"C'est le plus grand (site) que nous allons construire hors des Etats-Unis", a annoncé le PDG de Google Cloud, Thomas Kurian, lors de la signature d'un accord dans la capitale New Delhi.
"Cela représente un investissement en capital d'un montant de 15 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années", a détaillé M. Kurian.
D'une capacité de "l'ordre de plusieurs gigawatts", le centre de données et de recherche du géant américain sera construit à Visakhapatnam (sud), dans l'Etat de l'Andhra Pradesh.
Ces derniers mois, l'Inde a attiré plusieurs acteurs majeurs du secteur de l'IA, séduits par le plus grand marché de la planète en termes de population.
Quelque 900 millions d'Indiens - sur un total de près de 1,5 milliard - utilisent régulièrement Internet, à titre privé ou dans le cadre de leur profession, selon les dernières estimations du secteur.
"Cette infrastructure confirme les ambitions et les projets de l'Inde en matière d'IA", s'est réjoui le ministre indien des Technologies de l'information, Ashwini Vaishnaw.
Le nouveau site indien sera intégré dans un "réseau mondial" reliant les centres installés par Google dans 12 autres pays, a détaillé Thomas Kurian. "Nous n'apportons pas seulement la technologie de l'IA mais toute une infrastructure numérique".
"Nouvel or noir"
En charge des technologies de l'information pour l'Etat d'Andhra Pradesh, Nara Lokesh, a salué un "investissement qui change la donne".
"C'est un fantastique bond en avant pour notre Etat en matière de technologies, d'innovation et de rang dans le monde", a-t-il ajouté, en qualifiant l'information de "nouvel or noir" et les centres de données de "nouvelles raffineries".
La semaine dernière, la start-up américaine Anthropic a annoncé l'ouverture prochaine d'un bureau en Inde, révélant que le géant asiatique figurait déjà au deuxième rang des pays utilisateurs de son assistant conversationnel (chatbot) Claude.
"L'Inde s'impose comme une évidence grâce à son énorme réservoir de talents sur le plan technique et à la volonté de son gouvernement de faire en sorte que l'IA bénéficie à toute la société", a alors souligné le PDG d'Anthropic, Dario Amodei.
"L'écosystème dynamique de la tech indienne et sa jeunesse sont à la pointe de l'innovation en matière d'IA", lui avait alors répondu sur son compte X le Premier ministre indien Narendra Modi.
L'un des principaux concurrents d'Anthropic, OpenAI, a aussi fait part de son intérêt pour le marché indien et envisage également d'y ouvrir une représentation d'ici la fin de l'année.
En août, l'entreprise dirigée par Sam Altman a lancé en Inde un programme d'abonnement à ses services d'un montant d'à peine 399 roupies (4 euros) par mois qui remporte un grand succès auprès des étudiants et des jeunes professionnels.
La firme Perplexity a quant à elle signé un partenariat avec l'opérateur de télécommunications indien Airtel pour offrir ses services en Inde.
Le Trésor américain a annoncé jeudi une aide financière, sous forme d'un échange bilatéral de devises, dit "swap", pour 20 milliards de dollars, et d'une intervention américaine directe sur le marché des changes, pour acheter et soutenir un peso sous pression, soulageant les réserves de la Banque centrale argentine.
L'annonce chiffrée, qu'avait précédé fin septembre une première promesse de soutien du Trésor de faire "tout le nécessaire", a eu un effet dopant sur la monnaie argentine.
Après une dégringolade la semaine dernière, il s'est raffermi juste après l'annonce de Scott Bessent, secrétaire américain au Trésor, et poursuit lundi sa remontée: à 1.370 pesos pour un dollar au taux officiel, contre 1.490 jeudi, soit un gain de plus de 8% en quatre jours.
La présidence argentine n'a pas donné de détails sur la visite de M. Milei, qui voyageait lundi, autre qu'une réunion suivie d'un déjeuner de travail avec Donald Trump.
Sans pour autant garantir d'annonces depuis Washington, Javier Milei a indiqué dans une interview radio lundi que "si certaines choses sont conclues, elles feront l'objet d'annonces. Sinon, ce sera pour plus tard".
Le soutien américain intervient à un moment critique pour Javier Milei. Dans quelques jours, le 26 octobre, il fait face à des législatives de mi-mandat indécises, qui vont déterminer sa marge de manœuvre parlementaire, sa capacité à gouverner pour ses deux ans restant de présidence.
L'incertitude liée au scrutin -et au maintien ou non du cap d'austérité de Javier Milei- avait mis l'économie argentine, la 3e d'Amérique latine, à la merci de turbulences financières ces dernières semaines.
Encore une "passerelle" financière
"Les Etats-Unis ont perçu cette attaque contre l'Argentine, contre les idées de liberté, contre un allié stratégique, et c'est pourquoi ils nous ont apporté leur soutien", a estimé M. Milei lundi.
Pour l'économiste et ancien président de la Banque centrale Martin Redrado, il s'agit purement "d'une assistance financière, une nouvelle passerelle", venant après l'aide du FMI en avril (prêt de 20 milliards), "qui apporte de la tranquillité financière d'ici à l'élection".
"Mais l'Argentine ne peut pas aller de passerelle en passerelle", estime-t-il, d'où l'importance après l'élection "d'armer un programme législatif s'attaquant aux problèmes de production et d'emploi", dans un pays à plus de 40% d'emploi informel, et où le formel ne croit plus depuis 2011.
Au-delà de la probable empathie idéologique entre les deux présidents, la presse argentine se demandait ces derniers jours quelles pouvaient être les contreparties à l'aide américaine.
Un accès privilégié d'investisseurs américains aux ressources minières argentines, tels le lithium, l'uranium ? Une prise de distance d'avec la Chine, l'imposant deuxième partenaire commercial de l'Argentine (après le Brésil) ? Un assouplissement du régime de changes ?
Javier Milei, à plusieurs reprises, a nié que les Etats-Unis aient demandé la fin de l'accord d'échange de devises existant déjà entre l'Argentine et la Chine -et renouvelé en 2024- en contrepartie du swap avec les Etats-Unis.
