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Humans Right Watch enquête sur les violations des droits humains commises à travers le monde

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26.07.2024 à 18:20

Burkina Faso : Une vidéo montre des soldats éventrant un corps

Human Rights Watch

Click to expand Image Un soldat du Burkina Faso monte la garde dans un véhicule blindé dans la capitale, Ouagadougou, le 2 octobre 2022. © 2022 REUTERS/Vincent Bado

(Nairobi) – Les autorités du Burkina Faso devraient ouvrir de toute urgence une enquête impartiale sur une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux qui montre des soldats de l’armée burkinabè mutilant et éventrant un cadavre, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Toutes les personnes jugées responsables d'actes répréhensibles devraient être poursuivies, quel que soit leur rang.

La vidéo, qui a été diffusée sur les réseaux sociaux à la fin du mois de juillet 2024, montre au moins 18 hommes vêtus d’uniformes de l’armée identifiables, dont deux utilisent des couteaux pour éventrer un corps décapité et démembré. Dans une déclaration datée du 24 juillet, le chef d'état-major de l'armée burkinabè, le major-colonel Célestin Simporé, a condamné « ces agissements macabres aux antipodes des valeurs militaires et morales ». Il a indiqué que « des dispositions [ont été] prises » pour identifier le lieu où ont été tournées ces images ainsi que les responsables, sans toutefois annoncer l’ouverture d’une enquête criminelle.

« Cette vidéo épouvantable où l’on voit des soldats mutiler un corps témoigne de l'absence généralisée d'obligation de rendre des comptes pour les atrocités commises par des unités militaires au Burkina Faso ces dernières années » a expliqué Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « Les autorités militaires burkinabè devraient immédiatement ouvrir une enquête transparente et impartiale sur cet incident sordide et sanctionner de manière appropriée les responsables. »

Human Rights Watch a examiné la vidéo de 81 secondes, s’est entretenu avec cinq personnes ayant connaissance de l’incident et a reçu l’expertise d’un médecin spécialisé en médecine légale. Des experts en criminalistique des médias ont également analysé le fichier vidéo.

La vidéo montre un homme en uniforme militaire avec un drapeau du Burkina Faso visible sur l'épaule gauche se penchant sur le corps mutilé au sol. Une tête décapitée est visible au sol à proximité, à côté d’un deuxième cadavre. L'homme en uniforme plonge un couteau dans une zone située juste en dessous du sternum et commence à découper la chaire. Il plonge ensuite son bras dans la cavité et semble essayer de retirer des parties du corps, sans succès.

Un autre homme en uniforme de l’armée, qui utilise ce qui semble être une petite épée, fait des entailles dans le corps, frappant le sternum à 24 reprises, jusqu’à ouvrir le thorax du cadavre. Le premier homme prend alors son couteau et découpe ce qui semble être un organe du corps. Il se lève, l’organe dans les mains, tandis que les autres soldats se rassemblent autour de lui. Certains exclament en français « La patrie ou la mort ! » – un slogan associé au défunt leader révolutionnaire burkinabè, Thomas Sankara, dans les années 1980 et adopté par la junte actuelle.

Quatre des hommes portent les couleurs du drapeau national du Burkina Faso sur le revers gauche de leurs vestes militaires ou de leur t-shirts, ce qui correspond à l'uniforme militaire burkinabé. On peut entendre les hommes en uniforme dire en français qu'ils sont membres du Bataillon d'Intervention Rapide 15 (BIR-15), une force spéciale impliquée dans des opérations de contre-insurrection contre les groupes armés islamistes, et de l'unité militaire « Cobra 2 », une force d'élite associée au président du Burkina Faso, Ibrahim Traoré.

Beaucoup des hommes visibles sur la vidéo portent des fusils d'assaut militaires de type Kalashnikov et sont vêtus de gilets tactiques de protection. Trois d'entre eux portent des casques militaires. Leur équipement est similaire à celui observé dans une vidéo publiée sur YouTube en décembre 2023 par la télévision d'État burkinabè pour annoncer la création de nouveaux Bataillons d'Intervention Rapide (BIR). L'homme qui semble enlever l'organe est armé d'un pistolet.

En novembre 2022, le président Ibrahim Traoré a créé six bataillons d’intervention rapide pour soutenir les opérations militaires contre les groupes armés islamistes. Le nombre de ces forces spéciales a depuis été multiplié par quatre, pour atteindre au moins 25 BIR. Le BIR-15 a été créé par décret présidentiel le 25 octobre 2023. Deux jours plus tard, le président Ibrahim Traoré a nommé le capitaine Paul Belem au poste de commandant du bataillon.

Selon des médias burkinabè, le BIR-15 est stationné à Gaoua, dans la région du Sud-Ouest, ce qui suggère que la vidéo a pu être filmée dans cette région, ou dans les régions voisines, qui ont toutes été touchées par le conflit. Deux sources, dont une proche de l’armée, ont indiqué à Human Rights Watch que la vidéo a été filmée entre avril et mai près de Nouna, dans la région de la Boucle du Mouhoun.

Human Rights Watch n’a pas pu identifier de manière indépendante où et quand la vidéo a été filmée, mais les langues entendues dans la vidéo – le français, le mooré et le bobo – et les uniformes militaires portés par le groupe impliqué suggèrent que c’était au Burkina Faso. Human Rights Watch n’a trouvé aucune version de la vidéo disponible en ligne avant le 23 juillet 2024. Des experts en criminalistique des médias et en génération et manipulation de l’intelligence artificielle membres de la Deepfakes Rapid Response Force, une initiative de l’organisation WITNESS, ont analysé le fichier vidéo et ont conclu qu’il n’y avait aucune preuve significative de manipulation par intelligence artificielle.

Dans sa déclaration, le chef de l’armée a déclaré que les hommes de la vidéo étaient « des personnes supposées appartenir aux Forces de Défense et de Sécurité (FDS) et aux Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) ». Ces derniers sont des auxiliaires civils, mobilisés pour la première fois en 2020, qui accompagnent les soldats pendant leurs opérations. Depuis qu’il a pris le pouvoir lors d’un coup d’État en septembre 2022, le président Ibrahim Traoré a augmenté le recours aux VDP, et en octobre 2022, il a lancé une campagne pour recruter 50 000 VDP supplémentaires. Les uniformes et l'équipement des hommes dans la vidéo semblent confirmer l'implication des Forces de Défense et de Sécurité, a déclaré Human Rights Watch.

Dans le conflit armé au Burkina Faso, les forces de sécurité gouvernementales ainsi que les groupes armés islamistes ont commis de nombreuses atrocités en toute impunité, alimentant des cycles d'abus et de représailles. Human Rights Watch a précédemment documenté de graves violations des droits humains commises par des soldats des BIR et des membres des VDP, notamment le massacre d’au moins 156 personnes, dont 45 enfants, dans le village de Karma, dans la province du Yatenga, en avril 2023. Les soldats des BIR ont aussi été impliqués dans l’exécution sommaire d’au moins 223 personnes, dont 56 enfants, dans les villages de Soro et Nondin en février.

Les forces gouvernementales du Burkina Faso luttent contre les forces du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jama’at Nusrat al-Islam wa al-Muslimeen, JNIM) lié à Al-Qaïda et contre l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) depuis que les groupes armés sont entrés dans le pays depuis le Mali en 2016. Ces groupes contrôlent de vastes étendues de territoire dans le pays, ils attaquent les civils ainsi que les forces de sécurité du gouvernement et combattent également l’un contre l’autre. Le conflit a tué des milliers de personnes depuis 2016 selon l’Armed Conflict Location & Event Data Project (ACLED), un projet de collecte de données désagrégées, d’analyse et de cartographie des crises, et a contraint plus de 2 millions de personnes à quitter leurs foyers.

Le droit international coutumier applicable au conflit au Burkina Faso interdit la « mutilation des cadavres ». Les mutilations corporelles commises dans le cadre de conflits armés non internationaux constituent le crime de guerre « d'atteinte à la dignité de la personne » selon le statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel le Burkina Faso est partie. En vertu du droit international relatif aux droits humains, le Comité des droits de l'homme des Nations unies a indiqué que le traitement irrespectueux des dépouilles humaines peut constituer un traitement cruel, inhumain ou dégradant à l'égard de la famille du défunt.

« Les autorités burkinabè devraient contrôler les unités militaires et les auxiliaires civils commettant des abus et ouvrir des enquêtes complètes sur ceux impliqués dans la commission d’abus ainsi que les traduire en justice », a conclu Ilaria Allegrozzi. « Les gouvernements concernés devraient exhorter la junte militaire à mettre un terme aux atrocités telles que celles montrées dans la vidéo.»

26.07.2024 à 08:00

Guinée : Verdict imminent dans le procès pour le massacre du stade

Human Rights Watch

Click to expand Image Onze hommes accusés d'être impliqués dans le massacre de manifestants pro-démocratie par les forces de l'ex-junte militaire en 2009, et de nombreux viols commis lors de cet incident, photographiés (à droite) lors de leur procès à Conakry, en Guinée, le 28 septembre 2022. © 2022 Souleymane Camara/Reuters

(Bruxelles) – Le 31 juillet 2024, un tribunal national guinéen devrait rendre un verdict, notamment sur les demandes de réparation faites dans le cadre du procès historique de 11 hommes accusés d’être responsables de l’horrible massacre perpétré dans un stade en 2009, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch, qui a publié un document de questions réponses mis à jour sur les audiences.

Le matin du 28 septembre 2009, plusieurs centaines de membres des forces de sécurité guinéennes ont fait irruption dans un stade de la capitale, Conakry, et ouvert le feu sur des dizaines de milliers de partisans de l’opposition rassemblés pacifiquement. En fin d’après-midi, au moins 150 Guinéens avaient été tués ou étaient en train de mourir à l’intérieur du stade ou dans son périmètre, tandis que des dizaines de femmes présentes ont subi des violences sexuelles brutales de la part des forces de sécurité. Les forces de sécurité se sont ensuite lancées dans une opération de dissimulation, inhumant les corps dans des fosses communes.

« Ce verdict constitue un moment de vérité tant attendu pour les victimes et leurs familles qui ont appelé à plusieurs reprises à établir les responsabilités du massacre du stade de 2009 », a déclaré Tamara Aburamadan, conseillère juridique auprès du programme Justice internationale. « Quinze ans plus tard, les victimes et les survivants méritent d’obtenir justice. »

Le questions réponses détaille les éléments suivants :

Le contexte du procès ;L’identité des 11 accusés et leurs droits dans le cadre de ce procès ;Le contexte politique actuel de la Guinée ;Les principaux défis soulevés au cours de la procédure et préoccupations concernant les retards, la sécurité, les ressources et la demande du parquet de requalifier les accusations en crimes contre l’humanité ;Le rôle des victimes et des survivants dans le procès et leur droit à des réparations ;Les recommandations aux autorités guinéennes et aux entités internationales pour continuer à soutenir les efforts judiciaires.

Une annexe au document fournit un résumé détaillé récapitulant les 18 mois de procès, qui s’appuie sur le travail de Human Rights Watch en tant qu’observateur et sur la couverture médiatique.

Ce procès est le premier à se tenir à l’encontre de responsables guinéens de haut rang accusés de s’être livrés à des atrocités de grande ampleur dans le pays. Les audiences ont été suivies et discutées à travers toute la Guinée.

Le jour où sera prononcé le verdict devrait susciter beaucoup d’attention, comme cela avait été le cas pour l’ouverture du procès le 28 septembre 2022. La salle d’audience était remplie de victimes, de membres de leurs familles et de journalistes, tandis que le procès était retransmis en direct à la télévision guinéenne et sur YouTube.

Les médias guinéens et internationaux ainsi que les observateurs peuvent suivre la retransmission en direct du verdict et demander également une accréditation pour assister à l’audience à Conakry.

Ce procès mérite de recevoir une attention internationale en raison de la gravité des crimes jugés mais aussi parce qu’il démontre que les tribunaux nationaux sont essentiels dans la lutte contre l’impunité. Les leçons tirées de l’expérience guinéenne pourraient jouer un rôle important en encourageant les meilleurs pratiques dans le pays et à l’échelle internationale, a déclaré Human Rights Watch.

25.07.2024 à 06:00

Niger : Les droits humains en chute libre un an après le coup d’État

Human Rights Watch

Click to expand Image Mohamed Toumba, un officier impliqué dans le départ du président nigérien Mohamed Bazoum, s'addresse aux partisans de la junte militaire à Niamey, au Niger, le 6 août 2023. © 2023 AP Photo/Sam Mednick, File

(Nairobi) – Les autorités militaires au Niger ont réprimé l’opposition, les médias et la dissidence pacifique depuis qu’elles ont pris le pouvoir lors d’un coup d’État mené il y a un an, ont déclaré aujourd’hui Amnesty International, Human Rights Watch et la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH).

Elles ont arrêté arbitrairement l’ancien président Mohamed Bazoum, au moins 30 responsables du gouvernement renversé et personnes proches du président destitué, ainsi que plusieurs journalistes. Elles ont rejeté tout examen de leurs dépenses militaires, en dépit de leurs déclarations en faveur de la lutte contre la corruption. Les autorités nigériennes devraient libérer immédiatement toutes les personnes détenues pour des motifs politiques ; garantir le respect des libertés fondamentales, notamment les droits à la liberté d’expression, d’opinion et d’association ; et s’engager publiquement à faire preuve de transparence et de redevabilité dans la gestion des dépenses militaires.

