysme.
Pourquoi cet intérêt ? Eh bien, il y a une ombre de Healy et du « healysme » en France, provenant du souvenir que ce courant fut, pendant une quinzaine d’année, l’organisation « sœur » de l’OCI, le courant « lambertiste », une sorte de réplique outre-Manche qui aurait eu beaucoup de traits communs avec lui, mais « en pire » – en bien pire. Ce n’est toutefois qu’une ombre, une rumeur : une information sérieuse sur le « healysme » nous manque. Réciproquement, le point de vue français est quasiment absent dans l’abondante littérature de langue anglaise sur le sujet, Aidan Beatty compris.
Sur le plan historique et de la réflexion sur les formes d’organisation, le sujet apparaît important, mais spécifique : une fraction-secte « nationale-trotskyste » qui a fini par exploser car son chef, vrai autocrate, a été convaincu de harcèlements sexuels. Cela, bien avant que ce type d’atteintes aux personnes ne soit un « vrai sujet » : en 1985.
L’une des rares, peut-être la seule, politesse exquise de Gerry Healy, bien involontaire, fut d’avoir cassé sa pipe presque en même temps que l’URSS, le 14 décembre 1989. Dans les nécrologies qui parurent alors, l’un des titres les plus frappants fut trouvé par Alan Thornett, figure du syndicalisme ouvrier britannique et militant trotskyste : The Ceaucescu of the British Trotskyist movement (Socialist Outlook, février 1990). Ceaucescu, le petit Staline roumain, venait alors juste d’être renversé, et prestement liquidé pour qu’il ne parle pas.

Formule d’autant plus frappante que, dans son article nécrologique, A. Thornett n’en mesurait pas lui-même toute la portée : dire que le mouvement trotskyste a pu avoir quelque part un « Ceaucescu », autrement dit qu’il a pu y avoir des « Staline » dans le mouvement trotskyste, soulève de redoutables questions, car cela revient à l’envisager comme une réplique, à plus petite échelle, des États staliniens dits « ouvriers », des organisations cloisonnées voire des sortes de prisons dont certaines ont pu être totalement dominées par un tyran.
Healy fut un cas extrême mais nous savons bien que, en tant que monstruosité, il s’inscrit dans le cadre d’une espèce, dont il a poussé certains traits à un degré insupportable. Là était pour moi le problème à étudier.
Mais en cours de route, j’ai été conduit à lire d’autres publications dans la nombreuse bibliographie anglaise disponible sur le net, dont je mentionnerai des ouvrages au fur et à mesure, puis un livre que je me suis procuré, car Aidan Beatty s’y référait à diverses reprises et il avait attiré mon attention : My Search for Revolution. How we brought down an abusive leader, de Clare Cowen, Kindle Edition, paru en 2019. Ce récit autobiographique émouvant d’une femme qui a vécu 20 ans de sa vie sous l’emprise de Healy et a contribué à le vaincre et à s’affirmer elle-même comme personne, comme militante et comme féministe, en brisant l’appareil que Healy avait construit – qu’elle et ses amies pensaient préserver, mais qu’elles ont en fait brisé, et elles s’en sont d’autant mieux portées ! – a retourné profondément mon approche.
En effet, ce travail avait été commencé dans le prolongement de plusieurs de mes articles sur l’histoire du trotskysme, notamment de l’OCI française, mais aussi sur celle d’autres courants et, récemment, de Pablo. Mais je découvrais que la chute finale du healysme, dont l’histoire commence dans un cadre commun à celles que j’avais traités précédemment, fut un évènement d’une importance qui va bien au-delà, mais qui fut ignoré, inaperçu voire minimisé : c’est la révolte, terriblement difficile au départ, d’un groupe de femmes qui a détruit un appareil politique bureaucratique.
Ce changement de perspective globale s’est imposé à moi alors que ce travail était déjà largement rédigé, des origines à la fin des années 1970. Mais le récit des évènements terminaux en modifie la signification d’ensemble et en fait un chapitre important d’une histoire principalement féministe, relevant du combat pour l’émancipation des femmes, et de toute l’humanité, envers la domination masculine.
