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15.05.2025 à 18:26

Chine/Tibet : Le Panchen-Lama soumis à une disparu forcée depuis 30 ans

Human Rights Watch

Click to expand Image Des nonnes bouddhistes tibétaines vivant en exil à Dharmsala, en Inde, participaient à un rassemblement le 17 mai 2017, à l’occasion du 22ème anniversaire de l’enlèvement par les autorités chinoises de Gedhun Choekyi Nyima, le 17 mai 1995 ; ce garçon de six ans avait été reconnu par le Dalaï-Lama comme le 11ème Panchen-Lama (autre figure religieuse importante au Tibet). © 2017 AP Photo/Ashwini Bhatia

(New York, 15 mai 2025) – Le gouvernement chinois devrait libérer le 11e Panchen-Lama, Gendun Choki Nyima, et ses parents, que les autorités chinoises ont soumis à une disparition forcée il a 30 ans, le 17 mai 1995, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui ; ils n’ont pas été revus depuis cette date.

Le Panchen-Lama est la deuxième figure religieuse au Tibet après le Dalaï-Lama, chef religieux de cette communauté ; tout au long de l’Histoire, l’un a joué un rôle clé dans la reconnaissance du successeur de l’autre. L'actuel 14e Dalaï Lama fêtera son 90e anniversaire le 6 juillet ; la question de sa succession – et de l'avenir du bouddhisme tibétain et du peuple tibétain – devient donc de plus en plus urgente.

« Il a 30 ans, le gouvernement chinois a kidnappé un enfant de 6 ans et sa famille et les a soumis à une disparition forcée, afin de contrôler le choix du prochain Dalaï-Lama et, par conséquent, l’avenir du bouddhisme tibétain », a déclaré Yalkun Uluyol, chercheur sur la Chine à Human Rights Watch. « Les observateurs préoccupés devraient faire pression sur le gouvernement chinois pour qu'il mette fin à cette situation cruelle, et garantisse la liberté de Gendun Choki Nyima et de sa famille. »

Le gouvernement chinois a fait disparaître de force l'enfant, alors âgé de 6 ans, le 17 mai 1995, trois jours après que le Dalaï-Lama l'a reconnu comme le 11e Panchen-Lama. Même la simple publication de photos de Gendun Choki Nyima, ainsi que du Dalaï-Lama, sont interdites au Tibet.

Après avoir enlevé Gendun Choki Nyima, les autorités chinoises ont contraint un autre groupe de moines tibétains à reconnaître officiellement un autre enfant, Gyaltsen Norbu, comme le 11e Panchen-Lama ; ses parents étaient membres du Parti communiste chinois, selon les informations disponibles.

En mai 1995, les autorités chinoises ont également arrêté Jadrel Rinpoche, l'abbé du monastère de Tashi Lhunpo qui supervisait la recherche de la réincarnation du Panchen-Lama, ainsi que plus de 30 moines de ce monastère. Le Dalaï-Lama a par la suite indiqué qu’il n’avait aucune information sur le lieu de détention de Jadrel Rinpoche, ni sur son état de santé.

En 2015, vingt ans après la disparition de Gendun Choki Nyima, les autorités chinoises ont affirmé qu’il menait une « vie normale » et « ne voudrait être dérangé par personne ».

Au cours de la décennie suivante, le gouvernement chinois a resserré son emprise sur le Tibet, qui comprend la Région autonome du Tibet et les zones autonomes tibétaines voisines des provinces du Qinghai, du Sichuan, du Gansu et du Yunnan.

Depuis 2008, année de répression massive des manifestations populaires sur le plateau tibétain, les forces de sécurité chinoises ont maintenu une forte présence au Tibet et ont strictement restreint l'accès et les déplacements dans les zones tibétaines. Toute remise en question des politiques gouvernementales, aussi minime soit-elle, peut entraîner une détention arbitraire ou une longue peine d'emprisonnement, des poursuites judiciaires, des disparitions forcées, voire des cas de torture. Les autorités maintiennent des systèmes de surveillance de masse très intrusifs au Tibet, exigent des Tibétains qu'ils utilisent le mandarin comme langue d'enseignement à l'école et font pression sur nombre d'entre eux pour qu'ils quittent leurs villages d'origine afin de de réinstaller sur des sites construites par le gouvernement. Les autorités rendent également extrêmement difficile pour les Tibétains de voyager à l'étranger ou d'obtenir un passeport, et punissent sévèrement ceux qui contactent des proches ou d'autres personnes à l'étranger.

Depuis 2007, les autorités chinoises ont imposé des réglementations limitant la reconnaissance des lamas réincarnés, parmi lesquels figurent de nombreux chefs religieux du bouddhisme tibétain. Ces dispositions précisent que ces personnes ne peuvent être reconnues sans l'approbation de l'État et doivent être nées en Chine. Les dignitaires religieux de haut rang doivent être sélectionnées par le biais du système « Urne d'or », un système de loterie chinois datant du XVIIIe siècle, peu utilisé par les Tibétains jusqu'en 2007, année où le Parti communiste chinois l'a imposé comme seul moyen légal de sélectionner les lamas de haut rang.

Depuis 2009, on a recensé 160 cas d'auto-immolation, entraînant la mort de 127 Tibétains.

