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02.09.2025 à 13:18

Webinaire GIJN Afrique : enquêter sur les régimes révolutionnaires et/ou militaires

Maxime Domegni
Dans ce webinaire gratuit, GIJN réunira quatre journalistes africains expérimentés pour discuter des astuces pour obtenir des informations dans des régimes répressifs et des dictatures militaires du continent.

Texte intégral 811 mots

L’Afrique se trouve à un tournant en matière de gouvernance. Depuis août 2020, le continent a connu sept coups d’État ou prises de pouvoir militaires au Niger, au Burkina Faso, au Soudan, en Guinée, au Mali, au Tchad et au Gabon, suscitant des inquiétudes quant à une résurgence des régimes militaires à travers l’Afrique.

En outre, les présidents de pays comme l’Ouganda, le Rwanda et l’Érythrée, autrefois présentés comme « une nouvelle génération de dirigeants africains », se maintiennent au pouvoir depuis trois décennies ou plus. Et les dirigeants de démocraties naissantes comme la Tanzanie, le Bénin, le Kenya, l’Éthiopie et le Mozambique deviennent de plus en plus autocratiques et remettent en cause les consensus politiques acquis par le passé. Il est donc primordial que les journalistes d’investigation s’intéressent davantage aux régimes révolutionnaires et/ou militaires sur le continent.

GIJN est donc heureux d’organiser ce webinaire destiné à fournir aux journalistes d’investigation africains des conseils, des outils et des ressources pour examiner de près les actions politiques des gouvernements militarisés du continent, qui réduisent souvent l’espace dont disposent les médias pour remplir leur rôle de redevabilité.

Dans ce seminaire en ligne, gratuit pour tous les journalistes d’Afrique et d’ailleurs, GIJN réunira quatre journalistes africains expérimentés pour discuter de comment obtenir des informations dans des régimes répressifs; suivre les outils utilisés par ces régimes pour asservir leur population; vérifier les faits et de démystifier la désinformation et la propagande; et d’enquêter sur les alliés stratégiques et géopolitiques qui contribuent à maintenir les autocrates au pouvoir malgré l’opposition des citoyens.

Intervenants :

  • Justin Yarga est un journaliste d’investigation indépendant originaire du Burkina Faso, actuellement basé en Suède. Yarga a vu son pays natal, autrefois un sanctuaire de la liberté d’expression en Afrique de l’Ouest, devenir l’un des pires contrevenants. Il enquête désormais sur les régimes militaires à travers le Sahel et leurs campagnes de propagande, et a co-réalisé avec Al Jazeera l’enquête « Africa’s Ghost Reporters« .
  • Khadija Sharife est une journaliste d’investigation chevronnée et membre du conseil d’administration du GIJN. Elle a enquêté sur les régimes militarisés dans plusieurs pays africains et a rédigé un chapitre du guide de GIJN sur les enquêtes relatives au trafic d’armes.
  • Samuel Baker Byansi est le cofondateur de M28 Investigates / Unité M28, un média à but non lucratif qui mène des enquêtes, notamment à l’aide de méthodes d’infiltration et d’outils de open source, afin de dénoncer les violations des droits humains. Il a participé à l’enquête Forbidden Stories sur le gouvernement rwandais et vit actuellement en exil.
  • David Dembele est journaliste d’investigation originaire du Mali et actuellement en exil en raison de ses reportages critiques sur le régime militaire de son pays natal.

La modératrice est Busola Ajibola, directrice adjointe, responsable du programme de journalisme, au Centre pour l’innovation et le développement du journalisme (CJID).

Inscrivez-vous au webinaire ici !

Date : mardi 16 septembre 2025

Heure :

13h00 (Dakar, Bamako, Abidjan, Lomé, Ouagadougou)

14h00 (Cotonou, Niamey, Douala, Kinshasa, Tunis)

15h00 (Goma, Kigali, Bujumbura)

16h00 (Djibouti, Moroni, Port Louis, Antananarivo)

Consultez notre fil Twitter @gijnAfrique et notre newsletter mensuelle en français pour plus de détails sur les événements à venir.

27.08.2025 à 17:38

Fiche-conseils pour les journalistes : Comment obtenir gratuitement des images satellites

Rowan Philp
Évaluation de l'ampleur des destructions à Gaza, identification de charniers en Ukraine... L'importance des images satellites n'est plus à démontrer. Mais les freelances et les rédactions manquant de ressources croient souvent ne pas avoir les moyens d'y avoir accès. Or, de nombreuses images satellites de qualité sont bel et bien disponibles comme le détaille cet article. 

