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07.03.2025 à 17:54

« Besoin de monde pour demain matin, 5h. Je ne peux pas refuser » : la grande précarité des travailleurs intérimaires

Nadim Fevrier

La précarité des travailleurs intérimaires est une réalité. Emplois à courte durée, faibles stabilité et visibilité, stigmatisation dans les entreprises… Elle est l’un des symptômes du capitalisme dans lequel la productivité est un enjeu majeur pour assurer la compétitivité et la croissance des entreprises au profit du capital et non des travailleurs. De plus en plus utilisé, le recours aux services des travailleurs temporaires dans les grandes sociétés, notamment dans le secteur industriel, ne fait que participer à l’accroissement des dividendes plutôt qu’à la pérennisation des effectifs salariaux.

Quelques chiffres : 40 % des travailleurs temporaires gagnent moins de 1063 euros par mois contre 11 % des CDI (INSEE). En 2024 (source DARES), 715 500 personnes étaient en contrat intérimaire en France, soit 2.5 % des travailleurs contre 569 314 en 2004 et 520 024 en 2014. Notre article.

La réalité de la précarité

40 % des travailleurs temporaires gagnent moins de 1063 euros par mois contre 11 % des CDI (INSEE) ¼ des salariés en contrat court n’a plus d’emploi dans les trois mois. Précarité, de quoi parle-t-on ? D’emplois de courte durée, d’un manque de stabilité et de visibilité, des périodes sans emploi plus récurrents (5 mois/an sans emploi en moyenne), d’une stigmatisation dans les entreprises, moins d’accès à la formation, manque de missions, moins d’accès aux droits sociaux, car peu syndiqués de la part la précarité de leur statut…

En 1992, le Fonds d’Action Sociale du Travail Temporaire est mis en place. Cette association à but non lucratif se consacre à l’amélioration des conditions de vie des salariés intérimaires (logement, santé, prévention, mobilité, budget, famille, social), afin de pallier différents freins de retour à l’emploi des travailleurs temporaires en cas de difficultés soudaines.

Dans la pratique, il est assez difficile de mobiliser les aides surtout dans les territoires ruraux : « nous avons effectué une demande de mise à disposition d’un véhicule pour un de nos intérimaires qui était en panne, mais l’agence de location partenaire était à 70km du lieu de résidence, la personne ne pouvait pas se déplacer », souligne Ophélie, chargée de recrutement dans la Somme, « pour une demande d’aide pour un logement, il faut un nombre d’heures minimum qui est souvent difficile de cumuler pour une majorité des personnes chez nous ».

En 2024, le FASTT a mobilisé 38.1 millions d’euros d’aides financées par les accords de branches avec les agences de travail temporaire (gérées par les différents partenaires sociaux). Le problème de difficultés liées à la précarité est bien réel. Néanmoins, il devrait relever d’une solution étatique et non associative.

LFI se pose en défenseurs des personnes précaires. Favoriser l’embauche en CDI classique et empêcher les employeurs d’utiliser le CDII comme un moyen de précariser encore plus les travailleurs, voilà l’un des objectifs des insoumis concernant l’emploi. Cela passerait notamment pour le renforcement des droits des intérimaires, l’imposition d’un vrai salaire minimum garanti entre les missions, la limitation de l’usage des contrats précaires et l’encadrement strictement la sous-traitance.

Concernant l’entreprise ?

« Un de nos clients, une grande enseigne de logistique, compte environ 120 intérimaires pour un effectif total de 150 salariés, les intérimaires sont en poste pour de la longue durée si tout se passe bien, nous ne comprenons pas l’intérêt de ne pas embaucher » explique Ophélie.

Tout d’abord, l’entreprise n’a pas à supporter les coûts liés à l’embauche d’un CDI et peut parfois bénéficier, en plus, d’avantages fiscaux. Elle peut, sous certaines conditions, bénéficier de certains allègements des charges sociales de façon à diminuer le coût de la main d’œuvre. Cependant, le coût d’un travailleur intérimaire pour une entreprise est plus élevé qu’un salarié en CDI. En effet, plusieurs éléments de facturation sont à prendre en compte : le salaire brut de l’intérimaire, les charges sociales, les différentes indemnités (précarité, congés payés) et aussi le taux de facturation appliqué par l’agence d’intérim. Alors comment expliquer ce choix ?

