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09.03.2025 à 11:41

Racisme et violences policières : les propositions de LFI pour une société de l’harmonie des être humains

Linsoumission

Racisme, violences policières. Dans sa nouvelle rubrique « Un autre monde », l’Insoumission entend porter attention aux propositions formulées par la France insoumise pour rompre avec la société capitaliste et se diriger vers une autre société.    

Le mardi 28 janvier 2025, les insoumis ont franchi une étape centrale dans la vie de leur mouvement et leur préparation des futures échéances électorales. Le programme actualisé « L’Avenir en Commun », édition 2025, a été présenté publiquement en conférence de presse au siège de la France insoumise. « L’affirmation d’un sérieux » a introduit Jean-Luc Mélenchon, rappelant le caractère unique du programme insoumis, « sans équivalent » dans le pays et validé par plus de 7 millions d’électeurs aux élections présidentielles. Un socle et une matrice puissants, capables d’unir des personnes de toutes convictions anticapitalistes.

Forte de l’expertise acquise par les élus et militants insoumis au cours des dernières années, la nouvelle mouture de « L’Avenir en Commun » contient aujourd’hui 831 mesures. Parmi elles, un vaste plan pour lutter contre le racisme et les violences policières, deux réalités profondément entremêlées. Refondation d’une police républicaine de proximité au service de la sûreté des citoyens, lutte pour une République universaliste contre le racisme et les discriminations, tells sont deux des ambitions directrices de  « L’Avenir en Commun » et de la France insoumise pour un pays faisant place à l’harmonie des êtres humains entre-eux.

L’actualité des campagnes médiatico-politiques racistes conduites contre les députés de la France insoumise Aly Diouara et Rima Hassan montre combien le racisme des élites bourgeoises se débride jusqu’au plus haut sommet de l’État. Des plateaux de Bolloré au gouvernement Darmanin-Retailleau, l’extrême droite est légitimée par le système dominant pour maintenir sa logique capitaliste. Au jour le jour, les violences policières et autres manquements au droit et à la déontologie des dépositaires de la violence d’État mettent plus que jamais en lumière les problèmes structurels de la police française. Dans le même temps, les actes et discours racistes se multiplient en même temps qu’ils se radicalisent.

L’Insoumission vous propose de revenir en détail sur quelques-unes des mesures clés de la France insoumise et de « L’Avenir en Commun » pour renverser ces situations. Notre article.

Cabales racistes contre Rima Hassan et Aly Diouara : la partie émergée de l’iceberg

« Tu vas faire quoi si je te taze ? ». Des plus hautes sphères de l’État jusqu’aux pieds des grands ensembles, le fond de l’air est brun. Les campagnes médiatico-politiques racistes lancées contre Rima Hassan et Aly Diouara en sont le signal.

Comme nous vous en parlions dans nos colonnes il y a quelques jours, Rima Hassan et Aly Diouara, eurodéputée européenne et député de la France insoumise, ont été victimes de campagnes politiques et médiatiques aux accents de persécution raciste. Du gouvernement au Rassemblement National, de la télévision publique au préfet de Paris, sur les radios et sur les plateaux de télévision, on menace de « tazer » des parlementaires et de les déchoir de leur nationalité.

Ainsi Rima Hassan, après une interview accordée à Jean-Jacques Bourdin le 27 février dernier, fait face à une énième cabale d’acharnement raciste appelant en particulier à sa déchéance de nationalité. Ainsi des diffamations et insultes de Bruno Retailleau, Marion Maréchal-Le Pen, de multiples représentants du Rassemblement National, du ministre François-Noël Buffet appelant lui-même à la déchéance de nationalité de Rima Hassan, et du socialiste Jérôme Guedj. Ainsi également des médias de Bolloré et du Service public qui inversent les séquences de l’interview de Rima Hassan pour lui faire dire l’exact inverse de ce qu’elle a effectivement dit, à savoir que le droit international et le respect des êtres humains doivent être les premières boussoles guidant l’analyse et l’action politique internationale, jusques et y compris lorsque cela concerne les massacres et la colonisation d’Israël en Palestine.

Pour aller plus loin : Campagnes médiatico-politiques contre Rima Hassan et Aly Diouara : jusqu’au sommet de l’État, le racisme débridé des élites bourgeoises

En parallèle de la cabale raciste menée contre Rima Hassan depuis le plus haut sommet de l’État, un autre insoumis, le député Aly Diouara, a été menacé par des policiers alors qu’il était témoin de contrôles de police affichant violences et absence de motif apparent. Témoin d’une fouille sans fondement légal, un contrôle au faciès, Aly Diouara a exercé sans interférence son droit d’observation en tant que député. Il a alors été pris à partie par les fonctionnaires de police impliqués, ceux-ci menaçant de faire usage de leur arme à impulsion électrique (Tazer) à son encontre.

Alors qu’Aly Diouara a dénoncé cette situation par communiqué, le préfet de Paris Laurent Nunez et le préfet de Seine-Saint-Denis ont rapidement apporté leur soutien aux policiers, affirmant sans aucune preuve qu’ils ont agi dans le respect du droit des règles de déontologie. Manquant à leur devoir de retenue et de réserve en dépit des vidéos prouvant le témoignage d’Aly Diouara, les réactions du préfet de police de Paris et du préfet de la Seine-Saint-Denis soulèvent des interrogations d’une extrême gravité. Il n’est pas acceptable qu’un préfet de police puisse, en quelques heures à peine, décréter close toute enquête relative à des faits graves dont se seraient rendus responsables des fonctionnaires de police. La haine raciste dont est victime chaque jour Aly Diouara, député de la Nation, a ainsi été relayée et entretenue par les plus hautes autorités administratives de l’État.

Ces deux cas récents ne constituent malheureusement que la partie émergée de l’iceberg, cachant derrières elles une réalité qui fait de la France un pays à plusieurs reprises condamné par des juridictions nationales et internationales pour des pratiques discriminatoires en matière de contrôle d’identité et d’usage excessif de la force par l’institution policière, un pays où la parole raciste se débride dans les médias et au gouvernement, entraînant et justifiant avec elle la multiplication et la radicalisation des actes racistes au quotidien.

La réalité du racisme et des violences policières en France : une situation qui bafoue le pacte républicain

Mosquée incendiée, attaque nazie en plein Paris, soutien public du ministre de l’Intérieur au policier responsable de la mort de Nahel dont le parquet de Nanterre requiert le procès pour meurtre, humoriste privé d’antenne pour le seul tort d’être d’origine arabe, racisme décomplexé des élites politique, soutien au projet génocidaire du gouvernement israélien. En France, le fond de l’air est brun. 

Il s’incarne dans la multiplication des actes et agressions racistes partout à travers le pays. Du pied des grands ensembles aux manifestations, des territoires ultramarins au huis clos des commissariats, il s’accompagne d’une institution et d’une doctrine policière opaques où les violences demeurent impunies.

Ainsi en France, après que les « faits délictueux à caractère raciste, antisémite et antimusulman aient doublé entre 2017 et 2020 », le nombre de crimes et délits  « à caractère raciste » enregistrés par la police et la gendarmerie nationales a augmenté de 32 % en 2023, une réalité largement sous-estimée et sous-déclarée. En 2024, à l’occasion de son 34ème rapport annuel sur le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme s’inquiète quant à elle d’un contexte « de défiance vis-à-vis de l’Autre et de la diffusion d’un discours haineux dans certaines sphères politiques et médiatiques où la figure de l’immigré est rendue responsable des maux de la société ». 

Lors de la recherche d’un emploi, les personnes ayant un nom à consonance arabe doivent envoyer plus de trois CV afin de décrocher un entretien, contre seulement deux pour une personne avec un nom à consonance hexagonale, alors que les personnes perçues comme non blanches ont une probabilité 5 fois plus élevée que les autres d’avoir connu une expérience de discrimination lors de leur recherche d’un toit.

Cette situation s’accompagne d’une institution policière opaque dont la doctrine de maintien de l’ordre et de relation quotidienne avec les citoyens se mêle aux discriminations et aux violences racistes. Outre les multiples révélations de propos et groupes de discussion privés où des policiers assument leurs convictions et comportements racistes, la Défenseure des droits rappelait en 2023 que les jeunes hommes perçus comme noirs ou arabes ont 20 fois plus de chance de se faire contrôler que les autres. En 2023 et 2024, la Défenseure des droits et la Cour des comptes soulignaient « un cadre légal insuffisamment protecteur face aux discriminations » concernant les contrôles d’identité, l’absence de traçabilité de ces contrôles et l’absence de contrôle effectif de l’autorité judiciaire. Fin 2023, le Conseil d’État reconnaissait la défaillance de l’État face à la pratique avérée des contrôles au faciès.

Au-delà d’une pratique largement discriminatoire des contrôles d’identité, l’action de la police française se caractérise largement par la violence et une prime à l’escalade, qu’elles se déploient dans les quartiers de banlieues urbaines, en manifestation, ou dans les territoires ultramarins. Structurellement, du fait de son organisation et de la doctrine autoritaire qui lui est insufflée par le pouvoir politique depuis des décennies, la police française est violente. Cela ne revient pas à dire que tous les policiers sont violents, mais que le fonctionnement et l’esprit même de l’institution policière poussent à une réalité de violence incontestable.

Ainsi en 2024, selon le collectif « Désarmons-Les », au moins 55 personnes ont été tuées lors d’interventions policières, total le plus élevé depuis 57 ans et la répression coloniale de soulèvements en Guadeloupe. Comme le rappelle encore le collectif, ces chiffres, notamment gonflés par la répression policière sanglante de l’État français en Kanaky depuis mai 2024, s’inscrivent dans les 272 morts tombés dans les mains de la police entre 2018 et 2024, et dont le nombre s’est envolé sous la présidence d’Emmanuel Macron. Ils s’ajoutent aux dizaines de décès en garde à vue pour lesquels la France est  l’un des pays où la situation est la plus alarmante d’Europe.

Pour aller plus loin : Violences policières : des policiers tabassent un homme en garde à vue, il appelle à l’aide avec son sang

En plus des morts, les témoignages et images de violences, d’humiliations, de propos racistes dans le huis clos des commissariats ou à la vue de tous en manifestation, sont devenus monnaie courante. En passant par les éborgnements et amputations des Gilets jaunes, la France a été à plusieurs reprises condamnée par des juridictions nationales et internationales pour des pratiques discriminatoires en matière de contrôle d’identité et d’usage excessif de la force par l’institution policière, dont la structure interne de déontologie et de contrôle pousse à l’omerta et à l’impunité.