Texte intégral 6607 mots

Les images satellites sont désormais d’importance capitale pour un grand nombre d’enquêtes. Elles ont notamment permis de mettre au jour la destruction d’habitations à Gaza, des charniers dans les régions ukrainiennes contrôlées par la Russie, ou encore le lien entre la déforestation provoquée par les entreprises en Amazonie et d’importants incendies de forêt.

On associe ce genre d’outils aux grands médias, qui disposent de ressources importantes. L’accès à ces images – ainsi que la liste croissante de fournisseurs d’images et d’options d’analyse avancée – peut intimider les nouveaux venus, en particulier dans les pays du Sud.

Selon les experts, de nombreuses rédactions manquant de ressources ont l’impression que ces images sont soumises à des contrats d’exclusivité ou nécessitent des compétences avancées en matière de données et de recherche. Nombreux sont ceux qui craignent également que les fournisseurs d’imagerie satellite s’opposent forcément aux demandes d’accès gratuit aux données qui émaneraient d’organes de presse qu’ils ne connaissent pas.

La réalité est toute autre. Malgré certaines restrictions, de nombreuses images de qualité sont bel et bien disponibles.

GIJN a interrogé deux journalistes de premier plan qui ont travaillé auparavant pour des fournisseurs privés d’imagerie satellitaire : Laura Kurtzberg, enseignante en visualisation de données à l’Université internationale de Floride et ancienne ingénieure en applications chez Descartes Labs, et Daniel Wolfe, journaliste graphique au Washington Post et ancien ingénieur en visualisation de données chez Planet Labs.

Selon ces journalistes :

  • Dans la plupart des cas, il n’est probablement pas nécessaire de contacter qui que ce soit, ni de débourser de l’argent, pour obtenir des images satellites à moyenne résolution de l’endroit dont vous avez besoin pour votre enquête, et à une date plus ou moins pertinente.
  • Dans le cas d’enquêtes importantes nécessitant une image originale, les sociétés de satellites sont, du moins en principe, ouvertes à de telles demandes – et les journalistes des pays du Sud ont de meilleures chances de réussir, les demandes pour de telles missions commerciales étant moins fréquentes pour les satellites survolant l’hémisphère sud.
  • À moins que vous ne procédiez à une analyse géospatiale plus poussée, vous n’avez pas besoin de données ou de compétences informatiques particulières pour trouver ou télécharger des images satellites, ni même pour éliminer la couverture nuageuse ou créer des intervalles de temps personnalisés.
  • Les équipes de marketing des sociétés privées de satellites partagent fréquemment des images à très haute résolution d’événements internationaux majeurs, tels que des tremblements de terre ou des inondations, avec les journalistes inscrits sur leurs listes de presse, sans qu’ils aient à en faire la demande – parfois complémentée d’une analyse d’expert.
  • Certaines sociétés privées ont conclu des accords d’embargo ou de première utilisation avec certains médias sur des sujets donnés. Ces sociétés restent toutefois ouvertes à des demandes émanant de rédactions inconnues – et sont souvent ravies d’aider les journalistes issus de pays où leurs images n’ont encore jamais été diffusées.
  • Plusieurs bases d’images permettent de parcourir les images existantes, parmi lesquels des portails publics comme NASA WorldView et des bibliothèques privées comme Planet Explorer. Les journalistes peuvent également explorer les dizaines d’options d’accès, d’analyse et de combinaison de sources avancées proposées dans les guides en ligne, tels que le « Guide pour trouver et utiliser des images satellites » de GIJN. Cependant, pour les nouveaux venus, les experts affirment que deux outils en sources ouvertes particulièrement faciles d’emploi – Google Earth Pro et l’application de plus en plus puissante Sentinel Hub EO Browser – suffiront à presque tous vos besoins en images satellites.

« Je pense que, pour le journaliste moyen, Google Earth et EO Browser sont les seuls outils dont vous avez réellement besoin pour obtenir des images satellites gratuites », avance Laura Kurtzberg. « Investir du temps pour s’entraîner et apprendre à utiliser ces deux outils permet donc de couvrir la plupart des besoins. N’hésitez pas à vérifier si ces bases de données contiennent des images très récentes : elles pourraient contenir une image sans couverture nuageuse du lieu qui vous intéresse au cours des deux derniers jours ».

Et d’ajouter : « Cela dit, si vous ne trouvez pas l’image dont vous avez besoin via ces deux outils, il serait bon de connaitre quelqu’un qui travaille pour une société privée d’imagerie ».

