04.04.2025 à 13:16
Juliette Verdes
La presse, la justice, les ONG ou les minorités (religieuses, LGBT+, etc.)… nombreuses sont les cibles de Viktor Orbán depuis sa réélection en avril 2010. Alors qu'il avait affiché un visage plutôt libéral lors de son premier mandat (entre 1998 et 2002), le leader d'extrême droite se livre depuis son retour au pouvoir à des […]
L’article Etat de droit, séparation des pouvoirs, droits des minorités… que fait l'Union européenne pour lutter contre les dérives de la Hongrie ? est apparu en premier sur Touteleurope.eu.
La presse, la justice, les ONG ou les minorités (religieuses, LGBT+, etc.)… nombreuses sont les cibles de Viktor Orbán depuis sa réélection en avril 2010. Alors qu'il avait affiché un visage plutôt libéral lors de son premier mandat (entre 1998 et 2002), le leader d'extrême droite se livre depuis son retour au pouvoir à des attaques en règle contre l'état de droit.
Une situation contraire aux valeurs de l'Union européenne, inscrites dans les traités, comme le "respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités". Gardienne de ces principes, la Commission européenne a entamé depuis des années un bras de fer avec Budapest contre ses dérives autoritaires. Tandis que le Parlement européen a de son côté régulièrement condamné les violations de l'état de droit constatées dans le pays.
Retour sur 15 ans années d'affrontements et de procédures entre la Hongrie et l'Union européenne.
Outre la Hongrie, d’autres gouvernements européens ont eux aussi directement menacé les valeurs européennes :
La procédure la plus forte symboliquement est celle dite de l'article 7 (en référence à l'article du traité sur l'Union européenne). Ce dernier donne à l'UE la possibilité de sanctionner un État membre qui ne respecterait pas les valeurs énumérées dans le traité. Il peut en théorie conduire à la suspension des droits de vote d'un Etat membre au Conseil de l'Union européenne - et donc de sa participation à une bonne partie des décisions européennes, qui continueraient toutefois de s'appliquer à lui. La procédure de l'article 7 du traité sur l'Union européenne est parfois qualifié "d'arme nucléaire". La sanction à laquelle elle peut aboutir, à savoir priver un Etat de son droit de vote au Conseil de l'Union européenne, est en effet particulièrement lourde et se veut dissuasive. Elle n'a toutefois jamais pu arriver à son terme.
La procédure prévoit deux volets, chacun pouvant être utilisé indépendamment de l'autre : un mécanisme préventif et un mécanisme de sanctions.
Le 12 septembre 2018, deux tiers des députés européens ont voté en faveur du déclenchement de la procédure pour la Hongrie. Leurs préoccupations portaient notamment sur l'indépendance de la justice, la liberté d'expression, la corruption, le droit des minorités et la situation des migrants et des réfugiés. Cette étape constitue le premier volet de la procédure.
En mars 2025, la situation en est toujours à ce stade car le Conseil n’a pas encore statué, malgré les demandes répétées de nombreux décideurs politiques, dont des parlementaires européens. Autrement dit, il n’a pas officiellement constaté l’existence d’un risque clair de violation grave de l’état de droit.
Mais c'est l’unanimité requise au Conseil européen (moins le pays visé) pour déclencher le “volet répressif” qui constitue le principal obstacle. Puisque Budapest pourrait alors recevoir le soutien de certains alliés, comme le Slovaque Robert Fico ou l'Italienne Georgia Meloni, et donc bloquer le processus.
Pour sanctionner la Hongrie, les institutions européennes ont également mis en place des procédures d'ordre financier. Celles-ci ont été élaborées en 2020 avec l'adoption d'un mécanisme de conditionnalité des fonds européens au respect de l'état de droit. Le principe est simple : si un pays se rend coupable de violations de l'état de droit, l'Union européenne peut décider de suspendre les différentes aides financières dont il est censé bénéficier, notamment ceux de la politique de cohésion.
Cette procédure a été déclenchée pour la première fois par la Commission européenne à l'encontre de la Hongrie le 27 avril 2022, trois semaines après la réélection de Viktor Orbán à la tête du pays. En décembre de la même année, face aux menaces de véto du Premier ministre hongrois sur d'autres dossiers, les ambassadeurs des Vingt-Sept sont finalement parvenus à un compromis. Alors que la Commission proposait de geler 7,5 milliards d'euros, le Conseil a finalement opté pour un gel de 6,3 milliards d'euros. Sur ces derniers, Budapest a par ailleurs définitivement perdu 1,04 milliard d'euros qui devaient être alloués avant la fin de l'année 2024.
Le 16 novembre 2020, Budapest et Varsovie bloquent ensemble le budget pluriannuel de l’Union européenne et le plan de relance approuvé en juillet de la même année pour faire face à la crise économique engendrée par la pandémie de Covid-19. La création d’un mécanisme permettant de priver de fonds européens les Etats membres accusés de violer les principes de l’état de droit a poussé les deux pays à s’opposer à cet accord.
Trois semaines après avoir mis leur véto au plan de relance européen et au budget communautaire, les dirigeants polonais et hongrois affirment les 8 et 9 décembre 2020 qu’ils sont prêts à le lever après avoir obtenu des garanties interprétatives suffisantes et un compromis sur la mise en œuvre de ce mécanisme de conditionnalité à l’état de droit.
Le règlement relatif au mécanisme de conditionnalité est officiellement adopté le 16 décembre 2020.
Le 5 avril 2022, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen annonce devant le Parlement européen que l’organe exécutif européen va prochainement lancer la première activation de ce mécanisme de conditionnalité à l’état de droit contre la Hongrie. Cette procédure est formellement ouverte le 27 avril par le commissaire européen au Budget Johannes Hahn.
Le 30 novembre 2022, la Commission européenne propose finalement de geler le versement de 13,3 milliards d’euros de fonds européens à la Hongrie, dont 7,5 milliards d’euros sont issus des fonds de cohésion destinés au pays. Les 5,8 milliards d’euros restants correspondent aux subventions allouées dans le cadre du plan de relance européen. La Commission estime que “la Hongrie n’a pas suffisamment progressé dans ses réformes et doit respecter ses engagements afin de recevoir les fonds européens”. Pourtant ces mannes financières semblent indispensables pour Budapest, en proie à de graves difficultés économiques.
Petite subtilité : lors de l’annonce du gel de 13,3 milliards d’euros (dont une partie issue du plan de relance), la Commission européenne a tout de même validé le plan hongrois. Une étape qui était nécessaire avant la fin de l’année, sans quoi Budapest aurait pu définitivement perdre 70 % de son allocation. Mais pour toucher les fonds, le gouvernement hongrois doit mettre en œuvre les réformes indiquées par la Commission européenne.
Le 12 décembre 2022, les ambassadeurs des Vingt-Sept sont parvenus à un accord pour débloquer la situation. Cette validation nécessitait la majorité qualifiée des Etats, soit au moins 15 pays sur 27 représentant au minimum 65 % de la population de l’UE.
Le Conseil a ainsi décidé de suspendre 6,3 milliards d’euros sur les 7,5 initialement proposés par la Commission européenne. Le plan de relance hongrois est par ailleurs validé mais 27 “super jalons” devront être atteints pour débloquer les 5,8 milliards d’euros restants. Cette décision a également permis de débloquer les deux autres dossiers sur lesquels Budapest de mettre son véto : l’aide financière européenne de 18 milliards d’euros à destination de l’Ukraine ainsi que le projet d’impôt mondial sur les grandes entreprises de 15 %, proposé par l’OCDE.
Le 24 avril 2023, la ministre hongroise en charge des Affaires européennes Judit Varga annonce sur son compte Twitter que son pays a trouvé un "accord technique" avec la Commission européenne concernant les super jalons exigés. Budapest espère ainsi un déblocage dans les prochains mois, jugeant que "la balle est dans le camp de [l'exécutif européen]". "Des étapes internes vont suivre pour analyser les progrès réalisés", a pour sa part répondu le commissaire européen à la Justice Didier Reynders.
Ainsi, la Commission européenne annonce, le 13 décembre 2023, le déblocage d'une partie des fonds de cohésion destinés à la Hongrie, à savoir 10,2 milliards d'euros, estimant que Budapest a mis en œuvre plusieurs des mesures qu'elle s'était engagée à prendre afin d'améliorer l'indépendance de son système judiciaire.
Toutefois, le Parlement européen s'est opposé à cette décision de l'exécutif européen, saisissant la Cour de justice de l'UE le 25 mars 2024. Les eurodéputés estiment en effet que les "super jalons" sur lesquels Budapest s'était engagée à mettre en place des réformes afin de garantir l'indépendance de son système judiciaire n'ont pas été entièrement remplis.
A cette somme s'ajoutent également les fonds du plan de relance européen, adopté en juillet 2020 pour faire face au choc économique de la pandémie de Covid-19. Pour bénéficier de ces aides, chaque Etat a dû présenter à la Commission européenne un plan national dans lequel il détaille à quoi serviront les fonds. Si le plan hongrois a été adopté en décembre 2022, Budapest n'a pour le moment touché qu'une toute petite partie (correspondant à un préfinancement déboursé automatiquement). L'administration hongroise doit en effet présenter des réformes afin de bénéficier des fonds restants, conformément aux décisions de la Commission validées par le Conseil.
"Au total, 19 milliards d'euros de fonds européens (dont ceux du plan de relance) restent bloqués", d'après les calculs effectués par le Financial Times.
En plus de ces procédures exceptionnelles, la Commission européenne a également déclenché de nombreuses procédures d'infraction. Celles-ci sont lancées par l'exécutif européen lorsqu'il constate qu'un Etat membre ne respecte pas ou applique incorrectement les législations ou les traités européens.
La procédure d'infraction se déroule en plusieurs étapes. La Commission adresse d'abord une mise en demeure informelle à l'Etat concerné, qui détaille les violations présumées et demande une réponse. Si la situation n'est pas corrigée, elle peut envoyer un avis motivé puis, en l’absence de conformité, porter l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Si l’infraction est confirmée et persiste, la Cour peut imposer des amendes, forçant ainsi l’Etat membre à se conformer au droit européen.