La lutte contre le racisme et les violences policières, deux réalités en partie inextricables, doit être à l’avant garde de tout projet politique de progrès et d’harmonie entre les êtres humains. Pour ce faire, les propositions de la France insoumise et de « L’Avenir en Commun » sont nombreuses.

Refonder une police républicaine, promouvoir la désescalade et la responsabilité

La République a besoin d’une justice, mais également d’une police qui lui soit loyale, et qui soit attachée aux principes de l’État de droit. La police doit agir pour la protection des libertés individuelles et collectives. Elle doit s’employer à la proximité, à l’apaisement et à la désescalade. Pour être respectée, elle doit être respectable. Elle doit aussi être dotée des moyens lui permettant d’assurer sa mission, une dimension systématiquement mise sous le tapis par ses autoproclamés défenseurs de la droite et de l’extrême droite. D’une police de la sécurité, de l’escalade et du maintien de l’ordre, la France doit passer à une police de la sûreté, de la proximité et de la protection de la paix.

Une première étape, urgente, doit être de favoriser un maintien de l’ordre basé sur la désescalade. Ainsi les tasers, grenades de désencerclement, « lanceurs de balles de défense 40 » (Flash-Ball) doivent être interdits. Ainsi également des techniques d’immobilisation létales et de la la technique de la « nasse » (ou « encerclement ») en manifestation, sauf en cas de mise en danger pour les personnes. La loi Cazeneuve de 2017 sur le refus d’obtempérer, dite loi « permis de tuer », n’ayant produit que l’explosion du nombre de tirs à balles réelles, doit impérativement être abrogée.

Cette désescalade passera aussi par l’imposition réelle du port du numéro d’identification administrative obligatoire pour les policiers (numéro RIO, article R343-15 du Code de la sécurité intérieure, dont le Conseil d’État a réaffirmé le caractère obligatoire en 2023). Dans les faits – et comme c’était le cas des agents impliqués dans la menace du député Aly Diouara – cette règle n’est jamais respectée et accroît la défiance envers des agents de police, en même temps qu’elle favorise un sentiment de liberté totale.

Il est par ailleurs nécessaire que la police soit véritablement contrôlée pour être légitime et justifier son autorité. Ainsi, en ce qui concerne le contrôle interne de déontologie, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) et l’Inspection générale de la Gendarmerie nationale (IGGN) doivent être remplacées par une autorité indépendante incluant des magistrats, des universitaires, des citoyens, rattachée au Défenseur des droits et dotée d’une capacité de sanction disciplinaire sur les agents fautifs. La situation actuelle, où les agents sont contrôlés par leurs pairs, produit de l’omerta et de l’impunité. 

Le dépaysement des enquêtes judiciaires concernant des faits de violences policières doit devenir la norme, et le code de déontologie de la police de 1986, supprimé par Manuel Valls en 2014, doit être rétabli.

Pour lutter contre le contrôle au faciès, la France insoumise et son programme « L’Avenir en Commun » proposent la mise en place d’un récépissé de contrôle d’identité par les forces de l’ordre, accompagné de dispositifs de formation, de contrôle et de sanctions. À ce titre, la Défenseure des droits jugeait en 2024  « nécessaire » d’instaurer une traçabilité des contrôles ainsi que la mise en place d’un dispositif d’évaluation de leur pratique et de leur efficacité.

Une commission « Vérité et Justice » sur les violences policières ayant entraîné la mort ou la mutilation de citoyens sera créée afin d’établir toutes les responsabilités et de tenter de rétablir les injustices, et les moyens du Défenseur des droits, notamment chargé de contrôler la police et la gendarmerie nationale au titre de l’article 71-1 de la Constitution, seront renforcés.

Se donner les moyens d’une police de proximité au service des citoyens

En parallèle de l’apaisement urgent des relations entre la police et les citoyens par la promotion de la désescalade, de la justice et de la responsabilité, la boussole de la France insoumise et de son programme est celle du rétablissement d’une police de proximité au service des citoyens. Cette police du maintien de la paix plutôt que du maintien de l’ordre devra être dotée de tous les moyens nécessaires pour assurer sa mission, celle de la sûreté, principe figurant parmi les quatre « droits naturels et imprescriptibles de l’homme » énoncés à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et qui garantit, par-delà la notion de sécurité, de ne pas être poursuivi arbitrairement par la puissance publique.

La première marche de ce projet sera le démantèlement des BAC (brigades anticriminalité) et des BRAV-M (brigades de répression des actions violentes motorisées). La doctrine de harcèlement brutal des BAC n’a pas sa place dans une police de proximité et dessine en creux la nécessité de l’abandon de la politique du chiffre et des primes au résultat sur l’autel desquelles l’activité de ces brigades est devenue l’outil principal de la police pour fournir régulièrement des « bons » chiffres aux ministres successifs, harcelant la délinquance visible aux dépens des fonctions d’enquête.

Le rétablissement d’une police de proximité doit plus largement passer par la construction de nouveaux centres d’activités de police de proximité, par le développement des moyens humains pour le recueil de plainte et l’accompagnement des plaignants, par la revalorisation des fonctions d’accueils et la rénovation des commissariats dont l’état de délabrement témoigne souvent d’un service public abandonné par l’austérité et la politique du chiffre, lesquelles sont notamment à l’origine de risques psychosociaux pour les agents de gendarmerie et de police nationales qui se suicident en moyenne 2,5 fois plus que le reste de la population.  À ce titre, les moyens consacrés à la prévention des suicides dans la police et la gendarmerie doivent être doublés.

La formation des élèves gardiens de la paix dont le contenu doit être révisé et la durée portée à deux ans doit quant à elle intégrer un enseignement beaucoup plus poussé sur la prise en charge des violences sexistes et sexuelles, être tournée vers l’éthique et la qualité de vie des citoyens.

À terme, la France insoumise propose l’intégration des effectifs de police municipale à la nouvelle police de proximité après une formation de quelques mois, et leur répartition en fonction de la taille de la population et de ses besoins objectifs. Cette police de proximité doit par ailleurs se voir transférer la responsabilité de fonctions de sécurité aujourd’hui dévolues au privé, comme le gardiennage des services publics.

L’établissement d’une police de proximité et la reconnaissance de son rôle social permettra d’ancrer sa légitimité sur un territoire, d’accroître la qualité de ses services en améliorant la qualité de vie des citoyens, en diminuant leur méfiance vis-à-vis de la police, en valorisant les conditions d’exercice de la profession de policier. Les moyens et effectifs de police doivent par ailleurs être renforcés pour lutter efficacement contre les violences sexuelles, notamment celles faites aux enfants, contre la délinquance en col blanc, le trafic d’être humains, pour remonter les fillières de trafic de stupéfiants. Le doublement des effectifs de police technique et scientifique doit à ce titre être une priorité.

Aucune de ces propositions ne saurait enfin aller sans un vaste plan de prévention de la délinquance, complémentaire de l’action des policiers et gendarmes, ayant pour objectif premier de bloquer à la racine les parcours délinquants. L’action de la police ne peut pas se penser en dehors d’une refondation de l’École, de l’éradication de la misère et du chômage, de la réduction des inégalités socio-économiques, de l’accès égalitaire aux services publics ou d’une généralisation de la sécurité sociale. 

Un tel plan de prévention doit remplacer les multiples lois sécuritaires inefficaces et liberticides d’Emmanuel Macron qui doivent être abrogées, doit s’accompagner de la sortie de l’état d’urgence permanent et de l’interdiction dans la loi de tout usage ou expérimentation des technologies de reconnaissance faciale dans les espaces et établissements publics sur le territoire français.

Pour une République universaliste contre le racisme et les discriminations

L’universalité des droits n’est pas négociable en République : tous ceux qui adhèrent au programme « liberté, égalité, fraternité » sont français, citoyens, et donc égaux. C’est ce qui permet à la France d’être un pays créolisé, où chaque être humain s’enrichit dans sa relation aux autres. De ce principe en droit, il faut faire une réalité de fait. Face au fascisme qui vient, telle est l’ambition de la France insoumise et de « L’Avenir en Commun ».

À grande échelle, un plan d’action global contre les discriminations doit ainsi être déployé pour garantir l’effectivité du principe d’égalité. Il doit aller avec la création d’un Commissariat à l’égalité doté d’un Observatoire des discriminations et de pôles spécialisés au sein des services publics et des cours d’appel. Il doit inclure un plan interministériel d’analyse, de prévention et de lutte contre l’islamophobie et l’antisémitisme en France. Ce plan d’action global doit notamment être décliné dans les milieux du sport, de l’art et de la culture où les discriminations et violences racistes, entre autres, sont un fléau encore largement soumis à l’omerta.

Pour lutter contre les discriminations socio-économiques, la France insoumise propose également de généraliser les campagnes de testing et d’expérimenter les dossiers anonymes dans l’accès à l’emploi, au logement, aux études supérieures et autres droits sociaux fondamentaux. Dans ce cadre, des règles contre les biais discriminatoires des intelligences artificielles et des technologies médicales doivent être érigées.

Par ailleurs, alors que les assauts contre ce fondement de la République se multiplient y compris de la part du gouvernement, le droit du sol intégral doit être garanti à tous les enfants nés en France, être rétabli sur l’ensemble du territoire national, et l’acquisition de la nationalité française facilitée. Le droit de vote des étrangers aux élections locales doit être institué et la sécurité des lieux cultuels et culturels assurée, y compris par une protection policière.

Enfin, pour que soit reconnue la pluralité de notre histoire commune, un véritable plan de reconnaissance mémorielle doit être engagé. Ainsi la France insoumise et « L’Avenir en Commun » proposent d’instaurer le 4 février comme jour férié national en mémoire des victimes de l’esclavage et de leurs luttes, en plus d’un jour de commémoration spécifique à chaque territoire d’Outre-mer. Les archives sur les guerres de décolonisation doivent être ouvertes et les demandes de restitution et de circulation des biens culturels issus de la colonisation être véritablement considérées. Le massacre par la police française de manifestants algériens pacifiques le 17 octobre 1961 doit être reconnu comme un crime d’État au cours d’une journée nationale de commémoration.

