20.06.2024 à 07:30
Anne-Sophie Simpere
L'Iref se présente comme « un think tank libéral et européen » ayant pour but de « développer la recherche indépendante sur des sujets économiques et fiscaux ». Il se prétend lui aussi « indépendant de tout parti ou organisation politique ». Mais il est surtout l'un des relais les plus dévoués du réseau Atlas en France. Extrait de notre rapport Le réseau Atlas, la France et l'extrême-droitisation des esprits.
Si l'Iref n'a été fondé qu'en 2002 « par des membres de la société civile issus (…)
L'Iref se présente comme « un think tank libéral et européen » ayant pour but de « développer la recherche indépendante sur des sujets économiques et fiscaux ». Il se prétend lui aussi « indépendant de tout parti ou organisation politique ». Mais il est surtout l'un des relais les plus dévoués du réseau Atlas en France. Extrait de notre rapport Le réseau Atlas, la France et l'extrême-droitisation des esprits.
Si l'Iref n'a été fondé qu'en 2002 « par des membres de la société civile issus de milieux académiques et professionnels » (selon son site internet), une partie de ses membres a des liens bien plus anciens avec les libertariens américains. Jacques Garello, économiste et membre du conseil d'administration de l'Iref, est aussi membre de la Société du Mont Pèlerin. En 1980, il devient président de l'Association pour la liberté économique et le progrès social (Aleps), avec l'idée qu'il faut ouvrir la France à des idées en plein essor au niveau international [1]. L'Aleps deviendra membre du réseau Atlas et recevra des fonds par son intermédiaire. Jacques Garello est aussi l'un des fondateurs de l'Institute for Economic Studies - Europe (IES – Europe), une émanation de l'organisation libertarienne américaine Institute for Humane Studies, financée par Atlas, qui vise à former des étudiants, repérer des talents et organiser des rencontres entre libertariens. Aujourd'hui dirigé par Pierre Garello, fils de Jacques et également administrateur de l'Iref, l'IES continue d'organiser des rencontres avec des universitaires et représentants de think tanks libertariens rattachés au réseau Atlas.
L'Iref se présente comme « un think tank libéral et européen » ayant pour but de « développer la recherche indépendante sur des sujets économiques et fiscaux ». Il se prétend lui aussi « indépendant de tout parti ou organisation politique » [2]. L'institut est aujourd'hui présidé par Jean-Philippe Delsol, un avocat qui n'est pas si éloigné que ça des milieux politiques. En effet, il est le beau-frère de Charles Millon [3], avec qui il fonde dans les années 1970 un cabinet d'avocats d'affaires [4]. Charles Millon aura surtout une longue carrière politique : maire de Belley, député UDF puis ministre de la Défense sous le gouvernement Juppé, il est en 1998 un fervent partisan de l'alliance entre droite et extrême-droite au niveau régional. En 2016, il soutient la candidature de François Fillon, et en 2021 il est membre d'un comité politique autour d'Eric Zemmour [5]. Dans le conseil d'administration de l'Iref, aux côtés d'universitaires, on retrouve aussi Alain Mathieu, ancien président de Contribuables associés déjà cité, ainsi que le Prince Michael de Liechtenstein, ex-cadre de Nestlé, aujourd'hui président d'Industrie & Finanzkontor, une société de services financiers, et fondateur d'une société de « renseignements géopolitiques ».
Les liens de l'Iref avec les autres think tanks du réseau Atlas et le monde politique apparaissent aussi à travers ses salariés et contributeurs. Son directeur, Nicolas Lecaussin, est passé par l'Ifrap, dont il aurait été écarté pour un ouvrage trop critique sur Nicolas Sarkozy au goût de Bernard Zimmern [6]. Lecaussin a aussi été directeur de recherche de Sauvegarde Retraites et administrateur de l'Aleps. Augustin Nayrand, directeur adjoint, vient des Républicains. Ancien directeur de campagne adjoint du candidat LR Etienne Blanc à Lyon, conseiller municipal, il rallie Eric Zemmour en 2021. Aymeric Belaud, chargé d'études de l'Iref, est passé par l'Institut de formation politique (voir L'Institut de formation politique, vivier des droites radicales et de leur union), et fait partie des jeunes membres des Républicains partisans d'un rapprochement des droites qui ont participé à la convention de la droite avec Eric Zemmour et Marion Maréchal en 2019 [7]. Elodie Messeant, elle aussi ancienne chargée d'études, fut coordinatrice de Students for Liberty France [8]. Ferghane Azihari, ancien collaborateur de l'Iref, a lui aussi été porte-parole de Students for Liberty France.
Les sujets de prédilection de l'Iref sont très similaires à ceux des autres membres d'Atlas : les droits des propriétaires immobiliers, la critique des impôts sur les successions, la « suppression des obstacles réglementaires qui étouffent les entreprises », l'ouverture à la concurrence des services de santé, d'assurance chômage, et de l'éducation. Bien sûr, l'Iref est fermement opposé à l'impôt sur la fortune [9], et s'alarme des efforts pour lutter contre la fraude fiscale, qui risqueraient de faire fuir « les grandes entreprises et les gros patrimoines » [10]. Il fustige aussi les taxes sur le tabac, et a été nominé pour un « Mégot de l'ingérence » par le Comité national contre le tabagisme (CNCT) pour avoir publié une étude, financée par Philip Morris, qui s'avère être un plaidoyer pour une fiscalité avantageuse pour le fabricant. Le CNCT note aussi qu'avant les discussions du Projet de loi de finance de la sécurité sociale, l'Iref a organisé une formation à destination des parlementaires sur la fiscalité comportementale, en appui d'amendements favorables à Philip Morris France [11]. L'institut ne déclare pas ses activités de lobbying auprès de la HATVP, et sur son site internet, il est peu question d'actions auprès de décideurs [12]. En revanche, on peut y lire de nombreux articles sur des sujets de société, qui n'ont pas grand chose à voir avec l'économie ou la fiscalité, et défendant des points de vue très réactionnaires : le think tank va ainsi soutenir la liberté de port d'armes, s'opposer à l'inscription du droit à l'avortement dans la constitution [13], et voir dans la lutte contre le racisme ou les droits des personnes LGBT un « délire progressiste » [14]. L'institut critique aussi vivement toute politique environnementale, et continue à publier des articles niant la responsabilité des activités humaines sur les changements climatiques [15].
Parce que le débat démocratique mérite mieux que la com' du CAC 40.