« Un an après le coup d’État militaire, au lieu d’avancer sur la voie du respect des droits humains et de l’État de droit, les autorités militaires accentuent la pression sur l’opposition, la société civile et les médias indépendants », a déclaré Samira Daoud, directrice régionale d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et centrale. « Les autorités militaires nigériennes devraient libérer Mohamed Bazoum ainsi que toutes les personnes détenues pour des raisons politiques et garantir leurs droits à une procédure régulière. »

Le 26 juillet 2023, le général Abdourahamane Tiani et d’autres officiers de l’armée nigérienne du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) ont renversé Mohamed Bazoum, élu à la présidence du pays en 2021, et l’ont détenu arbitrairement, lui, sa famille et plusieurs membres de son cabinet. En réponse au coup d’État, le 30 juillet 2023, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a imposé des sanctions, notamment des sanctions économiques, des interdictions de voyager et des gels d’avoirs, aux leaders du coup d’État et au pays en général. Le 22 août 2023, l’Union africaine a suspendu le Niger de toute participation à ses organes, institutions et activités. Le 28 janvier 2024, le Niger, le Burkina Faso et le Mali ont annoncé leur retrait de la CEDEAO, et le 24 février, cette dernière a levé les sanctions contre le Niger.

Depuis le coup d’État, Mohamed Bazoum et son épouse sont détenus au palais présidentiel à Niamey, la capitale. Les trois organisations ont exprimé à plusieurs reprises des inquiétudes quant à leur bien-être. En août 2023, les autorités ont annoncé leur intention de traduire en justice Mohamed Bazoum pour « haute trahison » et atteinte à la sûreté intérieure et extérieure, mais il n’a pas encore été présenté à un juge. En septembre 2023, Mohamed Bazoum a intenté une action en justice devant la Cour de justice de la CEDEAO à Abuja, invoquant des violations des droits humains à son encontre et à l’encontre de sa famille pendant leur détention. En décembre 2023, la Cour de la CEDEAO a statué que Mohamed Bazoum avait été arbitrairement détenu et a appelé à sa libération. En avril, les autorités ont engagé une procédure judiciaire contre Mohamed Bazoum pour lever son immunité présidentielle afin qu’il puisse être jugé pour des crimes présumés commis après son élection en tant que président en 2021. Le 14 juin 2024, la Cour d’État du Niger a levé l’immunité à l’issue d’une procédure qui n’a pas respecté les normes essentielles d’une procédure régulière ainsi que les standards internationaux en matière de procès équitable, notamment le droit à la défense.

Les autorités militaires ont également arrêté arbitrairement au moins 30 responsables du gouvernement déchu, y compris d’anciens ministres, des membres du cabinet présidentiel et des personnes proches de l’ancien président, sans leur accorder une procédure régulière ni respecter leurs droits à un procès équitable. Les avocats représentant les personnes arrêtées ont déclaré que leurs clients avaient été détenus au secret par les services de renseignement, avant d’être transférés dans des prisons de haute sécurité pour des accusations sans fondement. Au moins quatre d’entre eux ont été libérés sous caution en avril, tandis que tous les autres ont été accusés d’« atteinte à la sûreté de l’État », entre autres infractions, par un tribunal militaire bien qu’ils soient des civils.

Depuis le coup d’État de 2023, la liberté des médias a été fortement restreinte dans le pays. Les autorités ont menacé, harcelé et arrêté arbitrairement des journalistes, dont beaucoup indiquent qu’ils s’autocensurent par crainte de représailles.

Le 30 septembre, des hommes qui se sont présentés comme des membres des forces de sécurité ont arrêté Samira Sabou, blogueuse et journaliste, au domicile de sa mère à Niamey. Le lieu de détention de Samira Sabou est resté inconnu pendant sept jours. La police judiciaire de Niamey a d’abord nié son arrestation mais, le 7 octobre, Samira Sabou a été transférée à l’unité des enquêtes criminelles de la police de Niamey, où son avocat et son mari lui ont rendu visite. Le 11 octobre, elle a été inculpée de « production et diffusion de données susceptibles de troubler l’ordre public » et libérée dans l’attente de son jugement. Aucune date n’a été fixée pour le procès.

Le 29 janvier, le ministre de l’Intérieur a publié un décret qui a suspendu les activités de la Maison de la Presse, une organisation de médias indépendante, et annonçant la création d’un nouveau comité de gestion des médias dirigé par le secrétaire général du ministère de l’Intérieur.

Le 13 avril, les forces de sécurité ont arrêté Ousmane Toudou, journaliste et ancien conseiller en communication du président déchu. Dans les jours qui ont suivi le coup d’État de juillet 2023, Ousmane Toudou a dénoncé la prise de pouvoir par l’armée dans un message largement diffusé sur les réseaux sociaux. En mai 2024, il a été inculpé de « complot contre la sûreté de l’État » et envoyé en détention provisoire.

Le 24 avril, les forces de sécurité ont arrêté Soumana Maiga, le directeur de publication de L’Enquêteur, après que le journal a relayé un article publié par un journal français sur l’installation présumée de systèmes d’écoute par des agents russes sur des bâtiments officiels de l’État. Il a été présenté à un juge en mai, placé en détention pour atteinte à la défense nationale et libéré le 9 juillet dans l’attente de son procès.

Tchima Illa Issoufou, correspondante de la radio BBC en langue haoussa au Niger, a déclaré avoir reçu des menaces de la part de membres des forces de sécurité l’accusant de tenter de « déstabiliser le Niger » en raison de sa couverture de la situation sécuritaire dans la région de Tillabéri, dans l’ouest du Niger, où des groupes islamistes armés mènent des attaques contre les civil·e·s et les forces de sécurité. « J’ai été attaquée par des partisans de la junte sur les réseaux sociaux », a-t-elle expliqué à Amnesty International en mai après avoir fui le Niger pour un autre pays. « Ils m’ont accusée de travailler sous influence étrangère. » Le 26 avril, les forces de sécurité ont arrêté Ali Tera, un militant de la société civile que Tchima Illa Issoufou avait interviewé.

Le 29 mai, le ministre de la Justice et des Droits de l’homme a publié une circulaire suspendant toute visite des organisations de défense des droits humains dans les prisons nigériennes « jusqu’à nouvel ordre », en violation du droit national et international relatif aux droits humains, y compris la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, que le Niger a ratifiée en 1988.

Le 12 juin, le ministre de la Justice et des Droits de l’homme a publié un communiqué de presse annonçant la modification d’une loi de 2019 sur la cybercriminalité. Cette loi, qui criminalisait « la diffusion, la production et la mise à la disposition d’autrui de données pouvant troubler l’ordre public ou portant atteinte à la dignité humaine par le biais d’un système d’information », a été utilisée pour réprimer les droits humains, notamment le droit à la liberté d’expression en ligne en 2020. En 2022, le gouvernement de Mohamed Bazoum, à la suite d’une campagne soutenue de la société civile, a modifié la loi, remplaçant les peines de prison par des amendes pour les infractions liées à la diffamation. Les modifications du 12 juin, cependant, rétablissent les peines d’emprisonnement.

« La longue liste d’attaques contre des journalistes au cours de l’année écoulée témoigne de la détermination des autorités à restreindre la liberté de la presse et le droit d’accès à l’information », a expliqué Drissa Traoré, secrétaire général de la FIDH. « La modification de la loi de 2019 sur la cybercriminalité constitue un recul dangereux et pourrait être utilisée pour faire taire toute voix jugée dissidente, et certainement pour cibler davantage les défenseur·e·s des droits humains, les activistes et les journalistes. Les autorités nigériennes doivent revenir sur cette décision et garantir la liberté d’expression. »

La Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, tous deux ratifiés par le Niger en 1986, garantissent les droits à la liberté d’opinion et d’expression.

Le 23 février, Abdourahamane Tiani, qui s’est engagé à lutter contre la corruption après avoir pris le pouvoir, a signé une ordonnance abrogeant tout examen des dépenses militaires. L’ordonnance stipule que « les dépenses ayant pour objet l’acquisition d’équipement ou matériel ou de toute autre fourniture, la réalisation de travaux ou de services destinés aux forces de défense et de sécurité […] sont exclues du champ d’application de la législation relative aux marchés publics et à la comptabilité publique » et sont également exonérées d’impôts. La transparence vis-à-vis des budgets et dépenses militaires est cruciale pour lutter contre la corruption et la mauvaise gestion. Elle contribue par ailleurs au respect des droits humains et de l’État de droit, à une gestion adéquate des dépenses militaires et à la redevabilité du gouvernement, ont déclaré les organisations.

« L’examen public des activités économiques de l’armée est non seulement essentiel pour rétablir un régime démocratique civil et tenir les autorités militaires pour responsables des abus, mais aussi pour prévenir la perte de ressources publiques due à la corruption et à la mauvaise gestion », a conclu Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « Les autorités nigériennes devraient s’engager en faveur de la transparence et de la redevabilité en divulguant immédiatement des informations financières vérifiables sur les dépenses militaires. »

23.07.2024 à 10:02

Un arrêté au Cameroun restreint la liberté d’expression de manière injustifiée

Human Rights Watch

Click to expand Image Le parlement camerounais à Yaoundé, le 17 novembre 2017. © 2017 AFP via Getty Images

Il devient de plus en plus difficile de s’exprimer librement au Cameroun.

Dans un arrêté du 16 juillet, Emmanuel Mariel Djikdent, le préfet de Mfoundi, le département où se situe la capitale, Yaoundé, a précisé que quiconque « outrage dangereusement les institutions [de l’État] ou celui qui les incarne », pourrait se voir interdire de séjour dans ce secteur. Emmanuel Mariel Djikdent a adopté cet arrêté pour « préserver l’ordre public ».

Deux jours plus tard, René Emmanuel Sadi, le ministre de la Communication, a publié un communiqué affirmant qu’« il est inacceptable que des compatriotes […] usent de propos irrévérencieux » à l’encontre du président Paul Biya, « qui a été librement et majoritairement élu par ses concitoyens ».

Le décret suscite légitiment l’inquiétude de professionnels des médias et de dirigeants de partis d’opposition, qui le décrivent comme un recul en matière de droit à la liberté d’expression. Ces annonces sont les dernières en date d’une série de décisions gouvernementales préoccupantes et manifestement destinées à museler l’opposition et la dissidence à l’approche des élections présidentielles de 2025.

En mars, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a interdit deux coalitions d’opposition qu’il a qualifiées de « mouvements clandestins ». En juin, à N’Gaoundéré, dans la région de l’Adamawa, des gendarmes ont procédé à l’arrestation arbitraire, une fois de plus, d’Aboubacar Siddiki, dit Babadjo, un artiste de premier plan et membre de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès, peu de temps après sa remise en liberté. Il avait été condamné à trois mois de prison pour avoir insulté un gouverneur. En juillet, l’Assemblée nationale du Cameroun a adopté une loi prorogeant le mandat de ses membres jusqu’en mars 2026 et reportant les élections législatives prévues en février 2025. Une décision qui, selon les partis d’opposition, réduira leurs chances de victoire aux élections présidentielles, toujours prévues pour 2025. Le président sortant, Paul Biya, âgé de 91 ans, exerce son septième mandat depuis son arrivée au pouvoir en 1982. Il a été réélu en 2018 à l’issue d’un vote contesté qui a déclenché une vague de répression politique.

En vertu du droit international relatif aux droits humains, le droit à la liberté d’expression ne peut être restreint que pour certains motifs limités, tels que la sécurité nationale ou la protection des droits d’autrui et, même dans ces cas, les restrictions doivent être nécessaires, proportionnées et non discriminatoires. L’arrêté du 16 juillet inclue des dispositions qui ne répondent pas à ces principes et pourrait être invoqué pour violer les droits et s’en prendre aux voix dissidentes. À l’approche des élections, les autorités du pays devraient pleinement respecter le droit à la liberté d’expression de tous les Camerounais et abroger ce décret.

22.07.2024 à 16:04

La Cour internationale de justice estime qu'Israël est responsable d’apartheid

Human Rights Watch

(New York) - La Cour internationale de justice (CIJ) a rendu un avis consultatif le 19 juillet 2024 ayant des conséquences importantes pour la protection des droits humains en Palestine, occupée depuis 57 ans par Israël. Cet avis fait suite à une requête de l'Assemblée générale des Nations Unies en décembre 2022 demandant à la Cour d'examiner les conséquences juridiques des politiques et des pratiques d'Israël dans le Territoire palestinien occupé. La citation suivante peut être attribuée à Tirana Hassan, directrice exécutive de Human Rights Watch : « Dans un avis historique, la Cour internationale de justice a constaté de multiples et graves violations du droit international par Israël à l'égard des Palestiniens dans le Territoire palestinien occupé, y compris, pour la première fois, en estimant qu'Israël est responsable d'apartheid. La Cour a confié à tous les États et aux Nations unies la responsabilité de mettre fin à ces violations du droit international. Cette décision devrait constituer un nouvel avertissement pour les États-Unis qui devraient cesser leur politique choquante consistant à défendre l'oppression des Palestiniens par Israël et inciter d'autres pays à procéder eux aussi à une réévaluation en profondeur de leur politique ».

19.07.2024 à 19:43

La Cour internationale de justice examine l’occupation israélienne en vigueur depuis 57 ans

Human Rights Watch

Click to expand Image La Cour internationale de Justice à La Haye, aux Pays-Bas, le 27 août 2018. © 2018 Mike Corder/AP Photo

(La Haye) – La Cour internationale de Justice (CIJ) s’apprête à rendre, ce 19 juillet 2024, un avis consultatif qui aura des répercussions considérables sur la protection des droits humains en Palestine occupée par Israël depuis 57 ans, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. L’avis consultatif attendu fait suite à une requête adressée à la Cour par l’Assemblée générale des Nations Unies pour qu’elle examine les conséquences légales des politiques et des pratiques israéliennes dans le Territoire palestinien occupé.

