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01.11.2025 à 10:47

Tchéky Karyo – L’âme derrière le regard

Romain Leclaire
Il y a des présences qui marquent la pellicule de manière indélébile. Celle de Tchéky Karyo en est une. Un visage taillé à la serpe, une mâchoire carrée qui suggère la détermination ou la menace, et surtout, un regard perçant, d’une intelligence acérée, capable de sonder les âmes ou de dissimuler les secrets les plus […]
Texte intégral (4859 mots)
Portrait de Tchéky Karyo, un homme à l'allure déterminée, avec un visage marqué par le temps et une expression intense. Il porte un costume sombre et affiche une barbe grisonnante, évoquant sagesse et expérience.

Il y a des présences qui marquent la pellicule de manière indélébile. Celle de Tchéky Karyo en est une. Un visage taillé à la serpe, une mâchoire carrée qui suggère la détermination ou la menace, et surtout, un regard perçant, d’une intelligence acérée, capable de sonder les âmes ou de dissimuler les secrets les plus profonds. À cette physionomie s’ajoute une voix, grave et rocailleuse, qui confère à ses personnages une autorité naturelle, une gravité qui impose le respect ou la crainte. Pendant plus de quarante ans, cette combinaison a fait de lui l’une des figures les plus reconnaissables et les plus magnétiques du cinéma français et international, l’incarnation d’une certaine forme de puissance contenue. Il était le mentor, l’antagoniste complexe, le policier usé par la vie, le chasseur confronté à sa conscience.

Pourtant, réduire Tchéky Karyo à cette image de force tranquille ou de danger latent serait passer à côté de l’essentiel. Derrière le masque de l’homme d’action se cachait un artiste complet, d’une sensibilité profonde et d’une polyvalence surprenante. Sa carrière, loin d’être une simple succession de rôles, fut une exploration continue de l’identité, de la moralité et de la condition humaine. C’est un voyage qui l’a mené des planches des théâtres les plus prestigieux aux plateaux des plus grands blockbusters hollywoodiens, sans jamais perdre le fil d’une quête intérieure. L’annonce de son décès, survenu à l’âge de 72 ans des suites d’un cancer, invite à une relecture de ce parcours exceptionnel. Cet hommage se veut un regard au-delà des personnages iconiques pour découvrir l’homme (le fils, le père, le musicien, l’acteur à la formation classique) dont la vie a forgé l’âme que l’on devinait à l’écran.

Portrait d'un homme en costume noir portant un chapeau noir, se tenant devant une fenêtre avec des rideaux. Son expression est sérieuse et réfléchie.

La force de Tchéky ne résidait pas seulement dans son talent à incarner la puissance physique, mais dans sa manière de la doubler d’une profondeur intellectuelle ou émotionnelle. Ses personnages les plus mémorables ne sont pas de simples « durs », ce sont des hommes qui comprennent la nature et le coût de la violence, du pouvoir et des choix moraux. Que ce soit le formateur ambigu de Nikita ou le détective empathique de The Missing, ses interprétations sont empreintes d’une gravité qui les rend inoubliables, car elles suggèrent une riche vie intérieure derrière une façade impénétrable. C’est cette dualité, cette puissance maîtrisée, qui est devenue sa signature artistique.

D’Istanbul à Strasbourg – La forge d’un acteur

Le voyage de Tchéky Karyo commence loin des projecteurs parisiens, sur les rives du Bosphore. Né Baruh Djaki Karyo le 4 octobre 1953 à Istanbul, il porte en lui un héritage culturel d’une richesse exceptionnelle. Sa mère est une juive grecque et son père est issu d’une famille juive séfarade de Turquie, dont les racines remontent à l’Espagne de l’Inquisition. Ce berceau cosmopolite, ce carrefour des civilisations, a sans doute jeté les bases de sa future aisance à naviguer entre les cultures et les langues, une compétence qui définira sa carrière internationale.

Portrait de Tchéky Karyo, un acteur français avec des cheveux frisés et un pull noir et rouge, affichant un regard intense et pensif.

Cet héritage est également marqué par la tragédie. Dans une rare et émouvante confidence, l’acteur a révélé la souffrance de sa famille maternelle durant la Shoah. Originaires de Salonique, ses proches ont subi la violence du nazisme. Une partie de sa famille fut déportée, tandis que sa mère, cachée en France, dut fuir à de multiples reprises des familles qui la maltraitaient. Cette histoire, celle de juifs espagnols accueillis par l’Empire ottoman après l’expulsion de 1492 et qui parlaient le ladino, est une mémoire de déracinement et de résilience qui a profondément marqué l’homme et l’artiste.

La famille s’installe ensuite à Paris, où le jeune Baruh Djaki devient « Tchéky », une translittération francisée de son prénom. Son enfance est marquée par la séparation de ses parents à l’âge de 13 ans, un événement qui le pousse vers une indépendance précoce. C’est dans l’art qu’il trouve un refuge et une voie. Il se tourne vers le théâtre, d’abord au Cyrano où il se frotte au répertoire classique, puis en intégrant la prestigieuse École Supérieure d’Art Dramatique du Théâtre National de Strasbourg (TNS) en 1975. Au sein du « groupe 17 » de la section jeu, il reçoit l’enseignement de maîtres comme Philippe Clévenot et Jean-Pierre Vincent, qui lui inculquent une discipline technique et un profond respect pour son art. Il fait ses armes sur les planches avec la compagnie Daniel Sorano et se produit au Festival d’Avignon à la fin des années 70, s’imposant comme une force théâtrale avant même que le cinéma ne le réclame.