Faites un donL'Iref est l'un des partenaires d'Atlas en France qui commente le plus l'actualité internationale et revendique son ouverture sur le monde : « Sa grande particularité dès le début c'est que c'est un institut européen, avec un site en trois langues (allemand, anglais, français), ce qui fait de nous un institut original qui ressemble un peu aux think tanks américains, explique Nicolas Lecaussin à Contrepoints. Le fait d'être européen nous donne plus de crédibilité (…). Des membres du conseil d'administration et du Conseil scientifique sont des gens des universités et des sociétés européennes allemandes, britanniques, suisses, italiennes, et qui nous donnent la possibilité de faire des comparaisons avec les autres pays. (…) On adore faire ça, nos lecteurs aussi, les journalistes français aussi [16]. »
Concernant l'actualité internationale, l'Iref se fait surtout le relais des combats du réseau Atlas : il se félicite ainsi du rejet du référendum sur les droits des communautés autochtones en Australie [17], étrille le projet de nouvelle constitution chilienne, reflet d'« un socialisme destructeur » [18], ou défend le bilan de Jair Bolsonaro au Brésil, « en demi-teinte mais globalement positif », en se basant pour cela sur un indice des libertés économiques de la Heritage Foundation [19]. Nicolas Lecaussin et l'Iref suivent également de près la politique américaine. Sans être de fervents supporters de Donald Trump et des aspects les plus protectionnistes de son programme, ils réservent l'essentiel de leurs critiques à Barack Obama et à Joe Biden, qualifié de « président des taxes, des impôts et des dépenses publiques » [20]. En Argentine, quand le président nouvellement élu Javier Milei et ses outrances inquiètent généralement les commentateurs, Nicolas Lecaussin le trouve seulement « atypique », et son discours ultra libéral à Davos fait l'objet d'un article enthousiaste sur le site de l'institut français : « Le discours du président Javier Milei au Forum de Davos : nos dirigeants devraient s'en inspirer [21]. » L'Iref publiera aussi des billets pour expliquer que Giorgia Meloni n'est pas fasciste [22], et se féliciter de sa décision de revenir sur le revenu social de base en Italie [23].
Le think tank est particulièrement virulent contre les « gauchistes », « islamo-gauchistes » et autres « communistes », comme en témoignent les titres aussi excessifs que racoleurs d'articles du site de l'Iref : « Canal Plus : des films de gauche désespérants », « L'idéologie islamo-gauchiste contrôle l'université française », « Une Miss France transgenre ? Le traditionnel concours cède au wokisme », « Voitures électriques, chauffage, enfants, viande, chiens et chats : l'écologisme veut diriger notre vie ». Le ton ressemble davantage à celui de tracts politiques que d' articles de recherche.
Pourtant, comme dans le cas de l'Ifrap, lorsqu'un porte-parole de l'Iref intervient dans les médias, il n'est pas présenté comme un militant politique, et il est rarement précisé que l'institut est une organisation de la droite libertarienne conservatrice. Ainsi, aux yeux des lecteurs ou téléspectateurs, il peut apparaître comme un institut de recherche indépendant de toute idéologie. Ses porte-paroles disposent d'une bonne visibilité dans les médias de droite et d'extrême-droite et sur les chaînes d'information en continu comme BFM, RMC ou LCI. Jean-Philippe Delsol prend ainsi souvent la parole au nom de l'Iref, et s'il est présenté aussi comme avocat, ses liens avec Charles Millon, ses positions politiques ou le fait qu'il soit spécialiste des fusions-acquisitions plus que des finances publiques ne sont pas mentionnés.
Anne-Sophie Simpere
Infographie : Maria Boidin
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Photo : CC BY-NC Mídia NINJA
[1] Brookes, Kevin. « "Les idées ont des conséquences" : la genèse internationale des think tanks néo-libéraux français », Quaderni, vol. 97, no. 3, 2018, pp. 35-55.
[2] Brookes, Kevin. « "Les idées ont des conséquences" : la genèse internationale des think tanks néo-libéraux français », Quaderni, vol. 97, no. 3, 2018, pp. 35-55.
[3] Charles Millon a épousé la sœur de Jean-Philippe Delsol, Chantal Delsol, rencontrée au cercle Charles Péguy. Chantal et Jean-Philippe sont les enfants de Michel Delsol, décrit dans Le Figaro comme : « Une forte personnalité, ce Michel Delsol. Un « réac » à l'ancienne, catholique traditionaliste et maurrassien à la fois. ». Jean-François Paoli, « La gauchiste de la famille », 6 mars 2008. https://www.lefigaro.fr/livres/2008/03/06/03005-20080306ARTFIG00508-la-gauchistede-la-famille.php. Chantal Delsol est éditorialiste à Valeurs Actuelles et membre du comité éditorial de L'Incorrect. Jean-Philippe Delsol lui-même contribue à Contrepoints, sous le pseudonyme Phlippe Grésy, et à Radio Courtoisie.
[4] « En 1973, Jean-Philippe DELSOL fonde sa structure de conseil juridique et fiscal à Lyon. Dès 1976, il s'associe pour créer la SCP DELSOL DUQUAIRE MILLON GARIAZZO (DMG) » Delsol avocats #28, juillet 2023 https://www.delsolavocats.com/IMG/pdf/journal_de_la_relation_28_juillet_2023.pdf
[5] Léopold Audebert, « Présidentielle 2022 : Charles Millon, ancien ministre de Jacques Chirac, rallie Éric Zemmour », BFM, 1er décembre 2021 - https://www.bfmtv.com/politique/elections/presidentielle/presidentielle-2022-charles-millon-ancien-ministre-de-jacques-chirac-rallie-eric-zemmour_AV-202112010439.html
[6] La Lettre, « Nicolas Lecaussin », 27 mars 2009 : https://www.lalettre.fr/fr/clubs--think-tanks/2009/03/27/nicolas-lecaussin,58236774-bre
[7] « [Tribune] Une centaine de Jeunes LR présents à la Convention de la Droite, avec Eric Zemmour et Marion Maréchal », publiée dans Valeurs Actuelles, 27 septembre 2019. https://www.valeursactuelles.com/politique/tribune-une-centaine-de-jeunes-lr-presents-a-la-convention-de-la-droite-avec-eric-zemmour-et-marion-marechal
[8] Voir sa présentation sur le site de Contrepoints : https://www.contrepoints.org/author/elodie-keyah
[9] Iref, « Rétablir l'ISF serait une énorme erreur », 7 décembre 2018 - https://fr.irefeurope.org/actions-et-manifestations/liref-dans-les-medias/article/retablir-l-isf-serait-une-enorme-erreur/
[10] Elodie Messeant, « Lutte contre la fraude fiscale : traquer les riches, c'est appauvrir le pays », Iref, 10 mai 2023.https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/lutte-contre-la-fraude-fiscale-traquer-les-riches-cest-appauvrir-le-pays/
[11] Voir le site du Comité national contre le tabagisme : https://cnct.fr/ressource/page/les-prix-5-3-sans-tabac-et-sans-lobby-2021/
[12] Voir sur le site de l'Iref « Actions auprès des décideurs » : https://fr.irefeurope.org/category/actions-et-manifestations/actions-aupres-des-decideurs/. Au 16 avril 2024, la dernière action mentionnée était une plainte déposée auprès de la Défenseure des droits en juin 2022 pour discrimination envers les personnes retraitées, qui seraient sous-représentées dans le paysage audio-visuel français. La seule autre action de 2022 était une lettre au Président de la République au sujet de la rémunération des membres du Conseil constitutionnel.