Lutter contre le racisme implique aussi de lutter contre les émetteurs médiatiques qui le propagent. Sur ce sujet, nous vous invitons à consulter notre précédent article de la rubrique « Un autre Monde », consacré à la révolution citoyenne dans les médias.

Le fascisme progresse : ce 22 mars, l’heure est à la riposte populaire

Les cabales médiatico-politiques subies ces derniers jours par Rima Hassan et Aly Diouara et leur orchestration depuis le plus haut sommet de l’État et des autorités administratives ne sont malheureusement que le symptôme d’une réalité plus large.

Comme le soulève notamment Manuel Bompard, coordinateur national de la France insoumise, dans une note de blogue relayée dans nos colonne, la multiplications des actes racistes, la dédiabolisation de l’extrême droite, de ses représentants, de ses thèmes et de ses termes jusqu’au plus haut sommet de l’État laissent entrevoir « le fasicme au bout du chemin ».

Pour aller plus loin : « Du fascisme qui vient et du 22 mars » – L’analyse de Manuel Bompard

« Comment utiliser un autre terme lorsque des milices d’extrême droite défilent dans Paris en criant « Paris est nazi » après avoir poignardé deux militants antifascistes ? Comment ne pas le voir lorsque l’on appelle désormais à déchoir de sa nationalité une députée française au Parlement européen, parce qu’elle a rappelé que si le droit international reconnaît la légitimité d’un peuple à résister à une situation de domination, y compris par la force armée, il condamne le fait de s’attaquer à des civils ou de prendre des otages ? Comment ne pas le comprendre quand, au sein du corps policier, on se trouve désormais autorisé à menacer avec une arme un député de la République quand celui-ci fait son devoir en s’opposant à un contrôle policier abusif ? » ajoute Manuel Bompard.

Racisme et violences policières sont deux réalités en partie inextricables. Ils sont en toute hypothèse deux des composantes fondamentales d’un programme fasciste vers lequel les sociétés occidentales semblent tendre.

Alors que l’action et le fonctionnement de la police française doivent être refondés de la cave au grenier, la riposte populaire face au fascisme qui rampe s’organise. Aux côtés de plus de 300 organisations, la France insoumise appelle à manifester partout en France contre le racisme et le fascisme ce 22 mars.

Comme le note Manuel Bompard, « C’est la participation de toutes et tous qui permettra à cette journée de marquer le début de la riposte populaire. Le 22 mars, en nous déployant partout en France, nous riposterons à l’extrême droite et à tous ceux qui propagent ses idées, et nous affirmerons l’unité du peuple face au racisme. » 

Par Eliot Martello-Hillmeyer

07.03.2025 à 17:54

« Besoin de monde pour demain matin, 5h. Je ne peux pas refuser » : la grande précarité des travailleurs intérimaires

Nadim Fevrier

La précarité des travailleurs intérimaires est une réalité. Emplois à courte durée, faibles stabilité et visibilité, stigmatisation dans les entreprises… Elle est l’un des symptômes du capitalisme dans lequel la productivité est un enjeu majeur pour assurer la compétitivité et la croissance des entreprises au profit du capital et non des travailleurs. De plus en plus utilisé, le recours aux services des travailleurs temporaires dans les grandes sociétés, notamment dans le secteur industriel, ne fait que participer à l’accroissement des dividendes plutôt qu’à la pérennisation des effectifs salariaux.

Quelques chiffres : 40 % des travailleurs temporaires gagnent moins de 1063 euros par mois contre 11 % des CDI (INSEE). En 2024 (source DARES), 715 500 personnes étaient en contrat intérimaire en France, soit 2.5 % des travailleurs contre 569 314 en 2004 et 520 024 en 2014. Notre article.

La réalité de la précarité

40 % des travailleurs temporaires gagnent moins de 1063 euros par mois contre 11 % des CDI (INSEE) ¼ des salariés en contrat court n’a plus d’emploi dans les trois mois. Précarité, de quoi parle-t-on ? D’emplois de courte durée, d’un manque de stabilité et de visibilité, des périodes sans emploi plus récurrents (5 mois/an sans emploi en moyenne), d’une stigmatisation dans les entreprises, moins d’accès à la formation, manque de missions, moins d’accès aux droits sociaux, car peu syndiqués de la part la précarité de leur statut…

En 1992, le Fonds d’Action Sociale du Travail Temporaire est mis en place. Cette association à but non lucratif se consacre à l’amélioration des conditions de vie des salariés intérimaires (logement, santé, prévention, mobilité, budget, famille, social), afin de pallier différents freins de retour à l’emploi des travailleurs temporaires en cas de difficultés soudaines.

Dans la pratique, il est assez difficile de mobiliser les aides surtout dans les territoires ruraux : « nous avons effectué une demande de mise à disposition d’un véhicule pour un de nos intérimaires qui était en panne, mais l’agence de location partenaire était à 70km du lieu de résidence, la personne ne pouvait pas se déplacer », souligne Ophélie, chargée de recrutement dans la Somme, « pour une demande d’aide pour un logement, il faut un nombre d’heures minimum qui est souvent difficile de cumuler pour une majorité des personnes chez nous ».

En 2024, le FASTT a mobilisé 38.1 millions d’euros d’aides financées par les accords de branches avec les agences de travail temporaire (gérées par les différents partenaires sociaux). Le problème de difficultés liées à la précarité est bien réel. Néanmoins, il devrait relever d’une solution étatique et non associative.

LFI se pose en défenseurs des personnes précaires. Favoriser l’embauche en CDI classique et empêcher les employeurs d’utiliser le CDII comme un moyen de précariser encore plus les travailleurs, voilà l’un des objectifs des insoumis concernant l’emploi. Cela passerait notamment pour le renforcement des droits des intérimaires, l’imposition d’un vrai salaire minimum garanti entre les missions, la limitation de l’usage des contrats précaires et l’encadrement strictement la sous-traitance.

Concernant l’entreprise ?

« Un de nos clients, une grande enseigne de logistique, compte environ 120 intérimaires pour un effectif total de 150 salariés, les intérimaires sont en poste pour de la longue durée si tout se passe bien, nous ne comprenons pas l’intérêt de ne pas embaucher » explique Ophélie.

Tout d’abord, l’entreprise n’a pas à supporter les coûts liés à l’embauche d’un CDI et peut parfois bénéficier, en plus, d’avantages fiscaux. Elle peut, sous certaines conditions, bénéficier de certains allègements des charges sociales de façon à diminuer le coût de la main d’œuvre. Cependant, le coût d’un travailleur intérimaire pour une entreprise est plus élevé qu’un salarié en CDI. En effet, plusieurs éléments de facturation sont à prendre en compte : le salaire brut de l’intérimaire, les charges sociales, les différentes indemnités (précarité, congés payés) et aussi le taux de facturation appliqué par l’agence d’intérim. Alors comment expliquer ce choix ?

D’abord, la gestion du recrutement : dans le cadre de l’utilisation de contrats intérimaires, l’entreprise utilisatrice n’a pas à gérer le volet recrutement (sourcing, entretiens…) mais aussi les formalités administratives (contrat de travail, accueil sécurité, mutuelle…) supportées par l’agence d’intérim. C’est un gain de temps essentiel pour l’entreprise, donc un gain d’argent.

Ensuite, la flexibilité : En effet, faire appel à des travailleurs intérimaires permet aux entreprises de réagir rapidement en cas de fluctuation d’activités (surcroit de commandes, absences…). À la fois pour pallier un besoin, mais aussi pour diminuer l’effectif total de la société en cas de baisse d’activité de façon très rapide : « ce client ne fait que des contrats à la semaine, ce qui est déjà bien, d’autres font des contrats à la journée… ».

Alors que 6,1 % des salariés vivent sous le seuil de pauvreté, les plus grosses entreprises françaises ont distribué un montant jamais vu de dividendes estimés à 98.2 milliards d’euros en 2024. Le secteur industriel représente 39 % de l’emploi en intérim, suivi par la construction et le transport/logistique. Ces 3 secteurs représentent approximativement 80 % du marché de l’intérim. D’après l’INSEE, l’intérim génère un chiffre d’affaires d’environ 29 milliards d’euros en 2020, soit 10 % du chiffre d’affaires de l’ensemble des services aux entreprises.

Pour aller plus loin : Des patrons du CAC 40 gagnent 1 453 fois plus que leurs salariés, Macron complice

Il semble évident que le recours à ces salariés précaires est essentiellement exercé par les grandes entreprises et non par les TPM/PME. Compte tenu des records indécents des dividendes versés, pourquoi faudrait encore maintenir nombre de travailleurs dans la précarité pour gaver des actionnaires ?

« Réveil à 3h30, heureusement j’habite à proximité. Le plus dur ce matin, c’est de lever mes filles à 4h15 » – La précarité au jour le jour, la veille pour le lendemain (témoignage)

« Il est 17h45, mon agence me contacte, besoin de monde pour demain matin 5h pour du conditionnement. Je ne peux pas vraiment refuser, mais j’espère que ce sera pour au moins quelques jours…. Bon, 17h45, je peux peut-être encore contacter le périscolaire pour la cantine de ma plus grande et je vais voir la nounou pour la deuxième (elle n’a que 18 mois, ce n’est pas évident). Je prépare tout ce petit monde à mon absence de demain…

Réveil à 3h30, heureusement, j’habite à proximité. Le plus dur ce matin, c’est de lever mes filles à 4h15 pour les déposer chez nounou…

4h40 : J’arrive le cœur lourd et la gorge serrée sur ce parking. Je ne suis jamais venue ici, mais les mamans de l’école connaissent bien, je pense que tout le monde y est passé comme on dit. Pas très bonne réputation, mais je verrais bien.

4h 50 : Je suis la foule, et rentre. Une « marraine » nous prend en charge. Elle nous emmène dans les vestiaires où les casiers ne sont pas suffisamment nombreux. Ils sont donc réservés pour les embauchés. Je croise les doigts pour retrouver mon portable, mon sac, mes affaires une fois mon poste terminé. Elle nous montre l’endroit pour badger, mais s’interrompt : un composant est manquant dans les livraisons de ce matin. Elle attend les directives. Nous, on ne dit trop rien. On est une vingtaine à attendre.

