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09.10.2025 à 11:04

Quelles sont les 6 monarchies de l'Union européenne ?

Rédaction Toute l'Europe

La plupart des pays européens ont connu au cours de leur histoire une période de monarchie. A la veille de la Première Guerre mondiale, la majorité des pays du Vieux Continent sont gouvernés par des souverains, mais après 1945, le modèle politique dominant change et les républiques deviennent majoritaires, au sein d'un paysage politique mouvant. […]

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Texte intégral (3218 mots)
Couronne de Christian IV (1577-1648), roi de Danemark et de Norvège - Crédits : Bradley Rentz / Wikimedia commons CC-BY-SA-4.0
Couronne de Christian IV (1577-1648), roi de Danemark et de Norvège - Crédits : Bradley Rentz / Wikimedia commons CC-BY-SA-4.0

La plupart des pays européens ont connu au cours de leur histoire une période de monarchie. A la veille de la Première Guerre mondiale, la majorité des pays du Vieux Continent sont gouvernés par des souverains, mais après 1945, le modèle politique dominant change et les républiques deviennent majoritaires, au sein d'un paysage politique mouvant.

Si dans certains pays, comme en Italie, la fin de la monarchie est synonyme de rétablissement de la démocratie, ce n'est pas le cas partout en Europe. Ainsi, en Espagne, le pays n'est plus une monarchie depuis 1931, et la dictature de Franco, qui s'installe en 1939 à l'issue d'une guerre civile meurtrière, ne la restitue pas. Elle ne sera réintroduite qu'en 1975 par Juan Carlos Ier, qui instaure alors une démocratie représentative.

A l'Est, de nombreux pays sont également poussés à mettre fin à leur système politique, sans pour autant aller vers un régime plus démocratique. C'est le cas de la Roumanie, qui adopte le modèle soviétique en 1945 et dont le roi Michel abdique en 1947, ou de la Hongrie qui, sortie défaite de la Seconde Guerre mondiale, adopte en 1945 un régime communiste imposé par les Soviétiques. En Grèce, le mouvement inverse a lieu. En 1946, Georges II est ainsi réinstitué à la tête du pays. La monarchie est cependant révoquée dès 1967 lors du coup d’État des colonels dont le régime durera jusqu'en 1974.

Six monarchies au sein de l'Union européenne

Aujourd'hui, les monarchies sont minoritaires au sein de l'Union européenne. Au nombre de six (Belgique, Danemark, Espagne, Luxembourg, Pays-Bas, Suède), elles octroient à leur souverain des pouvoirs limités, d'ordre symbolique et représentatif.

Au fil des années, les monarchies ont en effet évolué vers des modèles constitutionnels modernes, octroyant leurs pouvoirs au Premier ministre, relâchant l'étiquette et assouplissant les traditions. Aujourd'hui, la majorité des six monarchies de l'UE applique par exemple la primogéniture stricte (l'aîné du monarque hérite du pouvoir lors de la mort ou de l'abdication de ce dernier, que ce soit une fille ou un garçon) et non plus la primogéniture masculine (seul le fils aîné du roi hérite de la couronne) et dans quatre d'entre elles, des héritières pourraient prendre la couronne d'ici la seconde moitié du XXIème siècle. En Suède et en Espagne, les monarques payent même des impôts…

Depuis l'abdication de la reine Margrethe II du Danemark le 31 janvier 2023 et l'accès au trône de son fils Frédérik X, les six monarchies de l'Union européenne ont à leur tête un homme.

Les monarchies européennes

Philippe, roi des Belges
Crédits : Quirinale.it

La Belgique est une monarchie constitutionnelle fédérale. Le pays est doté d’un parlement bicaméral, constitué d’une Chambre des représentants et d’un Sénat. L’État fédéral exerce essentiellement les fonctions régaliennes. Parmi les six entités fédérées, les trois régions (Flandre, Wallonie, Bruxelles-capitale) sont compétentes dans les domaines économique et territorial, et les trois communautés (flamande, française et germanophone) sont responsables de la culture, de l’enseignement et de la langue. Le pouvoir exécutif fédéral est exercé par le Premier ministre et son gouvernement.