D’abord, la gestion du recrutement : dans le cadre de l’utilisation de contrats intérimaires, l’entreprise utilisatrice n’a pas à gérer le volet recrutement (sourcing, entretiens…) mais aussi les formalités administratives (contrat de travail, accueil sécurité, mutuelle…) supportées par l’agence d’intérim. C’est un gain de temps essentiel pour l’entreprise, donc un gain d’argent.

Ensuite, la flexibilité : En effet, faire appel à des travailleurs intérimaires permet aux entreprises de réagir rapidement en cas de fluctuation d’activités (surcroit de commandes, absences…). À la fois pour pallier un besoin, mais aussi pour diminuer l’effectif total de la société en cas de baisse d’activité de façon très rapide : « ce client ne fait que des contrats à la semaine, ce qui est déjà bien, d’autres font des contrats à la journée… ».

Alors que 6,1 % des salariés vivent sous le seuil de pauvreté, les plus grosses entreprises françaises ont distribué un montant jamais vu de dividendes estimés à 98.2 milliards d’euros en 2024. Le secteur industriel représente 39 % de l’emploi en intérim, suivi par la construction et le transport/logistique. Ces 3 secteurs représentent approximativement 80 % du marché de l’intérim. D’après l’INSEE, l’intérim génère un chiffre d’affaires d’environ 29 milliards d’euros en 2020, soit 10 % du chiffre d’affaires de l’ensemble des services aux entreprises.

Pour aller plus loin : Des patrons du CAC 40 gagnent 1 453 fois plus que leurs salariés, Macron complice

Il semble évident que le recours à ces salariés précaires est essentiellement exercé par les grandes entreprises et non par les TPM/PME. Compte tenu des records indécents des dividendes versés, pourquoi faudrait encore maintenir nombre de travailleurs dans la précarité pour gaver des actionnaires ?

« Réveil à 3h30, heureusement j’habite à proximité. Le plus dur ce matin, c’est de lever mes filles à 4h15 » – La précarité au jour le jour, la veille pour le lendemain (témoignage)

« Il est 17h45, mon agence me contacte, besoin de monde pour demain matin 5h pour du conditionnement. Je ne peux pas vraiment refuser, mais j’espère que ce sera pour au moins quelques jours…. Bon, 17h45, je peux peut-être encore contacter le périscolaire pour la cantine de ma plus grande et je vais voir la nounou pour la deuxième (elle n’a que 18 mois, ce n’est pas évident). Je prépare tout ce petit monde à mon absence de demain…

Réveil à 3h30, heureusement, j’habite à proximité. Le plus dur ce matin, c’est de lever mes filles à 4h15 pour les déposer chez nounou…

4h40 : J’arrive le cœur lourd et la gorge serrée sur ce parking. Je ne suis jamais venue ici, mais les mamans de l’école connaissent bien, je pense que tout le monde y est passé comme on dit. Pas très bonne réputation, mais je verrais bien.

4h 50 : Je suis la foule, et rentre. Une « marraine » nous prend en charge. Elle nous emmène dans les vestiaires où les casiers ne sont pas suffisamment nombreux. Ils sont donc réservés pour les embauchés. Je croise les doigts pour retrouver mon portable, mon sac, mes affaires une fois mon poste terminé. Elle nous montre l’endroit pour badger, mais s’interrompt : un composant est manquant dans les livraisons de ce matin. Elle attend les directives. Nous, on ne dit trop rien. On est une vingtaine à attendre.

5h30 : le verdict tombe : l’entreprise n’a pas le nécessaire pour nous mettre en poste, nous devons repartir. « Non non ne badgez pas, ce n’est pas nécessaire puisque vous rentrez… » Sur le coup, nous, on ne percute pas, on doit repartir rapidement, on ne peut pas stagner ici « pour des raisons de sécurité… »

5h45 : je remonte dans ma voiture et pense à mes filles… si j’avais su.

8h30 : J’appelle mon agence d’intérim. Personne n’est encore au courant. Elles auront surement un mail dans la matinée. Mais, au fait, mon déplacement est payé ? Et le temps passé là-bas ? « Non, voyons, vous n’avez même pas badgé »…

Par Madeleine Rosier

Crédits photo : « Manifestation du 5 décembre 2019 (pour la défense des retraites) », Jeanne Menjoulet, Wikimedia Commons, CC BY 2.0, pas de modifications apportées.