"C'est faux, ils ne l'ont pas demandé. La raison pour laquelle nous recevons ce soutien est géopolitique", affirmait-il y a deux semaines.
"Les Etats-Unis ont décidé d'être leader sur le continent américain", a-t-il insisté lundi. Et dans ce cadre, ils "savent que nous sommes un véritable allié, pas de circonstance".
L'ambassade de Chine en Argentine a réagi ce week-end à des propos prêtés à Scott Bessent sur les relations entre l'Argentine et la Chine, estimant que les Etats-Unis "doivent comprendre que l'Amérique latine et les Caraïbes ne sont le jardin de personne", et "ont le droit de choisir librement leurs partenaires".
Vendredi, la présidence argentine a annoncé que l'entreprise américaine OpenAI, créatrice de ChatGPT, a signé une lettre d'intention pour construire un mégacentre de données pour l'intelligence artificielle en Patagonie, un projet d'investissement de 25 milliards de dollars.
Andry Rajoelina a écarté lundi soir toute démission en appelant à "respecter la Constitution". Il s'agissait de la première prise de parole du président malgache depuis un lieu inconnu, après le ralliement ce week-end des militaires à la contestation qui agite le pays.
Quatre jours après un Norvège-Israël (5-0) ayant donné lieu à des manifestations propalestiniennes à Oslo, les autorités italiennes se préparent à "une journée à risques", a reconnu le ministre de l'Intérieur, Matteo Piantedosi.
"Tous les matches sont à risques, mais risques ne signifient pas alarmisme, mais plutôt attention maximale", a-t-il insisté.
Quelques 1.000 policiers, appuyés par des hélicoptères et des drones, vont être déployés dont les rues d'Udine (nord-est), choisie pour son éloignement des grands centres urbains italiens où des centaines de milliers de personnes ont défilé début octobre en scandant "Stop au génocide", et dont le maire a espéré jusqu'à la semaine dernière que le match soit délocalisé.
Avant le coup d'envoi, même si la première phase du plan de paix à Gaza a été menée à bien avec la libération d'otages israéliens lundi, 10.000 manifestants sont attendus pour un défilé sous haute-surveillance à partir de 17h30 (15h30 GMT).
Cette rencontre se disputera dans une ambiance particulière loin d'un match habituel des Azzurri: "un peu plus de 8.000 billets sur les 16.000 mis en vente" ont trouvé preneur, a précisé la Fédération italienne de football qui attend une centaine de supporters israéliens.
"Heureux de cette trêve"
Difficile pour le sélectionneur Gennaro Gattuso et ses joueurs de faire abstraction de ce contexte: "Nous sommes heureux qu'il y ait eu cette trêve, voir que des gens ont pu rentrer chez eux et retrouver leurs terres est quelque chose d'émouvant. Il y aura des gens qui vont manifester hors du stade, mais il y aura aussi des gens qui vont nos encourager dans le stade", a-t-il expliqué.
Son homologue israélien Ran Ben Shimon a simplement déclaré que son équipe et lui "était avec notre peuple": "Tout ce qu'on peut faire c'est être concentré à 100% sur notre match pour donner de la joie aux nôtres".
Sur le plan sportif, ce match est capital pour l'Italie qui n'a pas participé aux deux dernières phases finales de la Coupe du monde (2018, 2022).
A moins d'un improbable concours de circonstances, la Nazionale devra passer par les barrages pour participer à la Coupe du monde 2026.
L'Italie a enchaîné trois victoires de suite, la dernière (3-1) en Estonie samedi, en marquant pas moins de treize buts, et s'est emparée de la deuxième place du groupe I, avec trois points d'avance sur Israël.
Mais l'Amérique reste loin: les Azzurri, absents des deux dernières Coupes du monde, comptent six points de retard sur le leader norvégien (18 pts) qui a certes disputé un match en plus mais qui dispose d'une différence de buts nettement favorable (+26, contre +7 à l'Italie).
Forfait de Kean
Même si les quadruples champions du monde devaient réaliser un sans-faute, en remportant leurs trois derniers matches, dont la "finale" du groupe contre la Norvège le 16 novembre à San Siro, ils ne devraient pas décrocher la première place et la qualification directe pour la prochaine Coupe du monde.
Gattuso, qui a succédé en juin à Luciano Spalletti remercié après la déroute d'Oslo (3-0), ne se fait plus guère d'illusions et vise désormais ouvertement la deuxième place.
"On joue gros ce mardi, car si on gagne, on peut mettre Israël hors de l'équation pour les barrages et bien préparer ces barrages", a estimé l'ancien milieu de terrain de l'AC Milan.
Face à Israël, battue 5 à 4 au terme d'un match au scénario fou en septembre à Debrecen (Hongrie), "Rino" va être privé de Moise Kean, touché à la cheville droite contre l'Estonie dont le forfait a été officialisé lundi à la mi-journée.
L'attaquant de la Fiorentina a marqué six buts lors de de ses quatre dernières apparitions en Azzurro. Mais le secteur offensif de la Nazionale, qui affichait ces dernières années un rendement famélique, est en plein renouveau, avec Mateo Retegui (quatre buts sous Gattuso), Giacomo Raspadori (deux buts en trois matches) ou encore le grand espoir Francesco Pio Esposito.
Depuis plusieurs mois déjà, les États-Unis fournissent à l’Ukraine des renseignements précis sur les installations énergétiques à bombarder en Russie. Un soutien qui tranche avec l’attitude passée de Donald Trump à l’égard de Vladimir Poutine. Officiellement, Washington veut pousser Moscou à négocier. Mais ce n’est probablement pas la seule motivation du président américain.
Ce mardi sonne comme une journée à haut risque pour le nouveau gouvernement de Sébastien Lecornu. Lors d'un premier Conseil des ministres, l'exécutif présentera les projets de budget de l'État et de la Sécurité sociale. L'heure de vérité sera la déclaration de politique générale, quasi bouclée, que le Premier ministre français doit prononcer devant l'Assemblée à partir de 15 heures. Suivez notre direct.