Le roi belge règne mais ne gouverne pas. Il est garant de l’unité du pays, chef des armées. Le souverain signe des lois et désigne le formateur du gouvernement. Il ne peut cependant rien faire sans avoir l’aval de son gouvernement. Albert II est le prédécesseur de Philippe de Belgique, lequel est roi depuis le 21 juillet 2013.

Frederik X, roi de Danemark
Crédits : Flick Saeima CC BY-SA 2.0 Deed

Le Danemark est une monarchie constitutionnelle. Le pouvoir exécutif est exercé par le cabinet, composé des ministres et du Premier ministre. Le pouvoir législatif est lui exercé par la chambre unique du Parlement, le Folketing. Le système politique est multipartiste, ce qui donne fréquemment lieu à la formation de gouvernements de coalition. Le Royaume du Danemark inclut le Danemark, le Groenland et les îles Féroé. Le roi est limité à des fonctions non partisanes et cérémonielles. Il participe à la formation du gouvernement et peut théoriquement renvoyer le Premier ministre.

Depuis le 14 janvier 2024, Frédérik X est roi du Danemark. Il a succédé à sa mère Margrethe II qui régnait depuis 1972 et avait abdiqué le 31 décembre 2023.

Felipe VI, roi d'Espagne
Crédits : Quirinale.it

L’Espagne est une monarchie parlementaire. Le pays est composé de 17 communautés autonomes qui disposent chacune de leurs propres institutions et d’importantes compétences. Si le système espagnol est proche du fédéralisme, les communautés autonomes n’influent que peu sur la politique nationale. A la différence de systèmes adoptés dans les États fédérés, le Sénat espagnol ne représente pas les régions.

Le roi d’Espagne est le chef de l’État du Royaume d’Espagne. Il arbitre et modère le fonctionnement des institutions et exerce la plus haute représentation de l’État. Dans les faits, le roi d’Espagne n’a quasiment aucun pouvoir politique : il exerce une fonction représentative et symbolique.

Le roi Juan Carlos Ier, qui a accédé au trône en 1975, a abdiqué le 2 juin 2014, laissant ainsi la place à son fils, le prince Felipe de Bourbon, désormais Felipe VI.

Crédits : European Council

Unique Grand-Duché au monde, le Luxembourg est une monarchie constitutionnelle. Le pouvoir législatif est exercé par la Chambre des députés, le gouvernement et le Conseil d’État. Le Grand-Duc possède le pouvoir exécutif : il est chef de l’État et chef de l’armée. Dans la pratique, ces tâches sont déléguées au Premier ministre et au ministre des Affaires étrangères. Il représente le Grand-Duché sur le plan international.

Succédant à son père le Grand-Duc Henri suite à son abdication, Guillaume V a accédé au trône le 3 octobre 2025.

Willem-Alexander, roi des Pays-Bas
Crédits : Daina Le Lardic / Parlement européen

Les Pays-Bas sont une monarchie parlementaire de longue tradition. Dans ce système bicaméral, l’élection à la proportionnelle intégrale et pour quatre ans de la chambre basse, qui est le cœur de la politique gouvernementale, aboutit très fréquemment à la formation de coalitions. Le roi est le chef de l’État néerlandais. Il exerce plusieurs fonctions : il cosigne les lois, est président du Conseil d’État, signe les arrêtés royaux et nomme le Premier ministre. Sur demande du chef du gouvernement, il peut également dissoudre le Parlement.

Après l’abdication de Beatrix, son fils Willem-Alexander a été intronisé roi le 30 avril 2013, à l’âge de 46 ans. Ils appartiennent à la Maison d’Orange-Nassau.

Charles XVI Gustave, roi de Suède
Crédits : Wikimedia commons Bengt Nyman CC BY 2.0

La Suède est une monarchie constitutionnelle. Le Premier ministre et chaque ministre sont individuellement responsables devant le Riksdag, ou Diète royale, Parlement monocaméral élu pour 4 ans au scrutin proportionnel. Depuis 1975, le roi n’a plus qu’un rôle cérémoniel. Il ne détient aucun pouvoir politique et ne participe pas à la vie politique. D’après la constitution, le souverain représente l’unité de la nation et le pays sur le plan international.