La CIJ a tenu des audiences portant sur l’occupation israélienne pendant six jours en février. Cinquante pays et trois organisations internationales ont participé aux procédures orales, soit, d’après l’analyse de Human Rights Watch, davantage que dans n’importe quelle autre affaire du plus haut organe judiciaire international depuis qu’il a démarré ses activités en 1946.

« L’avis de la Cour internationale constituera sa première évaluation exhaustive des répercussions en matière de droits humains, pour les Palestiniens, des politiques et pratiques de l’occupation israélienne », a déclaré Clive Baldwin, conseiller juridique senior au sein de Human Rights Watch. « Les recommandations de la Cour pourraient mettre en lumière les causes profondes qui sous-tendent les atrocités dévastatrices actuelles et ouvrir la voie vers une réparation des préjudices flagrants causés en toute impunité par les autorités israéliennes depuis six décennies. »

Se fondant sur la requête de l’Assemblée générale de l’ONU, la Cour jouit de vastes attributions pour ce qui est des sujets couverts par son avis consultatif. Elle peut aussi bien examiner les pratiques et politiques d’Israël contraires au droit international interdisant la discrimination raciale, dont le crime contre l’humanité d’apartheid, qu’évaluer l’application du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits humains sous le régime d’occupation. 

La Cour peut également évaluer les responsabilités légales incombant aux autres pays et aux Nations Unies pour faire face aux violations du droit international qui découlent de l’occupation israélienne. Les États devraient adopter les recommandations de la CIJ afin de guider leur action pour mettre fin aux violations du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits humains à l’encontre des Palestiniens, a déclaré Human Rights Watch.

Israël, qui rejette l’applicabilité à la Palestine du droit international régissant l’occupation d’un territoire, a entrepris d’annexer illégalement Jérusalem Est occupée en 1967, tandis qu’en 2023, il a transféré des éléments clés lui permettant de contrôler la Cisjordanie des autorités militaires vers les autorités civiles. Le pays refuse également de reconnaître les responsabilités qui lui incombent vis-à-vis des civils palestiniens en tant que pouvoir occupant de la bande de Gaza. Pourtant, il demeure bien, aux yeux du droit international, le pouvoir occupant à Gaza et en Cisjordanie, y compris Jérusalem Est, et est à ce titre légalement responsable vis-à-vis de la population civile de tous le Territoire palestinien occupé.

Le processus d’examen des conséquences légales des politiques et des pratiques d’occupation d’Israël par la CIJ a commencé en décembre 2022, bien avant l’escalade des hostilités entre Israël et les groupes armés palestiniens en octobre 2023. Le 7 octobre 2023,  des groupes armés palestiniens ont lancé un assaut dans le sud d’Israël et pris 251 personnes en otage, commettant des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ; depuis, ils ont continué à lancer des roquettes sans discernement en direction de zones urbaines peuplées. Les forces israéliennes ont illégalement attaqué des bâtiments d’habitation, des centres médicaux, des travailleurs humanitaires, restreint les évacuations médicales, bloqué l’aide humanitaire et utilisé la famine comme arme de guerre dans la bande de Gaza, qui a subi des pertes humaines effroyables : plus de 38 600 personnes ont été tuées, selon le ministère de la Santé de Gaza. Les autorités israéliennes ont détenu au secret et maltraité des milliers de Palestiniens, avec des informations persistantes faisant état de torture.  

En Cisjordanie occupée, où les forces israéliennes ont tué plus de 530 Palestiniens depuis le 7 octobre, des colons et des soldats ont déplacé des communautés palestiniennes entières, détruisant chaque habitation, avec le soutien apparent des plus hautes autorités israéliennes, et confisquant de fait leurs terres. 

L’avis consultatif de la Cour internationale devrait se concentrer sur les répercussions légales de l’occupation plutôt que sur le comportement des forces israéliennes et des groupes armés palestiniens lors des hostilités récentes. Cependant, les abus et violations commis par toutes les parties depuis octobre ont eu lieu dans le contexte de l’occupation et de l’accélération de l’extension des colonies illégales par les autorités israéliennes, ainsi que par la continuation du crime d’apartheid, un crime contre l’humanité, et des persécutions à l’égard des Palestiniens. Dans les contributions qu’ils ont présentées à la Cour, 25 pays ont cité la commission des crimes contre l’humanité que constituent l’apartheid ou la persécution à l’encontre des Palestiniens par Israël comme une des conséquences clés de l’occupation.   

La CIJ juge des litiges entre États et émet des avis consultatifs relevant du droit international. Elle n’est pas compétente pour juger les actes de groupes armés non étatiques comme le Hamas. Bien que les avis consultatifs de la CIJ ne soient pas contraignants, ils peuvent être d'une grande valeur morale et légale, s’incorporant à terme dans le droit international coutumier, qui est juridiquement contraignant pour les États. Le dernier avis consultatif émis par la CIJ, datant de 2019, portait sur l’expulsion des habitants de l’archipel des Chagos par le Royaume-Uni et la décolonisation de l’île Maurice.

L’Assemblée générale des Nations Unies pourrait organiser un débat portant sur l’avis de la CIJ. À une écrasante majorité, elle avait voté en 2004 pour exiger d’Israël qu’il se conforme à un avis consultatif émis par la CIJ en juillet de la même année et concluant que le tracé du mur de séparation construit par Israël violait le droit international et que ce mur devait être démantelé.

Ces procédures de la CIJ sont distinctes de celles de la plainte déposée par l’Afrique du Sud, qui avance qu’Israël viole la Convention sur le génocide. Même s’il faudra certainement attendre des années avant que cette plainte ne soit jugée, la CIJ a ordonné à trois reprises à Israël de prendre certaines mesures, notamment permettre la fourniture de services de base et d’aide humanitaire à Gaza. Les recherches de Human Rights Watch démontrent qu’Israël continue à bafouer les ordonnances de la Cour, ce qui a des conséquences dévastatrices pour les Palestiniens à Gaza.

Cette procédure de la CIJ est également distincte de celles en cours auprès de la Cour pénale internationale (CPI), dotée d’un mandat pour juger de la responsabilité pénale des individus. Le 20 mai, le Procureur de la CPI, Karim Khan, a annoncé qu’il demandait des mandats d’arrêt contre deux hauts responsables israéliens et trois leaders du Hamas. Khan a confirmé que son bureau enquêtait depuis mars 2021 sur des atrocités commises à Gaza et en Cisjordanie, y compris Jérusalem Est, depuis 2014, et que son bureau avait compétence sur les crimes commis au cours des hostilités actuelles entre Israël et des groupes armés palestiniens, couvrant les actes illégaux de toutes les parties. 

Étant donné que les responsabilités d’une puissance occupante vis-à-vis des droits de la population occupée croissent avec le temps, Human Rights Watch a également appelé Israël à octroyer aux Palestiniens du territoire occupé des droits au moins égaux à ceux qu’il accorde à ses propres citoyens, en plus des protections découlant du droit international humanitaire.

La CIJ est composée de quinze juges élus par l’Assemblée générale des Nations Unies et le Conseil de sécurité pour des mandats de neuf ans. Cinquante-sept États et organisations internationales ont déposé une déclaration écrite au cours de la procédure en juillet 2023. Quinze États et organisations internationales ont transmis des observations écrites additionnelles en octobre et novembre 2023. Quant à Israël, il a transmis une déclaration écrite, mais choisi de ne pas prendre part aux audiences.

« La participation d’un si grand nombre d’États aux audiences qui ont débouché sur l’avis de la Cour internationale de justice démontre l’importance des questions qui lui sont soumises », a conclu Clive Baldwin. « Cet avis pourrait constituer une feuille de route utile pour les États cherchant à protéger les droits humains et à mettre fin à des années d’impunité pour les violations des droits en Israël et en Palestine. »  

19.07.2024 à 09:41

La fille du Président camerounais appelle à la décriminalisation de l’homosexualité

Human Rights Watch

Click to expand Image Une photo de la série intitulée « Visibilité Trans : De l'ombre à la lumière », par Femmes Debout, Cameroun. © 2023 Femmes Debout

Le 9 juillet, dans un entretien accordé à un quotidien français au sujet de sa relation avec une autre femme, Brenda Biya, la fille du président camerounais Paul Biya, âgée de 27 ans, a appelé à la dépénalisation des relations homosexuelles consensuelles dans son pays.

Son coming out témoigne d’un réel courage puisque le code pénal camerounais punit les relations homosexuelles d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant s’élever jusqu’à 200 000 francs CFA (environ 330 dollars). Les arrestations arbitraires, les agressions physiques et verbales et les actes de torture subies par les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT), ou perçues comme telles, sont monnaie courante au Cameroun et semblent en hausse.

Brenda Biya est une défenseure des droits humains problématique.

De nombreuses violations des droits ont été perpétrées sous le règne de son père, notamment l’emprisonnement de dirigeants politiques, des meurtres et des disparitions forcées dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest du pays, ainsi que de la corruption, dont des pots-de-vin. Néanmoins, la déclaration de Biya pourrait contribuer à changer le discours en vigueur dans un environnement notoirement hostile aux personnes LGBT. En mai 2021, deux femmes transgenres camerounaises ont été condamnées à cinq ans d’emprisonnement dans une prison pour hommes pour « tentative d’homosexualité » et « outrage public à la pudeur ». Lors de leur arrestation, les gendarmes les ont rouées de coups, menacées de mort, et les ont interrogées en l’absence de leurs avocats, les forçant à signer des déclarations.

Malgré la mobilisation croissante des personnes LGBT au Cameroun pour défendre leurs droits, de nombreuses personnes ont déclaré à Human Rights Watch qu’elles continuent de vivre dans la peur constante d’être attaquées ou arrêtées. Pour échapper à la persécution, affirment-elles, la seule solution est souvent de fuir et de demander l’asile dans d’autres pays. La plupart des migrants LGBT sont également confrontés à de multiples discriminations, notamment le racisme et la violence xénophobe.

Brenda Biya, qui ne vit pas au Cameroun, se trouve dans une position privilégiée et son coming-out ne lui fait pas courir de danger immédiat. Pourtant, ses récentes déclarations sur la criminalisation des relations homosexuelles sont légitimes et doivent être entendues. À la suite de cet entretien, une organisation anti-LGBT au Cameroun a déposé une plainte pénale contre elle.

Brenda Biya pourrait désormais envisager de dénoncer les autres violations graves des droits qui ont été commises dans son pays et continuent de l’être sous le règne de son père, qui dure depuis 42 ans. Les législateurs camerounais devraient abroger de toute urgence les dispositions discriminatoires du code pénal et agir conformément à la constitution et aux conventions internationales pour garantir l’égalité des droits et la justice pour tous.

18.07.2024 à 15:00

France : À l'approche des Jeux Olympiques, les droits humains mis en lumière

Human Rights Watch

Click to expand Image Les anneaux olympiques sur la Tour Eiffel, le 7 juin 2024 à Paris. © 2024 AP Photo/Aurelien Morissard

(Paris) - Les Jeux olympiques et paralympiques en France devraient donner lieu à des avancées pour garantir la tolérance, la non-discrimination et la défense des droits humains fondamentaux, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui dans un nouveau guide publié à l'attention des journalistes qui couvrent les Jeux. La cérémonie d’ouverture des Jeux d'été de Paris 2024 se tiendra sur la Seine le 26 juillet 2024. 

Human Rights Watch Reporters' Guide for the 2024 Paris Summer Olympic and Paralympic Games

Le "Guide pour les journalistes : Jeux olympiques et paralympiques d'été 2024 à Paris" de 35 pages résume les préoccupations en matière de droits humains liées aux Jeux de Paris et plus globalement en France. Le guide décrit également le rôle du Comité international olympique (CIO) et des autres comités olympiques, et leur place dans la promotion des droits humains pendant les Jeux olympiques et paralympiques de Paris.

« Les Jeux olympiques sont l’occasion de mettre en lumière les préoccupations quant à la dégradation de la situation des droits humains en  France », a déclaré Bénédicte Jeannerod, directrice pour la France à Human Rights Watch. « Par exemple, contrairement aux valeurs olympiques d'inclusion et de non-discrimination, les personnes racialisées, y compris les migrants, sont confrontées à des abus et une discrimination systémiques en France. » 

Les prochains Jeux se déroulent dans le contexte des récentes élections législatives anticipées en France, convoquées par le président Emmanuel Macron à la suite de la victoire du parti d'extrême droite, le Rassemblement national, aux élections européennes du 9 juin. La campagne électorale a été marquée par une montée de la rhétorique raciste, xénophobe et discriminatoire, ainsi que par une polarisation politique extrême. La société civile s'est massivement mobilisée en faveur de la tolérance et de la non-discrimination, et une majorité d'électeurs a refusé d'être gouvernée par l'extrême droite. Le nouveau gouvernement n'a pas encore été nommé. 

Les Jeux de 2024 à Paris marquent le centenaire des Jeux olympiques de Paris de 1924 et c’est la troisième fois que Paris accueillera les Jeux d'été. Avec plus de 200 pays participant aux Jeux olympiques et paralympiques, 15 millions de touristes attendus et une audience télévisuelle mondiale prévue de 5 milliards de téléspectateurs, ces Jeux pourraient être les plus regardés de tous les temps.

Le slogan de Paris 2024 est « Ouvrons grand les Jeux ». Cette devise vise à montrer que ces Jeux seront plus inclusifs, plus ouverts et plus égalitaires, notamment en ce qui concerne la parité hommes-femmes dans la participation des athlètes. 

Les Jeux olympiques et paralympiques en France sont les premiers à avoir lieu depuis que le CIO a adopté un cadre stratégique en matière de droits humains en 2022.  Le CIO a qualifié Paris 2024 de « première édition des Jeux qui intégrera les droits humains dans l'organisation et la réalisation de l'événement ». 