A la Une de la presse, ce mardi 14 octobre, la joie des otages israéliens et des détenus palestiniens libérés hier, dans le cadre du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas. Mais aussi les doutes sur le « plan de paix » de Donald Trump. Une journée cruciale pour Sébastien Lecornu. Et du foot, avec les phases qualificatives pour le Mondial 2026.
Le président malgache, Andry Rajoelina, a écarté lundi soir toute démission dans sa première prise de parole depuis un lieu inconnu, après le ralliement des militaires à la contestation. Lors d'un direct diffusé sur les réseaux sociaux, il s'est dit dans un "lieu sûr" après une "tentative de meurtre", sans plus de précision. Selon la radio française RFI, il est parti à l'étranger. Mais l'incertitude demeure sur l'endroit où il se trouve, nourrissant la confusion sur cette île.
Le collectif de jeunes GenZ 212 appelle, lundi, "la jeunesse marocaine ainsi que l'ensemble des citoyennes et citoyens" à se mobiliser pour réclamer des réformes dans les secteurs de la santé et de l'éducation. Pour cela, il va organiser des "sit-in pacifiques" dans la majorité des villes du Maroc samedi.
En cette période de Chuseok, grande fête familiale d'automne, nombreux sont les Sud-Coréens ayant des ancêtres restés au Nord qui accomplissent ce rituel funéraire devant des autels érigés à cet effet à la frontière, faute de pouvoir accéder aux tombes.
Sur l'île de Gyodong, cet autel, le Manghyangdae, se dresse à la pointe nord. A deux kilomètres, passées les eaux grises du fleuve Han, des paysans travaillent la terre sous des drapeaux rouges. Et un slogan en lettres géantes sur une colline proclame: "longue vie au socialisme!"
"Ils sont là-bas, j'espère simplement qu'ils vont bien", dit sobrement M. Ryh, dont le père a fui au Sud à la fin de la guerre de Corée (1950-1953) au contraire de sa grand-mère et d'autres parents qui, restés dans le pays communiste, n'ont plus jamais donné de nouvelles.
L'île de Gyodong a accueilli des milliers de déplacés pendant la guerre. A l'arrivée des troupes chinoises alliées des Nord-Coréens dans le bourg de Yeonbaek, beaucoup d'habitants sont simplement partis à Gyodong en traversant le fleuve, comme ils avaient depuis toujours l'habitude de le faire en bateau ou même à la nage. Sans se douter que cette traversée serait leur dernière.
Pendant sept décennies, ces déplacés n'ont eu pour se consoler que les hirondelles, nombreuses à Gyodong où une légende voit en elles des messagères entre les deux Corées par-dessus les barbelés. Les longues-vues installées au Manghyangdae sont pour eux le seul moyen de voir leurs anciennes maisons, derrière la frontière la plus hermétique du monde.
La plupart des réfugiés de première génération se sont éteints. Pour la poignée encore en vie, le chagrin est intact.
"Peuple au cœur brisé"
"Nous sommes un peuple au cœur brisé", affirme Chai Jae-ok, 94 ans. "Même si nous vivons aujourd'hui dans l'abondance, mes parents, mes frères et sœurs sont tous restés en Corée du Nord. Moi, je suis venu au Sud et j'ai dû les abandonner. A quoi bon vivre dans le luxe si je ne peux pas les revoir? Jour et nuit, je n'ai cessé de crier et d'espérer la réunification", dit-il.
"Avant que mes yeux ne se ferment pour toujours, j'aimerais la voir se réaliser."
Un rêve pour le moment impossible. Si Pyongyang a récemment exprimé son intérêt à renouer le dialogue avec Washington, il a clairement fait savoir qu'il ne voulait plus jamais parler à la Corée du Sud, désormais qualifiée d'"Etat hostile" et avec qui la séparation est irréversible.
Le Nord a même démantelé toutes ses institutions dédiées à une éventuelle réunification et dynamité les routes et voies ferrées intercoréennes, construites pendant les périodes de détente des années 2000.
- "Y a-t-il douleur plus grande ?"
"Mon seul vœu est que, même si la réunification n'a pas lieu de mon vivant, un échange entre le Nord et le Sud me permette au moins de me recueillir sur la tombe de mes parents", poursuit M. Chai. "Elle n'est qu'à six kilomètres d'ici. En voiture, cela prendrait à peine dix minutes. Y a-t-il douleur plus grande?"
Min Ok-sun, 92 ans, a elle laissé ses parents et quatre frères au Nord. "J'ai quitté ma terre natale à 17 ans et je ne les ai jamais revus", dit-elle.
A Gyodong, elle a épousé un autre réfugié, Kim Ching-san, ancien combattant chargé de missions d'infiltration au Nord maintenant âgé de 96 ans.
"Quand je vois des oiseaux retourner à leur nid au coucher du soleil, je me dis que nous, les humains, avons aussi ce besoin de retourner chez nous. C'est notre instinct", dit M. Kim.
"Ma femme et moi, on a des façons différentes de gérer la nostalgie du pays natal. Elle trouve du réconfort dans des choses simples, comme se blottir sous une couverture. Moi, je ne peux pas oublier. Chaque jour, je me bats intérieurement, comme si j'étais encore en guerre. C'est pourquoi je parais plus vieux qu'elle."
Les jours de fête, les réfugiés et d'autres personnes âgées de Gyodong se rassemblent pour chanter à tue-tête de vieilles balades coréennes datant de l'occupation japonaise (1910-1945).
"Ce sont des chansons que tout le monde, au Sud comme au Nord, connaissait avant la division", explique Chang Gwang-hyuck, le bénévole qui anime ces séances et dont le grand-père venait lui aussi du Nord. "Elles reflètent les aspirations et les émotions du peuple de l'époque."