[13] François Turenne, « Le projet de constitutionaliser l'avortement déjà oublié. Tant mieux. », Iref, 5 juillet 2022. https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/le-projet-de-constitutionaliser-lavortement-deja-oublie-tant-mieux/
[14] Nicolas Lecaussin, « Championnat d'Europe de foot ou du genou à terre et des droits LGBT ? », Iref, 25 juin 2021
[15] Nicolas Lecaussin, « Le CO2 est-il la cause du réchauffement climatique ? Pas sûr du tout… », Iref, 6 novembre 2023 - https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/le-co2-est-il-la-cause-du-rechauffement-climatique-pas-sur-du-tout/. Cet article se base sur une étude norvégienne, dont la rigueur a été remise en cause. Voir : Théo Marie-Courtois, « L'impact des activités humaines pas suffisamment important pour expliquer le réchauffement climatique ? C'est faux », AFP, 14 décembre 2023 - https://factuel.afp.com/doc.afp.com.347U7VK
[16] Pierre Schweitzer, « [PODCAST] Dans la « fabrique » des réformes libérales, avec Nicolas Lecaussin », Contrepoints, 25 février 2023 - https://www.contrepoints.org/2023/02/25/451163-podcast-dans-la-fabrique-des-reformes-liberales-avec-nicolas-lecaussin
[17] Nicolas Lecaussin, « Nouvelle Zélande et Australie : les électeurs rejettent la gauche « progressiste » et l'idéologie identitaire », Iref, 17 octobre 2023 - https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/nouvelle-zelande-et-australie-les-electeurs-rejettent-la-gauche-progressiste-et-lideologie-identitaire/
[18] Aymeric Belaud, « Une nouvelle Constitution dévastatrice pour le Chili », Iref, 14 juillet 2022. https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/une-nouvelle-constitution-devastatrice-pour-le-chili/
[19] Aymeric Belaud, « Présidence de Jair Bolsonaro : quel bilan ? », Iref, 26 octobre 2022 - https://fr.irefeurope.org/publications/articles/article/presidence-de-jair-bolsonaro-quel-bilan/
[20] Nicolas Lecaussin, « Joe Biden, le président des taxes, des impôts et des dépenses publiques », Iref, 30 mars 2022. https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/joe-biden-le-president-des-taxes-des-impots-et-des-depenses-publiques/
[21] Iref, « Le discours du président Javier Milei au Forum de Davos : nos dirigeants devraient s'en inspirer », 21 janvier 2024 - https://fr.irefeurope.org/publications/articles/article/le-discours-du-president-javier-milei-au-forum-de-davos-nos-dirigeants-devraient-sen-inspirer/
[22] Aymeric Belaud, « Non, Giorgia Meloni n'est pas fasciste », Iref, 27 septembre 2022. https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/non-giorgia-meloni-nest-pas-fasciste/
[23] Romain Delisle, « Le gouvernement de Giorgia Meloni limite le revenu social de base des Italiens et réalise 5,4 Mds€ d'économies », Iref, 3 mai 2023 . https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/le-gouvernement-de-giorgia-meloni-limite-le-revenu-social-de-base-des-italiens-et-realise-54-mdse-deconomies/
12.06.2024 à 07:30
Anne-Sophie Simpere
Directement inspiré par le réseau Atlas, l'IFP propose une formation à l'américaine au profit des droites radicales françaises, des Républicains aux zemmouristes en passant par le Rassemblement national et les chroniqueurs des médias Bolloré. Extrait de notre rapport Le réseau Atlas, la France et l'extrême-droitisation des esprits.
« Tous les partenaires du réseau Atlas ne se concentrent pas sur l'obtention de résultats tangibles à court terme. De nombreux partenaires du réseau Atlas se (…)
Directement inspiré par le réseau Atlas, l'IFP propose une formation à l'américaine au profit des droites radicales françaises, des Républicains aux zemmouristes en passant par le Rassemblement national et les chroniqueurs des médias Bolloré. Extrait de notre rapport Le réseau Atlas, la France et l'extrême-droitisation des esprits.
« Tous les partenaires du réseau Atlas ne se concentrent pas sur l'obtention de résultats tangibles à court terme. De nombreux partenaires du réseau Atlas se sont concentrés sur des activités éducatives axées sur le développement des talents, afin que les jeunes exposés aujourd'hui au libéralisme classique puissent occuper des postes à responsabilités dans une ou deux décennies. Cela demande de la patience et de la persévérance. Cela signifie qu'il faut supporter un certain risque de voir ses efforts réduits à néant. Il existe cependant de merveilleux exemples où la stratégie à long terme s'est avérée tout à fait justifiée », explique Brad Lips, directeur du réseau Atlas, dans un ouvrage intitulé « The Freedom Movement : its Past, its Present and Future ». Il cite en exemple la Federalist Society, dont cinq des anciens membres siègent maintenant à la Cour Suprême des États-Unis, ainsi que l'Estudos Empresariais au Brésil, dont plusieurs membres ont rejoint le gouvernement Bolsonaro. On peut aussi penser au Leadership Institute, partenaire de longue date du réseau Atlas.
Cet organisme de formation des leaders conservateurs aux États-Unis a été fondé peu avant la constitution du réseau, en 1979, par le militant républicain Morton Blackwell. En 2022, le Leadership Institute annonçait avoir formé son 250 000e activiste depuis sa création [1]. Parmi ses alumni, on retrouve des personnalités politiques, le plus célèbre étant sans doute Mike Pence, devenu vice-président de Donald Trump entre 2017 et 2021, mais aussi des lobbyistes, des chroniqueurs et journalistes ou encore des activistes. Comme Lila Rose, fondatrice et présidente de l'organisation anti-avortement Live Action, très active aux États-Unis et au-delà, ou encore de nombreuses membres de Moms for Liberty, une organisation ultra-conservatrice qui mène des campagnes agressives contre tout enseignement ou livre qui traiterait de l'orientation sexuelle, de l'identité de genre ou du racisme dans les écoles. Le Leadership Institute propose un vaste catalogue de formations, dans les domaines de la communication, de la prise de parole en public ou de la collecte de fonds. L'idée est de former un grand nombre de militants conservateurs, de les faire monter en compétence et de les soutenir, notamment grâce au réseau des « alumni ».
En 2000, le Leadership Institute accueille un stagiaire français, Alexandre Pesey, pour qui cette formation sera « décisive ». Il dit y avoir appris l'histoire du mouvement conservateur aux États-Unis, y avoir découvert les auteurs libertariens, la collecte de fonds et le travail avec les médias (le Leadership l'aidera à intégrer CNN) [2]. Il fera aussi sa thèse sur le Heartland Institute, un autre membre d'Atlas. Inspiré par son travail auprès de Morton Blackwell et par les méthodes des conservateurs américains, Pesey crée en 2003 la bourse Tocqueville, qui permet à de jeunes Français âgés de 20 à 28 ans de se rendre aux États-Unis pour se familiariser avec le conservatisme américain, en rencontrant des responsables politiques et des membres de groupes de réflexion et en participant à des séminaires pratiques. Agnès Verdier-Molinier en est l'une des premières bénéficiaires en 2004 (voir L'Ifrap : bon élève du réseau Atlas, et lobby des 10% les plus riches). La même année, Alexandre Pesey crée en France un organisme de formation sur le modèle du Leadership Institute américain : l'Institut de formation politique (IFP), qu'il monte avec l'avocat Jean Martinez, et Thomas Millon, le fils de Charles Millon. En 2008, le centre de formation reçoit un prix de 10 000 dollars de la fondation Templeton pour avoir formé plus de 200 jeunes aux principes du « libéralisme classique » et du conservatisme, et les avoir « armés de techniques pour les mettre en œuvre efficacement dans la société civile » [3]. En 2017, Pesey gagne aussi le « Think Tank Shark Tank Award » du réseau [4], un prix doté de 25 000 dollars, pour son projet « Le coquetier » visant à soutenir les « entrepreneurs civiques », c'est à dire des jeunes ayant des projets variés, allant du soutien aux chrétiens d'orient à l'organisation de débats dans les universités sur des sujets comme la procréation médicalement assistée ou « la fiscalité qui tue l'initiative » [5]. L'IFP est aussi ou a été un partenaire de la Federalist Society [6].
