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22.07.2025 à 06:00

Mali : L’armée et le groupe Wagner ont exécuté et fait disparaître des civils peuls

Human Rights Watch

Click to expand Image Une photo non datée de combattants russes du groupe Wagner dans le nord du Mali, publiée par l’armée française en 2022. © 2022 Armée française via AP Photo Les forces armées maliennes et leur allié, le groupe Wagner soutenu par la Russie, ont perpétré des dizaines d’exécutions sommaires et de disparitions forcées d’hommes de l’ethnie peule depuis janvier 2025.Les soldats maliens et les combattants du groupe Wagner ont accusé la communauté peule de collaborer avec des groupes armés islamistes qui se battent pour prendre le contrôle de certaines parties du pays.L’Union africaine devrait accroitre ses efforts au Mali pour aider à protéger les civils des abus commis par toutes les parties belligérantes, y compris en soutenant les enquêtes et en faisant pression pour l’ouverture de poursuites équitables.

(Nairobi, le 22 juillet 2025) – Les forces armées maliennes et leur allié, le groupe Wagner soutenu par la Russie, ont perpétré des dizaines d’exécutions sommaires et de disparitions forcées d’hommes de l’ethnie peule depuis janvier 2025, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

L’armée malienne et le groupe Wagner, qui mènent des opérations conjointes contre des groupes armés islamistes depuis plus de trois ans, semblent avoir exécuté au moins 12 hommes peuls et fait disparaître de force au moins 81 autres depuis janvier, dans le cadre d’opérations de contre-insurrection conduites dans plusieurs régions du pays contre le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, ou Jama’at Nusrat al-Islam wa al-Muslimeen, JNIM) lié à Al-Qaïda. Des témoins ont indiqué que des soldats maliens et des combattants du groupe Wagner ont commis des abus contre des personnes appartenant à l’ethnie peule, qu’ils accusent de collaborer avec le GSIM.

« La junte militaire malienne est en fin de compte responsable des exécutions sommaires et des disparitions forcées perpétrées par l’armée et par des combattants du groupe Wagner allié à l’armée », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « La junte devrait mettre fin aux abus, révéler où se trouvent les personnes détenues, mener des enquêtes et traduire les responsables en justice. »

L’Union africaine (UA) devrait faire pression sur la junte militaire malienne pour qu’elle enquête sur ces graves allégations, juge de manière équitable les responsables et accorde des réparations aux familles des victimes, a déclaré Human Rights Watch.

Entre février et mai 2025, Human Rights Watch a mené des entretiens téléphoniques avec 29 personnes ayant eu connaissance des incidents, dont 16 témoins, 7 chefs de communauté, des activistes, des journalistes et des représentants d’organisations internationales. Le 10 juin, Human Rights Watch a adressé aux ministres de la Justice et de la Défense du Mali un courrier exposant ses conclusions et ses questions, mais n’a reçu aucune réponse.

Human Rights Watch a également reçu des informations crédibles, corroborées par les Nations Unies, selon lesquelles l’armée et des combattants de Wagner ont exécuté 65 éleveurs et marchands de bétail peuls du village de Sebabougou, dans la région de Kayes, en avril après les avoir rassemblés et conduits vers un camp de l’armée.

Les groupes armés islamistes, qui sont impliqués dans de nombreux abus graves, ont longtemps concentré leurs efforts de recrutement au sein de la communauté peule. Les gouvernements maliens successifs ont fait l’amalgame entre la communauté peule et les combattants islamistes, mettant les Peuls dans une situation dangereuse.

Le 30 mars, l’armée malienne et des combattants de Wagner sont entrés dans le village de Belidanédji, dans la région de Ségou, et ont exécuté sommairement au moins six civils peuls qui s’enfuyaient ou se cachaient, d’après les récits de témoins. « Ils ont tiré dans dans la poitrine de mon ami devant moi », a raconté un homme de 47 ans. « Lorsque les soldats sont partis, nous avons récupéré cinq corps et évacué un homme blessé, mais il est décédé plus tard à l’hôpital. »

Les forces maliennes et des combattants de Wagner ont mené une opération dans le village de Kourma, dans la région de Ségou, le 19 mars. Un villageois de 50 ans a expliqué : « Ils [les soldats] ont frappé [les villageois] à coups de crosse de fusil avant de les entasser dans un pick-up. » Il a précisé qu’au moins 12 hommes peuls avaient été arrêtés. Leurs proches les ont cherchés dans plusieurs centres de détention, mais les autorités n’ont fourni aucune information sur leur emplacement.

Human Rights Watch documente des abus généralisés commis par l’armée malienne et le groupe Wagner lors d’opérations de contre-insurrection à travers le pays depuis 2021. Le 6 juin, le groupe Wagner a annoncé qu’il se retirait du Mali après avoir « accompli » sa mission. Des sources au sein des services de diplomatie et de sécurité ont déclaré aux médias que les combattants de Wagner seraient remplacés par Africa Corps, un groupe paramilitaire sous le contrôle direct du gouvernement russe qui a été créé après la mort du fondateur du groupe Wagner, Evgueni Prigojine, en 2023.

Le recadrage annoncé de la présence russe au Mali a coïncidé avec une série d’attaques majeures menées par des groupes armés islamistes et des groupes séparatistes touaregs en juin, au cours desquelles des dizaines de soldats maliens et quelques combattants d’Africa Corps ont été tués.

L’UA devrait accroitre ses efforts au Mali afin d’aider à protéger les civils des abus commis par toutes les parties belligérantes, y compris en soutenant les enquêtes sur les abus et en faisant pression pour l’ouverture de poursuites équitables. Cela est d’autant plus urgent que le Mali s’est retiré du bloc régional de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), en janvier, ce qui prive les victimes d’abus de la possibilité de recours devant la cour régionale ouest-africaine. Une mission de maintien de la paix des Nations Unies a quitté le Mali en 2023 à la demande de la junte militaire malienne, ce qui a accru les préoccupations concernant la protection des civils et la surveillance des abus.

Toutes les parties au conflit armé malien sont soumises au droit international humanitaire, notamment à l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949, et au droit de la guerre coutumier. L’article 3 commun interdit le meurtre, les traitements cruels et la torture de toute personne en détention. Les individus qui commettent des violations graves du droit de la guerre avec une intention criminelle ou qui sont impliqués au titre de la responsabilité de commandement peuvent faire l’objet de poursuites pour crimes de guerre.

Les détentions au secret documentées constituent des disparitions forcées et violent la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées à laquelle le Mali est un État partie.

Le Mali est également un État partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui a ouvert une enquête sur les crimes de guerre présumés commis dans le pays depuis 2012.

« Les hauts responsables maliens et russes devraient être conscients qu’ils peuvent être tenus pour responsables des crimes commis par leurs soldats et leurs combattants », a conclu Ilaria Allegrozzi. « Que l’Union africaine fasse enfin pression sur les autorités maliennes pour qu’elles enquêtent sur les abus et engagent des poursuites, ou que la Cour pénale internationale intervienne, ceux qui sont liés aux atrocités actuelles pourraient faire l’objet de procès à l’avenir. »

Pour connaître les conclusions détaillées, veuillez lire la suite.

Conflit au Mali et implication de la Russie

Depuis 2012, les gouvernements maliens successifs ont combattu les groupes armés islamistes, y compris le GSIM et l’État islamique dans la province du Sahel. Les hostilités ont provoqué la mort de milliers de civils et le déplacement forcé de 350 000 personnes.

La junte militaire malienne, qui a pris le pouvoir lors d’un coup d’État en 2021, s’est appuyée sur le groupe Wagner soutenu par la Russie lors d’opérations de contre-insurrection.

Les autorités maliennes n’ont jamais reconnu publiquement la présence du groupe. En décembre 2021, la junte a déclaré que des instructeurs militaires russes se trouvaient au Mali dans le cadre d’un accord bilatéral avec la Russie, mais elle a nié la présence de combattants de Wagner. Cependant, Human Rights Watch et des médias ont fait état des activités du groupe Wagner et de ses abus au Mali.

En juin 2023, le ministre malien des Affaires étrangères, en réponse à un rapport de Human Rights Watch, a de nouveau nié la présence de tout groupe armé étranger et n’a pas mentionné le groupe Wagner. Cependant, les autorités russes ont reconnu la présence du groupe. En mai 2023, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré à un média que le groupe Wagner « fournit des services de sécurité » au gouvernement malien et a indiqué par la suite que les membres de Wagner travaillaient comme « instructeurs ».

Abus commis par l’armée dans la région de Douentza

Click to expand Image Image satellite datée du 5 février 2025 montrant des dizaines de tukuls et autres structures brûlées dans le village de Kobou après une attaque ayant eu lieu le 23 janvier. Image satellite © 2025 Airbus. Google Earth. Analyse et graphiques © 2025 Human Rights Watch

Meurtres et incendies de maisons, Kobou, 23 janvier

Le 23 janvier, vers 9 heures du matin, les forces armées maliennes sont entrées dans Kobou, un village situé dans une zone contrôlée par le GSIM, à bord de six pick-up, apparemment à la recherche de combattants islamistes. Plusieurs témoins ont rapporté qu’au cours de l’opération, des soldats ont tué un homme peul de 46 ans qui tentait de s’enfuir et ont exécuté sommairement deux autres hommes, âgés de 65 et 75 ans. Les corps des deux hommes âgés ont été retrouvés avec les yeux bandés et les mains liées derrière le dos. Les soldats ont aussi incendié au moins 30 maisons, d’après les témoignages.

La plupart des villageois ont fui à l’arrivée des soldats. « Nous, les Peuls, nous avons tous fui, car nous savons que les soldats s’en prendront à nous parce qu’ils nous considèrent comme des djihadistes », a expliqué un homme de 28 ans. « Si vous ne fuyez pas, les djihadistes vous tueront parce qu’ils diront que vous avez aidé les soldats. Personne ne nous épargne. »

Un éleveur peul de 35 ans, qui a perdu son père de 65 ans dans l’attaque, a raconté :

Il y a eu un mouvement de foule. Je me suis enfui, mais mon père ne pouvait pas courir parce qu’il était trop vieux et trop faible. Il est resté à la maison et quand les militaires sont arrivés, ils l’ont tué là-bas. Quand je suis rentré au village vers 16 heures, j’ai trouvé son corps dans la maison, les yeux bandés avec son turban et les mains liées. Ils lui ont tiré une balle à l’arrière de la tête.

Un homme de 29 ans, qui a perdu son frère âgé de 46 ans dans l’attaque, a expliqué :

Quand j’ai vu les soldats arriver, je suis parti en emmenant ma mère âgée sur ma moto et nous nous sommes cachés dans la brousse. … Nous avons entendu plusieurs coups de feu. … À notre retour, nous avons vu que trois personnes avaient été tuées, dont mon frère. J’ai trouvé son corps avec trois balles dans le dos à environ 300 mètres de la mosquée. J’ai également trouvé le corps d’un homme de 75 ans, les yeux bandés, tué d’une balle dans la tête devant la mosquée. Et puis j’ai vu le corps d’un autre homme qui a été tué chez lui.

Human Rights Watch a analysé des images satellite montrant des signes de bâtiments incendiés répartis dans tout le village les 23 et 24 janvier.

« Lorsque nous sommes rentrés à Kobou, vers 16 heures, il y avait encore de la fumée et du feu », a décrit l’homme de 28 ans. « Nous avons éteint les dernières flammes et récupéré les corps des trois hommes tués pour les enterrer dans une fosse commune au cimetière du village. »

Abus commis par l’armée dans la région de Tombouctou

Enlèvements et exécutions à Farana, 26 mars

Le 26 mars, l’armée malienne a arrêté, passé à tabac et probablement tué quatre hommes peuls au bord d’une rivière dans le village de Farana, une zone où le GSIM mène des opérations et attaque les forces de sécurité. Des témoins ont déclaré avoir vu des soldats se diriger vers les berges de la rivière et arrêter les hommes, puis avoir constaté des preuves d’une attaque.

« Je me reposais près de la rivière avec mon frère et trois autres hommes lorsque, vers midi, des soldats sont arrivés à bord de camions pick-up et de véhicules blindés », a raconté un homme de 29 ans. Il s’est enfui, mais a déclaré que lorsqu’il est retourné près de la rivière quatre heures plus tard, il n’a trouvé aucun corps, mais « une mare de sang » et des restes humains. Il a rapporté les propos de quatre pêcheurs de l’ethnie Bozo qui ont été témoins des passages à tabac :

Les soldats ont torturé [les quatre hommes] jusqu’à ce qu’ils ne respirent plus et ont emmené les quatre corps avec eux. Sur place, j’ai trouvé beaucoup de sang et des morceaux de cerveau, une barre de fer avec des traces de sang et de la chair humaine collée dessus. Il y avait tellement de sang que c’était comme si 10 vaches avaient été abattues là-bas.

Un autre homme, âgé de 45 ans, dont le frère fait partie des quatre hommes disparus, a raconté que, lorsqu’il a appris qu’un convoi militaire arrivait au village, il s’est enfui avec presque tous les Peuls locaux : « Nous savons que, si un soldat aperçoit un Peul, c’est fini pour lui. »

Il a ajouté qu’il s’était caché dans la brousse à proximité et avait vu les véhicules militaires se diriger vers le bord de la rivière. « Ils ne sont pas entrés dans le village, ils sont allés vers la rivière. … J’étais inquiet parce que mon frère était là-bas. »

Quand les soldats sont partis, a poursuivi l’homme, il s’est rendu près de la rivière. « Je n’en croyais pas mes yeux », a-t-il expliqué. « C’était comme un abattoir. … Il y avait du sang partout, de la chair humaine collée sur des branches d’arbres, c’était horrible. »

Les quatre hommes sont toujours portés disparus. Leurs proches ont indiqué les avoir cherchés à la base militaire voisine de Soumpi en vain. Human Rights Watch a reçu une liste, établie par les proches, avec les noms des quatre hommes et leurs âges : 24, 38, 53 et 70 ans.

Les habitants et les proches pensent que les soldats ont pris pour cible les Peuls, car ils les accusent de collaborer avec le GSIM.

Abus commis par l’armée et le groupe Wagner dans la région de Kayes

Arrestations et meurtres à Sebabougou, 12 avril

Le 12 avril, les forces maliennes et des combattants de Wagner ont arrêté au moins 100 hommes peuls dans le village de Sebabougou, les accusant de collaborer avec les combattants islamistes. Des témoins, y compris des sources sécuritaires, ont expliqué que les soldats ont emmené les villageois au camp militaire de Kwala, à environ 30 kilomètres de là, où ils les ont détenus et en ont apparemment exécutés un grand nombre.

Un rapport de l’ONU a corroboré ces conclusions, exprimant l’« indignation face à l’exécution sommaire présumée de plusieurs dizaines de personnes … ainsi que la disparition forcée d’autres personnes » à Sebabougou. Les forces armées maliennes ont annoncé le 28 avril qu’elles avaient mené des opérations militaires entre le 11 et le 15 avril dans différentes zones, y compris Sebabougou et Kwala, et qu’elles avaient « neutralis[é] des groupes armés terroristes ».

Plusieurs témoins ont indiqué avoir vu les militaires et des combattants de Wagner arriver à Sebabougou vers 8 heures du matin à bord de plusieurs véhicules, tandis qu’un hélicoptère militaire survolait le village. Au marché aux bestiaux du village, ils ont ordonné à tout le monde de se rassembler devant le domicile du chef du village pour une réunion.

Un homme peul de 32 ans a déclaré :

Les gens s’y sont d’abord rendus volontairement, y compris certains Peuls, mais d’autres, comme moi, sont restés au marché. Mais vers midi, les militaires sont revenus au marché, forçant tous les Peuls à aller à la réunion. … J’ai décidé de fuir, car il me semblait que quelque chose clochait.

Un septuagénaire qui a assisté à la réunion a raconté : « Les soldats nous ont dit : “Tous ceux qui ont des liens avec des terroristes ne s’en tireront pas comme ça.” » Il a ajouté que les soldats ont ensuite rassemblé et arrêté environ 100 hommes peuls :

Vers 16 heures, ils ont bandé les yeux des Peuls avec leurs foulards ou d’autres vêtements et leur ont lié les mains dans le dos. Ils les ont emmenés vers leurs véhicules garés à l’extérieur du village et les ont chargés dans deux camions, puis sont repartis avec eux en direction de Kayes.

Des proches ont fourni à Human Rights Watch une liste contenant les noms de 65 hommes peuls arrêtés à Sebabougou, âgés de 30 à 65 ans, qui sont toujours portés disparus. Les villageois ont indiqué qu’ils n’ont pas pu obtenir d’informations sur le lieu où se trouvaient les hommes arrêtés. Un homme de 53 ans, dont le cousin âgé de 40 ans a été arrêté, a déclaré : « À partir [du moment de l’arrestation], nous avons cessé d’avoir des informations sur nos proches. »

Des membres des familles de ces hommes ont cherché à localiser leurs proches disparus jusqu’au 20 avril sans parvenir à savoir où ils se trouvaient. Les 21 et 22 avril, ils ont découvert au moins 43 corps en périphérie du camp militaire de Kwala. Bien qu’ils n’aient pas pu identifier ces corps du fait de leur décomposition, ils pensent que ce sont ceux des hommes arrêtés le 12 avril.

Un homme de 32 ans a raconté :

Le 21 avril, je me suis rendu à Kwala avec cinq autres personnes et nous avons découvert les corps de 13 hommes à environ sept kilomètres au nord du camp militaire. Les corps étaient dispersés et déjà décomposés. Le lendemain, nous avons trouvé 30 autres cadavres, dans le même état, à environ un kilomètre de l’endroit où nous avions découvert les 13 premiers. C’était horrible.

Des sources crédibles ont indiqué à Human Rights Watch qu'au moins 25 des personnes détenues ont été transférées du camp militaire de Kwala à la prison centrale de Bamako, environ une semaine après leur arrestation. Les sources ont déclaré que les 25 ont été présentées à un juge et libérées à la mi-juillet sans inculpation.

Abus commis par l’armée et le groupe Wagner dans la région de Ségou

Enlèvements et disparitions forcées à Kourma, 19 mars

Le 19 mars, l’armée malienne et des combattants de Wagner ont rassemblé 12 hommes peuls au marché aux bestiaux de Kourma, un village situé dans une zone contrôlée par le GSIM. Des proches ont fourni à Human Rights Watch une liste des noms des hommes, âgés de 22 à 62 ans. Les hommes sont toujours portés disparus.