"Ce que ces personnes âgées désirent le plus, c'est apaiser leur nostalgie", poursuit M. Chang. "Quand je vois ces personnes qui ont quitté leur foyer à 20 ans et n'ont jamais pu y retourner, je ressens une profonde tristesse."
La cheffe de l'opposition vénézuélienne, 58 ans, qui est entrée dans la clandestinité quelques jours après la présidentielle de 2024, estime que sa récompense et le déploiement américain sont un "coup fatal" pour le pouvoir.
Washington a déployé en août huit navires de guerre au large des côtes du Venezuela. L'administration Trump a frappé en mer au moins quatre embarcations qu'elle a présentées comme étant celles de narcotrafiquants, pour un bilan d'au moins 21 morts. Plusieurs sources proches du pouvoir américain font état de frappes imminentes visant le territoire vénézuélien.
"Avec ou sans négociation"
"Maduro a en ce moment la possibilité d'avancer vers une transition pacifique. (...) Avec ou sans négociation, il quittera le pouvoir", a-t-elle lancé.
"Nous avons dit être prêts à offrir des garanties, que nous ne rendrons pas publiques tant que nous ne serons pas assis à cette table de négociation. S'il insiste, les conséquences seront directement de sa responsabilité. De personne d'autre", prévient-elle.
"Ils (le pouvoir) sont conscients que nous sommes dans une phase finale et décisive (...) Ces dernières heures, plusieurs camarades ont été arrêtés, la répression augmente. C'est une façon d'essayer de paraître forts parce qu'ils savent que tout ce qui se passe (déploiement et prix Nobel) est un coup fatal", assure Mme Machado.
"Le monde entier sait qu'ils ont été battus à plate couture. Nous avons démontré notre triomphe", ajoute-elle à propos de la présidentielle de 2024.
L'opposition qui a collecté les procès-verbaux des bureaux de vote assure avoir prouvé la fraude du pouvoir. Le conseil national électoral, considéré aux ordres de Maduro, l'a déclaré vainqueur, sans publier de chiffres détaillés, affirmant avoir été victime d'une attaque informatique.
Intervention américaine
"Je ne vais pas spéculer", a-t-elle réagi sur le déploiement américain. "Celui qui a déclaré la guerre aux Vénézuéliens, c'est Nicolas Maduro".
"Je l'ai répété d'innombrables fois: sans liberté, il n'y a pas de paix et sans force, il n'y a pas de liberté quand tu fais face à une structure narco-terroriste. Nous avons tout essayé", a-t-elle néanmoins souligné.
"L'invasion qui existe ici est celle des Cubains, des Russes, des Iraniens (alliés traditionnels de Caracas), du Hezbollah, du Hamas, des cartels de la drogue, de la guérilla des Farc", accuse-t-elle.
"Nous, les Vénézuéliens, nous n'avons pas d'armes à feu, nous avons la parole, nous avons l'organisation citoyenne, nous avons la pression, nous avons la dénonciation", dit-elle.
Relations avec Trump et les Etats-Unis
Mme Machado qui a dédié son prix au "peuple vénézuélien qui souffre" mais aussi au président américain souligne que c'est "reconnaître au président Trump ce que nous considérons juste et nécessaire (...) C'est pour lui transmettre à quel point le Venezuela a besoin de son leadership et de la coalition internationale qui s'est formée".
"Nous avons un grand respect et une communication fluide (avec Washington), comme j'en ai avec de nombreux autres gouvernements", confie Mme Machado.
Elle a refusé d'évoquer la périodicité des contacts ou la lutte d'influence que se livrent, selon les médias, le secrétaire d'Etat Marco Rubio et l'envoyé spécial Richard Grenell.
"Corruption et répression"
"L'argent, lorsqu'il leur parvient (au pouvoir) passe d'abord dans la corruption. C'est le plus grand pillage de l'histoire de l'humanité. En deuxième lieu, (l'argent) va à la répression. (...) Mais il n'y pas d'argent pour les médicaments, les enseignants, les services publics, les personnes âgées", assure Mme Machado.
Armée
"Il faut offrir des garanties, et ceux qui facilitent une transition en auront (...) Ce message, nous l'avons adressé à toute la structure des Forces armées, aux corps policiers et aux employés publics", dit-elle.
Imagine-t-elle un soulèvement ? "Nous avons tous - civils, militaires - un rôle à jouer et, dans tous les cas, toute action qui respecte (la victoire revendiquée par l'opposition à la présidentielle) le 28 juillet serait le rétablissement de la Constitution".
Son avenir
"Notre président élu (Edmundo Gonzalez Urrutia, selon l'opposition) a déclaré qu'il souhaite que je l'accompagne en tant que vice-présidente", a déclare Mme Machado, qui n'avait pu se présenter car déclarée inéligible. "Je serai là où je pourrais être le plus utile à notre pays".
A propos de sa clandestinité, elle affirme ne "pas compter les jours, mais soustraire ceux qui restent, parce que je ne doute pas une seule seconde que nous sommes dans un compte à rebours".
Le dernier interrogatoire de l'accusé s'est achevé après environ huit heures de questions réparties entre vendredi et lundi, sans qu'à aucun moment le peintre-plaquiste de 38 ans ne dévie de sa ligne: il n'a aucun lien avec la disparition de son épouse, dont il est soupçonné du meurtre.
Lundi après-midi cependant, après qu'un expert psychiatre a assuré que Cédric Jubillar était "peu déstabilisable", les mouvements corporels de l'accusé, récurrents depuis le début de son procès, étaient de plus en plus marqués dans son box vitré.
Les "tout à fait" répétitifs, ainsi que les "si vous le dites" ou les "peut-être, mais je n'en ai pas le souvenir" sonnaient un peu différemment, à force de répétitions face à l'avalanche de questions de la présidente, des avocats généraux et des représentants des parties civiles pointant des contradictions entre les propos de l'accusé à l'audience et ses déclarations face aux enquêteurs.
Mes Emmanuelle Franck et Alexandre Martin, les défenseurs de Cédric Jubillar, se sont très peu exprimés tout au long de cette dernière journée d'audition de leur client, critiquant seulement l'imprécision des questions qui lui étaient adressées.