L'Institut de formation politique aurait reçu des fonds de Bernard Zimmern (fondateur de l'Ifrap et de Contribuables associés) et de Claude Razel, héritier du groupe industriel Razel Bec [7]. Il ne touche aucun financement public mais fonctionne grâce à des dons défiscalisés [8]. Charles Gave (financeur de l'extrême-droite) et l'ancien banquier François Billot de Lochner, proche de Marion Maréchal et admirateur de Zemmour, feraient partie des donateurs [9]. De même que Laurent Meeschaert, héritier du groupe Meeschaert, une société de gestion de patrimoine créée par son grand-père, qui soutient aussi des médias identitaires et la campagne d'Eric Zemmour [10].
Via Alexandre Pesey, l'IFP est étroitement lié à tous les partenaires français du réseau Atlas. Charles Gave (institut des libertés), Nicolas Lecaussin (Iref), Cécile Philippe (Institut Molinari), Agnès Verdier-Molinié et Samuel Servière (Ifrap) font partie des intervenants de l'école : économiquement, les auditeurs seront bien formés aux idées libertariennes. Les autres intervenants indiquent que les enseignements penchent vers l'extrême-droite de l'échiquier politique, puisque l'IFP invite pour ses conférences des personnalités politiques comme Jordan Bardella, François-Xavier Bellamy, Eric Ciotti, Philippe de Villiers, Marion Maréchal, Eric Zemmour, Julien Rochedy... Ou encore Régis Le Sommier, journaliste aux positions controversées sur la Syrie et la Russie, qui dirige le média d'extrême-droite Omerta, et Bernard Lugan, historien très critiqué pour ses erreurs factuelles et sa défense de la colonisation ou de l'apartheid, « monsieur Afrique » du candidat Eric Zemmour en 2022.
Cette proximité avec l'extrême-droite semble s'être considérablement renforcée au moment des mobilisations de la Manif pour tous. L'IFP aurait alors bénéficié d'un certain engouement. Samuel Lafont, très engagé contre le mariage pour tous, est ainsi passé par l'institut (et a reçu plusieurs prix), de même que Vivien Hoch, qui participait lui aussi aux manifestations anti-mariage pour tous avant de monter le comité Trump France [11]. Il est aujourd'hui formateur à l'IFP [12]. Ludivine de la Rochère, présidente de la Manif pour tous, est aussi l'une des intervenantes de l'institut. Dans un entretien à Libération, Alexandre Pesey expliquait que les centres d'intérêts des élèves avaient pu évoluer avec les années et l'actualité : grèves et endettement en 2004, puis l'effet « manif pour tous » en 2013-2014, sécurité et terrorisme en 2017. Cette diversité de sujets permet à plusieurs droites de se croiser... voire de converger.
En 2019, l'IFP était partenaire de la Convention de la droite, qu'Alexandre Pesey compare à la CPAC (Conservative Political Action Conference) aux États-Unis [13]. Dans son intervention, le directeur de l'institut rêve d'une union des droites dures : « Si on demande quel est le principal problème de notre temps, certains vont répondre que c'est l'intervention de l'État. Appelons-les les libéraux. D'autres vont considérer que c'est le relativisme. L'antidote : la vérité. Appelons-les les conservateurs. D'autres se désolent du fossé croissant entre le peuple et une élite globalisée, appelons-les les souverainistes. D'autres nous disent que le drame de notre temps, c'est le déracinement et l'invasion migratoire, eux nous appellent au ressourcement culturel et à la remigration, appelons-les les identitaires. Ces quatre grandes familles ont été trop souvent face à face. Pour le plus grand plaisir de la gauche. Aujourd'hui, elles sont côte à côte pour défendre la liberté d'expression, la solidarité, la famille naturelle, l'occident (…) Il faut s'allier et s'engager pour la France [14]. »
Pesey est un homme de réseau et croit dans les alliances, y compris internationales. Lors de la conférence « National Conservatism » (NatCon) de 2020 à Rome, à laquelle participent aussi Marion Maréchal, Giorgia Meloni et Viktor Orban, le directeur de l'IFP axe son intervention sur la double menace de la mondialisation et de l'islamisation. Il présente l'islam comme un « empire » qui gagnerait en faisant appliquer ses « lois coraniques » depuis la base, et grâce « aux ventres de leurs femmes » [15]. À l'été 2023, alors que de violentes manifestations secouent la France suite à la mort de Nahel, un adolescent tué par un policier lors d'un refus d'obtempérer, Pesey développe une vision apocalyptique lors d'une interview avec la journaliste états-unienne Sandy Rios, racontant que des hordes d'hommes musulmans, en âge de combattre, ont envahi la France pour y constituer des zones de non-droit ou que les chrétiens seraient aujourd'hui persécutés dans l'Hexagone [16]. Il semble ainsi vivre dans un univers de guerre des religions et des civilisations dans lequel il voit cependant un espoir : les centaines de jeunes qu'il forme à l'IFP, qui pourront devenir de bons leaders pour défendre la France et remplacer la génération de mai 68 en politique, dans les médias et dans la société civile.
Parce que le débat démocratique mérite mieux que la com' du CAC 40.
Faites un donEn 2022, Alexandre Pesey estimait avoir formé plus de 2200 jeunes, avec une « nette accélération ces dernières années » [17]. Début 2024, le site de l'IFP affiche 3000 auditeurs. En 2014, le réseau Atlas décrivait la mission de l'IFP comme le fait « d'accroître le nombre et l'efficacité des dirigeants et des militants conservateurs et libéraux classiques dans le domaine des politiques publiques ». Pour cela, l'institut allait « identifier, recruter, former et placer des conservateurs et des libéraux classiques respectueux des principes et travailleurs dans l'ensemble du processus d'élaboration des politiques publiques » [18]. Les formations sont courtes, sous forme de séminaires sur quelques week-ends. On s'y penche sur les « valeurs de la droite », la fiscalité (trop lourde), la façon de libérer les entreprises des contraintes juridiques et réglementaires ou la lutte contre le « wokisme ». Mais on y propose surtout des entraînements pratiques sur comment communiquer, convaincre, mener une campagne, tenir un entretien radio ou télévisé.... À la sortie, les élèves doivent maîtriser l'art des éléments de langage et de la posture pour porter leurs causes. À travers l'IFP, ils se constituent aussi un réseau.
