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07.03.2025 à 17:06

QSPTAG #319 — 7 mars 2025

robinson
Loi « Narcotrafic » : une loi de surveillance où le numérique joue un rôle central On en parlait fin janvier, la proposition de loi contre le « narcotrafic » est un grand fourre-tout sécuritaire qui joue la surenchère répressive dans…

Texte intégral 1579 mots

Loi « Narcotrafic » : une loi de surveillance où le numérique joue un rôle central

On en parlait fin janvier, la proposition de loi contre le « narcotrafic » est un grand fourre-tout sécuritaire qui joue la surenchère répressive dans tous les domaines, et les mesures de surveillance numérique ne sont pas les moins délirantes.

Imaginez. Il y aurait, dans un petit pays loin, loin d’ici, un gouvernement qui naviguerait à vue au gré des paniques médiatiques, qui godillerait de fait divers en fait divers, et qui entretiendrait avec complaisance une ambiance de panique morale collective, une sorte d’état d’urgence permanent : l’économie irait mal, la dette serait abyssale, les immigrés seraient trop nombreux et trop criminels, d’ailleurs le terrorisme frapperait de nouveau, et le trafic de drogue gangrènerait nos quartiers, etc. Bien conscient que sa politique économique, écologique et sociale serait peu populaire, ce gouvernement aurait besoin de la police pour résoudre la plupart de ses problèmes. Ce que la police demanderait, la police l’obtiendrait.

Dans ce contexte hostile à la réflexion et au respect des droits – une chose archaïque, visiblement, que des lois anciennes voulaient bizarrement protéger – c’est la foire aux mesures de surveillance intrusives. Activer à distance les micros et les caméras des appareils mobiles, casser le chiffrement des messageries instantanées, etc. La panoplie est détaillée dans l’article que nous avons publié le 24 février et dans la page de campagne.

« Mais pourquoi s’en inquiéter ? Ne s’agit-il pas de punir des criminels ? Vous ne voulez quand même pas protéger des assassins ? » Le danger est justement que ces mesures ne concernent pas « seulement les trafiquants de drogue ». Elles viennent étoffer un objet juridique qui existe déjà et qui s’appelle le régime de la « criminalité organisée ». Et ce régime censé cibler le grand banditisme a déjà été utilisé de nombreuses fois contre des actions militantes, justement en raison des facilités de procédure et de surveillance qu’il permet. On croit être dur pour les grossistes de cocaïne et on devient dur contre les opposants à une autoroute ou à une usine polluante. Quand une mesure liberticide entre dans la loi, d’abord de façon encadrée, elle reste dans la panoplie des mesures à appliquer quand on élargit le champ d’application à autre chose.

Nous avons donc appelé à une action collective pour interpeler les député·es de la commission des Lois qui devaient amender le texte cette semaine. Et vous avez répondu en nombre ! Un grand merci à vous !
L’action paye, et la commission a rejeté les mesures les plus dangereuses. Mais le gouvernement tentera sans doute de les introduire de nouveau lors de la discussion dans l’hémicycle, qui doit commencer le 17 mars. On en reparle très vite !

Lire l’article : La loi Narcotrafic est une loi de surveillance : mobilisons nous !
La page de la campagne : Contre la loi surveillance et narcotraficotage

Campagne de soutien 2025

Notre campagne de soutien pour 2025 est toujours ouverte ! Nous avons récolté environ 45% de notre objectif pour l’année. En prenant en compte les dons mensuels, on arrivera environ à 75% de l’objectif. Aidez-nous à boucler le budget 2025 ! Vous pouvez nous faire un don sur notre site.

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05.03.2025 à 16:21

Expérimentation VSA : le gouvernement sur le point d’obtenir trois ans de rab 

startuffenation
Demain jeudi, au Parlement, se tiendra la commission mixte paritaire en vue de l’adoption de la proposition de loi relative à la sécurité dans les transports. C’est le vecteur choisi par le gouvernement Bayrou mi-février…

Texte intégral 1663 mots

Demain jeudi, au Parlement, se tiendra la commission mixte paritaire en vue de l’adoption de la proposition de loi relative à la sécurité dans les transports. C’est le vecteur choisi par le gouvernement Bayrou mi-février pour proroger de deux années supplémentaires l’expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique (VSA), lancée dans le cadre de la loi JO. S’il a beaucoup été question d’intelligence artificielle ces dernières semaines, c’était plutôt pour promettre des investissements massifs ou appeler à la dérégulation. Moins pour mettre la lumière sur nouveau coup de force visant à imposer la surveillance policière constante et automatisée de nos espaces publics. Retour sur les derniers rebondissements de la lutte contre la vidéosurveillance algorithmique.