En 2012, le gouvernement a placé la quasi-totalité des monastères tibétains sous le contrôle direct de fonctionnaires chinois en poste permanent au Tibet. Depuis 2018, les autorités chinoises exigent de tous les moines et moniales qu'ils respectent les « Quatre Normes », dont la « fiabilité politique » et la « fiabilité lors des moments critiques ». Ces normes impliqueraient le soutien au choix du prochain Dalaï-Lama et de tout autre lama réincarné par le gouvernement chinois.

Dans une déclaration commune publiée en juin 2020, à l'occasion du 25e anniversaire de l'enlèvement du Panchen-Lama, cinq organismes et représentants des Nations Unies, dont le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires et le Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, avaient condamné « la disparition forcée continue de Gedhun Cheokyi Nyima et la réglementation de la réincarnation des bouddhas tibétains vivants, contraire aux traditions et pratiques religieuses de la minorité bouddhiste tibétaine ».

Dans le cadre du droit international, une disparition forcée est définie comme l'arrestation ou la détention d'une personne par des agents de l'État, suivie du refus de reconnaître la privation de liberté ou de révéler le sort de la personne ou le lieu où elle se trouve.

Plusieurs gouvernements et organismes indépendants, dont récemment le Parlement européen, ont appelé le gouvernement chinois à fournir des informations sur le sort du Panchen-Lama.

Le gouvernement chinois devrait autoriser les observateurs de l'ONU, les organisations indépendantes de défense des droits humains et les médias à accéder librement aux zones tibétaines, a déclaré Human Rights Watch.

Les gouvernements préoccupés, en particulier ceux qui comptent d'importantes populations bouddhistes, comme le Japon, la Corée du Sud, la Mongolie, Taïwan et l'Inde, devraient marquer le 30e anniversaire de la disparition forcée du Panchen Lama en s'exprimant publiquement et en affirmant le droit des Tibétains à exercer leur liberté religieuse.

« Le 30e anniversaire de la disparition du Panchen Lama offre aux gouvernements une occasion importante d'exhorter le gouvernement chinois à mettre fin à des décennies de répression du peuple tibétain », a conclu Yalkun Uluyol.

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14.05.2025 à 20:30

La junte malienne réduit encore plus l'espace politique

Human Rights Watch

Click to expand Image Des personnes protestant contre la décision de la junte militaire malienne d'interdire les partis politiques au Palais de la Culture de Bamako, au Mali, le 3 mai 2025. © 2025 Privé

Cette semaine, le Conseil national de transition du Mali a adopté un projet de loi qui supprime de fait le multipartisme dans le pays. La nouvelle loi interdit officiellement les réunions politiques, ainsi que les discours et les organisations de l'opposition. Cette mesure n'est malheureusement pas surprenante, compte tenu des récentes attaques de la junte militaire contre l'opposition politique. 

 

La loi entérine au Mali un climat politique dans lequel la liberté d'expression est de plus en plus restreinte. Quelques jours auparavant, la Haute Autorité de la Communication (HAC), l'organe de régulation des médias du pays, avait suspendu TV5Monde, une chaîne de télévision francophone internationale, parce que les autorités estimaient qu’un de ses reportages sur les manifestations anti-junte du 3 mai 2025 dans la capitale, Bamako, était « partial » et « déséquilibr[é] ». La HAC a également accusé TV5 de « diffamation des Forces armées et de sécurité ». 

 

Cette nouvelle loi coïncide aussi avec les emprisonnements et disparitions forcées récentes de plusieurs opposants politiques, activistes et dissidents par la junte. 

 

Le 8 mai, deux dirigeants de l'opposition politique, Abba Alhassane et El Bachir Thiam, ont disparu, suscitant des craintes qu’ils n’aient été victimes de disparitions forcées. Aucune information n’a filtré sur le lieu où ils se trouvent, ce qui suscite des inquiétudes quant à leur sécurité. 

 

Trois jours plus tard, Abdoul Karim Traoré, le vice-président du bureau des jeunes du parti d'opposition Convergence pour le développement du Mali (CODEM), a disparu à Bamako. Comme Abba Alhassane et El Bachir Thiam, Abdoul Karim Traoré avait participé aux manifestations du 3 mai. Il a été témoin de l'enlèvement d'Abba Alhassane et l'a publiquement dénoncé. Les médias internationaux ont rapporté qu’Abdoul Karim Traoré serait détenu par des agents de la sûreté de l'État. 

 

Un jour avant la disparition d’Abdoul Karim Traoré, des hommes non identifiés ont agressé le militant prodémocratie Cheick Oumar Doumbia à Bamako, qui avait également participé aux manifestations. Les militants pro-junte ont de plus en plus souvent appelé à la violence contre les militants prodémocratie et ceux qui ont participé aux manifestations. 

 

Lundi, Abdrahamane Diarra, secrétaire à la communication du parti d'opposition l'Union pour la République et la Démocratie (URD), a été arrêté et interrogé par les forces de sécurité à Bamako. Abdrahamane Diarra, qui s’était ouvertement exprimé contre la dissolution des partis politiques au Mali, a été libéré par la suite, mais le message des autorités est devenu très clair : l'espace pour exprimer de quelconques critiques est en train de disparaitre. 

 

Ces dernières semaines ont été marquées par des jours sombres au Mali, où les autorités militaires ont de nouveau fait monter la pression sur les militants qui prônent le retour à un régime civil démocratique. La junte devrait plutôt libérer les personnes injustement détenues, et respecter le droit à la liberté d'expression. 