Mais plutôt qu’une amélioration des droits à l'occasion des Jeux, on constate une érosion préoccupante de l'État de droit en France et des rapports font état d’abus inquiétants. 

La Charte olympique interdit expressément « toute forme de discrimination » en tant que « principe fondamental de l'Olympisme ». Les restrictions imposées aux athlètes féminines portant le foulard ont été annulées dans le sport mondial à partir de 2014, car l'interdiction excluait des millions de femmes et de filles de la participation à des sports tels que le football et le basketball. 

Cependant, en France, les autorités sportives ont mis en place des interdictions pour les athlètes françaises portant le foulard aux JO de Paris 2024 et au-delà, à tous les niveaux du sport. Cette discrimination à l'encontre des femmes et des filles portant le hijab est particulièrement préoccupante compte tenu de la célébration par le CIO de Paris 2024 comme les premiers « Jeux olympiques à atteindre la parité de genre ».

Ces interdictions ont pour effet de discriminer les athlètes féminines du pays hôte des Jeux olympiques et de les empêcher d'exercer leurs droits fondamentaux. Les femmes et les filles musulmanes françaises qui choisissent de porter le foulard ne pourront jamais se qualifier pour ces Jeux ou pour de futurs Jeux, étant exclues des entraînements et compétitions nécessaires pour atteindre le niveau olympique. Les athlètes musulmanes d'autres nations participeront aux Jeux olympiques et paralympiques en portant un couvre-chef sportif sans aucune restriction. 

Les restrictions des libertés fondamentales sont en hausse en France, avec des limitations croissantes de la liberté d'expression, du droit de manifester et de la liberté d'association. L'érosion de l'espace civique est accentuée par l'expansion et l'utilisation de technologies invasives de surveillance de masse, invoquées comme mesures de sécurité lors d’un événement de l’importance des Jeux olympiques et paralympiques. La nouvelle loi sur la surveillance des « Jeux olympiques » est la première du genre dans l'Union européenne à légaliser explicitement l'utilisation d’une technologie controversée de vidéosurveillance basée sur des algorithmes, qui risque d'entraîner une discrimination à l'encontre des personnes racialisées lors des Jeux. 

« Les compétitions sportives internationales ne devraient pas avoir de conséquences négatives à long terme à travers des politiques qui réduisent les libertés et les droits fondamentaux des personnes en France et au-delà », a ajouté Bénédicte Jeannerod. 

Alors que des milliers d'athlètes arrivent à Paris en provenance des quatre coins du monde, le guide traite également des abus commis à l'encontre des athlètes dans le monde entier, notamment les violences sexuelles et sexistes, la maltraitance des enfants dans le sport et les tests sexuels pratiqués sur les athlètes féminines. Dans le cadre de recherches menées au Japon, en Haïti, au Mali et en Inde, Human Rights Watch a travaillé avec des athlètes lanceurs d’alerte et des survivant·e·s d'abus pour dénoncer les violations et comprendre comment le sport crée des systèmes qui permettent aux violations des droits humains de se développer. Les athlètes et les survivant·e·s exigent des réformes de la part des fédérations sportives nationales et internationales afin de mettre en place des systèmes solides permettant de signaler les abus en toute sécurité et d'enquêter à leur sujet. 

Le guide pour les journalistes de Human Rights Watch fournit une vision d'ensemble du contexte des droits humains en France et dans le sport mondial pour la couverture des Jeux olympiques et paralympiques. Il comprend des informations générales sur les Jeux olympiques et les droits humains, sur les athlètes en proie à une discrimination systémique dans la pratique du sport, sur les personnes en France confrontées à un racisme structurel de la part des forces de l'ordre, sur les abus systémiques et les efforts de réforme au sein du mouvement olympique, ainsi que sur les récents développements en matière de violations des droits humains et les cas qu'il est intéressant de couvrir. 

« Le véritable héritage de ces Jeux d'été ne devrait pas se mesurer uniquement en nombre de médailles ou de records, mais dans la capacité du gouvernement français à démontrer un engagement sans faille et durable pour le respect des droits humains », a affirmé Bénédicte Jeannerod.

17.07.2024 à 16:20

La liberté des médias ne devrait pas être prise pour cible en RD Congo

Human Rights Watch

Click to expand Image Des journalistes assistent à un meeting dans le cadre de la campagne électorale du président Félix Tshisekedi à Goma, dans la province du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo, le 10 décembre 2023. © 2023 ALEXIS HUGUET/AFP via Getty Images

La semaine dernière, le Conseil supérieur de l'audiovisuel et de la communication (CSAC) a suspendu le journaliste Jessy Kabasele pour une durée indéterminée, suite à son interview avec l'un des chanteurs les plus célèbres du pays, Koffi Olomidé, dans le cadre de l'émission Le Panier, The Morning Show. Au cours de cette interview, diffusée par la Radio-Télévision nationale congolaise (RTNC), Koffi Olomidé a critiqué la réponse de l'armée à l'assaut des rebelles du M23, la jugeant trop faible.

Les autorités congolaises combattent le groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda, depuis la reprise des hostilités dans la province du Nord-Kivu en 2022.

Le CSAC a accusé Jessy Kabasele de ne pas avoir recadré les propos de Koffi Olomidé, dont il estime qu'ils « sape[nt] les énormes efforts et sacrifices consentis par le Gouvernement de la République ». L'autorité de régulation des médias a convoqué Jessy Kabasele et Koffi Olomidé la semaine dernière tandis que les avocats de ce dernier auraient rencontré un procureur le 15 juillet.

L'autorité de régulation des médias du Congo a récemment entravé la couverture médiatique du conflit. En février, le CSAC a publié une directive demandant aux médias de ne pas diffuser des débats à propos des opérations de l'armée congolaise sans la présence d'au moins un « expert en la matière ». Il a également demandé aux journalistes d'éviter « les émissions à téléphone ouvert sur les opérations militaires » et de s’abstenir d'interviewer les « forces négatives », un terme vague et imprécis qui laisse la porte ouverte à des interdictions arbitraires.

En avril, le CSAC a recommandé aux médias de ne plus « diffuser les informations en rapport avec la rébellion dans l'Est de la RDC sans se référer aux sources officielles [gouvernementales] ».

Si le droit international relatif aux droits humains autorise les gouvernements à déroger à certaines de leurs obligations en matière de respect de la liberté d'expression en période d'état d'urgence, des normes strictes régissent ce que les gouvernements peuvent faire et comment ils peuvent le faire. Ces normes, qui prévoient que les restrictions doivent avoir une base juridique claire, être nécessaires et proportionnées, garantissent que l'essence de la liberté d'expression, y compris la liberté de rechercher, de recevoir et de transmettre des idées et des informations, soit sauvegardée. Les restrictions du CSAC à la liberté d'expression et à la liberté de la presse ne sont pas conformes à ces normes.

Les cas de Koffi Olomidé et de Jessy Kabassele font écho à ceux d'autres journalistes et personnalités publiques pris pour cible par les autorités.

Le travail des journalistes congolais opérant dans les provinces de l'Est est jalonné de dangers et il convient de saluer leur dévouement et engagement. Au lieu de punir les journalistes et les citoyens pour avoir exprimé leur opinion sur une crise qui dévaste le pays, les autorités devraient protéger les droits des journalistes à travailler librement et en toute sécurité.

17.07.2024 à 06:01

Crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis le 7 octobre par des groupes menés par le Hamas

Human Rights Watch

Click to expand Image Une photo de famille est accrochée au mur à l'intérieur d'une maison incendiée dans le kibboutz de Be'eri à la suite de l'assaut du 7 octobre 2023 par des groupes armés palestiniens dans le sud d'Israël, le 14 octobre 2023.  © 2023 Marcus Yam / Los Angeles Times Les groupes armés menés par le Hamas ont commis un grand nombre de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité contre des civils lors de l'attaque du 7 octobre dans le sud d'Israël.Les combattants palestiniens ont commis des exécutions sommaires, des prises d'otages et d'autres crimes de guerre, ainsi que des crimes contre l'humanité tels que des meurtres et des emprisonnements injustifiés.Les gouvernements exerçant une influence sur les groupes armés palestiniens devraient faire pression pour que tous les otages civils soient libérés d'urgence.

(Jérusalem) – La branche militaire du Hamas – les Brigades al-Qassam – et au moins quatre autres groupes armés palestiniens ont commis de nombreux crimes de guerre et crimes contre l'humanité contre des civils lors de l'attaque du 7 octobre 2023 dans le sud d'Israël, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. Les gouvernements exerçant une influence sur les groupes armés devraient faire pression pour que les otages civils, dont la détention constitue un crime de guerre toujours en cours, soient libérés d’urgence, et que les responsables soient traduits en justice.

Le rapport de 236 pages, intitulé « “I Can’t Erase All the Blood from My Mind”: Palestinian Armed Groups’ October 7 Assault on Israel » (« “Je ne peux pas effacer tout le sang de mon esprit” : L’attaque du 7 octobre commise par des groupes armés palestiniens contre Israël » - lien vers le résumé et les recommandations en français), documente plusieurs dizaines de cas de violations graves du droit international humanitaire par des groupes armés palestiniens, sur presque tous les sites d’attaques contre des civils le 7 octobre. Il s’agit notamment de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, tels que des meurtres, des prises d’otages et d’autres infractions graves. Human Rights Watch a également examiné le rôle de divers groupes armés et leur coordination avant et pendant les attaques. De précédents rapports de Human Rights Watch ont fait état d’un grand nombre de violations graves commises par les forces israéliennes à Gaza depuis le 7 octobre.

17 juillet 2024 “I Can’t Erase All the Blood from My Mind”

« Les recherches de Human Rights Watch ont révélé que l'attaque menée par le Hamas le 7 octobre avait pour but de tuer des civils et de prendre en otage autant de personnes que possible », a déclaré Ida Sawyer, directrice de la division Crises et conflits à Human Rights Watch. « Les atrocités du 7 octobre devraient susciter un appel mondial à l’action pour mettre fin à tous les abus contre les civils en Israël et en Palestine. »

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Entre octobre 2023 et juin 2024, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 144 personnes, dont 94 Israéliens et ressortissants d’autres pays qui ont été témoins de l’attaque du 7 octobre, des membres des familles des victimes, des premiers intervenants et des experts médicaux. Les chercheurs ont également vérifié et analysé plus de 280 photographies et vidéos prises lors de l’attaque et publiées sur les réseaux sociaux ou partagées directement avec Human Rights Watch.

Dans la matinée du 7 octobre, des groupes armés palestiniens agissant sous la direction du Hamas ont mené de nombreuses attaques coordonnées contre des bases militaires israéliennes et des communautés résidentielles civiles, ainsi que des sites d’événements sociaux dans la zone du sud d'Israël bordant la bande de Gaza. Les groupes armés ont attaqué au moins 19 kibboutz et 5 moshavs (communautés coopératives), les villes de Sderot et Ofakim, 2 festivals de musique et une fête sur la plage. Les combats ont duré une bonne partie de la journée, voire plus longtemps dans certains cas.

Time Will Tell: How Human Rights Watch Identifies Time Through Analyzing Videos

For the past nine months, Human Rights Watch has continued to document ongoing atrocity crimes and human rights violations in Palestine and Israel. For this report, we analyzed over 280 videos and photographs that, combined with witness accounts, helped to identify exactly what happened on October 7, where and when and to whom, as well as who was responsible. The purpose of this research was to bring facts to light and support accountability efforts by documenting the abuses committed on October 7 and identifying those responsible. 

Sur plusieurs sites d’attaques, les combattants palestiniens ont tiré directement sur les civils, souvent à bout portant, alors qu’ils tentaient de fuir, ainsi que sur les personnes traversant la zone en voiture. Les assaillants ont lancé des grenades, tiré sur des abris et tiré des grenades propulsées par roquette sur des maisons. Ils ont incendié des maisons, dont des habitants ont été brûlés ou asphyxiés ; ceux qui ont tenté de fuir les maisons ont abattus ou capturés. Les assaillants ont pris des dizaines de personnes en otages, et en ont sommairement tué d’autres.

Nirit Hunwald, une infirmière du kibboutz Beeri, où 97 civils ont été tués, a décrit avoir traîné un membre de l’équipe d’intervention rapide qui avait été abattu jusqu’à la clinique dentaire du kibboutz, afin de soigner ses blessures : « Il y avait une traînée de sang. Je ne peux pas effacer tout ce sang de mon esprit. »

L'Agence France-Presse a recoupé un grand nombre de sources de données, permettant de déterminer que 815 des 1 195 personnes tuées le 7 octobre étaient des civils. Les groupes armés ont pris en otages 251 civils et membres des forces de sécurité israéliennes, et les ont emmenés à Gaza. Au 1er juillet, 116 de ces personnes se trouvaient encore à Gaza ;  mais au moins 42 d’entre elles auraient été tuées, selon l'AFP. Les corps de 35 autres personnes tuées ont été rapatriés en Israël.

Les Brigades Izz al-Din al-Qassam, branche armée du Hamas, le mouvement palestinien qui depuis 2007 gouverne la bande de Gaza occupée par Israël, ont principalement mené les attaques. Human Rights Watch a confirmé la participation de quatre autres groupes armés palestiniens en se basant sur les bandeaux que portaient les combattants pour indiquer leur affiliation, et sur leurs revendications de responsabilité publiées sur leurs chaînes Telegram sur les réseaux sociaux.

Les groupes armés ont commis de nombreuses violations du droit de la guerre qui constituent des crimes de guerre, notamment des attaques ciblant des civils et des biens de caractère civil ; des meurtres de personnes en détention ; des traitements cruels et autres traitements inhumains ; des crimes impliquant des violences sexuelles et sexistes ; la prise d'otages ; la mutilation et la spoliation des corps ; l’utilisation de boucliers humains ; ainsi que des actes de pillage et de saccage.