Son identité est une mosaïque complexe, né Turc, d’héritage grec et séfarade, élevé en France. Cette multiplicité n’est pas un simple détail biographique, elle est au cœur de son être et de son art. Les traumatismes familiaux et les dislocations de sa jeunesse ont probablement nourri sa quête artistique, faisant de la scène un espace où il pouvait explorer et unifier les différentes facettes de ce qu’il était. Sa maîtrise de plusieurs langues (français, anglais, espagnol, turc et arabe) n’est pas seulement un atout pour une carrière internationale, mais l’expression vivante de cet héritage pluriel. Comme il le confiera plus tard, « Ce métier m’a aidé à devenir un homme meilleur ». Pour lui, le jeu n’était pas une simple profession, mais un moyen de synthèse, un refuge où les complexités de son histoire personnelle pouvaient être transcendées et transformées en art.

La Révélation – La Balance et le nouveau visage du cinéma français

L’année 1982 marque l’entrée fracassante de Tchéky Karyo dans le monde du cinéma. Il apparaît dans pas moins de quatre films, dont des œuvres d’auteurs reconnus comme Toute une nuit de Chantal Akerman et Le Retour de Martin Guerre de Daniel Vigne, témoignant de son immersion immédiate dans un cinéma français exigeant. Mais c’est le dernier de ces quatre films qui va changer sa destinée.

Le tournant de sa carrière est son rôle de Petrovic, un gangster violent et charismatique, dans le polar urbain et brutal de Bob Swaim, La Balance. Le film, un immense succès critique et public, est un électrochoc pour le cinéma français. Avec sa performance brute, intense et magnétique, il crève l’écran. Il incarne une nouvelle forme de menace, loin des truands stylisés du passé, plus viscérale, plus psychologique, plus moderne. C’est ce rôle qui, selon ses propres termes, lui « ouvre les portes du cinéma ».

Scène de film montrant deux hommes en costume, l'un avec un pistolet, dans un environnement urbain.

La reconnaissance est immédiate. Le film récolte sept nominations aux Césars, et Tchéky Karyo est nommé dans la catégorie du meilleur espoir masculin. Fait notable, ce sera sa seule et unique nomination, ce qui souligne l’impact foudroyant de cette première grande performance. En 1986, il reçoit le prestigieux Prix Jean-Gabin, qui vient confirmer son statut d’acteur majeur de sa génération, un talent sur lequel il faudra désormais compter.

Le rôle de Petrovic est un acte fondateur. Il établit dès le départ les piliers de sa persona à l’écran. En un seul film, il devient synonyme d’une masculinité complexe, à la fois séduisante et dangereuse. Cet archétype du méchant intelligent et redoutable deviendra la pierre angulaire de sa carrière, notamment à l’international, où les réalisateurs hollywoodiens verront en lui l’antagoniste européen parfait. De Bad Boys à GoldenEye, l’ombre de ce personnage planera sur nombre de ses rôles, preuve de la puissance durable d’une seule performance parfaitement maîtrisée.

Les piliers d’une carrière – Analyse de rôles iconiques

La filmographie de Tchéky Karyo est jalonnée de performances qui ont non seulement défini sa carrière, mais aussi marqué leur époque. Quatre rôles, en particulier, illustrent son évolution et l’étendue de son talent.

L’Ours (1988) : Le dialogue du silence

En 1988, Jean-Jacques Annaud réalise un pari cinématographique fou, un film raconté du point de vue des animaux, avec un dialogue humain quasi inexistant. Dans L’Ours, Tchéky Karyo incarne Tom, l’un des deux chasseurs traquant un immense ours kodiak. Le défi est immense, comment construire un personnage et raconter une histoire sans le secours des mots? L’acteur y parvient avec une maîtrise stupéfiante. Par sa seule présence physique, ses gestes et l’intensité de son regard, il dépeint un arc narratif complet. Il est d’abord le chasseur déterminé, puis l’homme confronté à la puissance brute de la nature, et enfin l’individu humble, transformé par un acte de miséricorde inattendu. La scène pivot où l’ours, le tenant à sa merci, choisit de l’épargner est une leçon de jeu non verbal. Le visage de Karyo exprime un mélange de terreur, d’incompréhension et de respect qui bascule en une prise de conscience profonde. Le film est un triomphe, attirant près de neuf millions de spectateurs en France et consolidant son statut de star. Sa performance est saluée comme une « belle perf », un exploit dans un film où les acteurs humains auraient pu n’être que des faire-valoir.

Deux hommes en tête-à-tête sur un paysage montagneux, l'un avec un chapeau noir et une barbe, l'autre avec un chapeau similaire, tous deux semblant dans une conversation tendue.

Nikita (1990) – Le mentor dans l’ombre

Deux ans plus tard, Tchéky décroche le rôle qui le fera connaître dans le monde entier, celui de Bob dans Nikita de Luc Besson. Il y incarne un agent des services secrets, froid et énigmatique, chargé de transformer une jeune délinquante toxicomane en une machine à tuer pour le compte de l’État. Son personnage est l’incarnation de l’ambiguïté morale. Il est à la fois un mentor, une figure paternelle de substitution et un manipulateur implacable. L’acteur livre une composition tout en retenue, où la moindre inflexion de voix ou le plus petit frémissement du regard trahit des sentiments complexes sous une surface glaciale.