Choisir des outils d’imagerie satellitaire gratuits et faciles d’emploi

Un article publié par GIJN en 2019 et traitant du Centre INK pour le journalisme d’investigation, organisation à but non lucratif au Botswana, a permis de souligner l’importance d’un accès gratuit à ce genre de données. Le cofondateur d’INK, Joel Konopo, y a révélé que des journalistes du média ont réduit leurs salaires pourtant déjà modestes afin de réunir les fonds nécessaires pour acheter une seule image satellite privée, dans le but de vérifier les informations de leur enquête sur la maison de campagne du président de l’époque.

Cette image de DigitalGlobe, via la société sud-africaine Swift Geospatial Solutions, montre des aménagements importants dans le domaine privé d’un ancien président du Botswana. Une enquête menée en 2019 par l’organisation à but non lucratif INK, au Botswana, a révélé que des deniers publics ont financé ce développement immobilier.

Selon Laura Kurtzberg, l’image de ce domaine est un exemple type de données qu’aucune rédaction ne devrait aujourd’hui avoir à acheter, ni même demander. En effet, INK n’avait pas besoin d’une image datant d’un jour en particulier, et le domaine contient de grands bâtiments faciles à identifier même avec les images que fournirait un satellite à résolution moyenne et en libre accès, tel que le Sentinel-2 de l’Agence spatiale européenne.

Selon Daniel Wolfe, les nouveaux utilisateurs devraient commencer par évaluer les besoins de leur enquête : la date et la résolution de l’image sont-elles des priorités ?

« En général, votre rédacteur en chef veut l’image parfaite : une image nette ou récente, voire les deux en même temps », explique-t-il. « Imaginons que vous vous penchez sur des stades financés par le gouvernement chinois en Afrique, et que vous voulez savoir où en sont les travaux. Vous aurez fait un grand pas en avant si vous savez quelle période de temps vous intéresse, et quelle doit être la netteté de l’image. Une plaine inondable n’a pas besoin d’être en haute résolution. S’il s’agit d’une image pour montrer la topographie du lieu avant l’évènement qui vous préoccupe – afin de publier un avant / après – l’image peut être tout à fait claire puisque vous n’avez pas à utiliser une image datant d’un jour en particulier ».

Il ajoute : « Les choses se compliquent lorsqu’il s’agit d’un événement très récent. Mais il est souvent possible d’obtenir gratuitement des images suffisamment proches de la période qui vous intéresse.

Les satellites publics que Daniel Wolfe consulte en priorité sont LandSat de la NASA, dont la résolution est faible ou moyenne – « la résolution est à l’échelle d’une ville » – et Sentinel-2, qui a une résolution moyenne d’environ 10 mètres par pixel. Mais il ajoute que les nouveaux venus n’ont probablement pas à s’inquiéter du choix de la source satellitaire, car les outils en sources ouvertes font le travail à leur place : Google Earth présélectionne la meilleure image disponible à partir d’un mélange de satellites, EO Browser choisit par défaut l’excellent service Sentinel-2, et dispose également de LandSat et d’autres bases d’images dans sa bibliothèque que vous pouvez sélectionner d’un simple clic.

« Si vous créez un compte gratuit sur NASA WorldView, vous bénéficiez d’un accès à tous les flux de données de la NASA et utiliser cette base de données aussi simplement que Google Maps », explique-t-il. Le bouton « Add layer » (« Ajouter une couche ») permet de rechercher une catastrophe qui vous intéresse. Vous pouvez également rechercher les données brutes et utiliser des éléments tels que la fonction « Fire and Thermal Anomalies » (« Anomalies thermiques et d’incendie ») pour corroborer des informations sur les incendies ou les explosions.

La fonction « Fire and Thermal Anomalies » de l’outil Worldview de la NASA montre les principaux incendies qui se produisent chaque jour. Image : Capture d’écran, NASA

Daniel Wolfe explique : « Les journalistes n’ont pas forcément besoin d’utiliser toutes les fonctions disponibles. Pour les débutants, je recommanderais Sentinel Hub. »

Outre la facilité d’usage de son tableau de bord EO Browser, l’un des principaux avantages du programme Sentinel Hub, selon lui, est la fréquence des prises de vue par Sentinel-2 : les mêmes lieux sont pris en photo tous les cinq ou six jours.

« Les satellites sont espacés de telle sorte que, jour après jour, chaque région est survolée, plus ou moins, et les images sont prises à peu près au même moment de la journée, pour des raisons d’ombres comparables, etc. »

En résumé, il faut d’abord apprendre à utiliser les interfaces « pointer-cliquer » de Google Earth et d’EO Browser, qui sont excellentes. Quand on n’a pas l’habitude, un outil comme EO Browser n’est pas si facile à manier, surtout quand on a des délais à tenir », explique Laura Kurtzberg.