L'attaque généralisée du 7 octobre était dirigée contre une population civile. Le meurtre de civils et la prise d’otages ont constitué les objectifs centraux de cette attaque planifiée ; il ne s’agissait pas d’actes résultant d’une réflexion après coup, d’un plan qui aurait mal tourné ou d’actes isolés. Human Rights Watch a conclu que le meurtre planifié de civils et la prise d'otages constituaient des crimes contre l'humanité.

Une enquête plus approfondie est nécessaire sur d'autres crimes potentiels contre l'humanité, a déclaré Human Rights Watch, notamment les persécutions contre tout groupe identifiable pour des raisons raciales, nationales, ethniques ou religieuses ; le viol ou toute autre violence sexuelle de gravité comparable ; et l’extermination, s’il y a eu un massacre de masse destiné à provoquer la « destruction » d’une partie d’une population. Ces actes constitueraient des crimes contre l’humanité s’ils faisaient partie d’une attaque contre une population civile, dans le cadre d’une politique organisationnelle visant à commettre une telle attaque.

L’assaut du 7 octobre commis par des groupes armés palestiniens contre Israël

Les recherches de Human Rights Watch ont révélé que les groupes armés palestiniens impliqués dans l’assaut contre Israël du 7 octobre 2023 ont commis de nombreuses violations du droit international humanitaire – les lois de la guerre – qui constituent des crimes de guerre.

En réponse à des questions posées par Human Rights Watch, les autorités du Hamas ont affirmé que leurs forces avaient reçu pour instruction de ne pas prendre pour cible les civils, et de respecter le droit international humanitaire et le droit relatif aux droits humains. Toutefois, dans de nombreux cas, les enquêtes de Human Rights Watch ont révélé des preuves du contraire.

Les témoignages de survivants ainsi que des photographies et des vidéos vérifiées montrent des combattants palestiniens recherchant des civils et les tuant sur les sites d’attaque dès le début de celle-ci, ce qui indique que le meurtre intentionnel et la prise d’otages de civils étaient planifiés et clairement coordonnés.

Quelques jours après les attaques, les autorités israéliennes ont coupé les services essentiels à la population de Gaza et bloqué l'entrée de presque tout le carburant et de l'aide humanitaire ; ces actes ont constitué une punition collective, qui est un crime de guerre. Ils ont aussi exacerbé l'impact des plus de 17 années de fermeture illégale de Gaza, et des crimes d'apartheid et de persécution commis par Israël contre les Palestiniens.

Immédiatement après les attaques dans le sud d’Israël, les forces israéliennes ont lancé un bombardement aérien intense, puis une incursion terrestre, qui se poursuivent aujourd’hui. Plus de 37 900 Palestiniens, des civils pour la plupart, ont été tués entre le 7 octobre et le 1er juillet, selon le ministère de la Santé à Gaza. Les forces israéliennes ont réduit de grandes parties de Gaza en ruines et laissé la grande majorité de la population de Gaza déplacée et exposée au danger.

Toutes les parties au conflit armé à Gaza et en Israël devraient respecter pleinement le droit international humanitaire. Les groupes armés palestiniens à Gaza devraient libérer immédiatement et sans condition les civils retenus en otages. Ils devraient prendre des mesures disciplinaires appropriées à l'encontre des membres responsables de crimes de guerre, et autoriser les poursuites contre toute personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI).

« Les atrocités commises par un camp ne justifient pas les atrocités commises par l’autre camp », a conclu Ida Sawyer. « Pour mettre un terme au cycle sans fin des abus en Israël et en Palestine, il est essentiel de s’attaquer aux causes profondes et de demander des comptes aux auteurs de crimes graves. C’est dans l’intérêt des Palestiniens et des Israéliens. »

12.07.2024 à 18:51

En Guinée, des opposants disparus de force auraient été torturés

Human Rights Watch

Click to expand Image Oumar Sylla, dit Foniké Mengué, au siège du Front National pour la Défense de la Constitution à Conakry, Guinée, mai 2022. © 2022 Privé

Dans la soirée du 9 juillet, trois membres d'une coalition d'opposition, le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), Oumar Sylla (connu sous le nom de Foniké Menguè), Mamadou Billo Bah et Mohamed Cissé, regardaient un match de football à la télévision au domicile de Foniké Menguè à Conakry, la capitale de la Guinée. Soudain, les forces de sécurité ont forcé l'entrée et arrêté arbitrairement les trois hommes, avant de les conduire vers un lieu inconnu. Les autorités n'ont toujours pas reconnu la détention et n'ont pas révélé le lieu où ils se trouvent, bien que les avocats représentant les trois opposants leur aient demandé. Cela constitue une disparition forcée au regard du droit international.

Selon des médias ainsi que des informations partagées avec Human Rights Watch par des membres du FNDC, des dizaines de soldats, dont certains seraient des membres des forces spéciales, des gendarmes et des hommes armés en civil, ont arrêté arbitrairement et battu à plusieurs reprises les trois hommes avant de les emmener d'abord à la Direction Centrale des Investigations Judiciaires de la Gendarmerie à Conakry, puis dans un camp militaire sur l'île de Kassa, au large de la ville. Une déclaration du FNDC a suggéré que les trois hommes ont été torturés au cours d'interrogatoires extrajudiciaires.

Le FNDC, une importante coalition de groupes de la société civile et de partis d'opposition guinéens, a appelé au retour à un régime démocratique après le coup d'État militaire de septembre 2021. Le matin de sa disparition, Foniké Menguè, qui est le coordinateur du FNDC, avait appelé ses partisans à manifester le 11 juillet contre la fermeture des certains médias par les autorités et le coût élevé de la vie.

En août 2022, le gouvernement guinéen a dissous le FNDC pour des raisons politiques, mais la coalition a poursuivi ses activités.

Foniké Menguè faisait partie d'un groupe de personnes arrêtées en 2022 pour des chefs d’accusation de « manifestation illicite, destruction d’édifice public et privé », à la suite de violentes manifestations à Conakry au cours desquelles au moins cinq personnes avaient été tuées. Il a été libéré en mai 2023 et blanchi de toute accusation. Mamadou Billo Bah, qui est le coordinateur des activités de sensibilisation du FNDC, avait déjà été arrêté en janvier 2023 pour des chefs d’accusation de « complicité de destruction d’édifices publics et privés, coups et blessures volontaires », pour avoir participé à des manifestations. Mamadou Billo Bah a été libéré en mai 2023 et acquitté de toutes les charges qui pesaient contre lui.

Les personnes disparues de force sont détenues sans aucune protection juridique, et sont donc beaucoup plus exposées au risque de torture et d'autres formes d'abus. Les autorités militaires guinéennes devraient immédiatement confirmer la détention et la localisation des trois hommes, les libérer sans délai et mener une enquête crédible sur les allégations de torture.

10.07.2024 à 21:25

Émirats arabes unis : Procès inéquitable, peines injustes

Human Rights Watch

Click to expand Image Le défenseur émirati des droits humains Ahmed Mansoor, photographié avec ses deux fils lors d’un entretien avec Reuters à Dubaï, le 30 novembre 2011.  © 2011 Reuters/Nikhil Monteiro

(Beyrouth, 10 juillet 2024) – Les condamnations d’au moins 44 accusés lors du procès collectif d’au moins 84 défenseurs des droits humains et dissidents politiques aux Émirats arabes unis (EAU) sont fondées sur des procédures fondamentalement inéquitables, a déclaré aujourd’hui une coalition de groupes de défense des droits humains. Le 10 juillet, la Cour d’appel fédérale d’Abou Dhabi a prononcé contre ces personnes des peines allant de 15 ans de prison à la réclusion à perpétuité, lors du deuxième plus grand procès collectif inéquitable tenu aux EAU.

En décembre 2023, alors même qu’elles accueillaient la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28), les autorités émiraties ont porté des accusations contre au moins 84 personnes, en guise de représailles suite à leur création d’un groupe de plaidoyer indépendant en 2010 ; plusieurs de ces personnes purgeaient déjà des peines de prison liées a des présumées infractions identiques ou similaires. Ce procès collectif inéquitable a été entaché de graves violations des règles de procédure et de procès équitables. Parmi ces violations figuraient un accès restreint aux documents et aux informations concernant les accusations, une assistance juridique limitée, des propos de juges visant à influencer les témoignages, des violations du principe de double incrimination, des allégations crédibles de graves abus et de mauvais traitements, ainsi que des audiences tenues de manière secrète.

« Ces longues peines de prison, d’une sévérité choquante, sont une parodie de justice qui étouffe davantage encore la société civile naissante des Émirats arabes unis », a déclaré Joey Shea, chercheuse sur les Émirats arabes unis à Human Rights Watch. « Les Émirats arabes unis ont soumis des dizaines de défenseurs des droits humains et membres de la société civile à un procès honteusement inéquitable, qui était entaché de violations des règles de procédure et d’allégations de torture. »

Suite du communiqué en anglais.

Organisations signataires

Emirates Detainees Advocacy Center (EDAC)Fédération internationale pour les droits humains (FIDH)Gulf Centre for Human Rights (GC4HR)Human Rights WatchInternational Service for Human Rights (ISHR)MENA Rights Group

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Articles

Mediapart      Courrier international    Ouest-France

LaLibre.be    RTL.be

 

10.07.2024 à 06:00

Burkina Faso : Possible disparition forcée d’un journaliste et de détracteurs de la junte

Human Rights Watch

Click to expand Image Serge Oulon signe ses livres au centre de presse Norbert Zongo à Ouagadougou, au Burkina Faso, en octobre 2023. © 2023 Privé

(Nairobi) – Les autorités du Burkina Faso devraient de toute urgence ouvrir une enquête et révéler publiquement l’endroit où se trouvent un journaliste et deux détracteurs éminents de la junte militaire du pays, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Les enlèvements depuis le 18 juin de Serge Oulon, directeur d’un journal d’investigation, et d’Adama Bayala et Kalifara Séré, deux chroniqueurs sur des chaines de télévision, font craindre des disparitions forcées et de possibles conscriptions illégales dans les forces armées. Leurs cas semblent liés à une vague de répression menée par les autorités burkinabè qui ont sévèrement restreint les droits des activistes, des journalistes, des membres des partis d’opposition et des dissidents.

« Les arrestations arbitraires, les enlèvements et les disparitions forcées de journalistes, d’activistes et de dissidents sont devenus la nouvelle norme au Burkina Faso », a indiqué Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « La junte militaire devrait prendre des mesures immédiates pour localiser les trois individus disparus, rendre compte de leur situation et les libérer s’ils sont détenus à tort. »

Adama Bayala, âgé de 45 ans, chroniqueur régulier de l’émission de télévision « Presse Échos » de la chaîne de télévision privée BF1, est porté disparu depuis qu’il a quitté son bureau situé dans le quartier des 1200 Logements à Ouagadougou, la capitale du pays, vers 13 heures le 28 juin.

Quelques jours avant qu’il ne soit porté disparu, Adama Bayala a été menacé dans un message publié sur le groupe Facebook pro-junte « Anonymous Élite Alpha », l’avertissant qu’il serait « le prochain ». Le message faisait référence à des enlèvements antérieurs de journalistes et de dissidents.

« Adama Bayala est l’une des rares voix dissidentes qui restent au Burkina Faso qui n’a pas épargné l’analyse critique des décisions et des actions des autorités militaires », a déclaré un ami proche. « Nous avons parlé le jour de son enlèvement des risques auxquels il faisait face.Nous savions qu’il était en danger. »

Le 24 juin, à 5 heures du matin, au moins neuf hommes armés, vêtus en civil, ont enlevé Serge Oulon, âgé de 39 ans, directeur de la publication bimensuelle L’Événement, à son domicile à Ouagadougou. « Ils sont venus une première fois à bord de deux véhicules civils banalisés, sont entrés de force, ont emmené Serge et sont partis avec lui », a raconté son frère. « Plus tard, ils sont revenus chez Serge, ont ordonné à sa femme de leur donner le téléphone et l’ordinateur portable de Serge. Ils prétendaient travailler pour les services de renseignements. »

En décembre 2022, Serge Oulon a écrit un article dénonçant le détournement présumé par un capitaine de l’armée de quelque 400 millions de francs CFA (660 000 USD) qui faisaient partie d’un budget alloué au financement des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), auxiliaires civils des forces armées burkinabè. Le 20 juin 2024, le Conseil supérieur de la communication (CSC), l’organisme de régulation des médias du Burkina Faso, a suspendu L’Événement pendant un mois après la publication d’un autre article sur le scandale de corruption présumé.

Le 18 juin, Kalifara Séré, chroniqueur de l’émission télévisée « 7Infos » sur la chaîne BF1, a été porté disparu après avoir quitté une réunion avec le Conseil supérieur de la communication pour retourner à son bureau à Ouagadougou. Des personnes proches de Kalifara Séré ont expliqué à Human Rights Watch que le Conseil l’avait interrogé au sujet de sa chronique à la télévision le 16 juin, dans laquelle il avait exprimé des doutes sur l’authenticité de certaines photographies montrant le chef de l’État. Le 19 juin, le CSC a annoncé la suspension de l’émission « 7Infos » pendant deux semaines.

Le 24 juin, 11 organisations de médias burkinabè ont dénoncé les enlèvements de Serge Oulon et de Kalifara Séré comme étant « la preuve que la presse au Burkina [Faso] fait l’objet de harcèlements, d’intimidations … en violation flagrante des lois », et ont appelé les autorités « à faire cesser ces pratiques de nature à porter préjudice au droit du public à l’information ».