Depuis le retour au pouvoir de Viktor Orbán au pouvoir en 2010, la Commission a régulièrement ouvert des procédures d'infraction à l'encontre de la Hongrie sur les questions relatives à l'état de droit (voir en fin d'article). Certains sont toujours en cours ou viennent d'aboutir :
Le 15 juillet 2021, la Commission européenne a ouvert des procédures d’infraction contre la Hongrie et la Pologne pour “atteintes au valeurs fondamentales de l’Union européenne”. En Hongrie, la mesure en cause est une loi contre la représentation et la “promotion” de l’homosexualité.
Après une saisine de la CJUE par l'exécutif européen en décembre 2022, un procès s'est ouvert devant la Cour de justice de l'UE le 19 novembre 2024.
Cette affaire n'empêche pas la gouvernement de Viktor Orbán de multiplier les provocations. Le 18 mars 2025, le Parlement hongrois a ainsi adopté une nouvelle loi rendant illégale l'organisation ou la participation à la Marche des fiertés, un événement annuel qui défend les droits des personnes LGBT+. Les contrevenants risquent une amende de 500 euros, au motif de ne pas respecter la précédente loi de 2021, qui fait justement l'objet de la procédure devant la CJUE.
Le 7 février 2024, la Commission européenne a lancé une procédure d'infraction contre la Hongrie en raison de l'adoption d'une législation adoptée par Budapest qui instaure une autorité de surveillance censée prévenir les "interférences étrangères" dans le processus électoral et "protéger la souveraineté du pays".
Un texte législatif jugé contraire au droit de l'UE, selon l'exécutif européen, qui a décidé de poursuivre la Hongrie devant la Cour de justice de l'UE le 3 octobre 2024.
Le 13 juin 2024, la Cour de justice de l'UE a condamné la Hongrie pour non-respect du droit d'asile, et infligé à Budapest une amende de 200 millions d'euros accompagnée d'une astreinte d'un million d'euros par jour de retard. Dans un communiqué, la plus haute instance juridique de l'Union estime que le pays dirigé par Viktor Orbán n'a pas exécuté un arrêt de décembre 2020, dans lequel elle condamnait la Hongrie pour n'avoir "pas respecté les règles de droit de l'Union en matière, notamment, de procédures relatives à l'octroi de la protection internationale et au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier".
Adoptée le 21 décembre 2010, une nouvelle loi sur les médias prévoit des amendes pouvant atteindre 730 000 euros pour les chaînes de télévision et de radio qui porteraient atteinte à l’intérêt public, à l’ordre public ou à la morale, sans que ces concepts ne soient clairement définis. Elle attribue en outre à une autorité composée de membres du parti au pouvoir, le Fidesz, la fonction de contrôler le contenu des informations diffusées.
Cette loi controversée entre en vigueur le 1er janvier 2011, alors que la Hongrie entame une présidence tournante du Conseil de l’UE
Le 21 janvier 2011, Bruxelles met en demeure la Hongrie et lui accorde deux semaines pour répondre à ses demandes, puisque la loi contrevient selon elle au droit européen.
Viktor Orbán cède finalement à la pression et accepte, le 16 février 2011, d’amender les éléments contestés de sa loi sur les médias.
Le 12 décembre 2011, c’est cette fois à propos de sa réforme de la justice que la Commission européenne demande des clarifications au Premier ministre Viktor Orbán. Elle estime certaines mesures (telles que l’abaissement de l’âge de départ à la retraite des juges de 70 à 62 ans) contraires au principe de séparation des pouvoirs. Adoptées par le Parlement hongrois, celles-ci entrent en vigueur le 1er janvier 2012.
Le 7 mars 2012, la Commission adresse à Budapest deux avis relatifs à l’âge de départ en retraite des magistrats et à l’indépendance de l’autorité hongroise de protection des données personnelles. L’exécutif européen donne un mois à la Hongrie pour réformer sa législation, sous peine de poursuites devant la Cour de justice de l’UE.
La mesure prévoyant l’avancement de l’âge de départ à la retraite des juges de 70 à 62 ans sera finalement abandonnée, après un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne de novembre 2012 qui la juge discriminatoire.
Le 19 décembre 2011, la Commission européenne demande à Budapest de retirer deux projets de réformes qui entreraient en contradiction avec les traités européens. L’une concerne l’indépendance de la Banque centrale hongroise, mise en cause par la fusion prévue avec un Comité monétaire dont les membres pourraient être limogés par le pouvoir législatif. L’autre est liée à la politique fiscale.
Le 22 décembre 2011, Viktor Orbán rejette ces demandes de l’exécutif européen.
Le 30 décembre 2011, la réforme contestée de la Banque centrale est adoptée par le Parlement hongrois. Alors que le pays est en pleine crise économique, la Commission et le Fonds monétaire international (FMI) décident par conséquent d’interrompre un projet de crédit financier (de 15 à 20 milliards d’euros) envisagé pour la Hongrie.
Le 6 juillet 2012, une nouvelle version révisée de la loi sur la Banque centrale hongroise est présentée, dont le texte a été validé cette fois-ci par les institutions internationales.
La nouvelle Constitution de Hongrie entre en vigueur le 1er janvier 2012. Plusieurs des dispositions (notamment celles au sujet de l’indépendance de la Banque centrale, du statut des juges et de l’autorité de protection des données personnelles) qu’elle contient avaient auparavant été vivement dénoncées par l’opposition et par des milliers de manifestants.
Le 17 janvier 2012, la Commission européenne adresse à la Hongrie trois mises en demeure en raison de la non-conformité de dispositions de la nouvelle Constitution vis-à-vis des traités européens.
Le 11 mars 2013, le Parlement hongrois adopte un nouvel amendement à la Constitution, qui prévoit de diminuer les prérogatives du pouvoir judiciaire en plaçant de facto les pouvoirs politiques (législatif et exécutif) au-dessus.
La Commission européenne fait alors rapidement part de ses préoccupations en ce qui concerne la primauté du droit, le droit de l’Union européenne ainsi que l’état de la démocratie et des libertés en Hongrie. C’est la première fois qu’un Etat membre de l’Union se place ouvertement aussi loin des valeurs communautaires.
Le 3 juillet 2013, le Parlement européen vote le rapport du Portugais Rui Tavares. Celui-ci conclut que “la tendance systémique et générale [de la Hongrie] à modifier à plusieurs reprises le cadre constitutionnel et juridique” est “incompatible” avec les valeurs européennes et que cette tendance “aboutira à un risque manifeste de violation grave” de ces mêmes valeurs.
Mais le 20 novembre 2013, l’exécutif européen clôt sa procédure d’infraction. Elle considère que la Hongrie a pris les mesures nécessaires et a mis sa législation en conformité avec le droit de l’UE.
Le 4 avril 2017, le Parlement hongrois vote une loi sur l’enseignement supérieur, qui vise à priver de licence d’exploitation certains établissements d’origine étrangère. Son but quasiment avoué est d’interdire l’Université d’Europe centrale financée par le milliardaire hongro-américain George Soros, puisque c’est la seule université étrangère à ne pas pouvoir s’y conformer.
Dans un arrêt du 6 octobre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne juge que la loi hongroise de 2017 sur l’enseignement supérieur est contraire à la Charte des droits fondamentaux de l’Union, qui garantit la liberté académique et la liberté d’entreprise. Les juges de la Cour dénoncent “un moyen de discrimination arbitraire” introduit par la Hongrie, et des conditions “incompatibles avec le droit de l’Union”. Bien que l'institution autorise l'université à se réinstaller à Budapest, celle-ci a choisi de maintenir son siège principal à Vienne, considérant les conditions en Hongrie comme incompatibles avec les principes de liberté académique
Dans la foulée, le 7 avril 2017, le parti de Viktor Orbán dépose une nouvelle proposition de loi afin de contraindre les organisations non gouvernementales (ONG) à déclarer leurs ressources financières qui proviennent de donateurs étrangers. Une nouvelle fois, il apparaît que ce projet vise particulièrement contre le milliardaire américain George Soros, qui en 2016 a distribué 3,6 milliards de dollars aux ONG de Budapest. A cause de cette proposition de loi, les ONG perçues comme “agents de l’étranger” craignent de perdre leurs revenus financiers indispensables à leur activité d’opposition politique. Elle est finalement adoptée le 13 juin 2017.
Un mois plus tard, le 13 juillet, la Commission européenne engage une procédure d’infraction concernant cette loi hongroise. La conclusion tirée est qu'elle n’est pas conforme au droit de l’UE puisqu’elle porte notamment atteinte à la liberté d’association et qu’elle introduit des restrictions disproportionnées à la libre circulation des capitaux.
Considérant que la Hongrie ne répond pas à ses préoccupations, la Commission européenne adresse un avis motivé (deuxième étape de la procédure d’infraction) le 4 octobre 2017. La troisième étape de la procédure d’infraction, le recours devant la Cour de justice de l’Union européenne, est franchie le 7 décembre suivant.
Le 18 juin 2020, la Cour de justice de l’Union européenne condamne cette loi, l’estimant contraire à la liberté de circulation des capitaux au sein de l’UE. Elle statue que ces restrictions imposées aux ONG bafouent le droit à la liberté d’association, le droit au respect de la vie privée et celui à la protection des données personnelles.
Le 18 février 2021, la Commission européenne lance une nouvelle procédure en infraction contre la Hongrie pour cette même loi. L’exécutif européen met en demeure le gouvernement de Viktor Orbán de l’abroger dans un délai de deux mois.
Le 20 avril 2021, le gouvernement hongrois abroge sa loi sur les ONG jugée non conforme au droit européen en envoyant une proposition en ce sens au pouvoir législatif.
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04.04.2025 à 11:34
Juliette Verdes
L’Europe joue la montre sur les directives CSRD et CS3D. Derrière ces acronymes difficiles à saisir se cachent des législations ambitieuses, adoptées dans le cadre du Pacte Vert européen, pour s'assurer que les entreprises – y compris les multinationales – respectent les droits humains et l’environnement. Les premières mesures de ces textes clés sur la […]
L’article Devoir de vigilance, reporting : pourquoi l’application de nouvelles normes sociales et environnementales pour les entreprises va être repoussée est apparu en premier sur Touteleurope.eu.