5h30 : le verdict tombe : l’entreprise n’a pas le nécessaire pour nous mettre en poste, nous devons repartir. « Non non ne badgez pas, ce n’est pas nécessaire puisque vous rentrez… » Sur le coup, nous, on ne percute pas, on doit repartir rapidement, on ne peut pas stagner ici « pour des raisons de sécurité… »

5h45 : je remonte dans ma voiture et pense à mes filles… si j’avais su.

8h30 : J’appelle mon agence d’intérim. Personne n’est encore au courant. Elles auront surement un mail dans la matinée. Mais, au fait, mon déplacement est payé ? Et le temps passé là-bas ? « Non, voyons, vous n’avez même pas badgé »…

Par Madeleine Rosier

Crédits photo : « Manifestation du 5 décembre 2019 (pour la défense des retraites) », Jeanne Menjoulet, Wikimedia Commons, CC BY 2.0, pas de modifications apportées.

07.03.2025 à 17:38

Plus de 150 manifestations partout en France ce samedi 8 mars pour la journée internationale des droits des femmes

Linsoumission

Il y a un an, la journée du 8 mars se tenait dans un contexte historique. Le droit à l’IVG était enfin inscrit dans le marbre constitutionnel grâce au combat mené par la France insoumise, de Mélenchon à la Bastille en 2012 à Panot au Congrès en 2024, aux côtés des collectifs et des associations féministes. Un an plus tard, si des victoires sont à saluer, les menaces contre les droits des femmes se sont amplifiées sous le coup de l’internationale fasciste.

L’extrême droite s’approprie les luttes féministes pour y injecter ses biais racistes, colonialistes et LGBTphobes. Ce samedi, le collectif raciste Némésis a ainsi prévu d’être dans la rue pour saboter les manifestations progressistes à coup de slogans xénophobes. Les ripostes féministes s’organisent contre les offensives réactionnaires qui veulent piétiner les droits des femmes, à l’instar des députés RN comparant l’avortement à la Shoah et aux crimes de Daesh.

Le 8 mars est une date clé dans la riposte féministe. « Nous sommes les partisans du féminisme populaire. Être féministe, c’est lutter pour l’égalité des droits au sens large. Et nous le disons d’autant plus fortement dans un contexte mondial où l’extrême droite s’organise pour attaquer les droits des femmes », a déclaré Mathilde Panot cette semaine en conférence de presse en appelant à manifester massivement ce samedi. Plus de 150 manifestations sont prévues partout en France. Retrouvez la carte dans nos colonnes !

Plus de 150 manifestations partout en France ce samedi 8 mars pour la journée internationale des droits des femmes

Retrouvez tous les lieux de manifestations du 8 mars sur la page dédiée à la grève féministe https://lafranceinsoumise.fr/2025/02/21/8-mars-2025-greve-feministe/

Et pour finir, notre carrousel de l’édition 2024.

07.03.2025 à 17:28

Jean-Michel Aphatie suspendu de RTL pour avoir rappelé l’Histoire : les médias bourgeois s’agenouillent devant l’extrême droite

Nadim Fevrier

Mardi 25 février, sur le plateau de la radio RTL, le journaliste Jean-Michel Aphatie comparait les massacres de la colonisation française en Algérie aux crimes de l’armée nazie. Pour avoir rappelé des faits historiques confirmés par tous les historiens spécialistes du sujet, il est depuis la victime d’une nouvelle cabale de la droite et de l’extrême droite pour qui la colonisation a d’abord été une « bénédiction » pour l’Algérie. Pire encore, RTL a préféré donner raison à la meute fasciste plutôt qu’à l’Histoire, et a suspendu Jean-Michel Apathie. Il devrait a priori être de retour à l’antenne la semaine prochaine. Un épisode malheureusement symptomatique de l’influence de l’extrême droite sur les médias dominants.

Il n’y a qu’à voir pour s’en convaincre les évictions de Guillaume Meurice, Merwane Benlazar, que la mise en retrait forcée de Charline Vanhoenecker et de Waly Dia du service public après des cabales racistes et réactionnaires de la droite, de l’extrême droite et de l’extrême centre, alors que sur les antennes de Bolloré et de RMC, on peut tranquillement être condamné pour incitation à la haine raciale et appeler au nettoyage ethnique des Palestiniens sans être inquiété. Notre article.

Aphatie a rappelé la réalité de la violence raciale de la France en Algérie

« Chaque année, nous commémorons le massacre d’Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais nous en avons fait des centaines en Algérie. Est-ce qu’on en a conscience ? ». Ici, Jean-Michel Apathie ne fait que rappeler des faits. Débutée en 1830, la conquête et la colonisation de l’Algérie par la France s’est caractérisée par des massacres et crimes coloniaux de masse, l’armée française violant, torturant, décapitant, rasant des villages entiers. Des centaines de milliers d’Algériens sont morts, sans doute plus d’un million. Une conquête d’une violence raciale inouïe.

Immédiatement, incapable d’envisager l’horreur de la colonisation française, l’animateur Thomas Sotto reprend : “Mais on n’a pas fait Ouradour-sur-Glane en Algérie”, puis interroge son interlocuteur : “On s’est comportés comme des nazis en Algérie ?”. 

Jean-Michel Aphatie se doit alors de lui rappeler la pratique des « enfumades » qui consistait pour l’armée coloniale française à allumer des feux à l’entrée des grottes où se réfugiaient les populations civiles algériennes afin de les y étouffer ou de les y brûler vives. Une pratique déjà dénoncée au Parlement et dans les journaux français de l’époque, et dont l’État s’est vanté pendant de longues années. 

Une pratique aujourd’hui largement attestée par les historiens dont nombreux sont depuis venus soutenir les propos de Jean-Michel Aphatie. Une pratique qui, consistant à étouffer des centaines de personnes dans des lieux clos à l’aide de gaz, est malheureusement comparable aux méthodes nazies, et à propos de laquelle Jean-Michel Aphatie a donc eu raison de répondre à Thomas Sotto : « Combien de villages ont été massacrés ? Combien de femmes, combien d’enfants ? Les nazis n’existaient pas. On ne s’est pas comportés comme des nazis. Les nazis se sont comportés comme nous, nous l’avons fait en Algérie. »

Une fois encore, une cabale de la droite et de l’extrême droite fait plier un média

Dans la foulée de son intervention où il a, répétons-le encore s’il le faut, rappelé une stricte vérité historique, Jean-Michel Aphatie a vu s’abattre sur lui une intense cabale de la droite et de l’extrême droite, incapables de reconnaître l’existence de crimes lorsqu’ils sont commis contre des populations non-blanches.

Ainsi sur les plateaux de Bolloré, du Figaro, sur RMC et sur tous ceux des médias dominants, voilà que la droite et l’extrême droite se mobilisent pour contester la réalité historique des propos de Jean-Michel Aphatie, pour l’insulter, en profitant au passage pour louer les bienfaits de la colonisation française en Algérie. Face à la pression, l’ARCOM (régulateur de l’audiovisuel français) a annoncé ouvrir une instruction. Pire encore, RTL a annoncé ce 5 mars suspendre son journaliste, la direction considérant ses propos comme “inappropriés”. Son retour serait prévu la semaine prochaine, le mal reste fait.

Pour aller plus loin : Campagnes médiatico-politiques contre Rima Hassan et Aly Diouara : jusqu’au sommet de l’État, le racisme débridé des élites bourgeoises

Jean-Michel Aphatie est donc sanctionné pour avoir rappelé des faits historiques qui ne plaisent pas au révisionnisme de l’extrême droite et d’une partie de la droite, et parce que son groupe (comme la totalité des médias dominants) est aujourd’hui trop poreux à leurs influences. 

Il n’y a qu’à voir pour s’en convaincre que le groupe M6 (qui possède RTL) a annoncé dans la même semaine sanctionner Jean-Michel Aphatie pour avoir dénoncé les crimes de la colonisation française, et accueillir à partir de septembre Cyril Hanouna, laquais en chef de Bolloré et de l’extrême droite dont l’émission a été sanctionnée à des dizaines de reprises par l’ARCOM.

Il n’y a qu’à voir pour s’en convaincre les évictions de Guillaume Meurice, Merwane Benlazar, que la mise en retrait forcée de Charline Vanhoenecker et de Waly Dia du service public après des cabales racistes et réactionnaires de la droite, de l’extrême droite et de l’extrême centre, alors que sur les antennes de Bolloré et de RMC, on peut tranquillement être condamné pour incitation à la haine raciale et appeler au nettoyage ethnique des Palestiniens sans être inquiété.

Pour aller plus loin : Appel au meurtre contre des insoumis, cabale médiatique raciste contre R.Hassan et A. Diouara, baroud de déshonneur anti-IVG sur C8 – La revue de presse de l’Insoumission

Ce nouvel épisode est symptomatique de l’influence qu’exercent aujourd’hui l’extrême droite et ses idées sur le système médiatique qui commence déjà à préparer son arrivée au pouvoir. Préférant donner raison au fascisme qui rampe plutôt qu’à l’Histoire, les médias dominants se compromettent en même temps qu’ils compromettent la liberté d’expression et l’avenir du pays. 

https://x.com/JLMelenchon/status/1897626965982544068

Par Eliot Martello-Hillmeyer

07.03.2025 à 16:11

« L’après Trump consiste à obéir à ses demandes ? » – L’analyse de Jean-Luc Mélenchon

Nadim Fevrier

Trump. Dans une note de blog publiée ce jour, le leader de la France insoumise analyse les récentes actualités internationales. Il revient sur l’humiliation infligée par Trump à Zelensky et donc à tous les pays qui ont suivi la ligne politique des USA. Jean-Luc Mélenchon analyse aussi les conséquences de l’annonce d’une « économie de guerre » par Ursula Von Der Leyen et Emmanuel Macron et sa signification par l’ouverture d’une « ère d’expansion et d’accumulation sans risque pour les capitaux flottants dans le monde et l’énorme réserve d’épargne disponible ». En toile de fond, la stratégie nord-américaine se poursuit : constituer un vaste front contre la Chine en exacerbant les tensions dans la zone Asie-Pacifique. L’Insoumission relaie dans ses colonnes la note de blog de Jean-Luc Mélenchon.