14.05.2025 à 06:01

Arabie saoudite : Des travailleurs migrants électrocutés, décapités et victimes de chutes mortelles au travail

Human Rights Watch

Click to expand Image Des travailleurs migrants se reposaient sur le site d’un chantier près de Riyad, en Arabie saoudite, le 2 mars 2024.  © 2024 Jaap Arriens/Sipa via AP Photo En Arabie saoudite, de nombreux travailleurs migrants sont morts à la suite d’accidents du travail effroyables qui auraient pu être évités, notamment des chutes d’immeubles, des électrocutions et même des décapitations.Parmi les causes de décès, beaucoup sont classées à tort comme « naturelles » ; ces décès ne font pas l’objet d’une enquête et ne donnent lieu à aucune indemnisation. En cas d’accident du travail, le processus d’indemnisation est long et fastidieux.Les autorités saoudiennes, la FIFA et les autres employeurs devraient faire en sorte que tous les décès de travailleurs migrants, quels qu’en soient la cause perçue, l’heure et le lieu, fassent l’objet d’une enquête en bonne et due forme, et que les familles de ces travailleurs soient traitées avec dignité et reçoivent rapidement une indemnisation équitable.

(Beyrouth) — En Arabie saoudite, de nombreux travailleurs migrants sont morts à la suite d’accidents du travail effroyables qui auraient pu être évités, notamment des chutes du haut d’immeubles, des électrocutions et même des décapitations, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les autorités saoudiennes n’ont pas protégé adéquatement les travailleurs contre des décès évitables ; elles n’ont pas enquêté sur les accidents liés à la sécurité du lieu de travail ; et elles ont négligé d’indemniser les familles rapidement et de façon adéquate, ce qui aurait pu être fait grâce à des politiques imposant la souscription d’une assurance-vie et en prévoyant des compensations pour les proches survivants. Une autre enquête indépendante, réalisée par Fairsquare et également publiée aujourd’hui, met au jour d’importantes lacunes dans les politiques et procédures du gouvernement saoudien, celui-ci ne disposant pas de suffisamment d’outils efficaces pour déterminer les causes de décès de travailleurs migrants. 

Les risques de décès et de blessures professionnels augmentent encore à mesure que le gouvernement saoudien intensifie ses travaux de construction en vue de la Coupe du monde de football de 2034 et d’autres « gigaprojets ». Les familles de travailleurs migrants décédés ont déclaré que les employeurs saoudiens et les autorités leur avaient fourni très peu d’informations sur les circonstances du décès de leurs proches ; certains employeurs ont refusé de prendre en charge les frais de rapatriement des victimes, et d’autres ont même insisté pour que les familles enterrent leurs proches en Arabie saoudite, moyennant des incitations financières. De plus, les entreprises ont souvent tenté d’éviter l’envoi aux familles des effets personnels des victimes, ainsi que le paiement des sommes qui leur étaient encore dues.

« Les effroyables accidents du travail qui tuent des travailleurs migrants en Arabie saoudite devraient être perçus comme un important signal d’alerte par les entreprises et les associations sportives qui souhaitent établir des partenariats avec la FIFA pour la Coupe du monde masculine de football de 2034 et pour d’autres gigaprojets prévus dans le pays, ainsi que par les fans de football », a déclaré Michael Page, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Étant donné que les autorités saoudiennes n’assurent pas adéquatement la sécurité de base et la protection sociale des travailleurs migrants, les entreprises locales et internationales endossent une responsabilité plus importante pour garantir l’absence de violations graves des droits au sein de leurs opérations dans ce pays. »

Human Rights Watch a mené des entretiens avec les familles de 31 travailleurs migrants décédés en Arabie saoudite. Ceux-ci étaient originaires du Bengladesh, d’Inde et du Népal, et avaient entre 23 et 52 ans. Nous avons également interrogé deux travailleurs sociaux basés dans les pays d’origine et qui ont fourni une aide au rapatriement aux familles, ainsi que trois travailleurs migrants actuellement basés en Arabie saoudite, qui ont été témoins du décès de leurs collègues. Les chercheurs ont également examiné, lorsque cela était possible, les « certificats de non‑objection » des travailleurs décédés, un document obligatoire émis par l’ambassade du pays d’origine préalablement à l’autorisation de rapatriement des corps et à l’émission de certificats de décès et de tout autre document officiel utile.

D’autres études ont précédemment constaté que de nombreux décès de travailleurs migrants survenus en Arabie saoudite sont classés, à tort, comme « naturels », ne faisant l’objet d’aucune enquête et ne donnant lieu à aucune indemnisation. De même, Human Rights Watch a constaté que même lorsque le certificat de décès d’un travailleur migrant indique correctement que le décès est survenu sur le lieu de travail, cette mention ne donne pas toujours lieu à l’indemnisation de la famille pourtant prévue par la loi saoudienne et les normes internationales en matière de travail. En outre, en cas d’indemnisation, la procédure est longue et fastidieuse.

Selon les documents officiels de l’Organisation générale de l’Arabie saoudite pour la Sécurité sociale (General Organization for Social Insurance, GOSI), le secteur de la construction est celui qui est le plus exposé aux risques d’accidents du travail. Les chiffres montrent que les trois principaux types de blessures professionnelles proviennent de « forces mécaniques inanimées », de chutes et d’accidents de la route, les travailleurs migrants étant touchés de façon disproportionnée.