Une scène du film _Nikita_ où un personnage tient une arme sur le cou d'un autre, illustrant une tension dramatique entre les deux.

Deux anecdotes de tournage révèlent les coulisses de cette performance iconique. La première concerne son engagement. Luc Besson, certain de son choix, le supplia d’accepter le rôle sans même lire le scénario, lui expliquant simplement que Bob faisait partie d’un « trio de personnages dont il rêve ». Fort d’une confiance aveugle en la vision du réalisateur, Karyo accepta les yeux fermés. La seconde anecdote est plus légère. Lors du tournage de l’unique scène réunissant Nikita (Anne Parillaud), son amant Marco (Jean-Hugues Anglade) et Bob, Tchéky Karyo fut pris d’un fou rire incontrôlable. Pour préserver le sérieux de son personnage, il dut tourner ses gros plans seul, face au vide, une illustration amusante du décalage entre l’homme et l’acteur. Le succès international de Nikita le propulse sur la scène mondiale et lui vaut le prix du Meilleur Acteur au festival Mystfest.

La scène mondiale – De l’antagoniste hollywoodien à la star internationale

Grâce à Nikita, Hollywood lui ouvre grand ses portes. Sa maîtrise de l’anglais et d’autres langues, alliée à son charisme et à sa capacité à incarner une menace sophistiquée, fait de lui un second rôle de choix pour de nombreuses superproductions. Il devient l’un des « méchants » européens les plus mémorables des années 90. En 1995, il est l’inoubliable et sadique baron de la drogue français, Antoine Fouchet, face à Will Smith et Martin Lawrence dans Bad Boys de Michael Bay. La même année, il rejoint la mythique franchise James Bond dans GoldenEye, où il interprète Dmitri Mishkin, le ministre russe de la Défense, un personnage droit mais inflexible.

Sa carrière américaine ne se limite cependant pas aux rôles d’antagonistes. En 2000, il offre une performance noble et touchante dans The Patriot de Roland Emmerich. Il y joue le Major Jean Villeneuve, un officier français qui vient prêter main-forte aux miliciens américains durant la Guerre d’Indépendance. Ce rôle, inspiré du Baron von Steuben, lui permet de montrer une facette plus héroïque de son talent. Preuve de son dévouement, il assure lui-même le doublage de son personnage pour la version française du film. Au fil des ans, il collabore avec des réalisateurs de renom comme Ridley Scott (1492 : Christophe Colomb) et côtoie les plus grandes stars, de Gérard Depardieu à Mel Gibson, s’imposant comme un acteur respecté et fiable sur la scène internationale.

Le patriarche moderne – The Missing et le triomphe de la sagesse

Alors que sa carrière cinématographique se poursuit, c’est la télévision qui lui offre, sur le tard, l’un de ses plus beaux rôles, celui qui deviendra une nouvelle signature. De 2014 à 2016, il incarne le détective français Julien Baptiste dans la série britannique de la BBC, The Missing. Le succès est tel qu’un spin-off centré sur son personnage, Baptiste, voit le jour en 2019. Ce rôle lui vaut une reconnaissance critique unanime et une nomination au Festival de Télévision de Monte-Carlo.

Un homme à l'air pensif tient un talkie-walkie, vêtu d'un manteau noir, avec une légère barbe grise et des lunettes. En arrière-plan, une rue floue avec des voitures.

Julien Baptiste est en quelque sorte la synthèse de toute sa carrière. C’est un homme d’une intelligence et d’une perspicacité redoutables, comme Bob dans Nikita, mais dont la force ne réside plus dans la manipulation ou la violence, mais dans l’empathie, la patience et une humanité profonde. Hanté par les disparitions d’enfants sur lesquelles il enquête, il est obstiné, sage, et profondément touchant. Le public du monde entier s’attache à ce personnage complexe, qui représente une forme de boussole morale dans un monde obscur.

Pourtant, ce rôle qui a redéfini la fin de sa carrière, il a bien failli le refuser. Une anecdote poignante révèle que le tournage de la première saison de The Missing coïncidait avec la naissance de sa propre fille. Le sujet de la série, la disparition d’un enfant, le rendait si anxieux qu’il s’est d’abord retiré du projet. Ce n’est qu’à la dernière minute, après l’insistance du réalisateur, qu’il a accepté de revenir. Cette décision, motivée par une angoisse de père, a paradoxalement nourri son interprétation et lui a permis de livrer la performance la plus humaine et la plus sage de sa carrière.

Ce parcours illustre une fascinante évolution. L’acteur qui a débuté en incarnant la menace physique brute (La Balance) a progressivement évolué vers des figures de contrôle psychologique (Nikita), pour finalement atteindre un sommet en incarnant une autorité morale et empathique (The Missing). C’est le cheminement d’un artiste qui a su approfondir son exploration de la force, la faisant passer de l’extérieur vers l’intérieur, de la puissance qui détruit à la sagesse qui répare.

L’autre scène – La musique de Tchéky Karyo

Au-delà de l’acteur se trouve une autre facette, moins connue du grand public mais tout aussi essentielle à l’homme, le musicien. Loin d’être un simple passe-temps, la musique a représenté pour Tchéky Karyo un espace d’expression intime et personnel, un lieu où il pouvait parler avec sa propre voix, sans le filtre d’un personnage.