L'idée est ensuite de passer à l'action. Dans le champ politique bien sûr, en devenant collaborateur d'élu, élu local... à droite toute, évidemment. Des auditeurs de l'IFP sont ainsi engagés auprès de François Fillon ou de Valérie Pécresse [19]. En 2022, c'est Eric Zemmour qui semble susciter l'engouement : « Quand on demande aux étudiants de l'IFP leur source d'inspiration, Zemmour est le nom qui revient le plus », révèle Alexandre Pesey dans l'enquête d'Etienne Girard sur le candidat d'extrême droite, Le radicalisé. L'IFP facilite les mises en contact, sans doute d'autant plus aisément que son directeur opérationnel, Benoît Perrin, aurait lui-même participé aux réunions au domicile de Sarah Knafo où se préparait la candidature du polémiste [20]. Parmi les « lieutenants » de Zemmour en 2022, Samuel Lafont, Stanislas Rigault, René Boustany ou Garen Shnorhokian ont été auditeurs de l'IFP.
Mais ces derniers ne s'engagent pas qu'auprès du mouvement Reconquête. En 2017, Lafont et Boustany soutenaient la campagne de François Fillon [21]. En octobre 2023 encore, l'IFP annonçait qu'après les élections sénatoriales, plusieurs de ses anciens étudiants avaient franchi les portes du Sénat, en tant qu'élus ou collaborateurs, et que ceux-ci représentaient 23% des sénateurs de moins de 40 ans [22]. Sans que le détail des partis politiques concernés ne soit précisé.
Dans la même enquête
Dans la droite ligne des préceptes d'Antony Fisher et du réseau Atlas, Alexandre Pesey destine également ses auditeurs à la bataille des idées dans les médias et dans la société civile. Les élèves du très conservateur institut sont ainsi encouragés à s'engager dans le syndicalisme étudiant, dans des associations, sur les réseaux sociaux. Si une grande partie des initiatives reste assez confidentielle, d'autres parviennent à gagner une certaine audience [23]. Toute l'équipe fondatrice de SOS Chrétiens d'Orient est ainsi passée par l'IFP, de même qu'Alice Cordier, fondatrice du collectif féministe identitaire Némésis, ou encore Thaïs d'Escuffon, ancienne porte-parole de Génération identitaire reconvertie en influenceuse « tradwife » qui prône le cantonnement des femmes aux rôles de mère et d'épouse.
Rien de plus efficace pour augmenter encore la visibilité de ces idées que de pouvoir compter sur des journalistes eux aussi formés à l'IFP. À l'image de Charlotte d'Ornellas, l'une des intervenantes stars de Cnews, mais encore de Jules Torres ou Baudouin Wisselmann, ex-Valeurs Actuelles passés respectivement au JDD et à Radio Courtoisie, ou Louis Lecomte et Maguelonne de Gestas qui travaillent pour Le Figaro. Cette dernière a également suivi une formation au Leadership Institute, où elle a pu découvrir le mouvement conservateur aux États-Unis, qui semble l'avoir impressionnée : « Malheureusement, le conservatisme français n'a pas connu le même engouement qu'aux États-Unis. (…) En France, au contraire, nous avons connu (…) une émergence de la gauche, qui prônait le renversement du sens moral de la société française [24]. »
En 2018, l'IFP a lancé un Institut Libre du Journalisme (ILDJ) pour former des journalistes conservateurs en cinq à dix week-ends. Le projet est financé par la Fondation Notre-Dame [25] et des levées de fonds de la Nuit du Bien commun, soirée caritative de la sphère catholique et conservatrice fondée notamment par l'entrepreneur multi-millionnaire Pierre-Edouard Stérin, qui se revendique libertarien. Pour Alexandre Pesey comme pour Maguelonne de Gestas (qui a pitché le projet à la Nuit du bien Commun en 2020), l'ILDJ vise à former des journalistes conservateurs « ancrés dans le réel » – un réel qui serait ignoré par une presse trop à gauche [26]. Pourtant, aussi bien Pesey lui-même que nombre d'auditeurs de l'IFP semblent avoir des difficultés avec les faits – Charlotte d'Ornellas, par exemple, a été épinglée pour une utilisation assez fantaisiste de chiffres sur les migrations [27].
Les débouchés principaux pour les auditeurs de ces écoles restent des médias ancrés à droite et très à droite – Cnews, Valeurs Actuelles, Europe 1, le JDD –, les mêmes qui relaient déjà facilement les messages des autres partenaires du réseau Atlas. L'essentiel des intervenants de l'IFP issus du monde médiatique vient aussi de ces titres (Geoffroy Lejeune, Christine Kelly, Laurent Dandrieu, Elisabeth Levy, Eugénie Bastié, Mathieu Bock-Coté...), même si quelques-uns sont liés à des médias considérés comme moins radicaux comme Nicolas Doze (BFM), Christophe Barbier (L'Express) ou Daniel Riolo (RMC).
« Avant, il n'y avait pas d'opposition aux médias maintream. Mais aujourd'hui, grâce à quelques milliardaires et particulièrement un, qui a acheté beaucoup de médias, on a totalement changé le débat public en France. En gros, nous avons eu Fox News en France et ça change complètement le spectre du débat », expliquait Alexandre Pesey lors d'une conférence en ligne de la Common Sense Society [28]. S'il ne cite pas ce milliardaire, on reconnaît évidemment Vincent Bolloré, son rachat de nombreux médias et la création de Cnews. qui peut effectivement rappeler Fox News avec ses innombrables rappels à l'ordre et sanctions de la part de l'Arcom (notamment pour manquement à l'exigence d'honnêteté et de rigueur de l'information, propos injurieux, humiliants, homophobes...) [29]. Malgré cela, la chaîne augmente constamment sa part de marché au point d'arriver en seconde place des chaînes d'information continue derrière BFM pour l'année 2023.
La couverture médiatique est essentielle pour avoir une influence sur le « climat des idées » et les médias de Bolloré ont sans aucun doute aidé la minorité des libertariens conservateurs français à acquérir du poids dans le débat public ; Quand la chaîne est critiquée pour sa partialité et auditionnée dans le cadre d'une commission d'enquête parlementaire, l'IFP lui apporte un soutien franc et massif : « On ne bâillonne que la bouche qui dit vrai [30]. » L'institut sent-il ses futurs « leaders » et porte-paroles menacés par la récente décision du Conseil d'État qui, pour apprécier le respect du pluralisme de l'information d'une chaine de télévision, enjoint à l'Arcom de prendre en compte « la diversité des courants de pensée et d'opinions représentés par l'ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs, animateurs et invités » ?