Je n’ai pas tout réécrit dans cette perspective telle qu’elle s’est imposée – principalement ce préambule, car l’approche historique qui prend le cours des évènements dans leur ordre chronologique reste tout à fait indispensable, et la perspective féministe prend ici sa centralité non au début, mais à la fin, de l’histoire. Cependant, je peux dire aux lectrices et aux lecteurs que, je l’espère, leur intérêt devrait grandir, comme il a grandi pour moi, quand approche la crise finale ; et qu’elles et ils peuvent d’ailleurs, s’ils le souhaitent, commencer par lire les dernières sections, à partir de la grève des mineurs de 1984-1985, pour reprendre ensuite l’ensemble depuis le début.
Il n’était, du coup, moralement plus question d’intituler ce travail Gerry Healy, bien que sa construction chronologique suive le parcours politique de Gerry Healy. J’aurai aimé l’appeler Aileen Jennings, car c’est elle la victime, la combattante, la tombeuse du healysme, c’est elle qui mérite des fleurs et l’hommage de l’histoire. Mais c’était inexact, car ceci n’est pas du tout une biographie de Aileen Jennings. J’ai donc opté pour une cote mal taillée, et trouvé ce titre : Gerry Healy contre les femmes. Même pas Les femmes contre Gerry Healy, qui aurait convenu à toute la partie qui commence avec la grève des mineurs, puisque ce qui la précède est la genèse, l’essor et la putréfaction parasitaire de ce phénomène bureaucratique à gestation progressive qu’il faut bien appeler le « healysme ». Et à vrai dire, l’oppression des femmes dans cette histoire a été combattue par certaines, mais pas par toutes : Healy a aussi eu des sectateurs femmes, des sectatrices !, passionnées et indécrottables (la plus célèbre est Vanessa Redgrave).
Par choix politique et parce qu’elles méritent un immense respect, les trois portraits surplombant ce travail sont ceux des trois femmes, ses victimes, qui l’ont vaincu : Aileen Jennings, Clare Cowen, Dot Gibson. Des photos de Healy sont placées plus bas. Et cette publication, terminée début mars, est rendue publique ce 8 mars qui suit de quelques mois, en France, le « procès Pélicot ».
VP.
Publié le 05.03.2025 à 18:48
A l’approche de la manifestation féministe et syndicale du 8 mars, il circule sur Paris un appel à interdire la manifestation « aux fascistes et aux sionistes » ainsi amalgamés.
Cet appel établit un parallèle, qui est de fait un amalgame, entre Némésis, groupe d’extrême droite qui doit être expulsé s’il tente de venir dans une telle manifestation, et le collectif Nous Vivrons, dont la présence avait été actée par les organisateurs officiels de la manifestation le 8 mars dernier – nous n’avons pas connaissance de leur position cette année.
Rappelons que déjà le 8 mars 2024, ce collectif avait été admis dans la manifestation par les organisateurs, qu’il avait été la cible de provocations soi-disant « pro-palestiniennes » et qu’il avait lui-même eu recours à un SO masculin et patibulaire, fourni par le CRIF, le SPCJ. Il appartenait et il appartient aux organisations syndicales et féministes d’assumer le service d’ordre dans de telles situations.
Le collectif Nous Vivrons a diffusé un communiqué dénonçant toute confusion entre lui-même et Némésis qu’il qualifie (à juste titre) de raciste. Quoi que l’on pense des orientations politiques de ce collectif et de telles ou telles de ses membres, le fait central est que des femmes juives ont le droit imprescriptible de manifester le 8 mars aux côtés du mouvement syndical et féministe, au même titre que les femmes palestiniennes ou ukrainiennes.
Bien entendu, l’appel à les expulser se prévaut de la « cause palestinienne ». Il faut être clair : ce n’est pas défendre la cause palestinienne que d’appeler à attaquer physiquement, car c’est bien de cela qu’il s’agit, des femmes juives souhaitant manifester le 8 mars en tant que telles, aux côtés du mouvement féministe et du mouvement syndical. Dans la pratique, il s’agit d’une prise de position et d’une menace qui n’a rien à voir avec la défense des droits nationaux et démocratiques des Palestiniens, rien à voir avec la lutte contre les massacres et déportations que les Palestiniens subissent ainsi que les Ukrainiens : il s’agit d’une provocation menaçant l’ordre et l’unité dans la manifestation au profit des antisémites.
Que cet appel aligne des signatures allant d’Urgence Palestine à PEPS en passant par la Marche des solidarités souligne le niveau de confusion et d’impréparation de beaucoup face à l’offensive du fascisme global porté par l’Axe Trump/Musk/Poutine.