(Les journalistes ayant des compétences informatiques avancées peuvent approfondir les données de Sentinel Hub grâce à cette collection de codes Javascript et de scripts personnalisés).

Selon Carl Churchill, infographiste au sein du Wall Street Journal, le satellite GOES, exploité par la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis, est une source gratuite utile qui ne figure pas dans EO Browser. « Il s’agit d’un satellite géostationnaire qui prend une photo géante de l’ensemble de l’hémisphère occidental toutes les 10 minutes », explique-t-il. Outre les options de téléchargement facile et gratuit de ce satellite via NASA Worldview, Carl Churchill recommande de consulter l’excellente plateforme brésilienne DSAT.

Conseils pour l’utilisation d’outils satellitaires open source

  • Essayez les fonctions de pointer-cliquer, de zoom et de défilement du temps sur Google Earth Pro pour orienter votre enquête et pour consulter et télécharger des images d’objets de grande taille. L’an dernier, le Financial Times a utilisé Google Earth pour montrer que les autorités chinoises avaient modifié ou supprimé des éléments architecturaux de style arabe sur 74 % des mosquées d’un échantillon de 2 323 mosquées en Chine, entre 2018 et 2023. « Si vous avez simplement besoin de prouver que quelque chose existe, et non qu’un évènement ait eu lieu à une date précise, Google Earth est un excellent choix », explique Laura Kurtzberg. « Vous pouvez saisir des coordonnées géographiques si vous le souhaitez, mais la plupart des journalistes se contentent de grossir l’image, comme sur Google Maps. Assurez-vous de télécharger et d’utiliser la version de bureau, et non le navigateur ».
  • Gagnez du temps dans la recherche d’images utilisables grâce à la remarquable fonction de nuage d’EO Browser. Si vous cliquez sur « Advanced search » (« Recherche avancée ») sous la case Sentinel-2 dans le menu principal de l’outil, vous trouverez un curseur « Max cloud coverage » (« Couverture nuageuse maximale »). Si vous cliquez, par exemple, sur les trois quarts du curseur, toutes les images de la période de temps sélectionnée présentant une couverture nuageuse supérieure à 25 % seront automatiquement exclues. Il vous suffit ensuite de sélectionner l’image non obstruée que vous souhaitez, ou d’en sélectionner plusieurs, de les télécharger et d’utiliser l’attribution indiquée pour créditer le fournisseur.

Réglé ici à 80 %, le curseur « Couverture nuageuse maximale » d’EO Browser n’affiche que les images de l’aéroport international Murtala Muhammed de Lagos dont la couverture nuageuse est inférieure à 20 %. Image : Capture d’écran, Sentinel Hub EO Browser

  • Entraînez-vous à utiliser des outils open source en recherchant votre propre domicile et en recherchant des images avant et après des changements survenus dans les environs. « La pratique est vraiment utile dans ce domaine », note Daniel Wolfe. « Observez les changements qui se sont produits dans votre quartier. Par exemple, dans mon cas, je pourrais observer la façon dont notre service des eaux s’occupe des conduites d’eau dans mon quartier ».
  • Comparez les dates clés, ou les fourchettes de dates, de votre enquête avec le calendrier numérique d’EO Browser. Le calendrier met automatiquement en évidence les dates exactes – souvent une ou deux fois par semaine – auxquelles les images satellites ont été prises pour le lieu recherché.

Le calendrier intelligent de Sentinel Hub révèle les dates auxquelles les images d’un lieu ont été prises et sélectionnées. Image : Capture d’écran, EO Browser

  • Planifiez les images qui seront probablement prises au cours de la semaine à venir grâce aux prévisions météorologiques. Sentinel Hub comprend une fonction « Clear sky confidence » (« probabilité d’un ciel clair ») qui indique les conditions météorologiques attendues pour les jours où les satellites prendront la prochaine image d’un lieu que vous avez sélectionné.
  • Expérimentez les fonctions de distance et d’étiquetage d’EO Browser. Contrairement à d’autres plateformes, cet outil vous permet de mesurer facilement des distances et des surfaces en mètres, plutôt qu’en degrés de la surface de la Terre, grâce au bouton « ruler » (« règle ») situé dans le menu de droite. Vous pouvez vous orienter, ou orienter votre public, en cliquant sur « labels » (« étiquettes ») ou « roads » (« routes ») dans l’onglet situé dans le coin supérieur droit, ce qui permet d’afficher des noms de villes et de lieux sur votre image. Vous pouvez également marquer des points à l’aide de l’onglet « Pin » (« épingle ») situé en dessous.