Il se lance officiellement dans la musique en 2006 avec un premier album, Ce lien qui nous unit. Ce titre évocateur suggère déjà les thèmes qui lui sont chers: la connexion, la mémoire, les relations humaines. Sept ans plus tard, en 2013, pour son soixantième anniversaire, il sort un deuxième opus, Credo. Cet album, plus ambitieux encore, témoigne de la maturité de sa démarche artistique. Il collabore avec des plumes reconnues comme le poète Zéno Bianu et Jean Fauque (parolier d’Alain Bashung), et confie la création de la pochette au célèbre dessinateur Enki Bilal. Ces choix artistiques exigeants montrent que sa musique n’est pas une simple récréation, mais une véritable quête esthétique et poétique.

Son style musical se situe à la croisée de la chanson française à texte et d’un rock à la fois énergique et mélancolique. Sur scène, accompagné de son groupe « Les Bienveillants », il se révèle être un interprète charismatique, sa voix grave et profonde trouvant un nouvel écrin. Il a lui-même décrit ce passage à la musique, survenu autour de la cinquantaine, comme un désir de se renouveler. Si le métier d’acteur consiste à se mettre au service d’une vision, d’un texte et d’un personnage, la musique lui a offert une liberté totale. Elle était l’espace où l’homme à l’histoire complexe pouvait exprimer directement sa philosophie, ses doutes et ses convictions. C’était la voix derrière le masque, l’expression non médiatisée de l’âme de l’artiste.

L’empreinte d’un artiste complet

Tchéky Karyo laisse derrière lui une empreinte unique et durable dans le paysage cinématographique. Il fut un pont entre les mondes: entre le cinéma d’auteur français et les blockbusters internationaux, entre la rigueur du théâtre classique et l’énergie brute de l’écran, entre l’Europe et l’Amérique. Sa facilité à être crédible en gangster parisien, en chasseur en Colombie-Britannique, en officier français du XVIIIe siècle ou en détective contemporain témoigne d’une rare polyvalence, nourrie par une curiosité insatiable pour les cultures et les langues.

Pour lui, l’art dramatique était un espace réservé et magique permettant une introspection et une prise de recul sur soi-même. Cette vision de son métier comme un chemin de vie, une quête de soi, éclaire l’ensemble de son parcours. Chaque rôle, même le plus sombre, semble avoir été une étape dans cette quête d’humanité.

L’image finale que l’on gardera de lui ne sera pas seulement celle du chasseur, de l’espion ou du détective. Ce sera celle d’un artiste complet, dont le regard intense n’était pas un signe de dureté, mais la fenêtre ouverte sur une âme riche, complexe et profondément sensible. L’acteur n’est plus, mais son empreinte sur le cinéma, elle, demeure. Et l’âme derrière le regard continue de nous parler.

01.11.2025 à 09:19

Elon Musk – Des chats écrasés aux voitures volantes, le grand cirque de la distraction

Romain Leclaire
Entre deux tentatives pour devenir le premier trillionnaire au monde, l’expansion de son entreprise de contrats de défense, sa lutte acharnée contre le « virus mental woke », ses querelles avec Sam Altman et la supervision d’une demi-douzaine de sociétés technologiques, Elon Musk a miraculeusement trouvé le temps de s’immiscer dans un débat local à […]
Texte intégral (1333 mots)

Entre deux tentatives pour devenir le premier trillionnaire au monde, l’expansion de son entreprise de contrats de défense, sa lutte acharnée contre le « virus mental woke », ses querelles avec Sam Altman et la supervision d’une demi-douzaine de sociétés technologiques, Elon Musk a miraculeusement trouvé le temps de s’immiscer dans un débat local à San Francisco. Le sujet ? Un chat de quartier bien-aimé, écrasé par un robotaxi Waymo.

Si vous l’aviez manqué, un drame félin s’est noué cette semaine. KitKat, surnommé « le maire de la 16e rue » et pilier du Randa’s Market, a été tué. Waymo, l’entreprise responsable, a plus ou moins admis sa culpabilité, expliquant que l’animal s’était précipité sous l’un de ses véhicules alors qu’il démarrait. Une tragédie locale, certes, mais qui aurait dû le rester.

C’était sans compter sur l’intervention du grand oracle de la tech. Alors que la communauté pleurait KitKat, Elon Musk a choisi son camp. Il a retweeté un compte affirmant que l’autonomie sauverait les animaux, citant que « 5,4 millions de chats sont heurtés par des voitures chaque année aux États-Unis ». La réponse du milliardaire ? Un laconique et suffisant: « C’est vrai, de nombreux animaux de compagnie seront sauvés par l’autonomie ».

Quelle magnanimité. C’est formidable que Elon ait pu dégager quelques minutes dans son emploi du temps de sauveur du monde pour participer au discours sur un chat. Mais ne soyons pas dupes. Il est surtout sur le point de lancer son propre service de robotaxi. Il n’est donc pas un observateur neutre mais un concurrent direct de Waymo qui utilise cette tragédie pour vanter sa propre technologie, encore inexistante sur le marché.

Mais si commenter la mort d’un chat pour un gain commercial est mesquin, le véritable talent du patron de Tesla réside dans l’art de la distraction à grande échelle. Et pour cela, rien ne vaut une apparition chez Joe Rogan (un podcasteur américain controversé). Vendredi dernier, au milieu de sujets déjà ressassés, il a décidé de lâcher une « nouvelle »: il veut faire la démonstration d’une voiture volante d’ici la fin de l’année.