Car là se situe le vrai danger. C’est une provocation contre la manifestation féministe et syndicale qui est en train de se mettre en place. En voici les composantes :
- Némésis annonce manifester, sans dire où ni quand et en annonçant que leur vedette sera Sara Knaffo, de Reconquête.
- Les signataires de l’appel « antisioniste » annoncent de manière à peine voilée qu’ils comptent attaquer les femmes juives en les confondant avec Némésis.
- Si le collectif Nous Vivrons fait appel à un SO relevant de la droite sioniste, il finirait de tomber dans la provocation.
Apparemment, ce sont là des gens différents qui risquent de s’affronter, perturbant la manifestation. Ils ont cependant un point commun. Sara Knaffo était à l’investiture de Donald Trump et soutient Poutine. Les courants indigénistes qui sont la force motrice de l’appel à « virer les sionistes » ont une orientation bien résumée par ce message que Youssef Boussoumah fait circuler sur les réseaux sociaux en même temps qu’il diffuse les appels à interdire les manifestations aux femmes juives appelées « sionistes » : « Seule une alliance internationale incluant la Russie et la Chine pourra sauver le monde de la folie des Etats-Unis et d’Israël. » Ces courants ont appelé à battre Genocide Joe et n’ont encore jamais parlé de Genocide Donald. Quant à la droite et à l’extrême-droite sioniste, Trump et Poutine sont ses références comme elles sont celles de Netanyahou.
Les mêmes organisations qui donnent carte blanche aux provocateurs antisémites pour se livrer à la chasse aux femmes juives dans les rues de Paris, penseraient elles à appeler à virer de la manif les amis des islamistes violeurs et oppresseurs des femmes de l’Iran à l’Afghanistan en passant par la Tunisie ? Ce serait pourtant là une expulsion salutaire de fascistes et d’alliés des fascistes, et salutaire d’abord et avant tout pour les droits, la liberté d’expression et d’organisation des musulmanes et des musulmans !
Prétendre organiser dans la manifestation du 8 mars une chasse aux femmes juives sous couvert d’interdiction du « sionisme » amalgamé au « fascisme », c’est en réalité non seulement diviser le front antifasciste qui doit maintenant se dresser contre les masculinistes Trump, Musk et Poutine, et avec eux les Milei, les Netanyahou, les Khamenei … mais c’est introduire dans une manifestation féministe et syndicale la pression et les méthodes de nos pires ennemis, au compte de l’Axe fasciste Trump/Musk/Poutine.
Il n’est d’antifascisme que celui qui les combat et construit l’unité contre eux !
Nous prenons date en publiant cette mise en garde par avance. Il est de la responsabilité des organisations syndicales, notamment, d’assurer par leurs services d’ordre la protection de toutes les manifestantes et manifestants, et de l’interdire à Némesis si ceux-ci tentaient de provoquer.
La rédaction, le 05/03/2025.
Publié le 05.03.2025 à 17:27
D’un singulier tournant gaulliste et des devenirs de la gauche en Europe. Par Martin Vander Elst.
Présentation
Nous publions cette contribution qui nous vient de Belgique.
Contribution
Depuis l’élection de Trump et plus encore depuis le retrait américain de son aide militaire à l’Ukraine, on entend monter un discours de nature gaulliste sur l’ « indépendance » nécessaire de l’Europe, y compris à gauche. L’Europe et Zelensky seraient responsables d’avoir trop compté sur la sécurité américaine. J’ai même lu sous la plume de certains gauchistes que Zelensky n’aurait pas du négocier avec l’administration Trump. Comme souvent avec les discours souverainistes, il y a beaucoup de fantasmes de toute puissance dans de telles affirmations.
Face à une extrême-droite européenne pro-Trump (y compris le VLD qui lorgne désormais du côté de Musk), nous avons une extrême-gauche campiste qui vit dans le déni complet de la guerre et parle de la paix en Ukraine selon les mêmes termes que l’administration Trump (pour le cas du PTB, il s’agit d’un alignement sur la Chine).