L’Europe joue la montre sur les directives CSRD et CS3D. Derrière ces acronymes difficiles à saisir se cachent des législations ambitieuses, adoptées dans le cadre du Pacte Vert européen, pour s'assurer que les entreprises – y compris les multinationales – respectent les droits humains et l’environnement.
Les premières mesures de ces textes clés sur la finance verte auraient dû entrer en vigueur dès cette année. Le calendrier a cependant été chamboulé par le paquet Omnibus, un vaste plan de simplification des normes européennes visant à renforcer la compétitivité du continent, présenté par la Commission en janvier dernier.
Cette dernière a trouvé un accord avec les Etats membres de l’UE le 26 mars pour laisser plus de temps aux entreprises avant d'appliquer ces nouvelles exigences sociales et environnementales. Jeudi 3 avril, c’était au tour des eurodéputés de se prononcer pour inscrire ce report à l’agenda. Il a été largement adopté avec 531 voix pour, 69 contre et 17 abstentions.
La première vise à orienter les financements des investisseurs vers des activités bénéfiques à l’environnement et aux droits humains, grâce aux informations fournies par les sociétés sur leurs activités (un reporting extra-financier). Les entreprises de plus de 250 salariés (avec un chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 millions d’euros) auront donc l’obligation de communiquer sur leurs initiatives en faveur du développement durable.
La seconde concerne les entreprises de plus de 1 000 salariés (avec un chiffre d’affaires annuel supérieur à 450 millions d’euros), et entend limiter les effets négatifs de leur activité sur les droits humains et l’environnement, y compris leurs sous-traitants et leurs fournisseurs. En somme, les entreprises devront respecter les droits sociaux et environnementaux sur toute leur chaîne d'activité, de la conception d’un produit jusqu'à sa livraison. Ce qui signifie qu’elles ne pourront plus fermer les yeux sur l'esclavage, le travail des enfants, ou encore les pratiques polluantes et nocives pour la biodiversité.
Ces deux textes adoptés lors de la précédente législature (2019-2024) entreront progressivement en application, avec plusieurs phases selon la taille des entreprises. A commencer par les plus grands groupes.
La Commission européenne a proposé de revoir ces deux directives dans le cadre d’un vaste plan de simplification des normes européennes, appelé Omnibus. Celui-ci vise à stimuler la compétitivité économique de l'UE, fer de lance de la nouvelle Commission, dans la lignée des recommandations du rapport Draghi. Pour l’exécutif européen, l’objectif est aussi de réaliser des économies sur les coûts administratifs annuels d'environ 6,3 milliards d'euros, et de mobiliser 50 milliards d'euros supplémentaires d'investissement public et privé.
Les législations sur le reporting en matière de durabilité, le devoir de vigilance mais aussi le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières sont dans le viseur d’un certain nombre d'entreprises européennes, qui leur reprochent de représenter une charge administrative trop lourde. Outre l’allongement du calendrier, la Commission compte désormais exclure une majorité d’entreprises du champ d’application de ces directives, notamment les PME. Dans le cas du reporting extra-financier (CSRD), 80 % des entreprises pourraient être exemptées des obligations de la directive.
Les députés européens se sont prononcés en faveur d'un délai d’application des deux législations, jeudi 3 avril.
Une fois la proposition entérinée, l'obligation de produire des rapports sociaux et environnementaux (CSRD) débutera en 2028 pour les entreprises de plus de 250 salariés, et 2029 pour les PME cotées en bourse.
Quant au devoir de vigilance (CS3D), son application est reportée à 2028 pour les grandes entreprises employant plus de 5 000 personnes et ayant un chiffres d'affaires supérieur à 1,5 milliard d'euros. Même chose pour les entreprises non-européennes réalisant un chiffre d'affaires équivalent dans l'UE. Les entreprises à partir de 3 000 employés (chiffre d'affaires supérieur à 900 millions d’euros) seront soumises aux mêmes obligations à partir de 2028.
Dans les prochaines semaines, la commission des affaires juridiques du Parlement européen se penchera sur une deuxième proposition, cette fois-ci plus générale, modifiant le cœur même des directives. Autrement dit, les règles du devoir de vigilance et des exigences en matière d'information sur le développement durable seront révisées afin d’alléger la charge administrative pour les entreprises. Au détriment des ambitions du Pacte Vert ?
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04.04.2025 à 10:52
Florian Chaaban
La question de l'acquisition de la nationalité suscite d'importants débats en Europe, où coexistent deux grands principes juridiques : le droit du sol (jus soli) et le droit du sang (jus sanguinis). Si certains pays appliquent l'un de ces principes de manière stricte, d'autres combinent les deux avec des conditions variables. Qu'en est-il réellement en […]
L’article [Comparatif] Droit du sol, droit du sang : comment les pays de l'UE attribuent-ils la nationalité ? est apparu en premier sur Touteleurope.eu.
La question de l'acquisition de la nationalité suscite d'importants débats en Europe, où coexistent deux grands principes juridiques : le droit du sol (jus soli) et le droit du sang (jus sanguinis). Si certains pays appliquent l'un de ces principes de manière stricte, d'autres combinent les deux avec des conditions variables. Qu'en est-il réellement en France et chez nos voisins européens ?
Le droit du sol permet à un individu né sur le territoire d'un pays d'en obtenir la nationalité, mais il est rarement inconditionnel en Europe. Contrairement aux Amériques où plusieurs pays accordent automatiquement la citoyenneté à toute personne née sur leur sol, comme les Etats-Unis (dont Donald Trump souhaite durcir les conditions de nationalité pour les enfants de migrants), les pays européens subordonnent souvent l'application de ce principe à des critères précis.
C’est par exemple le cas de la Belgique, de l’Allemagne et de l'Irlande. Ces conditions concernent notamment le statut et la durée de résidence des parents. Ainsi, un jeune Belge peut obtenir la nationalité si ses parents ont résidé sur le territoire pendant cinq des dix dernières années tandis que chez nos voisins germaniques, la règle est que l’un des parents ait résidé habituellement et légalement dans le pays pendant au moins huit ans.
Comme d'autres pays européens, la France repose sur un système particulier appelé "double droit du sol". Dans l'Hexagone, un enfant né de parents étrangers peut devenir français à sa majorité s’il vit en France depuis au moins cinq ans à partir de ses 11 ans. Il obtient aussi la nationalité à la naissance si ses parents sont apatrides ou ne peuvent pas lui transmettre leur propre nationalité.
A noter qu'un enfant vivant en France peut obtenir la nationalité française par déclaration, avant sa majorité et avec des conditions de durée de résidence :
Ce régime existe aussi au Luxembourg, aux Pays-Bas, au Portugal et en Espagne.
À Mayotte, le droit du sol est plus restrictif qu’en métropole en raison des spécificités migratoires du territoire. Depuis une loi de 2018, un enfant né de parents étrangers ne peut obtenir la nationalité française que si l’un d’eux justifie d’une résidence régulière d’au moins trois mois avant la naissance.
Un projet de réforme visant à durcir davantage le droit du sol à Mayotte a été approuvé par une commission mixte paritaire le 1er avril 2025. Si le texte est définitivement adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat, les deux parents devront prouver une résidence d’au moins un an sur le territoire (ou un seul parent en cas de famille monoparentale). De plus, un passeport biométrique sera exigé, une mesure critiquée pour son caractère potentiellement discriminatoire, puisque certains pays ne délivrent pas ce type de document.
Le droit du sang demeure le principe dominant dans la plupart des pays européens. Au total, 19 pays appliquent un droit du sang strict parmi les Vingt-Sept.
Celui-ci stipule qu'un enfant acquiert la nationalité de ses parents, indépendamment de son lieu de naissance. Ainsi, dans des pays comme l'Italie, le Danemark ou l'Autriche, un enfant né de parents étrangers ne peut pas obtenir la nationalité du pays de naissance, à moins de remplir une liste de conditions strictes.
Pour mieux comprendre, en dehors du droit en vigueur, ne peut devenir Danois qu'un individu ayant habité dans le royaume les dix-neuf premières années de sa vie. De l'autre côté des Alpes, un enfant né en Italie de parents étrangers peut demander la citoyenneté italienne s'il a résidé légalement et de manière continue dans le pays jusqu'à ses 18 ans, et déposé une demande avant ses 19 ans. Le droit du sol y est donc une exception.
Au Royaume-Uni, toute personne née dans le pays avant le 1er janvier 1983 est citoyen britannique. Depuis, il faut qu’au moins un des parents soit britannique ou soit autorisé à résider sans limitation sur le territoire.
Si le droit du sol subsiste en Europe, il tend à se restreindre avec le temps. Au-delà du cas de Mayotte cité plus haut, plusieurs pays ont révisé leurs lois pour introduire des conditions de résidence parentale ou limiter les cas d'acquisition automatique. Par exemple, l'Etat luxembourgeois a modifié sa législation en 2008 pour n'accorder la nationalité qu'aux enfants nés de parents déjà nés dans le pays.
Le droit du sol et le droit du sang coexistent donc en Europe, mais avec des variations notables d'un pays à l'autre. Actuellement, aucun pays de l'Union européenne n'accorde une citoyenneté inconditionnelle à la naissance sur son sol.