Des rapports d’évaluation dont on aimerait pouvoir se moquer

Tout d’abord et après plusieurs semaines de rétention, le ministère de l’intérieur a fini par publier le rapport d’évaluation de « l’expérimentation » de vidéosurveillance algorithmique prévue par la loi de 2023 sur les Jeux olympiques. Pour rappel, pendant plusieurs mois, la VSA a été utilisée légalement pour détecter 8 situations lors d’événements « récréatifs, sportifs ou culturels ». Et on comprend pourquoi ce rapport n’a pas été exhibé fièrement par le gouvernement : il ne fait qu’enchaîner les preuves de dysfonctionnements techniques souvent risibles (une branche qui bouge et déclenche une alerte, un problème de perspective qui rend le système de détection d’une personne inopérant, etc.), pointant l’absence de maturité de ces technologies ainsi que leur inutilité opérationnelle.

Par ailleurs, le rapport analyse au plus près l’expérimentation autorisée par la loi JO, mais ne se penche pas sur les centaines de déploiement qui restent illégaux dans le pays, ni sur les velléités du lobby techno-sécuritaire, qui ne compte évidemment pas s’arrêter en si bon chemin et se tient prêt à multiplier les cas d’usage, notamment dans une logique d’identification des personnes. On pense par exemple aux propos tenus récemment par le représentant de la société suisse Technis, qui a racheté Videtics et dont les algorithmes sont utilisés dans le cadre de l’expérimentation : « L’avantage de la vidéo », explique-t-il tranquillement dans cet entretien, « c’est qu’elle est désormais multifonction. Il y a le volet sécuritaire (surveillance d’un lieu et alerte en cas d’intrusion), le volet statistique (analyse de la fréquentation d’un espace) et le volet reconnaissance faciale ou d’identité (identification de personnes) ». Dont acte.

Ces intentions d’aller plus loin sont d’ailleurs partagées par la RATP et la SNCF, qui ont été les principaux acteurs de l’utilisation de la VSA « légale » de la loi JO. Et c’est là un des passages les plus intéressants du rapport d’évaluation : ces deux opérateurs de transports assument de vouloir aller plus loin que ce qui est aujourd’hui autorisé, pour faire du suivi automatisé de personnes ou encore de la détection de « rixes ». Est également relayée la volonté de pouvoir utiliser la VSA dans davantage de moments et de lieux, et donc de s’affranchir du seul cadre des grands événements sportifs, récréatifs ou culturels prévu actuellement par la loi aujourd’hui. Des revendications du même ordre ont été relayées par des sénateurs et sénatrices, qui ont produit leur propre rapport d’évaluation.

Le gouvernement fonce tête baissée pour pérenniser la VSA

Le satisfecit ridicule du préfet de police Laurent Nuñez au mois de septembre, affirmant que la VSA avait fait ses preuves lors des JO et devait donc être pérennisée, avait déjà posé le cadre : le gouvernement ne prendrait aucune pincette pour tirer son propre bilan de l’expérimentation et forcer son agenda politique.

Et pour cause ! Avant même la publication du rapport officiel d’évaluation, profitant d’un énième retour de la loi relative à la sûreté dans les transports à l’Assemblée, le gouvernement a déposé un amendement sorti de nulle part et sans lien avec le texte, demandant l’extension du dispositif de VSA pour trois années supplémentaires, au prétexte que les services n’auraient pas eu assez de temps pour tester la technologie. Mais que la VSA « marche » ou pas est, au fond, accessoire. Pour le gouvernement Bayrou, il s’agit de l’imposer, coûte que coûte, et ce alors même que des experts indépendants de l’ONU viennent de dénoncer le caractère disproportionné de ces déploiements.

En prolongeant l’expérimentation pour trois années supplémentaires, le gouvernement permet d’installer un peu plus cette technologie dans les pratiques, en se laissant la possibilité d’exploiter les largesses que la France a réussi à obtenir au niveau de de l’Union européenne à travers l’« AI Act » et ainsi légaliser la reconnaissance faciale et d’autres cas d’usage de la VSA politiquement sensibles. Cela dit, comme nous l’avons déjà expliqué, sur le plan juridique, la régularité de cet amendement visant à prolonger l’expérimentation de la VSA est parfaitement douteuse, et il est possible qu’il soit déclaré contraire à la Constitution.

Un caillou juridique dans la chaussure de la Technopolice

Ces coups de butoir sont intervenus juste après une décision historique obtenue de haute lutte dans l’« affaire Moirans » – du nom de cette petite commune isèroise qui a acquis le logiciel de VSA de l’entreprise Briefcam. Au terme de notre recours et à l’issue d’une passe d’arme avec la CNIL qui faisait valoir sa position très accommodante pour l’industrie de la VSA et le ministère de l’intérieur, le tribunal administratif de Grenoble a jugé que le recours à la VSA aussi bien dans le cadre de la police administrative (hors enquêtes pénales, pour faire simple) que lors d’enquêtes judiciaires était illégal et disproportionné.

Depuis l’interdiction de la reconnaissance faciale dans les établissements scolaires en 2020, c’est l’une des principales victoires juridiques dans l’opposition populaire à la vidéosurveillance algorithmique. Depuis un an, nous encourageons les collectifs locaux à interpeller les responsables municipaux pour les appeler à s’engager contre la VSA dans le cadre de notre campagne « Pas de VSA dans ma ville ». De nombreuses personnes ont déjà répondu à cette initiative et demandé à leur maire de refuser cette surveillance. Désormais, avec cette jurisprudence qui pointe l’illégalité des centaines de déploiements locaux de la VSA, en dehors du cadre restreint de la loi JO, nous avons des arguments de poids pour poursuivre cette lutte.

