07.05.2025 à 12:39
Contre l’islamophobie: le 11 mai et après, aimez nous vivants
L’assassinat d’Aboubakar Cissé a déclenché une immense émotion au delà de la communauté musulmane mais aussi des débats indignes en réponse : pendant des jours, l’extrême droite, la droite, les macronistes ont essayé de démontrer que le meurtre d’un jeune homme noir et musulman dans une mosquée par un homme qui a blasphémé et tenu des propos négrophobes en le poignardant à des dizaines de reprises n’avait rien à voir avec l’islamophobie. L’ignominie de ces forces politiques, leur indécence dans un tel contexte n’étonnera personne, sauf des extra-terrestres venus d’une lointaine planète et qui n’auraient pas suivi la montée paroxystique du racisme éradicateur dans l’Hexagone. Mais l’on peut se demander pourquoi il était à ce point important que l’islamophobie ne soit pas le motif de l’assassinat. Sans doute parce que la mort violente apparaît en France comme la seule raison légitime pour défendre les musulmans. A force de reculs politiques, à force de renoncements pour ne pas braquer l’électorat chauffé à blanc par la propagande raciste , à force de concessions pour ne pas paraitre “islamo-gauchiste”, il faut qu’une personne soit sauvagement assassinée dans son lieu de culte pour que l’antiracisme apparaisse comme une cause défendable, lorsqu’il s’agit de l’appliquer aux musulmans . Pour nous la mobilisation pour notre frère, l’émotion politique que suscitent à sa suite les agressions de sœurs couvertes qui en temps ordinaire passent désormais inaperçues sont des émotions à double tranchant. Oui, nous avons peur de mourir au quotidien. Oui, nous avons surtout peur pour les hommes de notre entourage, identifiés au danger absolu et cibles des violences fascistes et policières. Oui , nous renonçons souvent à des déplacements tant les transports en commun sont devenus le lieu de la banalité de l’insulte, de la bousculade volontaire, des mauvais regards perpétuels pour les musulmanes visibles. Oui nous sommes sensibles à la compassion que des politiques et des militants expriment en masse . Mais un autre sentiment parfaitement raisonnable nous étreint. Faut il que nous mourrions dans des conditions atroces pour être des humains à part entière dans ce pays ? Sommes nous condamnées à faire pitié pour ne plus être les monstres ou les fréquentations honteuses de nos concitoyens et du monde politique ? La question mérite d’être posée surtout en période électorale. Nous sommes la deuxième religion de France: la droite, l’extrême droite peuvent bien monter au plafond et redescendre douze fois en nous persécutant au passage, les faits sont têtus et les incantations inefficaces. Bruno Retailleau peut hurler ” A bas le Voile”, ou ” Abracadabra, à 3 l’islam disparaîtra’ , cela aura aussi peu d’effet sur nous que les milliers de discours islamophobe que opus entendons chaque jour sur les réseaux de la part d’anonymes qui appellent à nous tuer et à nous tondre en toute impunité . Des millions de femmes continueront à exister, comme elles sont et les mosquées seront aussi pleines le vendredi suivant. Il n’ y pas de hiérarchie dans nos vies quotidiennes entre la France, la démocratie et l’islam. Nous sommes les musulmans et les musulmanes de France et voilà. Dans ce contexte nous connaissons nos ennemis, ceux qui ont décidé de la Croisade et la mènent férocement. Nous savons que le temps du débat est terminé de leur côté, nous connaissons leur projet: nous éradiquer . Inutile d’employer des euphémismes pour nous rassurer nous mêmes: la gouvernement français soutient le génocide commis par Israel depuis la première minute de son commencement, depuis le 7 octobre à 22h49 quand une dépêche AFP a repris les propos sans ambiguïté aucune de monsieur Netanyahu ” Nous allons détruire la Cité du Mal, il ne restera que des ruines : habitants de Gaza, quittez ce lieu car nous allons frapper de toutes nos forces“. Ici, chacun peut nier la réalité islamophobe de ce génocide, nous, nous savons qu’il n’y a pas de raison profane de