« Comment s’étonner ensuite que Trump se croit en terrain conquis d’avance quand il parle à ceux qui lui obéissent toujours. »

À mes yeux, les dépenses militaires ne sont pas la priorité de notre temps. Notre priorité devrait être d’augmenter considérablement nos capacités de résistance aux conséquences du changement climatique. La montée des tensions dans le monde est une politique délibérée. Elle provoque d’ores et déjà une montée en puissance des dépenses militaires qui sont une ponction considérable sur les moyens des États. Elle réduit d’autant la capacité d’action de la planification écologique et sociale dont les pays ont besoin. Ils pensent y trouver leur compte.

Le passage à l’économie de guerre a pour but aux USA comme en Europe d’ouvrir une ère d’expansion et d’accumulation sans risque pour les capitaux flottants dans le monde et l’énorme réserve d’épargne disponible. Dans le même temps, il s’agit de reconstituer une capacité productive industrielle. Cela après des années de délégation de toutes les productions manufacturières aux pays extérieurs dont les salaires et l’indifférence écologique permettaient une brutale diminution des coûts de production.

Mais on est loin de partir de rien dans ce domaine. Les dépenses militaires dans le monde ont été de 2 400 milliards de dollars en 2023. Avant l’élection de Trump ! C’est l’équivalent de deux fois la richesse totale de 80 % des pays du monde ! L’économie de guerre est d’ores et déjà la base de l’économie productive aux USA qui auront dépensé presque mille milliards pour ce secteur.

En Europe, le cirque des va-t-en-guerre ne date pas d’aujourd’hui non plus. Il a déjà conduit au désastre de l’humiliation infligée par Trump à Zelensky et donc à tous nos pays qui avaient suivi la ligne politique des USA avant l’insupportable invasion russe. En Europe, la scène est désormais dominée par les déclarations grandiloquentes de ces derniers jours et la somme de huit cents milliards d’efforts de guerre, annoncée à grand bruit médiatique. Un examen sérieux montre un paysage moins chevaleresque que les fanfaronnades présidentielles.

Pour aller plus loin : Ukraine/Russie : Macron prépare la France à l’économie de guerre et aux sacrifices sociaux

Ce n’est pas nouveau. L’intervention de la présidente de la Commission européenne ne doit pas faire croire que les pays de l’union débarquent en matière de dépenses militaires. Depuis l’ordre de Trump de porter les dépenses militaires à 2 % de la richesse de chaque pays, quinze d’entre eux ont obtempéré en 2024. Il n’y en avait que dix, un an auparavant. Et il a même été créé en octobre 2024 un Commissaire européen à la Défense et à l’Espace, attribué à Andrius Kubilius, et une commission au Parlement européen. Sans aucun vote des parlements nationaux alors même que la Défense ne fait pas partie des attributions de l’Union !

Mais pour bien comprendre ce que veut dire l’ordre de Donald Trump de passer à 5 % de la richesse produite par l’Union pour acheter des armes, il faut bien se souvenir qu’il s’agit prioritairement des armes produites par les USA. D’ailleurs, au cours des cinq dernières années, 55 % des importations d’armes en Europe provenaient des États-Unis, contre 35 % dans la période 2014-2018. C’est dire le degré de rapidité à exécuter les ordres des USA sur le vieux continent. Comment s’étonner ensuite que Trump se croit en terrain conquis d’avance quand il parle à ceux qui lui obéissent toujours.

800 milliards européens ? C’est le chiffre de Trump. En effet, au moment même où les dirigeants et la presse française parlent d’un « ressaisissement européen », tout ce qui est annoncé s’inscrit avec précision dans le plan de demandes trumpistes. Voyez les chiffres. Le PIB de l’Union européenne est de 17 000 milliards d’euros. Dès lors, 5 % de ce PIB européen c’est donc bien 850 milliards d’euros. L’annonce de von der Leyen c’est donc pile la somme demandée par Trump !

Le budget militaire correspondant à la demande de Trump, c’est donc quatre fois et demie le budget annuel de l’Union européenne. Celui-ci s’élève en effet à 189 milliards en 2024. C’est quinze fois le budget de la Politique agricole commune. Ou bien cinquante-deux fois le budget européen de l’aide humanitaire (actuellement 16 milliards par an). Ou encore soixante-trois fois le budget européen de recherche (13,5 milliards par an).

Le contenu de ce plan fleure bon l’arnaque tout du long. La presse a claironné sans aucun recul le chiffre donné. Mais cette somme ne correspond à aucun « argent frais ». C’est aux États de fournir l’essentiel. Ils sont autorisés à dépenser 650 milliards sur leur propre budget. Et pour cela, ils ont le droit de s’endetter davantage. Von der Leyen permet 1,5 milliard au-delà de la sacro-sainte limite d’hier à 3 %. Von der Leyen n’a pas cherché à cacher cet aspect si habilement noyé dans le flot des bavardages ou des lignes médiatiques.

« Avec jusqu’à 150 milliards d’euros, cela soutiendrait fermement les efforts déployés par l’UE pour parvenir à une augmentation rapide et significative des investissements dans les capacités de défense de l’Europe ». Notez comment la durée d’application de cette « dépense » reste bizarrement établie. Elle parle d’une dépense pour « aujourd’hui et au cours de cette décennie ». Ce qui ne correspond ni à un budget annuel, ni à la durée de la programmation budgétaire de l’Union.

Avant d’aller plus loin, attardons-nous quelques lignes sur les merveilleux emprunts décidés par l’Union européenne. Pour faire face aux conséquences de la Covid, l’UE a emprunté pour la première fois 390 milliards d’euros pour les distribuer. La France a touché par ce moyen 40 milliards d’euros. Mais l’emprunt est à la fin du cycle de remboursement bien coûteux pour les Français. Car notre pays rembourse sur sa part au budget européen.

Elle a donc à sa charge 17 % de la somme empruntée et distribuée à l’ensemble des États. Cela signifie que pour 40 milliards reçus, nous payons 66 milliards ! Soit 26 milliards d’euros de plus que nous aurons reçus, quand tout sera remboursé. Rappelons qu’à l’époque, les « pays égoïstes » avaient refusé de créer une nouvelle recette (droits de douanes, taxe européenne sur les gros patrimoines…) pour financer l’emprunt !

Donc 150 milliards d’emprunt vont nous coûter très cher. En tout cas, cela place la somme annuelle à un niveau sans rapport avec les gesticulations des va-t-en-guerre : 15 milliards annuels. C’est un milliard de moins que l’aide humanitaire…. Étonnant, non ? C’est donc que ce plan est surtout un emballage. Les six cent cinquante milliards dépensés par les nations sont l’essentiel.

Ce sont eux qui feront l’arbitrage entre les dépenses qu’ils engageront. C’est-à-dire entre l’école et les canons, entre les soins et les munitions et ainsi de suite. Et si l’on veut aller plus loin dans l’analyse de l’objectif de ce plan, il reste à comprendre combien en réalité l’essentiel est attendu d’ailleurs par la caste européenne.

La guerre doit être une bonne affaire. Un placement intéressant. Von der Leyen est claire et nette sur ce point « Il est indispensable de stimuler nos investissements publics. Mais ce ne sera pas suffisant en soi. Nous devons veiller à ce que nos entreprises, nos industries, aient le meilleur accès possible au capital, au financement, afin d’apporter leurs solutions à l’échelle industrielle et d’assurer un financement optimal tout au long de leurs chaînes de production, de la R & D à la livraison ». L’Union va donc faire les yeux doux au capital financier. « Nous avons discuté de la question à plusieurs reprises » avoue madame Von der Leyen.

« Nous devons veiller à ce que les milliards d’économies réalisées par les Européens soient investis sur les marchés à l’intérieur de l’UE. Pour ce faire, l’achèvement de l’union des marchés des capitaux est absolument primordial. Elle pourrait, à elle seule, attirer des centaines de milliards d’investissements supplémentaires par an dans l’économie européenne, renforçant ainsi sa compétitivité ».

En une phrase, beaucoup est dit des finalités financières de l’économie de guerre européenne. « C’est le moment d’agir. Nous présenterons une communication sur une union de l’épargne et des investissements », conclue-t-elle avant de surligner son injonction aux États membres : « Je compte sur votre soutien indéfectible pour une action rapide ».

En France, il s’agit de passer à 90 milliards par an pour la défense, selon le ministre de la Défense. Dans ce contexte de va-t-en-guerre, c’est un budget annuel en surmultiplié pour répondre à des besoins militaires d’ailleurs jamais défini. Encore une fois, un chiffre en milliards parle peu. Il faut donc comparer pour s’en faire une idée. Ici, 90 milliards, c’est quatre fois et demie le budget de l’écologie (21 milliards), trois fois le budget de la recherche (26,7 milliards) mais surtout, c’est l’équivalent d’une fois et demie tout le budget de l’Éducation nationale (63 milliards)…

L’Ukraine est-elle vraiment l’objectif de l’économie de guerre en Europe ? Je ne le crois pas. Une fois le sort de ce pays réglé avec ou sans son accord selon l’humeur de Trump et Poutine, la partie fondamentale reprendra son cours. Von der Leyen a montré le bout de son nez sur le sujet. C’est sans équivoque.

« Nous ne devons pas non plus oublier le rôle joué par les États non européens qui reconnaissent les enjeux et non seulement partagent nos valeurs, mais montrent leur volonté de les défendre. Les États-Unis ont ouvert la voie, avec l’Australie, le Canada, le Japon, la Corée du Sud, la Nouvelle-Zélande et bien d’autres. C’est un rappel pour nous que la démocratie n’a pas de distance ».

Cette liste, c’est celle des nouveaux alliés contre la Chine autour des USA. Quand tout le monde sera prêt et en ordre de marche, nous allons vivre le deuxième épisode de la stratégie trumpiste. Question pour l’instant sans réponse : de quel côté seront alors les Russes ?

Crédits photo : Gage Skidmore from Peoria, AZ, United States of America, CC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons.

07.03.2025 à 12:21

Gaz/électricité : plus d’1,2 million d’impayés, des factures qui explosent

Nadim Fevrier

Plus d’1,2 million d’interventions (+24 % par rapport à 2023) pour impayés de factures d’électricité et de gaz ont eu lieu en France en 2024, soit le plus haut du 2019. Une hausse d’impayés inexorable, pour la quatrième année consécutive. Le pallier du million d’interventions pour impayés avait déjà été franchi pour l’année 2023. Dans un nouveau triste bilan, le Médiateur national de l’énergie a recensé 937 000 limitations de puissance d’électricité (+25 % sur un an) et 309 000 interventions de coupure de l’électricité ou du gaz (+16 %). Des chiffres à mettre en lien avec l’explosion des prix des factures d’énergie. Depuis la libéralisation du marché de l’électricité en 2007, les prix ont augmenté de 137 %. Concernant les factures de gaz, Emmanuel Macron avait entériné une hausse de 120 euros pour l’année 2024.

