
19.11.2025 à 18:04
Déborah Yapi
Pascal Boniface · Réhabiliter la Realpolitik. Avec Gérard Araud | Entretiens géopo Pourquoi et comment réhabiliter la Realpolitik ? En mettant leurs principes moraux au cœur de leur politique étrangère, les pays occidentaux se retrouvent aujourd’hui mis à mal face à leurs propres contradictions. D’une part, on leur reproche d’appliquer un double standard dans leurs prises de position internationales. D’autre part, leurs choix guidés par des valeurs affichées comme universelles se révèlent parfois déconnectés des rapports de force réels, produisant des résultats contraires à leurs intentions initiales. Loin de renforcer leur légitimité, cette posture morale peut ainsi fragiliser leur crédibilité sur la scène internationale.De Machiavel à la Realpolitik formulée et pratiquée par Henry Kissinger, en passant par la construction de l’ordre international libéral après 1945, la morale a toujours occupé une place ambiguë dans l’exercice du pouvoir : invoquée comme fondement de légitimité, mais souvent contournée lorsqu’elle se heurte aux intérêts stratégiques des États. Or, dans un monde voyant émerger un nouvel ordre international, l’Occident doit repenser sa stratégie et réhabiliter la Realpolitik, à savoir adopter une vision réaliste de la géopolitique et des rapports de force internationaux, sans pour autant renoncer à ses principes. Quelles sont les conséquences de la realpolitik et la diplomatie morale ? Le réalisme permet-il de mieux appréhender le monde contemporain que les approches fondées sur la morale, notamment au regard de la rivalité sino-américaine et des conflits en Ukraine et au Proche-Orient ? Dans quelle mesure les instituts de recherche peuvent-ils contribuer à faire évoluer la politique étrangère en collaborant avec les acteurs diplomatiques ?Autant d’enjeux abordés avec Gérard Araud, ancien ambassadeur de France aux États-Unis et en Israël, auteur du livre « Leçons de diplomatie » aux éditions Tallandier.
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Pourquoi et comment réhabiliter la Realpolitik ? En mettant leurs principes moraux au cœur de leur politique étrangère, les pays occidentaux se retrouvent aujourd’hui mis à mal face à leurs propres contradictions. D’une part, on leur reproche d’appliquer un double standard dans leurs prises de position internationales. D’autre part, leurs choix guidés par des valeurs affichées comme universelles se révèlent parfois déconnectés des rapports de force réels, produisant des résultats contraires à leurs intentions initiales. Loin de renforcer leur légitimité, cette posture morale peut ainsi fragiliser leur crédibilité sur la scène internationale.
De Machiavel à la Realpolitik formulée et pratiquée par Henry Kissinger, en passant par la construction de l’ordre international libéral après 1945, la morale a toujours occupé une place ambiguë dans l’exercice du pouvoir : invoquée comme fondement de légitimité, mais souvent contournée lorsqu’elle se heurte aux intérêts stratégiques des États. Or, dans un monde voyant émerger un nouvel ordre international, l’Occident doit repenser sa stratégie et réhabiliter la Realpolitik, à savoir adopter une vision réaliste de la géopolitique et des rapports de force internationaux, sans pour autant renoncer à ses principes. Quelles sont les conséquences de la realpolitik et la diplomatie morale ? Le réalisme permet-il de mieux appréhender le monde contemporain que les approches fondées sur la morale, notamment au regard de la rivalité sino-américaine et des conflits en Ukraine et au Proche-Orient ? Dans quelle mesure les instituts de recherche peuvent-ils contribuer à faire évoluer la politique étrangère en collaborant avec les acteurs diplomatiques ?
Autant d’enjeux abordés avec Gérard Araud, ancien ambassadeur de France aux États-Unis et en Israël, auteur du livre « Leçons de diplomatie » aux éditions Tallandier.
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19.11.2025 à 17:19
Déborah Yapi
Le 16 novembre, le Chili a vécu un double scrutin clé avec le premier tour des élections législatives et présidentielles, rebattant profondément les cartes politiques. La gauche, rassemblée autour de la candidate communiste Jeannette Jara, réalise son plus mauvais score depuis 1958 avec seulement 28 %, tandis que les droites enregistrent une poussée spectaculaire, notamment autour de José Antonio Kast, qui recueille 24 % des voix. Aujourd’hui, près de 60 % de l’électorat chilien vote pour une droite nouvelle, plus « dure » que la tradition politique du pays. Que traduisent ces résultats de l’évolution politique du Chili ? À quoi sont-ils dus ? Quelles pourraient-être les perspectives régionales en Amérique latine et équilibres géopolitiques à venir ?