L’outil « règle » d’EO Browser, montrant ici la distance (1 700 mètres) entre les pistes de l’aéroport Murtala Muhammed de Lagos, au Nigeria. Image : Capture d’écran, EO Browser

⇒ Assurez-vous d’avoir créé un compte gratuit sur EO Browser.

⇒ Tapez le nom ou les coordonnées de la zone dans la barre de recherche et lancez la recherche.

⇒ Cliquez sur « Visualiser » sur une vignette dans le menu principal pour voir l’image et affiner les limites de temps.

⇒ Faites défiler jusqu’à l’icône montrant une bobine de film puis cliquez sur « Create timelapse », et sélectionnez les dates de début et de fin.

⇒ Désélectionnez les vignettes où les nuages bloquent la vue. Conseil : veillez à ne pas confondre nuages et fumée sur ces petites images, et à ne pas désélectionner par erreur des images de feux de forêt ou de conflits.

⇒ Choisissez le nombre d’images par seconde à l’aide de l’icône « SPEED » située en bas de l’écran. « Vous pouvez contrôler la vitesse à laquelle défilent les images, et vous pouvez faire durer la dernière image pour que votre lecteur se concentre vraiment dessus », explique Daniel Wolfe. « Vous pouvez ensuite exporter la vidéo au format MPEG. »

⇒ Prévisualisez en cliquant sur « Play » et téléchargez la vidéo.

Comment traiter avec les fournisseurs commerciaux

Toutefois, si votre enquête nécessite une image prise à un moment précis ou une vue claire d’un objet de la taille d’un véhicule, vous aurez besoin d’une image à haute résolution, précis jusqu’à un mètre ou moins. Outre les satellites militaires, ces images ne sont recueillies que par des fournisseurs commerciaux tels que Planet Labs, Maxar Technologies, Airbus Earth Observation et BlackSky. Ces fournisseurs peuvent également aider les clients à trouver des images plus anciennes à une date et à une heure données, et à donner aux satellites des objectifs de prise de vue pour des projets futurs.

« Si vous devez vérifier que la voiture du président se trouvait à tel endroit à telle heure, alors, oui, vous devrez peut-être contacter un attaché de presse d’une entreprise privée », explique Daniel Wolfe. « Ces entreprises disposent d’équipes de marketing dont le travail consiste, en partie, à anticiper et à créer des images avant même que les journalistes ne les demandent. Ainsi, s’il s’agit d’un événement comme le tremblement de terre de Taïwan, nous n’avons pas besoin de les solliciter, car ils nous envoient déjà ce matériel par courrier électronique si nous figurons sur leur liste de journalistes.

Daniel Wolfe souligne que le personnel chargé du marketing et de la presse dans les entreprises de satellites a tendance à être ouvert aux demandes d’images gratuites de la part des médias et anticipe souvent les besoins de la presse.

« Les attachés de presse de ces entreprises souhaitent généralement fournir ces données aux journalistes, parce qu’ils savent que les entreprises seront alors citées dans la presse », explique-t-il. « N’oubliez pas qu’un grand nombre de personnes travaillant pour ces fournisseurs se sont lancées dans ce secteur parce qu’elles croient en leur mission, à savoir qu’il ne s’agit pas de surveillance, mais que ces données sont utiles au monde entier lorsqu’elles sont entre de bonnes mains. Lorsque je travaillais chez Planet, il arrivait que des gens nous écrivent : « Nous effectuons une mission de sauvetage, l’avion de notre ami s’est écrasé dans cette forêt, pouvez-vous nous envoyer des images de la zone ? Je peux vous dire que nous laissions tout tomber pour leur venir en aide. L’importance et la nécessité font toute la différence ».

Les rédactions de petite taille doivent absolument rentrer en contact avec ces entreprises.

Daniel Wolfe se souvient : « Quand je recevais des demandes émanant de petits médias, je ne me suis jamais dit : Ils ne sont pas le New York Times, je ne vais donc pas me pencher sur la question. Du point de vue du service de presse, il est facile de télécharger l’image et de l’envoyer par courrier électronique. »

Ces fournisseurs éprouvent une grande fierté à soutenir les enquêtes de presse, comme le révèle cette page du site web de Maxar. Quant à Planet, l’entreprise déclare : « Chaque jour, nos données donnent vie à l’actualité et à des enquêtes dans des endroits isolés et souvent dangereux. »

En outre, le WeatherDesk de Maxar a fourni des cartes de données associées à des conflits, comme cette carte montrant un net déficit dans la plantation de cultures, en rouge, en 2022, par rapport à la période d’avant-guerre. Image : Capture d’écran, Maxar

Laura Kurtzberg souligne que, d’après son expérience de la filière de l’imagerie satellite, il existe une légère tension entre l’envie des responsables du marketing d’aider à la rédaction d’articles et le désir de leurs supérieurs d’y trouver un avantage pour la marque de l’entreprise.