Pays | Régime de nationalité |
Allemagne ![]() | Politique mixte |
Autriche ![]() | Droit du sang |
Belgique ![]() | Politique mixte |
Bulgarie ![]() | Droit du sang |
Chypre ![]() | Droit du sang |
Croatie ![]() | Droit du sang |
Danemark ![]() | Droit du sang |
Espagne ![]() | Politique mixte |
Estonie ![]() | Droit du sang |
Finlande ![]() | Droit du sang |
France ![]() | Politique mixte |
Grèce ![]() | Droit du sang |
Hongrie ![]() | Droit du sang |
Irlande ![]() | Politique mixte |
Italie ![]() | Droit du sang |
Lettonie ![]() | Droit du sang |
Lituanie ![]() | Droit du sang |
Luxembourg ![]() | Politique mixte |
Malte ![]() | Droit du sang |
Pays-Bas ![]() | Politique mixte |
Pologne ![]() | Droit du sang |
Portugal ![]() | Politique mixte |
République tchèque ![]() | Droit du sang |
Roumanie ![]() | Droit du sang |
Slovaquie ![]() | Droit du sang |
Slovénie ![]() | Droit du sang |
Suède ![]() | Droit du sang |
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04.04.2025 à 10:42
Eve Bachler
Les Européens sont-ils nombreux à souffrir de la pollution au quotidien ? L’Union européenne vient de publier ses derniers chiffres sur notre environnement et notre cadre de vie. Il en ressort qu’un Européen sur huit se dit gêné chez lui par la pollution, la saleté ou d’autres problèmes liés à l'environnement. C'est le résultat d'une étude […]
L’article [Podcast] Pollution en Europe : 1 Européen sur 8 gêné chez lui, les Français parmi les plus concernés est apparu en premier sur Touteleurope.eu.
L’Union européenne vient de publier ses derniers chiffres sur notre environnement et notre cadre de vie. Il en ressort qu’un Européen sur huit se dit gêné chez lui par la pollution, la saleté ou d’autres problèmes liés à l'environnement. C'est le résultat d'une étude d'Eurostat, l'office européen de statistiques, qui porte sur l’année 2023. Bien que les Européens soient plus sensibles aujourd'hui à leur environnement, le nombre de ceux qui se plaignent de la pollution a légèrement diminué ces dernières années, ce qui laisse à penser que la situation s'améliore.
Les Français figurent parmi les plus touchés : 16 % des habitants déclarent que la pollution ou la saleté leur posent problème au quotidien. A Malte, en revanche, plus d’un tiers de la population se dit concernée, tandis que les Croates paraissent les plus satisfaits de leur environnement et de leur cadre de vie.
Les chiffres d'Eurostat montrent aussi un net contraste entre les villes et les campagnes. En France, 1 citadin sur 3 est gêné par la pollution environnementale ou la saleté : c'est deux fois plus que les habitants des zones rurales. L'écart est d'ailleurs le même en moyenne dans l'Union européenne. Mais dans certains pays moins peuplés comme l’Estonie et Chypre, on ne constate quasiment aucune différence entre ville et campagne.
L’étude donne également des chiffres sur la pollution sonore, dont les effets sont d'autant plus marqués. En effet, plus d’un Européen sur six est perturbé par le bruit de ses voisins ou de la rue.
Ces chiffres révèlent, une fois de plus, des écarts importants entre les pays. Ce sont de nouveau les Maltais qui se plaignent le plus du bruit, puis les Luxembourgeois et les Néerlandais. Les Français sont en 9e position avec un habitant sur cinq qui se dit gêné - et même près d’un sur trois dans les villes.
Eurostat établit un autre constat important : le poids des inégalités sociales. Les populations les plus démunies sont davantage exposées à la pollution et aux nuisances sonores.
L'Union européenne agit en adoptant un certain nombre de dispositions. La directive sur la qualité de l'air fixe notamment des limites aux principaux polluants. L'Union a également interdit les ventes de voitures thermiques neuves d’ici à 2035. De plus, la directive européenne sur la pollution sonore exige des Etats membres de mettre en œuvre des plans de prévention du bruit. Jugée moins efficace, cette dernière a été récemment mise en cause par la Cour des comptes européenne.
En somme, la pollution environnementale et sonore est une réalité bien tangible pour beaucoup d’Européens et de Français, surtout en ville. Si la situation s'est légèrement améliorée ces dernières années grâce aux réglementations européennes, la tendance reste fragile, à l’heure où certaines mesures environnementales sont remises en question, sous la pression économique et politique.
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03.04.2025 à 17:39
Rédaction Toute l'Europe
En 2021, le flux des investissements directs étrangers entrant dans l’UE a atteint environ 117 milliards d’euros, soit 8 % du montant mondial, selon un rapport spécial de la Cour des comptes européenne. Les principales transactions étrangères vers l'UE ont eu lieu en Allemagne, en Espagne et en France. Les investissements directs étrangers sont généralement […]
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Qu’est-ce qu’un investissement direct étranger ?
Un investissement direct étranger, ou investissement direct à l’étranger (IDE) correspond à l’acquisition d’actifs financiers représentant au moins 10 % du capital d’une société étrangère.
Contrairement au simple placement financier (comme l’achat de quelques actions dans une société), l’IDE est effectué dans le but d’acquérir un intérêt durable dans une entreprise étrangère "et d’exercer, dans le cadre d’une relation à long terme, une influence significative sur sa gestion”, explique l’Insee.
L’IDE est ainsi l’élément clé de la mondialisation des entreprises en quête de nouveaux marchés, et donc de l’émergence de multinationales : création de filiales à l’étranger, fusions-acquisitions transfrontières…
En 2021, le flux des investissements directs étrangers entrant dans l’UE a atteint environ 117 milliards d’euros, soit 8 % du montant mondial, selon un rapport spécial de la Cour des comptes européenne. Les principales transactions étrangères vers l'UE ont eu lieu en Allemagne, en Espagne et en France.
Les investissements directs étrangers sont généralement perçus comme bénéfiques pour les économies des pays d'accueil et d'origine, ainsi que pour les entreprises qui investissent. Ils favorisent la croissance, l'innovation, la création d'emplois qualifiés, le développement des compétences, et encouragent de meilleures pratiques de gestion. Ils ouvrent également de nouvelles opportunités pour les exportations de l'Union.
Malgré leurs effets positifs, les IDE soulèvent néanmoins des problématiques importantes en matière de sécurité dans certains secteurs. "Les risques associés aux IDE sont devenus plus sérieux, en particulier dans les questions liées à l’autonomie et aux actifs stratégiques (les centrales nucléaires ou les ports, par exemple), aux secteurs sensibles (notamment ceux qui touchent à des intrants essentiels en matière de défense), […] ou encore au transfert de technologies sensibles vers un pays tiers dont les intentions stratégiques [divergent] des intérêts de l’UE", explique la Cour des comptes européenne.
C’est l’objet du règlement mis en œuvre le 11 octobre 2020. Ce "cadre européen relatif au filtrage des investissements directs étrangers" doit éviter les prises de contrôle dommageables d’entreprises européennes grâce à l’échange d’informations entre les Etats membres sur les IDE touchant les secteurs stratégiques (aéronautique, ferroviaire, batteries, biotechnologies…).
Un exemple emblématique : les grands ports européens
En 2016, sous la pression de ses créanciers, l’Etat grec a vendu le Pirée, le plus grand port hellène, à l’armateur chinois Cosco Shipping Corporation : une entreprise publique, détenue par la République populaire de Chine. Pékin a également renforcé son influence sur les ports d’Anvers, de Rotterdam, de Hambourg… Son concurrent public hong-kongais China Merchants Port a, quant à lui, acquis des parts dans les ports de Dunkerque, du Havre, de Marseille, de Nantes et de Marsaxlokk, à Malte.
Avec ces opérations mises bout à bout, les opérateurs chinois possèdent aujourd'hui des participations minoritaires ou majoritaires dans 14 ports européens, dont les trois plus grands du continent, indique une étude du Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa), parue en avril 2024.
Les ports jouent un rôle clé dans le commerce en Europe : en Allemagne par exemple, ceux-ci traitent 60 % de son commerce extérieur (importations et exportations confondues). L'acquisition de ces infrastructures sensibles par des sociétés étrangères pose des enjeux importants en matière de sécurité : "Les ports sont de plus en plus des infrastructures numériques, ce qui crée des risques d'espionnage et de sabotage", décrypte la chercheuse Marie Krpata, chargée de mission au Cerfa et auteure de l'étude.
Le règlement établit une liste des facteurs que les Etats membres ou la Commission peuvent prendre en considération pour déterminer si un IDE risque de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public, s'interrogeant sur ses "effets potentiels" dans des secteurs "clés".
Plusieurs critères peuvent être retenus : tout d'abord si l'IDE concerne une cible dite "critique". Ce terme recouvre les infrastructures sensibles (centrales nucléaires par exemple), les technologies critiques (comme les semi-conducteurs utilisés dans de nombreux appareils électroniques), les biens à double-usage (militaire et civil), ou encore certaines matières premières. Les Etats membres veillent également à ce que l'investissement ne porte pas atteinte à des droits essentiels, comme la liberté des médias ou l'accès aux soins.
La législation s'intéresse aussi au caractère critique de l'investisseur étranger : contrôle direct ou indirect par le gouvernement d'un pays tiers, participation à des activités portant atteinte à la sécurité ou l'ordre public, à des activités illégales ou criminelles…
Les pays de l'UE sont incités à mettre en place des mécanismes de filtrage des IDE. Si de tels mécanismes existent au niveau national, ils ont l'obligation de communiquer à la Commission et aux autres Etats membres les dossiers d’IDE soumis à un filtrage.
Plusieurs Etats membres effectuent cette surveillance depuis longtemps. Le règlement européen la coordonne grâce à un système d'alerte entre les pays de l'UE, basé sur l'échange d'informations entre tous les Etats membres qui possèdent un mécanisme de filtrage des investissements étrangers. Concrètement, les pays ont l'obligation de signaler tous les dossiers faisant l'objet d'un filtrage au niveau national et de fournir des informations concernant ces potentiels investissements.
Des points de contact, désignés dans chaque Etat membre et à la Commission européenne, échangent des informations sur les investisseurs étrangers et l'entreprise européenne concernés via un "système sécurisé et crypté". La Commission européenne peut alors demander des informations complémentaires et formuler un avis. Le pays ayant notifié l'investissement à risque décide ensuite de l'autoriser, sous certaines conditions, ou de l'interdire sur la base des retours de la Commission et des autres Etats membres.
Certains programmes de l'Union européenne, qui concernent des secteurs sensibles, font l'objet d'une attention accrue. C'est le cas pour le Réseau transeuropéen de transports, le système satellite Galileo, ou encore le programme Horizon Europe.