Les prix du gaz vont encore s’alourdir en 2025. Ces prix sont en constante augmentation depuis plusieurs années : la facture pour un ménage a pratiquement doublé depuis le début 2021. En février 2025, un ménage se chauffant avec paiera une facture annuelle de 1608 euros, soit une augmentation de 18,2 % par rapport à février 2024, selon le comparateur Selectra. Les prix augmentent, donc les impayés aussi. Les coupures suivent et humilient ceux qui les subissent. Elles brisent leur quotidien. Elles sont violentes, au sens premier du terme. Les responsables ? Emmanuel Macron et tous ceux qui soutiennent le marché européen de l’énergie. Notre brève.

Gaz/électricité : Macron et les néolibéraux responsables des impayés et de l’explosion des factures

Depuis la libéralisation de l’électricité, les prix ont augmenté de… 137 %. Le gaz est en perpétuelle augmentation, avec une hausse de près de 20 % en un an. Il ne faut pas s’étonner d’un tel nombre d’impayés. Ceux qui ne paient pas leurs factures ne leur font pas pour s’amuser : ils n’ont matériellement pas les moyens de payer leurs factures. Plus d’un quart des Français avaient du mal à payer leurs factures énergétiques en 2024.

Certains considèrent que ces « mauvais payeurs » profiteraient d’un système qui les protège. Ce, jusqu’à ce que celui-ci ait utilisé toutes les options avant d’enclencher une intervention pour impayés. Mais comment vivre sans énegie ? Dans la même situation, que ferions-nous, surtout avec des enfants ? Userions-nous du mieux qu’on pourrait des derniers Mégawatts qu’il nous reste, avec le risque de ne plus avoir d’énergie ? Ou nous-couperions nous volontairement le courant, pour que nos enfants viennent ensuite nous demander « pourquoi il y a une boite de bougies sur la table ? », mais ce qui éviterait l’humiliation de la coupure totale d’énergie sans prévenir ?

Pour aller plus loin : Gestion publique de l’énergie : retour sur une campagne de lutte internationale au Mexique

« Je tiens également à rappeler mon opposition par principe aux coupures d’électricité pour impayé, car il s’agit d’un produit de première nécessité. Je propose que soit toujours garantie pour tous une fourniture minimum de courant électrique toute l’année », déclare le médiateur de l’énergie dans un communiqué attaché à son rapport. Pour rappel, les coupures sont aujourd’hui uniquement interdites durant la trêve hivernale, entre le 1ᵉʳ novembre et le 31 mars. « Le gouvernement est en faute ! », fustige la députée LFI Aurélie Trouvé. Cette état de fait rappelle la nécessité d’accélérer profondément la rénovation thermique des bâtiments pour faire baisser la facture des contribuables. En effet, 1 ménage sur 10 vit aujourd’hui dans une passoire thermique.

Lorsque Bruno Le Maire annonce une hausse de 10% des tarifs de l’électricité en 2024, après une hausse de 25% en 2023, tout en refusant de geler les tarifs, le chef de l’État est directement responsable. Lorsque les macronistes soutiennent au Parlement européen la fin des tarifs réglementés et la généralisation de la privatisation de l’électricité, Emmanuel Macron en est aussi responsable. Le groupe de la France Insoumise était alors le seul à avoir combattu cette nouvelle attaque.

06.03.2025 à 18:24

Ukraine/Russie : Macron prépare la France à l’économie de guerre et aux sacrifices sociaux

Linsoumission

La politique de la peur. C’était la ligne principale retenue par Emmanuel Macron lors de son allocution télévisée de ce mercredi 5 mars. À coups de graphiques, de pourcentages et d’encadrés, le chef de l’État l’a affirmé en direct à la télévision : « la menace russe est là », « nous touche », sans « connaître de frontières ». À en croire le président, la Russie sera bientôt aux portes du pays.

Même son de cloche ce matin du côté du ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot : « La ligne de front ne cesse de se rapprocher de nous ». Que la Russie participe à des opérations de déstabilisation, de désinformation, c’est une chose. Mais affirmer que son armée serait bientôt aux portes de l’Europe, c’en est bien une autre, complètement fausse.

Le seul objectif de la rhétorique de l’exécutif est de préparer l’opinion à une économie de guerre, pour préparer la guerre. Celle-ci s’organiserait par des sacrifices de conquis sociaux, puisque les plus riches ne seraient pas mis à contribution par l’impôt. Déboussolés par l’abandon des nord-américains et l’alignement de la Maison Blanche sur Moscou, les atlantistes de tous bords ne sont pas prêts à remettre en question l’appartenance à l’OTAN et le gavage des industriels de l’armement. Ils ont mis le pays dans l’impasse, refusant toutes les options de négociations pour la paix avancées par LFI ces trois dernières années, et continuent de se pavaner. Au mépris des vies perdues sur le front de l’Est. Notre article.

Face à la Russie, Macron prépare la guerre… et les plus pauvres à payer pour la financer

C’est donc un Emmanuel Macron à la mine grave qui a pris la parole hier soir. D’aucuns auraient pu s’attendre un mea culpa de sa part. Pour avoir cru que se maintenir dans le giron de l’OTAN et des États-Unis était la seule solution, pour avoir décrété qu’on ne pouvait plus parler à Vladimir Poutine quand bien même il faut traiter avec les agresseurs et pas seulement avec le pays agressé et ses alliés, pour avoir entretenu l’idée qu’une issue militaire était la seule possibilité pour ce qu’il passe sur le front de l’est.

Au lieu de quoi, Emmanuel Macron a commencé à préparer le pays à l’économie de guerre. Une espèce de nouveau « quoi qu’il en coûte ». « Nous aurons à faire de nouveaux choix budgétaires et des investissements supplémentaires devenus indispensables […] Il faudra des réformes, des choix, du courage », a affirmé le chef de l’État. Le tout, annoncé sans hausse des impôts. Ce langage utilisé par les néolibéraux ne laisse planer aucun doute sur ce qui attend les Français. La question est posée : où l’argent sera-t-il pris ? Dans nos écoles ? Nos hôpitaux ? Nos retraites ? « Une économie de guerre qui ne met pas à contribution les ultrariches est une arnaque contre le peuple », a rapidement dénoncé le député LFI Antoine Léaument.

Vous entendez cette musique qui monte ? Sur RMC le 4 mars 2025, le président du MEDEF Patrick Martin prend l’exemple du Danemark : « Le Danemark a décidé de reporter à 70 ans l’âge de départ à la retraite pour que l’économie finance l’effort de guerre ». Ce 6 mars 2023, le ministre des Armées Sébastien Lecornu parle d’une mobilisation de l’épargne des Français « de manière volontaire » pour financer la Défense. Les instituts de sondages, comme IPSOS, publient déjà des études sur les jeunes prêts à s’enrôler dans l’armée « en cas de guerre ».

;Pour aller plus loin : Trump/Poutine : Et soudain, le RN devint définitivement atlantiste

https://x.com/L_insoumission/status/1897569313051103668

Pour la guerre, au diable les règles sur le déficit et tant pis si les industriels nord-américains récoltent le pactole

Dans le même temps, la présidente de la commission européenne a vanté de 800 milliards d’euros mobilisés pour « réarmer l’Europe » et un assouplissement des règles budgétaires de l’Union européenne. Nous proposerons d’activer la clause d’échappement nationale du Pacte de stabilité et de croissance. Cela permettra aux États membres d’augmenter considérablement leurs dépenses de défense sans déclencher la procédure de déficit excessif », selon les mots d’Ursula Von der Leyen. Au diable la fameuse règle des 3 % maximum de déficit !

Problème : ce plan de réarmement ne s’accompagnerait d’une quelconque stratégie industrielle. De si grandes dépenses profiteront encore davantage… aux industriels de l’armement nord-américains. Pour rappel, la moitié des dépenses militaires de l’Union européenne servent à acheter des armes aux États-Unis !

Face à cette économie de guerre, les insoumis défendent une économie de la paix qui répond aux besoins de la population. Ils tiennent une position non-alignée pour la France sur la scène internationale. Critiqués par beaucoup d’éditorialistes et autres médiacrates pour leur soi-disant « poutinôlatrie », ils restent les seuls à avoir accueilli des opposants au régime poutinien en France et à plaider dès le début du conflit pour une paix négociée sous l’égide de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), avec des garanties de sécurité mutuelle à la fois pour l’Ukraine et la Russie, afin de permettre une paix durable à l’Est.

06.03.2025 à 11:27

Aux Antilles, le magnat Bernard Hayot fait sa fortune sur le dos des plus pauvres

Linsoumission

En bas de la liste ? Bernard Hayot figure tout de même dans le top 500 des plus grandes fortunes françaises, riche d’environ 300 millions d’euros. Peu connu dans l’Hexagone, les manifestations contre la vie chère aux Antilles l’ont médiatisé ces derniers mois. Bernard Hayot est le président fondateur du groupe GBH, qui s’est développé dans l’industrie (agroalimentaire, matériaux de construction, pneumatiques), le commerce automobile, les spiritueux et la grande distribution.

GBH possède 11 Carrefour dans les Antilles, et supermarchés, magasins de sport, de bricolage aux Antilles, en Kanaky-Nouvelle-Calédonie, à la Réunion, à Mayotte mais aussi au Maghreb et en Asie. Le groupe emploie plus de 16 000 employés dans le monde, son CA est d’environ 4,5 milliards d’euros. Aux Antilles, comparés à l’Hexagone, les prix sont en moyenne 14% plus chers et dans l’alimentaire 40% plus chers, alors que les Antillais sont deux fois plus pauvres que les Français de l’Hexagone. Notre article.

La pwofitasyon

Bernard Hayot est un Béké de Martinique, descendant d’une famille de colons arrivés à la Martinique au 17ème siècle, héritier d’une fortune familiale issue du sucre, fondée sur l’esclavage.