C’est pourquoi elle conseille aux journalistes des rédactions moins connues de décrire brièvement, dans les demandes qu’elles envoient par courrier électronique, la taille de leur lectorat, leur importance relative dans le paysage médiatique, leur indépendance journalistique et les prix qu’elles ont reçu.

Lorsque je travaillais pour une société d’imagerie satellitaire et que j’entendais parler d’un journaliste qui voulait utiliser nos images, je me disais toujours « Super ! Allons-y ! Mais la direction me répondait ensuite : « D’accord, mais que va-t-on en tirer ? » », se souvient-elle. C’est pourquoi il est utile de préciser [au fournisseur d’images satellites] : « Nous avons tant de lecteurs » si vous en avez beaucoup, ou « Nos articles sont repris par de nombreux médias », ou « Nous avons tel impact dans notre pays ». S’il s’agit d’une demande détaillée et que vous dites que vous êtes le média le plus populaire ou le plus primé dans tel petit pays, vous avez plus de chance que l’entreprise vous vienne en aide.

Conseils pour obtenir des images satellites commerciales gratuites

  • Rejoignez les listes de presse et les groupes qui reçoivent des lettres d’information. Planet encourage les journalistes à « s’inscrire sur [sa] liste de presse pour recevoir les dernières mises à jour ou à envoyer un courriel à press@planet.com pour toute demande. »
  • Établissez une relation de confiance avec les principaux attachés de presse avant de demander d’accéder gratuitement à des images sensibles ou prises à une date précise. Les responsables peuvent être contactés à des adresses telles que media@maxar.com et images@planet.com. Selon Daniel Wolfe, les principaux attachés de presse dans ce domaine sont Stephen A. Wood chez Maxar, Anne Pellegrino chez Planet et Colleen Frerichs chez ICEYE. Vous trouverez les courriels des services de presse de ces entreprises en effectuant une simple recherche sur Google. Envoyez-leur un message expliquant ce que vous faites et qui sont vos lecteurs. Précisez qu’un jour vous aurez peut-être besoin de collaborer avec leur service pour un article important, et demandez la procédure à suivre pour obtenir des images en haute résolution », explique Laura Kurtzberg. « Il faut s’y prendre à l’avance, car si vous essayez de faire ce travail de fond en contactant le service pour la première fois pour une nouvelle de dernière minute, vous risquez d’arriver trop tard. »

Conseil pour les médias de petite taille : Accompagnez votre première prise de contact d’une demande d’image simple et non urgente, en précisant les coordonnées géographiques, pour illustrer un article sur lequel vous travaillez réellement et qui ne nécessite pas de photo à une date précise. Une fois publié, envoyez à votre contact une copie de l’article avec l’image fournie, accompagnée d’un message de remerciement.

  • Même si l’attribution souhaitée par l’entreprise est clairement indiquée dans les communiqués de presse relatifs aux images, veillez à vérifier le choix des mots. Incluez dans toute demande initiale une ligne du type : « Quelle formulation exacte souhaitez-vous que nous utilisions pour créditer votre entreprise quand nous publions les images que vous nous fournissez ? » Ce type de question montre à l’entreprise que vous êtes conscient de ses besoins en matière d’attribution, explique Laura Kurtzberg.
  • Ne « partez pas à la pêche » avec des demandes trop générales. Donnez aux attachés de presse les éléments dont ils ont besoin pour travailler. Si vous envoyez un courriel disant « Je suis très intéressé par l’exploitation minière illégale dans la région X, qu’est-ce que vous avez ? », ils ne vous répondront pas », prévient Daniel Wolfe. En revanche, si vous dites : « Selon nos informations, les résidus miniers (déchets des opérations minières) semblent se déverser dans telle rivière. Pouvez-vous vérifier les conditions autour de cette mine ? » Dans ce cas, ils pourront peut-être vous aider.                                                                                                            Il ajoute : « Si vous ne connaissez que la zone générale, mais qu’il y a quelque chose qu’ils peuvent rechercher dans un délai donné, cela peut être suffisant. Si vous dites : « Nous avons entendu parler de violences dans cette zone générale la semaine dernière – nous ne savons pas exactement où mais il y a probablement des traces de feu à cet endroit », les entreprises peuvent effectuer les recherches qui conviennent, car vous aurez fourni suffisamment d’éléments.
  • Dans la mesure du possible, utilisez des coordonnées GPS dans votre demande, plutôt que des noms de lieux ou des points de repère. « Les coordonnées sont préférables », confirme Daniel Wolfe. « Si vous avez une latitude et une longitude, donnez-les. Astuce : Trouvez les coordonnées en cliquant avec le bouton droit de la souris au-dessus de l’endroit que vous visez sur Google Maps.