En 2021, au moment de l'entrée en vigueur du règlement, seuls 14 pays avaient établi un cadre pour filtrer les IDE. Désormais, 24 Etats membres de l'UE sont dotés d'un système de filtrage des investissements tandis que de nouveaux mécanismes sont en cours d'adoption à Chypre, en Croatie et en Grèce, selon le quatrième rapport annuel de la Commission européenne sur le filtrage des investissements. "La guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, un contexte géopolitique difficile et les risques nouveaux et émergents qui en découlent pour la sécurité" peuvent expliquer l'adoption accélérée de ce mécanisme, remarque la Commission.
En 2023, 488 opérations ont fait l'objet d'un contrôle dans 18 pays, contre 421 notifications soumises par 17 Etats membres l'année précédente. Dans son rapport spécial paru en 2023, la Cour des comptes européenne souligne que "la Commission a pris des mesures appropriées pour mettre en œuvre [le filtrage des IDE] et que les Etats membres sont de plus en plus nombreux […] à coopérer au niveau européen". Elle estime toutefois que des obstacles subsistent, notamment en raison du manque d'harmonisation des législations au sein de l'UE. Le règlement ne définit pas de manière suffisamment précise les types d'investissements qui comportent un risque pour "la sécurité et l'ordre public", donnant lieu à des interprétations différentes selon les pays, explique la Cour des comptes.
C'est pourquoi, en janvier 2024, la Commission européenne a proposé de réviser ce cadre pour assurer la sécurité économique de l'UE. Dans son rapport d'évaluation, elle présente des pistes d'amélioration. A commencer par une plus grande harmonisation des mécanismes de filtrage au niveau européen, tout en conservant certaines spécificités nationales en matière de sécurité. Le champ d’application inclurait également une liste plus précise d'actifs stratégiques et de technologies critiques, qui feraient l'objet d'une surveillance renforcée. De plus, le filtrage s’étendrait désormais aux investissements réalisés par des investisseurs de l'UE contrôlés en dernier ressort par des particuliers ou un pays étranger. Enfin, le règlement révisé devrait encore améliorer la coopération entre les pays de l'UE et fluidifier l'échange d'informations avec la Commission européenne.
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03.04.2025 à 17:16
Hugo Palacin
Depuis qu'il est redevenu président des Etats-Unis en janvier 2025, Donald Trump a déclaré une guerre commerciale globale au monde entier. L'Union européenne n'est pas épargnée par le milliardaire ultraconservateur. A de nombreuses reprises, il a accusé les pays du Vieux Continent d'avoir trop longtemps profité d'une forme de bienveillance commerciale américaine. "Vous pensez que […]
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Depuis qu'il est redevenu président des Etats-Unis en janvier 2025, Donald Trump a déclaré une guerre commerciale globale au monde entier. L'Union européenne n'est pas épargnée par le milliardaire ultraconservateur. A de nombreuses reprises, il a accusé les pays du Vieux Continent d'avoir trop longtemps profité d'une forme de bienveillance commerciale américaine.
"Vous pensez que l'Union européenne est très amicale, mais ils nous arnaquent. C'est tellement triste à voir. C'est pathétique", a-t-il déclaré mercredi 2 avril, au moment où il annonçait son intention d'appliquer 20 % de tarifs douaniers supplémentaires sur les importations en provenance de l'UE.
La principale préoccupation du leader du camp républicain est le déficit commercial de son pays vis-à-vis de l'Union, qu'il estime à 300 milliards de dollars. Si les Etats-Unis sont effectivement déficitaires dans leur relation commerciale avec l'UE, ce chiffre est en revanche faux.
En 2024, les Etats-Unis étaient le premier partenaire de l'UE pour les exportations de biens de (20,6 %) et son deuxième partenaire pour les importations de biens (13,7 %), derrière la Chine (21,3 %).
Selon les données communiquées par la Commission européenne, le commerce transatlantique de biens et de services a atteint 1 600 milliards d'euros en 2023. Dans le détail, l'Union européenne a exporté pour 822,5 milliards d'euros de biens et services vers les Etats-Unis cette année-là, tandis qu'elle a importé pour 774,5 milliards d'euros en provenance de l'autre côté de l'Atlantique. La balance commerciale penche donc bel et bien du côté de l'UE, mais de 48 milliards d'euros seulement. On est bien loin du chiffre de 300 milliards d'euros, avancé régulièrement par Donald Trump.
Il existe toutefois une grande différence de balance commerciale entre les biens et les services. Et c'est peut-être sur ce point précis que Donald Trump s'appuie pour essayer de travestir la réalité des faits. Car pour ce qui concerne uniquement le commerce de biens, les exportations européennes vers les Etats-Unis atteignaient 503,8 milliards d'euros en 2023, contre 347,2 milliards d'euros d'importations américaines. Soit un excédent commercial de 156,6 milliards d'euros à la faveur du Vieux Continent.
Donald Trump s'est plaint à plusieurs reprises de ce déficit pour son pays. "Ils n'achètent pas nos voitures, ni nos produits agricoles, ils n'achètent presque rien", regrettait-il déjà fin janvier, à propos des Européens. Sauf que du côté des services, la tendance s'inverse. En ayant exporté pour 318,7 milliards d'euros vers les Etats-Unis en 2023 et importé pour 427,3 milliards d'euros, l'Union se retrouve cette fois en déficit commercial, à hauteur de 108,6 milliards d'euros.
Une donnée que le président américain semble régulièrement oublier, mais qui n'est pas anodine. Car dans la catégorie des "services", on retrouve, entre autres, les profits réalisés sur le continent européen par les géants du numérique, tel que Google, Amazon, Facebook ou Apple. Ce mécanisme s'applique également aux grandes marques américaines.
"Quand on achète un gobelet avec le logo Disney ou des baskets Nike, toutes les filiales européennes de ces entreprises paient un droit d'utilisation de la marque. C'est comptabilisé dans les exportations américaines de services", explique Eric Dor, professeur à l'Ieseg, School of Management, dans un entretien au Figaro. Ainsi, ce chiffre d'affaires lié à l'usage de la propriété intellectuelle des grandes marques américaines représente plus d'un tiers des exportations américaines de services vers l'Union. Il en va de même pour les services aux entreprises. Les grands cabinets de conseil et d'audit américains, comme McKinsey, font fortune en Europe.
Selon les données d'Eurostat pour 2024, le pétrole brut (12,6 %), les produits médicaux et pharmaceutiques (9,9 %), les moteurs (8 %), les aéronefs et équipements associés (5,4 %) et le gaz naturel (4,6 %) constituent les principaux biens importés par l'UE en provenance des Etats-Unis.
Dans le sens inverse, les produits médicaux et pharmaceutiques (14,6 %), les médicaments (8 %), les voitures et autres véhicules (7,3 %), les autres machines (2,7 %) et les aéronefs et équipements associés (2,5 %) sont les principaux biens exportés par l'UE vers les Etats-Unis l'an passé.
D'après Eurostat, en 2024, 20 des 27 Etats membres de l'UE avaient une balance commerciale excédentaire vis-à-vis des Etats-Unis, en ce qui concerne les échanges de biens seulement (les échanges de services n'y sont pas comptabilisés). Tout en haut du classement, on retrouve l'Allemagne, avec un excédant commercial de 92 milliards d'euros, puis l'Irlande (51 milliards d'euros) et l'Italie (39 milliards d'euros). La France se situe au milieu des pays européens, avec un excédant commercial de 3 milliards d'euros en 2024.
Malte (12 millions d'euros), le Luxembourg (178 millions d'euros), Chypre (191 millions d'euros), la Slovénie (277 millions d'euros), la Pologne (491 millions d'euros), l'Espagne (6 milliards d'euros) et les Pays-Bas (25 milliards d'euros) sont les seuls Etats membres de l'UE qui importent plus qu'ils n'exportent avec les Etats-Unis.
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03.04.2025 à 17:07
Arthur Olivier
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, son homologue au Parlement européen Roberta Metsola, ou encore le chancelier allemand Olaf Scholz… Tous ont félicité Donald Trump pour sa réélection. Mais derrière les traditionnelles politesses diplomatiques, l’issue de l’élection américaine du 5 novembre représente un véritable défi pour les Européens. Le retour de […]
L’article Présidence de Donald Trump : quelles conséquences pour l’Europe et la France ? est apparu en premier sur Touteleurope.eu.
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, son homologue au Parlement européen Roberta Metsola, ou encore le chancelier allemand Olaf Scholz… Tous ont félicité Donald Trump pour sa réélection. Mais derrière les traditionnelles politesses diplomatiques, l’issue de l’élection américaine du 5 novembre représente un véritable défi pour les Européens.
Le retour de Donald Trump ne réjouit pas vraiment les dirigeants de ce côté de l’Atlantique. A l’exception de quelques uns, comme les Premiers ministres hongrois Viktor Orbán et slovaque Robert Fico, connus pour leurs dérives autoritaires, ou encore la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni.
Commerce, défense, régulation du numérique ou lutte contre le réchauffement climatique : l’alternance au sommet de la première puissance mondiale conduit les Européens à multiplier les points de vigilance face aux incertitudes et aux décisions de Donald Trump lors de son deuxième mandat, qui a débuté le 20 janvier 2025.
S'il a fait de Pékin son adversaire principal, en matière de commerce, le milliardaire de 78 ans a aussi ciblé l’Union européenne, allant jusqu’à la qualifier de "mini-Chine" avant son second mandat. Partenaire économique important des Etats-Unis, le Vieux Continent exporte plus de biens qu’il n'en n’importe depuis ce pays.
Lors de son investiture pour son retour à la Maison-Blanche, le Républicain n'a pris aucune mesure ferme en matière de commerce. Mais le discours a évolué dès le lendemain. "L'UE est très mauvaise pour nous. Ils nous traitent très mal", a déclaré lors d'une conférence de presse le nouveau président américain, assurant que les pays européens pourraient être soumis à des droits de douane.
Le 3 février, Donald Trump a évoqué un déficit commercial de 300 milliards de dollars avec le Vieux Continent, une situation jugée “injuste”. Dans les faits, ce déficit (en matière de biens) a atteint 158 milliards d’euros en 2023, et dépassait les 183 milliards d’euros fin novembre 2024, selon la Commission européenne. Ce déséquilibre a toutefois été partiellement compensé par un déficit de l'Union européenne en matière de services échangés avec les Etats-Unis.