"Aussi tendus que lui"
"Vous êtes pratiquement aussi tendus que lui, laissez donc votre client répondre à mes questions", leur a ainsi lancé Laurent Boguet, l'un des avocats des enfants du couple.
"Cédric Jubillar s'est exprimé comme il le fait depuis le début de cette procédure, pour dire et répéter qu'il est innocent de ce qu'on lui reproche", a insisté Me Martin, à l'issue de la journée de lundi.
Si contradictions il y a eu dans ses déclarations, elles ne portent "que sur des points de détail", a jugé son conseil, tandis que "sur les éléments essentiels du dossier (...) il ne s'est jamais contredit".
Les deux avocats de l'accusé ont indiqué qu'ils n'étaient "pas là pour démontrer l'innocence" de leur client mais "pour combattre des charges que l'on nous avance comme des preuves de culpabilité", la charge de la preuve dans un procès pénal revenant à l'accusation.
Ils ont indiqué qu'ils réservaient dorénavant leurs "propos à la plaidoirie".
C'est désormais à leurs adversaires de l'autre côté de la barre de prendre la parole, comme le prévoit le code de procédure pénale.
Cédric Jubillar "est enferré dans sa logique qui consiste effectivement, coûte que coûte et en dépit des évidences, à protester de son innocence", a déclaré lundi soir devant la presse Me Boguet qui s'exprimera en dernier, après ses huit collègues des parties civiles.
"Contradictions et incohérences"
Il "a bunkerisé et bétonné sa position", a-t-il estimé, même si "nous avons été quelques-uns à le solliciter, à chercher à le pousser dans ses retranchements en avançant les contradictions et les incohérences qui pouvaient résulter de son récit".
Me Mourad Battikh, avocat de plusieurs cousins, tantes et oncles de la disparue, a de son côté dit avoir vu lundi "un homme stressé, un homme qui s'accrochait et qui s'agrippait à la barre, tremblant, l'air vraiment déboussolé".
"Je crois que c'est un effort particulier qui lui est demandé, puisqu'il doit mentir à chacune des questions qui lui est posée, c'est un exercice qui sollicite beaucoup d'énergie, beaucoup de concentration. On a senti qu'il était dans le mensonge permanent", a-t-il déclaré.
"Il a une série de réponses types qu'il enfile les unes après les autres et qui lui permettent de répondre, effectivement, ou de s'abstenir de répondre", a de son côté analysé Laurent de Caunes, autre avocat des parties civiles.
"La victime n'est pas là, il faut essayer de la faire exister, je ne dis pas de la faire revivre malheureusement, mais au moins de susciter sa personne, de susciter sa mémoire, pour rééquilibrer les choses", a ajouté celui qui défend les intérêts des frères et de la soeur de Delphine Jubillar avec l'un de ses confrères.
Les plaidoiries des parties civiles sont prévues jusqu'à mercredi. Prendront ensuite la parole les avocats généraux et la défense. L'accusé s'exprimera en dernier avant que la cour et les jurés ne se retirent pour délibérer, pour un verdict attendu vendredi.
Le pensionnaire de Matignon se rendra d'abord à l'Elysée pour un premier Conseil des ministres à 10H00. Sa nouvelle équipe examinera les projets de budget de l'Etat et de la Sécurité sociale, afin qu'ils soient transmis dans les temps au Parlement.
Mais c'est à partir de 15H00 que les choses se joueront, à la tribune de l'Assemblée nationale, avec sa déclaration de politique générale. Les responsables des groupes parlementaires pourront ensuite lui répondre avant qu'il ne reprenne une dernière fois la parole.
Si l'exercice impose qu'il aborde de nombreux sujets cruciaux pour le pays, l'attention sera focalisée sur les retraites.
"Nous demandons clairement la suspension immédiate et complète de la réforme" de 2023, adoptée sans vote au prix d'un recours au 49.3, a martelé lundi le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure.
Même le camp présidentiel est divisé sur la question: si certains ne veulent pas voir détricoter un marqueur emblématique du second quinquennat d'Emmanuel Macron, d'autres espèrent une suspension pour tenter de sortir de la crise politique.
"Il faut bouger clairement sur les retraites et j'espère que le Premier ministre le fera demain", a ainsi estimé lundi le député macroniste Charles Sitzenstuhl.
Selon des sources gouvernementales et parlementaires, Sébastien Lecornu invitera mardi à Matignon les ministres et députés du camp gouvernemental, avant de se rendre à l'Assemblée prononcer son discours.
"Pente naturelle"
Le PS tiendra un Bureau national à 13H00, a-t-on appris auprès d'une source socialiste. Et se retrouve sous la pression des autres oppositions, RN et LFI en tête.
"C'est le moment de vérité", a lancé lundi le patron du RN Jordan Bardella. Le gouvernement "va évidemment tomber puisqu'il n'y a aucune possibilité de suspension des retraites avec les gens qui sont là-dedans", a jugé pour sa part le chef de file de LFI Jean-Luc Mélenchon.
A ce stade, deux motions de censure ont été déposées, par LFI et des alliés de gauche, et par la coalition RN/UDR, le parti d'Eric Ciotti.
Le PS pourrait décider de déposer sa propre motion mardi après le discours de politique générale.
Le choix des socialistes sera décisif: leurs voix feraient presque assurément pencher la balance de la censure, qui nécessite 289 voix.
Si tout le reste de la gauche (insoumis, écologistes et communistes) et l'alliance RN-UDR votaient une censure, il ne faudrait même qu'une vingtaine de voix du PS pour faire tomber le gouvernement.
Une équation qui interroge un conseiller de l'exécutif: "est-ce que Faure tient le groupe?"
"On a peut-être une douzaine, une dizaine de députés, qui voteront quand même" la censure, même si le groupe appelait à s'abstenir, a commenté sur LCP le porte-parole des députés socialistes Romain Eskenazi.
Il estime toutefois que si le gouvernement accède à des demandes sur les "retraites, le pouvoir d'achat et la fiscalité", il sera épargné.