Les lois saoudiennes imposent aux organisations employant 50 travailleurs ou plus d’instaurer une politique de santé et de sécurité, de dispenser des formations, d’évaluer les risques sur le lieu de travail et de fournir les équipements de protection requis, ainsi que des premiers secours. Le Conseil national de la sécurité et de la santé au travail a déclaré que le ministère des Ressources humaines et du Développement social effectuait des inspections régulières, des vérifications de la conformité et des enquêtes sur les accidents au travail, en coordination avec les personnes concernées. Il a également affirmé que les violations devaient faire l’objet d’actions en justice ou de sanctions, comme précisé dans les réglementations relatives au travail.

Mais Human Rights Watch a constaté qu’en Arabie saoudite, quels que soient le secteur d’activité ou la région géographique, les travailleurs continuaient de subir des abus généralisés et d’être exposés à des risques professionnels sur leur lieu de travail. Si les « maladies causées par l’exposition à des températures extrêmes » sont répertoriées dans la liste approuvée des maladies professionnelles, les protections contre la chaleur et les enquêtes sur ses effets, y compris les décès dus à la chaleur extrême, restent largement insuffisantes.

La Fédération Internationale de Football Association (FIFA) a attribué la Coupe du monde de 2034 à l’Arabie saoudite. Toutefois, la FIFA l’a fait sans avoir procédé à une vérification préalable adéquate en matière de droits humains, et sans obtenir de garanties quant à la protection effective des travailleurs, notamment contre les températures extrêmes et en matière de sécurité sociale, y compris l’obligation de souscrire un contrat d’assurance-vie, ainsi que l’octroi d’indemnités aux proches survivants en cas de décès accidentel lié au travail. C’est en connaissance de cause que la FIFA prend une fois encore le risque que l’organisation d’un tournoi entraîne un lourd tribut humain, a déclaré Human Rights Watch.

Human Rights Watch estime en outre que les autorités saoudiennes, la FIFA et les autres employeurs devraient faire en sorte que tous les décès de travailleurs migrants, quels qu’en soient la cause perçue, l’heure et le lieu, fassent l’objet d’une enquête en bonne et due forme et que les familles soient traitées avec dignité et reçoivent rapidement une indemnisation juste.

Dans sa réponse à Human Rights Watch, la FIFA a écrit qu’elle prévoyait de mettre en place un système de protection sociale pour les travailleurs définissant des normes et des mécanismes d’application obligatoires pour les travaux de construction et la fourniture de services en lien avec la Coupe du monde en Arabie saoudite. Elle n’a cependant pas fourni de précisions sur les mesures concrètes qui permettraient de prévenir les décès de travailleurs migrants (notamment des mesures de protection contre la chaleur fondées sur le risque), et d’enquêter et d’indemniser les familles en cas de décès (par ex. : une assurance vie). Les autorités saoudiennes n’ont pas répondu à une lettre de Human Rights Watch datée du 25 mars leur demandant des précisions sur les protections dont bénéficiaient les travailleurs migrants. Human Rights Watch avait déjà montré que le Qatar, pays hôte de la Coupe du monde 2022 de la FIFA, avait encouragé les sous‑traitants à souscrire une assurance vie privée pour leurs employés dès 2019. Mais en 2022, Human Rights Watch avait découvert que seulement 23 sous-traitants l’avaient fait. L’un d’entre eux avait indiqué que cela avait coûté moins de 14 dollars par travailleur et par an, pour une indemnisation de 20 599 dollars en faveur des membres de la famille si les décès n’étaient pas classés comme professionnels et ne remplissaient pas les conditions d’une indemnisation.

« La FIFA, qui prétend donner un élan à des réformes positives du travail dans les pays hôtes de la Coupe du monde, devrait tirer les leçons des catastrophes qu’ont été les compétitions passées sur le plan des droits humains, et exiger d’urgence la prévention effective des accidents, des enquêtes et des mécanismes d’indemnisation en cas de blessure ou de décès de travailleurs migrants », a conclu Michael Page.

Informations complémentairesDécès de travailleurs migrants en Arabie saoudite

Les chercheurs ont recueilli des informations sur les décès de travailleurs migrants auprès de sources gouvernementales indiennes, bangladaises et népalaises. Toutes nationalités confondues, la grande majorité des décès de travailleurs ont été attribués à des « causes naturelles ». C’est en effet le cas pour 74 % des 1 420 décès de travailleurs migrants indiens enregistrés uniquement à l’ambassade indienne de Riyad en 2023 ; 80 % des 887 décès de travailleurs bangladais au cours des 6 premiers mois de 2024 ; et 68 % des 870 décès de travailleurs migrants népalais de 2019 à 2022.

Cinq des neuf cas de décès documentés par Human Rights Watch officiellement classés comme non liés au travail, y compris des décès par « causes naturelles », concernent des travailleurs qui se sont effondrés sur leur lieu de travail et sont décédés par la suite, selon leurs familles. Des témoins de deux décès de travailleurs ont déclaré aux familles que leurs collègues étaient décédés à la suite d’accidents du travail ; dans le premier cas, il s’agissait d’une électrocution et dans le second, d’un accident d’ascenseur. Des témoins ont également indiqué aux familles de deux travailleurs migrants décédés que ceux-ci étaient morts dans leur sommeil. Ces résultats font craindre qu’en Arabie saoudite, les accidents du travail soient insuffisamment enregistrés et mal catégorisés et/ou qu’ils ne fassent pas l’objet d’enquêtes adéquates.