Charles XVI Gustave a accédé au trône de Suède le 15 septembre 1973, succédant à son grand-père Gustave VI Adolphe, de la Maison Bernadotte.

Les couronnes vacillent

Dernièrement, les différentes couronnes européennes ont néanmoins vécu plusieurs scandales les fragilisant. En 2010, par exemple, le roi de Suède a utilisé des subventions agricoles européennes pour compenser la perte d'un million d'euros en bourse lors de la crise financière. Son surnom de "roi sans culotte", allusion aux divers scandales de liaisons extra-conjugales dont il est l'objet, continue en outre de le suivre.

Très contestée ces dernières années, l'image de la monarchie espagnole s'est dégradée. Entre partie de chasse pharaonique alors que le pays s'enlisait dans la crise et soupçons de blanchiment de capitaux et de fraude fiscale, les bévues se sont enchaînées. Au point que, pour des raisons de santé mais aussi d'image, le roi Juan Carlos Ier a décidé d'abdiquer en 2014. Il a laissé la place à son fils Felipe VI, qui tente de redorer l'image de sa famille. Six ans plus tard, le 3 août 2020, l'ancien roi a même quitté le pays pour une destination inconnue…

Popularité et coût de la monarchie

Même si les populations gardent un certain attachement à leur monarchie, ces dernières années, la confiance semble s'effriter quelque peu. En Espagne, le roi Felipe VI bénéficiait d'une popularité de 6,4 points sur 10 en 2021 (7,2 en 2017). En 2021, 57 % des Néerlandais se déclaraient en faveur de leur souverain (70 % en 2013) et en Belgique, ce sont 63,3 % des sondés qui déclaraient en 2017 avoir totalement ou plutôt confiance en leur roi, contre 69 % l'année précédente.

De plus, malgré leurs pouvoirs réduits, les monarchies représentent tout de même un coût pour leur pays. Et ce même si ces montants ont diminué ces dernières années et que beaucoup de membres des familles royales doivent travailler pour subvenir à leurs besoins.

Au Luxembourg, le Grand-Duc, sa femme, leur fils et sa femme, perçoivent une dotation annuelle, qui était d'environ 11 millions d'euros en 2020. Au pays de la maison Orange-Nassau, la monarchie a couté 44,4 millions d'euros aux Néerlandais en 2020. La famille royale danoise a, quant à elle, perçu 11,4 millions d'euros en 2018, soit un peu plus qu'en Suède où ce chiffre atteint près de 6,9 millions d'euros en 2019.

Les souverains belges ont reçu plus de 13,6 millions d'euros en 2018, mais la monarchie a elle coûté près de 36 millions d'euros pour le pays cette année-là. Le roi Felipe a baissé son salaire de 20 % par rapport à celui de son père et touche annuellement un peu plus de 230 000 euros. Le budget de la monarchie est lui resté le même, aux alentours de 8 millions d'euros par an. Cela représentait, en 2015, 16 centimes d'euro par an et par habitant.

Ailleurs en Europe…

La monarchie la plus célèbre au monde est sans doute celle du Royaume-Uni, pays membre de l'Union européenne du 1er janvier 1973 au 31 janvier 2020. Elizabeth II y a régné officiellement pendant plus de 70 ans entre le 6 février 1952 et son décès le 8 septembre 2022. Le même jour, son fils a pris le nom de Charles III, lui succédant au trône. Aujourd'hui, son rôle politique est essentiellement cérémoniel et diplomatique. Il est officiellement chef de l’État, du Commonwealth (il est considéré comme souverain de 15 pays sur 56 membres, dont le Canada et l'Australie), des armées mais aussi de l’Église anglicane. Si la résidence officielle du monarque est le palais de Saint-James, à Londres, la résidence usuelle et la plus connue de la couronne britannique depuis des décennies est le palais de Buckingham.

En Norvège (non membre de l'UE, mais membre de l'espace Schengen), c'est le roi Harald V qui est sur le trône depuis le 17 janvier 1991. Il est également le chef de l’État norvégien et dispose théoriquement du pouvoir exécutif. Mais dans les faits, ce pouvoir est essentiellement symbolique. Le monarque norvégien est surtout le représentant de la société norvégienne.