Anne-Sophie Simpere
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Photo : Wik8dude cc by-sa
[1] Matthew Hurtt, « Five Questions with Leadership Institute's 250,000th Graduate », Leadership Institute, 18 juillet 2022 - https://leadershipinstitute.org/news/?NR=15991
[2] Lauren Hart, « A Conservative Entrepreneur in France », Leadership Institute, 10 juillet 2012 - https://www.leadershipinstitute.org/news/?NR=8243
[3] Communiqué du réseau Atlas, « Sixteen Think Tanks Receive Recognition for Important Work In Advancing Liberty », 20 octobre 2008 : https://web.archive.org/web/20220525223911/https://ifuturo.org/wp-content/uploads/attachments/2170_Nota%20de%20prensa%20ATLAS%20definitiva.pdf
[4] Communiqué du réseau Atlas, « Sixteen Think Tanks Receive Recognition for Important Work In Advancing Liberty », 20 octobre 2008 : https://web.archive.org/web/20220525223911/https://ifuturo.org/wp-content/uploads/attachments/2170_Nota%20de%20prensa%20ATLAS%20definitiva.pdf
[5] LE COQUETIER avec Alexandre PESEY - La Nuit du Bien Commun 2017 : https://www.youtube.com/watch?v=aSaR3iHlIeg
[6] L'IFP est présenté comme un partenaire de la Federalist Society dans le rapport annuel 2013 de cette dernière : https://fedsoc-cms-public.s3.amazonaws.com/update/pdf/0iamvscuGSyYpH9TNtkLz5qygeRLZuyh1LsV3QqY.pdf#page=12
[7] La Lettre, « IFP, pouponnière partagée de la droite et de l'extrême droite », 9 février 2017 - https://www.lalettre.fr/fr/action-publique_partis-et-elections/2017/02/09/ifp-pouponniere-partagee-de-la-droite-et-de-l-extreme-droite,108211073-art
[8] Une bonne droite, « Défiscalisation : soutenir des causes patriotes à moindre coût », 28 décembre 2023. https://www.unebonnedroite.fr/blogs/articles/defiscalisation-reduire-vos-impots-tout-en-soutenant-des-causes-patriotes
[9] Victor Boiteau, « A l'IFP, la jeunesse de droite fait l'école identitaire », Libération, 8 octobre 2021 - https://www.liberation.fr/politique/elections/a-lifp-la-jeunesse-de-droite-fait-lecole-identitaire-20211008_S3UD5VHRXRGUXIVG6TAGLFUJHM/?redirected=1
[10] Jérémie Baruch, Maxime Vaudano, Vincent Nouvet et Anne Michel, « Derrière Eric Zemmour, les cinquante lieutenants d'une campagne d'extrême droite », Le Monde, 12 décembre 2021 - https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2021/12/12/derriere-eric-zemmour-les-cinquante-lieutenants-d-une-campagne-d-extreme-droite_6105788_4355770.html
[11] Nolwenn Le Blevennec, « Cet homme est le plus grand fan français de Donald Trump », Le Nouvel Obs, 21 novembre 2016 - https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-politique/20161007.RUE3980/cet-homme-est-le-plus-grand-fan-francais-de-donald-trump.html
[12] Voir le profil Linkedin de Vivien Hoch : https://www.linkedin.com/in/vivien-hoch-71483442/?original_referer=https%3A%2F%2Fwww%2Egoogle%2Ecom%2F&originalSubdomain=fr
[13] Voir le post sur la page Facebook de L'Incorrect, le 6 septembre 2019 : « Alexandre va Pesey dans le game ! Le directeur de l'Institut de Formation Politique sera présent dans l'octogone de la Convention de la droite 2019 le 28 septembre. Venez avec lui participer à l'événement le plus important pour la droite de la décennie qui vient. » - https://www.facebook.com/watch/?v=741313279667188
[14] Intervention d'Alexandre Pesey - Convention de la droite 28 septembre 2019 : https://www.youtube.com/watch?v=plp9XwFI9sU
[15] Intervention d'Alexandre Pesey à la conférence National Conservatisme à Rome, en Italie, le 4 février 2020, sur le thème “The Threats to Nationalism in Europe” : https://nationalconservatism.org/natcon-rome-2020/presenters/alexandre-pesey/
[16] Sandy Rios 24/7, « France in Crisis...Alexandre & Kate Pesey on their Beloved Country », 24 juillet 2023 : https://podcasts.apple.com/us/podcast/france-in-crisis-alexandre-kate-pesey-on-their-beloved/id400516424?i=1000622162346 . Lors d'une conférence de la Common Sense Society ( https://commonsensesociety.substack.com/p/video-whats-really-drove-frances), Alexandre Pesey a aussi expliqué que la police ne répondait pas aux émeutiers et qu'elle était très clémente avec eux, malgré le déploiement de dizaines de milliers de policiers, y compris des unités d'élite (Raid, Gign, BRI), et le fait qu'il y ait eu plus d'un millier d'interpellation et plusieurs cas de violences policières recensés sur la période, pendant cette période, du crâne fracassé d'Hedi à la mort de Mohamed Bendriss (ciblé par des tirs de LBD) en passant par des jeunes éborgnés (Abdelkarim Y., Jalil)
[17] Hadrien Péyrier, « Trois questions à Alexandre Pesey », Le nouveau conservateur, 9 septembre 2022 - https://lenouveauconservateur.org/rubriques/culture-civilisations/trois-questions-a-alexandre-pesey/
[18] Atlas Network, Institute Directory, mai 2014 : https://ia902702.us.archive.org/16/items/2014-atlas-network-xlsx-directory/2014%20Atlas_Directory.xlsx%20-%20Institute%20Directory.pdf
[19] « J'ai repris cet été la responsabilité des Jeunes Républicains des Yvelines sur proposition de Valérie Pécresse, et j'ai aussi été chargée de sa campagne digitale », raconte par exemple Flora, auditrice de l'IFP, sur le site de l'école en 2016 https://ifpfrance.org/2016/01/13/flora-de-tous-les-combats-a-21-ans/
[20] Etienne Girard, Le radicalisé. Enquête sur Eric Zemmour, éd. du Seuil, oct. 2021
[21] Jérémie Baruch, Maxime Vaudano, Vincent Nouvet et Anne Michel, « Derrière Eric Zemmour, les cinquante lieutenants d'une campagne d'extrême droite », Le Monde, 12 décembre 2021 - https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2021/12/12/derriere-eric-zemmour-les-cinquante-lieutenants-d-une-campagne-d-extreme-droite_6105788_4355770.html
[22] Voir le message sur le compte X de l'IFP le 4 octobre 2023 : « Grande Nouvelle pour l'IFP ! Nous sommes fiers de vous annoncer qu'aujourd'hui plusieurs de nos anciens étudiants ont franchi les portes du Sénat en tant que sénateurs et collab. parlementaires. Un fait marquant : 23% des sénateurs de - de 40 ans proviennent de l'IFP » https://twitter.com/ifpfrance/status/1709506847969812806
[23] Nathalie Gathié, « Comment la droite de la droite mène sa reconquête médiatique », La Lettre, 23 octobre 2023 - https://www.lalettre.fr/fr/medias/2023/10/23/comment-la-droite-de-la-droite-mene-sa-reconquete-mediatique,110079551-ge0
[24] Maguelonne DeGestas, « The American Conservative Movement – An Outsider's Perspective », Leadership Institute, 14 février 2020 - https://leadershipinstitute.org/news/?NR=14574
[25] La Fondation Notre dame est une association caritative catholique fondée par Monseigneur Jean-Marie Lustiger : https://www.fondationnotredame.fr/
[26] Eric Martin, « Alexandre Pesey : “Le conformisme politique des écoles de journalisme et des médias dissuade depuis longtemps des jeunes de conviction de se lancer dans le journalisme” », Nouvelles de France, 5 septembre 2018 - https://ndf.fr/politique/05-09-2018/alexandre-pesey-le-conformisme-politique-des-ecoles-de-journalisme-et-des-medias-dissuade-depuis-longtemps-des-jeunes-de-conviction-de-se-lancer-dans-le-journalisme/
[27] CNews, Punchline, 5 septembre 2018 - https://x.com/clemovitch/status/1043043430870523904?s=20
[28] Elad Vaida, « VIDEO : What Really Drove France's Violent Riots ? », Common Sense Society, 11 juillet 2023 – passage à 21'30 - https://commonsensesociety.substack.com/p/video-whats-really-drove-frances
[29] Adel Miliani, « C8 et CNews : plus de 40 rappels à l'ordre de l'Arcom, dont la moitié depuis trois ans », Le Monde, 13 mars 2024 - https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/03/13/c8-et-cnews-plus-de-40-rappels-a-l-ordre-de-l-arcom-dont-la-moitie-depuis-trois-ans_6221708_4355770.html
[30] Voir le message sur le compte X de l'IFP le 15 mars 2024 : « « Toute censure est un aveu. On ne bâillonne que la bouche qui dit vrai. » Pierre Gripari #CNEWS » https://twitter.com/ifpfrance/status/1768562574738543039
06.06.2024 à 07:30
Jeremy Walker, professeur à l'University of Technology de Sydney en Australie, étudie depuis des années les agissement du réseau Atlas dans son pays et au niveau international. Pour lui, l'opposition aux politiques climatiques et environnementales est la clé du développement du réseau depuis les années 1980, et explique son alignement sur des positions ultraconservatrices sur les sujets de société. Rencontre.