En outre, le WeatherDesk de Maxar a fourni des cartes de données associées à des conflits, comme cette carte montrant un net déficit dans la plantation de cultures, en rouge, en 2022, par rapport à la période d’avant-guerre. Image : Capture d’écran, Maxar

  • Soyez précis sur les aspects techniques de ce dont vous avez besoin – et de ce dont vous n’avez pas particulièrement besoin – dans la recherche d’images. Si l’image n’a pas besoin d’être parfaitement nette, dites-le. « Ce qui intéresse ces entreprises, c’est l’emplacement exact, la date voulue et la qualité d’image dont vous avez besoin », ajoute-t-il. « Donnez-leur donc une fourchette de résolution acceptable pour votre reportage ».
  • Demander qu’un satellite prenne une image cruciale, sans préciser une date. « Il s’agit de demander au satellite à haute résolution de se déplacer pour prendre une photo d’une zone en particulier », explique Daniel Wolfe. « Les médias des pays du Sud sont avantagés dans ce cas de figure, car dans l’hémisphère nord, de nombreuses entreprises paient pour obtenir des images pour des raisons commerciales ou concurrentielles. En revanche, dans l’hémisphère sud, ces demandes sont bien moins fréquentes, ce qui fait qu’il y a beaucoup de créneaux à prendre, pour parler vite ». Il ajoute : « Si vous disposez d’informations indiquant qu’une personne sur qui vous enquêtez possède, par exemple, une piste d’atterrissage privée dans son jardin, dans une zone difficile d’accès et instable, vous pouvez indiquer les coordonnées géographiques, par exemple à Planet, et ajouter : « Je cherche à confirmer l’existence de cette piste pour un article important, et je remarque que vous ne semblez pas disposer de données à haute résolution de cet endroit. Pourriez-vous demander à un satellite de prendre une image du lieu ? – Peu importe quel jour, nous voulons simplement vérifier l’existence de la piste. » Ils pourraient vous répondre : « Bien sûr, donnez-nous une semaine ou deux ». »
  • Si vous faites partie d’une organisation à but non lucratif importante ou d’un collectif éducatif qui a fait ses preuves en matière de bienfaits pour la communauté, envisagez de négocier un accord d’accès libre et gratuit à des images en haute résolution pour vos membres. Laura Kurtzberg indique qu’elle connaît au moins un centre de journalisme à but non lucratif de qualité qui a obtenu un accès gratuit aux images pour tous ses étudiants en journalisme auprès d’un grand fournisseur privé d’imagerie satellite.
  • Précisez que vous souhaitez des fichiers « spatiaux » dans votre demande si vous créez une carte. Selon Carl Churchill du Wall Street Journal, il est important de préciser le format de fichier dont vous avez besoin – comme les fichiers « spatiaux » pour les cartes – lorsque vous communiquez avec les attachés de presse. « Par exemple, Maxar ne fournit souvent que d’énormes dossiers de JPEG, ce qui est très bien, mais si vous voulez, disons, les ajouter à QGIS et les incorporer dans une carte, vous ne pouvez pas le faire », explique Carl Churchill. « Le format JPEG ne contient pas les informations dont QGIS a besoin pour géoréférencer. Cependant, Planet offre généralement cette possibilité par défaut. Le format de fichier est important. N’oubliez pas que ‘geoTIFF’ est un format spatial.
  • Demander de l’aide pour analyser les données fournies. « Il peut être plus difficile de contacter les personnes chargées de l’analyse, car on sait rarement qui elles sont », explique Daniel Wolfe. « Dans le cas de Gaza, un ou deux chercheurs peuvent se consacrer à une analyse puis, par exemple, l’envoyer sous embargo au New York Times, qui la publiera en premier, après quoi n’importe quel autre média pourra utiliser ces données. Il ajoute : « S’il s’agit d’une société comme Planet, qui se targue d’analyser les images, vous pouvez lui demander si l’analyse d’une image particulière est quelque chose qu’elle peut partager avec vous. S’il s’agit d’un attaché de presse avisé, il vous répondra peut-être : « Oh, vous vous intéressez à l’agriculture ? Vous savez, nous pouvons aussi vous dire quelle proportion de cette zone a été touchée par X, si vous le souhaitez ». Pour l’analyse, Planet peut mettre les journalistes en relation avec un réseau d’experts tiers géré par l’entreprise.