Article initial rédigé par Isaure Magnien le 15.05.2018

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08.10.2025 à 18:40

Robert Badinter au Panthéon : un Européen convaincu

Hugo Palacin

À l'heure de sa panthéonisation, prévue ce jeudi 9 octobre 2025 à partir de 18h30, Robert Badinter revient à la conscience collective comme le grand abolisseur de la peine de mort en France, promulguée il y a 44 ans jour pour jour. Au-delà de cet événement majeur, un motif européen se tisse dans la longue […]

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Texte intégral (1579 mots)
Durant 18 ans, Robert Badinter a présidé la Cour de conciliation et d'arbitrage de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), de 1995 à 2013 - Crédits : Commission européenne / Etienne Ansotte
Durant 18 ans, Robert Badinter a présidé la Cour de conciliation et d'arbitrage de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), de 1995 à 2013 - Crédits : Commission européenne / Etienne Ansotte

À l'heure de sa panthéonisation, prévue ce jeudi 9 octobre 2025 à partir de 18h30, Robert Badinter revient à la conscience collective comme le grand abolisseur de la peine de mort en France, promulguée il y a 44 ans jour pour jour. Au-delà de cet événement majeur, un motif européen se tisse dans la longue vie de l'ancien ministre de la Justice, disparu le 9 février 2024 à l'âge de 95 ans.

Ce juriste de formation a cru que l'Europe pouvait être un espace de droit et de régulation entre États, un lieu de réconciliation juridique, une construction par le droit au service de la paix. Son combat ne se limitait pas au cadre national : il s'inscrivait dans une ambition européenne et universelle de droit.

L'Europe comme horizon humaniste

Dès les années 1980, Robert Badinter a insisté pour que la France accepte pleinement la compétence individuelle de la Cour européenne des droits de l'homme, afin que tout citoyen puisse saisir la juridiction supranationale des droits. Il a notamment joué un rôle important dans l'adoption du protocole n°6 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), celui qui proscrit la peine de mort en temps de paix.

Mais derrière les textes, c'est une vision. Celle d'un espace européen de justice, non pas dominé par une superpuissance juridique, mais construit par des institutions de dialogue et de contraintes partagées. C'est cette ligne que l'ancien garde des Sceaux a cherché à incarner au cours de sa carrière.

Ainsi, quand la Yougoslavie s'est disloquée au début des années 1990, la Communauté économique européenne (CEE) a créé une commission d'arbitrage pour la Conférence de paix sur la Yougoslavie, confiée à un collège de présidents de cours constitutionnelles des États membres. Alors président du Conseil constitutionnel français, Robert Badinter fut nommé en 1991 président de cette commission, rapidement surnommée "Commission Badinter".

Celle-ci a rendu 15 avis juridiques sur les questions les plus sensibles du conflit : la reconnaissance des États, l'application du principe d'intangibilité des frontières, la délimitation des successions ou encore le sort des populations. Si ses avis n'étaient pas contraignants, ils ont joué un rôle politique, conceptuel et symbolique dans la manière de penser le droit des peuples dans un espace en transition. L'utilisation que cette commission a fait du droit international a toutefois suscité des critiques, certains y voyant une "réutilisation" parfois discutable ou approximative du raisonnement juridique international, notamment en ce qui concerne l'application stricte du principe d'intangibilité des frontières.

Pour Robert Badinter toutefois, cette expérience montrait l'utilité d'un droit européen non seulement pour protéger les individus, mais pour réguler les conflits entre États au sein du continent. C'était une philosophie de "juridicité de l'Europe".

Construire un droit entre États : l'OSCE et la Cour de conciliation et d'arbitrage

Ce chemin l'a plus tard conduit à un engagement institutionnel durable au sein de la Cour de conciliation et d'arbitrage de l'OSCE, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. Un cadre souple créé par la Convention de Stockholm de 1992, pour que les États membres puissent soumettre leurs différends à la conciliation ou à l'arbitrage. Robert Badinter en devint le premier président, de 1995 à 2013.