détruire aussi les mosquées et de retourner même la terre des cimetières au bulldozer après les avoirs bombardés pour profaner même les morts. Ici nous savons que ce génocide est le rêve reproductible de tous les islamophobes du monde, et notamment en France. Ici, notre communauté s’est levée contre ce génocide islamophobe malgré la répression et elle a entraîné toutes les forces humanistes derrière elle, à commencer par la gauche. Notre jeunesse est descendue en masse dans la rue pour défendre des idéaux qui ne sont pas seulement les siens, mais ceux de tous les êtres épris de justice et de paix, de tous ceux qui rêvent d’un autre monde possible. La centralité palestinienne a rallié mondialement et aussi en France, apportant une force nouvelle à la gauche, dont la base était déprimée et exsangue après la défaite lors du mouvement contre la réforme des rétraites. Mais nous payons le prix fort: avant le génocide et depuis des décennies nous étions déjà la cible. La loi de 2004 a exclu les musulmanes de l’école et bien au delà , elle a été le geste fondateur des politiques islamophobes dans un pays où l’école est l’institution centrale de la société , celle qui est censée introduire les petits humains dans le corps social. Exclure les musulmans et les musulmanes de l’école, c’était faire de nous les ennemis intérieurs dès l’enfance, visiblement. Ensuite toutes les lois successives n’ont fait que développer concrètement ce narratif d’exclusion et de persécution. En 2010 , une loi est allée jusqu’à interdire des femmes d’espace public. Dans quelques temps une autre va les interdire d’université. Ce n’est pas une atteinte aux valeurs féministes comme on l’entend trop souvent à gauche, c’est un des éléments centraux visant à briser notre communauté en exigeant des femmes qu’elles se séparent de leur foi visiblement. L’exigence de retirer le hijab n’est pas une exigence vestimentaire, c’est une injonction à rejoindre le butin de guerre des colonialistes islamophobes où à dépérir voir périr avec nos pères, nos frères, nos époux et nos fils dans un récit où l’homme musulman est le Mal absolu , celui à qui la République n’offre aucune chance de rédemption. Mais il est vrai que ces deux lois sont les plus faciles à combattre pour la gauche: leur abrogation peut être portée aussi au nom des valeurs qu’elle défend et qui se recoupent avec les nôtres sans souci. Pourtant, en 2025 , alors qu’un magnifique mouvement autonome de jeunes filles a eu lieu l’an dernier contre l’interdiction du port de la abaya, que ce mouvement a été rejoint par la jeunesse non musulmane, aucun parti politique représenté à l’Assemblée Nationale n’a osé inscrire l’abrogation de la loi de 2004 dans son programme, comme geste fondateur d’un nouveau contrat social avec les musulmans de France. Sans ce préalable, comment ne pas nous sentir des humains de seconde zone , même aux côtés de de nos aliié.e.s ? Au lendemain de la mort d’Aboubakar Cissé, au rassemblement à République j’étais aux côtés d’un jeune frère palestinien à qui les élus de tous les partis de gauche sont venus demander le micro pour prendre la parole. Militante depuis mes 18 ans , de tous les combats sociaux et sociétaux aux côtés des camarades de gauche, je regardais toutes les personnalités défiler, et je pensais à d’autres scènes possibles. Des lundi matin , où ces mêmes camarades laisseraient mes sœurs et moi sur le trottoir devant la porte close d’un établissement scolaire, d’une université, d’une assemblée élective et pourquoi pas demain des magasins, des parcs et des jardins puisque c’est déjà le cas pour les sœurs qui portent le niqab. Aurons nous le droit, ce jour là à autre chose qu’un sourire triste et gêné ? La ségrégation ne peut pas être combattue seulement dans les manifestations qui ont lieu parce que la communauté musulmane a la force de les organiser. C’est tout l’enseignement des débats ignobles qui ont lieu depuis l’assassinat d’Aboubakar Cissé et de la difficulté de la gauche à les mener : que disent les macronistes et l’extrême-droite ? Que la gauche tente d’instrumentaliser cet assassinat pour mettre la lutte contre l’islamophobie au cœur du débat politique et faire avancer les revendications musulmanes. Que doit répondre la gauche ? Qu’elle est coupable. Coupable de défendre la liberté, l’égalité et la fraternité pour toutes et tous , sans attendre que l’islamophobie nous tue après avoir ravagé nos vies. La gauche doit se déclarer coupable de vouloir rétablir la liberté de culte inconditionnelle pour les musulmans. Le discours de l’extrême droite la plus violente, aussi atroce soit-il contient une part de vérité: lorsqu’ils disent qu’Aboubakar n’aurait pas été tué s’il n’avait pas été en France, lorsqu’ils affirment qu’il nous suffirait de retirer le hijab et de raser les barbes et les murs pour ne pas être insultés, ils ont raison. Lorsque tous les imans qui prêchent selon les préceptes de notre foi auront été expulsés, lorsque les seules mosquées ouvertes seront celles où ne sont énoncés que des discours corrigés au préalable par le Ministère de l’intérieur, lorsque toutes nos librairies auront été fermées, lorsque toutes celles et ceux qui dénoncent le génocide en Palestine seront en prison pour apologie du terrorisme, lorsque les musulmans visibles auront été chassés des universités, des crèches, des écoles, des assemblées, des associations, des émissions de divertissement, lorsqu’un Guantanamo à la française aura été ouvert comme le réclame le bateleur de foire fasciste le plus populaire de France, Cyril Hanouna, alors nous serons en sécurité derrière ses murs . Nous ne risquerons plus 57 coups de couteau pour une prière dans un lieu de culte Un autre scénario est possible , si nous le mettons en oeuvre tout de suite, sans plus attendre, car Netanyahu, Trump et Retailleau vont vite pour tuer dans l’œuf l’espoir qui se lève. Il n’a pas fallu 48h pour que les musulmans et la gauche se lèvent ensemble pour honorer la mémoire d’Aboubakar face à la meute islamophobe qui a commencé à la salir dès l’annonce de sa mort, et au plus haut niveau de l’état. Une des raisons de cette indignation en actes, qui va s’amplifier le 11 mai est que nous sommes déjà ensemble et en partie les mêmes: ces dernières années, en même temps que la mobilisation communautaire ralliait absolument toutes les sensibilités des issus de l’immigration musulmane, toutes les générations, toutes les mémoires anticoloniales, toutes celles des luttes passées, les partis de gauche ont été irrigués par l’apport musulman qui s’incarne dans la masse des militants et des personnalités qui les ont investis avec succès. Ce n’est pas un concours mais dans un pays où les discriminations structurelles et le plafond de verre sont une réalité pour nous tous et toutes, il faut se réjouir du fait que des noms comme celui de Sihame Assbague, de Rima Hassan , de Taha Bouhafs, d’Elias d’Imzalene pour ne citer qu’eux sont plus connus chez la jeunesse de gauche que ceux de bien des députés LFI ou EELV non musulmans. Ce n’est pas un concours mais nous avons été tellement invisibilisés en tant que nous même dans toutes les mobilisations qu’une de nos rares consolations dans le contexte terrible du génocide est de pouvoir faire défiler sur nos écrans des photos de manifestation partagées par les étudiants des plus grandes écoles de France où la tête de cortège nous ressemble . Mais l’amour a besoin de preuves d’amour au quotidien. Le 11 mai, la gauche sera avec les musulmans dans la rue, et devant les caméras. Mais le 12 au matin, toutes les forces politiques islamophobes, tous les médias Bolloré lui demanderont quelle est la suite de l’histoire. C’est à partir du lundi matin que tout va se jouer . Face au “A bas le voile ” de Retailleau, il n’y a qu’une seule réponse digne des directions de gauche: A bas l’islamophobie d’Etat et toutes ses lois. La demi-mesure serait une défaite absolue à très court terme et en 2027. Si pour abroger les lois islamophobes il faut changer de régime et proclamer une nouvelle république pluriculturelle, quel est le problème ? Des