Arrêtez-nous une seconde. Musk parle de voitures volantes depuis au moins 2014. Le Roadster de deuxième génération, promis pour 2020, est devenu l’Arlésienne de l’industrie automobile. Interrogé par le podcasteur sur son statut, Musk a lentement admis qu’il voulait le faire voler. « Nous approchons de… », dit-il avec une longue pause, « …la démonstration du prototype. Une chose que je peux garantir, c’est que cette démo de produit sera inoubliable. Inoubliable. » Il a fallu un certain temps pour que Rogan comprenne. « Que ce soit bon ou mauvais, ce sera inoubliable », a ajouté le milliardaire en riant. Il a ensuite évoqué son ami Peter Thiel, un autre milliardaire d’extrême-droite, qui se plaignait que l’avenir n’ait pas tenu sa promesse de voitures volantes.

Il ne faut pas être grand clerc pour décoder la manœuvre. Musk adore déployer des prototypes et des idées bien avant qu’ils ne soient prêts. Vous souvenez-vous de l’Hyperloop, ce système de transport de masse autonome à 250 km/h ? Il a accouché d’un tunnel à Las Vegas où des chauffeurs humains conduisent des Teslas à faible vitesse. Une démonstration n’est pas un produit. C’est du spectacle. Et pourquoi ce spectacle maintenant ? La réponse est simple, les ventes de Tesla sont dans les choux. Depuis que Musk a aligné sa marque sur le trumpisme et s’est permis des saluts de style nazi, le cœur de sa clientèle s’est érodé. La voiture volante n’est pas une innovation, c’est un écran de fumée, une distraction clinquante pour faire oublier que l’empereur est nu et que ses affaires périclitent.

Et quand la distraction terrestre ne suffit plus, il y a toujours l’espace. L’IA exige une puissance de calcul et de stockage colossale et l’intérêt pour les centres de données spatiaux explose. Eric Schmidt et Jeff Bezos y investissent. Alors, qui voilà sur X ? Elon Musk, bien sûr. Répondant à un article sur le sujet, il déclare: « Il suffirait de mettre à l’échelle les satellites Starlink V3… SpaceX le fera. » Son intérêt réhausse le profil de l’industrie, mais le schéma est le même. Elon Musk se positionne sur chaque nouvelle frontière technologique, non pas nécessairement pour innover, mais pour posséder le narratif.

Que ce soit sur le bitume ensanglanté de San Francisco, dans les studios enfumés de Joe Rogan ou dans le vide de l’espace, l’objectif reste le même. Il s’agit pour cet oligarque de s’assurer que, quelle que soit la conversation sur l’avenir, il en est le centre. La voiture volante de James Bond, comme il la décrit, n’est peut-être qu’un VTOL (un hélicoptère glorifié), mais peu importe. L’important n’est pas ce qu’il livre, c’est ce qu’il promet, nous faisant oublier les controverses d’aujourd’hui.

01.11.2025 à 08:18

Bluesky réinvente ses conversations – Le bouton « J’aime pas » et le « quartier social »

Romain Leclaire
Bluesky, l’alternative décentralisée, vient de franchir fièrement le cap des 40 millions d’utilisateurs. Loin de se contenter de sa croissance, elle est en pleine phase d’expérimentation, cherchant activement à améliorer la qualité des conversations en son sein. L’annonce la plus surprenante ? L’introduction imminente d’un bouton « Je n’aime pas » (dislike). Mais ne vous y trompez […]
Texte intégral (1681 mots)
Ciel bleu clair avec quelques nuages blancs épars et des rayons de soleil illuminant la scène.

Bluesky, l’alternative décentralisée, vient de franchir fièrement le cap des 40 millions d’utilisateurs. Loin de se contenter de sa croissance, elle est en pleine phase d’expérimentation, cherchant activement à améliorer la qualité des conversations en son sein. L’annonce la plus surprenante ? L’introduction imminente d’un bouton « Je n’aime pas » (dislike).

Mais ne vous y trompez pas, il ne s’agit pas de céder à la tentation d’un indicateur de popularité négative. Ce nouvel outil, qui sera testé en version bêta, vise à redéfinir la manière dont nous interagissons en ligne. Bluesky ne veut pas seulement que vous voyiez moins de publications indésirables, l’entreprise veut que vous vous sentiez chez vous. Cette nouvelle option fait suite à une période de troubles où certains utilisateurs ont vivement critiqué la plateforme pour sa gestion de la modération, lui reprochant de ne pas bannir assez fermement les « mauvais acteurs » ou les personnalités controversées qui enfreindraient les directives de la communauté.

Fidèle à sa philosophie décentralisée, elle ne répond pas par une modération centralisée accrue, à la manière de l’ancien Twitter. Elle préfère se concentrer sur les outils qu’elle fournit à ses utilisateurs pour leur permettre de contrôler leur propre expérience. L’objectif affiché est de cultiver un espace propice aux échanges amusants, authentiques et respectueux.

Logo de Bluesky représentant un papillon blanc sur un fond bleu.

La pierre angulaire de cette nouvelle vision est un concept fascinant que Bluesky nomme la « proximité sociale », ou plus poétiquement, le « quartier social » (social neighborhood). L’idée est simple en théorie mais complexe en pratique: cartographier votre place au sein d’un écosystème d’interactions. Le système cherche à comprendre qui sont les gens avec qui vous interagissez déjà ou que vous aimeriez probablement connaître.

Une fois ce « quartier » défini, l’algorithme s’efforcera de donner la priorité aux réponses et aux publications provenant des personnes qui en font partie. L’entreprise est convaincue qu’en favorisant la familiarité, les conversations deviendront plus pertinentes, plus agréables et, surtout, moins sujettes aux malentendus qui naissent souvent d’interactions hors contexte avec de parfaits inconnus.