Lors de sa présidence, il prônait une justice pragmatique, une procédure que les États accepteraient, plus rapide et moins formaliste que d'autres instances internationales. Mais cette institution resta largement en sommeil, puisque peu d'États l'ont saisi. Dans ses propres discours, Robert Badinter, tout en restant optimiste, reconnaissait la difficulté intrinsèque des juridictions interétatiques, qui ne peuvent fonctionner que si les États y consentent pleinement.

Cette "cour européenne des États", que Robert Badinter espérait incarner, a été difficile à ancrer. Mais elle symbolise son effort : faire de l'Europe non seulement un lieu de droits individuels, mais un espace de gestion juridique des tensions entre États.

L'Europe à légiférer : du parquet européen à la Constitution

Par-delà ses fonctions, Badinter a formulé des propositions de réforme concrètes pour l'Europe. Dès 2002, il fut impliqué dans la rédaction du projet de Constitution européenne (même si ce projet échoua en 2005). Il s'est aussi engagé pendant la décennie suivante en faveur de la création d'un parquet européen indépendant, essentiel selon lui pour lutter contre les organisations criminelles transnationales.

Il tirait toutefois la sonnette d'alarme : un parquet "européen" qui ne bénéficierait pas de garanties institutionnelles fortes ne serait qu'un label sans substance. Il écrivait, dans un article du Monde datant de 2016 : "Ne créons pas un parquet qui n'aurait d'européen que le nom".

Au Sénat français, il fut membre de la délégation sénatoriale pour l'Union européenne durant l'intégralité de son mandat, de 1995 à 2011, et participa à la commission des Affaires européennes. Dans ces fonctions, il a également contribué à faire vivre le dialogue entre le niveau national et les défis européens.

Son credo : l'Europe ne doit pas écraser les identités nationales, mais offrir des cadres dans lesquels les États peuvent coopérer juridiquement, converger, se discipliner les uns les autres pour mieux protéger les droits.

Derniers combats : mémoire, Russie, Europe en guerre

Même durant ses dernières années, Robert Badinter n'a pas abandonné l'Europe comme champ de combat intellectuel. Il a coécrit "Vladimir Poutine : l'accusation", paru en 2023, une œuvre visant à rendre compte des crimes russes en Ukraine et à relancer la responsabilité pénale internationale dans le contexte européen.

Il a souligné que l'Europe ne pouvait être qu'un espace qui se défende, que l'idéal de "construction pacifique" exigeait une constante vigilance. Son engagement ne cessa pas à l'âge sénatorial : il restait une voix audible et respectée pour convaincre de la nécessité d'une Europe de la raison et du droit.

Par ailleurs, l'association Ensemble contre la peine de mort (ECPM) rappelle que Robert Badinter s'était, dès sa création, rapproché d'elle et participa activement au congrès mondial contre la peine de mort à Strasbourg en 2001. Cela montrait comment il entendait prolonger son combat national sur le terrain européen et mondial.

Au moment où il est sur le point d'entrer au Panthéon français, son héritage invite à repenser l'Europe, non seulement comme union économique ou comme superstructure politique, mais comme une œuvre juridique sans cesse à consolider, parfois fragile, souvent inachevée, mais indispensable.

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08.10.2025 à 18:12

[Carte] L'abolition de la peine de mort en Europe

Lou Caubet

Dans l'Union européenne, les Vingt-Sept ont tous définitivement aboli la peine de mort. Sur le continent européen, la Biélorussie est le dernier pays à appliquer encore la peine capitale, d'après Amnesty International. La Russie maintient quant à elle un moratoire sur les exécutions. Pour adhérer à l'Union européenne, un État doit en effet avoir aboli […]

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Texte intégral (2504 mots)

Dans l'Union européenne, les Vingt-Sept ont tous définitivement aboli la peine de mort. Sur le continent européen, la Biélorussie est le dernier pays à appliquer encore la peine capitale, d'après Amnesty International. La Russie maintient quant à elle un moratoire sur les exécutions.

Pour adhérer à l'Union européenne, un État doit en effet avoir aboli la peine de mort. Plus largement, les 46 membres du Conseil de l'Europe ont renoncé à cette pratique, l'abolition étant un principe fondamental de l'organisation, fondée sur des protocoles de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).