Des proches et des avocats représentant Adama Bayala, Serge Oulon et Kalifara Séré ont indiqué les avoir recherchés dans différents postes de police et brigades de gendarmerie, en vain. Les autorités n’ont divulgué aucune information sur les lieux où ils sont détenus.

« Les journalistes burkinabè ne devraient pas vivre dans la peur d’être enlevés pour avoir fait leur travail », a déclaré un journaliste burkinabè, dont le nom n’est pas mentionné par sécurité. « Les autorités ont réussi à réduire à néant ou presque l’accès aux informations d’intérêt public en ciblant les journalistes, limitant ainsi leur capacité à demander des comptes aux acteurs puissants. »

Les enlèvements d’Adama Bayala, de Serge Oulon et de Kalifara Séré sont intervenus dans un contexte de signalements de plus en plus nombreux de cas où les forces de sécurité burkinabè ont intimidé, détenu arbitrairement, fait disparaître de force et conscrit illégalement des journalistes, des défenseurs des droits humains, des opposants politiques et des dissidents.

En février, Human Rights Watch a fait état de six autres cas d’enlèvements d’activistes et de membres de partis d’opposition. Il s’agit de Rasmané Zinaba et Bassirou Badjo, tous deux membres du groupe de la société civile Balai citoyen ; Guy Hervé Kam, avocat réputé et coordinateur du groupe politique Servir Et Non se Servir (SENS) ; Ablassé Ouédraogo, président du parti d’opposition Le Faso Autrement ; Daouda Diallo, éminent défenseur des droits humains et secrétaire général du Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC) ; et Lamine Ouattara, membre du Mouvement burkinabè des Droits de l’Homme et des Peuples (MBDHP). Au moins quatre d’entre eux semblent avoir été enrôlés illégalement dans l’armée.

Même si les gouvernements sont habilités à conscrire des membres de la population civile âgés de 18 ans et plus pour la défense nationale, la conscription doit être autorisée et être conforme au droit national. La loi sur la conscription doit être appliquée de manière à ce que le conscrit potentiel soit informé de la durée du service militaire et qu’il ait la possibilité de contester l’obligation de servir à ce moment-là. La conscription doit également être effectuée conformément à des normes compatibles avec la non-discrimination et l’égalité devant la loi. Le recours à la conscription motivé par des raisons politiques viole les normes internationales de protection en matière de droits humains.

Le Burkina Faso est un État partie à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Les disparitions forcées sont définies comme l’arrestation ou la détention d’une personne par des représentants de l’État ou leurs agents, suivi par un refus de reconnaître la privation de liberté ou de révéler la situation de la personne ou l’endroit où elle se trouve. Les familles d’individus soumis à une disparition forcée vivent avec l’incertitude de ne pas savoir si leurs proches sont sains et saufs et n’ayant aucune information sur leurs conditions de captivité.

Depuis le coup d’État militaire de septembre 2022, la junte a de plus en plus réprimé la liberté des médias et l’accès à l’information. En avril 2024, l’organisme de régulation des médias du Burkina Faso a suspendu le réseau d’information français TV5 et plusieurs autres médias pendant deux semaines après qu’ils ont relayé les conclusions d’un rapport de Human Rights Watch indiquant que l’armée avait commis des crimes contre l’humanité à l’encontre de civils dans la province du Yatenga. L’organisme de régulation a également bloqué le site internet de Human Rights Watch dans le pays.

La Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP), basée à Banjul, en Gambie, a tenu quatre sessions ordinaires entre août 2023 et juin 2024, sans adopter une seule résolution sur la dégradation de la situation des droits humains au Burkina Faso.

« La Commission africaine devrait rompre son silence inexplicable concernant l’assaut croissant de la junte burkinabè contre la liberté de la presse », a conclu Ilaria Allegrozzi. « La Commission devrait adopter de toute urgence une résolution appelant les autorités militaires à respecter les droits des journalistes et des détracteurs conformément à leurs obligations en vertu de la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. »

09.07.2024 à 22:38

UE : Les nouveaux dirigeants devraient défendre le droit d’asile en Europe

Human Rights Watch

Click to expand Image Un centre d'accueil de migrants (à gauche) mis en place dans le port de Shengjin, ville côtière du nord-ouest de l'Albanie,  située au bord de la mer Adriatique. Photo prise le 5 juin 2024. © 2024 Vlasov Sulaj/AP Photo

(Bruxelles) – L’Union européenne (UE) et ses États membres devraient garantir le droit d’asile territorial en Europe, ont affirmé Human Rights Watch et 94 autres organisations dans une déclaration conjointement publiée aujourd’hui. Les tentatives récentes et croissantes de plusieurs États membres de l’UE d’externaliser le traitement des demandes d’asile et de protection des réfugiés dans le cadre de contrats avec des pays non membres de l’UE – comme l’accord entre l’Italie et l’Albanie portant sur les migrations – contreviennent à leurs responsabilités légales envers les personnes ayant besoin de protection.

« Tous les États membres de l’UE sont tenus de garantir le droit d’asile en vertu de la Charte des droits fondamentaux de l’UE », a déclaré Iskra Kirova, directrice du plaidoyer pour l’Europe et l’Asie centrale à Human Rights Watch. « Ni la Charte ni le Pacte européen sur la migration et l’asile, récemment adopté, ne prévoient d’option permettant aux pays de transférer le traitement de demandes d’asile vers des pays extérieurs à l’UE. »

9 juillet 2024 Déclaration conjointe : la future UE devrait garantir le droit d’asile en Europe

La Commission européenne devrait rejeter fermement les appels visant à faciliter le transfert du traitement des demandes d’asile hors du territoire de l’UE, ont déclaré les organisations. Partout où de tels programmes d’externalisation ont été tentés, ils ont été entachés de violations des droits. Les demandeurs d’asile risquent d’être placés en détention prolongée dans des pays qui n’ont pas la capacité d’examiner de manière équitable et complète leurs demandes et de leur fournir une protection, les laissant dans l’incertitude et les privant de garanties juridiques cruciales, tout en coûtant des sommes exorbitantes aux contribuables.

Les propositions visant à externaliser le traitement des demandes d’asile s’inscrivent dans le contexte des efforts accrus de la Commission européenne pour conclure des accords controversés et fournir des fonds conséquents pour la coopération migratoire aux pays voisins afin de maintenir les migrants hors d’Europe, avec peu ou pas d’attention aux garanties pourtant nécessaires en matière de droits humains, ont déclaré les groupes.

« Au lieu de perdre davantage de temps et de ressources sur des propositions incompatibles avec les lois de l’UE et ses engagements en matière de droits humains, l’UE devrait soutenir des politiques d’accueil et de traitement des demandes d’asile humaines, durables et réalistes sur le territoire européen », a ajouté Iskra Kirova. « De telles politiques bénéficieraient à la fois aux personnes en quête de protection et aux communautés qui les accueillent. »

09.07.2024 à 21:48

Arabie saoudite : 20 ans de prison pour des tweets

Human Rights Watch

Click to expand Image L'enseignant saoudien Asaad al-Ghamdi, condamné à 20 ans de prison en juillet 2024, pour des posts sur les réseaux sociaux. © 2024 Privé

(Beyrouth, le 9 juillet 2024) – Un tribunal saoudien a condamné un homme à 20 ans de prison sur la base d’accusations liées à ses activités pacifiques sur les réseaux sociaux, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Cette condamnation est le dernier exemple en date du type de « répression transnationale » menée par l’Arabie saoudite, ciblant une personne en raison des activités d’un membre de sa famille à l’étranger ; le verdict reflète aussi une nouvelle escalade dans la répression toujours plus intense de la liberté d’expression et d’autres droits fondamentaux dans le pays.

Le 29 mai 2024, le Tribunal pénal spécial (créé pour juger des affaires portant sur des accusations liées au terrorisme) a prononcé un verdict de culpabilité à l’encontre d’Asaad al-Ghamdi, un enseignant saoudien âgé de 47 ans qui était accusé de plusieurs infractions pénales liées uniquement à des opinions qu’il avait exprimées de manière pacifique en ligne. L’un des frères d’Asaad al-Ghamdi, Mohammed al-Ghamdi, est un enseignant saoudien à la retraite qui a été condamné à mort en juillet 2023 uniquement sur la base de ses publications sur X (anciennement Twitter), et de son activité sur YouTube. Un autre frère d’Asaad al-Ghamdi, Saeed bin Nasser al-Ghamdi, est un érudit islamique saoudien qui vit en exil au Royaume-Uni, et a souvent critiqué le gouvernement saoudien. Les autorités saoudiennes exercent souvent des représailles contre des membres des familles d’opposants ou de dissidents qui vivent à l’étranger, y compris en tant que moyen de pression pour contraindre leur retour au royaume.

« Cela fait des décennies que les tribunaux saoudiens condamnent des citoyens ordinaires pour le simple fait de s’être exprimés pacifiquement en ligne », a déclaré Joey Shea, chercheuse sur l’Arabie saoudite à Human Rights Watch. « Le gouvernement devrait aussi cesser de punir des personnes simplement parce que des membres de leur famille vivant à l’étranger critiquent le gouvernement. »

Les forces de sécurité saoudiennes ont arrêté Asaad al-Ghamdi le 20 novembre 2022, lors d’une descente nocturne à son domicile dans le quartier d’al-Hamdaneyah à Djeddah, en présence de sa femme et de ses enfants, ont déclaré à Human Rights Watch des sources bien informées. Les forces de sécurité ont confisqué des appareils électroniques et saccagé toutes les pièces de la maison. Il n’a pas été informé des raisons de son arrestation ni des accusations portées contre lui.

Les autorités l’ont détenu à la prison de Dhahban à Djeddah, où il a d’abord été placé en isolement pendant trois mois. Asaad Al-Ghamdi a également été détenu au secret pendant près de deux mois et n’a reçu la première visite de membres de sa famille que le 11 janvier 2023.

En juillet 2023, son frère Mohammed al-Ghamdi a été condamné à mort ; son autre frère Saeed al-Ghamdi avait alors écrit, dans un tweet, que « ce jugement infondé vise à me nuire personnellement après l’échec des tentatives visant à contraindre mon retour [en Arabie saoudite] ».

Les documents judiciaires examinés par Human Rights Watch montrent que les autorités ont accusé Asaad al-Ghamdi d’avoir enfreint les articles 30, 34, 43 et 44 de la loi antiterroriste saoudienne ; les mêmes articles ont été utilisés en juillet 2023 pour condamner à mort son frère Mohammed al-Ghamdi. Les documents montrent qu’Asaad al-Ghamdi a été accusé d’avoir « défié la religion et la justice du roi et du prince héritier » et d’avoir « publié des informations et des rumeurs fausses et malveillantes ». Les documents indiquent qu’Asaad al-Ghamdi a été arrêté pour avoir « publié des messages portant atteinte à la sécurité de la patrie sur des sites de médias sociaux [X] ».

Des sources bien informées ont déclaré à Human Rights Watch que les tweets utilisés comme preuves contre lui critiquaient des projets liés à Vision 2030, le programme du prince héritier Mohammed ben Salmane visant à diversifier l’économie du pays, ainsi que les récents changements au sein du gouvernement saoudien, faisant référence à « son abandon de l’ancienne alliance religieuse ». Un tweet rendait hommage au Dr Abdallah al-Hamed, fondateur de l’Association saoudienne des droits civils et politiques et figure de proue des droits humains en Arabie saoudite, décédé en prison après sa condamnation pour des accusations basées sur ses activités pacifiques en faveur des droits humains, et présentait ses condoléances à sa famille.

Al-Ghamdi souffre d’épilepsie, une maladie qui nécessiterait une attention médicale régulière pour être prise en charge de manière adéquate. Or, il n’a pas reçu de tels soins pendant sa détention, ont déclaré les sources.

Ces sources ont aussi fait part à Human Rights Watch de leur inquiétude au sujet du frère d’Asaad, Mohammed, qui a été condamné à mort uniquement en raison de son activité pacifique sur les réseaux sociaux, et qui souffre également d’épilepsie.

Les autorités saoudiennes devraient immédiatement fournir à Asaad al-Ghamdi et à Mohammad al-Ghamdi des soins médicaux, notamment l’accès à des spécialistes capables de traiter leurs problèmes de santé, et des médicaments adéquats.

Human Rights Watch a critiqué à plusieurs reprises les abus généralisés dans le cadre du système de justice pénale saoudien, notamment les longues périodes de détention sans inculpation ni procès, le refus d’assistance juridique et l’acceptation par les tribunaux d’aveux obtenus sous la torture comme base d’une condamnation.

Communiqué complet en anglais : en ligne ici.

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Articles

OLJ 

 

03.07.2024 à 18:30

Un artiste de nouveau arrêté au Cameroun

Human Rights Watch

Click to expand Image Aboubacar Siddiki Babadji, connu sous le nom de Babadjo. © 2020 Privé

Aboubacar Siddiki, connu sous le nom de Babadjo, a été libéré de prison au Cameroun le 21 juin après avoir purgé une peine de trois mois d’incarcération pour avoir insulté un gouverneur local. Quelques instants après sa sortie de prison, il a été de nouveau arrêté pour, entre autres accusations, perturbation de l’ordre public, manifestation et discours de haine. L’avocat de Babadjo a dit à Huamn Rights Watch que ces accusations étaient basées sur des affirmations par les services des renseignements camerounais selon lesquelles les supporters de Babadjo avaient prévu de manifester pour célébrer sa libération de prison.

Membre du parti politique Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP), Babadjo avait été tout d’abord arrêté le 8 mars à son domicile dans la ville de N'Gaoundéré, dans la région d’Adamawa, après avoir critiqué le gouverneur de la région dans une discussion de groupe sur WhatsApp. Ses amis et des défenseurs locaux des droits humains ont affirmé à Human Rights Watch que le gouverneur avait ordonné son arrestation.