Afin de renverser cette tendance, le Républicain, défenseur de "l'Amérique d'abord" et d'un programme protectionniste, a mis en place une série de mesures. Après avoir annoncé une taxe de 25 % sur l’acier et l’aluminium le 10 février (taxe appliquée depuis le 2 avril) puis annoncé trois jours plus tard la mise en place de "droits de douane réciproques" sur l’ensemble des marchandises importées, le milliardaire a indiqué le 26 février que l'Union européenne serait prochainement concernée par des droits de douane de 25 % sur les produits entrant sur le sol américain. "Nous avons pris la décision, et nous l'annoncerons prochainement, ce sera 25 % et ce sera sur les voitures, toutes sortes de choses", a lancé le milliardaire, qui tenait sa première réunion de cabinet à la Maison-Blanche.
En réponse à la guerre commerciale déclarée, l'UE a contre-attaqué, le 12 mars, en annonçant qu’elle appliquerait des droits de douane "forts mais proportionnés" sur une série de produits américains à compter du 1er avril. Des mesures finalement repoussées à la mi-avril, et qui pourraient concerner jusqu'à 26 milliards d'euros de marchandises américaines, notamment le bourbon, les bateaux ou les motos.
Déterminé à faire régner sa loi, Donald Trump a frappé un grand coup trois semaines plus tard. Sous l'appellation de "jour de la libération", il a décrété dans la soirée du mercredi 2 avril l'instauration d'une taxe de 20 % sur tous les produits européens entrant aux Etats-Unis. "L’Europe nous arnaque, eux, c’est 39 % qu’ils prennent. On va leur en demander à peine la moitié", a-t-il justifié.
Si l’ensemble des produits européens sont touchés par ces nouvelles taxes, certains secteurs vont être plus durement impactés, l’industrie automobile en tête. Les voitures fabriquées à l’étranger seront désormais taxées à 25 %, pénalisant particulièrement l'Allemagne et ses grands constructeurs.
L’Union européenne n’a pas tardé à réagir. Elle prépare ses contre-propositions depuis des semaines. Lors d'un sommet en Ouzbékistan le 2 avril, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a dénoncé "un coup dur pour l’économie mondiale", avertissant que ces mesures entraîneraient une montée de l’inflation. L'Allemande a rappelé que l'UE était "en train de finaliser un premier paquet de contre-mesures en réponse aux droits de douane sur l'acier", et de se préparer "à d'autres contre-mesures, pour protéger nos intérêts et nos entreprises si les négociations échouent". Elle a cependant laissé ouverte la porte ouverte à des négociations.
L’entrée en vigueur des taxes américaines est prévue le 9 avril pour les mesures spécifiques visant l’Europe, la Chine et d’autres partenaires commerciaux.
Les relations avec Washington sont tout aussi cruciales côté français. Selon les chiffres du Trésor, les échanges de biens et services entre la France et les Etats-Unis ont atteint un niveau historique en 2023 (153,1 milliards de dollars). L’Hexagone représente par ailleurs le 5e plus gros investisseur outre-Atlantique, tandis que les Etats-Unis occupent la première place en sens inverse.
Les droits de douane supplémentaires aux frontières américaines risque de peser sur les secteurs dans lesquels les exportations sont particulièrement importantes : les industries de l’aéronautique et de la chimie, mais aussi les boissons (vins, cognacs et autres alcools de l'Hexagone), dont certains sont déjà menacés par une enquête commerciale en Chine.
Les nouveaux plans du gouvernement américain prévoient des droits de douane différenciés et plus sévères vis-à-vis des territoires d’Outre-mer par rapport au reste de l’UE. Ainsi, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Mayotte seront soumises à une taxe supplémentaire de 10 %, tandis que La Réunion, bien qu’ayant le même statut légal, verra ses exportations taxées à 37 %. Ce taux atteindra même 50 % sur les produits en provenance de Saint-Pierre-et-Miquelon - taxation la plus élevée à l'échelle du globe.
Le mot "Europe" n’apparaissait qu'une fois dans le programme du ticket Trump-Vance : pour aborder le sujet des dépenses militaires. "Les Républicains renforceront les alliances en veillant à ce que nos alliés respectent leur obligation d'investir dans notre défense commune et en rétablissant la paix en Europe", pouvait-on dans le document de 16 pages.
Depuis des années, le milliardaire critique les Etats membres de l’Otan, les accusant de sous-investir en matière de défense et de compter sur le parapluie de leur allié américain. Donald Trump leur a longtemps reproché de ne pas respecter l’objectif de consacrer 2 % de leur PIB aux dépenses militaires, une cible fixée en 2006. Et le 7 janvier 2025, il a déclaré que les membres de l'Alliance atlantique devaient accroître ce budget de défense à 5 % de leur PIB. "Ils peuvent tous se le permettre", a-t-il lancé lors d'une conférence de presse dans sa résidence de Mar-a-lago.
Un objectif que beaucoup jugent irréaliste. Parmi les 23 membres de l’Union européenne que compte l'Otan, une large majorité dépasse aujourd’hui le palier des 2 %. La Pologne a plus que doublé cet objectif en 2024, avec un niveau de dépenses atteignant 4,1 % de son PIB. Le déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022, a notamment poussé les gouvernements de l’UE à mieux investir dans leur défense.
"L'Europe ne peut espérer assurer sa paix et sa sécurité en continuant de dépenser moins que les autres continents ou espaces politiques", a soutenu le président français Emmanuel Macron à l'occasion de ses vœux aux armées, lundi 20 janvier.
Face aux menaces de désengagement des Etats-Unis (qui ont suspendu temporairement leur aide militaire à l'Ukraine entre le 3 et le 8 mars dernier) en Europe, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, a présenté mardi 4 mars un plan pour une Europe "plus sûre et résiliente". Initialement nommé "ReArm Europe" ("Réarmer l'Europe"), ce plan désormais appelé "Readiness 2030" ("Préparation 2030") vise à répondre aux défis sécuritaires auxquels est confronté le continent.
Ce projet prévoit une enveloppe de près de 800 milliards d’euros à mobiliser dans les cinq ans à venir pour moderniser les capacités militaires des Vingt-Sept. Un autre volet majeur du financement concerne la création d’un nouvel instrument de prêt de 150 milliards d’euros, appelé « SAFE », destiné à aider les Etats membres à acheter des équipements militaires européens. Ce mécanisme vise à renforcer l’interopérabilité entre les forces armées européennes, tout en soutenant l’industrie de défense européenne.
Un bouclier de défense européen d'autant plus urgent et nécessaire que dans un document intitulé "Interim National Defense Strategic" ("Orientations stratégiques provisoires pour la défense nationale") en date du 29 mars, le nouveau secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, redéfinit les priorités militaires des Etats-Unis en accord avec les orientations de Donald Trump. Ce texte prévoit en particulier un retrait significatif des forces américaines en Europe, y compris en cas d’attaque russe. Une intention toutefois relativisée ce jeudi 3 avril par le secrétaire d'Etat américain, Marco Rubio, assurant que les Etats-Unis allaient "rester dans l'Otan".
Le conflit entre l’Ukraine et la Russie est l'autre grand sujet de préoccupation des Européens. Le milliardaire, qui avait souligné à plusieurs reprises vouloir engager des négociations avec Moscou avant sa prise de fonction, promettant de "mettre fin à la guerre en Ukraine en vingt-quatre heures", s'y est bel et bien employé. Avec un succès très relatif pour le moment.
Le 28 février, une rencontre houleuse à la Maison-Blanche avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky a exacerbé les tensions, le milliardaire américain accusant son homologue de manquer de volonté pour parvenir à un "accord de paix durable". En réponse, le chef d'Etat ukrainien a souligné que des garanties de sécurité solides étaient indispensables pour mettre fin à la guerre. Cette divergence a non seulement affaibli le soutien américain à l'Ukraine, mais aussi inquiété les alliés européens concernant l'engagement des Etats-Unis dans cette crise.
Sur le plan militaire, Donald Trump a négocié un cessez-le-feu partiel avec la Russie, limité aux attaques sur les infrastructures énergétiques et maritimes. Ce compromis, bien qu'insuffisant pour stopper les combats au sol, a permis d'ouvrir la voie à une pause temporaire dans les hostilités. Cependant, la Russie a répondu en posant des conditions strictes, comme l'arrêt de l'aide militaire américaine à l'Ukraine et la levée de sanctions économiques, compliquant toute avancée vers une trêve durable. L'administration Trump a utilisé ce cessez-le-feu pour exercer une pression sur l'Ukraine, suspendant temporairement son assistance militaire afin d'obtenir des concessions.
En parallèle, le président américain continue de chercher à tirer parti des vastes ressources en terres rares présentes sur le sol ukrainien pour compenser le soutien financier américain. Un accord sur ces minerais stratégiques est en négociation mais reste difficile à trouver. D'autant qu'une partie importante des gisements se trouve dans des zones occupées par la Russie, compliquant leur exploitation. Les négociations sur les centrales électriques ukrainiennes, en particulier la centrale nucléaire de Zaporijia, occupent également une place centrale dans les discussions entre les États-Unis, la Russie et l'Ukraine.
S’agissant des dossiers liés au numérique, les relations transatlantiques pourraient là aussi se tendre un peu plus. Ces dernières années, l’UE a renforcé la modération des réseaux sociaux avec le Digital Services Act (DSA) et limité la domination des géants du web avec le Digital Markets Act (DMA).
Des législations peu appréciées par Elon Musk, propriétaire de la plateforme X (ex-Twitter) et actuel membre du gouvernement de Donald Trump. Celui-ci a connu plusieurs conflits avec la Commission européenne au sujet de l’application du DSA, sur le traitement de la désinformation notamment.
Le patron de Tesla, en charge du ministère de l’Efficacité gouvernementale, travaille sur une mission temporaire destinée à couper dans les dépenses et à abroger des réglementations fédérales. Il s’est récemment illustré par des actions peu amicales vis-à-vis de l’Europe, notamment en s’ingérant dans la campagne des dernières élections allemandes, en soutenant publiquement la candidate d’extrême droite Alice Weidel.