C’est ici que le fameux bouton « J’aime pas » entre en scène. Bluesky précise qu’il s’agira d’un signal privé, non visible publiquement par les autres utilisateurs. Son rôle premier sera d’aider le système à comprendre ce que vous ne voulez pas voir, affinant ainsi la personnalisation de votre fil principal « Discover ». Mais son influence ne s’arrête pas là. Ce signal pourrait également affecter le classement des réponses, non seulement dans vos propres fils de discussion, mais aussi dans ceux des autres membres de votre quartier social. C’est une manière douce et collective de réguler le ton des échanges au sein d’une communauté connectée.

D’autres ajustements viennent renforcer cette logique. Bluesky s’attaque par exemple à la réponse impulsive. Nous avons tous déjà répondu à une publication sans lire l’intégralité de la conversation. Pour y remédier, le bouton « Répondre » va être modifié. Désormais, un clic sur ce dernier vous présentera d’abord l’intégralité du fil de discussion, plutôt que de vous jeter directement dans un écran de composition vide. L’objectif est d’encourager la lecture avant l’écriture, afin de réduire l’effondrement du contexte et les réponses redondantes, un fléau bien connu des réseaux de microblogging. Parallèlement, un nouveau modèle de détection est en cours de déploiement pour identifier plus efficacement les réponses toxiques, relevant du spam, hors sujet ou postées de mauvaise foi. Ces commentaires indésirables seront automatiquement déclassés dans les fils, les résultats de recherche et les notifications.

Bien entendu, cette approche soulève un débat fondamental. D’un côté, on peut y voir une interprétation charitable: Bluesky continue d’étendre sa philosophie de contrôle utilisateur. La plateforme offre déjà des listes de modération, des filtres de contenu, des mots masqués et même la possibilité de détacher les citations pour limiter le « dunking » toxique. D’un autre côté, une lecture moins charitable y voit le risque de renforcer les bulles de filtre. Ce concept de quartier social, s’il est mal équilibré, pourrait se transformer en un moyen d’enfermer les utilisateurs dans leur propre chambre d’écho, plutôt que de s’attaquer aux problèmes de modération à la racine. Dans un quartier socialement homogène et protégé, les critiques ne verraient plus les publications problématiques et les auteurs de ces publications ne seraient plus confrontés à leurs critiques. Si cela peut effectivement réduire le niveau de conflit apparent, cela risque aussi d’étouffer les désaccords productifs et la confrontation d’idées, pourtant essentiels à la vitalité d’un espace public.

Three smartphone screens displaying the Bluesky social media interface. The left screen shows a user profile with the name 'Appoline' and a brief bio. The center screen features a feed of interactions and replies, showcasing various user comments. The right screen presents a text box for composing a new post.

Cette stratégie de quartier vise aussi à résoudre un problème qui handicape Threads de Meta, son concurrent direct. Le fil de Threads peut être incroyablement déroutant, jetant les utilisateurs au milieu de conversations sans aucun contexte. Il est souvent impossible de savoir qui répond à qui et pourquoi vous voyez certains messages. Le système de cartographie sociale de Bluesky, s’il est bien exécuté, pourrait élégamment résoudre ce problème de pertinence à grande échelle.

Face à la crise de la modération qui secoue l’ensemble du web social, Bluesky choisit de ne pas être l’arbitre suprême. Il préfère se positionner comme un fournisseur d’outils sophistiqués, donnant à ses 40 millions d’utilisateurs les clés pour construire leurs propres clôtures, leurs propres places publiques et, désormais, leurs propres quartiers. L’avenir dira si ces derniers deviendront des communautés florissantes ou des ghettos idéologiques.

GIGAWATTS est sur Bluesky

31.10.2025 à 16:32

Course vers la Lune – SpaceX peut-il tenir sa promesse face à la pression chinoise ?

Romain Leclaire
La tension est palpable dans le monde de l’exploration spatiale. Alors que le sentiment grandit que la Chine pourrait bien coiffer les États-Unis au poteau pour le retour des humains sur la Lune, SpaceX vient de briser un silence de près de deux ans. La société d’Elon Musk a publié une mise à jour détaillée […]
Texte intégral (1672 mots)
Une pleine lune illuminée sur fond noir, dégageant une lueur bleue.

La tension est palpable dans le monde de l’exploration spatiale. Alors que le sentiment grandit que la Chine pourrait bien coiffer les États-Unis au poteau pour le retour des humains sur la Lune, SpaceX vient de briser un silence de près de deux ans. La société d’Elon Musk a publié une mise à jour détaillée de son contrat de plusieurs milliards de dollars avec la NASA pour l’alunissage des astronautes du programme Artemis. Dans une longue déclaration, l’entreprise américaine se positionne comme le catalyseur central qui réalisera la vision du projet, établir une présence durable sur la Lune et, à terme, ouvrir la voie vers Mars.

Cette distinction a son importance. L’objectif ultime de SpaceX, martelé par son PDG depuis la création de l’entreprise, a toujours été la planète rouge. La Lune, dans cette optique, est une étape. Elon Musk a d’ailleurs parfois critiqué le programme Artemis de la NASA, le jugeant peu ambitieux et trop dépendant des contractants aérospatiaux traditionnels. Lorsque le milliardaire parle de Starship, son véhicule de nouvelle génération, c’est presque toujours avec Mars en ligne de mire, la Lune n’obtenant que peu de temps d’antenne.