Ce n’étaient pas les premiers démêlés de Babadjo avec les autorités. En 2020, il avait été arrêté pour avoir diffusé une chanson dans laquelle il critiquait des responsables locaux. Il est actuellement détenu à la Légion de la gendarmerie à N'Gaoundéré. Le 24 juin, son avocat a déposé un recours en habeas corpus auprès du tribunal de grande instance, qui devrait prononcer son verdict sur l’affaire le 4 juillet. Selon ses proches et ses amis, Babadjo souffre de diabète et a besoin de soins médicaux particuliers.

« Cette dernière arrestation de Babadjo illustre la répression exercée par le gouvernement à l’encontre des voix d’opposition et dissonantes », a déclaré Aboubakary Siddiki, le président d’un autre parti d’opposition du nord du Cameroun, le Mouvement patriotique du salut camerounais (MPSC). « Cette répression s’intensifie à l’approche du scrutin de 2025, alors que nous assistons à l’interdiction de réunions et de coalitions politiques. »

Les autorités camerounaises répriment l’opposition et la dissidence depuis de nombreuses années. En mars, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a interdit deux coalitions de l’opposition, l’Alliance politique pour le changement (APC), dirigée par Jean-Michel Nintcheu, et l’Alliance politique pour la transition au Cameroun (APT), dirigée par Olivier Bile.

Le président du Cameroun, Paul Biya, âgé de 91 ans et au pouvoir depuis 1982, en est à son septième mandat. Sa dernière réélection remonte à 2018, après un processus contesté de décompte des voix qui a déclenché une vague de répression politique et une répression meurtrière de manifestations pacifiques.

La ré-arrestation de Babadjo alors qu’il sortait de prison illustre la manière dont les autorités camerounaises réduisent au silence quiconque veut exercer son droit à la liberté d’expression dans le pays. Les autorités devraient remettre Babadjo en liberté, abandonner toutes les accusations portées contre lui et s’assurer qu’il ait accès à des soins médicaux adéquats pendant sa détention. 

03.07.2024 à 07:00

Éthiopie : L’armée attaque le système de santé lors du conflit dans l’Amhara

Human Rights Watch

Click to expand Image Une vue de la salle d’urgence d'un hôpital de la région d'Amhara (près de la région du Tigré) dans le nord de l’Éthiopie, le 14 décembre 2021. Suite au début d’un conflit entre les forces fédérales éthiopiennes et une milice amhara en août 2023, de nombreux centres de santé ont été attaqués dans cette région. © 2021 Minasse Wondimu Hailu/Anadolu Agency via Getty Images Les forces de sécurité éthiopiennes ont commis des attaques généralisées constituant des crimes de guerre contre des personnels soignants, des patients et des établissements de santé dans la région d’Amhara.Les civils paient le tribut le plus lourd des combats qui opposent l’armée éthiopienne et la milice amhara connue sous le nom de Fano, qui ont débuté en août 2023.Les partenaires internationaux de l’Éthiopie devraient insister sur l’obligation de rendre des comptes, exiger la fin des attaques visant personnels soignants et services de santé, et reprendre une surveillance accrue de la situation des droits humains dans ce pays.

(Nairobi, le 3 juillet 2024) – Les forces de sécurité éthiopiennes ont commis des attaques généralisées constituant des crimes de guerre contre des personnels soignants, des patients et des établissements de santé dans la région d’Amhara, dans le nord-ouest du pays, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport rendu public aujourd’hui.

3 juillet 2024 “If the Soldier Dies, It’s on You”

Le rapport de 66 pages, intitulé « “If the Soldier Dies, It’s On You”: Attacks on Medical Care in Ethiopia’s Amhara Conflict » (« “Si le soldat meurt, ce sera votre faute” : Attaques contre les soins médicaux lors du conflit dans l’Amhara en Éthiopie »),  documente les attaques perpétrées par les forces fédérales éthiopiennes et une milice qui leur est affiliée contre les personnels de santé, les centres de soins et les moyens de transport en Éthiopie, dans au moins 13 villes depuis le début des combats entre les forces gouvernementales et la milice amhara connue sous le nom de Fano en août 2023. Les partenaires internationaux d’Addis-Abeba devraient exiger que les responsabilités soient établies, que les attaques visant personnels et services de santé prennent fin et que la surveillance de la situation des droits humains dans le pays soit renforcée.

« Les forces fédérales éthiopiennes, qui opèrent en quasi-impunité, affichent un mépris non surprenant à l’égard des vies civiles, en attaquant des centres médicaux qui fournissent des soins dont les habitants ont désespérément besoin », a déclaré Laetitia Bader, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch. « Tant que le gouvernement ne ressentira aucune pression pour exiger que les forces ayant commis des abus soient tenues responsables, de telles atrocités risquent de se poursuivre. »

Entre août 2023 et mai 2024, Human Rights Watch a mené des entretiens à distance avec 58 victimes et témoins d’abus ainsi qu’avec des professionnels de santé et des travailleurs humanitaires. Nous avons également examiné des images satellite et vérifié des vidéos et des photographies d’une frappe de drone contre une ambulance en novembre attribuée aux forces gouvernementales.

Human Rights Watch a établi que les forces éthiopiennes ont mis en danger ou perturbé le fonctionnement des hôpitaux. Des soldats ont roué de coups des professionnels de santé, procédé à leur arrestation arbitraire et les ont intimidés parce qu’ils dispensaient des soins aux blessés et aux malades, y compris des combattants présumés des Fano. Ils ont également attaqué en toute illégalité des ambulances et des transports médicaux, entravé l’accès à l’aide humanitaire et privé les Amharas de leur droit à la santé.

En janvier, des soldats éthiopiens ont arrêté et interrogé un professionnel de santé pendant plusieurs jours dans un camp militaire. « Le colonel [qui m’interrogeait] m’a traité de ‘‘médecin Fano’’ », a-t-il relaté. « Il a commencé à me demander pourquoi je soignais les Fano. Il a déclaré qu’[ils] n’étaient pas des humains… que ce sont des monstres. »

Les forces fédérales ont entravé l’accès aux installations médicales, notamment en procédant à l’arrestation de patients sur la base de simples soupçons d’appartenance aux Fano, provoquant la peur parmi celles et ceux qui pourraient demander ou nécessiter un traitement.

Le droit international humanitaire, également connu sous le terme de droit de la guerre, interdit les attaques contre des civils et des infrastructures civiles. En outre, il prévoit des protections spéciales pour les établissements sanitaires, les professionnels de santé, les patients et les ambulances. Même dans le cadre d’un conflit armé, le droit international des droits humains reste en vigueur, faisant obligation aux États de maintenir des seuils minimums vitaux pour préserver le droit à la santé.

Les combats dans la région d’Amhara ont perturbé la livraison de fournitures médicales, entraînant des pénuries aiguës et prolongées de médicaments vitaux dans les hôpitaux et les centres de soins, et affectant leur capacité à fournir des soins adéquats.

Les médecins et les personnels de santé opèrent dans des conditions effroyables : « Nous manquons d’oxygène et de médicaments, et comme il n’y a pas d’électricité, nous sommes confrontés à de graves difficultés », a expliqué, en novembre 2023, un médecin exerçant dans un hôpital. « La banque de sang a arrêté d’en collecter... Hier, nous avons dû dire à la famille d’une femme enceinte de venir avec 20 litres de carburant ou n’importe quelle autre quantité pour que nous puissions l’opérer à l’aide d’un groupe électrogène. »

Les médecins qui cherchent à reconstituer les stocks de fournitures médicales épuisées éveillent les soupçons des forces gouvernementales et, dans certains cas, ont été attaqués, compliquant la dispense de soins dans un environnement sûr. Le 30 novembre, une frappe de drone apparente contre une ambulance clairement identifiée comme telle dans la ville de Wegel Tena a tué au moins quatre civils, en a grièvement blessé un autre et détruit des fournitures médicales essentielles. « Le personnel hospitalier est perturbé, étreint par la crainte d’une nouvelle attaque », a témoigné un médecin. « Tous les médicaments transportés à bord de l’ambulance ont brûlé. Le peu de budget qui nous restait, nous l’avions utilisé pour les acheter. »

Les agences humanitaires qui s’efforcent de combler les stocks manquants sont également confrontées à un environnement opérationnel de plus en plus difficile depuis août 2023. Leur travail a été compliqué par les combats en cours, les attaques visant les travailleurs humanitaires, les contrôles imprévisibles dans les villes et les restrictions de mouvement, notamment dans les zones sous contrôles des Fano. Neuf travailleurs humanitaires ont été tués dans l’Amhara depuis le début des combats, dont au moins quatre depuis janvier.

En mars, les responsables locaux de la santé dans l’Amhara ont reconnu que le conflit en cours dans la région entre les forces gouvernementales et les milices Fano avait causé d’importants dégâts au système de santé, tout en attribuant aux « forces extrémistes » le pillage de 967 établissements et la confiscation de 124 ambulances.

En juin, Human Rights Watch a écrit aux autorités éthiopiennes afin de porter à leur connaissance ses conclusions, mais n’a pas reçu de réponse a ce jour.

Depuis l’échec du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à reconduire l’enquête qu’il avait mandatée en Éthiopie en octobre 2023, la surveillance internationale de la situation des droits humains dans ce pays reste limitée, et il est également difficile pour les journalistes indépendants de se rendre à Amhara. Le 14 juin, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a rendu public un rapport sur la situation en Éthiopie, affirmant que les forces fédérales et la milice Fano étaient impliquées dans de nombreuses violations du droit international humanitaire, avec plus de 2 000 victimes civiles dans la région d’Amhara.

Le gouvernement éthiopien devrait immédiatement mettre fin aux attaques contre les professionnels de santé, les patients, les centres de soins et les moyens de transport dans cette région. Il devrait également s’efforcer de renforcer les protections juridiques pour les soins de santé en adoptant une législation spécifique protégeant les personnels de santé et les établissements sanitaires.

Les bailleurs de fonds internationaux ont pris des mesures pour réhabiliter les établissements sanitaires endommagés dans l’Amhara et dans d’autres zones touchées par le conflit, mais les gouvernements concernés n’ont pas publiquement condamné les attaques perpétrées par les forces fédérales éthiopiennes ni exhorté le gouvernement à demander des comptes aux responsables d’abus, a constaté Human Rights Watch.

Lors de forums multilatéraux, les partenaires internationaux de l’Éthiopie, notamment l’Union africaine et l’Union européenne, devraient faire pression pour une reprise de la surveillance de la situation des droits humains en Éthiopie. Ils devraient également accroître leur soutien aux services de santé dans la région d’Amhara, assurer une surveillance rigoureuse et indépendante des droits humains dans le cadre de leurs accords avec le gouvernement éthiopien, et dénoncer publiquement les restrictions à l’aide et les attaques visant les travailleurs humanitaires.

« Les gouvernements étrangers et les organisations internationales ont privilégié le statu quo avec le gouvernement éthiopien malgré l’absence d’amélioration de la situation sur le terrain », a conclu Laetitia Bader. « Les souffrances civiles persistantes provoquées par le conflit dans l’Amhara exigent une surveillance internationale bien plus étroite des droits en Éthiopie. »

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Médias

Libération     RTL.be

France24 (TV)

02.07.2024 à 21:43

Cambodge : Des militants écologistes condamnés à des peines de 6 à 8 ans de prison

Human Rights Watch

Click to expand Image Des militants écologistes cambodgiens, membres de l’association Mother Nature, étaient assis près d’une barricade bloquant l’accès à une rue menant au Tribunal municipal de Phnom Penh, au Cambodge, le 5 juin 2024.  © 2024 And Chhin Sothy/AFP via Getty Images

Ce mardi, le tribunal de Phnom Penh a rendu un verdict de culpabilité contre 10 militants de Mother Nature, une association cambodgienne de défense de l’environnement, dirigée par des jeunes activistes et lauréate d’un prestigieux prix. Les accusations visant les militants était liées à leur  activisme pacifique pro-environnement au sein de cette association, de 2012 à 2021. Au moins quatre des militants ont été immédiatement arrêtés à l’extérieur de la salle d’audience, où ils étaient assis avec des sympathisants et réclamaient un système judiciaire plus juste qui défende les droits environnementaux.

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Certaines campagnes de Mother Nature ont abouti à des réussites, comme la cessation de la construction par la Chine d’un barrage hydroélectrique menaçant une communauté indigène ; une autre initiative a contribué à mettre fin au commerce largement corrompu de l’exportation de sable des estuaires côtiers de Koh Kong, qui détruisait l’écosystème local et les zones de pêche.

Le verdict est dévastateur pour les 10 militants, condamnés à des peines comprises entre six et huit ans de prison, en raison de leurs activités en faveur de la protection de l’environnement au Cambodge. Il envoie également un message déplorable à la jeunesse cambodgienne : le gouvernement se rangera du côté des intérêts particuliers au détriment de l’environnement chaque fois qu’il en aura l’occasion.

Des mandats d’arrêt ont été émis contre les 10 militants, accusés de complot contre l’État en vertu de l’article 453 du Code pénal. Ly Chandaravuth, Thun Ratha, Long Kunthea, Phuon Keoraksmey, Binh Piseth, Pok Khoeuy et Rai Raksa ont été condamnés à 6 ans de prison en vertu de l’article 453.

Sun Rotha, Alejandro Gonzalez-Davidson et Yim Leanghy ont été condamnés à 8 ans de prison et à une amende de 10 millions de riels pour complot contre l’État et insulte au roi en vertu des articles 453 et 437, respectivement.

Suite en anglais.

…………..