En outre, dans le cas du décès d’un travailleur bangladais par « électrocution », le « certificat de non-objection » indiquait qu’il n’y avait « pas de possibilité » d’indemnisation et que le motif de ce refus était « non disponible », tandis que pour deux autres cas d’accidents du travail officiellement certifiés, la possibilité de recevoir une indemnisation était indiquée comme « dépendant du rapport de police ».

Les employeurs se sont également soustraits ou ont tenté de se soustraire aux obligations leur incombant en vertu de la loi saoudienne, qui les oblige à prendre en charge les frais de rapatriement des dépouilles mortelles, à moins que ceux-ci ne soient couverts par la GOSI. Les membres des familles de neuf travailleurs bangladais décédés ont déclaré que les employeurs avaient proposé de les enterrer en Arabie saoudite, en offrant des paiements forfaitaires ou la prise en charge de dépenses mensuelles telles que les frais de scolarité des enfants. Malgré leurs conditions économiques désastreuses, huit familles ont déclaré avoir refusé ces offres, tandis que six ont payé elles-mêmes les frais de rapatriement. Dans un cas, l’épouse d’un travailleur népalais a déclaré que son conjoint avait été enterré en Arabie saoudite sans le consentement de la famille. Aucune de ces familles n’a encore été indemnisée.

Le fils d’un Bangladais décédé à la suite d’une décharge électrique a déclaré que l’employeur de son père avait conditionné l’indemnisation à un enterrement sur place. La famille a refusé cette condition et a dû payer plus de 500 000 takas bangladais (environ 4 134 dollars) pour rapatrier le corps, somme qu’elle a financée par des prêts. La famille a reçu une indemnisation de 335 000 takas (2 770 dollars) de la part du gouvernement bangladais. « Nos dettes étaient plus importantes que les indemnités », a conclu le fils.

Les familles de travailleurs migrants éligibles ont du mal à accéder aux prestations de sécurité sociale du gouvernement saoudien, même avec l’aide de leur ambassade ou de leur consulat. Les sites Web des ambassades des pays d’origine indiquent que l’obtention d’une indemnisation est extrêmement longue et fastidieuse, et qu’elle peut prendre des années. La veuve d’un travailleur décédé a déclaré qu’il lui avait fallu dix ans pour obtenir ce qui lui était dû : « Mes fils ont 11 et 13 ans. Lorsque mon mari est décédé, ils avaient 11 mois et 2 ans. Si nous avions été indemnisés juste après sa mort, nous aurions été tellement soulagés ».

Dans un autre cas, il a fallu près de 15 ans à la famille d’un migrant décédé pour accéder à ses prestations GOSI. Son frère a déclaré à Human Rights Watch : « L’indemnisation aurait dû arriver plus tôt. Elle aurait apporté une certaine consolation à mes parents en deuil et allégé la pression des prêts. Ils sont décédés six ans après la mort de mon frère ».

Le fait de ne pas reconnaître les décès survenus sur le lieu de travail et de ne pas garantir en temps voulu la sécurité sociale aux membres survivants de la famille peut aggraver leur pauvreté ou engendrer des préjudices sur plusieurs générations, notamment parce que cela contraint les familles à déscolariser leurs enfants pour les envoyer travailler. La veuve d’un travailleur migrant bangladais a déclaré : « Pour joindre les deux bouts, j’ai fait travailler mon fils de 14 ans, et le peu d’argent qu’il gagne est utilisé pour nos dépenses quotidiennes ».

Certains témoins ayant assisté à la mort de collègues dans des accidents du travail ont déclaré que leur employeur avait exigé qu’ils reprennent rapidement le travail. L’un d’entre eux a décrit les vertiges ressentis au moment d’écarter le cadavre de son ami tué dans un accident de machine. Il a repris le travail le lendemain sans pouvoir bénéficier d’un congé de deuil ni d’un soutien social ou de santé mentale.

Un autre a déclaré que ses supérieurs remettaient en cause les raisons pour lesquelles lui et ses collègues avaient interrompu leur travail après avoir assisté à la mort de leur ami. Ils ont été contraints de reprendre le travail le jour même. « C’est difficile dans un pays étranger », a-t-il expliqué. « Nous n’avons pas osé parler de ce problème et nous n’avons rien dit, car nous avions peur ».

Décès sur le lieu de travail et manquements flagrants à la sécurité sur le lieu de travailMorts dues à des chutes de travailleurs, ou à des chutes de matériaux de construction

La veuve d’un Bangladais de 48 ans qui a travaillé dans le secteur de la construction en Arabie saoudite pendant plus de vingt ans a raconté :

Il est décédé après être tombé du cinquième étage d’un immeuble en construction. Ses collègues présents sur place m’ont expliqué que l’endroit où il était tombé était la zone d’atterrissage de l’ascenseur, où des ordures et des morceaux de fer avaient été jetés. À ce moment-là, il effectuait des travaux de coffrage et sa ceinture de sécurité s’est détachée, ce qui l’a fait tomber… Comme il y avait beaucoup d’objets lourds et durs, il a été blessé à plusieurs endroits de la tête et du corps. Il a perdu connaissance mais est resté en vie. La police saoudienne est arrivée très rapidement sur les lieux de l’accident, l’a secouru et l’a emmené à l’hôpital le plus proche. Après avoir reçu les premiers secours, il a été admis à l’unité de soins intensifs, mais il est décédé deux heures plus tard. Je lui parlais plusieurs fois par jour. Comme tous les jours, le jour de sa mort, il m’a appelé après le déjeuner et ça a été notre dernière conversation.