Des témoins ont raconté que des soldats et des combattants de Wagner sont arrivés dans le village vers 8 heures du matin, ont encerclé le marché aux bestiaux et ont commencé à rassembler des hommes peuls. Ils ont accusé les hommes de collaborer avec le GSIM et les ont violemment battus avant de partir avec eux dans un pick-up en direction de la ville de Sokolo, située à environ 15 kilomètres, d’après les témoignages.

Un homme peul, âgé de 50 ans, a décrit les hommes armés comme des « soldats maliens et blancs » à bord d’au moins six pick-up et sept motos. Il a expliqué qu’il s’était caché dans un magasin appartenant à un homme de l’ethnie bambara, tandis que son fils, âgé de 22 ans, a été arrêté :

Les soldats, cinq Maliens et deux Russes, ont rassemblé les 12 personnes près du portail du marché. … Ils les ont giflés, les ont frappés à coups de bottes et de crosse de fusil et les ont traités de « terroristes ». Ils ont déchiré leurs vêtements pour leur bander les yeux, leur ont lié les mains et les pieds, puis … ils les ont jetés l’un après l’autre dans un pick-up comme des animaux.

Un autre homme peul, âgé de 66 ans, dont le fils de 25 ans a été arrêté, a décrit avoir vu vers 11 heures du matin un pick-up militaire avec environ 12 personnes à bord, « les yeux bandés » et « blessées », qui quittait le marché en direction de Sokolo.

Le lendemain, des proches des hommes arrêtés ont déclaré avoir signalé l’incident aux gendarmes de la base militaire de Sokolo. Une femme de 41 ans, dont le fils a été arrêté, a raconté :

J’ai trouvé deux gendarmes. Ils ont refusé que j’accède au camp, mais ils m’ont écoutée. J’ai expliqué ce qui s’était passé à Kourma. … Ils ont répondu que les personnes arrêtées à Kourma se portaient bien et que je ne devais pas m’inquiéter. J’ai demandé à en avoir la preuve. Ils m’ont dit de m’asseoir et de patienter. Je suis restée assise sur une chaise pendant plusieurs heures. Ils sont revenus plus tard pour me dire qu’ils n’avaient pas reçu de nouvelles et que je devais partir.

Meurtres, torture et détentions au secret à Belidanédji et Molodo, 30 mars

Le 30 mars vers 8 heures du matin, deux combattants du GSIM, dont un armé, sont entrés dans Belidanédji, un village situé dans une zone contrôlée par ce groupe, et ont battu au moins 20 femmes parce qu’elles ne portaient pas de voile, selon des témoins.

« Ils [les combattants] les ont fouettées, giflées, puis leur ont ordonné de se couvrir », a raconté un homme de 47 ans. « Ils ont dit que nous refusions de nous soumettre à la charia [loi islamique]. Nous, les hommes, étions impuissants, effrayés – pour nous, c’était une humiliation. »

Des témoins ont expliqué qu’une heure plus tard, les forces maliennes et des combattants de Wagner sont entrés dans le village à bord de trois pick-up et d’au moins un véhicule blindé. D’après les informations disponibles, les soldats ont affronté les combattants du GSIM et ont tué l’un d’eux, puis ont exécuté sommairement six civils peuls âgés de 35 à 63 ans.

« Pendant les combats, beaucoup d’entre nous ont fui, certains se sont cachés dans les rizières, d’autres ont sauté dans la rivière », a décrit un homme de 47 ans. « Les soldats ont ensuite pris le contrôle du village, … ont commencé à tuer des gens. Ils n’ont pas essayé de faire de distinction entre nous – ils nous considéraient tous comme des djihadistes. »

Un homme de 49 ans qui a perdu son frère dans l’attaque a indiqué qu’il avait fui Belidanédji lorsque le combattant du GSIM armé avait tiré le premier coup de feu, mais qu’il était revenu au village vers midi :

J’ai trouvé mon frère encore en vie, mais gravement blessé dans sa rizière. Il tenait sa main sur la blessure par balle qu’il avait à la poitrine. Sa main était couverte de sang. Des gens m’ont aidé à panser sa plaie et à l’évacuer vers l’hôpital de Diabaly sur ma moto. Mais il est mort deux jours plus tard.

L’homme de 47 ans a raconté qu’il s’était caché dans une rizière, qu’il avait été témoin d’une exécution sommaire et qu’il avait récupéré des corps :

Mon ami de 58 ans aussi se cachait ici, les militaires l’ont abattu. Ça s’est passé à moins de 100 mètres de là où j’étais. Les soldats l’ont vu, ils lui ont demandé de se mettre debout et de lever les mains, puis ils lui ont tiré dans la poitrine. … Lorsque les soldats sont partis, nous avons récupéré cinq cadavres [de civils] et avons aidé un homme gravement blessé. … Nous avons enterré deux hommes dans le cimetière du village le même jour. L’homme blessé est décédé après avoir été évacué à l’hôpital et les trois autres ont été enterrés par leurs proches dans des hameaux voisins.

Des témoins ont indiqué que les soldats et les combattants de Wagner qui sont entrés dans le village faisaient partie d’un convoi plus important, et que d’autres soldats et combattants de Wagner étaient restés à l’extérieur de Belidanédji. Ils ont décrit que les soldats déployés à l’extérieur du village ont arrêté deux hommes peuls, âgés de 48 et 50 ans, les ont torturés en les passant à tabac et les ont emmenés à la base militaire de Molodo, à environ 76 kilomètres de là, où ils ont été détenus au secret dans un conteneur pendant deux semaines.

Human Rights Watch a également reçu des informations crédibles indiquant qu’au moins 20 personnes ont été exécutées sommairement à la base, dont au moins sept combattants islamistes capturés, mais ces informations n’ont pas pu être confirmées.

Arrestations et meurtres à Sikere, 14 mai

Tôt dans la matinée du 14 mai, les forces maliennes accompagnées de combattants de Wagner et de miliciens dozos, qui appartiennent principalement à l’ethnie bambara, ont encerclé Sikere, un village situé dans une zone contrôlée par le GSIM et peuplé de Bambaras, de Rimaïbés, un sous-groupe peul, et de Peuls. D’après les témoignages, les soldats et les combattants sont allés de porte en porte et ont rassemblé tous les hommes rimaïbés et peuls et les ont réunis dans un endroit proche de la mosquée. Ils les ont accusés de collaborer avec le GSIM et ont abattu quatre hommes.

Un homme de 48 ans a expliqué qu’il dormait lorsqu’un soldat malien et deux miliciens dozos ont fait irruption chez lui, ont pointé leurs fusils sur sa tête et lui ont ordonné de se rendre à pied à la mosquée. Il a raconté :

Quand je suis arrivé près de la mosquée, beaucoup d’autres hommes étaient déjà là. Ils nous ont bandé les yeux avec nos foulards. … Puis ils ont commencé à nous accuser. Ils ont dit que nous avions suivi un entraînement pour devenir djihadistes, … que nos proches sont du côté des djihadistes.

Un homme de 45 ans qui a été arrêté a expliqué :

Ils nous ont accusés d’être des djihadistes et de participer à des attaques contre les forces de sécurité. Le chef de notre village leur a répondu qu’ils n’avaient aucune preuve concrète de cela, puisqu’ils n’avaient trouvé aucune arme dans le village. Alors, un soldat nous a menacés : « Si jamais les djihadistes viennent attaquer Ngonado [un village bambara près de Sikere] en représailles à notre présence ici aujourd’hui, nous reviendrons vous exterminer jusqu’au dernier ! »

Après environ deux heures dans la mosquée, les soldats ont libéré tous les hommes rimaïbés et ont exécuté sommairement quatre hommes peuls. « Nous avons récupéré leurs corps : ils avaient tous été tués d’une balle dans la tête », a relaté l’homme de 45 ans. « Nous les avons enterrés dans une fosse commune dans le cimetière du village. »

Les villageois ont fourni à Human Rights Watch une liste des quatre hommes exécutés. Deux avaient 37 ans et les deux autres avaient respectivement 35 ans et 60 ans.

Les témoins et les habitants considèrent que l’attaque à Sikere a été menée en représailles contre la population locale accusée de soutenir le GSIM. Ils ont précisé que, dans les semaines précédant cette attaque, le GSIM avait attaqué les forces de sécurité, les miliciens Dozo et les combattants de Wagner dans la zone.

21.07.2025 à 06:00

États-Unis : Des migrants détenus en Floride dans des conditions abusives

Human Rights Watch

Click to expand Image © 2025 John Holmes pour Human Rights Watch

 

Des personnes détenues dans des centres de rétention pour migrants en Floride y sont soumises à des conditions inhumaines, notamment le refus de soins médicaux, le surpeuplement et des traitements dégradants. Au moins deux décès récents pourraient être liés à l’insuffisance de soins médicaux.Il ne s'agit pas d'incidents isolés, mais plutôt du résultat d'un système de détention fondamentalement défaillant et entaché de graves abus.Le gouvernement américain devrait privilégier les alternatives communautaires à la détention de migrants, remédier immédiatement aux conditions de détention abusives et autoriser un contrôle indépendant des centres de rétention.

(Washington, 21 juillet 2025) – Le gouvernement des États-Unis a soumis des migrants détenus dans trois centres de rétention en Floride à des conditions abusives et dégradantes, et dans certains cas à des risques mortels, ont déclaré Americans for Immigrant Justice, Human Rights Watch et Sanctuary of the South dans un rapport conjointement publié aujourd'hui.

21 juillet 2025 “You Feel Like Your Life is Over”

Ce rapport de 92 pages, intitulé « “You Feel Like Your Life is Over”: Abusive Practices at Three Florida Immigration Detention Centers Since January 2025 » (« “Vous avez l'impression que votre vie est finie” : Pratiques abusives dans trois centres de rétention pour migrants en Floride depuis janvier 2025 »), révèle que les personnes détenues au Krome North Service Processing Center (« Krome »), au Broward Transitional Center (« BTC ») et au Federal Detention Center de Miami (« FTC ») ont été enfermées dans des conditions de surpeuplement et d'insalubrité, soumises à des traitements dégradants, et privées d’accès à des soins médicaux rapides et adéquats. Le rapport décrit les expériences vécues par 17 migrants dans ces trois centres de rétention depuis le 20 janvier.

Americans for Immigrant Justice est un cabinet d'avocats à but non lucratif qui lutte pour la justice pour les migrants par le biais d’assistance juridique, de litiges visant des changements à long terme, ainsi que des actions de plaidoyer et de sensibilisation. Human Rights Watch est une organisation non gouvernementale internationale qui enquête sur des violations des droits humains dans le monde entier, publie des rapports et vise à promouvoir la justice et l’obligation de rendre des comptes. Sanctuary of the South est une association dont la mission est de promouvoir la justice et la libération de personnes injustement détenues, en s’appuyant sur « l'amour et le soutien mutuel ».

Les chercheur-euse-s des trois organisations ont mené des entretiens avec des migrants actuellement ou précédemment détenus, des membres de leurs familles et des avocats spécialisés en droit de l'immigration ; les chercheur-euse-s ont aussi analysé les données publiées par les services d'immigration et de douane des États-Unis (Immigration and Customs Enforcement, ICE), ainsi que d'autres documents officiels.

Depuis l'arrivée au pouvoir du président Donald Trump, son administration a provoqué une forte hausse du nombre de migrants détenus à travers le pays. Les données de l'ICE montrent qu’à la mi-avril, le taux de population dans 45 des 181 centres de rétention officiels à travers le pays dépassait la capacité contractuelle prévue.

La hausse du nombre de personnes détenues par l'ICE a été particulièrement forte en Floride, suite aux politiques fédérales et étatiques qui ont élargi le champ d'application des mesures de contrôle de l'immigration. Dans le centre Krome, le nombre de migrants détenus a plus que triplé au cours des trois premiers mois de 2025, atteignant un niveau près de trois fois sa capacité opérationnelle. Le centre FDC, conçu à l’origine comme prison fédérale, a commencé à être utilisé pour détenir des centaines de migrants en février.

Centres de rétention pour migrants en FloridePopulation quotidienne moyenne Click to expand Image Le nombre moyen de personnes détenues quotidiennement dans les centres de rétention pour migrants en Floride est passé d'environ 1 480 en mars 2024 à environ 3 280 en mars 2025. © 2025 Human Rights Watch

« L'escalade des mesures contre l’immigration et les tactiques répressives de l'administration Trump terrorisent des communautés et déchirent des familles ; ceci est particulièrement cruel en Floride, dont la prospérité repose pourtant sur ses communautés immigrées », a déclaré Katie Blankenship, avocate spécialisée en droit de l'immigration et cofondatrice de Southern Sanctuary. « L'approche rapide, chaotique et cruelle utilisée pour arrêter et détenir des personnes a des conséquences mortelles, et provoque une crise des droits humains qui affectera cet État et le pays tout entier pendant des années. »

Les chercheur-euse-s ont constaté que les détenus de Krome étaient régulièrement enfermés dans des cellules glaciales, surpeuplées et sans literie, qu’ils étaient privés d'accès à des mesures hygiéniques et que lors de leur transport, ils étaient menottés de manière prolongée et injustifiée. Les personnes détenues dans les trois centres n'ont pas pu bénéficier des soins médicaux nécessaires, notamment pour des maladies chroniques comme le diabète, l'asthme et le VIH. Des femmes ont été détenues à Krome, un centre de rétention conçu pour des hommes, sans accès à des soins adaptés à leur genre ni à leur intimité. Au moins deux décès en détention – l'un à Krome et l'autre au BTC – pourraient être liés à une négligence médicale.

Un homme détenu au centre Krome a déclaré qu'on lui y avait refusé des soins médicaux pour une hernie étranglée, jusqu'à ce qu'il s'effondre de douleur. « Le médecin de l'hôpital m'a dit que si je n'étais pas venu à ce moment-là, mes intestins se seraient probablement rompus », a-t-il affirmé. « J'ai dû me jeter par terre pour obtenir de l'aide. »

Cet homme a aussi déclaré avoir vu d’autre détenus de Krome ligotés et frappés, après une manifestation pacifique et leur refus de de monter dans un bus qui devait les transférer vers un autre centre : « Ils leur ont sauté dessus, les ont ligotés et les traînés [vers le bus]. »

Une détenue a déclaré avoir été punie pour avoir sollicité un soutien psychologique : « Si vous demandez de l'aide, ils vous détiennent [à l'isolement]. Si vous pleurez, ils peuvent vous placer [à l'isolement] pendant deux semaines. Alors les gens préfèrent ne rien dire. »

Cette détenue a aussi déclaré avoir été témoin de la mort de Marie Ange Blaise, une Haïtienne âgée de 44 ans, après que le personnel a tardé à appeler les secours. « Nous avons commencé à crier à l'aide, mais les gardiens nous ont ignorés », a-t-elle expliqué. « Lorsque les secours sont arrivés, elle ne bougeait plus. »

Au cours d'un incident particulièrement dégradant, des détenus du centre FDC ont été contraints de manger alors que leurs mains étaient menottées derrière le dos. « Nous devions nous pencher et manger la nourriture placée sur des chaises, rien qu’avec la bouche, comme des chiens », a déclaré Harpinder Chauhan, un entrepreneur britannique arrêté par l'ICE lors d'un rendez-vous avec les services d'immigration. Chauhan, qui souffre de diabète et de maladies cardiaques, a déclaré s'être vu refuser de l'insuline à plusieurs reprises pendant sa détention dans chacun des trois centres (Krome, FDC et BTC) ; au centre BTC, il a fini par s’effondrer après presque une semaine, et a alors été hospitalisé.

Les chercheur-euse-s ont recueilli des témoignages sur le problème de surpeuplement dans les centres ; des personnes y ont été détenues pendant plusieurs jours pendant que leurs dossiers étaient traités, assis et dormant sur des sols en béton lors de températures parfois glaciales, dans des pièces conçues pour accueillir beaucoup moins de personnes pendant des périodes beaucoup plus courtes. Un homme a décrit avoir dormi à côté des toilettes, dans une pièce tellement surpeuplée que les gens devaient s'enjamber pour se déplacer. Un autre homme a affirmé qu’il s’est vu refuser l'accès à l'eau et au savon pendant 20 jours consécutifs. Au centre Krome, certaines cellules étaient occupées par plus du double du nombre de personnes correspondant à leur capacité prévue.

Des femmes détenues au centre Krome pendant que leurs demandes d’asile étaient traitées ont déclaré avoir été confinées dans des pièces dont les toilettes exposées étaient visibles pour les hommes détenus dans des cellules adjacentes. « Si des hommes se mettaient debout sur des chaises, ils pouvaient avoir une vue directe sur notre pièce et sur les toilettes », a déclaré une femme argentine. « Nous avons supplié [les gardiens] de nous autoriser à prendre une douche, mais ils ont dit que c'était impossible car c'était un centre conçu [en principe] pour des hommes. »

Ces conditions bafouent le droit international, et semblent également enfreindre certaines normes essentielles du gouvernement fédéral américain. Les normes de détention de l'agence ICE exigent un traitement humain, l'accès aux soins médicaux et la protection contre les abus. Les chercheur-euse-s ont toutefois constaté que l'ICE et ses prestataires ne respectent pas ces obligations.

« Des mères, des pères, des frères et des sœurs, des enfants et des amis proches de citoyens américains sont arrachés à leurs foyers et à leurs communautés, et disparaissent dans un système de détention profondément préjudiciable et déshumanisant », a déclaré Denise Noonan Slavin, conseillère senior du directeur exécutif d'Americans for Immigrant Justice. « Permettre que ces injustices perdurent est à la fois dégradant et profondément contraire aux valeurs fondamentales que les États-Unis sont censés défendre. »

Le gouvernement américain devrait mettre fin à son recours à la détention de migrants en tant que conséquence automatique de la quasi-totalité des arrestations effectuées lors de la vague d’opérations des agents de l'ICE, et privilégier plutôt des alternatives communautaires à la détention, ont déclaré les trois organisations. L'ICE devrait immédiatement mettre fin aux conditions de détention abusives, garantir aux migrants l'accès aux soins médicaux et de santé mentale, et permettre un contrôle indépendant des centres de rétention.