Une abolition progressive à la sortie de la Seconde guerre mondiale

Le mouvement abolitionniste en Europe trouve ses origines au XVIIIe siècle, avec notamment la publication en 1764 de l'œuvre de l'Italien Cesare Beccaria, "Des délits et des peines", qui contestait l'efficacité et la légitimité de la peine de mort. Cette idée a été soutenue par des philosophes comme Voltaire. Le grand-duc Léopold Ier de Toscane a quant à lui été un pionnier en abolissant la peine de mort dans son territoire peu après, en 1786, faisant de la Toscane le premier État souverain à le faire.

Il est suivi par Joseph II, qui la supprime en Autriche en 1787 pour les procès ordinaires. Elle est réintroduite quelques années plus tard, supprimée après la Première Guerre mondiale en 1919, de nouveau rétablie en 1933 pour les crimes militaires et appliquée largement sous le régime nazi, avant d'être enfin définitivement interdite après la Seconde Guerre mondiale (1950 pour les crimes de droit commun, 1968 pour l'ensemble des crimes).

Dans le reste de l'Europe, la date d'abolition de la peine capitale varie d'un pays à l'autre selon le contexte politique, social, historique et culturel, et notamment l'évolution des systèmes juridiques et des pressions internationales. Au XIXe siècle, quelques pays y renoncent à leur tour pour des crimes de droit commun, à la différence des crimes considérés comme politiques ou extraordinaires (par exemple les atteintes à la sûreté de l'État ou à l'ordre public). Le Portugal prend cette mesure en 1867, suivi par le Royaume des Pays-Bas en 1870.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la République fédérale d'Allemagne (Allemagne de l'Ouest) est la première à abolir la peine de mort pour tous les crimes, en 1949, avec l'inscription de cette abolition dans sa Loi fondamentale. Outre l'Autriche en 1968, il faut attendre les années 1970 pour que la Finlande, la Suède, le Portugal, le Danemark ou encore le Luxembourg suivent cet exemple. Certaines mesures ont toutefois précédé ces abolitions, comme en Finlande où la peine de mort a été interdite en temps de paix dès 1949, tandis que dans d'autres pays comme la Suède, les exécutions avaient déjà cessé de fait depuis longtemps, la dernière remontant à 1910.

En France, l’abolition de la peine de mort a été votée le 17 septembre 1981 et promulguée le 9 octobre suivant. Elle porte alors un coup historique à une pratique encore largement acceptée par l’opinion publique. Robert Badinter, nommé ministre de la Justice par le président socialiste François Mitterrand, a mené avec conviction ce combat, fort de son expérience d'avocat pénaliste engagé depuis longtemps contre la peine capitale. La France, à cette date, était le dernier pays de la Communauté économique européenne, l'ancêtre de l'Union européenne, à supprimer la peine de mort. Hamida Djandoubi, guillotiné en 1977, restera le dernier homme à être exécuté dans le pays.

Dans la République démocratique allemande (RDA, Allemagne de l'Est), la peine de mort a été maintenue plus longtemps qu'en RFA et la dernière exécution a eu lieu en 1981. Ce n'est qu'en 1987, sous le régime d'Erich Honecker, que la RDA a officiellement aboli la peine capitale. Après la chute du Mur de Berlin, la Roumanie et la Slovénie ont aboli la peine de mort en 1989, marquant une rupture avec l'ère communiste. Les autres pays issus du bloc soviétique ainsi que Malte et Chypre ont mis fin à la peine capitale dans les années 1990 à 2010, notamment en vue de leur adhésion à l'Union européenne et au Conseil de l’Europe.

La Grèce a quant à elle pu intégrer la Communauté économique européenne (CEE) sans avoir aboli complètement la peine de mort : en 1981, la CEE n'avait pas encore contraint l'adhésion aux critères de Copenhague, qui comprennent le respect des droits humains. Le pays avait en outre déjà supprimé la peine de mort pour les crimes de droits communs, et à l'époque la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) acceptait encore la peine capitale pour les crimes de guerre. La ratification du Protocole n°13 de la CEDH (voir plus bas) en 2002 a définitivement interdit la peine capitale pour ses membres, une mesure appliquée en 2004 en Grèce.