« Essayez de tenir compte de leurs contraintes de temps, comme vous le feriez avec n’importe quelle source », conclut Daniel Wolfe. « Écrivez donc : Voici ce que nous faisons, cette enquête est importante, voici comment nous avons l’intention d’utiliser l’image, avez-vous des images de cet endroit à telle heure ? »

« L’utilisation actuelle de l’imagerie satellite dans le cadre du journalisme d’investigation n’est que la partie émergée de l’iceberg », déclare Andrew Lehren, directeur du journalisme d’investigation à l’école de journalisme CUNY de New York. « Il s’agit d’une forme puissante de preuve qui est largement disponible gratuitement. Nous constatons l’intérêt de ces images pour la couverture des catastrophes naturelles, bien évidemment, mais il y a tellement d’autres reportages qui pourraient s’appuyer sur ces données. La construction et la pollution illicites et presque toutes les activités illégales à grande échelle qui se déroulent derrière une clôture peuvent désormais être observées. Il n’est même plus nécessaire d’avoir recours aux grandes entreprises privées : on peut le faire soi-même, depuis son ordinateur. »

Traduit de l’anglais par Olivier Holmey.


Rowan Philp est grand reporter au sein de la rédaction de GIJN, responsable de la stratégie d’impact. Il a été grand reporter au Sunday Times sud-africain. En tant que correspondant étranger, il a couvert l’actualité politique, économique et militaire d’une vingtaine de pays.

30.05.2025 à 15:52

Guide d’introduction au journalisme d’investigation

Maxime Domegni
Bien qu’il existe de nombreuses formations en ligne sur les techniques de recherche avancées, le Réseau international sur le journalisme d’investigation (GIJN) et le pilier de formation de l’iMEdD, Ideas Zone, ont constaté un besoin important de compétences de base en matière de journalisme d’investigation. C’est pourquoi nous avons élaboré ce guide – qui fait […]

Lire 411 mots

Bien qu’il existe de nombreuses formations en ligne sur les techniques de recherche avancées, le Réseau international sur le journalisme d’investigation (GIJN) et le pilier de formation de l’iMEdD, Ideas Zone, ont constaté un besoin important de compétences de base en matière de journalisme d’investigation.

C’est pourquoi nous avons élaboré ce guide – qui fait partie du programme « Introduction au journalisme d’investigation » mis en œuvre collaborativement en 2024 – et engagé quelques-uns des meilleurs journalistes d’investigation du monde entier pour le rédiger.

Les chapitres sont rédigés par : Jelena Cosic (ICIJ), Wahyu Dhyatmika (Tempo), Emilia Díaz-Struck (GIJN), Mariam Elba (ProPublica), Will Fitzgibbon (The Examination), Brant Houston (University of Illinois), Karol Ilagan (University of the Philippines), Purity Mukami (OCCRP), Miranda Patrucic (OCCRP), Runa Sandvik (Granitt), Hamadou Tidiane Sy (Ouestaf News), Shereen Youssef (BBC Verify), Marina Walker (Pulitzer Center), et Margot Williams (The Intercept).

Le guide a été édité par Nikolia Apostolou, Jabeen Bhatti, John Dyer, Martha Hamilton, Reed Richardson et Alexa van Sickle. Les chapitres ont été vérifiés par Jabeen Bhatti, Martha Hamilton et Katrina Janco.

Des conseils juridiques ont été fournis par le Cyrus R. Vance Center for International Justice.

Le projet n’aurait pas été possible sans l’aide et le soutien de GIJN et du personnel de l’iMEdD :

De GIJN :

Directrice du centre de ressources : Nikolia Apostolou; Directrice exécutive : Emilia Díaz-Struck; responsables régionaux et associés : Aïssatou Fofana, Maxime Domegni, Benon Oluka; assistance supplémentaire : Leonardo Peralta; Illustrations : Smaranda Tolosano

De l’iMEdD :

Cofondatrice et directrice générale : Anna-Kynthia Bousdoukou; responsable de l’Incubator and Ideas Zone: Dimitris Bounias; chefs de projet : Nikolas Aronis, Nota Vafea et Katerina Voutsina; directeur artistique : Evgenios Kalofolias

La version originale de ce guide est disponible en anglais et en grec.

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