07.03.2025 à 17:38

Plus de 150 manifestations partout en France ce samedi 8 mars pour la journée internationale des droits des femmes

Linsoumission

Il y a un an, la journée du 8 mars se tenait dans un contexte historique. Le droit à l’IVG était enfin inscrit dans le marbre constitutionnel grâce au combat mené par la France insoumise, de Mélenchon à la Bastille en 2012 à Panot au Congrès en 2024, aux côtés des collectifs et des associations féministes. Un an plus tard, si des victoires sont à saluer, les menaces contre les droits des femmes se sont amplifiées sous le coup de l’internationale fasciste.

L’extrême droite s’approprie les luttes féministes pour y injecter ses biais racistes, colonialistes et LGBTphobes. Ce samedi, le collectif raciste Némésis a ainsi prévu d’être dans la rue pour saboter les manifestations progressistes à coup de slogans xénophobes. Les ripostes féministes s’organisent contre les offensives réactionnaires qui veulent piétiner les droits des femmes, à l’instar des députés RN comparant l’avortement à la Shoah et aux crimes de Daesh.

Le 8 mars est une date clé dans la riposte féministe. « Nous sommes les partisans du féminisme populaire. Être féministe, c’est lutter pour l’égalité des droits au sens large. Et nous le disons d’autant plus fortement dans un contexte mondial où l’extrême droite s’organise pour attaquer les droits des femmes », a déclaré Mathilde Panot cette semaine en conférence de presse en appelant à manifester massivement ce samedi. Plus de 150 manifestations sont prévues partout en France. Retrouvez la carte dans nos colonnes !

Plus de 150 manifestations partout en France ce samedi 8 mars pour la journée internationale des droits des femmes

Retrouvez tous les lieux de manifestations du 8 mars sur la page dédiée à la grève féministe https://lafranceinsoumise.fr/2025/02/21/8-mars-2025-greve-feministe/

Et pour finir, notre carrousel de l’édition 2024.

07.03.2025 à 17:28

Jean-Michel Aphatie suspendu de RTL pour avoir rappelé l’Histoire : les médias bourgeois s’agenouillent devant l’extrême droite

Nadim Fevrier

Mardi 25 février, sur le plateau de la radio RTL, le journaliste Jean-Michel Aphatie comparait les massacres de la colonisation française en Algérie aux crimes de l’armée nazie. Pour avoir rappelé des faits historiques confirmés par tous les historiens spécialistes du sujet, il est depuis la victime d’une nouvelle cabale de la droite et de l’extrême droite pour qui la colonisation a d’abord été une « bénédiction » pour l’Algérie. Pire encore, RTL a préféré donner raison à la meute fasciste plutôt qu’à l’Histoire, et a suspendu Jean-Michel Apathie. Il devrait a priori être de retour à l’antenne la semaine prochaine. Un épisode malheureusement symptomatique de l’influence de l’extrême droite sur les médias dominants.

Il n’y a qu’à voir pour s’en convaincre les évictions de Guillaume Meurice, Merwane Benlazar, que la mise en retrait forcée de Charline Vanhoenecker et de Waly Dia du service public après des cabales racistes et réactionnaires de la droite, de l’extrême droite et de l’extrême centre, alors que sur les antennes de Bolloré et de RMC, on peut tranquillement être condamné pour incitation à la haine raciale et appeler au nettoyage ethnique des Palestiniens sans être inquiété. Notre article.

Aphatie a rappelé la réalité de la violence raciale de la France en Algérie

« Chaque année, nous commémorons le massacre d’Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais nous en avons fait des centaines en Algérie. Est-ce qu’on en a conscience ? ». Ici, Jean-Michel Apathie ne fait que rappeler des faits. Débutée en 1830, la conquête et la colonisation de l’Algérie par la France s’est caractérisée par des massacres et crimes coloniaux de masse, l’armée française violant, torturant, décapitant, rasant des villages entiers. Des centaines de milliers d’Algériens sont morts, sans doute plus d’un million. Une conquête d’une violence raciale inouïe.

Immédiatement, incapable d’envisager l’horreur de la colonisation française, l’animateur Thomas Sotto reprend : “Mais on n’a pas fait Ouradour-sur-Glane en Algérie”, puis interroge son interlocuteur : “On s’est comportés comme des nazis en Algérie ?”. 