« Le gouvernement américain détient de nombreuses personnes qui ne représentent aucune menace pour la sécurité publique, dans des conditions qui portent atteinte aux droits humains fondamentaux et à la dignité humaine », a conclu Belkis Wille. « Les États-Unis ont la responsabilité de traiter toutes les personnes détenues avec dignité et humanité. »

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Articles

Le Figaro  L'Express/AFP 

Le Devoir  20Minutes.ch

18.07.2025 à 17:26

Angola : La police a recouru à une force excessive contre des manifestants pacifiques

Human Rights Watch

Click to expand Image Des membres de la Force d'intervention rapide d'Angola bloquaient une route à Luanda, face à des manifestants qui protestaient contre la hausse des prix du carburant et des coûts de transport, le 12 juillet 2025. © 2025 Julio Pacheco Ntela/AFP via Getty Images

(Johannesburg) – La police angolaise a fait un usage excessif de la force et procédé à des arrestations arbitraires lors de la dispersion de manifestants pacifiques à Luanda, la capitale, le 12 juillet, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. La police a tiré des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc de manière injustifiée et a agressé des manifestants, blessant plusieurs personnes. Les policiers ont également arrêté 17 manifestants, dont certains n'ont été libérés qu'après une intervention judiciaire.

Le gouvernement devrait enquêter rapidement et impartialement sur le recours à la force et sur les arrestations, et sanctionner ou poursuivre les responsables, quel que soit leur rang.

« Les Angolais devraient pouvoir manifester pacifiquement contre des politiques gouvernementales sans subir un recours excessif à la force ni d'autres violations de leurs droits fondamentaux », a déclaré Ashwanee Budoo-Scholtz, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch. « Le gouvernement devrait ouvrir une enquête impartiale sur ces abus et demander des comptes aux responsables. »

Des centaines de personnes ont participé à la manifestation, qui a débuté dans le quartier de São Paulo à Luanda et devait se terminer au Largo 1º de Maio, une place d’une grande importance symbolique dans le centre-ville. Des mouvements de jeunesse et des organisations de la société civile avaient appelé à manifester, suite à la décision du gouvernement d'augmenter le prix du carburant et de supprimer les subventions aux transports publics, sans aucune consultation publique préalable.

« La manifestation… était un moyen légitime d'exprimer notre mécontentement face à la décision du gouvernement angolais de mettre en œuvre des politiques antisociales », a déclaré Simão Afonso, un avocat qui a contribué à obtenir l'autorisation de la manifestation, et a ensuite fourni une assistance juridique aux détenus. « La réaction répressive de la police nationale est profondément regrettable. … L'État ne remplit pas ses obligations légales à l’égard des garanties fondamentales des droits et des libertés des citoyens. »

Le 12 juillet, le porte-parole du commandement général de la police angolaise a affirmé dans une déclaration aux médias que l'intervention de la police lors de la marche « visait à maintenir l'ordre et la tranquillité publics, les manifestants n'ayant pas suivi le parcours [autorisé] ».

Cependant, Aidilson Manuel, activiste et porte-parole de la manifestation, a déclaré que l'organisation de cet événement était conforme aux exigences gouvernementales : « Le 10 juillet, nous avons adressé une lettre au gouvernement provincial de Luanda pour l'informer de la manifestation. Nous avons également transmis la même lettre au commandement de la police provinciale, qui nous a contactés pour discuter du trajet. La police a suggéré un itinéraire différent de celui que nous avions proposé. L'approbation officielle est arrivée le 11 juillet vers 16 heures, c’était une réponse favorable. »

Malgré l'autorisation officielle, la police a dispersé les manifestants en tirant des gaz lacrymogènes et à coups de matraques dès que le groupe s'est approché du Largo 1º de Maio. « Sans aucun avertissement préalable, la répression a commencé brutalement », a déclaré Aidilson Manuel.

Aidilson Manuel a ajouté que quatre personnes avaient été grièvement blessées : « Une personne a été touchée directement au visage par une grenade lacrymogène, provoquant une profonde coupure nécessitant une intervention chirurgicale. Une autre a subi une grave blessure à la bouche et a dû être soignée d'urgence. Deux autres manifestants ont subi des fractures et des blessures graves après avoir été agressés par des policiers. »

Le porte-parole de la police a déclaré que deux personnes avaient été blessées lors de la manifestation. Cependant, les médias ont signalé qu'au moins neuf personnes avaient été blessées.

L'Angola est un État partie à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, ainsi qu’au Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; en vertu de ces instruments juridiques, le gouvernement a l’obligation de respecter et de protéger le droit de réunion pacifique et la liberté d'expression.

Les Principes de base des Nations Unies sur le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois, ainsi que les Lignes directrices pour le maintien de l'ordre lors des rassemblements en Afrique, prévoient un recours à la force uniquement en cas de stricte nécessité. Lorsqu'ils recourent à la force, les responsables de l'application des lois doivent faire preuve de retenue et agir proportionnellement à la gravité de l'infraction, et à l'objectif légitime visé.

En 2020, les Nations Unies ont publié des Lignes directrices portant sur l’utilisation des armes à létalité réduite dans le cadre de l’application des lois ; selon ce texte, les gaz lacrymogènes ne doivent être utilisés que lorsque cela est nécessaire pour prévenir des violences physiques, et ne doivent pas être employés pour disperser des manifestations non violentes.

Human Rights Watch a précédemment documenté des cas où les forces de sécurité angolaises ont fait un usage excessif de la force contre des manifestants pacifiques, et ont procédé à des arrestations arbitraires. Les appels lancés par Human Rights Watch et d'autres organisations en faveur de réformes significatives et concrètes des méthodes employées par les forces de sécurité ont abouti à certaines mesures visant un meilleur respect des normes internationales en matière de droits humains. Toutefois, le recours persistant à une force policière excessive lors de manifestations montre que les mesures prises jusqu'à présent sont insuffisantes, a déclaré Human Rights Watch.

« Le recours excessif à la force par la police contre des manifestants pacifiques s'inscrit dans le cadre plus large des problèmes liés aux forces de sécurité en Angola », a observé Ashwanee Budoo-Scholtz. « Le gouvernement devrait adopter et appliquer des réformes globales portant sur le comportement des forces de sécurité, afin de garantir que les policiers respectent la loi et soient tenus responsables lorsqu'ils violent les droits des manifestants. »

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15.07.2025 à 01:00

Thaïlande : Les autorités maltraitent et exploitent des ressortissants du Myanmar

Human Rights Watch

Click to expand Image Un travailleur migrant originaire du Myanmar était assis dans l’appartement où il réside, dans la province de Samut Sakhon, en Thaïlande, le 26 janvier 2025.  © 2025 Lillian Suwanrumpha/AFP via Getty Images

 

Les autorités thaïlandaises menacent, extorquent et détiennent des ressortissants du Myanmar qui ont fui la junte militaire pour trouver refuge en Thaïlande.La seule façon pour la plupart de ces personnes d’obtenir un statut légal est de devenir des travailleurs migrants, mais ce statut est exclu d’une récente mesure du gouvernement thaïlandais visant à fournir une protection à certains réfugiés.Le gouvernement thaïlandais devrait instaurer un régime de protection temporaire pour les ressortissants du Myanmar.

(Bangkok, 15 juillet 2025) – Les autorités thaïlandaises menacent, extorquent et détiennent des ressortissants du Myanmar qui ont fui la junte militaire pour trouver refuge en Thaïlande, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.

14 juillet 2025 “I’ll Never Feel Secure”

Le rapport de 48 pages, intitulé « “I’ll Never Feel Secure”: Undocumented and Exploited Myanmar Nationals in Thailand » (« “Je ne me sentirai jamais en sécurité” : Des ressortissants du Myanmar sans papiers et exploités en Thaïlande »), examine la manière dont la police thaïlandaise arrête et interroge fréquemment des ressortissants du Myanmar et les extorque en les menaçant d’arrestation et de détention s’ils ne paient pas de pots-de-vin. Human Rights Watch a constaté que cette pratique était répandue dans la ville de Mae Sot, près de la frontière avec le Myanmar, où les autorités qui profitent de cette corruption qualifient les ressortissants birmans de « distributeurs automatiques ambulants de billets ». Vivant sous la menace constante d'une expulsion qui pourrait les mettre en danger, les ressortissants du Myanmar limitent leurs déplacements pour rester hors de vue de la police et des autres autorités qui cherchent à les exploiter.

« Après avoir fui le conflit, la persécution et les privations, les ressortissants du Myanmar ont besoin de protection en Thaïlande », a déclaré Nadia Hardman, chercheuse auprès de la division Droits des réfugiés et migrants à Human Rights Watch. « Au lieu de cela, la Thaïlande leur refuse un statut juridique sûr, et ses autorités profitent de cette vulnérabilité pour les exploiter et les extorquer. »

Depuis le coup d'État militaire au Myanmar en février 2021, la junte a commis des exactions généralisées dans tout le pays, notamment des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Un grand nombre de personnes ont fui la violence, la persécution, l'effondrement de l'économie et le blocage de l'aide humanitaire pour se rendre dans les pays voisins. Plus de quatre millions de personnes originaires du Myanmar vivent actuellement en Thaïlande, dont près de la moitié sont sans papiers.

En février 2025, Human Rights Watch a mené des entretiens auprès de 30 ressortissants du Myanmar vivant en Thaïlande. Bon nombre d'entre eux sont des réfugiés au sens du droit international, même s'ils n'ont pas été reconnus comme tels, et que les voies d'accès à un statut reconnu en Thaïlande sont limitées. Ces ressortissants du Myanmar sans papiers sont contraints de chercher la sécurité et des moyens de subsistance en Thaïlande afin d'éviter d'être renvoyés vers la répression, le conflit et les crises humanitaires au Myanmar.

Les personnes interrogées ont déclaré que les pratiques des autorités thaïlandaises les effrayaient et les intimidaient, leur donnant le sentiment d'être marginalisées et exploitées en Thaïlande. Les forces de sécurité thaïlandaises se livrent à des pratiques de racket par le biais d'un système d'extorsion semi-officiel consistant à « vendre » des « cartes de police » non officielles à des ressortissants du Myanmar cherchant à obtenir des papiers ou simplement à éviter une arrestation. La seule option pour les personnes qui ne veulent ou ne peuvent pas acheter ces cartes est l'assignation à résidence volontaire.

Un journaliste birman de 30 ans, réfugié à Mae Sot, a déclaré : « La principale menace [à Mae Sot], c'est la police. J'avais peur d'eux… J'ai été arrêté [par la police] six fois : trois fois, j'ai payé les policiers et ils m'ont laissé partir. »

Même les personnes qui paient pour des « cartes de police » ne sont pas totalement protégées contre l'expulsion. Les expulsions massives de ressortissants du Myanmar, notamment d'enfants, se poursuivent dans tout le pays, sans tenir compte des risques qu'ils pourraient encourir à leur retour au Myanmar. Une femme a déclaré que malgré le versement d'un pot-de-vin pour elle-même et sa nièce de 12 ans, les autorités d'immigration thaïlandaises les ont arrêtées toutes les deux, les ont retenues dans un centre de détention pendant neuf jours, puis les ont expulsées vers le Myanmar.

La plupart des ressortissants du Myanmar auprès de qui Human Rights Watch a mené des entretiens étaient en train de demander ou de renouveler une carte de travailleur migrant, communément appelée « carte rose ». Il s'agit du principal document dont disposent les ressortissants du Myanmar en Thaïlande pour obtenir un statut légal. Cette procédure nécessite le parrainage du travailleur migrant par un employeur.

La Thaïlande n’est pas un État partie à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés ni à son Protocole de 1967. Le pays ne dispose pas de loi sur les réfugiés ni de procédures d’asile formalisées applicables à toutes les nationalités. Au lieu de cela, en 2023, le gouvernement a introduit un nouveau Mécanisme national de filtrage (« National Screening Mechanism », NSM) en vertu duquel certaines personnes, qui ne peuvent ou ne veulent pas retourner dans leur pays d’origine en raison de craintes de persécution, peuvent demander une protection.

Bien que présenté comme une avancée vers une meilleure protection internationale, le Mécanisme national de filtrage et ses règlements d'application excluent largement certaines nationalités de l'accès, notamment les travailleurs migrants originaires du Myanmar, du Cambodge et du Laos.

Des ressortissants du Myanmar ont déclaré que, qu'il s'agisse de renouveler leurs documents de travailleur migrant grâce à une « fenêtre de régularisation » – une période spécifique pendant laquelle le gouvernement thaïlandais autorise les travailleurs migrants sans papiers à régulariser leur statut juridique – ou de déposer une première demande, ils faisaient appel à un intermédiaire pour gérer la procédure et payaient des frais, souvent exorbitants, pour obtenir les documents nécessaires et gérer cette procédure complexe. Dans tous les cas examinés par Human Rights Watch, l’employeur indiqué sur leur « carte rose » de travailleur migrant n’était pas leur véritable employeur, mais un employeur fictif.

Bien qu’une carte rose offre une certaine protection contre l’arrestation, la détention et l’expulsion, elle ne constitue pas un document précis ou approprié pour les personnes qui sont très probablement des réfugiés, malgré l’absence d’un système permettant de reconnaître ce statut.

Le gouvernement thaïlandais devrait adopter une législation établissant des critères ainsi que des procédures de reconnaissance du statut de réfugié et d'octroi de l'asile conformes aux normes juridiques internationales, selon Human Rights Watch. Le statut de réfugié devrait être ouvert à toutes les nationalités selon les mêmes critères, conformément à la définition internationale du réfugié, notamment des formes complémentaires de protection pour les personnes fuyant les conflits, et les réfugiés devraient être autorisés à travailler.

Dans l’intervalle, la Thaïlande devrait mettre en place un cadre de protection temporaire pour les ressortissants du Myanmar, reconnaissant les besoins immédiats de milliers de personnes qui ont fui les persécutions ou les conflits du pays. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne devrait pas y avoir de retours forcés au Myanmar : « Les personnes fuyant le Myanmar doivent être autorisées à accéder au territoire pour demander l’asile et être protégées contre le refoulement. »

« Les autorités thaïlandaises devraient prendre des mesures conformes aux normes internationales pour assurer une protection efficace aux personnes fuyant le Myanmar », a conclu Nadia Hardman. « Le gouvernement thaïlandais devrait mettre fin à l'exploitation et aux souffrances de plusieurs millions de ressortissants du Myanmar sans papiers. »

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14.07.2025 à 23:03

Le droit des femmes à vivre sans violence doit être fermement protégé

Human Rights Watch

Click to expand Image Des femmes sud-africaines manifestaient contre les violences sexistes, ainsi que le harcèlement sexuel au sein d’entreprises, devant la Bourse de Johannesburg, le 13 septembre 2019. © 2019 Alet Pretorius/Gallo Images via Getty Images

Il ne fait aucun doute que les droits des femmes sont actuellement menacés de manière destructrice, à l’échelle mondiale.

C’est dans ce contexte régressif que le Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a tenu sa 91ème session, du 16 juin au 4 juillet. Le Comité a examiné le respect par divers pays de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (Convention on the Elimination of All Forms of Discrimination against Women, CEDAW), et a publié une déclaration sur la nécessité d’appliquer fermement le droit international relatif aux droits humains.

Cette déclaration répond aux efforts de certains pays visant à élaborer un nouveau Protocole facultatif à la CEDAW qui serait axé en particulier sur la violence fondée sur le genre (« gender-based violence »). Toute modification de l’actuel Protocole facultatif, indique la déclaration du Comité, « devrait être fondée sur les normes existantes » dans ce domaine.

La violence sexiste à l'égard des femmes et des filles constitue une violation de la Convention CEDAW. Déjà en 1992, le Comité l’avait souligné : « La violence sexiste est une forme de discrimination qui entrave gravement la capacité des femmes à bénéficier de leurs droits et libertés sur un pied d'égalité avec les hommes. »

Faire pression en faveur d'un nouveau Protocole concernant des droits déjà inscrits dans le droit international, dans le contexte actuel de menaces aux droits des femmes, risque d'affaiblir ces droits. La déclaration du Comité évoque ce risque : « Toute initiative qui aboutirait à un système de protection inégale parmi les États parties compromettrait les protections et garanties existantes au titre de la Convention. Le Comité est convaincu qu'un nouveau Protocole facultatif risque de créer un processus parallèle susceptible de compromettre l’obligation de rendre des comptes pour des abus en vertu de la Convention. »

Les attaques contre les droits des femmes surviennent dans un nombre alarmant de pays ; un rapport d’ONU Femmes a signalé qu’en 2024, « une hostilité croissante vis-à-vis de l’égalité des sexes » a été observée dans près d’un pays sur quatre. Le recul des droits reproductifs – aux États-Unis, en Roumanie et ailleurs – n'en est qu'un exemple. Le danger est aussi de plus en plus visible dans des enceintes internationales comme l'ONU, où les droits des femmes sont pris pour cible par certains activistes et mis à mal par des coupes budgétaires drastiques. Un nombre croissant d'États œuvrent ouvertement, dans ces enceintes, à affaiblir les protections des droits des femmes.

Cependant des défenseures des droits des femmes à travers le monde poursuivent leurs efforts, s'unissant pour défendre et appliquer résolument le droit international, notamment la Convention CEDAW, qui reconnaît le droit des femmes à l'égalité. Les mises en garde du Comité de la CEDAW méritent une attention particulière.

Comme le rappelle le Comité : « Le principe de non-discrimination énoncé dans la Convention couvre la violence sexiste à l'égard des femmes et des filles. » Les instruments juridiques internationaux sont clairs, tout comme leur interprétation. Il est essentiel que les gouvernements respectent leurs obligations juridiques internationales, et mettent fin à toutes les formes de violence à l'égard des femmes.

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11.07.2025 à 17:46

Cuba : Des ex-détenus décrivent les abus subis en prison

Human Rights Watch

Deux policiers cubains emmenaient un homme arrêté lors d'une manifestation contre le gouvernement du président Miguel Diaz-Canel à La Havane, le 12 juillet 2021. © 2021 Yamil Lage/AFP via Getty Images Des manifestants détenus pour avoir participé aux manifestations pacifiques de juillet 2021 à Cuba ont été victimes de graves abus en prison, notamment de coups, d'isolement et de manque de soins médicaux.Bien que certains aient été libérés, ils affirment rester sous surveillance constante. Des centaines d'autres sont toujours en prison. Les conditions de vie contre lesquelles ils manifestaient ne se sont pas améliorées.Les autres gouvernements devraient condamner la détention arbitraire et le harcèlement des manifestants, exprimer leurs inquiétudes quant à la grave situation humanitaire dans le pays et soutenir les groupes de défense des droits humains et les journalistes indépendants à Cuba.