"Je pense que la pente naturelle des députés est de dire +franchement, on sanctionne tout ça+", résume une source au sein du groupe. Selon lui, "en leur for intérieur", les députés socialistes sont partagés alors que "les Français sont aussi fatigués" par la crise politique et "qu'ils nous demandent de nous entendre".
D'autant que le PS escompte décrocher d'autres victoires dans l'hémicycle.
L'objectif du projet de budget est de garder le déficit en dessous des 5% du PIB, au lieu de 4,7% initialement prévu, un assouplissement qui laisse une marge de 9 milliards d'euros pour éventuellement satisfaire les demandes des oppositions.
"Sur ces bases là, nous allons pouvoir réviser complètement la copie qui va être présentée en Conseil des ministres", a estimé lundi Olivier Faure.
La construction de ces complexes aux allures de mini-villes ceintes de barbelés et gardées par des hommes en armes continue sans relâche autour de Myawaddy, sur la frontière avec la Thaïlande, montrent des images satellite et des prises de vue réalisées par drones par l'AFP.
Ces images mettent en lumière ce qui ressemble à l'utilisation à grande échelle par les fraudeurs du service internet Starlink d'Elon Musk.
Ces espèces de centres d'appel d'un autre genre, qui ont proliféré dans les zones inhospitalières dites du Triangle d'Or, emploient de gré ou de force des petites mains.
Assises derrière un écran ou un téléphone, elles soutirent chaque année des milliards de dollars à des Chinois, des Américains et autres pigeons à l'autre bout du monde, convaincus de réaliser un juteux investissement ou d'avoir trouvé l'amour.
La plupart de ces centres sont sous la coupe de syndicats chinois du crime en cheville avec les milices birmanes qui abondent à la faveur de la guerre civile, disent les experts.
La Chine, la Thaïlande et la Birmanie ont entrepris en février un effort commun pour éradiquer le fléau et mis sous pression les milices birmanes pour qu'elles ferment ces centres. Environ 7.000 personnes ont été, selon les points de vue, interpellées ou libérées d'un système brutal.
Certaines d'entre elles, originaires d'Asie, d'Afrique ou du Moyen-Orient, ont montré aux journalistes de l'AFP les traces des blessures et des coups qu'ils disent avoir reçus de ceux qui les exploitaient.
Sun, un Chinois revendu d'un site à un autre, a raconté son histoire. Elle donne un aperçu du fonctionnement de cette industrie.
Enquête sur Starlink
Un haut responsable policier thaïlandais estimait en mars qu'au moins 100.000 personnes travaillaient encore dans les complexes le long de la frontière birmane.
Les images satellite montrent que l'expansion a repris quelques semaines seulement après les descentes de février.
Des antennes paraboliques Starlink se sont rapidement multipliées sur les toits pour pallier la coupure d'internet par les autorités thaïlandaises.
Près de 80 antennes sont visibles sur un seul toit du plus grand complexe, KK Park, sur les images de l'AFP.
Starlink n'est pas agréé en Birmanie. Avant février, Starlink n'avait pas assez de trafic pour figurer sur la liste des fournisseurs d'accès à internet dans ce pays. Fin avril, il était au 56e rang; il est au premier depuis le 3 juillet quasiment tous les jours, indiquent les données du registre internet asiatique APNIC.
Des procureurs californiens ont mis en garde Starlink en juillet 2024 contre le fait que des malfaiteurs utilisaient son système, mais n'ont reçu aucune réponse. Des responsables politiques thaïlandais et américains ont exprimé leur inquiétude. La puissante Commission économique conjointe du Congrès américain a dit à l'AFP avoir ouvert fin juillet une enquête sur le rôle joué par Starlink dans le fonctionnement de ces centres.
SpaceX, propriétaire de Starlink, n'a pas répondu aux demandes de réaction de l'AFP.
"Qu'une entreprise américaine permette une chose pareille est odieux", dénonce Erin West, ancienne procureure américaine spécialisée dans la cybercriminalité qui a démissionné l'an dernier pour se consacrer pleinement à la lutte contre les réseaux.
Les Américains sont parmi les principales victimes, selon le département du Trésor. Ils auraient perdu 10 milliards de dollars l'an dernier, 66% de plus que l'année précédente.
Les bandits ont recommencé à construire les centres à un rythme "à couper le souffle", observe Erin West.
Histoire de casting
La zone proche de Myawaddy paraît héberger 27 centres de cyber-arnaque disséminés le long des méandres de la rivière Moei, qui marque la frontière avec la Thaïlande.
Les immeubles y poussent comme des champignons. KK Park s'est agrandi d'une nouvelle section. Le poste de contrôle à l'entrée principale s'est considérablement développé. Au moins cinq nouveaux points de passage sur la rivière ont apparu.
L'un de ces passages dessert Shwe Kokko, que le Trésor américain qualifie de "plaque tournante notoire des escroqueries aux investissements en monnaie virtuelle, sous la protection de l'Armée nationale karen", une milice alliée à la junte birmane.
Les zones frontalières entre la Birmanie, la Thaïlande, la Chine et le Laos, connues sous le nom de Triangle d'Or, sont de longue date un foyer de production d'opium et d'amphétamines, de trafic de drogue, de contrebande, de jeux clandestins et de blanchiment.
La corruption et le désordre causé par la guerre civile en Birmanie ont permis aux organisations criminelles d'étendre leurs activités.
La fraude en Asie du Sud-Est a fait perdre à ses victimes 37 milliards de dollars en 2023, selon un rapport publié l'année dernière par l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime.
Nombre des personnes extraites des centres en février disent y avoir été emmenées contre leur gré en transitant par la Thaïlande et y avoir été forcées à travailler et battues.
D'autres ont déclaré avoir été attirées par la promesse d'emplois bien payés. D'autres encore sont venues de leur plein gré, disent des experts.