Pourtant, en coulisses, les ingénieurs de SpaceX travaillent d’arrache-pied sur une version lunaire du Starship. Le plan actuel de la NASA est complexe, les astronautes décolleront de la Terre à bord de la capsule Orion de Lockheed Martin. Une fois en orbite lunaire, ils s’amarreront au Starship qui les attendra pour descendre vers le pôle sud de la Lune. Après leur mission, ils utiliseront ce même Starship comme ascenseur pour remonter vers Orion et rentrer chez eux.

Représentation numérique d'une mission spatiale avec des vaisseaux dans l'espace, sur fond de la Terre.

Mais il y a un obstacle technique notable, le ravitaillement, un véritable éléphant dans l’orbite. Le Starship est une bête colossale, mais il consomme tout son carburant simplement pour atteindre l’orbite terrestre basse. Pour aller plus loin, il doit être ravitaillé dans l’espace. Le plan lunaire exige que SpaceX lance d’abord un dépôt de carburant en orbite, puis le remplisse à l’aide d’une flotte de Starships « tankers » (peut-être une douzaine de vols ou plus) avant que le vaisseau lunaire ne puisse faire le plein et partir. C’est cette manœuvre, que Blue Origin avait qualifiée d’immensément complexe et à haut risque lors de sa protestation contre l’attribution du contrat initial, qui constitue le goulot d’étranglement du programme.

SpaceX affirme avoir franchi plusieurs étapes en avance sur le calendrier, notamment sur les systèmes de survie, l’adaptateur d’amarrage avec Orion et les tests de train d’atterrissage. Mais le plus dur reste à faire. Le premier test de transfert de propergol cryogénique entre deux Starships en orbite, prévu au départ pour fin 2025, est désormais repoussé à l’année prochaine. Si l’entreprise surmonte cet obstacle, la récompense est transformationnelle. Le Starship lunaire est gigantesque, offrant un volume habitable de plus de 600 mètres cubes, soit les deux tiers de la Station Spatiale Internationale. Il sera doté d’un ascenseur pour descendre les astronautes et le matériel du haut de la cabine (perchée à 15 étages) jusqu’au sol lunaire. En mode cargo, il pourrait livrer 100 tonnes de matériel (des rovers, des habitats, voire des réacteurs nucléaires) en un seul voyage.

Mais le temps presse. Les échecs répétés des premiers vols d’essai cette année, bien que faisant partie de la méthode de développement itératif de SpaceX, ont accumulé les retards. Ces revers, couplés à l’ampleur de la tâche, font craindre que le programme Artemis ne prenne un retard irrattrapable sur l’initiative chinoise, qui vise un alunissage d’ici 2030 avec une architecture plus traditionnelle, ressemblant à Apollo.

Un vaisseau spatial de SpaceX décollant avec des flammes et de la fumée, entouré de lumières d'une installation de lancement.

Le calendrier officiel de la NASA pour Artemis III, le premier alunissage américain, est fixé à 2027. Cependant, plus personne n’y croit. Le Starship et les nouvelles combinaisons spatiales (développées par Axiom Space) ne seront tout simplement pas prêts. Le chœur des voix affirmant que les États-Unis vont perdre cette seconde course à la Lune s’amplifie. Jim Bridenstine, l’ancien administrateur de la NASA sous Trump, a déclaré au Congrès américain que la défaite était probable. Charlie Bolden, son prédécesseur sous Obama, partage ces doutes, tout en tempérant: « Ce n’est pas grave si nous arrivons en 2031, tant que nous le faisons mieux qu’eux.« 

Cette perspective ne satisfait pas l’administration actuelle. Sean Duffy, l’administrateur par intérim de la NASA, a récemment lancé un appel aux contractants pour trouver des moyens d’accélérer le calendrier. SpaceX et Blue Origin ont confirmé avoir soumis de nouveaux plans. Blue Origin, qui développe son propre atterrisseur (le Blue Moon) pour une mission ultérieure (Artemis V), propose désormais une approche incrémentale utilisant une version modifiée de son plus petit atterrisseur, le Mark 1, qui n’a pas besoin de ravitaillement en orbite.

De son côté, SpaceX a également proposé une architecture simplifiée, sans en dévoiler les détails. La société se dit constamment réactive aux changements d’exigences de la NASA, tout en réaffirmant que le Starship reste la voie la plus rapide pour retourner sur la Lune. L’entreprise a bâti sa réputation sur sa rapidité, et elle a récemment enchaîné les succès avec son vaisseau, réalisant des exploits comme le transfert de propergol dans l’espace et des rallumages de moteurs Raptor. La course est lancée, mais la route est encore longue et le principal adversaire n’est peut-être pas Pékin, mais la complexité vertigineuse du ravitaillement en orbite.

31.10.2025 à 15:40

Creative réinvente l’audio de bureau avec le surprenant hub Re:Imagine

Romain Leclaire
Si vous avez connu l’informatique des années 90, votre cœur va probablement battre un peu plus vite à la simple évocation du nom Creative. Cette entreprise est indissociable de sa gamme légendaire de cartes son Sound Blaster, qui a littéralement donné une voix (et des bandes-son épiques) à nos PC de l’époque. C’était le temps […]
Texte intégral (1745 mots)
Un hub audio modulaire de Creative avec des boutons personnalisables, un écran tactile et des curseurs, conçu pour les créateurs de contenu et les audiophiles.