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Le 16 novembre, le Chili a vécu un double scrutin clé avec le premier tour des élections législatives et présidentielles, rebattant profondément les cartes politiques. La gauche, rassemblée autour de la candidate communiste Jeannette Jara, réalise son plus mauvais score depuis 1958 avec seulement 28 %, tandis que les droites enregistrent une poussée spectaculaire, notamment autour de José Antonio Kast, qui recueille 24 % des voix. Aujourd’hui, près de 60 % de l’électorat chilien vote pour une droite nouvelle, plus « dure » que la tradition politique du pays. Que traduisent ces résultats de l’évolution politique du Chili ? À quoi sont-ils dus ? Quelles pourraient-être les perspectives régionales en Amérique latine et équilibres géopolitiques à venir ?
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19.11.2025 à 12:36
Déborah Yapi
« …Il aura le pouvoir d’accorder des sursis et des grâces pour les infractions contre les États-Unis, sauf en cas de destitution. » Décidément, Donald Trump ne se gêne pas pour exercer son pouvoir constitutionnel de gracier des accusés et des condamnés. Trump semble utiliser ses pardons pour marquer des points politiques, protéger sa famille, ses amis et ses partisans, et rendre des faveurs. Bien que le nombre, si ce n’est la notoriété, de ses pardons lors de sa première administration soit resté dans les normes historiques, depuis son investiture en janvier dernier il a augmenté la fréquence et la visibilité de ses pardons. Dans les premiers mois de son mandat, il a protégé près de 1 600 contrevenants des conséquences de leurs méfaits. Peut-il faire cela ? Existe-t-il des limites au pouvoir du président d’effacer des condamnations pénales ? Que dit l’utilisation de ce pouvoir par Trump sur l’état de droit aux États-Unis ? Peut-être qu’aucun autre pouvoir accordé par la Constitution au président n’est aussi illimité. Du point de vue du droit constitutionnel, le président peut, d’un simple coup de stylo, accorder la clémence. Cela peut être un pardon complet, effaçant essentiellement une condamnation (et libérant immédiatement la personne de prison si elle y est encore incarcérée). Ou cela peut être une commutation de peine, où la condamnation reste mais l’emprisonnement est écourté. Le président peut même gracier des personnes avant qu’elles ne soient accusées d’un crime, empêchant ainsi toute poursuite future. Bien que ni la Constitution ni la loi américaine ne l’exigent, la tradition impose une certaine obligation de garantir transparence et équité dans l’octroi des pardons. Le Bureau de l’avocat chargé des grâces du Département de la Justice dispose depuis la fin du XIXᵉ siècle d’un processus structuré en plusieurs étapes pour traiter les demandes ; […]
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« …Il aura le pouvoir d’accorder des sursis et des grâces pour les infractions contre les États-Unis, sauf en cas de destitution. »
Décidément, Donald Trump ne se gêne pas pour exercer son pouvoir constitutionnel de gracier des accusés et des condamnés. Trump semble utiliser ses pardons pour marquer des points politiques, protéger sa famille, ses amis et ses partisans, et rendre des faveurs. Bien que le nombre, si ce n’est la notoriété, de ses pardons lors de sa première administration soit resté dans les normes historiques, depuis son investiture en janvier dernier il a augmenté la fréquence et la visibilité de ses pardons. Dans les premiers mois de son mandat, il a protégé près de 1 600 contrevenants des conséquences de leurs méfaits. Peut-il faire cela ? Existe-t-il des limites au pouvoir du président d’effacer des condamnations pénales ? Que dit l’utilisation de ce pouvoir par Trump sur l’état de droit aux États-Unis ?
Peut-être qu’aucun autre pouvoir accordé par la Constitution au président n’est aussi illimité. Du point de vue du droit constitutionnel, le président peut, d’un simple coup de stylo, accorder la clémence. Cela peut être un pardon complet, effaçant essentiellement une condamnation (et libérant immédiatement la personne de prison si elle y est encore incarcérée). Ou cela peut être une commutation de peine, où la condamnation reste mais l’emprisonnement est écourté. Le président peut même gracier des personnes avant qu’elles ne soient accusées d’un crime, empêchant ainsi toute poursuite future. Bien que ni la Constitution ni la loi américaine ne l’exigent, la tradition impose une certaine obligation de garantir transparence et équité dans l’octroi des pardons. Le Bureau de l’avocat chargé des grâces du Département de la Justice dispose depuis la fin du XIXᵉ siècle d’un processus structuré en plusieurs étapes pour traiter les demandes ; ces dernières années, cependant, la Maison-Blanche a de plus en plus contourné ce processus.
Il n’existe que deux limites au pouvoir de gracier. Premièrement et surtout, le président ne peut gracier que pour des crimes fédéraux. Or, une grande partie du processus judiciaire américain se déroule au niveau des États ou au niveau local, et le président n’a aucun pouvoir d’intervention dans ces juridictions. À titre d’exemple, sous la présidence Biden, Donald Trump a été l’objet de plusieurs enquêtes. Certaines, comme celles concernant l’ingérence dans le processus électoral ou la gestion de documents gouvernementaux classifiés, relevaient de juridictions fédérales (et étaient donc potentiellement susceptibles d’un pardon présidentiel). D’autres, comme sa condamnation finale pour falsification de documents commerciaux à New York, relevaient de la compétence de l’État et n’étaient donc pas pardonnables. Deuxièmement, la jurisprudence américaine considère généralement que le président ne peut pas gracier des individus pour des crimes futurs. Le précédent principal à ce sujet remonte à un jugement de la Cour suprême de 1867 qui déterminait que les pardons ne pouvaient être accordés qu’après la commission d’une infraction. En principe, cependant, Trump ou son successeur pourrait tenter de contester cette interprétation.