Les Békés représentent 1% de la population et détiennent 40% de l’économie. 4 groupes familiaux se partagent 80% du marché de la distribution antillaise et 50% du commerce d’importation alimentaire, dont le groupe Bernard Hayot. A la Réunion, environ 37 % des parts de marché de la grande distribution et 45 % des dépenses de consommation courante des ménages sont générées par le groupe. GBH est le premier employeur privé de Martinique.

En septembre 2024, le RPPRAC (Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens) lance un soulèvement contre la pwofitasyon (exploitation outrancière capitaliste et coloniale) en Martinique, qui s’étend à la Guadeloupe et à la Guyane (le premier mouvement est parti de Guadeloupe en 2009). Ce mouvement social dénonce la vie chère et la dépendance à Paris. Le gouvernement Macron y a répondu par la répression avec notamment l’envoi de CRS en Martinique. Depuis décembre 1959, il n’y avait pas eu de CRS sur l’île, le conseil général de Martinique ayant alors décidé du « retrait de tous les CRS et des éléments racistes indésirables ».

Pour aller plus loin : Des prix 40 % plus élevés en Martinique, la mobilisation contre la vie chère ne faiblit pas

Économie coloniale

Les Outre-Mer sont maintenues dans un système colonial avec notamment une monoculture intensive, la France ayant imposé à l’agriculture locale l’exportation au détriment des cultures vivrières, « la bananisation des Antilles », selon l’expression de Malcolm Ferdinand, qui empêche toute autonomie alimentaire. Une des revendications des mobilisations est de soutenir la production et la consommation des produits locaux.

Aux Antilles, comparés à l’Hexagone, les prix sont en moyenne 14% plus chers et dans l’alimentaire 40% plus chers, alors que les Antillais sont deux fois plus pauvres que les Français du continent. En effet, à 8000 km de l’Hexagone, aux Antilles, entre 50 et 80% des produits consommés sont importés et 80% des importations viennent de France et d’Europe. Le commerce avec les voisins des Caraïbes et des Amériques est extrêmement limité.

Le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur le coût de la vie en Outre-mer de Johny Hajjar conclut en 2023 à un système organisé de « captation économique et d’enrichissement de quelques-uns ». La même année, Mathilde Panot souligne à l’Assemblée Nationale les difficultés des habitants des Outre-Mer : « Ils subissent ensuite les difficultés liées à l’alimentation, le prix de l’huile, par exemple, ayant progressé de 137 % en un an, celui des pâtes de 29 %, et sachant que, comme vous le savez, les prix de base sont largement supérieurs – de 30 à 50 % – dans les territoires ultramarins. »

Pratiques frauduleuses de GBH

En novembre 2024, en Martinique, quatre lanceurs d’alerte assignent le Groupe Bernard Hayot devant le tribunal de commerce de Fort-de-France à rendre publics ses comptes. En janvier 2025 une nouvelle plainte est déposée contre les grands distributeurs la Martinique pour pratiques commerciales abusives. Les lanceurs d’alerte invitent les citoyens à co-signer cette plainte, pour fédérer, en demandant transparence et régulation des prix des produits de première nécessité.

Libération, dans une enquête publiée le 9 janvier 2025, basée sur des sources internes et des documents comptables, dévoile les pratiques frauduleuses du groupe GBH. Le journal pointe l’opacité des comptes et des marges très importantes. Dans la vente automobile, GBH réalise 18 à 28% de marges nettes outre-mer, soit 4 fois celles réalisées dans l’Hexagone sur les mêmes voitures vendues. Le groupe met en avant des frais d’approche (coûts de transport, d’importation et d’octroi de mer), mais la structure du groupe avec des filiales permettrait d’accumuler des marges, de ventiler les bénéfices et d’alléger les comptes d’exploitation des entreprises les plus rentables.

Nous allions oublier que Bernard Hayot a été élevé par décret du 3 juillet 2024, à la dignité de grand officier de l’ordre national de la Légion d’honneur ! La France reconnaissante…

Par Sandrine Cheikh

06.03.2025 à 10:11

Retraites : la « délégation paritaire permanente » et la mascarade du « conclave » de Bayrou

Linsoumission

L’insoumission.fr et Informations Ouvrières s’associent pour proposer à leurs lecteurs des contenus sur les résistances et les luttes en cours aux quatre coins du pays. À retrouver sur tous les réseaux de l’Insoumission et d’Informations ouvrières.

Le jeudi 27 février, s’est tenue la première réunion du « conclave » convoqué par Bayrou sur la réforme Borne des retraites. Ni suspension ni abrogation et respect de la trajectoire financière. Dans un courrier adressé la veille au soir aux partenaires sociaux, le Premier ministre précise encore le rôle dévolu à ce qu’il appelle désormais la « délégation paritaire permanente » : « Rétablir l’équilibre de notre système de retraites à un horizon proche, l’année 2030, sans dégrader la trajectoire du reste de nos finances publiques ».

La mission des cardinaux du conclave devient donc non seulement de confirmer la « trajectoire » de la réforme Borne mais de l’aggraver encore. La lettre de Bayrou qui « ne confond pas la démocratie sociale et la démocratie parlementaire » mais organise néanmoins « l’association du Parlement à vos travaux », établit dans le détail toutes les règles de fonctionnement de la « délégation paritaire permanente ». Un document annexé donne le programme de travail et le calendrier jusqu’en juin 2025, avec les horaires des réunions.

Non content de refuser toute abrogation de la réforme des retraites, Emmanuel Macron exige désormais une nouvelle série de sacrifices sociaux pour se diriger vers une économie de guerre. Pas de hausse de salaires mais une hausse des commandes d’armements qui, mécaniquement, fera le profit des industriels nord-américains vers qui se tournent déjà les Européens pour acheter leur matériel. Notre brève.

FO claque la porte du « conclave » sur les retraites, la CGT garde un pied dedans, un pied dehors

La « DPP » sera assistée de la Mission animation retraite, la MAR, qui animera un comité de pilotage inter-administrations et siègera dans des locaux dédiés à disposition où chaque organisation disposera d’un bureau.
Derrière l’apparence d’une usine à gaz, se met donc en place une structure corporatiste intégrant les organisations syndicales à la machinerie de l’Etat et du Parlement pour la mise en œuvre d’une politique d’agression frontale des salariés qui exigent l’abrogation pure et simple de la réforme des retraites et ont confié ce mandat aux organisations syndicales. Moyennant quoi, rien n’est tabou : ni l’âge de départ, ni le nombre d’annuités de cotisations, ni le montant des retraites, ni la réforme à points, ni la capitalisation ! Et pour cause, pour le Medef (disposant de facto d’un droit de veto dans ce conclave) comme pour le gouvernement, « la réforme de 2023 ne suffit pas ».

Réaffirmant sa revendication d’abrogation de la réforme des retraites de 2023, la confédération Force ouvrière a dénoncé une mascarade et refusé le « carcan » imposé par le gouvernement. FO ne siégera pas : « Nous ne participerons ni à l’instrumentalisation, ni à l’intégration des organisations syndicales de salariés dans un processus gouvernemental. » Cette annonce a provoqué l’inquiétude des sommets et des commentateurs sur l’avenir du conclave.

Pour sa part, la CGT, qui participe au conclave, estime avoir « mis un pied dans la porte » et « appelle à la mobilisation pour gagner l’abrogation de la réforme ». Est-ce compatible ? Peut-on appeler à mobiliser, qui plus est par des « journées d’action » – dont l’inefficacité n’est plus à démontrer – pour exiger l’abrogation de la réforme des retraites, en siégeant tous les jeudis pendant treize semaines – jusqu’en juin ! – avec ceux-là mêmes qui s’expriment tous les jours pour mettre fin à notre système de retraite ?

Pour aller plus loin : François Bayrou refuse abroger la retraite à 64 ans, le PS se contentera-t-il d’une mission flash ?

Macron et Bayrou annoncent désormais que des choix budgétaires sont indispensables pour passer à une économie de guerre

L’appel lancé le 13 février par 1 200 citoyens, travailleurs, militants, démocrates reste d’actualité : « Nous estimons que ce n’est ni la place ni le rôle des dirigeants syndicaux d’appeler à la stabilité du pouvoir et d’y contribuer en participant à ce conclave… Il s’agit d’associer les organisations syndicales aux manœuvres d’un président et d’un gouvernement rejetés par près de 70 % de la population, pour les aider à se maintenir au pouvoir et à poursuivre leur politique de désagrégation sociale et de répression. »

Macron et Bayrou annoncent désormais que des choix budgétaires sont indispensables pour passer à une économie de guerre : « Il faut réviser la loi de programmation militaire à la hausse ». Le journal Les Echos donne des chiffres : il faudrait tripler la hausse prévue du budget de la défense (c’est-à-dire gonfler chaque année les crédits d’environ 10 milliards d’euros au lieu de 3) pour atteindre 100 milliards de crédits en 2029 (60 aujourd’hui). La présidente de la Commission européenne vient d’annoncer un plan de 800 milliards d’euros pour « réarmer l’Europe » et financer la guerre en Ukraine.

https://x.com/ericcoquerel/status/1896868947946832226

Les choix de ce gouvernement sont de saccager les retraites et toute la protection sociale et les services publics pour financer l’économie de guerre et les profits des capitalistes. Ni le soutien à l’économie de guerre, ni la stabilité du gouvernement et des institutions, ni le saccage des retraites ne sont compatibles avec l’indépendance syndicale et la défense des revendications des salariés.

Par Hubert Raguin

05.03.2025 à 18:24

Pénibilité invisibilisée des métiers « féminisés » : un scandale passé sous silence par la macronie

Linsoumission

Métiers « féminisés ». Depuis des décennies, les politiques publiques se concentrent sur les métiers majoritairement masculins pour traiter la question des risques professionnels. Cependant, il existe tout un pan de métiers dits « féminisés », passé sous silence, où la pénibilité des conditions de travail est majeure et les risques d’accidents importants.

Alors que l’Assurance maladie prend principalement en compte les métiers « masculinisés » et adapte les critères de pénibilité en fonction d’eux, plusieurs études pointent du doigt les dangers rencontrés dans les métiers implicitement féminins. Lors de leur niche parlementaire, le 28 novembre 2024, les députés insoumis ont déposé une proposition de loi visant à faire reconnaître officiellement et publiquement la pénibilité de ces métiers « féminisés ». « Les femmes étant assignées au travail reproductif, cela a des conséquences sur le travail féminin dans notre pays » a rappelé la députée insoumise Gabrielle Cathala ce matin en conférence de presse, rappelant les propositions de loi déposées : « Reconnaître la pénibilité des métiers féminisés ET lutter contre le temps partiel contraint. ». Notre article.

