De Mike, son personnage principal, on sait peu de choses: vivant dans la rue, en proie aux addictions et vraisemblablement à une maladie mentale, ses accès de violence le conduisent une nouvelle fois en prison.
"Je voulais essayer de raconter une histoire centrée sur un personnage qui fait face à un comportement cyclique et lui donner vie avec un peu de légèreté, d'humanité et sans jugement", explique Harris Dickinson, 28 ans, à l'AFP.
Du trou noir de son emprisonnement, métaphoriquement représenté à l'écran par une plongée dans les abysses, Mike sort avec la volonté de se réinsérer. Mais parviendra-t-il à tenir durablement les quelques mains qu'on lui tend?
"Je voulais en quelque sorte poser la question de combien on peut accompagner et soutenir quelqu'un, espérer pour lui", poursuit le jeune réalisateur. Alors que Mike flirte à nouveau avec ses démons, "j'espère que les gens voudront rester avec lui et poursuivre son voyage".
Harris Dickinson, qui a "grandi" avec le cinéma social britannique de Mike Leigh et Ken Loach, ne renie pas cette inspiration, mais il voulait aussi "essayer de faire quelque chose de différent".
"De manière très pragmatique, simpliste, sans romantisme", le film commence sur un trottoir sur lequel Mike s'est endormi. Progressivement, "nous nous écartons vers des styles et des tonalités différents", vers plus de symbolisme, développe le réalisateur.
"Un oursin"
Outre un scénario d'une grande finesse, soumis à des sans-abris rencontrés par Harris Dickinson dans le cadre d'activités de bénévolat, la réussite d'"Urchin" tient aussi beaucoup à l'interprétation de Frank Dillane (vu en jeune Voldemort dans "Harry Potter" et dans la série "Fear the Walking Dead").
Travaillant "toujours avec (ses) émotions plutôt qu'avec l'apparence de (ses) émotions", il incarne un personnage à la fois charismatique et agaçant. Et parfois inquiétant.
"J'ai essayé d'accéder avec Mike à l'idée d'une personne pure, sans trop de mensonge en lui, bien qu'il manipule peut-être des choses. C'est comme s'il lui manquait une peau, comme une fenêtre ouverte", décrit l'acteur. "Ainsi, même si nous ne sommes pas d'accord avec son comportement à certains moments, au moins il est fidèle à ses sentiments."
"C'est comme vivre et mourir à chaque souffle. Tout arrive en même temps avec Mike."
Parmi les personnages qui croisent sa route, Andrea, incarnée par l'actrice franco-britannique Megan Northam, vit avec lui une "courte idylle".
Mais "comme le nom du film l'indique, Mike est un oursin", rappelle-t-elle. "L'intérieur est tendre et hyper attendrissant et on a envie d'accompagner ce personnage du début à la fin, de l'aimer et d'avoir beaucoup de tendresse pour lui. Mais, en même temps, il repousse la moindre aide inconsciemment."
"C'est ça que je trouve intéressant avec ce film. Il y a beaucoup d'ambiguïté et ce n'est pas moralisateur. Il parle aussi de santé mentale, d'addiction, et je trouve qu'Harris ne juge pas ça", résume-t-elle.
Avant de repasser derrière la caméra pour un deuxième film, Harris Dickinson (également remarqué aux côtés de Nicole Kidman dans "Babygirl" cette année) se lance dans sa version toute personnelle de l'ascension de l'Everest, en incarnant rien moins que John Lennon dans un biopic des Beatles en quatre volets, signé Sam Mendes et prévu pour avril 2028.