Gilets Jaunes aux travailleurs précarisés, des féministes aux écologistes conséquents, des agents du service public aux ouvriers jamais régularisés de tous les grands chantiers de ce pays, tout le monde déteste la Vème République qui a renoué avec ses origines, celle de l’état réduit à son rôle répressif d’abord contre les peuples colonisés puis contre la jeunesse des printemps de 68 et ceux qui ont suivi. Exactement comme au début des années 60, le peuple de gauche tout entier, celui qui compte pour prendre le pouvoir, c’est à dire celui qui bat le pavé, est prêt à aimer les musulmans de France puissants et libres, à ses côtés pour mener les combats pour la justice et la liberté. Pour que cela se traduise dans les urnes, il faut que cela se traduise dans les programmes: l’abrogation de toutes les lois islamophobes à commencer par la loi de 2004, c’est assumer dès le 11 mai et après, que les musulmans ne sont pas pour la gauche seulement des victimes que l’on préfère faibles tout en s’en méfiant , mais des alliés dont on a besoin vivants et sans entraves pour gagner ensemble. Un électorat que l’on soigne, pour le dire simplement. Texte intégral 2523 mots
30.04.2025 à 19:57
Urgence Palestine, la dissolution de trop
Emmanuel Macron a été porté au pouvoir par les voix de millions de personnes qui ont voté pour faire barrage à l’extrême droite. En 2025, son gouvernement se sert de cette loi pour tenter de dissoudre Urgence Palestine, le cœur battant de la lutte contre un génocide mené par l’extrême droite israélienne devenu le modèle de tous les fascistes occidentaux. Bruno Retailleau dissout Urgence Palestine en meme temps que la Jeune Garde, groupe antifasciste au lendemain de l’assassinat islamophobe d’Aboubakar Cissé , poignardé sauvagement dans un lieu de culte, au lendemain de l’assassinat d’une jeune lycéenne par un admirateur d’Adolf Hitler. Il n’y a pas besoin de longues analyses : les dissolutions ont d’abord concerné les associations musulmanes, dans un contexte où la deshumanisation islamophobe battait déjà son plein. Elles ont donc été accueillies dans l’indifférence. Elles ont ensuite concerné les écologistes conséquents, dont les actions massives et populaires mettaient en péril des projets capitalistes démentiels qui mènent partout l’humanité à sa perte. La dissolution d’Urgence Palestine est logique dans le contexte de la victoire idéologique provisoire de l’extrême-droite française, dont le macronisme est le valet tremblant. Depuis un an et demi, Urgence Palestine est en France le cœur battant de la résistance au nihilisme génocidaire, comme la Palestine est le pays de coeur de toutes celles et ceux qui espèrent encore en l’humanité. Urgence Palestine, dès octobre 2023 n’a pas été seulement un mouvement parmi d’autres, mais le nom de l’antifascisme, le cri de ralliement, le centre névralgique de toutes les énergies positives pour un autre monde possible. On ne peut dissoudre une atmosphère, même en empêchant les gens de respirer avec des lois mortifères. Comme tous les régimes autoritaires en fin de règne, le macronisme crée lui même les conditions de sa chute. L’islamophobie n’est jamais une diversion, mais depuis le début du génocide en Palestine , elle est devenue le seul moteur du régime. Très logiquement, l’antifascisme qui se lève est en partie palestinien et musulman : Urgence Palestine rallie vastement, et la plus grande défaite des forces fascistes et macronistes du nationalisme français vieillissant , c’est de voir la jeunesse et leurs propres enfants aux côtés de l’ennemi intérieur que désignent leurs grands parents. On ne dissout pas le Printemps. Lire 499 mots
Il n’aura eu de cesse d’insulter ceux qui ont permis son élection, notamment en utilisant une loi votée par le Front Populaire en 1936 pour mettre fin à la violence des groupes de combat et des ligues d’extrême droite qui faisaient régner la terreur et avaient tenté un coup d’état en 1934.
03.04.2025 à 09:26
Zemmour et Pétain: en temps de génocide, que vaut la mémoire des victimes de Vichy ? ?