Plus inattendu est le revirement de Mark Zuckerberg, fondateur et PDG de Meta qui regroupe Facebook, Instagram et WhatsApp. Il semble avoir rejoint la croisade d'Elon Musk contre les législations de l'Union européenne, accusée d'"institutionnaliser la censure", en annonçant une forte réduction de la modération sur ces trois réseaux sociaux le 7 janvier 2025. Trois jours plus tard, le milliardaire a critiqué l'UE pour avoir imposé des amendes massives aux géants américains de la tech, exprimant l'espoir que Donald Trump défende leurs intérêts.
Le Conseil du commerce et de la technologie UE-Etats-Unis est aussi sur la sellette. La plateforme avait été créée en 2021 pour rétablir un dialogue des deux côtés de l’Atlantique sur des sujets comme l’intelligence artificielle ou la cybersécurité. Ce Conseil "a certainement peu de chances de survivre à un second mandat républicain, à moins qu'il ne devienne un club antichinois à part entière", résument Micol Bertolini et Elvire Fabry pour l’institut Jacques Delors.
Enfin, le secteur du numérique pourrait faire les frais des dernières annonces de Donald Trump sur les droits de douane. Jeudi 3 avril, la porte-parole du gouvernement français, Sophie Primas, a indiqué que l’Union européenne n’hésitera pas à s’en prendre aux géants de la tech pour répondre à la guerre commerciale lancée par les Etats-Unis et Donald Trump. "Nous avons aujourd’hui toute une batterie d’outils et nous sommes prêts à [répondre]", a-t-elle assuré au micro de la radio RTL.
L'élection de Donald Trump s'apparente à un recul pour la politique climatique, alors que les Etats-Unis sont le deuxième émetteur de gaz à effet de serre dans le monde, derrière la Chine. Le milliardaire veut augmenter la production d'énergies fossiles en favorisant les forages et la construction de nouveaux pipelines. Il est également revenu sur plusieurs normes antipollution dans le secteur automobile.
Donald Trump a choisi un homme pour mener à bien cette tâche. Le 11 novembre 2024, le président élu a désigné Lee Zeldin à la tête de la puissante Agence de protection de l'environnement (EPA), l'organe qui élabore et fait respecter les politiques environnementales au niveau fédéral. "Nous rétablirons la domination énergétique américaine, revitaliserons notre industrie automobile pour ramener des emplois aux Etats-Unis et ferons [du pays] le leader mondial de l’intelligence artificielle. Nous le ferons tout en protégeant l’accès à l’air et à l’eau propres", a réagi sur X le Républicain originaire de New York.
Cette situation fragilise aussi la diplomatie climatique. Rapidement après son accession à la Maison-Blanche en 2017, Donald Trump avait décidé de sortir de l’accord de Paris sur le climat, adopté lors de la COP21 fin 2015. Il a récidivé pour son retour aux affaires en 2025. Tout juste investi, le milliardaire a annoncé le retrait des Etats-Unis de ce texte, qui doit engager le monde sur la voie d'un réchauffement planétaire inférieur à 2°C. Sa décision ne pourra cependant être effective que dans un délai d’un an.
Ce choix rétrograde a aussitôt été pointé du doigt par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, affirmant que “l’Accord de Paris demeure le meilleur espoir de l’humanité tout entière”. L'Allemande a fait de la lutte contre le réchauffement climatique l'une de ses grandes priorités avec le Pacte vert présenté en décembre 2019. Loin des ambitions affichées par Trump, la présidence de Joe Biden avait quant à elle été marquée par des politiques significatives et une bonne coopération entre les deux continents sur le plan climatique.
Les dirigeants européens ont également été nombreux à réagir à la menace d'annexion du Groenland formulée par Donald Trump le 7 janvier. Un territoire situé entre l'Amérique du Nord et l'Arctique, mais qui appartient au Danemark, membre de l'Union européenne et de l'Otan. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a affirmé qu'il n'était "pas question" que l'UE laisse des pays "s'en prendre à ses frontières souveraines". La Commission européenne a quant à elle qualifié ces menaces d'extrêmement "hypothétiques", tout en soulignant son attachement à la souveraineté des Etats.
Des propos loin de calmer les ardeurs du milliardaire, qui a remis le sujet sur la table le 4 mars 2025, lors de son discours face aux deux chambres du Congrès. Le président américain a garanti que cette annexion se ferait "d’une manière ou d’une autre", tout en promettant aux habitants de cette île autonome de 2,1 millions de km2 prospérité économique et succès. "Nous assurerons votre sécurité, nous vous rendrons riches et, ensemble, nous mènerons le Groenland vers des sommets que vous n’auriez jamais imaginés possibles", a-t-il déclaré. Les Etats-Unis possèdent une base militaire dans le nord-ouest de l'île depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et ont a priori le droit d'augmenter leur présence, tant qu'ils en informent les autorités groenlandaises et le Danemark.
Sur la guerre au Proche-Orient, Donald Trump et Joe Biden ont tous deux revendiqué l'accord de cessez-le-feu annoncé le 15 janvier 2025 entre Israël et le Hamas. L'UE, qui n'a pas été directement impliquée dans les négociations, a salué l'accord tout en se montrant prudente quant à la suite. Un certain nombre de dirigeants européens a rappelé l'engagement officiel de l'Union, favorable à une solution à deux Etats. Une position apparemment peu compatible avec le nouveau plan proposé par Donald Trump en 2025, qui prévoit une prise de contrôle de Gaza par les États-Unis pour en faire une "Riviera du Moyen-Orient". Une transformation radicale qui nécessite le transfert de 2,4 millions d’habitants vers l’Égypte et la Jordanie.
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03.04.2025 à 12:19
Hugo Palacin
"La planète entière retenait son souffle. Le trublion à la Maison-Blanche, si fier de sa posture jacksonienne, un savant mélange de populisme et de chauvinisme, allait-il mettre ses menaces à exécution et décréter une guerre commerciale tous azimuts ? Le 'jour de la libération' tant annoncé par Donald Trump est arrivé et il n'a pas déçu […]
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"La planète entière retenait son souffle. Le trublion à la Maison-Blanche, si fier de sa posture jacksonienne, un savant mélange de populisme et de chauvinisme, allait-il mettre ses menaces à exécution et décréter une guerre commerciale tous azimuts ? Le 'jour de la libération' tant annoncé par Donald Trump est arrivé et il n'a pas déçu les plus anxieux", entame Maurin Picard, correspondant du Soir aux Etats-Unis.
"Donald Trump déclare la guerre commerciale au monde", titre purement et simplement RFI. Ce mercredi 2 avril en fin de journée, le président américain a dévoilé les nouveaux droits de douane drastiques imposés à 185 pays et territoires à travers le monde. Une mesure qui risque de bouleverser "des décennies de politique commerciale américaine" et qui menace "de déclencher une guerre commerciale mondiale", alerte The Guardian.
"Il l'annonçait depuis des semaines, il l'a fait" [RFI]. "Dans quelques instants, je signerai un décret historique instituant des droits de douane réciproques sur [les importations] des pays du monde entier", a déclaré Donald Trump hier, en fin d'après-midi, depuis les jardins de la Maison-Blanche. Devant les journalistes, le milliardaire a célébré l'"un des jours les plus importants de l'histoire américaine".
Ce dernier a finalement décidé d'imposer un tarif douanier universel de 10 % sur les importations de 185 pays et territoires des quatre coins de la planète. "Un coup dur porté au libre marché, qui vise notamment à promouvoir la production locale, à forcer les sociétés à rapatrier les usines outre-Atlantique, ainsi qu'à punir les partenaires économiques qui 'maltraitent' Washington, argumente depuis des mois le dirigeant républicain", explique Le Figaro.
Sont concernées les plus grandes puissances mondiales comme les endroits les plus reculés, telles que les îles Heard-et-MacDonald, territoire australien situé dans l'océan Indien, "dépourvu d'êtres humains, mais habité par des colonies de phoques et de pingouins", ironise (à moitié) Euronews.
"Le tarif universel de 10 % entrera en vigueur le 5 avril tandis que les tarifs réciproques débuteront le 9 avril", précise The Guardian.
Donald Trump a donc "également imposé des droits de douane supplémentaires individualisés à une soixantaine de pays, qu'il considère comme les plus grands contrevenants commerciaux", rapporte Politico. Parmi eux, l'Union européenne et ses 27 Etats membres, visés par des droits de douane supplémentaires à hauteur de 20 %.
"Nous allons maintenant faire payer l'Union européenne. Ils sont des commerçants très, très durs. Vous pensez que l'Union européenne est très amicale, mais ils nous arnaquent. C'est tellement triste à voir. C'est pathétique", a déclaré le président américain hier pour justifier cette mesure [Politico].
Dans le reste du monde, les droits de douane supplémentaires sur les importations aux Etats-Unis s'élèvent à 34 % pour la Chine, 24 % pour le Japon, 30 % pour l'Afrique du Sud, 32 % pour la Turquie, 26 % pour l'Inde ou encore 24 % pour l'Australie. Côté européen (hors UE), ils atteignent 10 % pour le Royaume-Uni, l'Ukraine et l'Islande, 31 % pour la Suisse et 15 % pour la Norvège.
A noter que la Russie fait partie des rares pays qui ne figurent pas dans cette longue liste, tout comme la Corée du Nord, la Biélorussie ou encore Cuba. La raison ? Ces Etats sont "déjà confrontés à des tarifs douaniers extrêmement élevés" et concernés par des "sanctions imposées précédemment qui empêchent tout commerce significatif" entre eux et les Etats-Unis, a expliqué un responsable de la Maison-Blanche au New York Times.
"A peine assenés, les droits de douane extrêmement lourds imposés mercredi 2 avril dans le monde entier par le président Donald Trump, que les réactions, outrées, ont commencé à tomber", rapporte Libération. "L'Europe est prête à réagir", a déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ajoutant : "Nous défendrons toujours nos intérêts et nos valeurs. Nous sommes prêts à passer de la confrontation à la négociation", rapporte Euronews.