Comment est-ce que vous avez commencé à vous intéresser au réseau Atlas ? (…)
Jeremy Walker, professeur à l'University of Technology de Sydney en Australie, étudie depuis des années les agissement du réseau Atlas dans son pays et au niveau international. Pour lui, l'opposition aux politiques climatiques et environnementales est la clé du développement du réseau depuis les années 1980, et explique son alignement sur des positions ultraconservatrices sur les sujets de société. Rencontre.
Comment est-ce que vous avez commencé à vous intéresser au réseau Atlas ?
Jeremy Walker : Si je remonte aux origines, je crois que je pourrais aller jusqu'à mes années étudiantes, où on manifestait contre la destruction des forêts primaires. Les entreprises forestières nous accusaient de nous mettre en travers de la croissance économique et de l'emploi. Cette vision économique où les ressources seraient infinies et pourraient être exploitées jusqu'au bout, sans conséquences, m'a interpellé. Cela a continué en 1992 avec les conférences internationales sur la biodiversité ou le climat, avec beaucoup de frustration à chaque fois, car il n'y avait pas d'accord ambitieux. Et à côté, dans les médias, il y avait des discours qui remettaient en cause l'existence même des dérèglements climatiques, portés par des économistes. Pourquoi ces économistes contredisaient-ils la science ? Je me suis intéressé au néo-libéralisme, puis j'ai lu The Road from Mont Pèlerin [1]… C'est quand on établit leurs liens avec l'industrie fossile, qui a financé très tôt la construction de ces réseaux, que ce narratif prend tout son sens. Sinon ça n'a aucune logique de clamer que les ressources seraient infinies, qu'il n'y a pas de limites écologiques et que tous les scientifiques du GIEC se trompent. En réalité, ces « économistes » servent surtout à porter les revendications des grandes entreprises, en les masquant derrière un discours académique.
Dès 1976, John Bonython, l'un des fondateur de l'entreprise pétrolière australienne Santos, écrit à propos du fondateur du réseau Atlas, Antony Fisher : « Fisher a une technique qui consiste à amener les universitaires à dire et à écrire en leur propre nom ce que les entreprises ne peuvent pas dire pour elles-mêmes. [...] La méthode de Fisher me semble être la meilleure que j'aie jamais rencontrée (…) [Cette méthode] n'est pas sporadique, c'est un processus continu [2]. » Le réseau Atlas a reçu des financements d'Exxon, mais aussi de milliardaires qui ont bâti leurs fortunes sur le pétrole, le tabac, d'autres industries polluantes ou la finance (Scaife Foundation, Koch Industries…). En Australie, les subventions qui ont permis de fonder le Center for independant studies (CIS) en 1979, qui rejoindra ensuite le réseau Atlas, viennent de Santos, Shell, BHP, Rio Tinto, Western Mining Corporation (WMC).
L'opposition aux politiques climatiques est l'un des enjeux clés derrière l'expansion massive du réseau Atlas
Dès la fin des années 80, le public commençait à être informé des risques de dérèglement climatique à cause des énergies fossiles – une information que les entreprises pétrolières avaient depuis longtemps. Ces dernières ont alors orienté leurs stratégies de relations publiques avec l'idée « d'accentuer l'incertitude ». Il y a eu les premiers groupes climato-sceptiques, les premiers ouvrages sur le sujet comme celui de Fred Singer, qui a également créé en 1990 le Science & Environmental Policy Project (SEPP), qui a été domicilié à la même adresse que les bureaux du réseau Atlas, et ensuite de la Fondation Charles Koch. Pour autant que je sache, toutes les campagnes pour s'opposer aux politiques climatiques depuis la fin des années 80 ont des liens, d'une nature ou d'une autre, avec le réseau Atlas. Et je pense que cette opposition aux politiques climatiques est l'un des enjeux clés derrière l'expansion massive du réseau (d'une quarantaine de think tanks fin des années 90 à plus de 500 aujourd'hui).
Dans plusieurs pays, on voit aussi que ces think tanks portent des idées très conservatrices socialement, à côté du libéralisme économique, et se rapprochent de l'extrême-droite. A quoi est lié cet agenda réactionnaire selon vous ?
Il n'y a rien de libéral dans le néo-libéralisme : ils travaillent pour les multinationales, ils ne veulent pas de taxes sur les entreprises, pas d'obstacles aux transferts des capitaux, ils veulent maximiser les profits… La démocratie ne les arrange pas forcément. Ils ne veulent pas d'un parlement fort qui va pouvoir établir des régulations environnementales ou mettre en place des politiques de redistribution. Dans les années 1980 et 1990, ils ont largement gagné la « guerre économique » de la mondialisation : ils ont eu le libre-échange, des tribunaux d'arbitrage, la dérégulation de la finance… Bien sûr, ils continuent à se battre sur le plan économique : on a encore une éducation publique, un système de santé publique, auxquels ils s'attaquent. Mais ils ont beaucoup avancé dans ces domaines là aussi. En Australie, par exemple, les écoles privées reçoivent aujourd'hui plus de fonds que les écoles publiques.
Leur nouveau champ de bataille est la « guerre culturelle », qui leur permet d'avoir des votes, de mobiliser une partie de la population en attisant leurs colères, leurs frustrations.
Aujourd'hui, leur nouveau champ de bataille est la « guerre culturelle ». Ca leur permet d'avoir des votes, de mobiliser une partie de la population en attisant leurs colères, leurs frustrations. C'est plus facile de faire réagir les gens sur les sujets de « guerre culturelle » que sur la dérégulation bancaire. Et puis ils peuvent utiliser les idées réactionnaires pour pousser leurs intérêts. Par exemple, ils détestent les aides sociales. Pour les attaquer ils vont utiliser le cliché de la « black welfare queen », c'est-à-dire la mère célibataire afro-américaine qui profite de l'État providence. Cela permet d'avoir le soutien de personnes racistes. En Australie, le racisme a été mobilisé stratégiquement dans la campagne pour s'opposer au référendum accordant des droits aux communautés aborigènes. Et ce, même si l'opposition de départ des think tanks du réseau Atlas repose davantage en réalité sur le fait que donner aux aborigènes une Voix permanente au Parlement national menace l'accès des industries extractives à leurs terres.