Des métiers implicitement féminins, essentiels durant la crise sanitaire du Covid-19, mais jamais valorisés

Les métiers « féminisés » englobent toutes les professions majoritairement occupées par des femmes. Il s’agit des métiers du soin, du social, du nettoyage, de la sous-traitance, du commerce et de la distribution. Selon la proposition de loi insoumise « 87 % des infirmier·es, 91 % des aides-soignant·es, 97 % des aides à domicile et des aides ménagères, 73 % des agent·es d’entretien, 76 % des caissier·es, des vendeuses et vendeurs sont des femmes.

Parmi les personnels de l’éducation nationale, les femmes représentent 92,4 % des accompagnant·es d’élèves en situation de handicap (AESH), 86,4 % des enseignant·es du premier degré… mais seulement 51,4 % personnels d’inspection et 39 % des professeur·es de chaires supérieures dans le second degré public ».

Des métiers souvent difficiles, impliquant de faire des mouvements à répétition, de soulever des charges lourdes ou encore être soumis à un volume sonore trop élevé. De plus, ces derniers sont souvent précaires : beaucoup de CDD, très peu de protection de l’emploi et un salaire minimum, puisque « deux-tiers des salariés au SMIC sont des femmes ».

Ce sont ces mêmes métiers « féminisés » qui ont été mis en première ligne pendant la crise du Covid-19. Ces emplois sont trop souvent associés, à tort, à des supposées compétences naturelles féminines, ne nécessitant pas de qualification, seulement une sorte d’instinct « maternel ». Dans un article du Monde datant de 2020, des chercheuses et chercheurs expliquent que ces métiers implicitement féminins font « appels à des « compétences présumées innées », si « naturelles » quand on est femme… Cette dévalorisation est l’un des facteurs expliquant les 26 % d’écarts salariaux entre les femmes et les hommes ».

Ces professions, pourtant mises en lumière comme étant essentielles durant la période du Covid-19, sont constamment rabaissées par le gouvernement Macron, jugeant qu’elles ne nécessitent aucune qualification. Le nouveau Premier ministre illégitime François Bayrou a sans doute eu le même raisonnement pour former son nouveau gouvernement recyclé sans qualification.

Pour aller plus loin : Valls, Retailleau, Darmanin, Rebsamen : Bayrou a son gouvernement de perdants et de revenants

La variable sexuée mise du côté au bénéfice des métiers « masculinisés »

Dans l’idée collective, les accidents du travail concernent principalement les métiers « masculinisés », comme les métiers du bâtiment ou de l’industrie. Pourtant, d’après un article de Politis, bien qu’il y ait encore un peu plus d’accidents du travail dans les professions occupées par des hommes, « entre 2001 et 2019, les accidents de travail chez les hommes ont diminué de 27,2 % quand ils ont progressé de 41,6 % chez les femmes ». Pareil pour les maladies professionnelles puisqu’au « XXIe siècle, la hausse est deux fois plus importante pour les femmes (+ 158 %) que pour les hommes (+ 73 %) ».

Alors que la courbe entre les accidents du travail et les maladies professionnelles pour les hommes et les femmes semblent de plus en plus s’égaliser, la reconnaissance de ces sinistres et leurs aides sont encore loin d’être identiques pour les femmes par rapport aux hommes. Pourtant « les accidents de travail des femmes sont plus graves que ceux des hommes, et ce dans tous les secteurs, sauf pour le BTP ». L’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) prend désormais en compte la variable sexuée dans ses études, telle que la « photographie statistique de la sinistralité au travail en France selon le sexe » en 2022.

Ce qui permet de pointer du doigt « un certain nombre de tendances, dont notamment des évolutions différenciées pour les femmes et les hommes ». Le problème c’est que l’Assurance maladie, qui s’occupe des arrêts maladie et des accidents du travail, ne fait pas de distinguo entre les hommes et les femmes. Ces derniers ne prenant pas en compte les variables sexuées, ils axent leurs critères de pénibilités et d’aides selon les métiers exercés par des hommes.

Ainsi, d’après la sociologue Delphine Serre dans Politis « les femmes se voient plus souvent refuser la reconnaissance d’un accident de travail que les hommes ». Un scandale qui continue d’être passé sous silence par la macronie. La proposition de loi insoumise met en avant le fait que les critères de pénibilité ne prennent pas en compte les professions « féminisées » en donnant un exemple révoltant : « les hôtesses de caisses soulèvent environ une tonne de marchandises par heure mais elles n’accèdent que très peu à la reconnaissance du port de charges lourdes ».

À charge égale, la pénibilité sera reconnue et accordée pour un homme soulevant ce poids dans un métier de construction comme le BTP mais pas pour une femme caissière. Le second exemple mis en lumière est celui du bruit. Dans les usines, il y a régulièrement des contrôles et des mesures du bruit mais jamais dans les métiers de l’enfance et de la petite enfance.

Pourtant plusieurs collectifs et sociétés, dont Officiel Prévention, alertent sur ces sujets : « les troubles vocaux (fatigue et modification de la voix) touchent aussi les gardiennes d’enfants : les bruits permanents et prolongés des enfants exigent à la fois une utilisation et une élévation de la voix constantes, ce qui entraine l’apparition d’aphonie temporaire (extinctions de voix) et de douleurs laryngées ».

Le travail a été et est généralement pensé pour les hommes : matériels, postes de travail, cadences etc.. Florence Chappert, experte de l’Anact, explique dans Politis que « quand on dimensionne un poste pour un homme de taille moyenne (1,75 m), ça ne colle pas pour une femme “standard” (1,63 m). Donc cela surexpose les travailleuses à des troubles musculosquelettiques et à des accidents ».

Une solution simple pour limiter ces accidents serait d’adapter les cadences, le matériel et les postes aux travailleuses et même à chaque travailleur en règle générale. Solution surement jugée trop superflue, chronophage et couteuse pour de nombreux patrons se souciant peu du bien être de leurs employés.

La vision androcentrée du travail est toujours très ancrée dans la société. Bien que le sujet de la santé des femmes au travail commence à être plus abordé, il l’est trop souvent sous l’angle de la maternité et des congés menstruels. Cet angle, bien qu’important, est très réducteur et limite les femmes à leurs menstruations et leur fécondité. C’est pourquoi les députés insoumis ont déposé une proposition de loi à l’Assemblée Nationale afin de faire reconnaître la pénibilité des métiers « féminisés ».

Une proposition de loi insoumise pour la reconnaissance de la pénibilité des métiers « féminisés »

Les députés insoumis ont déposé une proposition de loi le 15 octobre 2024, afin d’être débattue et votée lors de la niche parlementaire de La France Insoumise (LFI) le 28 novembre 2024. Elle s’intitule « Proposition de loi visant à reconnaître la pénibilité des métiers « féminisés » » et est composée de 4 articles.

Pour aller plus loin : Abrogation de la retraite à 64 ans, destitution de Macron, consentement dans la définition du viol… Quels textes défend LFI pour sa niche parlementaire ?

Le premier article « prévoit de créer des facteurs de risques professionnels liés aux contraintes émotionnelles fortes inhérentes, par exemple dans les métiers du lien, du handicap, de l’éducation, et du soin, etc ». L’idée est de compléter les facteurs de prévention du Compte professionnel de prévention (C2P). Le C2P comporte 6 facteurs de prévention. Il en comportait initialement 10 dans le C3P mais le président Macron, à l’instar de la destruction des services publiques et des coupes budgétaires, s’est attaqué aux facteurs de prévention dès le début de son premier mandat en 2017.

Ces 6 facteurs de risques reconnus par le C2P sont « le travail de nuit, le travail répétitif, le travail en équipes successives alternantes, le travail effectué en milieu hyperbare, les températures extrêmes et le bruit ». Les députés LFI souhaitent rajouter à ces facteurs, des « facteurs de risques professionnels liés aux contraintes émotionnelles fortes inhérentes » pour les métiers du soin, de l’éducation, du handicap etc..

Le deuxième article « permet la prise en compte de ces contraintes émotionnelles fortes pour les fonctionnaires » afin que l’article 1er puisse s’appliquer au personnel de la fonction publique. Le troisième article « vise à modifier la définition des facteurs de risques professionnels afin de mieux prendre en compte les spécificités des métiers « féminisés ».

Cet article prévoit également la prise en compte, notamment pour les droits à la retraite, des quatre facteurs de risques supprimés (anciens critères de pénibilité) par M. Emmanuel Macron en 2017 : la manutention manuelle de charges, les postures pénibles, la vibration mécanique et les agents chimiques dangereux ».

L’objectif de cet article est de revenir au C3P en remettant les 4 facteurs supprimés par Macron et s’assurant que ces 10 facteurs soient comptabilisés pour une retraite anticipée en cas de pénibilité au travail, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Le dernier article, obligatoire dans une proposition de loi, gage cette dernière.

C’est-à-dire qu’il explique et atteste son financement. Signée par les députés insoumis, soutenue par des députes du Nouveau Front Populaire (NFP) et adoptée lors de la Commission des affaires sociales le 20 novembre 2024, elle aurait dû être présentée durant la niche parlementaire LFI. Cependant, elle n’a pas pu être débattue car les macronistes ont fait de l’obstruction parlementaire, en déposant une succession d’amendements inutiles, par peur que l’abrogation de la réforme des retraites à 64 ans soit votée ce jour-là.

Pour aller plus loin : Alerte – Se sachant battus, les macronistes tentent le tout pour le tout pour saboter le texte de LFI visant à abroger la retraite à 64 ans

La députée LFI Gabrielle Cathala assure qu’elle continuera de défendre cette proposition malgré le fait qu’elle n’ait pas pu être débattue dans l’hémicycle. Les députés insoumis espèrent pouvoir faire voter cette proposition de loi lors d’une future niche parlementaire des partenaires du NFP ou lors d’une séance à l’Assemblée Nationale. La dévalorisation de la pénibilité des métiers « féminisés » n’a que trop duré et il est plus que nécessaire que l’Etat prenne enfin en compte les souffrances des femmes au travail.

Par Camille Oulès

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