02.07.2024 à 21:30

République centrafricaine : Une étape vers la fin de l’impunité pour les auteurs de crimes graves

Human Rights Watch

Click to expand Image Des individus se tiennent à côté d'un magasin tenu par un musulman qui a été pillé par des combattants anti-balaka à Guen, en République centrafricaine, le 15 avril 2014. © 2014 Jerome Delay/AP Photo

(Bangui) – La Cour pénale spéciale (CPS) de la République centrafricaine a annoncé avoir arrêté, le 16 juin 2024, un ancien chef de milice anti-balaka, Edmond Beïna, pour des crimes commis en 2014, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Cette arrestation constitue un pas important pour assurer que justice soit rendue aux victimes de crimes graves commis dans le pays.

La Cour a confirmé l’arrestation le 21 juin. Elle a inculpé Beïna de crimes contre l’humanité et crimes de guerre présumés commis à Guen, Gadzi et Djomo, dans la province de Mambéré-Kadéï, dans le sud-ouest du pays, en février et mars 2014. Des groupes anti-balaka sous le commandement de Beïna et d’un autre chef de milice, Matruin Kombo, avaient attaqué des civils, tuant au moins 72 hommes et garçons musulmans, dont certains n’avaient pas plus de 9 ans, lors d’attaques perpétrées les 1 et 5 février 2014. La Cour a arrêté Kombo en novembre 2022. Outre Kombo et Beïna, trois autres co-accusés sont actuellement détenus par la Cour pour des crimes liés aux mêmes événements.

« Jusqu’à présent, personne n’a été amené à rendre des comptes pour les crimes atroces commis à Guen et l’impunité continue de prévaloir en République centrafricaine », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. « La Cour pénale spéciale a la possibilité de changer cette trame narrative et de rendre enfin une certaine justice aux victimes et à leurs familles, qui l’attendent depuis très longtemps. »

La CPS a été créée pour enquêter sur les crimes graves internationaux commis en République centrafricaine depuis 2003 et juger leurs auteurs présumés. Elle est basée à Bangui, la capitale, et est dotée de juges, de procureurs et d’administrateurs internationaux et centrafricains. Elle a commencé à travailler en 2018.

Les milices anti-balaka se sont constituées à travers le pays pour combattre la Séléka, une coalition à dominante musulmane qui a pris le contrôle de Bangui le 24 mars 2013. Les anti-balaka ont rapidement entrepris de cibler les civils musulmans, en particulier dans l’ouest du pays, les associant à la Séléka ou aux sympathisants de la coalition.

Click to expand Image Les blessures d'une victime des attaques du 1 février 2014 des anti-balaka sur Guen. © 2014 Lewis Mudge/Human Rights Watch

En mars 2014, un chercheur de Human Rights Watch a passé plusieurs jours dans le pays, s’entretenant avec des survivants des attaques de Guen et Djomo. Les victimes, toutes musulmanes et pour la plupart des femmes âgées et des enfants, avaient cherché refuge dans une enceinte paroissiale catholique, où elles ont été attaquées.

Le père d’Oumarou Bouba, un garçon de 10 ans, a déclaré : 

« J’ai emmené mon fils quand les anti-balaka ont attaqué. Alors que nous courions, il a été atteint par les tirs des anti-balaka. Il a reçu une balle dans la jambe droite et il est tombé, mais ils l’ont achevé à coups de machette. Je n’ai pas eu d’autre choix que de continuer de courir. J’avais aussi été touché. Plus tard, je suis allé voir son corps, il avait été frappé à la tête et au cou. »

Le 5 février, après avoir pillé les quartiers musulmans de Guen, les anti-balaka ont attaqué une propriété où des centaines de musulmans s’étaient réfugiés. Lors de cette attaque, les anti-balaka ont séparé environ 45 hommes en deux groupes, les ont emmenés hors de la propriété, les ont forcés à s’allonger sur le sol et les ont exécutés.

Des témoins ont affirmé que le 6 mars, les anti-balaka commandés par Beïna et Kombo sont allés dans la paroisse à la recherche de l’imam local de Djomo, Abdoulaye Liman, qui s’y était réfugié, et l’ont tué.

Le massacre de Guen a démontré le mépris total des anti-balaka pour la loi, la nécessité urgente à l’époque que les militaires chargés du maintien de la paix agissent rapidement pour protéger les civils, ainsi que l’importance qu’il y a maintenant – 10 ans plus tard – à faire appliquer la règle de droit et à rendre justice, a déclaré Human Rights Watch.

L'arrestation de Beïna survient alors que la CPS a accompli des progrès sur certains dossiers importants. En octobre 2022, la Cour a condamné trois membres du groupe rebelle 3R pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en mai 2019 dans le nord-ouest du pays. Ce verdict a été confirmé en appel en juillet 2023.

Le deuxième procès de la Cour a débuté en décembre 2023 et est toujours en cours. Il se rapporte à des crimes présumés commis en 2020 dans la ville de Ndele par des factions du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), un groupe armé. Un autre procès pour des crimes prétendument commis par ce groupe à Ndele en 2020 a débuté en juin 2024. En septembre 2023, la CPS a également annoncé l’inculpation d’Abdoulaye Hissène, un chef du FPRC, pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité présumés commis en 2017; il reste en détention provisoire.

En même temps, la CPS continue de se heurter à des difficultés, notamment en ce qui concerne l’arrestation de certains suspects. En mai, la Cour a émis un mandat d’arrêt à l’encontre de l’ancien président François Bozizé, qui est accusé de crimes contre l’humanité présumés commis entre février 2009 et le 23 mars 2013 par la Garde présidentielle et d’autres services de sécurité dans un centre de formation militaire situé au nord de Bangui. Bozizé, qui était rentréen République centrafricaine en 2019 alors que le pays était déchiré par des conflits, puis était réapparu ultérieurement comme l’un des principaux dirigeants d’une coalition rebelle, est actuellement de nouveau en fuite, caché en Guinée-Bissau.

L’actuel ministre de l’Élevage et de la santé animale, Hassan Bouba, a été arrêté le 19 novembre 2022 pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Il a été remis en liberté et escorté chez lui par des gendarmes centrafricains au mépris des décisions de justice, le 26 novembre 2022, et ne s’est pas présenté devant la Cour.

Bien que la situation sécuritaire dans le pays se soit améliorée lors de ces dix dernières années, l’impunité dont bénéficient les personnes responsables de crimes graves continue d’alimenter des cycles récurrents de violence et les groupes armés continuent de commettre des atrocités, laissant derrière eux un triste bilan de morts, de déplacements et de misère.

La CPS joue un rôle important dans les efforts pour assurer que justice soit rendue pour les attaques contre les civils au cours de la dernière décennie, comme celles commises à Guen ou contre des camps pour personnes déplacées à l’intérieur des frontières du pays. Le gouvernement et les partenaires internationaux de la Cour devraient redoubler d’efforts pour soutenir la Cour et faire en sorte qu’elle puisse s’acquitter effectivement de son mandat crucial, notamment en lui assurant des ressources adéquates et en veillant à la prompte exécution des mandats d’arrêt actuellement en attente, a déclaré Human Rights Watch.

« Si elle est soutenue de manière adéquate, la Cour pénale spéciale a le potentiel d’apporter enfin justice aux victimes des crimes les plus graves », a affirmé Lewis Mudge. « L’arrestation et l’inculpation de Beïna montrent que justice sera rendue, même si cela prend du temps, et constituent un avertissement clair pour ceux qui continuent de commettre des atrocités en République centrafricaine. »

01.07.2024 à 07:00

Guinée : Un verdict historique attendu dans la phase finale du procès du massacre du stade

Human Rights Watch

Click to expand Image Des membres des familles de victimes du massacre commis en 2009 dans un stade de Conakry (Guinée), ainsi que des personnes y ayant survécu, faisaient la queue pour entrer dans un tribunal de Conakry le 28 septembre 2022, au premier jour du procès d’individus accusés d'être responsables de ce massacre. © 2022 Elise Keppler/Human Rights Watch

(Bruxelles) – Les juges rendront un verdict au terme d’un procès national historique en Guinée pour de graves violations des droits humains commises par les forces de sécurité gouvernementales en 2009, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch. Les plaidoiries finales de toutes les parties au procès se sont achevées le 26 juin 2024. Les juges ont indiqué qu’ils délibéreraient sur un verdict jusqu’au 31 juillet.

Le procès examine l’un des pires épisodes d’abus jamais commis en Guinée. Le 28 septembre 2009, les forces de sécurité guinéennes ont ouvert le feu sur des manifestants pacifiques mobilisés contre la candidature à la présidence du putschiste de l’époque, Moussa Dadis Camara. Plus de 150 personnes ont été tuées et une centaine de femmes violées dans un stade de Conakry, la capitale. Les forces de sécurité ont alors procédé à une opération de dissimulation des faits, inhumant les corps dans des fosses communes.

« Tous les regards seront tournés vers Conakry, car le verdict tant attendu permettra de répondre aux violations brutales commises il y a près de 15 ans, dont les effets continuent de se faire sentir sur les victimes et les survivants », a déclaré Tamara Aburamadan, conseillère juridique auprès du programme Justice internationale de Human Rights Watch. « Le gouvernement guinéen devrait redoubler d’efforts en matière de responsabilisation pour renforcer son système de lutte contre les crimes internationaux graves. »

Victimes et survivants guinéens ont appelé à maintes reprises à ce que toute la lumière soit faite sur les circonstances de ce massacre et à ce que les responsabilités soient établies.

Ce procès est le premier à se pencher sur des violations des droits humains d’une telle ampleur en Guinée, captivant l’attention de l’opinion publique, dans un contexte de répression soutenue contre l’opposition, les dissidents et les médias par les forces de sécurité de l’État, qui ont fait des centaines de morts et de blessés, selon un rapport d’Amnesty International.

Depuis l’ouverture du procès le 28 septembre 2022, les juges ont entendu chacun des 11 accusés – parmi lesquels un ancien président et des ministres du gouvernement –, une centaine de victimes et plus d’une douzaine de témoins, dont de hauts responsables gouvernementaux. Avant le début des plaidoiries, le 13 mai, les juges ont de nouveau entendu trois accusés, entre autres, lors de la phase des « confrontations ».

Au cours des dernières semaines, toutes les parties au procès ont présenté leurs réquisitoires. Treize avocats représentant les parties civiles – c’est-à-dire les victimes ayant qualité d’agir – ont été suivis par le parquet puis par les avocats de la défense des 11 accusés.

Selon l’observation du procès par Human Rights Watch et les reportages des médias, les avocats des victimes ont relaté les horribles événements de 2009 et détaillé la responsabilité pénale individuelle présumée de chacun des accusés. Certains avocats des victimes ont requis des condamnations pour crimes contre l’humanité et des peines de prison à vie.

En cas de condamnation, au moins cinq avocats des victimes ont demandé aux juges d’accorder une série de réparations – entre un et trois milliards de francs guinéens (soit environ 115 000 à 345 000 dollars US) – pour chaque groupe de victimes, y compris celles ayant subi des blessures physiques et enduré un traumatisme psychologique.

De nombreuses victimes, notamment des survivants de viols et de violences sexuelles, n’ont toujours pas les ressources nécessaires pour avoir accès aux soins médicaux pour les blessures qu’elles ont subies lors du massacre et des événements qui ont suivi, selon l’Association des victimes, parents et amis du 28 septembre 2009 (AVIPA).

Au cours de la phase des plaidoiries finales, le parquet a réitéré sa demande en date du mois de mars visant à requalifier les charges retenues contre les 11 accusés en crimes contre l’humanité, et a en outre requis des peines allant de 14 ans à la perpétuité. Les juges ont indiqué qu’ils ne se prononceraient sur la demande de requalification des accusations qu’au moment de rendre leur verdict.

Parmi les accusés figurent Claude Pivi, ancien ministre, toujours en fuite a l’heure actuelle après avoir quitté le centre où il était détenu en novembre 2023, ainsi que trois autres accusés de plus haut rang, dont l’ancien président Dadis Camara, et des membres des forces armées. Les dix autres accusés, y compris les trois qui avaient quitté le centre de détention, sont désormais à nouveau sous les verrous.

Dans leur plaidoiries finales, les avocats de la défense ont demandé des acquittements, et ont répondu à la demande de requalification des accusations. Ils ont fait valoir que rendre une décision de reclassement au moment du verdict violerait le droit à un procès équitable des accusés, les laissant sans possibilité de se défendre contre les nouvelles accusations.

Le droit guinéen en matière de procédure pénale garantit aux accusés des droits internationalement reconnus, notamment celui à disposer du temps et des moyens nécessaires pour préparer sa défense et le droit à un procès équitable.

Après la lecture du verdict, les accusés et les parties civiles ont le droit de faire appel dans un délai de 15 jours. Le parquet a deux mois pour faire appel.

Au fil des années, les partenaires internationaux de la Guinée, notamment l’ONU, l’Union européenne et les États-Unis, ont soutenu la quête de justice pour les crimes du 28 septembre 2009 en Guinée. Le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a également cherché à dialoguer de manière constructive avec les autorités guinéennes pour les inciter à respecter leur engagement initial de rendre justice dans cette affaire.

Le rôle des acteurs internationaux, notamment de la CPI, semble avoir été un facteur majeur pour promouvoir les progrès au fil du temps. Un soutien international continu et un engagement auprès des autorités guinéennes sur l’importance cruciale de la justice, y compris les processus de réparation, seront essentiels.

« La conclusion du procès du massacre du stade et la perspective d’un verdict offrent aux victimes et aux survivants guinéens une lueur d’espoir pour que la justice puisse l’emporter sur l’impunité », a conclu Tamara Aburamadan. « Ils méritent que justice soit rendue de manière juste et efficace. »

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