Parce que le débat démocratique mérite mieux que la com' du CAC 40.
Faites un donCette campagne contre le référendum « The Voice » est l'un des récent succès du réseau Atlas en Australie. Comment est-ce qu'ils s'y sont pris ?
Il faut savoir que l'Australie est un pays très riche en ressources minérales. Et aussi un État qui n'a pas reconnu ses populations indigènes dans sa constitution. L'an dernier, il y a eu une tentative pour obtenir cette reconnaissance, et le réseau Atlas s'est mobilisé pour que ça échoue. On est passé de 65 % de soutien à la reconnaissance des droits des aborigènes à 40 %. Ils ont été très efficaces, ils ont trouvé un homme et une femme issus de communautés aborigènes qui étaient liés depuis des années à leur think tanks, qui étaient là pour répéter les slogans qu'ils avaient conçus contre le référendum. Et ils les ont envoyés partout, dans tous les médias, tout le temps, comme s'ils représentaient une opinion majoritaire parmi les aborigènes. Ce qui n'était absolument pas le cas.
Les droits constitutionnels des communautés aborigènes sont aussi remis en cause, parce qu'ils sont des obstacles au développement pétrolier et minier, chez notre voisin néo-zélandais. Le traité de Waitangi de 1840 reconnaît les droits préexistants des Maori à la terre et leur assure une position forte au Parlement. Les think tanks Atlas étaient très opposés à la politique de Jacinda Ardern et ont mené des campagnes contre elle, jouant sur les colères des électeurs autour de la gestion de la crise du covid ou l'opposition au vaccin. Maintenant, le nouveau gouvernement veut s'attaquer aux droits des populations indigènes et au traité de Waitangi. Parmi les ministres, on trouve David Seymour, qui sera vice-premier ministre à partir de mars 2025 (selon l'accord de coalition), et qui a travaillé pour des think tanks du réseau Atlas au Canada (Frontier centre for public policy et Manning Center) et a suivi un programme de formation de l'Atlas Network, le think tank MBA.
Sur quels autres sujets les partenaires d'Atlas en Australie sont-ils mobilisés ?
En parlant constamment du nucléaire dans les médias, les think tanks du réseau Atlas ont réussi à changer les termes du débat public.
En Australie, nous avons sept ou huit partenaires du réseau Atlas, les deux plus gros étant l'Institute of Public Affairs (IPA) et le CIS, l'un portant des discours qui vont apparaître plus raisonnables, à destination des classes moyennes, du monde du business, et l'autre beaucoup plus virulent et radical. Mais tous coordonnent dans une certaine mesure leurs campagnes. En ce moment, on a une énorme campagne visant à convaincre le public qu'il y a besoin d'énergie nucléaire en Australie. Ce qui est fou, c'est que personne ne proposait ça sérieusement avant. On s'est opposés aux mines d'uranium, aux essais nucléaires français dans le Pacifique... Et aujourd'hui, alors que l'on pourrait avoir un déploiement massif des énergies renouvelables, avec du solaire et de l'éolien peu coûteux, on a cette idée ridicule qu'on aurait besoin de nucléaire. Les réacteurs, on mettrait dix à vingt ans à les construire, on n'a pas les ressources en eau pour les refroidir, et les « mini-réacteurs » dont on nous parle, ça n'existe pas et aucune communauté n'en voudra à côté de chez elle. Tout ça vise à empêcher que l'on développe les renouvelables le plus vite possible, avec notre potentiel énorme. Mais, en parlant constamment du nucléaire dans les médias, les think tanks du réseau Atlas ont réussi à changer les termes du débat public, et les oppositions se sont engouffrées dedans.
Ils ont aussi des campagnes systématiques contre l'éolien offshore, qui permettrait de se passer de l'électricité à base de charbon ou de gaz dans les grandes villes. Elles sont menées sur le même modèle que les campagnes similaires aux États-Unis, avec des fausses informations conçues là-bas et diffusées à travers des groupes Facebook ou d'autres canaux. D'une part, il va y avoir de fausses « associations locales » (community groups) qui sont montées. Aux États-Unis, des journalistes ont montré que des partenaires d'Atlas étaient derrière, comme le Caesar Rodney Institute ou le Heartland Institute. En Australie, c'est pareil : on se retrouve face à des organisations un peu mystérieuses, et derrière on se rend compte que leurs « experts » ont des liens avec l'IPA, le CIS ou d'autres think tanks du réseau. Et d'autre part, ces campagnes se basent sur une fake news » : que les éoliennes offshore tueraient les baleines. Ce n'est pas vrai, mais ils le répètent partout.
Comment ces think tanks peuvent-ils avoir autant d'influence, et comment pourrait-on la réduire ?
Ils ont des entreprises et fondations très puissantes derrière eux – on a déjà parlé des géants du gaz et du pétrole, des banquiers. Mais il y a aussi des liens avec l'empire Murdoch par exemple. Le père de Rupert Murdoch, Keith Murdoch, a été l'un des co-fondateur de l'IPA en Australie. Et ces think tanks ont toujours quelqu'un de prêt à aller à une interview à la télévision. Ici les médias sont très concentrés, et les médias Murdoch sont dominants.
Les porte-parole des partenaires du réseau Atlas peuvent aller y dire ce que les entreprises ne peuvent pas exprimer directement, sans être accusés de défendre des intérêts établis. Ils se font appeler « Instituts » pour avoir l'air universitaire, ils se qualifient de « fellow », « researchers », mais ils ne sont pas vraiment des centres de recherche. D'ailleurs, ils passent aussi du temps à tenter de discréditer de vrais chercheurs, notamment en sciences sociales. Comme ils le formulent eux-mêmes, leur rôle est de « propagandiser » des idées pour le compte d'entreprises qui restent cachées. C'est de la propagande car ils trompent le public à des fins politiques. Ils diffusent des messages qui sont faux : les changements climatiques n'existent pas, les éoliennes tuent les baleines, les communautés aborigènes ne veulent pas la reconnaissance de leurs droits… Et ils cachent les intérêts commerciaux qu'ils défendent (ceux de très grandes entreprises) ainsi que le fait qu'ils coordonnent leur action à travers le réseau Atlas.
Il est donc important d'exposer ces liens et ces intérêts. De préciser qu'une personne appartient au réseau Atlas quand elle s'exprime pour influencer l'opinion ou les décideurs. Ils détestent ça. Leur succès tient aussi au fait qu'ils bombardent le public de messages prétendument « indépendants » en faisant croire qu'ils viennent de plusieurs sources, alors qu'ils viennent tous d'une même source : le réseau Atlas et ses alliés les médias. Ils n'aiment donc pas qu'on montre ça non plus.
Propos recueillis par Anne-Sophie Simpere
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Photo : King Coal, sculpture de Louis Pratt, par Ashlet cc by-nc-nd