La veuve d’un travailleur migrant bangladais de 36 ans qui a travaillé dans le secteur de la construction en Arabie saoudite pendant plus de huit ans a raconté :

Mon beau-frère travaillait dans la même entreprise et vivait avec lui. Le jour de l’accident, il était présent sur le chantier et c’est lui qui nous a informés du décès de mon mari. Il m’a dit : « Nous transportons des blocs lourds au travail, et il y a une grande quantité de blocs accumulée sur le chantier. Mon frère [mon mari] passait à cet endroit quand une masse de blocs lui est soudainement tombée dessus. Comme il y en avait beaucoup, nous n’avons pas pu l’extraire à mains nues. Une grue a été amenée pour le dégager de là, mais il était trop tard. Mon frère [mon mari] avait déjà cessé de respirer. Son corps a été écrasé par le poids des lourds blocs. »

La veuve d’un travailleur migrant bangladais de 33 ans qui travaillait dans le secteur de la construction en Arabie saoudite depuis à peine sept mois a témoigné :

Quelques membres de ma famille vivent en Arabie saoudite pour leur travail. Ils ont appris que mon mari était tombé du troisième étage de la fenêtre d’un bâtiment de construction qui était sur le point d’être démoli pour la reconstruction… Mon mari était au troisième étage en train de marteler le mur pour le casser lorsqu’il est tombé. Il n’est pas mort sur le coup. Mais personne n’est venu l’aider de peur d’avoir des ennuis judiciaires, car il s’agissait d’un cas d’accident.

Morts par électrocution

La veuve d’un Népalais de 25 ans qui a travaillé en Arabie saoudite pendant deux ans a déclaré :

Après avoir été électrocuté au travail, mon mari s’est effondré et a été transporté à l’hôpital. Quelques mois plus tard, nous avons été soulagés d’apprendre qu’il avait repris connaissance, puis nous avons soudainement été informés de son décès. La cause du décès est professionnelle, mais officiellement, elle est considérée comme naturelle. En plus, nous n’avons pas reçu le corps de mon mari, mais nous avons été informés que les derniers sacrements avaient déjà été administrés en Arabie saoudite, sans notre autorisation. Cela nous a encore plus attristés. Nous pensons que tout cela fait partie d’un plan conçu pour nous priver d’indemnisation. Tant de questions restent sans réponse… Qui les a autorisés à enterrer [mon mari] au lieu de rapatrier [son] corps ? Des témoins affirment que la mort a été causée par une électrocution…

La veuve d’un travailleur migrant bangladais de 27 ans qui a travaillé en Arabie saoudite pendant quatre ans et demi a raconté :

Plusieurs collègues étaient présents lorsqu’il [mon mari] a été électrocuté. Ils ont raconté qu’il travaillait à proximité de fils électriques lorsqu’il s’est effondré sous l’effet d’un choc électrique soudain. Malgré les tentatives de réanimation, il a été déclaré mort sur place.

Décapitations accidentelles

La veuve d’un Bangladais de 46 ans qui a travaillé dans le secteur de la construction en Arabie saoudite pendant deux ans a décrit les circonstances de son décès :

Selon ses collègues et le contremaître, il a remarqué un problème mécanique sur la machine qu’il utilisait. Il a éteint la machine pour la réparer et essayait de retirer une pierre coincée à l’intérieur lorsque quelqu’un a accidentellement remis la machine en marche. Sa tête est restée coincée à l’intérieur et il est mort sur le coup. Lorsque son corps est arrivé au Bangladesh, nous avons constaté que sa tête était séparée de son corps. La description fournie par ses collègues correspondait à l’état de son corps, et je n’ai donc eu d’autre choix que de croire à l’accident. Cependant, je ne peux pas dire si l’enquête sur l’accident a été approfondie ou non. Lorsque nous avons reçu son corps, j’ai voulu le serrer une dernière fois dans mes bras, mais cela n’a pas été possible. En le voyant dans cet état, j’ai perdu connaissance.

La veuve d’un autre Bangladais, âgé de 43 ans qui a taillé des blocs de béton en Arabie saoudite pendant deux ans a raconté :

Il n’avait aucune expérience de l’utilisation de ce type de machine géante. La lame s’est peut-être bloquée, mais il n’a pas remarqué qu’elle tournait dans la partie supérieure. Il a placé sa tête à l’intérieur de la machine lorsque la lame s’est soudainement mise à tourner. À ce moment-là, sa tête a été coupée par la lame et s’est détachée du corps. Il est mort sur le coup. La police est arrivée et a pris le corps. Je ne sais ce qui s’est passé qu’à travers ce qu’on m’en a dit. Je n’ai pas pu vérifier la cause du décès depuis le Bangladesh. 