Pékin a fait pression sur les autorités birmanes et thaïlandaises pour qu'elles sévissent après l'émoi public suscité par le sort de l'acteur Wang Xing. Celui-ci a raconté avoir été enlevé à l'aéroport de Bangkok où il s'était rendu en vue d'un prétendu casting et avoir été emmené dans un centre de cyber-arnaque birman.
La justice chinoise a récemment prononcé 11 condamnations fermes à la peine de mort à l'encontre de membres présumés d'un gang se livrant à la cyberfraude de l'autre côté de la frontière avec la Birmanie et responsable de la mort d'au moins 14 personnes, dont une dizaine qui cherchaient à s'enfuir d'un complexe d'arnaque.
Supplier à genoux
Des mois d'enquête dessinent un monde impitoyable peuplé d'individus insaisissables prêts à vendre des êtres ou à négocier leur libération, pour peu que le prix soit le bon, sous l'égide de milices aux intérêts communs ou concurrents.
Sun, dont l'AFP préserve l'identité pour sa sécurité, fait partie des milliers de Chinois engloutis par ce gouffre. Ce jeune villageois à la voix douce venu des montagnes du Yunnan relate comment lui et d'autres étaient régulièrement battus à coups de matraque électrique et de fouet s'ils faiblissaient à la tâche ou désobéissaient aux ordres.
"Presque tous ceux qui étaient dedans ont été battus à un moment ou à un autre, soit pour avoir refusé de travailler, soit pour avoir tenté de sortir", rapporte-t-il. Mais, vu la hauteur des clôtures et la présence de miradors et de gardes armés, "il n'y avait aucun moyen de partir" avant l'épilogue de février, pour lui et 5.400 autres Chinois.
Les journalistes de l'AFP lui ont parlé au moment de sa sortie du centre, puis au téléphone, puis encore à son retour dans son village isolé.
Ses ennuis ont commencé en juin 2024 quand il a quitté son village pauvre situé à une centaine de kilomètres de la Birmanie, se rappelle-t-il. Il avait déjà un enfant et la famille en attendait un autre. Le jeune homme de 25 ans avait entendu dire qu'il était possible de gagner de l'argent en vendant des produits chinois en ligne via la Thaïlande. "On m'a dit que c'était très rentable."
Le voyage a viré au cauchemar à Mae Sot, ville frontalière thaïlandaise. Sun raconte y avoir été enlevé et transféré, par la rivière Moei, à Myawaddy vers ses centres d'escroquerie. Il se souvient avoir été "terrifié". "Je n'arrêtais pas de les supplier à genoux de me laisser partir."
A Myawaddy, il a été emmené dans un camp de miliciens. Il y a été vendu pour 650.000 bahts thaïlandais (20.000 dollars) à un centre de cyberfraude, la première d'une série de transactions analogues. On lui a ordonné de faire des exercices de frappe pour accélérer sa vitesse d'écriture. Mais Sun est atteint d'une déformation du doigt qui le ralentissait et attirait les foudres de ses supérieurs.
Filatures
Son handicap lui a valu d'être confiné à des tâches subalternes et revendu de centre en centre, jusqu'au dernier, d'où il a réellement envoyé des messages à des gogos aux États-Unis, raconte-t-il.
Une fois les victimes ferrées, il passait la main à des fraudeurs plus aguerris chargés de parachever l'ouvrage.
Les centres fournissent à leurs petites mains des mémentos pour remplir leur tâche. Un texte de 26 pages suggère au fraudeur d'adopter le personnage d'Abby, une Japonaise de 35 ans en mal d'amour, pour séduire l'interlocuteur en ligne. "Je sens que nous sommes faits l'un pour l'autre", peut dire Abby à son correspondant.
C'est une industrie entourée d'une grande opacité, que les relations complexes de la Chine et de la Thaïlande avec le régime militaire birman et divers groupes, rebelles ou non, n'aident pas à dissiper. Beaucoup de ces groupes se livrent à l'exploitation minière et forestière et à la production de drogue.
Les gangs emploient dans ces centres une main-d'œuvre quasiment réduite à l'esclavage aussi bien que des programmeurs qualifiés grassement payés, décrit David Scott Mathieson, grand connaisseur de la Birmanie, un ancien de Human Rights Watch.
Les autorités chinoises traitent les personnes comme Sun comme des "suspects". L'AFP a confirmé les principaux aspects de son récit en consultant plusieurs experts. Mais d'autres éléments ont été plus difficiles à corroborer. Les autorités thaïlandaises n'ont pas fourni d'informations.
En Chine, les journalistes de l'AFP ont été suivis par plusieurs voitures banalisées alors qu'ils allaient voir Sun dans son village, à trois heures de la ville la plus proche, Lincang. Quelques minutes après le début de l'entretien, un groupe de fonctionnaires est arrivé pour, ont-ils expliqué, l'emmener "vérifier" qu'il allait bien. À son retour une demi-heure plus tard, il a refusé de s'exprimer davantage.
Les semaines précédant son extraction du centre, Sun se demandait s'il arriverait à échapper un jour aux violences, aux menaces et aux corvées. "Je pensais à la possibilité (de mourir...) presque tous les jours", confie-t-il.
L'AFP a obtenu la copie d'un "contrat de travail" interdisant au personnel d'un centre de chatter ou de quitter son poste, et autorisant l'encadrement à "former" ceux qui enfreignent les règles.
Le désespoir des proches
La Chine met en garde ses citoyens depuis des années contre la cyberfraude, qu'il s'agisse des arnaques en ligne ou des offres d'emploi crapuleuses.
Mais un flux constant de Chinois disparaît encore. Leurs proches se lancent désespérément à leur recherche, s'exposant eux-mêmes à de sombres agissements.
Fang, originaire du Gansu, dans le nord-ouest de la Chine, raconte que son frère de 22 ans, en décrochage scolaire, s'est volatilisé en février dans le Yunnan, à la frontière birmane.
Son frère avait probablement des soucis financiers et s'est rendu à Xishuangbanna, près de la frontière du Triangle d'Or, pour s'adonner au trafic d'or et de montres, pense-t-elle.