Jean-Michel Aphatie se doit alors de lui rappeler la pratique des « enfumades » qui consistait pour l’armée coloniale française à allumer des feux à l’entrée des grottes où se réfugiaient les populations civiles algériennes afin de les y étouffer ou de les y brûler vives. Une pratique déjà dénoncée au Parlement et dans les journaux français de l’époque, et dont l’État s’est vanté pendant de longues années. 

Une pratique aujourd’hui largement attestée par les historiens dont nombreux sont depuis venus soutenir les propos de Jean-Michel Aphatie. Une pratique qui, consistant à étouffer des centaines de personnes dans des lieux clos à l’aide de gaz, est malheureusement comparable aux méthodes nazies, et à propos de laquelle Jean-Michel Aphatie a donc eu raison de répondre à Thomas Sotto : « Combien de villages ont été massacrés ? Combien de femmes, combien d’enfants ? Les nazis n’existaient pas. On ne s’est pas comportés comme des nazis. Les nazis se sont comportés comme nous, nous l’avons fait en Algérie. »

Une fois encore, une cabale de la droite et de l’extrême droite fait plier un média

Dans la foulée de son intervention où il a, répétons-le encore s’il le faut, rappelé une stricte vérité historique, Jean-Michel Aphatie a vu s’abattre sur lui une intense cabale de la droite et de l’extrême droite, incapables de reconnaître l’existence de crimes lorsqu’ils sont commis contre des populations non-blanches.

Ainsi sur les plateaux de Bolloré, du Figaro, sur RMC et sur tous ceux des médias dominants, voilà que la droite et l’extrême droite se mobilisent pour contester la réalité historique des propos de Jean-Michel Aphatie, pour l’insulter, en profitant au passage pour louer les bienfaits de la colonisation française en Algérie. Face à la pression, l’ARCOM (régulateur de l’audiovisuel français) a annoncé ouvrir une instruction. Pire encore, RTL a annoncé ce 5 mars suspendre son journaliste, la direction considérant ses propos comme “inappropriés”. Son retour serait prévu la semaine prochaine, le mal reste fait.

Pour aller plus loin : Campagnes médiatico-politiques contre Rima Hassan et Aly Diouara : jusqu’au sommet de l’État, le racisme débridé des élites bourgeoises

Jean-Michel Aphatie est donc sanctionné pour avoir rappelé des faits historiques qui ne plaisent pas au révisionnisme de l’extrême droite et d’une partie de la droite, et parce que son groupe (comme la totalité des médias dominants) est aujourd’hui trop poreux à leurs influences. 

Il n’y a qu’à voir pour s’en convaincre que le groupe M6 (qui possède RTL) a annoncé dans la même semaine sanctionner Jean-Michel Aphatie pour avoir dénoncé les crimes de la colonisation française, et accueillir à partir de septembre Cyril Hanouna, laquais en chef de Bolloré et de l’extrême droite dont l’émission a été sanctionnée à des dizaines de reprises par l’ARCOM.

Il n’y a qu’à voir pour s’en convaincre les évictions de Guillaume Meurice, Merwane Benlazar, que la mise en retrait forcée de Charline Vanhoenecker et de Waly Dia du service public après des cabales racistes et réactionnaires de la droite, de l’extrême droite et de l’extrême centre, alors que sur les antennes de Bolloré et de RMC, on peut tranquillement être condamné pour incitation à la haine raciale et appeler au nettoyage ethnique des Palestiniens sans être inquiété.

Pour aller plus loin : Appel au meurtre contre des insoumis, cabale médiatique raciste contre R.Hassan et A. Diouara, baroud de déshonneur anti-IVG sur C8 – La revue de presse de l’Insoumission

Ce nouvel épisode est symptomatique de l’influence qu’exercent aujourd’hui l’extrême droite et ses idées sur le système médiatique qui commence déjà à préparer son arrivée au pouvoir. Préférant donner raison au fascisme qui rampe plutôt qu’à l’Histoire, les médias dominants se compromettent en même temps qu’ils compromettent la liberté d’expression et l’avenir du pays. 

https://x.com/JLMelenchon/status/1897626965982544068

Par Eliot Martello-Hillmeyer

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