(New York) – Des manifestants arrêtés pour avoir participé aux manifestations pacifiques de juillet 2021 à Cuba ont été victimes de graves abus en prison, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Un accord conclu en janvier 2025 a conduit à la libération de nombreux prisonniers, mais des centaines d’autres personnes sont toujours en détention.

D'anciens détenus libérés en janvier, à la suite de négociations menées principalement avec le Vatican, ont déclaré à Human Rights Watch avoir été battus lors de leur détention, et parfois placés à l'isolement en guise de puntion. Ils ont décrit des conditions de détention insalubres et dangereuses pour leur santé, y compris l’insuffisance de l’alimentation et de l’accès à l’eau. Ils ont indiqué qu'ils restent sous surveillance constante, et sont soumis à des conditions strictes, dont certaines semblent avoir été imposées de manière informelle. Nombre d'entre eux craignent d'être renvoyés en prison, et au moins trois des personnes libérées ont été de nouveau arrêtées.

« Il y a quatre ans, le gouvernement cubain a déclenché une vague de répression contre des milliers de Cubains qui sont descendus pacifiquement dans la rue pour réclamer leurs droits et leurs libertés », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « Aujourd'hui, des centaines de personnes sont toujours derrière les barreaux dans des conditions déplorables. »

Entre mars et mai 2025, Human Rights Watch a mené des entretiens téléphoniques avec 17 anciens détenus cubains. Parmi eux figuraient des hommes qui avaient été détenus dans six prisons pour hommes (Alto Río de Guanajay, Boniato, Cerámica Roja, Mar Verde, Valle Grande et Unidad 1580) ainsi que des femmes qui avaient été incarcérées dans deux prisons pour femmes (centres de Guamajal et de Matanzas). Plusieurs personnes ont déclaré avoir été transférées dans des camps pénitentiaires ou d’autres établissements avec des normes sécuritaires moins strictes au cours de leur détention. Trois organisations indépendantes de défense des droits humains – Cubalex, Justicia 11J et Prisoners Defenders – ont facilité le contact avec certains ex-détenus. En raison du risque de représailles, Human Rights Watch s’abstient de divulguer l'identité de la plupart des personnes interrogées.

De nombreux anciens détenus ont décrit des violences physiques infligées par des gardiens de prison. Ils ont déclaré avoir été battus par des gardiens pour avoir crié des slogans antigouvernementaux ou protesté contre les conditions de détention. Nombre d'entre eux ont déclaré avoir été soumis à des positions pénibles, comme celle de la « bicyclette » (« la bicicleta ») parfois aussi appelée position de la « brouette » (« la carretilla »), lors de laquelle les prisonniers sont contraints de courir, menottés, les bras levés au-dessus de la tête.

D'anciens détenus ont systématiquement décrit la surpopulation des cellules et le manque d'accès à la nourriture et à l'eau potable, tant pour les prisonniers politiques que pour les prisonniers de droit commun. « Si ta famille ne t'apporte pas à manger, tu meurs », a déclaré un ancien détenu. « La nourriture qu'ils te donnaient était immangeable. Il y avait des vers dedans », a ajouté un autre.

Les anciens détenus ont décrit des épidémies de gale, de tuberculose, de dengue et de Covid-19, qui, selon eux, n'étaient pas traitées. Ils ont indiqué que les autorités pénitentiaires ignoraient régulièrement les préoccupations médicales et, dans de nombreux cas, punissaient les détenus qui s'inquiétaient de l'insalubrité ou des pénuries alimentaires. Ceux qui protestaient ont déclaré qu'ils étaient fréquemment placés à l'isolement ou privés de visites, d'appels ou d'accès aux colis envoyés par leurs proches.

En janvier 2025, les autorités cubaines ont annoncé la libération de 553 prisonniers à la suite de négociations entre le gouvernement cubain, le Vatican et les États-Unis. Des organisations indépendantes de défense des droits humains, dont Cubalex, Justicia 11J, et Prisoners Defenders, estiment qu'environ 200 des personnes libérées étaient des prisonniers politiques, les autres étant des prisonniers de droit commun.

Le 14 janvier 2025, peu après l’annonce par le gouvernement cubain concernant la libération des prisonniers, l'administration Biden a retiré Cuba de la liste américaine des pays soutenant le terrorisme ; les pays figurant sur cette liste sont soumis à des restrictions portant sur l'aide fournie par les États-Unis, et sur les liens commerciaux. Toutefois, le 20 janvier, premier jour de son deuxième mandat, le président Donald Trump a révoqué cette mesure de l’administration Biden, et a à nouveau rajouté Cuba à cette liste.

De nombreux manifestants libérés ont déclaré être tenus d'accepter des emplois assignés par l'État, de se présenter régulièrement aux agents de sécurité et de demander l'autorisation de quitter leur municipalité. Plusieurs ont également déclaré qu'il leur était interdit de participer à des manifestations publiques, de s'associer à des groupes d'opposition et de publier sur les réseaux sociaux. Dans certains cas au moins, ces conditions semblent avoir été imposées de manière informelle et arbitraire, car elles ne figurent ni dans un ordre écrit ni dans les conditions de libération imposées par un tribunal.

Des membres des services de renseignement, connus sous le nom de « sécurité de l'État », ont suivi les personnes libérées dans la rue et se sont rendus à leur domicile, ont déclaré d'anciens détenus, pour les menacer, les surveiller et leur remettre des convocations écrites ou verbales à comparaître devant un tribunal ou un commissariat. « Bien que libéré de prison, je suis toujours prisonnier », a déclaré l'un d'eux. « C'est comme être un prisonnier dans la rue. »

En avril, les autorités ont de nouveau arrêté José Daniel Ferrer, leader de l'Union patriotique cubaine (Unión Patriótica Cubana, UNPACU), mouvement d'opposition, et Félix Navarro, fondateur du Parti pour la démocratie Pedro Luis Boitel (Partido por la Democracia Pedro Luis Boitel), qui avaient été libérés en janvier. En mai, les autorités ont de nouveau arrêté Donaida Pérez Paseiro, présidente de l'Association des Yorubas libres de Cuba (Asociación Yoruba Libre de Cuba), après qu'elle eut fait campagne sur les réseaux sociaux pour la libération de son mari. Ce dernier est toujours emprisonné en lien avec les manifestations de 2021.

Les Cubains continuent de subir une grave crise économique et sont confrontés à de graves pénuries de nourriture et de médicaments, un facteur important qui les a poussés à descendre dans la rue en juillet 2021. Une enquête menée en 2024 par l'Observatoire cubain des droits humains auprès de plus de 1 100 personnes a révélé que 7 Cubains sur 10 sautent un repas chaque jour et que 61 % d'entre eux peinent à subvenir à leurs besoins essentiels. Dans tout le pays, la population est également confrontée à des coupures de courant quotidiennes allant de 4 à 20 heures.

En raison de la pauvreté et de la répression politique, les Cubains ont quitté le pays en grand nombre. Dix pour cent de la population cubaine, soit plus d'un million de personnes, ont quitté le pays entre 2022 et 2023, selon le directeur de l'Office national des statistiques du pays. Des rapports indépendants indiquent que ce chiffre total pourrait être bien plus élevé.

Les gouvernements d'Amérique latine, du Canada et de l'Union européenne devraient condamner la détention arbitraire et le harcèlement par le gouvernement cubain de manifestants, de journalistes et d’activistes, et exprimer leurs inquiétudes quant aux violations des droits humains et à la grave situation humanitaire dans le pays, a déclaré Human Rights Watch. Les gouvernements devraient également accroître leur soutien aux groupes indépendants de défense des droits humains et aux journalistes à Cuba.

Suite en anglais, comprenant des témoignages d’ex-détenus.

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Articles

AgenziaNova

10.07.2025 à 18:58

Les États-Unis imposent des sanctions à la Rapporteuse spéciale de l'ONU sur le TPO

Human Rights Watch

Click to expand Image La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés, Francesca Albanese, photographiée lors d'une conférence de presse au centre Forenede Nationer Byen (« Cité des Nations Unies ») à Copenhague, au Danemark, le 5 février 2025.  © 2025 Ritzau Scanpix/Sipa USA via AP Photo

Le 9 juillet, le gouvernement des États-Unis a imposé des sanctions à Francesca Albanese, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, poste auquel elle avait été nommée par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies ; ces sanctions ont été imposées dans le cadre d’un décret précédemment émis par le président Donald Trump en février 2025.

Réagissant à l’annonce des sanctions, Liz Evenson, directrice du programme Justice internationale à Human Rights Watch, a fait la déclaration suivante :

« La décision du gouvernement américain de sanctionner Francesca Albanese pour avoir cherché à obtenir justice à travers la Cour pénale internationale vise en réalité à réduire au silence une experte de l'ONU qui fait son travail, dénonce les violations commises par Israël à l’encontre des Palestiniens, et appelle les gouvernements et les entreprises à ne pas se rendre complices de ces violations. Les États-Unis cherchent à démanteler les normes et les institutions sur lesquelles s’appuient les survivants de graves abus. Les pays membres de l'ONU et de la CPI devraient fermement résister aux efforts éhontés du gouvernement américain visant à bloquer la justice pour les crimes les plus graves au monde, et condamner les sanctions scandaleuses prises à l’encontre de Francesca Albanese. »

Autres communiqués de HRW sur Israël et la Palestine :

https://www.hrw.org/fr/moyen-orient/afrique-du-nord/israel/palestine

Autres communiqués de HRW sur la justice internationale :

https://www.hrw.org/fr/topic/justice-internationale

09.07.2025 à 06:00

Un an plus tard, deux activistes guinéens toujours portés disparus

Human Rights Watch

Click to expand Image Une affiche créée par la coalition de l'opposition, le Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), montrant Mamadou Billo Bah (à gauche) et Oumar Sylla, connu sous le nom de Foniké Mengué (à droite). © 2024 Front National pour la Défense de la Constitution

(Nairobi) – Les autorités militaires guinéennes devraient mener une enquête crédible sur les disparitions de deux activistes politiques, divulguer leur lieu de détention, et soit les inculper, soit les libérer immédiatement, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch.

Il y a un an, les forces de sécurité ont arrêté arbitrairement trois membres de la coalition d'opposition Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC), Oumar Sylla (connu sous le nom de Foniké Menguè), Mamadou Billo Bah et Mohamed Cissé, à Conakry, la capitale guinéenne, et les ont transférés vers un lieu non identifié. Human Rights Watch a reçu des informations crédibles, confirmées par des médias nationaux et internationaux, selon lesquelles les forces de sécurité auraient torturé les trois hommes. Mohamed Cissé a été libéré le 10 juillet 2024, tandis qu’Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah sont toujours portés disparus.

« Cela fait un an qu’Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah ont disparu, et les autorités guinéennes n'ont toujours pas mené d'enquête crédible », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « Les autorités guinéennes devraient mener une enquête approfondie et indépendante sur ces disparitions et poursuivre les responsables. »

Les autorités ont ouvert une enquête sur la disparition des trois hommes. Mais elles ont nié toute responsabilité et n'ont pas reconnu la détention des hommes ni révélé où ils se trouvaient, malgré les demandes d'informations de leurs avocats et d’organisations nationales et internationales de défense des droits humains.

Le 9 juillet 2024, des dizaines de soldats, de gendarmes et d'hommes armés en civil ont fait irruption au domicile d’Oumar Sylla et l’ont arrêté arbitrairement, ainsi que les deux autres hommes. Les forces de sécurité ont frappé à plusieurs reprises les trois militants politiques, puis les ont emmenés au quartier général de la gendarmerie à Conakry, avant de les transférer dans un camp militaire sur l'île de Kassa, au large de de la capitale.

Le FNDC appelle au rétablissement de la démocratie en Guinée depuis le coup d'État militaire de septembre 2021. En août 2022, la junte guinéenne, dirigée par le général Mamady Doumbouya, a dissous le FNDC pour des raisons politiques, mais celui-ci a poursuivi ses activités.

Le matin de sa disparition, Oumar Sylla, qui est le coordinateur du FNDC, avait exhorté ses partisans à manifester le 11 juillet 2024 contre la fermeture des médias par les autorités et le coût élevé de la vie.

Oumar Sylla faisait partie des personnes arrêtées en 2022 pour « manifestation illicite [et] destruction d’édifice public et privé » à la suite des manifestations violentes ayant eu lieu à Conakry au cours desquelles au moins cinq personnes ont été tuées. Mamadou Billo Bah, le coordinateur de la communication du FNDC, avait déjà été arrêté en janvier 2023 pour « complicité de destruction d’édifices publics et privés, coups et blessures volontaires » pour avoir participé à des manifestations. Tous deux ont été libérés en mai 2023 et innocentés de toute accusation.

Depuis sa prise de pouvoir, la junte a suspendu les médias indépendants et procédé à des arrestations arbitraires et à des disparitions forcées de journalistes et d'opposants politiques. Les forces de sécurité ont fait un usage excessif de la force, notamment de gaz lacrymogènes et de tirs à balles réelles, pour disperser des manifestants pacifiques, causant la mort de dizaines de personnes depuis janvier 2024.

Le 21 juin, des hommes armés ont enlevé et torturé Mohamed Traoré, un éminent avocat et ancien président du barreau, en représailles apparentes à sa décision de démissionner du Conseil national de transition, le principal organe de transition de la junte.

Les autorités militaires ont promis d'organiser des élections avant la fin de 2024, mais n'ont pas respecté ce délai, ce qui a déclenché des manifestations menées par l'opposition à Conakry en janvier. À la suite de ces manifestations, les autorités ont annoncé un nouveau calendrier électoral. Le général Mamady Doumbouya a fixé la date du référendum constitutionnel au 21 septembre, et le Premier ministre Amadou Oury Bah a annoncé en mai que les élections présidentielles auraient lieu en décembre.

« Après quatre ans de régime militaire, la répression des droits et libertés n'a fait que s'intensifier », a déclaré un éminent membre du FNDC qui est entré dans la clandestinité. « Le gouvernement a étouffé la liberté d'expression et de réunion ; il a neutralisé l'opposition politique par des arrestations arbitraires, des disparitions forcées, du harcèlement et des intimidations. Trop c’est trop. »

Selon le droit international, une disparition forcée survient lorsque des personnes agissant au nom du gouvernement arrêtent, détiennent ou enlèvent des personnes. puis refusent de reconnaître cet acte ou dissimulent leur lieu de détention ou ce qui leur est arrivé. Le droit international interdit les disparitions forcées, qui violent les droits fondamentaux à la liberté et à la sécurité, ainsi que le droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains et dégradants.

La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées stipule que « nul ne sera soumis à une disparition forcée » et impose une interdiction absolue de la détention en secret. Elle exige également des pays qu'ils mettent fin aux pratiques abusives qui facilitent les disparitions forcées, notamment la détention arbitraire au secret, la torture et les exécutions extrajudiciaires.

La Guinée n'est pas un État partie à ce traité, mais est tenue de respecter le droit international relatif aux droits humains qui interdit les arrestations illégales, les enlèvements, les détentions arbitraires, les mauvais traitements infligés aux détenus et autres violations de procédure. Elle garantit aux victimes d'abus le droit à un recours effectif.

« Lorsque les autorités nient avoir connaissance des détentions, elles privent les détenus de toute protection et les exposent à des crimes encore plus graves, comme la torture », a déclaré Ilaria Allegrozzi. « Les autorités devraient prendre des mesures immédiates et concrètes en menant une enquête crédible sur les disparitions des deux activistes, et en ratifiant la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. »

09.07.2025 à 00:00

Corée du Sud : Des travailleurs âgés peu rémunérés dans des conditions précaires

Human Rights Watch

Click to expand Image Des offres d’emploi ne spécifiant pas de limites d’âge étaient affichées sur le mur d’un salon de l’emploi pour des personnes âgées tenu dans la ville de Suwon, au sud de Séoul, en Corée du Sud, en octobre 2019. © 2019 Yonhap/EPA-EFE/Shutterstock Les lois et les politiques sud-coréennes en matière d’emploi qui sont fondées sur l’âge discriminent les travailleurs âgés en les forçant souvent à prendre leur retraite de leur emploi principal et en les poussant à effectuer des travaux mal payés et précaires.L’insuffisance de la sécurité sociale aggrave cette perte de revenus, ce qui crée un système qui punit les travailleurs pour avoir vieilli.Le gouvernement devrait supprimer l’établissement d’un âge de retraite obligatoire, fixé à 60 ans ou plus, ainsi que le système de « pic salarial », et réformer les programmes de réemploi et de sécurité sociale.

(Séoul, 9 juillet 2025) – Les lois et les politiques sud-coréennes en matière d’emploi qui sont fondées sur l’âge discriminent les travailleurs âgés, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. L’insuffisance du système de sécurité sociale aggrave les difficultés que rencontrent les personnes âgées.

Le rapport de 72 pages, intitulé « Punished for Getting Older: South Korea’s Age-based Policies and Older Workers’ Rights » (« Punis pour avoir vieilli : Politiques sud-coréennes fondées sur l’âge et droits des travailleurs âgés »), décrit comment trois lois ou politiques fondées sur l’âge – la fixation de l’âge de retraite obligatoire à 60 ans ou plus, le système de « pic salarial » et les politiques de réemploi – portent préjudice aux travailleurs âgés, et en quoi les programmes insuffisants de sécurité sociale aggravent leur situation.

8 juillet 2025 Punished For Getting Older

« Les lois et les politiques sud-coréennes qui devraient protéger les travailleurs âgés contre la discrimination liée à l’âge produisent l’effet inverse», a déclaré Bridget Sleap, chercheuse senior sur les droits des personnes âgées auprès de Human Rights Watch. « Elles privent ces personnes de l’opportunité de continuer à travailler dans leur emploi principal, conduisent à une rémunération inferieure et les poussent vers des travaux moins bien payés et précaires, uniquement à cause de leur âge. Le gouvernement devrait cesser de punir des travailleurs simplement parce qu’ils prennent de l’âge. »

Entre février et septembre 2024, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 34 travailleurs sud-coréens, âgés de 42 à 72 ans, ayant été employés dans les secteurs public et privé à Séoul, ainsi qu’avec 41 autres personnes : des chercheurs, des syndicalistes sud-coréens, des représentants d’organisations non gouvernementales et un journaliste. Human Rights Watch a également examiné la législation nationale et des rapports en coréen et en anglais émis par le gouvernement, des universitaires, des syndicats, des médias et des institutions internationales.