Trump n’est pas le premier président à prendre des décisions controversées en matière de pardon. Gerald Ford a notamment gracié Richard Nixon après la démission de ce dernier, mettant ainsi fin à tout espoir de responsabilité à haut niveau pour le scandale du Watergate. Jimmy Carter a accordé une amnistie générale controversée à des milliers de déserteurs de la guerre du Vietnam. Bill Clinton a été vivement critiqué pour avoir gracié le grand donateur démocrate Mark Rich. Joe Biden a accordé à la dernière minute un pardon à son fils Hunter Biden, malgré ses promesses répétées et publiques de ne pas le faire.
Les pardons de Trump ont toutefois fait l’objet d’un examen particulier. Tout d’abord, Trump a veillé à ce qu’un très large éventail de responsables et de partisans soient protégés contre toute poursuite et incarcération. Sa liste des pardons ressemble à un véritable « who’s who » du monde Trump : l’ancien conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn, son confident politique Roger Stone, le directeur de campagne de 2016 Paul Manafort, l’ancien assistant de la Maison-Blanche et influenceur MAGA Steve Bannon, l’ancien chef de cabinet Mark Meadows, l’ancien avocat de Trump Rudi Giuliani, et bien d’autres. Un certain nombre de pardons de Trump – comme ceux accordés au PDG de Binance, Changpeng Zhao, qui aurait eu des liens commerciaux avec les fils de Trump, ou au grand collecteur de fonds Elliott Broidy – donnent au minimum l’apparence d’un conflit d’intérêts personnel. Comme Biden, la clémence de Trump s’étend également à son cercle familial. À la fin de sa première administration, Trump a gracié Charles Kutchner, le père de son gendre Jared, qui avait été condamné dans une affaire rocambolesque impliquant la subornation de témoins. Kutchner est aujourd’hui ambassadeur des États-Unis en France. Comme ses prédécesseurs, Trump a également gracié des catégories entières de criminels. Donald Trump, cependant, a utilisé des pardons massifs pour des fins ouvertement partisanes. Le jour de son investiture en janvier dernier, il a accordé la clémence à 1 500 émeutiers qui avaient pris d’assaut le Capitole américain en 2021 pour protester contre l’élection de son adversaire.
Dans un contexte général d’érosion de l’indépendance et de la transparence du processus judiciaire, les pardons de Trump posent problème. En premier lieu, il semble y avoir une tentative concertée et peu subtile de l’administration visant à cibler les opposants de Trump. L’ancien directeur du FBI James Comey, qui a mené l’enquête sur l’ingérence russe dans la campagne présidentielle de 2016, et Letitia James, la procureure de New York qui a obtenu la condamnation de Trump pour fraude commerciale, ont déjà été inculpés. Tous deux invoquent des poursuites vindicatives. D’autres sont sous enquête formelle ou font l’objet de menaces publiques similaires de la part du président. À la clôture de la campagne présidentielle de 2024, NPR a recensé plus d’une centaine de cas où Trump avait ouvertement menacé ses ennemis de poursuites judiciaires.[1] Une fois réélu président, il a continué de publier des messages sur des individus qu’il estime devoir être enquêtés ou poursuivis, ce qui constitue une violation grave des normes présidentielles concernant la non-ingérence dans les procédures pénales du ministère de la Justice. Si l’on ajoute à cela une certaine impunité accordée aux soutiens de Trump par ses pardons, l’État de droit en ressort affaibli.
Trump pourrait-il un jour se gracier lui-même ? Dans une certaine mesure, la Cour suprême a déjà rendu cette question caduque. En 2024, la Cour a statué dans « Trump contre les États-Unis » que le président bénéficie d’une immunité absolue pour ses actes officiels. Bien que les actes non officiels ne soient pas couverts par cette décision, presque toutes les actions que Trump pourrait entreprendre dans le cadre de ses fonctions officielles ne peuvent être portées devant les tribunaux. Trump pourrait toujours essayer de se gracier pour des infractions non officielles. Le consensus juridique est qu’une telle action irait à l’encontre de l’intention des auteurs de la Constitution, mais la question n’a jamais été examinée par les tribunaux. Dans l’environnement actuel, toutefois, Trump pourrait toujours tenter cette démarche.
[1] https://www.npr.org/2024/10/21/nx-s1-5134924/trump-election-2024-kamala-harris-elizabeth-cheney-threat-civil-liberties
Retrouvez régulièrement les éditos de Jeff Hawkins, ancien diplomate américain, chercheur associé à l’IRIS, pour ses Carnets d’un vétéran du State Department.
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