Si le prolongement de la VSA « légale » jusqu’en 2027 venait donc à être confirmé en commission mixte paritaire demain, puis de façon définitive par le Parlement, il faudra utiliser tous les moyens à notre disposition pour mettre fin à cette fuite en avant, et contre-carrer l’alliance d’élus locaux, de fonctionnaires et d’industriels prêts à tout pour conforter leur pouvoir techno-sécuritaire. Ce combat passe notamment par la découverte et la documentation ces projets, car les sortir de l’opacité permet de mettre la pression aux instances dirigeantes des communes et des collectivités et les mettre face à leurs responsabilités. Si vous même prenez part à un collectif local dans une commune ayant recourt à un système de VSA du style du logiciel Briefcam, n’hésitez pas à vous saisir de nos écritures pour porter vous-mêmes un recours ! Et si vous aviez besoin de conseil, nous sommes joignables à l’adresse contact@technopolice.fr.

Contre la VSA, la bataille continue !

Et si vous voulez nous aider à continuer à l’animer, vous pouvez aussi nous soutenir en faisant un don.

24.02.2025 à 15:56

La loi Narcotrafic est une loi de surveillance : mobilisons nous !

noemie
La semaine prochaine, l’Assemblée nationale discutera d’une proposition de loi relative au « narcotrafic ». Contrairement à ce que le nom du texte indique, les mesures qui pourraient être adoptées vont bien au-delà du seul trafic de…

Texte intégral 693 mots

La semaine prochaine, l’Assemblée nationale discutera d’une proposition de loi relative au « narcotrafic ». Contrairement à ce que le nom du texte indique, les mesures qui pourraient être adoptées vont bien au-delà du seul trafic de stupéfiants. En réalité, son champ d’application est si large qu’il concernerait également la répression des mouvements militants. Cette loi prévoit de légaliser de nombreuses mesures répressives. Si elle était adoptée, elle hisserait la France en tête des pays les plus avancés en matière de surveillance numérique.

C’est l’un des textes les plus dangereux pour les libertés publiques proposés ces dernières années. En réaction, et face à un calendrier législatif extrêmement resserré, La Quadrature du Net lance aujourd’hui une campagne de mobilisation pour lutter contre la loi Narcotrafic. Le but est d’abord d’informer sur le contenu de ce texte, en faisant en sorte que les mesures techniques et répressives qu’il cherche à légaliser soient compréhensibles par le plus grand nombre. Nous souhaitons également dénoncer l’instrumentalisation de la problématique du trafic de stupéfiants — une « guerre contre la drogue » qui, là encore, a une longue histoire bardée d’échecs — pour pousser des mesures sécuritaires bien plus larges, à grand renfort de discours sensationnalistes. Notre page de campagne répertorie ainsi différents décryptages, des ressources, mais aussi des outils pour contacter les député⋅es et les alerter sur les nombreux dangers de cette proposition de loi. Nous avons pour l’occasion décidé de renommer cette loi « Surveillance et narcotraficotage » tant elle est l’espace fourre-tout d’une large panoplie sécuritaire.

Parmi les mesures proposées et largement retravaillées par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, on retrouve l’extension de la surveillance du réseau par algorithmes, la censure administrative d’Internet ou encore l’instauration d’une procédure de surveillance secrète échappant aux débats contradictoires et largement dénoncée par la profession des avocat·es. Au gré de son examen au Sénat, la proposition de loi n’a fait qu’empirer, incluant de nouvelles techniques de surveillance extrêmement intrusives, comme l’espionnage à travers les caméras et micros des personnes via le piratage de leurs appareils et l’obligation pour les messageries chiffrées de donner accès au contenu des communications. Cette dernière mesure va à contre-courant des recommandations de nombreuses institutions et pourrait conduire à l’éviction de France de services comme Signal ou Whatsapp ou d’abaisser leur niveau de sécurité, comme Apple vient d’être contraint de le faire pour ses produits au Royaume-Uni. Ces dispositions ne sont nullement limitées aux trafiquants de drogue : la police peut y avoir recours pour l’ensemble de la « criminalité organisée », un régime juridique extrêmement large qui est notamment utilisé dans la répression des actions militantes.

Face à cela, les groupes politiques au Sénat ont voté à l’unanimité pour ce texte — y compris à gauche. La Quadrature du Net appelle les élu·es à se réveiller et à réaliser la gravité des enjeux posés par ce texte. La lutte contre le trafic de stupéfiants ne peut pas servir à justifier des atteintes aussi graves aux principes fondateurs de la procédure pénale, ni à banaliser des pouvoirs de surveillance aussi intrusifs et qui pourraient encore être étendus à l’avenir.

Pour prendre connaissance de nos arguments, de nos ressources ainsi que des coordonnées des député⋅es pour les contacter, rendez-vous sur notre page de campagne : laquadrature.net/narcotraficotage

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