La loi sud-coréenne interdisant la discrimination fondée sur l’âge dans le monde du travail (en anglais « Act on Prohibition of Age Discrimination in Employment and Elderly Employment Promotion »), autorise les employeurs des secteurs public et privé à fixer un âge obligatoire de retraite à 60 ans ou davantage, quelles que soient les compétences professionnelles de l’employé-e. Cette pratique est particulièrement répandue dans le secteur public sud-coréen, et dans les grandes entreprises de plus de 300 employés.

Human Rights Watch a constaté que le système de « pic salarial » (« peak wage »), qui permet aux employeurs de réduire les salaires des travailleurs les plus âgés au cours des trois à cinq ans qui précèdent leur retraite obligatoire, représente un préjudice financier et mental, et qu’il est fondé sur des stéréotypes âgistes. Ce système peut également affecter d’autres bénéfices auxquels ont droit les travailleurs, comme les contributions à la retraite, les indemnités de licenciement ou les allocations chômage.

Un homme âgé de 59 ans a expliqué à Human Rights Watch que son employeur l’a ainsi prévenu qu’il serait obligé de prendre sa retraite dans un an. Mais lors de sa dernière année professionnelle, il ne touchera que 52 % de ce qu’il gagnait à 55 ans. « C’est de la discrimination, puisque notre revenu n’a été réduit qu’en raison de notre âge », a-t-il déclaré. « Ce n’est pas justifié.  »

Human Rights Watch a constaté que le fait d’être forcé à prendre sa retraite affectait par ailleurs les travailleurs les plus âgés sur le plan de leur santé mentale et de leur bien-être.

Une infirmière de 59 ans, qui sera obligée de prendre sa retraite à 60 ans, après avoir travaillé pendant 36 ans, a témoigné : « Je ne peux pas m’imaginer en dehors de cette organisation. J’aurais l’impression de me retrouver toute seule au bord d’une route balayée par le vent. » 

D’après le droit international relatif aux droits humains, le fait de traiter les personnes différemment en se fondant sur un motif prohibé, comme l’âge, doit répondre à un critère de justification afin de veiller à ce que ce traitement ait un objectif légitime et soit à la fois proportionnel et nécessaire. Mais dans le droit sud-coréen, le fait de fixer un âge de retraite obligatoire ne nécessite aucune justification et les travailleurs plus âgés ne peuvent pas le remettre en question comme discriminatoire. 

Human Rights Watch a constaté que les lois et politiques sud-coréennes fondées sur l’âge constituaient bien une discrimination. Les objectifs respectifs de l’âge obligatoire de retraite et du système de pic salarial sont de maintenir les travailleurs âgés dans leur emploi principal jusqu’à l’âge de 60 ans au moins, et de financer l’emploi de jeunes travailleurs. Cependant, le préjudice causé aux travailleurs les plus âgés pèse davantage dans la balance que les avantages éventuels. 

Le gouvernement pourrait employer des méthodes moins nocives pour atteindre ces objectifs, notamment le développement des compétences professionnelles des travailleurs plus âgés et des subventions incitant les employeurs à recruter de jeunes travailleurs. Même si ces politiques affectent tous les travailleurs âgés, elles ont un impact disproportionné sur les femmes, qui ont souvent moins d’opportunités, au cours de leur carrière, d’obtenir des postes importants, des salaires élevés et des économies ou des retraites confortables.

D’après la loi nationale interdisant la discrimination fondée sur l’âge dans le monde du travail, les gouvernements locaux ainsi que l’État ont la responsabilité de soutenir le réemploi des travailleurs âgés après que ceux-ci ont pris leur retraite de leur emploi principal. Toutefois, Human Rights Watch a constaté que ce n’était pas une solution, puisque les programmes existants de réemploi forcent les travailleurs âgés à accepter du travail moins bien payé et plus précaire. 

En moyenne, les travailleurs ayant 60 ans et plus gagnent 29 % de moins que ceux qui sont plus jeunes, d’après des données issues du gouvernement. De plus, les travailleurs âgés réemployés se concentrent dans les activités mal payées, comme celles d’agent de sécurité ou de soin aux personnes, dont les travailleurs plus jeunes ne veulent pas. Une telle « ségrégation professionnelle » fondée sur l’âge est une forme de discrimination. 

Ces problèmes sont exacerbés par un système de sécurité sociale insuffisant, qui ne répond pas aux normes relatives aux droits humains, a déclaré Human Rights Watch. Les personnes forcées à prendre leur retraite à 60 ans n’ont droit qu’à une allocation chômage de maximum 270 jours. Elles peuvent attendre jusqu’à cinq ans pour être éligibles à la « pension nationale du troisième âge » ou à la pension de base. En 2023, seules 40 % des personnes de plus de 60 ans recevaient une pension nationale du troisième âge.

La Corée du Sud a l’obligation, en vertu du droit international relatif aux droits humains, de veiller à ce que tout le monde puisse jouir de ses droits à la non-discrimination, au travail et à la sécurité sociale, quel que soit son âge. Le gouvernement sud-coréen devrait abolir la possibilité de fixer un âge de retraite obligatoire à 60 ans ou davantage, ainsi que le système de pic salarial. Il devrait également réformer les programmes de réemploi et de sécurité sociale afin de garantir que les personnes âgées aient le même accès à des opportunités d’emploi équitables, favorables et significatives, et qu’elles reçoivent au moins un revenu permettant de vivre.

« Les lois et politiques sud-coréennes en matière d’emploi fondées sur l’âge discriminent les personnes âgées et les générations futures », a conclu Bridget Sleap. « Le gouvernement devrait adopter une loi anti-discrimination de vaste portée pour lutter contre toutes les formes de discrimination, y compris celle fondée sur l’âge et les préjugés âgistes. »

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08.07.2025 à 18:37

Afghanistan : La CPI a émis des mandats d'arrêt contre deux hauts dirigeants talibans

Human Rights Watch

Click to expand Image Une salle de classe vide dans une école à Kaboul, en Afghanistan, photographiée le 22 décembre 2022. Les talibans ont interdit aux filles de ce pays de bénéficier d’un enseignement secondaire. © 2022 Ebrahim Noroozi/AP Photo

(New York, 8 juillet 2025) – Le 8 juillet, dans le cadre de son enquête sur l’Afghanistan, la Cour pénale internationale (CPI) a émis des mandats d’arrêt contre deux hauts dirigeants talibans ; ces deux mandats sont actuellement sous scellés.

Réagissant à cette annonce, Liz Evenson, directrice du programme Justice internationale à Human Rights Watch, a fait la déclaration suivante :

« Deux hauts dirigeants talibans sont désormais recherchés par la Cour pénale internationale en raison de leur persécution présumée de femmes et de filles afghanes, et de personnes non conformes en matière de genre. La communauté internationale devrait soutenir pleinement le travail crucial de la CPI portant sur l’Afghanistan, y compris par le biais d’efforts concertés à l’échelle mondiale pour faire exécuter les mandats d’arrêt de la Cour. Les arrestations prennent du temps, mais le transfert à la CPI de l’ex-président philippin Rodrigo Duterte pour répondre d’accusations d’exécutions extrajudiciaires présumées montre que lorsque la justice est soutenue, les victimes peuvent être entendues. Le Bureau du Procureur de la CPI devrait poursuivre ses enquêtes afin d’offrir un espoir de justice aux victimes d’autres exactions commises par les talibans, ainsi qu’aux victimes d’abus commis par les forces de l’État islamique de la Province du Khorassan, par les anciennes forces de sécurité afghanes, et par des membres des forces américaines. Pour mettre fin aux cycles de violence et d’impunité en Afghanistan, il est essentiel de garantir un accès égalitaire à la justice à toutes les victimes, quels que soient les auteurs des abus. »

Précédent communiqué du 23/01/25 :

https://www.hrw.org/fr/news/2025/01/23/afghanistan-le-procureur-de-la-cpi-requiert-des-poursuites-pour-persecution-liee-au

08.07.2025 à 07:00

Pérou : Le Congrès compromet la lutte contre le crime organisé

Human Rights Watch

Un homme brandissait une pancarte avec le message « Pour nos vies, nous marchons aujourd'hui », lors d’une manifestation tenue le 21 mars 2025 dans la capitale du Pérou, Lima, pour protester contre la criminalité croissante et l'insécurité dans ce pays. © 2025 Reuters/Sebastian Castaneda Des lois adoptées par le Congrès péruvien ont porté atteinte à l’indépendance des juges et des procureurs, et à leur capacité à lutter contre le crime organisé.Le nombre d’homicides, d’actes d’extorsion et d’incidents d’exploitation minière illégale a connu une croissance exponentielle ces dernières années, portant atteinte au droit à la vie et à l’intégrité physique des Péruviens.Alors que le Pérou poursuit son processus d’adhésion à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), cette organisation devrait faire pression sur les autorités péruviennes pour qu’elles suppriment les obstacles à la lutte contre la criminalité et garantissent la séparation des pouvoirs.

(Lima, 8 juillet 2025) – Le Congrès péruvien porte atteinte à l’indépendance des juges et des procureurs et à leur capacité à lutter contre le crime organisé, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. 

8 juillet 2025 Congress in Cahoots

Le rapport de 43 pages, intitulé « Congress in Cahoots: How Peru’s Legislature is Allowing Organized Crime to Thrive » (« Le Congrès complice : Comment le parlement péruvien permet l’essor du crime organisé »), détaille comment les récentes mesures législatives et décisions prises par le Congrès ont entravé les efforts déployés pour enquêter sur les réseaux criminels et engager des poursuites en justice, érodé l’autonomie d’institutions publiques clés et réduit les protections environnementales. L’administration de la présidente Dina Boluarte a souvent facilité la mise en œuvre de cette approche, tout en s’appuyant largement sur des déclarations d’« état d’urgence » – suspendant provisoirement les droits constitutionnels – comme principal outil de lutte contre la criminalité.

« L’attaque du Congrès contre l’état de droit a exposé des millions de Péruviens à davantage de menaces liées au crime organisé », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques de Human Rights Watch. « Le Congrès et l’administration de la présidente Dina Boluarte devraient d’urgence changer de cap et prendre des mesures efficaces pour protéger les droits de tous les Péruviens. »

Entre septembre 2023 et décembre 2024, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 125 procureurs, juges, policiers, défenseurs de l’environnement, dirigeants autochtones, journalistes et responsables au sein du gouvernement. Des chercheurs se sont rendus à Lima, Puerto Maldonado, Pucallpa et Trujillo, et ont passé en revue 34 lois, projets de loi et décisions législatives adoptés par le Congrès, ainsi que 54 décrets présidentiels publiés depuis 2023.

La situation sécuritaire au Pérou s’est détériorée ces dernières années. Selon les données fournies par la police, le nombre annuel d’homicides a augmenté de près de 137 % entre 2018 et 2024, et les chiffres provisoires pour 2025 laissent présager une nouvelle année record. Selon la police, plus de la moitié des homicides commis en 2024 l’ont été par des tueurs à gages. Les plaintes pour extorsion, qui touchent particulièrement les zones urbaines et le transport de marchandises, ont atteint un pic en 2023. Elles sont restées élevées en 2024 et pourraient atteindre un nouveau pic en 2025.

Hausse du nombre d'homicides au Pérou (2018-2024) Click to expand Image Tableau montrant la forte hausse du nombre d’homicides officiellement enregistrés au Pérou entre 2018 (1 076 homicides) et 2024 (2 552 homicides). © 2025 Human Rights Watch

Le Congrès, dont plus de la moitié des députés font l’objet d’enquêtes pour corruption ou autres crimes, a pris des mesures qui sapent l’indépendance et les pouvoirs des tribunaux et des procureurs. Il a fortement limité la capacité des procureurs à réunir des preuves et poursuivre des pistes d’enquête auprès des accusés disposés à coopérer, portant un coup dur aux efforts de démantèlement des groupes criminels et de détection des liens avec des responsables accusés de corruption. Le Congrès a par ailleurs modifié la définition du « crime organisé » dans le code pénal en vue d’exclure de nombreux délits de corruption, tout en créant des obstacles aux perquisitions menées dans le cadre des enquêtes. De plus, les députés ont arbitrairement démis de leurs fonctions des juges et des procureurs de haut rang, le plus souvent dans le but de bloquer les enquêtes sur la corruption.

« Une politique de sécurité effective et respectueuse des droits au Pérou implique de renforcer, et non d’affaiblir, les outils dont disposent les experts médico-légaux, les procureurs et les juges pour rendre justice aux victimes du crime organisé », a déclaré Juanita Goebertus.

Le Congrès a également adopté des lois qui nuisent à la protection de l’environnement, notamment en légalisant rétroactivement la déforestation illégale de vastes superficies et en protégeant de facto les mineurs illégaux contre les poursuites judiciaires. L’exploitation minière illégale, principalement celle de l’or à petite échelle, a connu une forte augmentation ces dernières années et constitue la principale infraction permettant le blanchiment d’argent, selon des données fournies par le gouvernement.

Si l’exploitation minière à petite échelle peut constituer une source importante de revenus pour les populations pauvres, elle comporte également des risques considérables pour l’environnement, la santé et les droits du travail lorsqu’elle n’est pas soumise à une réglementation et à une surveillance rigoureuses. Près de la moitié des attaques contre des défenseurs de l’environnement et des leaders autochtones entre 2020 et 2023 étaient liées à l’exploitation minière illégale, selon le Bureau du médiateur.

« Le nombre d’hectares touchés par l’exploitation minière illégale continue d’augmenter d’année en année, sans aucune réaction de la part de l’État, entraînant une recrudescence, dans ces régions, de crimes liés à cette activité, tels que le trafic, les viols et les homicides », a déclaré à Human Rights Watch un procureur de haut rang travaillant en Amazonie péruvienne.

Pour lutter contre la criminalité, la présidente Dina Boluarte a de plus en plus recours à la mise en place d’états d’urgence qui entraînent la suspension des droits constitutionnels dans les zones où ils sont décrétés. Ces mesures n’ont cependant pas permis de réduire le niveau de la violence.

De récentes mesures législatives menacent également de restreindre considérablement le travail des journalistes indépendants et des organisations de la société civile au Pérou. En mars 2025, le Congrès a adopté un projet de loi qui augmente fortement les pouvoirs du gouvernement en matière de contrôle des journalistes et des organisations non gouvernementales qui reçoivent des financements étrangers.

Le Pérou est actuellement candidat à l’adhésion à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui regroupe principalement des pays à revenu élevé et promeut des politiques visant à améliorer le bien-être économique et social des populations à travers le monde. Plus d’une douzaine de comités de l’OCDE examinent actuellement la conformité du Pérou aux normes applicables en matière de gouvernance publique, de politique environnementale et d’état de droit.

« L’OCDE devrait insister pour que les autorités péruviennes s’engagent à lever les obstacles à la lutte contre le crime organisé, la destruction de l’environnement et la corruption, et à garantir la séparation des pouvoirs », a affirmé Juanita Goebertus.

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Articles

LaLibre.be 

07.07.2025 à 20:00

Un activiste de premier plan toujours détenu au Niger

Human Rights Watch

Le 4 juillet, un tribunal de Niamey, la capitale du Niger, a rejeté le recours en appel de Moussa Tiangari, éminent activiste des droits humains et détracteur du gouvernement. Détenu depuis décembre 2024, cet appel était sa troisième tentative de faire annuler les poursuites engagées contre lui pour des motifs politiques.

Click to expand Image Moussa Tiangari, Niamey, Niger, Juin 2024. © 2024 Amnesty International

Âgé de 55 ans, Moussa Tiangari est le Secrétaire général de l'organisation de la société civile Alternative Espaces Citoyens (AEC). Il a été arrêté à son domicile à Niamey le 3 décembre 2024, et le lieu de sa détention est resté inconnu pendant deux jours. Le 5 décembre, ses avocats l’ont finalement retrouvé au Service Central de Lutte contre le Terrorisme et la Criminalité Transnationale Organisée (SCLCT/CTO) du Niger.

Un mois plus tard, le 3 janvier 2025, la Haute Cour de Niamey l’a inculpé d’« association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste » et de « complot contre l’autorité de l’État en intelligence avec des puissances ennemies », entre autres infractions. S'il est reconnu coupable de complot avec des puissances ennemies, il risque la peine de mort. Depuis lors, il est maintenu en détention provisoire et son affaire n'a pas encore été portée devant un juge.

La décision rendue la semaine dernière par la Cour d’appel de Niamey de maintenir Moussa Tiangari en détention est survenue quelques jours seulement après l’interdiction par le ministre de l'Intérieur du Niger d’une série de séminaires sur le droit à l'alimentation prévus par l'AEC à travers le pays. Selon les Nations Unies, plus de 2,2 millions de personnes au Niger sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë cette année en raison des conflits, des chocs climatiques et de la flambée des prix. Le ministre de l'Intérieur n'a fourni aucune raison pour justifier cette interdiction.

Depuis sa prise de pouvoir lors d'un coup d'État en juillet 2023, la junte militaire nigérienne a réprimé l'opposition, les médias et la société civile. L'ancien président Mohamed Bazoum et son épouse sont détenus arbitrairement à Niamey pour des raisons politiques, depuis le coup d'État. Le 31 mai, la junte a expulsé du pays le Comité international de la Croix-Rouge, qui menait un travail humanitaire essentiel, accusant l'organisation de « collusion avec des groupes armés ».

Moussa Tiangari n'a pas sa place en prison. Il devrait être libéré et les autorités devraient abandonner toutes les accusations retenues contre lui. Les autorités devraient en outre libérer toutes les autres personnes arrêtées arbitrairement, et mettre fin à leurs attaques contre la société civile.