Pression des employeurs pour que les travailleurs migrants décédés soient enterrés en Arabie saoudite

De nombreuses familles de travailleurs migrants ont indiqué à Human Rights Watch que l’employeur de leur proche décédé avait activement fait obstacle au rapatriement de leur corps.

La veuve d’un Bangladais de 48 ans qui a travaillé pendant plus de vingt ans dans le secteur de la construction en Arabie saoudite a confié :

Au départ, les représentants de l’entreprise nous ont proposé d’enterrer le corps de mon mari en Arabie saoudite et nous ont assuré que l’entreprise nous offrirait divers avantages en échange. Mais nous avons voulu ramener le corps de mon mari au Bangladesh et l’enterrer ici. Alors, l’entreprise nous a dit que nous devrions prendre en charge tous les frais de transport du corps… C’est donc notre famille qui a payé toutes ces dépenses.

La veuve d’un Bangladais de 46 ans qui a travaillé dans le secteur de la construction en Arabie saoudite pendant deux ans a raconté :

Le Kafil [parrain] saoudien voulait enterrer mon mari en Arabie saoudite, mais je n’ai pas donné mon accord. Je voulais le ramener pour le voir une dernière fois. Le Kafil n’a fourni aucune aide financière. La présence de ma famille en Arabie saoudite a été utile, car elle s’est investie corps et âme pour que le corps de mon mari soit rapatrié. Pour ce faire, mes proches ont versé 1 000 rials saoudiens (265 dollars), plus 4 000 rials supplémentaires (1 065 dollars) de la part des collègues de mon mari… Le Kafil [sponsor] n’a fourni aucune compensation ou assurance.

La veuve d’un Bangladais de 44 ans qui a travaillé comme plombier en Arabie saoudite pendant plus de vingt ans a raconté :

Au moment du décès, l’entreprise n’a cessé de m’appeler et m’a proposé diverses aides financières en échange de l’enterrement de mon mari en Arabie saoudite même. Ils ont insisté pour que je ne reprenne pas le corps. Ils m’ont promis de m’envoyer 800 000 takas bangladais (6 584 dollars), le salaire restant de mon mari, et une allocation mensuelle pour l’éducation de mes enfants, mais j’ai insisté pour ramener son corps au Bangladesh.

La veuve d’un ouvrier bangladais de 32 ans décédé à la suite de décharges électriques a déclaré :

Le corps de mon mari est arrivé au Bangladesh environ trois mois après sa mort. Le contremaître de l’entreprise n’a cessé d’essayer de me convaincre de diverses manières que si je ne faisais pas rapatrier le corps, j’obtiendrais de nombreux avantages de la part de l’entreprise. Il m’a dit que l’entreprise nous aiderait même à payer nos dépenses mensuelles, les frais de scolarité de nos enfants, etc. Mais nous avons refusé que le corps soit enterré en Arabie saoudite, et le contremaître a lui-même contacté l’entreprise et a ramené le corps au Bangladesh.

Refus d’indemniser les familles de travailleurs migrants décédés, y compris pour des décès survenus dans le cadre du travail

La GOSI de l’Arabie saoudite couvre en principe les blessures ou les décès attribués à des accidents du travail. Cette assurance obligatoire est basée sur une cotisation de 2 % du salaire, et les membres survivants de la famille du défunt perçoivent 84 mois de salaire, la somme maximum étant de 330 000 rials saoudiens (88 000 dollars).

Toutefois, la plupart des décès qui se produisent en Arabie saoudite sont attribués, en l’absence d’enquête appropriée, à des raisons non liées au travail, notamment à des « causes naturelles », ce qui prive les membres de la famille d’une indemnisation. Cependant, les recherches de Human Rights Watch montrent que même lorsque les travailleurs migrants meurent dans des accidents de travail qualifiés comme tels sur les certificats de décès, les familles rencontrent souvent des difficultés et des retards importants d’indemnisation.

Pour de nombreux travailleurs migrants qui rentrent au pays et pour leurs familles, les programmes publics de protection sociale sont un dernier recours, en particulier en cas d’abus entraînant la mort ou des blessures. De nombreux pays d’origine utilisent communément les Fonds de protection sociale aux migrants, qui sont largement financés par les contributions des migrants, pour financer ces programmes. Cependant, pour obtenir ce soutien, il faut être en possession d’un permis de travail valide, ce qui n’est pas le cas de tous les travailleurs migrants. En outre, le niveau et l’étendue de l’aide apportée par les pays d’origine varient considérablement.

Indemnisation tardive par l’Arabie saoudite ou par le pays d’origine

La veuve d’un ouvrier népalais de la construction routière âgé de 28 ans, décédé après avoir été percuté par un poids lourd, a livré ce témoignage :

J’ai reçu 700 000 roupies indiennes (8 065 dollars) du gouvernement népalais à titre d’indemnisation et 1 400 000 (16 130 dollars) de la compagnie d’assurance [népalaise]. J’ai rencontré de nombreux obstacles pour recevoir l’indemnisation de l’Arabie saoudite. Mon beau-frère a pris les devants. Les démarches ont duré deux ans et j’ai dû me rendre dans de nombreux bureaux. Les formalités administratives étaient lourdes… Il était clair que je ne pouvais pas gérer seule le processus d’indemnisation. Mon beau-frère a alors fait appel à des travailleurs sociaux qui ont fait pression sur l’ambassade du Népal en Arabie saoudite. Ce n’est qu’après de nombreuses relances que nous avons finalement reçu l’indemnisation sur les comptes bancaires de mon fils et de moi-même séparément… Sans [l’indemnisation], nous n’aurions pas été en mesure de gérer nos dépenses…