Elle est à présent convaincue qu'il a été attiré là-bas et forcé de passer en Birmanie. Les relevés téléphoniques le localisent pour la dernière fois dans la région de Wa, bastion du groupe ethnique le plus important et le mieux armé de Birmanie.
Comme d'autres membres de sa famille, elle se sent impuissante malgré ses appels à l'aide aux autorités chinoises. "C'est le petit dernier de la famille", explique-t-elle. "Ma grand-mère, atteinte d'un cancer en phase terminale, pleure tous les jours à la maison."
Fang dit avoir rejoint sur la messagerie chinoise WeChat plusieurs groupes de personnes à la recherche de proches disparus près de la frontière avec la Birmanie. Elle a été approchée par des "sauveteurs" auto-proclamés lui proposant leurs services.
L'AFP a contacté plus d'une douzaine de ces personnages faisant la promotion de leurs activités sur les plateformes Xiaohongshu et Kuaishou. Beaucoup semblaient avoir eux-mêmes travaillé dans les centres de cyberfraude et se prévalaient de leurs liens avec des trafiquants.
Ils ont assuré pouvoir actionner des relais dans les centres ou parmi les "têtes de serpent", des passeurs de mèche avec les centres.
La plupart ont évoqué le paiement de rançons équivalant à des dizaines de milliers de dollars, en fonction du centre où se trouverait la personne disparue et d'éventuelles dettes qu'elle aurait auprès du gang.
Soudain sauvetage
Certains de ces "sauveteurs" ont affirmé ne pas prendre d'argent pour eux-mêmes. D'autres au contraire ont exposé clairement la part leur revenant et celle revenant à des intermédiaires.
L'un d'eux, se présentant sous le nom de Li Chao, dit gagner des milliers de yuans par mois (1 yuan = 0,12 euro) en organisant des sauvetages au Cambodge – autre plaque tournante pour la fraude et le blanchiment – en repérant les camps et en escamotant les fugitifs en voiture de location. C'est un travail rémunérateur, mais "il y a aussi des risques pour moi", déclare-t-il.
Ling Li, chercheuse sur l'esclavage moderne aux commandes d'une ONG de lutte contre la traite des êtres humains, s'émeut que des gens comme Li Chao lui "compliquent" la tâche.
Son organisation aide les familles à rechercher des travailleurs en Birmanie et au Cambodge en contactant la police et en négociant des rançons.
De nombreux "sauveteurs" sont eux-mêmes des escrocs ou facturent des sommes faramineuses pour des extractions qui, souvent, ne se concrétisent jamais, déclare-t-elle. "Les familles peuvent facilement se faire rouler par des opportunistes."
Certains proches ont versé des milliers de yuans pour rien, abonde Fang. Les sauveteurs "prétendent avoir des relations, en réalité il ne s'agit que d'une arnaque de plus", tranche-t-elle.
Sun a été extrait le 12 février. Il réparait des téléphones ce matin-là quand un groupe d'hommes armés est arrivé et les a entassés, lui et des dizaines d'autres, dans des pickups qui les ont les conduits vers un camp de miliciens. Quelques heures après, il était dans un bateau pour la Thaïlande.
"Jamais je n'aurais imaginé être sauvé aussi soudainement", dit-il. Dix jours plus tard, on l'a embarqué dans un avion à destination de Nanjing, en Chine, encadré par des policiers.
"État ennemi"
Sun fait partie des milliers de personnes arrêtées lors de l'opération conjointe de février entre la Chine, la Thaïlande et deux anciens groupes rebelles karens à présent alliés à l'armée birmane parmi les différentes milices opérant autour de Myawaddy.
Les fraudeurs sévissent dans un "environnement très permissif, avec l'autorisation des milices birmanes affiliées à la junte", commente un récent rapport du groupe de réflexion Australian Strategic Policy Institute, en partie financé par le ministère de la Défense australien.
Si de violents combats opposent souvent des groupes rivaux près des centres, ces derniers n'auraient jamais été touchés, note le rapport. Personne ne veut mettre en péril les "profits bruts générés par l'industrie de l'escroquerie", ajoute-t-il.
Pékin assure que son action témoigne de son engagement "résolu" à enrayer cette calamité. Mais Nathan Ruser, auteur du rapport de l'Australian Strategic Policy Institute, et d'autres experts, affirment que des opérations comme celle de février ne font que perturber temporairement les réseaux criminels.
"Tant que la junte militaire de Rangoun favorisera et alimentera cette industrie, je pense que cela restera un jeu du chat et de la souris", estime Nathan Ruser. De nouveaux centres "surgiront ailleurs", prédit-il.
Sun insiste sur le fait qu'il a été forcé de travailler dans les centres et n'a jamais escroqué personne. Traumatisé, épuisé et toujours en liberté sous caution, il trouve le "fardeau mental" de son calvaire difficile à supporter.
Pékin n'a pas précisé comment il comptait traiter ceux qui ont travaillé dans les centres. Des experts font valoir que nombre d'entre eux minimisent leur implication pour échapper à la sanction.
La société chinoise éprouve peu de compassion pour eux, quoi qu'ils aient fait, selon la chercheuse Ling Li. "On vous jugera pour votre cupidité et votre stupidité", résume-t-elle.
Mais les gouvernements ont fait preuve d'une "négligence insensée" face à la gravité du problème, accuse l'experte Erin West. "On nous vole la valeur d'une génération de richesse", dénonce-t-elle. "Je ne sais pas comment nous allons y mettre fin. C'est devenu bien trop grand, comme un État ennemi".
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Il n'avait pas été entendu depuis samedi, lorsque le contingent militaire a décidé de ne plus obéir aux ordres. Le président malgache, Andry Rajoelina, a écarté lundi soir toute démission en appelant à "respecter la Constitution", dans sa première prise de parole depuis un lieu inconnu. "Un discours sans surprise", estime la correspondante de France 24 à Madagascar, Gaëlle Borgia. "Il n'a fait aucune allusion à sa présumée exfiltration par la France."