07.07.2025 à 01:00

Chine : Dix ans après la « Répression 709 », des avocats sont toujours harcelés

Human Rights Watch

Click to expand Image Des manifestants tenaient des pancartes appelant à la libération d’avocats chinois emprisonnés, dont Wang Quanzhang, lors d’un rassemblement devant le Bureau de liaison du gouvernement chinois à Hong Kong, le 26 décembre 2018.  © 2018 S.C. Leung/SOPA Images/LightRocket via Getty Images Dix ans après une vague de répression contre des avocats défenseurs des droits humains, le gouvernement chinois continue de persécuter et de réduire au silence les avocats qui dénoncent les abus commis par les autorités.Le gouvernement de Xi Jinping a cherché à éradiquer l'influence des avocats qui défendent les droits humains, tout en contraignant les autres professionnels du secteur juridique à soutenir le programme politique du Parti communiste chinois.Le gouvernement chinois devrait cesser de persécuter les avocats défenseurs des droits, et rétablir les licences révoquées. Les gouvernements préoccupés devraient s'exprimer ouvertement pour soutenir ces avocats, y compris ceux qui cherchent refuge à l'étranger.

(New York, 6 juillet 2025) – Dix ans après le lancement de l’opération « Répression 709 » ciblant les avocats défenseurs droits humains, le gouvernement chinois continue de persécuter et de réduire au silence les avocats qui dénoncent les abus commis par les autorités, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Le Parti communiste chinois a également renforcé le contrôle idéologique sur la profession juridique au sens large.

En juillet 2015, la police chinoise a arrêté et interrogé environ 300 avocats, assistants juridiques et activistes à travers le pays ; ces personnes étaient membres d'une communauté informelle connue sous le nom de « mouvement de défense des droits », dont l'influence avait augmenté entre 2003 et 2013. Parmi les individus arrêtés, certains ont été victimes de disparition forcée pendant des mois et torturés, et dix ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Au cours de la décennie qui a suivi, les autorités ont soumis nombre d'entre eux à la surveillance, au harcèlement, à l'humiliation publique et a des punitions collectives ; dans certains cas, elles ont révoqué ou annulé leur licence ou celles de leur cabinet d'avocats.

« Sous Xi Jinping, le gouvernement chinois cherche à éradiquer l'influence des avocats qui défendent les droits humains, tout en contraignant les autres professionnels du secteur juridique à soutenir les programmes du Parti communiste chinois », a déclaré Maya Wang, directrice adjointe pour la Chine auprès de la division Asie à Human Rights Watch. « Au cours de la dernière décennie, les autorités ont réduit au silence les avocats défenseurs des droits, même si nombre d'entre eux trouvent encore des moyens de lutter contre l'injustice sociale. »

Human Rights Watch a examiné divers documents officiels concernant les avocats et les cabinets d'avocats visés par la campagne « Répression 709 », surnommée ainsi en raison de la date de son lancement, le 9 juillet 2015. Human Rights Watch a également mené des entretiens avec sept avocats défenseurs des droits humains, et un autre avocat non impliqué dans ce type d’activisme.

Outre le harcèlement constant des avocats, les autorités exigent de plus en plus souvent qu'ils fassent preuve d'une « loyauté absolue » envers le Parti communiste chinois (PCC), requérant que des cabinets d’avocats créent des cellules du PCC et suivent leurs directives. L'élargissement de l'accès aux services juridiques publics fournis par le gouvernement a accru le rôle des avocats agréés par le PCC, au détriment de celui des avocats défenseurs des droits humains ; le gouvernement utilise ainsi le système judiciaire pour désamorcer des conflits, et renforcer son contrôle social.

Le gouvernement chinois devrait cesser de persécuter les avocats défenseurs des droits humains, indemniser les victimes d'abus passés et récents et rétablir les licences de ces avocats et de leurs cabinets, a déclaré Human Rights Watch. À l'occasion du 10ème anniversaire de la « Répression 709 », les gouvernements préoccupés devraient exprimer leur soutien aux avocats chinois défenseurs des droits humains, et soutenir ceux qui cherchent refuge à l'étranger.

« Les avocats chinois défenseurs des droits humains et leurs familles ont énormément souffert en raison de leurs efforts visant à aider des concitoyens à obtenir justice », a conclu Maya Wang. « Afin de contrer leur persécution continuelle et les tentatives de les réduire au silence, les gouvernements étrangers devraient soutenir ces juristes courageux par le biais d’une reconnaissance internationale et de mesures de solidarité. »

Suite détaillée en anglais, comprenant des témoignages d’avocats chinois.

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04.07.2025 à 13:55

République centrafricaine : Des activistes arrêtés lors d'une cérémonie commémorative

Human Rights Watch

Click to expand Image Des participants à la veillée organisée en la mémoire des élèves décédés dans l'explosion du 25 juin au lycée Barthélémy Boganda, le 27 juin 2025, à Bangui, en République centrafricaine. © 2025 Privé

(Nairobi) – Les autorités centrafricaines ont arrêté des activistes qui organisaient une cérémonie commémorative en hommage aux élèves décédés dans une explosion ayant eu lieu dans un lycée, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch.

Le 27 juin 2025, des activistes de la société civile ont organisé une veillée en mémoire des élèves décédés dans l'explosion du 25 juin au lycée Barthélemy Boganda de Bangui, la capitale, où ils passaient leurs examens de fin d'année. Selon les médias, le bilan s’est élevé à 29 morts et au moins 250 blessés. Les autorités ont arrêté sept personnes lors de la cérémonie commémorative, dont trois organisateurs, qui ont toutes depuis été libérées.

« Des élèves ne devraient pas craindre pour leur vie ou leur intégrité physique lorsqu'ils vont à l'école, et ils ont droit à une pleine reddition des comptes publique », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. « Le gouvernement devrait respecter son obligation de mener des enquêtes transparentes et efficaces et ne pas prendre pour cible ceux qui réclament des comptes. »

Le gouvernement a publié une déclaration le 1er juillet indiquant que 20 élèves étaient morts et 65 autres avaient été hospitalisés. Il a promis d'enquêter sur les causes de l'explosion.

L'explosion, qui s'est produite lors du rétablissement de l'alimentation électrique d'un transformateur électrique sur place, a provoqué une bousculade parmi les 5 000 élèves qui passaient des examens, selon des témoins et des médias. Un élève a déclaré à Human Rights Watch que les ambulances avaient mis beaucoup de temps à arriver et que des passants avaient dû transporter les blessés à l'hôpital en taxi-moto.

« Ma fille a sauté d’une fenêtre au deuxième étage », a déclaré à Human Rights Watch le père d'une victime âgée de 21 ans, qui n'était pas sur les lieux. « Ses amis et camarades de classe ont attendu plus d'une heure l'arrivée d'une ambulance et ont décidé de la transporter en moto, mais elle est décédée pendant le trajet vers l'hôpital. C'était son examen de fin d'études secondaires et elle était enthousiaste quant à son avenir. Nous l'avons enterrée hier et nous sommes encore sous le choc. »

Les journalistes qui ont couvert l'incident ont déclaré à Human Rights Watch que le nombre de morts s'élevait à 29 et que le nombre de blessés, y compris les blessés graves, était également supérieur au bilan officiel. Le gouvernement devrait mener immédiatement une enquête efficace, transparente et publique sur les causes et l'ampleur des dégâts, a déclaré Human Rights Watch.

Le président a décrété trois jours de deuil national, du 27 au 29 juin. Des activistes de la société civile appartenant à un groupe de coordination, le Groupe de Travail de la Société Civile, ont organisé une veillée le 27 juin pour commémorer la mort des victimes, réclamer des écoles plus sûres et exiger une enquête.

L'un des activistes a déclaré à Human Rights Watch que les organisateurs avaient tenté d'organiser la cérémonie commémorative au lycée, mais que le ministère de l'Éducation leur avait refusé l'accès au motif de l’enquête en cours. Comprenant cette raison, ils ont choisi un autre lieu, mais le ministre de la Sécurité a déclaré que la veillée n'était pas autorisée, invoquant une interdiction de manifester dans l’espace public datant de 2022.

Les organisateurs, les élèves et les familles d’élèves ont tout de même commencé à tenir la veillée, avant que la police ne les disperse et arrête sept personnes, dont les trois organisateurs, Gervais Lakosso, Fernand Mandé Djapou et Paul Crescent Beninga, ont déclaré les activistes.

Des photos montrant la police en train de frapper les participants à la veillée, vues par Human Rights Watch, ont circulé sur les réseaux sociaux. Human Rights Watch a également reçu des photos de l'un des organisateurs de la veillée montrant les blessures qu'il a subies lorsqu'il a été jeté dans un camion de police.

« Nous essayions d'allumer des bougies et de déposer des fleurs en mémoire de ceux que nous avons perdus », a déclaré Paul Crescent Beninga. « En quoi cela représente-t-il un risque sécuritaire ? Nous faisions le deuil de nos jeunes qui étudiaient pour leur avenir, et la police est venue, nous a frappés, arrêtés et emmenés. »

Au cours de leur interrogatoire, trois militants de la société civile ont été accusés de manière informelle par la police d'« association avec des criminels » et d'avoir des liens avec le Bloc républicain pour la défense de la constitution, une coalition de partis d'opposition. Les proches du gouvernement dénigrent souvent cette coalition et l'accusent de soutenir des groupes armés.

« Nous avons été traités comme des criminels et des traîtres », a déclaré Fernand Mandé Djapou.

Le ministère de la Sécurité intérieure a publié sur sa page Facebook son refus de la demande des activistes d'organiser la cérémonie commémorative, accompagnée de photos des trois activistes menottés. Le message indique que les « détenus », bien que libres, seront « soumis à une surveillance policière étroite ».

Les autorités ont emmené Gervais Lakosso et Fernand Mandé Djapou dans une cellule de l'Unité de sécurité nationale et Paul Crescent Beninga dans une cellule de l'Office central pour la répression du banditisme (OCRB), une unité de police de Bangui connue pour ses abus, où ils ont passé la nuit. Envoyer un activiste placé en détention pour avoir organisé une cérémonie commémorative en hommage à des élèves décédés dans un établissement géré par une unité connue pour ses actes de torture, ses exécutions et ses tirs à vue sur les suspects ne peut avoir pour but que d'intimider et d'envoyer un message menaçant aux activistes.

Les trois militants, ainsi que les quatre autres personnes arrêtées avec eux, ont été libérés après l'intervention du président Faustin-Archange Touadéra, selon les activistes et la page Facebook du ministère.

Depuis 2022, les autorités centrafricaines répriment la société civile, les médias et les partis politiques d'opposition. La police a empêché des manifestations politiques de l'opposition et des responsables gouvernementaux ont porté des accusations infondées selon lesquelles des activistes de la société civile collaboreraient avec des groupes armés.

La répression s'est intensifiée à l'approche des élections locales et nationales de 2023, et un référendum organisé en 2023 a abouti à une nouvelle constitution qui supprime la limitation du nombre de mandats et permet au président Touadéra de se présenter pour un troisième mandat, ce qui n'était pas autorisé par la constitution de 2016.

« Lorsque des tragédies comme celle-ci se produisent, la société civile devrait pouvoir commémorer, demander des comptes et soutenir les personnes dans leur deuil », a déclaré Lewis Mudge. « La répression exercée par le gouvernement lors de cet événement commémoratif montre à quel point il s'appuie sur celle-ci et présume le pire de la société civile. »

02.07.2025 à 20:44

Cambodge : Des activistes de l’ONG Mother Nature emprisonnés depuis un an

Human Rights Watch

Click to expand Image Cinq activistes de l’ONG écologiste Mother Nature – Ly Chandaravuth, Thun Ratha, Yim Leanghy, Phuon Keoraksmey et Long Kunthea – photographiés à l’extérieur du Tribunal de première instance de Phnom Penh, au Cambodge, le 11 juin 2024, lors d’une pause du procès les visant. Le 2 juillet 2024, ils ont été reconnus coupables de « complot contre l’État » et d’« insulte au roi », et condamnés à des peines comprises entre six et dix ans de prison. © 2024 Privé

(Bangkok, le 2 juillet 2025) – Cinq activistes écologistes cambodgiens emprisonnés depuis un an sur la base d’accusations infondées devraient être libérés immédiatement et sans condition, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui ; leurs peines sont comprises entre six ans et huit ans de prison.

Le 2 juillet 2024, un tribunal de Phnom Penh a rendu un verdict de culpabilité envers dix activistes de l'association écologiste de jeunes Mother Nature qui étaient accusés de « complot contre l’État » et d'« insulte au roi » (lèse-majesté). Ces accusations étaient liées à leur militantisme pacifique en faveur de l’environnement. Cinq activistes ont été alors immédiatement incarcérés, tandis que quatre autres, dont on ignore le sort, étaient jugés par contumace. Le dixième, un ressortissant espagnol, avait été expulsé du pays en 2015.

« Les peines lourdes et infondées infligées aux activistes de Mother Nature il y a un an témoignent du profond mépris du gouvernement cambodgien envers l’environnement dans ce pays », a déclaré Bryony Lau, directrice adjointe de la division Asie à Human Rights Watch. « Le gouvernement devrait annuler ces condamnations pour militantisme environnemental pacifique, et libérer immédiatement les personnes emprisonnées. »

Les autorités ont incarcéré les cinq activistes dans cinq différentes prisons reparties à travers le pays et situées à des centaines de kilomètres de leurs familles, une mesure qualifiée de cruelle et sans précédent par l’organisation cambodgienne de défense des droits humains LICADHO. Le 30 avril 2025, la Cour suprême du Cambodge a rejeté la dernière demande de libération sous caution des activistes, confirmant le jugement rendu par la Cour d'appel de Phnom Penh le 17 février et la condamnation des cinq activistes.

Les cinq activistes emprisonnés sont Thun Ratha (à Tbong Khmum), Ly Chandaravuth (à Kandal), Phuon Keoraksmey (à Pursat), Yim Leanghy (à Kampong Speu) et Long Kunthea (à Preah Vihear). Les lieux éloignés des prisons limitent considérablement les visites familiales, les soins médicaux et l'accès à l'assistance juridique, ce qui représente un risque sérieux pour le bien-être des activistes et leur droit à une procédure régulière.

Click to expand Image Carte du Cambodge montrant les sites des prisons où sont incarcérés cinq activistes de l’ONG écologiste Mother Nature, suite à leur condamnation le 2 juillet 2024. © 2024 LICADHO

Pendant plus d’une décennie, l’ONG Mother Nature a dénoncé la corruption dans la gestion des ressources naturelles au Cambodge, s'oppose à des projets d'infrastructures destructeurs et mobilise la jeunesse pour défendre la biodiversité du pays, l'une des plus menacées au monde en raison des taux élevés de déforestation et de trafic d'espèces sauvages. Parmi les réussites de Mother Nature figurent d’une part la cessation de la construction d'un barrage financé par un consortium chinois et qui menaçait le mode de vie d’une communauté autochtone, et d’autre part l'arrêt des exportations de sable de l'île de Koh Kong dans le cadre d’un système corrompu.

En 2023, le groupe a reçu le prix Right Livelihood pour son « activisme courageux et engagé ». En octobre 2024, lors d’une réunion du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies à Genève, l’ONG Right Livelihood a dénoncé l'emprisonnement des activistes de Mother Nature qualifiant leurs arrestations et condamnations de « sans précédent, […] injustes et arbitraires ».

Les autorités cambodgiennes ont souvent accusé des militants des droits humains d'« incitation à commettre un crime », infraction passible d'une peine pouvant aller jusqu'à deux ans de prison. En 2021, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme au Cambodge a déclaré qu’il était préoccupé par le fait que « des défenseurs des droits humains sont actuellement en détention et accusés d'incitation à commettre un crime ». Les activistes de Mother Nature ont été les premiers militants écologistes à être inculpés de « complot contre l’État », infraction passible d’une peine pouvant aller jusqu'à 10 ans de prison. Quatre activistes – Ly Chandaravuth, Phuon Keoraksmey, Long Kunthea et Thun Ratha – ont été condamnés en 2024 à six ans prison, soit jusqu'en 2030 ; Yim Leanghy a été condamné à huit ans de prison, soit jusqu'en 2032.

Suite aux condamnations des activistes de Mother Nature, les autorités cambodgiennes ont également ciblé des journalistes pour des reportages sur des questions environnementales.

Le 4 janvier, le journaliste britannique Gerald Flynn s'est vu interdire de revenir au Cambodge, apparemment en représailles à ses reportages. À son arrivée à Siem Reap depuis l'étranger, les autorités de l'immigration ont déclaré à Flynn que la prolongation de son visa était « invalide », alors qu'il avait pu entrer et sortir librement du Cambodge avec les mêmes documents en novembre 2024. Les autorités ont informé Flynn, l'un des rares journalistes étrangers encore basés au Cambodge, qu'il lui était interdit de revenir au Cambodge pour une durée indéterminée. Flynn avait enquêté sur des réseaux d'exploitation forestière illégale au Cambodge, et était apparu dans un documentaire vidéo de France 24 que le ministère cambodgien de l'Environnement avait publiquement qualifié de « fake news ».

Le 16 mai, trois policiers en civil circulant dans un véhicule banalisé ont arrêté et menotté un journaliste environnemental cambodgien, Ouk Mao, près de son domicile à Stung Treng ; ils n’ont présenté aucun mandat d’arrestation, a déclaré son épouse au site d’informations Mongabay. En juin 2024, la police militaire l'avait déjà interrogé au sujet de son enquête sur le défrichement de terres dans une forêt communautaire de Stung Treng.

Entre cet incident et son arrestation le 16 mai, Ouk Mao a continué à couvrir les questions de déforestation. Le 12 mai, Mongabay avait publié un article sur de précédentes agressions physiques et poursuites arbitraires le visant ; il avait aussi été interviewé par le service khmer de Radio France Internationale (RFI), dans une vidéo diffusée le 13 mai et vue par des dizaines de milliers de personnes.

Ouk Mao a été libéré sous caution le 25 mai après neuf jours de détention provisoire, mais il est toujours visé par plusieurs graves accusations liées à ses reportages sur l'environnement et à ses commentaires publics.

Le 27 mai, la Rapporteure spéciale des Nations Unies sur les défenseurs des droits humains a exprimé sa préoccupation au sujet d'Ouk Mao, déclarant que « le harcèlement judiciaire et physique des [défenseurs des droits environnementaux] qui dénoncent l'exploitation forestière illégale et la déforestation au Cambodge doit cesser immédiatement ».