Le frère d’un travailleur népalais décédé, qui s’est battu pour obtenir une indemnisation au nom de sa belle-sœur, a déclaré :

Pour le décès de mon frère, nous avons reçu une indemnisation de la GOSI au bout de 15 ans. J’étais déterminé à obtenir une indemnisation et j’ai donc continué à suivre le dossier. Tout le monde n’aurait pas pu en faire autant. Les membres de ma famille m’ont dit d’abandonner, mais j’étais déterminé à obtenir l’indemnisation à tout prix. Si nécessaire, j’étais prêt à me rendre en Arabie saoudite pour défendre ma cause. Mais au moins, nous avons reçu l’argent : c’est mieux que de ne rien recevoir.... Cela nous a soulagés.

L’épouse d’un travailleur népalais de 34 ans décédé dans un accident de la route a déclaré :

J’ai épargné le montant de l’indemnité sur mon compte bancaire et j’essaie de ne pas y toucher. Je dois l’épargner pour l’avenir de mes enfants. J’essaie de gérer les dépenses de mon ménage grâce à l’agriculture de subsistance, aux indemnités que le gouvernement népalais verse aux veuves et aux bourses d’étude destinées aux enfants de migrants décédés par l’intermédiaire du Foreign Employment Board [programme de bourses d’études financé par le fonds contributif de protection sociale des migrants].

Autres exemples d’indemnisation tardive ou inadéquate

La veuve d’un Bangladais de 44 ans qui a travaillé comme plombier en Arabie saoudite pendant plus de vingt ans a raconté :

Je n’ai pas reçu beaucoup d’aide financière à l’arrivée du corps, mais trois mois plus tard, le gouvernement bangladais m’a versé 350 000 takas (2 879 dollars). Ni le gouvernement saoudien ni l’entreprise n’ont fourni d’aide financière. L’entreprise avait précédemment promis de m’aider, mais je n’ai jamais reçu de soutien.

La veuve d’un Bangladais de 26 ans qui a travaillé en Arabie saoudite comme ouvrier du bâtiment pendant plus de cinq ans avant de décéder sous le poids d’une chargeuse a raconté :

Il a fallu plus de trois mois pour ramener son corps au Bangladesh en raison de retards bureaucratiques et du refus de l’employeur de prendre ses responsabilités… Malgré des demandes répétées, l’entreprise n’a pas payé les salaires qui restaient, les indemnités de fin de service ou les compensations supplémentaires. Nous avons reçu 300 000 takas (2 466 dollars) du gouvernement dans le cadre du Fonds de bien-être des expatriés…

La veuve d’un ouvrier bangladais de 32 ans décédé à la suite de décharges électriques a déclaré :

Au moment de sa mort, il restait un mois de salaire impayé que l’entreprise nous a envoyé par la suite. Mais nous n’avons pas récupéré l’argent qu’il avait à la banque ni ses autres biens… Nous avons reçu 35 000 takas (287 dollars) du gouvernement bangladais lorsque nous avons reçu le corps, puis 300 000 takas (2 466 dollars), et ses amis du travail nous ont également envoyé 150 000 takas (1 233 dollars) en soutien. L’entreprise n’a versé ni le salaire dû, ni aucun avantage, ni aucune somme pour l’assurance…

La veuve d’un plombier indien de 44 ans décédé de « cause naturelle », ce que la famille ne croit pas, a précisé :

L’entreprise a versé 300 000 roupies indiennes (3 511 dollars). Nous ne savons pas si cet argent correspond à un salaire dû, à des indemnités de fin de service ou à une compensation… Nous avons parlé à Rajeev [un autre travailleur migrant de l’entreprise], qui est le seul interlocuteur de notre famille auprès de l’entreprise. Il nous a dit que l’entreprise n’était pas disposée à nous verser de l’argent supplémentaire. Pourtant, elle nous en doit encore au titre de l’indemnité de décès puisque le décès est survenu sur le lieu de travail.

Exemple d’absence d’indemnisation

La veuve d’un Népalais de 45 ans qui a travaillé en Arabie saoudite en tant qu’ouvrier sur un chantier de construction routière pendant plus de 11 ans a déclaré :

J’ai supplié la compagnie plusieurs fois de me verser de l’argent au titre de l’assurance. Mais ils disent que ce n’est pas dans leurs règles, car ils n’ont pas de police d’assurance vie, seulement une assurance accident. Notre cas n’est pas considéré comme un accident du travail. Faut-il tomber, être frappé par une pierre ou être coupé par une machine pendant le travail ? Il s’est évanoui à cause d’une forte pression au travail. Je pense que l’enquête est incomplète. Nous sommes obligés de les croire sur parole, car nous ne pouvons pas nous rendre sur place [en Arabie saoudite] pour mieux comprendre la situation. L’argent de l’indemnisation aurait été comme de l’oxygène pour nous. Nous n’avons pas non plus été indemnisés par le gouvernement népalais, car son permis de travail avait expiré et il ne pouvait prétendre à une indemnisation du fonds d’aide sociale ou de l’assurance. 

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