Mais c'est la Lettonie qui a aboli la peine de mort le plus tard au sein de l'actuelle Union européenne, en 2012. Elle est aussi le dernier pays à y avoir eu recours, avec une exécution en 1996. Elle a toutefois pu intégrer l'UE en 2004 grâce à un moratoire sur les exécutions, et ratifie le protocole n°13 de la CEDH en 2012.

Depuis quand l'UE impose-t-elle l'abolition de la peine de mort pour les pays candidats à l'adhésion ?

Depuis 1993, l’adhésion à l’Union européenne est encadrée par les critères de Copenhague. Ceux-ci posent des exigences politiques essentielles telles que le respect de l'état de droit et des droits de l'homme. Dès lors, l’abolition de la peine de mort constitue une condition sine qua non à l'adhésion, découlant directement de ces principes. Parmi ces critères, les États candidats doivent ratifier la CEDH et ses protocoles, qui garantissent le droit à la vie dans l'article 2 et interdisent explicitement le recours à la peine de mort en tout circonstances, de paix comme de guerre.

Enfin, le traité de Lisbonne en 2007 garantit lui aussi "les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit et du respect des droits de l’homme”. La Charte des droits fondamentaux de l’UE, juridiquement contraignante depuis 2009, interdit explicitement la peine de mort.

Les textes européens et internationaux relatifs à la peine de mort

La Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) : il s'agit du premier texte contraignant protégeant le "droit à la vie de toute personne" dans son article 2, adopté en 1950 par les membres du Conseil de l'Europe. Dans sa première version, l'exécution capitale reste autorisée à titre d'exception et notamment en "temps de guerre". Mais une série de protocoles vient ensuite restreindre cette pratique, jusqu'à l'interdire définitivement. Parmi eux, le protocole n°13, adopté en 2003, abolit la peine de mort en toutes circonstances, y compris en temps de guerre ou de danger imminent de guerre.

Les résolutions des Nations unies. En décembre 2024, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté sa dixième résolution appelant à un moratoire sur l'application de la peine de mort. Non-contraignant, le texte a été adopté par environ deux tiers des États membres de l'ONU, dont l'ensemble des pays de l'UE. Un soutien en hausse, qui démontre une tendance croissante en faveur de l'abolition dans le monde, depuis la première résolution proposée en 2007.

Que fait l'UE pour lutter contre la peine de mort hors de ses frontières ?

L’Union européenne a instauré plusieurs mesures visant à lutter contre la peine de mort dans le reste du monde. Elle interdit le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale ou la torture. Elle utilise sa politique commerciale pour encourager le respect des droits de l’homme. Elle soutient les organisations de la société civile qui font un travail de sensibilisation, analysent et documentent la situation dans les pays non abolitionnistes. Elle joue un rôle d'observateur permanent au siège de l'ONU, au sein duquel elle défend toutes les actions visant à éradiquer la peine de mort. Enfin le Parlement européen adopte des résolutions et organise des débats qui condamnent les actions de pays qui pratiquent encore la peine de mort. Une résolution datant de 2015 condamne notamment le recours à la peine de mort comme moyen de supprimer l'opposition ou pour des motifs tels que les croyances religieuses, l'homosexualité ou l'adultère.

Les dates d'abolition de la peine de mort dans les pays de l'UE

PaysDate d'abolition de la peine de mort
Allemagne1949 (RFA) / 1987 (RDA)
Autriche1968
(1950 pour les crimes de droit commun)
Belgique1996
Bulgarie1998
Chypre2002
Croatie1990
Danemark1978
(1933 pour les crimes de droit commun)
Espagne1995
(1978 pour les crimes de droit commun)
Estonie1998
Finlande1972
(1949 pour les crimes de droit commun)
France1981
Grèce2004
Hongrie1990
Irlande1990
Italie1994
(1947 pour les crimes de droit commun)
Lettonie2012
Lituanie1998
Luxembourg1979
Malte2000
Pays-Bas1982
(1870 pour les crimes de droit commun)
Pologne1997
Portugal1976
(1867 pour les crimes de droit commun)
République tchèque1990
Roumanie1989
Slovaquie1990
Slovénie1989
Suède1972
(1921 pour les crimes de droit commun)

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