« Le ciblage des activistes écologistes et des journalistes par le gouvernement cambodgien est désastreux », a conclu Bryony Lau. « Emprisonner ou expulser ceux qui sont encore prêts à risquer leur vie et leurs moyens de subsistance pour protéger l'environnement au Cambodge, ou forcer ces personnes à agir de manière clandestine, ne peut qu'entraîner des dommages à long terme pour le peuple cambodgien. »

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02.07.2025 à 19:17

Au Soudan du Sud, les filles et les femmes sont constamment menacées

Human Rights Watch

Click to expand Image Deux filles sud-soudanaises qui avaient été enlevées avec d’autres jeunes filles par un groupe armé avant d’être finalement relâchées se tenaient la main lors d'une cérémonie célébrant leur libération, à Yambio, au Soudan du Sud, le 7 février 2018.  © 2018 Stefanie Glinski/AFP via Getty Images

Les récentes attaques contre des filles et des jeunes femmes au Soudan du Sud illustrent les risques auxquels elles sont exposées et le manque de protections adéquates.

Le 25 juin, selon les médias, des hommes armés ont enlevé quatre lycéennes dans la commune Pochalla North (État de Jonglei), alors qu'elles se rendaient à leur école pour y passer des examens de fin d’année scolaire. Malgré les recherches menées par la communauté locale, les quatre lycéennes sont toujours portées disparues.

Le 19 juin, la police a annoncé l'arrestation de sept suspects dans l’affaire du viol collectif d'une adolescente de 16 ans à Juba, la capitale du Soudan du Sud. Une vidéo présumée de l'attaque avait circulé en ligne et suscité l'indignation du public. Suite à cet incident, la ministre sud-soudanaise du Genre, de l'Enfance et de la Protection sociale a appelé à une enquête approfondie et à la reddition de comptes. Des activistes ont réclamé des réformes juridiques et organisé des forums pour encourager les survivantes à s'exprimer. Mais même lorsque les affaires suscitent un tel intérêt public, les condamnations sont rares.

En mai, un groupe de jeunes hommes armés a encerclé un pensionnat pour filles à Marial Lou, dans l'État de Warrap, piégeant au moins 100 élèves à l'intérieur. Selon la mission de maintien de la paix des Nations Unies, les enseignants ont verrouillé les portes jusqu'à ce que les Casques bleus sécurisent l'école et négocient la fin du siège.

Ces incidents sont tristement courants au Soudan du Sud, où les filles subissent constamment des menaces, qu’il s’agisse de leur corps, de leur éducation ou de leur avenir. Des anciens conflits, l'accès généralisé aux armes et les coutumes patriarcales, menant parfois à des mariages forcés, ont depuis longtemps transformé les corps de filles et de femmes en champs de bataille, utilisés comme butin de guerre ou monnaie d'échange dans des conflits intercommunautaires.

La mobilisation de communautés pour protéger les filles permet d’espérer que ces comportements et pratiques peuvent changer, mais une protection efficace dépend avant tout du respect par l'État de ses obligations légales.

Le Soudan du Sud est un État partie à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (acronyme anglais CEDAW). Ce pays a également ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et approuvé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, s'engageant ainsi à protéger les élèves et étudiantes contre des attaques. Le ministère du Genre, de l'Enfance et de la Protection sociale, ainsi que le ministère de la Justice, ont promu un projet de loi sur la lutte contre les violences basées sur le genre et visant une meilleure protection de l'enfance. Ce projet de loi renforcerait les protections juridiques, criminaliserait les mariages forcés et les mariages d'enfants, et garantirait aux survivantes un soutien médical et psychosocial gratuit. Le Parlement devrait donner la priorité à l'adoption de ce projet de loi.

Le gouvernement devrait également renforcer les institutions sud-soudanaises chargées de faire respecter l’état de droit, et garantir la reddition de comptes pour les abus. Il est essentiel de protéger les écoles contre les attaques, notamment en renforçant la présence des forces de sécurité, en organisant des dialogues avec les jeunes personnes et en mettant en œuvre des processus de désarmement respectueux des droits.

Au Soudan du Sud, les filles devraient pouvoir se rendre à l'école à pied et poursuivre leur éducation sans crainte ; et les autorités devraient agir pour garantir ces droits fondamentaux.

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02.07.2025 à 08:00

Guatemala : Une loi sur l’eau est urgemment requise

Human Rights Watch

Play Video Le manque généralisé d’accès à l’eau potable et à des services d’assainissement adéquats au Guatemala menace le droit à la santé et d’autres droits de millions de personnes, en particulier des peuples autochtones et des femmes.Alors que le Guatemala est un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, une part importante de sa population est obligée de vivre sans avoir accès à un élément aussi fondamental que l’eau potable.Les autorités guatémaltèques devraient adopter une législation sur l’eau qui garantisse le droit des personnes à l’eau et l’assainissement.

(Guatemala City) – Le manque généralisé d’accès à l’eau potable et à des services d’assainissement adéquats au Guatemala menace le droit à la santé et d’autres droits de millions de personnes, en particulier des peuples autochtones et des femmes, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.

2 juillet 2025 “Without Water, We Are Nothing”

Ce rapport de 88 pages, intitulé « “Without Water, We Are Nothing”: The Urgent Need for a Water Law in Guatemala » (« “Sans eau, nous ne sommes rien” : L’urgente nécessité d’une loi sur l’eau au Guatemala ») décrit l’indisponibilité fréquente de services sûrs et suffisants de distribution d’eau et d’assainissement au Guatemala, qui affecte de façon disproportionnée les membres de communautés autochtones, surtout les femmes et les filles. Le rapport détaille également l’impact de cet accès insuffisant à l’eau et à l’assainissement sur le droit à la santé, y compris pour les enfants, dans un pays où près d’un enfant de moins de cinq ans sur deux souffre de malnutrition chronique.

« Alors que le Guatemala est un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, une part importante de sa population est forcée à vivre sans avoir accès à un élément aussi fondamental que l’eau potable », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « Les autorités guatémaltèques devraient approuver d’urgence un projet de loi de portée nationale sur l’eau, accomplissant ainsi un pas essentiel pour garantir à toutes et tous un accès sûr, fiable et universel aux services de distribution d’eau et d’assainissement. »

Le Guatemala dispose d’une quantité d’eau douce par habitant supérieure à la moyenne mondiale, mais depuis longtemps, le pays n’a pas su protéger et distribuer ces ressources comme il se doit. En l’absence de législation établissant clairement les droits et obligations liés à l’eau, de système de réglementation et de financement clair pour garantir ces droits, ainsi que de mécanismes d’application qui vont avec, la disponibilité et la qualité de l’eau dans le pays resteront compromises.

Human Rights Watch a mené des entretiens avec 108 personnes, surtout des femmes, issues de communautés majoritairement autochtones des départements de Jalapa, Santa Rosa et Totonicapán. L’équipe de recherche a mené des entretiens de suivi avec des experts, demandé des informations au gouvernement et analysé les données concernant l’eau, l’assainissement et la pauvreté issues de l’Enquête nationale sur les conditions de vie, réalisée en 2023 par l’Institut national de la statistique du Guatemala.

Les données analysées par Human Rights Watch révèlent que les Guatémaltèques autochtones ont moins accès à l’eau et à l’assainissement que les autres citoyens, ce qui correspond à des schémas anciens de discrimination et d’accès inéquitable aux services publics fondant les droits. D’après les données officielles, dans l’ensemble, 40 % des Guatémaltèques n’ont pas l’eau courante chez eux. Mais concernant les Guatémaltèques autochtones, ils sont 50 % à ne pas avoir pas l’eau courante, alors que cela n’est le cas que pour 33 % des citoyens non autochtones. De même, les personnes d’origine autochtone ont trois fois plus de chances de n’avoir à leur disposition que des latrines ou des fosses, formes d’assainissement qui peuvent représenter un risque pour la sécurité ou la santé, alors que les personnes d’origine non autochtone ont deux fois plus de chances de disposer de toilettes débouchant sur un système d’égout.

Click to expand Image María Magdalena Cac Pú, une femme guatémaltèque contrainte à chercher régulièrement de l’eau à un point d'eau situé loin de son domicile, transportait un bidon d’eau attaché à son dos tout en portant son bébé, dans la municipalité de Santa María Chiquimula (département de Totonicapán) au Guatemala. © 2025 Víctor Peña pour Human Rights Watch

Sans accès fiable à l’eau courante, des millions de Guatémaltèques sont forcés de récupérer de l’eau dans des puits, des fleuves, des lacs, des sources naturelles, ou encore de l’eau de pluie, comme source d’eau primaire. Cela implique de graves risques sanitaires, puisque le gouvernement estime que plus de 90 % des eaux de surface au Guatemala sont contaminées.

Ce sont souvent les femmes qui ont la responsabilité d’aller chercher de l’eau pour elles-mêmes et leur famille, de même qu’elles sont chargées des soins aux enfants. D’après les données de l’enquête officielle, deux tiers des adultes ayant rapporté qu’ils étaient allés chercher de l’eau le jour précédent étaient des femmes.

Rosalía Maribel Osorio Chivalan, une femme de 24 ans de la municipalité de Santa María Chiquimula, dans le département de Totonicapán, a décrit sa routine matinale qui l’oblige à se lever à 5 heures ou 5 heures et demie du matin et à effectuer un circuit de deux heures pour aller chercher de l’eau à un puits, avant de faire un trajet de 40 minutes aller-retour pour amener ses enfants à l’école à 8 heures.

Les enfants, eux aussi, doivent souvent aller chercher de l’eau. Une femme de 29 ans, mère célibataire de trois enfants à Santa María Chiquimula, a expliqué que ses enfants marchaient avec elle deux heures par jour pour aller chercher de l’eau, car elle ne pouvait pas le faire toute seule. « Parfois j’ai un moment de désespoir quand je les vois marcher en portant l’eau, les pauvres », a-t-elle déclaré.

Même les familles qui sont connectées à un réseau de distribution d’eau connaissent des difficultés d’accès à l’eau, notamment parce que le service fonctionne de façon intermittente. En analysant les données gouvernementales de 2023, Human Rights Watch a constaté que seuls 19 % des ménages rapportaient avoir eu de l’eau chez eux de façon ininterrompue, 24 heures sur 24, chaque jour du mois précédant cette enquête.

Comme le souligne le rapport, la qualité de l’eau est un sujet de préoccupation majeur au Guatemala. De nombreuses femmes interrogées avaient observé des signes de contamination, notamment une eau trouble, une mauvaise odeur et des débris polluant l’eau, sachant que très peu d’options de traitement de l’eau leur sont accessibles. Beaucoup ont déclaré qu’elles et leurs enfants souffraient de maux d’estomac, de vomissements et de diarrhées après avoir consommé cette eau, mais que ces sources contaminées représentaient pourtant la seule option accessible.

María Carolina Barrera Tzun, une femme de 28 ans, mère de trois enfants, de Santa María Chiquimula, a témoigné que le puits où elle allait chercher de l’eau pour elle et ses enfants était sale, et que ses enfants lui demandaient parfois : « Pourquoi l’eau est-elle si sale ? Pourquoi on n’a pas l’eau à la maison ? » Pourtant ils doivent la boire, a-t-elle expliqué, parce qu’ils n’ont pas d’autre possibilité.

Les infrastructures d’assainissement inadaptées représentent également un danger pour la santé et contribuent à la mauvaise qualité de l’eau. Seuls 42 % des foyers guatémaltèques rapportaient qu’ils disposaient de toilettes débouchant sur un réseau d’évacuation des eaux usées. Environ un tiers de la population est obligée de se servir de latrines, de fosses, ou encore de déféquer à l’air libre. D’après les informations officielles, en 2021, 97 des 340 municipalités du Guatemala, soit 29 %, n’avaient aucune station d’épuration des eaux usées opérationnelle.

Les impacts sanitaires d’un accès risqué ou insuffisant à l’eau et d’un assainissement inadéquat sont graves. D’après l’Organisation mondiale de la santé, en 2019, le taux de mortalité dû à l’eau non potable et aux services d’assainissement et d’hygiène inadaptés était au Guatemala de 15,3 décès pour 100 000 personnes, plus du double de celui de n’importe quel pays voisin. L’accès limité à l’eau et à l’assainissement contribue par ailleurs à la malnutrition chronique. Au Guatemala, près d’un enfant sur deux de moins de cinq ans souffre de malnutrition de façon chronique : c’est un des taux les plus élevés du monde. 

Afin de faciliter une gouvernance globale en matière d’eau et un investissement efficace dans les infrastructures dédiées à l’eau et à l’assainissement, les autorités guatémaltèques devraient adopter un projet de loi sur l’eau qui crée la capacité institutionnelle de protéger la disponibilité en eau pour toutes et tous, et inflige des amendes pour la contamination des nappes d’eau.

En élaborant cette loi, le gouvernement devrait veiller au respect des pratiques autochtones de gestion de l’eau ainsi qu’à une réelle participation et consultation des peuples autochtones, qui sont souvent en première ligne des pratiques de conservation et de préservation des ressources et qui sont les plus affectés par la crise actuelle.

Les autorités devraient par ailleurs mettre en place un système réglementaire et financier qui permette au Guatemala d’honorer son obligation de prendre des mesures, dans la limite de ses ressources disponibles, pour garantir la disponibilité, l’accessibilité et la qualité de l’eau à usage personnel et domestique.

« Le gouvernement du président Bernardo Arévalo a une occasion historique de régler une ancienne dette et d’apporter un changement durable aux Guatémaltèques », a conclu Juanita Goebertus. « Il ne devrait pas la laisser passer. »

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01.07.2025 à 22:00

Malawi : Inaction de la police face à l'agression de manifestants pacifiques

Human Rights Watch

Click to expand Image Un policier tenait son arme à Blantyre, au Malawi, le 6 mai 2020, lors de la campagne précédant l’élection présidentielle de juillet 2020. La période préélectorale avait alors été entachée de violences. Fin juin 2025, des violences dans la capitale, Lilongwe, ont suscité des inquiétudes quant aux élections prévues au Malawi en septembre 2025. © 2020 Amos Gumulira/AFP via Getty Images

(Johannesburg) – Le 26 juin, une douzaine d'hommes armés ont attaqué des manifestants qui protestaient pacifiquement au Malawi contre la manière dont le gouvernement planifie les prochaines élections nationales, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Le refus apparent de la police d’intervenir pour mettre fin aux violences ou pour arrêter les responsables suscite de vives inquiétudes quant à la capacité du gouvernement à organiser les élections générales de septembre de manière juste et impartiale.

L'incident s'est produit lors d’un rassemblement organisé par l’association Citizens for Credible Elections (« Citoyens pour des élections crédibles » - CCE), afin de réclamer un audit indépendant des listes électorales et la démission de hauts responsables de la Commission électorale du Malawi (Malawi Electoral Commission, MEC). Lors du rassemblement tenu dans la capitale, Lilongwe, entre 10 et 20 hommes – certains masqués et armés de bâtons, de sjamboks (fouets en cuir) et de grands couteaux – ont attaqué les manifestants, blessant plusieurs personnes et endommageant également des biens. Des groupes de la société civile et le principal parti d'opposition, le Parti démocratique progressiste (Democratic Progressive Party, DPP), affirment que les assaillants étaient liés à une milice de jeunes affiliée au Parti du Congrès du Malawi (Malawi Congress Party, MCP), au pouvoir. Le MCP est accusé d’employer des tactiques d'intimidation contre des citoyens souhaitant s’exprimer librement à l'approche des élections de septembre.

« Les autorités malawiennes devraient enquêter sur cette attaque brutale contre des manifestants pacifiques et veiller à ce que les responsables soient dûment punis », a déclaré Idriss Ali Nassah, chercheur senior auprès de la division Afrique à Human Rights Watch. « Pour que les Malawiens aient confiance dans l'équité des prochaines élections, ils doivent avoir la certitude que la police réagira rapidement et impartialement aux menaces ou aux actes de violence, quels qu'en soient les responsables. »

Le gouvernement et les forces de l'ordre ont la responsabilité de garantir le respect des droits fondamentaux à la liberté d'expression et de réunion pacifique, et de veiller à ce que les manifestants puissent manifester en toute sécurité, conformément à la Constitution du Malawi et aux normes internationales. Par ailleurs, la commission électorale MEC a rejeté la demande de plusieurs organisations locales qui souhaitaient examiner les listes électorales afin de déceler toute incohérence susceptible de conduire à des fraudes électorales ; ce refus a accru les inquiétudes des citoyens et de la société civile quant à l'équité des prochaines élections.

Sylvester Namiwa, directeur du Centre pour la démocratie et les initiatives de développement économique (Center for Democracy and Economic Development Initiatives, CDEDI Malawi) et principal organisateur des manifestations, a déclaré à Human Rights Watch qu'au moment où la manifestation allait commencer, des assaillants ont attaqué les personnes rassemblées. Il a déclaré que, sous le regard de la police et d'autres agents des forces de l'ordre, les hommes l'ont violemment battu, l'ont traîné vers un SUV Toyota et ont tenté de l'enlever. Il a ajouté qu'il a échappé à la tentative d'enlèvement grâce aux tirs de gaz lacrymogènes de la police. Les assaillants ont ensuite volé un système de sonorisation utilisé par les manifestants, endommagé plusieurs véhicules et incendié deux voitures.

Sylvester Namiwa a ensuite été soigné pour ses blessures dans un hôpital local.

Une femme qui est membre de l’organisation CCE a déclaré qu’alors que les assaillants la frappaient, elle a imploré les policiers de la secourir. Mais ils ne sont pas intervenus, et lors de l'attaque, elle a été blessée au dos à l’une de ses mains.

Des militants locaux des droits humains et des journalistes couvrant les manifestations ont corroboré les témoignages des manifestants, affirmant avoir vu des policiers observer les manifestants sans rien faire pour les protéger, même lorsqu'il était clair que leur vie était en danger. Aucun agresseur n'a été arrêté ; de plus, la police n'a pas répondu aux questions des médias sur la réaction des forces de l'ordre face aux attaques.

Précédemment en novembre 2024, des partis d'opposition et des organisations de la société civile ont allégué que le MCP avait organisé une violente attaque menée par des hommes masqués et armés contre des personnes qui manifestaient pacifiquement en faveur des réformes électorales. Des témoins avaient alors accusé les forces de l'ordre d'être restées passives lors de l’attaque, tout comme lors du récent incident du 26 juin.

Les gouvernements ont l'obligation, en vertu du droit international, de respecter, de faciliter et de protéger le droit à la liberté d'expression et de réunion pacifique. Le Malawi est un État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, qui énoncent ces droits. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies, l'organe international d'experts chargé de surveiller le respect du PIDCP, a déclaré dans son Observation générale no 37 que les États parties ont « l’obligation positive de faciliter la tenue des réunions pacifiques et de permettre aux participants d’atteindre leurs objectifs ».