Entre les discours pro-russes de déni de réalité et les discours libéraux européens sur le réarmement de l’Europe comme puissance, la gauche européenne se cherche. Il me semble qu’il faut pouvoir séparer la question de la victoire de la résistance ukrainienne de celle du réarmement européen. Là, aujourd’hui, pour tous les démocrates de gauche, il s’agit de gagner la guerre d’Ukraine, contre Poutine, contre Xi Jinping, contre Trump. C’est pour cette raison précise qu’il faut soutenir Zelensky dans le refus d’un “cessez-le-feu” sans garanties de sécurité. Plus fondamentalement, gagner la guerre d’Ukraine, dans la suite de l’insurrection syrienne victorieuse, ce serait d’abord mette un point d’arrêt à l’impérialisme russe en expansion depuis la seconde guerre de Tchétchénie (1999) au moins. L’Europe ne doit pas se réarmer sur le dos de l’Ukraine de façon abstraite, elle doit prendre part à la guerre d’indépendance nationale en Ukraine, de façon à jeter les forces armées russes hors d’Ukraine, avec le droit international et les conventions de l’ONU comme unique boussole.
D’une certaine façon, ici, la gauche européenne pourrait rester léniniste. Il s’agit en effet de transformer la guerre impérialiste en une guerre révolutionnaire. Avec le renversement des alliances trans-atlantiques sous le régime trumpiste mafieux, désormais aligné sur le Kremlin, la mission historique de la gauche apparaît en toute clarté. La guerre d’indépendance ukrainienne peut et doit se transformer en guerre contre les oligarques, contre les ploutocrates, contre le capital rentier et ses logiques mafieuses. Une guerre anti-impérialiste, pour le droit à l’autodétermination et contre la paix des empires, celle du business as usual. Cette transformation révolutionnaire ne sera possible qu’à condition que la gauche européenne refuse le cadre libéral gaulliste actuel. Il ne s’agit pas d’augmenter les budgets de dépenses pour créer une puissance européenne imaginaire, il s’agit de s’engager résolument dans la guerre d’Ukraine pour défaire l’impérialisme russe et américain. Contre les puissances du Saint-Empire coalisées et pour le droit des peuples à disposer d’eux mêmes.
A rebours complet des néo-chauvinismes, qu’ils soient décoloniaux ou gaullistes, la gauche doit ouvrir le cadre, la perspective, à l’échelle mondiale. Ce n’est pas vrai que l’Europe se trouve seule face à son destin. Partout dans le monde les peuples sont en lutte contre les régimes kleptocrates qui les gouvernent. L’insurrection victorieuse en Syrie a ouvert la voie. La perspective peut prendre les noms de Hirak, de Maïdan ou de Occupy Wall Street. Le peuple grec est encore descendu il y a quelques jours dans la rue, par milliers, contre les effets criminels des politiques d’austérité sur les services publics. Nous étions 100.000 dans les rues de Bruxelles contre le gouvernement Arizona. Une des raisons qui fait que les discours complotistes made in Poutine circulent quasiment comme dans un pipeline jusque dans les cerveaux des campistes, c’est parce que, pour une bonne partie de l’opinion publique ouest européenne qui vit encore dans une immunité otaniste, la guerre d’Ukraine demeure illisible et lointaine.
Or, la dernière séquence, avec le refus de Zelensky de céder aux menaces de Vance et de Trump, change complètement la nature politique de cette guerre. Zelensky qui était moqué comme un clown, comme un homme d’État fantoche, etc. apparaît désormais comme celui qui a tenu tête aux Empires américain et russe coalisés. La guerre d’Ukraine devient alors une guerre anti-impérialistes. L’Europe ne doit pas s’armer elle-même, derrière les frontières de l’OTAN et de Schengen, dans un réflexe immunitaire purement impérialiste et dans la perspective d’un affrontement d’empire à empire. Elle doit résolument s’engager avec l’Ukraine de façon à ce que l’Ukraine puisse conserver son intégrité territoriale, de façon à faire respecter le droit international, dans le cadre de l’ONU. De ce point de vue, le vote à l’assemblée générale de la résolution pour « promouvoir une paix globale, juste et durable en Ukraine » offre une cartographie extrêmement précise de l’ennemi de la démocratie : Hongrie, Israël, Russie, États-Unis, Corée du Nord et les pays qui leur sont inféodés. Ce bloc fasciste n’est pas majoritaire, loin de là.
Contre les fascistes, contre les néo-chauvinistes, contre les gaullistes, nous resterons internationalistes.
Le 2 mars 2025.