Il y eut autrefois des survivants et survivantes de l’extermination des Juifs d’Europe pour inviter des victimes algériennes de Papon à la barre lorsque celui-ci eut à répondre des crimes commis au nom de l’État français sous Vichy. Ce fut historique, car en vertu de la loi d’amnistie votée par la jeune Vème République créée pour mater l’insurrection algérienne, Papon était protégé de toute poursuite concernant les crimes contre l’humanité et la torture en Algérie. Certes, aucune des associations actuelles de lutte contre l’antisémitisme n’invitera des Palestiniens de France ou des musulmans au pourvoi en cassation que formera Eric Zemmour contre une décision qui ne lui semble encore pas assez laxiste dans la France d’aujourd’hui : 10 000 euros d’amende pour avoir tenu des propos négationnistes d’un niveau inimaginable sur de grands médias il y a quinze ans, c’est encore trop à ses yeux. L’Histoire, le respect des victimes de la France vichyste servile devant le nazisme, devançant les désirs des SS, à leur grande surprise parfois, on s’en fiche en 2025. Monsieur Zemmour n’a dit qu’un mensonge, finalement très mesuré, en affirmant que Pétain a sauvé des Juifs, quand les sionistes au pouvoir en Israël en sont à proclamer que ce sont les arabes qui ont poussé Hitler à exterminer les Juifs, quand des assassins et des génocidaires portent une étoile jaune en allant à l’ONU, profanant ainsi la mémoire des victimes juives de Hitler à qui cette étoile ne donnait, certes, que le pouvoir d’être fichées, traquées, interdites d’éducation, de travail, de s’asseoir sur les bancs, spoliées de leurs biens puis exterminées. Pas celui de commettre un génocide tout en se promenant aux Nations Unies pour y éructer des insanités racistes. Finalement, Zemmour présentant le bourreau en chef de Vichy comme un sauveur de Juifs, en quoi est-ce le problème d’une musulmane ? Pourquoi voler sa Shoah à Yvan Attal ? Sincèrement, je m’en passe fort bien, et je n’aimerais certes pas en venir à faire rougir de honte toute ma famille et susciter la colère de toute ma communauté en osant m’approprier les victimes du colonialisme pour ma petite boutique politique sanglante. Mais tout le monde n’a pas les mêmes valeurs. Et l’on pourrait, à l’heure où les Palestiniens sont menacés de déportation ou d’extermination, en termes très clairs par Israël acter simplement des faits : la lutte contre l’antisémitisme en France en 2025, la législation antiraciste comme le discours public à ce sujet sont devenus le fer de lance de la répression contre celles et ceux qui contestent non pas la mémoire de crimes contre l’humanité, mais des crimes contre l’humanité en train d’être commis. Lorsque Serge Klarsfeld, dont les travaux sont justement la cible de Zemmour dans cette affaire, applaudit l’extrême-droite avec ferveur, la boucle historique semble bouclée et ne nous concerner en aucun cas. Mais comme tout le monde, les musulmans ont le droit à l’Histoire, à la transmission de la vérité, surtout sur le sujet des génocides commis par les Européens. Et ce droit, nous l’avons, même si les sionistes nous le dénient, eux qui, par la voix de leurs associations et de leurs avocats, ont reproché à notre frère Elias d’Imzalene d’être allé devant le Mémorial des Insurgés du ghetto de Varsovie. Cela a fait partie des griefs soulevés par les avocats de la LICRA et de l’Observatoire Juif de France, car se recueillir pour les insurgés armés du Ghetto, c’était reconnaître ses propres projets antisémites violents, selon eux. Notre Frère a été condamné à cinq mois de prison avec sursis pour avoir dit “Intifada”. Ses avoirs sont gelés, la spoliation des biens par le pouvoir exécutif s’ajoute à une condamnation, pathétique tentative de le priver de moyens et de soutiens avant l’appel. Pour avoir nié les crimes commis par le maréchal Pétain et sa clique venue de tout le champ politique français, Zemmour, après six ans de procédure et deux relaxes, écope d’une amende que son mouvement paiera sans souci. Il le lui doit bien, car Zemmour, comme tous les négationnistes, sait ce qu’il gagne à aller volontairement au procès dans un pays qui s’est toujours montré très complaisant avec eux. La promotion de son récit. Un récit qui va bien au-delà des seuls intérêts de l’extrême droite officielle en cette période où la France, ses intellectuels appointés, ses écrivains, ses polémistes, et une grande partie du champ politique, hurlent à la mort contre les Palestiniens avec Israël, par amour des Juifs disent ils. Pour être crédible, ce récit doit effacer le passé, impérativement : il faut faire oublier la participation de la France au génocide antisémite. Pétain, le héros de la boucherie nationaliste de la Première Guerre mondiale, encensé par Macron pour sa première vie, doit être petit à petit exonéré de la seconde. Alors, prétendre