"Cela fait des semaines que la Commission européenne, compétente en matière de commerce, prépare sa riposte", indique Le Monde. Le journal du soir explique que les dirigeants européens "misent encore sur un accord avec Washington, qui leur permettrait d'éviter le pire", pensant qu'il existe "un espace pour négocier […] tant le jeu de la Maison-Blanche est dangereux pour la croissance des deux côtés de l'Atlantique".
Pour contrer ces nouveaux droits de douane, l'exécutif européen prépare deux documents, nous apprend le quotidien français. "Le premier est une liste de mesures de rétorsion qui pourraient entrer en vigueur fin avril ou début mai, le second énumère les sujets sur lesquels les Vingt-Sept seraient prêts à négocier avec Washington si les nouveaux droits de douane américains étaient finalement suspendus. Ils seront communiqués aux Etats membres et à la Maison-Blanche à la mi-avril."
Par ailleurs, la Commission devrait, d'ici à une semaine, envoyer aux Vingt-Sept, pour une validation avant la mi-avril, la liste des produits américains qu'elle entend surtaxer en réponse aux droits de douane sur l'acier et l'aluminium imposés depuis le 12 mars par Washington et qui concernent 26 milliards d'euros d'exportations européennes.
Pour rappel, les échanges commerciaux annuels entre les Etats-Unis et l'Union européenne atteignent environ 1 500 milliards d'euros, avec un excédent de 150 milliards d'euros pour ce côté-ci de l'Atlantique. Mais le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a tenu à rappeler que les géants américains du numérique "réalisent 25 % de leurs revenus en Europe, [soit] plusieurs centaines de milliards d'euros chaque année". Une donnée que la Commission a évidemment en tête dans la préparation de sa riposte.
Parmi les nombreuses annonces de Donald Trump, les ultramarins français ont eu la surprise de voir leur territoire figurer dans le tableau récapitulatif des nouvelles surtaxes douanières américaines. Ainsi "les départements et territoires ultramarins français vont être soumis dans les prochains jours à des niveaux de taxation individuels, bien différents des 20 % qui vont s'appliquer à l'UE", annonce La 1ere.
La Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Mayotte, qui sont "parties intégrantes du territoire douanier de l'UE mais considérées fiscalement comme des territoires tiers […] verront leurs produits imposés à hauteur de 10 % supplémentaires par les autorités américaines", et non 20 % comme pour l'ensemble de l'UE, poursuit le média ultramarin. "En revanche, la Réunion, qui bénéficie pourtant du même statut légal, verra ses produits taxés à hauteur de 37 %".
"Le gouvernement américain prévoit aussi d'imposer des droits de douane de 50 % sur les produits importés depuis l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon mais de 10 % sur ceux arrivant de la Polynésie française, deux territoires qui ne font pas partie de l'Union européenne aux yeux des douanes", abonde La 1ere.
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03.04.2025 à 11:54
Florian Chaaban
C'est ce qui s'appelle frapper fort. Mercredi 2 avril, tard dans la soirée, Donald Trump a mis ses menaces à exécution en annonçant une série de mesures protectionnistes visant les importations en provenance de l’Union européenne et du reste du monde. Depuis les jardins de la Maison-Blanche et devant un parterre de chefs d’entreprise et […]
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C'est ce qui s'appelle frapper fort. Mercredi 2 avril, tard dans la soirée, Donald Trump a mis ses menaces à exécution en annonçant une série de mesures protectionnistes visant les importations en provenance de l’Union européenne et du reste du monde.
Depuis les jardins de la Maison-Blanche et devant un parterre de chefs d’entreprise et de membres de son gouvernement, il a proclamé l’entrée en vigueur imminente de "droits de douane réciproques", avec des taxes spécifiques par pays et par secteur.
Lors d’une allocution soigneusement mise en scène, le président américain a dénoncé les déséquilibres commerciaux qui, selon lui, nuisent aux Etats-Unis depuis des décennies. "Ce qu’ils nous font, nous leur faisons", a-t-il martelé, affirmant que ces mesures marquaient "le jour de la libération" pour l’économie américaine.
L’Union européenne est particulièrement visée. Le milliardaire a ainsi annoncé une taxe de 20 % sur tous les produits européens entrant aux Etats-Unis. "L’Europe nous arnaque, eux, c’est 39 % qu’ils prennent. On va leur en demander à peine la moitié", a-t-il justifié.
En l'état actuel des choses, le taux moyen des droits de douane appliqués par l’UE au pays de l'Oncle Sam avoisine les 4 %, soit un niveau légèrement supérieur à celui pratiqué par les Etats-Unis sur leurs importations (3,5 %). L’administration américaine semble donc avoir obtenu le chiffre de 39 % en y intégrant ses propres estimations des coûts engendrés par la TVA – qui s’élève par exemple à 20 % en France – ainsi que par diverses barrières non tarifaires, telles que les réglementations environnementales et sanitaires.
Les produits chinois, eux, seront frappés d’une taxe encore plus lourde, à hauteur de 34 %, tandis que le Royaume-Uni verra ses exportations soumises à un minimum de 10 %.
Si l’ensemble des produits européens sont touchés par ces nouvelles taxes, certains secteurs seront plus durement impactés. L’industrie automobile en tête : les voitures fabriquées à l’étranger seront désormais taxées à 25 %. Une mesure qui vise directement les constructeurs allemands tels que BMW, Mercedes et Audi, très présents sur le marché américain.
L’aéronautique, les produits pharmaceutiques et les vins et spiritueux français sont également dans le viseur. En 2023, ces secteurs ont exporté respectivement 7,9 milliards, 4,1 milliards et 3,9 milliards d’euros outre-Atlantique. Un marché crucial qui risque d’être lourdement affecté par cette guerre commerciale.
Pour le reste, Donald Trump annonce également que les produits étrangers seront par défaut frappés d'au moins 10 % de droits de douane. En précisant les objectifs : réindustrialiser son pays et y créer des emplois, tout en augmentant les recettes fiscales.
Avec seulement 6,2 % de ses exportations destinées aux Etats-Unis, la France semble moins exposée que d’autres pays européens aux nouvelles taxes américaines, bien que sujette aux 20 % de taxes annoncées. Selon Le Parisien, les secteurs les plus touchés seraient l’aéronautique (7,9 milliards d’euros d’exportations en 2023), l’industrie pharmaceutique (4,1 milliards) et les boissons (3,9 milliards), qui pourraient subir un impact significatif.
L'heure est toutefois à la vigilance. Alors que la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a déjà fait part de son inquiétude, le président de la République Emmanuel Macron a annoncé qu'il allait réunir à l'Elysée, dès ce jeudi après-midi, "les représentants des filières impactées par les mesures tarifaires annoncées par les Etats-Unis".
Par ailleurs, les nouveaux plans du gouvernement américain prévoient des droits de douane différenciés et plus sévères vis-à-vis des territoires d’Outre-mer par rapport au reste de l’UE. Ainsi, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Mayotte seront soumises à une taxe supplémentaire de 10 %, tandis que La Réunion, bien qu’ayant le même statut légal, verra ses exportations taxées à 37 %.
Les Etats-Unis comptent imposer des droits de douane de 50 % sur les produits en provenance de Saint-Pierre-et-Miquelon - taxation la plus élevée à l'échelle du globe avec le Lesotho - contre seulement 10 % pour ceux issus de la Polynésie française, ces deux territoires n’étant pas considérés comme faisant partie de l’Union européenne aux yeux des douanes américaines.
L’Union européenne n’a pas tardé à réagir. Depuis un sommet en Ouzbékistan, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a dénoncé "un coup dur pour l’économie mondiale", avertissant que ces mesures entraîneraient une montée de l’inflation.
Toutefois, Bruxelles veut encore croire à une issue négociée. "Il n’est pas trop tard pour répondre aux préoccupations par les négociations", poursuivi la cheffe de l'exécutif européen, précisant que des discussions étaient en cours avec les autorités américaines.
En cas d’échec des pourparlers cependant, la riposte sera inévitable. L’UE prévoit déjà d’appliquer, à partir de mi-avril, des droits de douane ciblés sur certains produits américains comme les motos, les bateaux ou encore le bourbon. "Nous nous préparons maintenant à d’autres contre-mesures pour protéger nos intérêts et nos entreprises", a averti l'Allemande.
Cette nouvelle salve de mesures protectionnistes, sans précédent depuis les années 1930, pourrait en tout cas avoir des conséquences majeures sur le commerce international. "Notre pays a été pillé, saccagé, violé et dévasté par des nations proches et lointaines, des alliés comme des ennemis", a asséné sans détour Donald Trump. Avec ces annonces, le risque de voir l’inflation grimper et la compétitivité des entreprises américaines s’éroder existe pourtant.
L’entrée en vigueur des taxes américaines est prévue en deux temps : le 5 avril pour les droits de douane minimaux de 10 %, et le 9 avril pour les mesures spécifiques visant l’Europe, la Chine et d’autres partenaires commerciaux.
La guerre commerciale est bel et bien déclarée.
Territoire | Nouveaux droits de douane |
Albanie ![]() | 10 % |
Andorre ![]() | 10 % |
Arménie ![]() | 10 % |
Azerbaïdjan ![]() | 10 % |
Bosnie-Herzégovine ![]() | 35 % |
Géorgie ![]() | 10 % |
Gibraltar ![]() | 10 % |
Groenland ![]() | 0 % |
Guernesey ![]() | 0 % |
Île de Man ![]() | 0 % |
Îles Féroé ![]() | 0 % |
Islande ![]() | 10 % |
Jersey ![]() | 0 % |
Kosovo ![]() | 10 % |
Liechtenstein ![]() | 37 % |
Macédoine du Nord ![]() | 33 % |
Moldavie ![]() | 31 % |
Monaco ![]() | 10 % |
Norvège ![]() | 30 % |
Royaume-Uni ![]() | 10 % |
Russie ![]() | 0 % |
Saint-Marin ![]() | 10 % |
Serbie ![]() | 37 % |
Suisse ![]() | 31% |
Svalbard et Jan Mayen ![]() | 10 % |
Turquie ![]() | 10 % |
Ukraine ![]() | 10 % |
Vatican ![]() | 0 % |
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