Si vous avez connu l’informatique des années 90, votre cœur va probablement battre un peu plus vite à la simple évocation du nom Creative. Cette entreprise est indissociable de sa gamme légendaire de cartes son Sound Blaster, qui a littéralement donné une voix (et des bandes-son épiques) à nos PC de l’époque. C’était le temps où l’audio n’était pas un acquis, mais une mise à niveau excitante.

Eh bien, préparez-vous à un sérieux voyage nostalgique, car la marque est de retour. Mais ne vous y trompez pas, elle ne se contente pas de dépoussiérer un vieux nom. Elle cherche à le « Re:Imaginer ». Creative vient de dévoiler un tout nouveau produit qui fait la synthèse de son héritage audio et des besoins des créateurs, joueurs et audiophiles modernes avec son hub Re:Imagine. À première vue, cet appareil peut faire penser aux célèbres contrôleurs Stream Deck d’Elgato, devenus incontournables pour les streamers. Mais là où ce dernier se concentre sur les raccourcis visuels, le Re:Imagine place votre équipement audio au centre de l’expérience. Et il le fait avec une ambition remarquable.

Appareil audio modulaire avec boutons et molettes, conçu pour les créateurs et gamers.

La modularité comme philosophie

La caractéristique la plus frappante du Re:Imagine est sa conception modulaire. Nous ne parlons pas de quelques options de couleur mais d’une personnalisation physique profonde. L’appareil est conçu pour que vous puissiez mélanger, assortir et réorganiser à volonté des boutons, des molettes, des curseurs et même des écrans. Ces modules sont magnétiques, vous permettant de cliper les commandes dont vous avez besoin, là où vous en avez besoin. Vous êtes podcasteur ? Mettez en avant les curseurs pour gérer vos différentes pistes audio. Vous êtes streamer ? Privilégiez les boutons pour lancer des scènes ou des effets sonores. Vous êtes un audiophile ? La molette de volume de précision et l’écran tactile seront vos meilleurs amis. Le Re:Imagine s’adapte à votre flux de travail et non l’inverse.

Un véritable « Hub » pour tout votre son

Le mot « hub » n’est pas utilisé à la légère. Le Re:Imagine est conçu pour être le cerveau central de votre installation audio. La connectique est pléthorique: on y trouve de l’USB-C, des entrées micro, ligne et optique, une prise casque 3,5 mm, et un port USB dédié pour la connexion à l’ordinateur. Mais ce n’est pas tout. Il intègre également le Wi-Fi 6 et le Bluetooth, ouvrant la voie à tous vos appareils sans fil, comme votre casque favori.

Image d'un hub audio Re:Imagine de Creative, avec un écran tactile de 3 pouces, des boutons modulaires et des connexions variées. Le design montre plusieurs ports, y compris USB-C et des entrées audio, ainsi que des spécifications techniques comme un DAC haute résolution et un processeur octa-core.

Le véritable atout pour les puristes du son se cache à l’intérieur. Creative, fidèle à sa réputation, a intégré un DAC (convertisseur numérique-analogique) et un amplificateur de haute qualité. L’entreprise affirme que cet ensemble est capable d’alimenter de gros haut-parleurs de bureau de qualité studio. La promesse est de pouvoir acheminer le son d’un appareil à l’autre via les boutons du hub ou son écran tactile, sans plus jamais avoir à jongler avec les câbles derrière votre bureau.

Plus qu’un simple contrôleur audio

Si le Re:Imagine s’était arrêté là, il serait déjà un produit intéressant. Mais Creative a vu beaucoup plus grand. Lorsqu’il est connecté à un PC, ses divers boutons et commandes peuvent être personnalisés pour lancer des applications, déclencher des raccourcis (comme couper le micro lors d’un appel ou démarrer un enregistrement) ou même exécuter des macros programmables complexes.

Et voici la surprise, il peut également contrôler les appareils domestiques intelligents compatibles Matter. Votre hub audio devient soudainement une télécommande pour votre éclairage de studio ou votre thermostat. Pour les plus technophiles, Creative lâche une bombe, l’appareil fonctionne sous Linux, et les utilisateurs auront un accès root complet au matériel. C’est une invitation ouverte aux développeurs pour créer leurs propres applications, trouver des utilisations alternatives et repousser les limites de l’appareil.

Vue d'un hub audio modulaire Creative, affichant les modes 'Standalone' et 'PC Tethered', avec un écran tactile et plusieurs boutons.

Une puissance autonome surprenante

L’appareil n’est pas totalement dépendant d’un PC. Il est alimenté par un processeur octa-core, soutenu par 8 Go de RAM et 16 Go de stockage (extensible via une carte microSD). C’est, en substance, un mini-ordinateur. Il peut faire tourner des applications directement sur son écran tactile de 3 pouces. Creative a même inclus des fonctionnalités étonnantes, un émulateur DOS pour jouer à des jeux rétro (un clin d’œil parfait à l’héritage Sound Blaster !), des assistants alimentés par l’IA et même un « DJ IA » capable de générer de la musique basée sur un thème.

Prix et disponibilité

Pour un projet aussi ambitieux, Creative s’est tourné vers le financement participatif. Une campagne Kickstarter a été lancée. Le prix de vente au détail devrait commencer à 500 $ pour un kit de base comprenant l’unité horizontale, un écran tactile, des modules de boutons, de molette et de curseur. Les participants à la campagne peuvent actuellement le précommander pour 329 $ pour une durée limitée. Il faudra être patient, la livraison est prévue pour juin 2026.

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