partout qu’il a sauvé des Juifs et surtout sur C News, c’est important. Les faits sont têtus et terriblement dégradants pour la France éternelle amie des Juifs dont on nous rebat les oreilles toute la journée, même au regard des autres pays européens sous la domination nazie. Il y eut deux pays dans lesquels une collaboration d’état fut officiellement acceptée : la France et le Danemark. Mais au Danemark, immédiatement, les autorités firent savoir aux nazis que les Juifs danois ne seraient pas déchus de leur citoyenneté. Les nazis acceptèrent cette décision-là jusqu’à mi-1943, où ils opérèrent des rafles massives. À ce moment, le gouvernement danois démissionna en bloc. En France, le premier statut des Juifs est décrété dès le 3 octobre 1940. Il n’y pas eu la moindre protection des Juifs français, les seuls dont Zemmour parle et pour cause. Lorsqu’il tente d’inventer une “protection ” des Juifs français en arguant, avec une abjection absolue, que seuls des Juifs “étrangers “, moins humains sans doute, furent arrêtés par la police française, puis exterminés pendant la rafle du Vel d’Hiv, il oublie un léger détail de l’histoire : 3000 enfants nés de parents juifs étrangers, mais français, furent arrêtés. L’amende de 10 000 euros infligée à Zemmour estime donc à 3 euros et 30 centimes la mémoire de chaque enfant juif français raflé. Et à rien celle des autres : les étrangers, qui, il est vrai, étaient déjà l’objet de lois contre les immigrés de plus en plus dures à la fin de la 3ᵉ République et objets de campagnes xénophobes puissantes. L’enjeu politique est là, en ce qui nous concerne : en 2025, la remise en cause du droit du sol est une banalité lamentable. Les camps d’internement des étrangers, en majorité musulmans, ne cessent de s’agrandir et font partie d’un quotidien européen, celui qui traite comme des criminels, des hommes, des femmes et des enfants qui n’ont pas eu la décence de mourir noyés dans la Méditerranée. En 2025, même des députées visées comme palestiniennes et musulmanes sont menacées de déchéance de nationalité par des Ministres. En 2025, on ne répète pas la Shoah, on se contente de répéter l’histoire de France, celle qui amena la République et des socialistes à rejeter dans la catégorie des sous-humains même celui qui fut leur dirigeant le plus brillant, Léon Blum, et à voter les pleins pouvoirs aux ancêtres politiques de Zemmour, couchés devant les nazis. En 2025, il n’y a pas à voler sa Shoah à Yvan Attal, il y a simplement à s’approprier l’Histoire, car elle est la nôtre. Les mensonges de Zemmour, il faut le savoir, s’appuient sur une seule œuvre, celle d’Alain Michel, historien et rabbin en Israël : Alain Michel est un homme qui affirme que l’on ne peut librement faire de la recherche sur la Shoah et Vichy en France, que la “doxa “règne. Ça vous rappelle les discours négationnistes ? C’est normal, monsieur Alain Michel est un précurseur dans le domaine des amitiés franco-israéliennes, il ne se cache pas d’avoir rencontré le gendre de Pierre Laval et d’avoir été sensible à ses arguments. Face à la démence des discours fascistes, face à l’union pour tous les génocides, nous avons l’Histoire à préserver : celle d’un pays profondément coupable et éternellement dans le déni de ses crimes, capable de se présenter en patrie de la lutte contre l’antisémitisme pour condamner des musulmans qui luttent contre un génocide, alors même que la France est une des patries de l’antisémitisme, dont les nazis lurent avec avidité les intellectuels. Faut-il préciser que même si l’histoire des génocides n’était pas un savoir, mais une arme de guerre, nous ne la volerions désormais à personne et surtout pas aux sionistes ? De droite ou se disant de gauche, leur seule préoccupation, affichée fièrement, est, aujourd’hui, le destin d’un état génocidaire. Leur seul projet : attaquer l’antisionisme, avec le pouvoir macroniste, avec les fascistes, en s’acharnant, non seulement sur les musulmans, mais également sur les Juifs antisionistes à longueur de tribune, en leur déniant même le droit de faire vivre dans des colloques la mémoire de l’extermination des Juifs d’Europe, ou de projeter des films qui disent la vérité sur les nazis. La vérité historique, sa transmission aux masses ? Ils s’en moquent, donc. Dans ce contexte historique, la lutte contre l’antisémitisme n’est pas un devoir pour les musulmans. Personne en France n’a à dicter aux victimes d’un racisme d’état, qui, à bien des égards, imite ce qu’il a toujours su faire, le devoir de faire autre chose que se défendre. Par contre, notre devoir et notre intérêt sont de préserver la mémoire de la sombre histoire française, de sa collaboration à un génocide, industrialisé froidement, sur son propre sol. Sombre histoire qui ne s’est jamais interrompue, juste exportée. Texte intégral 1834 mots