Les Lignes directrices sur la liberté d'association et de réunion en Afrique, publiées par la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) indiquent ceci : « Les droits à la liberté d’association et de réunion restent des droits fondamentaux qui devraient sous-tendre toute société démocratique dans laquelle la personne humaine pourrait faire entendre librement sa voix sur toute question de société. » L’article 30 stipule ceci : « Les États sont censés protéger les associations, notamment leurs responsables les plus en vue, des menaces, actes de harcèlement, d’ingérence, d’intimidation ou de représailles de la part de tierces parties ou d’acteurs non étatiques. »

« Le gouvernement malawien devrait respecter les droits humains et l'État de droit en enquêtant, en arrêtant et en poursuivant en justice les agresseurs et les auteurs des violences », a conclu Idriss Nassah. « À l'approche des élections générales cruciales de septembre, les autorités doivent envoyer un message fort : les violations des droits humains ne seront pas tolérées. »

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APA News

01.07.2025 à 21:28

Cinq États européens se retirent du traité d'interdiction des mines antipersonnel

Human Rights Watch

Click to expand Image Tomiko Ichikawa, Ambassadrice du Japon auprès de la Conférence du désarmement de l’ONU et Présidente de la 22ème Assemblée des États parties à la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel prévue en décembre 2025, s’inclinait devant Tun Channareth, un activiste cambodgien qui a reçu le prix Nobel de la paix 1997 au nom de la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres, à Genève, le 17 juin 2025. Tun Channareth a présenté à Mme Ichiwaka une déclaration de 101 lauréats du prix Nobel, soutenant cette Convention. © 2025 Mine Ban Treaty ISU

(New York, 1er juillet 2025) – Le retrait de cinq pays européens du traité international qui interdit les mines antipersonnel de manière efficace depuis plusieurs années met inutilement la vie de civils en danger, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Le 27 juin, l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont déposé auprès du siège des Nations Unies leurs instruments de retrait de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel de 1997 ; ces retraits devraient prendre effet dans six mois. Début juin, les parlements de deux autres pays – la Finlande et la Pologne – ont officiellement approuvé des propositions relatives à leurs propres retraits de la Convention ; leur notification de l’ONU devrait suivre prochainement.

« Les cinq pays européens ayant choisi de se retirer de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel mettent en danger leurs propres civils, et effacent des années de progrès accomplis pour éradiquer ces armes indiscriminées », a déclaré Mary Wareham, directrice adjointe de la division Crises, conflits et armes à Human Rights Watch. « Ces pays ont pourtant une expérience directe du danger à long terme que représentent les mines antipersonnel, ce qui rend leur acceptation de ces armes largement discréditées difficile à comprendre. »

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Les mines antipersonnel sont conçues pour exploser en réponse à la présence, à la proximité ou au contact d'une personne. Elles sont généralement posées à la main, mais peuvent également être dispersées par des avions, des roquettes et de l'artillerie, ou encore par des drones et des véhicules spécialisés. Ce sont des armes intrinsèquement indiscriminées qui ne font pas la distinction entre soldats et civils. Les mines terrestres non explosées représentent un danger à long terme, jusqu'à leur déminage et leur destruction.

La Convention sur l'interdiction des mines, entrée en vigueur le 1er mars 1999, interdit totalement les mines antipersonnel et oblige les pays à détruire leurs stocks, à déminer les zones minées et à venir en aide aux victimes. Au total, 166 pays ont ratifié cette Convention, les plus récents étant les Îles Marshall le 12 mars et le royaume des Tonga le 25 juin.

La Russie n'a pas adhéré à la Convention, et ses forces ont largement utilisé des mines antipersonnel en Ukraine depuis l'invasion russe à grande échelle en 2022, faisant des victimes civiles et contaminant des terres agricoles. L'Ukraine, bien que ce soit un État partie à la Convention sur l'interdiction des mines, a aussi utilisé des mines antipersonnel depuis 2022 ; l’Ukraine a reçu ce type d’armes de la part des États-Unis en 2024, en violation du traité.

Le 29 juin, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé avoir signé un décret proposant le retrait de ce pays de la Convention sur l'interdiction des mines. Cette mesure sera désormais examinée par le Parlement ukrainien. En vertu de l'article 20 de la Convention sur l'interdiction des mines, un retrait ne prend effet que six mois après la notification officielle de l'ONU par un État. Toutefois, l’article 20 inclut aussi cette clause qui pourrait s’appliquer à l’Ukraine : « Cependant, si à l’expiration de ces six mois, l’État partie qui se retire est engagé dans un conflit armé, le retrait ne prendra pas effet avant la fin de ce conflit armé ».

Par ailleurs, les articles de cette Convention « ne peuvent faire l’objet de réserves » (article 19).

« L'Ukraine étant en guerre, sa proposition de retrait de la Convention constitue de fait une manœuvre symbolique visant à se couvrir politiquement alors que ce pays bafoue l’interdiction formelle de développer, produire ou utiliser des mines antipersonnel », a déclaré Mary Wareham. « Mais le recours accru aux mines antipersonnel risque de faire de nouvelles victimes civiles et d’engendrer des souffrances, à court terme et à long terme. »

L'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie a fait plus de 13 300 morts et plus de 32 700 blessés parmi les civils. Selon la Mission de surveillance des droits de l'homme des Nations Unies en Ukraine, le nombre de victimes civiles au cours des cinq premiers mois de 2025 a augmenté de 47 % par rapport à la même période en 2024.

Les cinq États membres de l'Union européenne ont fait valoir que les préoccupations sécuritaires suscitées par l'invasion continue de l'Ukraine par la Russie étaient la principale raison de leur retrait du traité. Chacun des cinq pays a suivi une procédure d'approbation parlementaire formelle, mais précipitée.

Lors de réunions intersessions tenues à Genève du 17 au 20 juin (avant la 22ème Assemblée des États parties à la Convention prévue en décembre), les États parties, y compris ceux ayant annoncé leurs retraits, ont passé cinq heures à discuter des implications de ces retraits. Un groupe de pays africains mené par l'Afrique du Sud a exhorté ces États à « revoir leur position » et à« revenir à la table des négociations », car « les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui exigent davantage de coopération, et non moins ». Ce groupe a ajouté : « Nous devons collectivement préserver l'intégrité et l'universalité du traité d'interdiction des mines. »

Le 16 juin, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a déclaré qu’il était « profondément préoccupé » par les retraits du Traité d'interdiction des mines, qualifiant cette action de « particulièrement inquiétante, car elle risque d'affaiblir la protection des civils et de compromettre deux décennies d'un cadre normatif qui a sauvé d'innombrables vies ». António Guterres a annoncé le lancement d’une nouvelle campagne mondiale visant à renforcer le soutien aux instruments de désarmement humanitaire tels que le traité d'interdiction des mines et aux efforts de déminage.

Le 17 juin, 101 lauréats du prix Nobel ont publié une déclaration conjointe (datée du 30 mai), mettant en garde contre les retraits en raison du risque de dommages civils et pour éviter de porter atteinte aux normes juridiques et humanitaires établies de longue date. Les lauréats ont spécifiquement critiqué la Russie et les États-Unis, deux pays qui n'ont pas interdit ces armes, pour avoir porté atteinte aux normes du Traité d'interdiction des mines et mis en danger les civils.

Parmi les lauréats du prix Nobel de la paix qui ont soutenu cet appel figurent le Dalaï-Lama et les anciens présidents Lech Walesa (Pologne), Juan Manuel Santos (Colombie), Oscar Arias Sánchez (Costa Rica) et José Ramos-Horta (Timor-Leste), ainsi que les membres de l'Initiative Nobel des femmes Jody Williams, Shirin Ebadi, Leymah Gbowee, Tawakkol Karman, Narges Mohammadi et Oleksandra Matviichuk.

Human Rights Watch, qui a cofondé la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL), colauréate du prix Nobel de la paix 1997, a également soutenu cette déclaration.

Le 17 juin, Tun Channereth, ambassadeur de l'ICBL et survivant cambodgien de mines antipersonnel, a remis cette déclaration des 101 lauréats du prix Nobel à la Présidente de la 22ème Assemblée des États parties à la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel. Il lui a également remis une autre déclaration conjointe signée par 21 personnalités éminentes, dont l'ancien ministre canadien des Affaires étrangères Lloyd Axworthy, qui a dirigé le « processus d'Ottawa » ayant abouti à la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel. Les signataires ont exhorté les États qui se sont retirés à reconsidérer leur position, affirmant que « le respect du traité d'interdiction des mines n'est pas seulement une obligation juridique et morale, mais aussi un impératif stratégique pour tous ceux qui cherchent à limiter les souffrances en temps de guerre ».

Tous les États membres de l'UE avaient jusqu’à présent adhéré à la Convention sur l’interdiction des mines ; en avril 2025, l'UE a réaffirmé sa position commune de longue date, favorable « à l’universalisation et à la mise en œuvre » de la Convention.

La Finlande et la Pologne, qui ont produit des mines antipersonnel par le passé, ont indiqué qu'elles pourraient reprendre leur production. En 2015, la Finlande avait achevé la destruction de son stock d'un million de mines ; en 2016, la Pologne avait détruit son propre stock de plus d'un million de mines antipersonnel. Des civils finlandais et polonais ont été blessés par des mines terrestres et des munitions non explosées pendant la Seconde Guerre mondiale et d'autres conflits. Plus de 80 ans plus tard, les autorités locales reçoivent toujours des demandes de dépollution des résidus de mines terrestres et de restes explosifs de guerre.

« Les pays qui se retirent de la Convention sur l'interdiction des mines seront surveillés de près, car il existe désormais un risque réel qu'ils se mettent à produire, transférer et utiliser des mines antipersonnel », a conclu Mary Wareham. « Ces gouvernements devraient plutôt investir dans des mesures visant à éloigner les civils des zones minées, à prendre en charge les victimes des mines terrestres et à promouvoir le déminage. »

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01.07.2025 à 06:00

Le Conseil de l’UE cherche à affaiblir la loi sur les chaînes d’approvisionnement

Human Rights Watch

Click to expand Image Des activistes de la Fédération bangladaise de solidarité avec les travailleurs participaient à un rassemblement à Dhaka, au Bangladesh, le 7 mai 2023, dix ans après l'effondrement du bâtiment « Rana Plaza », qui abritait plusieurs ateliers de confection ; cet incident, survenu le 24 avril 2013, avait tué plus de 1 130 personnes dont un grand nombre de travailleur-euse-s.  © 2023 Mamunur Rashid/NurPhoto via AP

(Bruxelles) – Les États membres de l’Union européenne (UE), sous l’impulsion de la France et de l’Allemagne, sont en train de trahir leur engagement de protéger les droits humains et l’environnement dans le cadre des chaînes d’approvisionnement mondiales, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Le 23 juin, ces États membres ont approuvé une proposition du Conseil européen qui, si elle prenait force de loi, rendrait caduque une directive de l’UE sur la protection des droits le long des chaînes d’approvisionnement.

Cette directive, connue sous le nom de Directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (Corporate Sustainability Due Diligence Directive, CSDDD), était destinée à protéger les victimes d’abus des droits humains, ainsi que l’environnement, tout en créant un champ d’action équitable pour les entreprises. Elle a marqué une importante transition, les entreprises habituées jusque-là à appliquer certaines normes sur une base purement volontaire étant désormais tenues légalement responsables pour les violations des droits humains et de l’environnement commises tout au long de leurs chaînes d’approvisionnement. Elle était entrée en vigueur en juillet 2024 dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe (European Green Deal), le projet phare de la Commission de l’UE pour rendre l’Union plus durable et neutre sur le plan climatique d’ici à 2050. 

« Les États membres de l’UE veulent réduire la loi européenne sur les chaînes d’approvisionnement à un simple morceau de papier, trahissant les victimes et les survivants d’abus commis le long des chaînes d’approvisionnement des entreprises européennes », a déclaré Hélène de Rengervé, chargée de plaidoyer senior sur la responsabilité des entreprises à Human Rights Watch. « Cette proposition trahit l’engagement de l’UE en faveur des droits humains et de la durabilité et, si elle devenait loi, aurait très peu d’impact pour empêcher les atteintes aux droits humains et à l’environnement dans les chaînes d’approvisionnement. »

La prochaine étape aura lieu lorsque le Parlement européen adoptera sa position concernant cette proposition d’abandon de la CSDDD. Il s’agira d’une occasion cruciale et définitive pour le Parlement de se prononcer pour éviter que la directive ne devienne obsolète et pour conserver de réelles protections pour les victimes d’abus commis par les entreprises. 

Les efforts en vue d’affaiblir la législation ont commencé en février 2025, lorsque la nouvelle Commission de l’UE a fait volte-face et avancé une proposition dite « Omnibus » visant à vider de leur substance les éléments les plus importants de la directive. Parmi ceux-ci figurent l’obligation pour les entreprises de faire preuve de vigilance en matière de droits humains et d’environnement tout au long de leurs chaînes d’approvisionnement, ainsi que la possibilité pour les victimes de poursuivre en justice les entreprises si leurs droits sont violés. Ces mesures étaient considérées comme d’importants compromis, obtenus à la suite de négociations minutieuses. 

Certains lobbies industriels semblent avoir joué un rôle prépondérant dans les efforts en faveur des changements. Leurs appels à davantage de compétitivité et de simplification, qui sont utilisés pour justifier les démantèlements, masquent une vaste entreprise de déréglementation et ignorent le véritable objectif de la loi : protéger les victimes d’abus tout en créant un champ d’action équitable pour les entreprises.

L'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne, la Banque centrale européenne (BCE), des entreprises progressistes, des experts juridiques et des économistes, des personnalités de haut niveau, des responsables et experts de haut rang des Nations Unies et le Groupe de travail de l’ONU sur les entreprises et les droits de l’homme ont tous critiqué cette proposition, exhortant l’UE à ne pas affaiblir la directive.

La décision du 23 juin, prise sous l’égide de la présidence polonaise de l’UE, soutient le plan de la commission consistant à limiter les obligations de vigilance obligatoires et systématiques aux seuls fournisseurs directs. Mais, du fait que de nombreuses violations des droits humains sont commises plus loin le long de la chaîne mondiale d’approvisionnement, par exemple au niveau de l’extraction des matières premières ou de la fabrication, ces limites restreignent gravement la faculté de la loi d’empêcher les abus.

La décision est également en contradiction avec les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, qui étend la responsabilité des entreprises d’exercer leur vigilance en matière de droits humains à tous les maillons de leur chaîne de valeurs. Limiter le devoir de vigilance aux seuls fournisseurs directs équivaudrait à négliger les maillons de la chaîne d’approvisionnement où la plupart des abus sont commis, a déclaré Human Rights Watch. 

« Si la CSDDD est limitée au fournisseur direct, cela voudra dire qu’elle ne sera plus que des paroles creuses pour les travailleurs », a déclaré Kalpona Akter, une activiste du droit du travail du Bangladesh. « Nous serions laissés de côté. C’est inacceptable. »

Les États membres de l’UE ont même proposé d’aller encore plus loin dans la réduction des exigences de la directive, en affaiblissant les plans d’atténuation des effets des changements climatiques et en limitant le champ d’application de la loi aux entreprises de plus de 5 000 employés et de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires.

Des estimations effectuées par le Centre de recherche sur les entreprises multinationales (Centre for Research on Multinational Corporations), présentées dans sa base de données sur la CSDDD, montrent que l’imposition d’un tel seuil exclurait 72,5 % des entreprises actuellement concernées par la loi de 2024, réduisant à moins de 1 000 le nombre de celles qui resteraient concernées. 

La proposition du Conseil de limiter le devoir de vigilance essentiellement aux fournisseurs directs signifie que les entreprises pourraient ignorer les maillons de leur chaîne d’approvisionnement où se situent la plupart des risques, tout en transférant à leurs fournisseurs directs les coûts et la responsabilité du devoir de vigilance dans le cadre de contrats commerciaux inéquitables. 

La décision du Conseil de remplacer une règle commune et harmonisée pour tenir les entreprises responsables par des règles propres à chaque État membre signifierait aussi qu’il y aurait 27 ensembles de règles. Cela rendrait plus complexe et plus coûteux l’application de la loi, tout en affaiblissant son aspect préventif et en encourageant les entreprises à faire du « forum shopping » pour trouver les États membres ayant les règles les plus avantageuses, a déclaré Human Rights Watch.

Des désastres industriels faisant des morts et des blessés parmi les travailleurs, comme l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza au Bangladesh, et les violations par les grandes entreprises des droits humains, du droit du travail et des normes environnementales le long des chaînes mondiales d’approvisionnement ont suscité un vaste mouvement de soutien à des législations contraignantes afin de tenir les entreprises responsables. Les organisations de défense des droits, les syndicats, des consommateurs, des dirigeants politiques et des entreprises progressistes ont milité en faveur de la loi.

Mais le processus législatif, qui a débuté en 2020, a été difficile ; il s’est heurté à une vive opposition de la part de multinationales et d’associations patronales, et les gouvernements français, italien et allemand ont mené les efforts, directement et aussi par l’intermédiaire de leurs groupement de lobbyistes d’employeurs, pour diluer les dispositions les plus importantes de la loi. 

La hâte inhabituelle avec laquelle la Commission a fait avancer la proposition Omnibus, au mépris de ses obligations administratives et procédurales et sans consulter sérieusement la société civile, a conduit huit organisations de la société civile à porter plainte auprès du bureau du Médiateur européen en avril. En réaction, la Médiatrice de l’UE a ouvert une enquête en mai. 

Human Rights Watch soutient cette initiative très importante des organisations et exhorte le bureau de la Mediatrice à tenter de mener à bien son enquête le plus promptement possible, dans la mesure du possible avant que le texte final de la CSDDD remaniée soit adopté. Cette enquête constitue un pas essentiel vers une complète transparence et responsabilité dans le processus de décision de la Commission, contribuant à assurer qu’elle reflète effectivement les valeurs démocratiques fondamentales de l’UE. 

« Le Parlement européen a l’occasion de mettre fin à cette course au nivellement par le bas et de se battre pour une loi qui tient réellement responsables les grandes entreprises pour leurs violations des droits humains et de l’environnement », a conclu Hélène de Rengervé. « Tant les victimes des abus des entreprises que les consommateurs de l’UE méritent mieux que la situation actuelle. »

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