L’annonce de la victoire de Donald Trump le 6 novembre dernier a conduit à une ruée sans précédent vers le Bitcoin. Au cours de la campagne, le candidat républicain a déclaré à plusieurs reprises qu’il serait le président le plus favorable aux cryptos, annonçant devant une foule d’enthousiastes réunis à la conférence de Nashville sur le bitcoin en juillet 2024 qu’il souhaitait faire des États-Unis « la capitale crypto de la planète ».
En décembre, le bitcoin dépassait pour la première fois la barre symbolique des 100 000 dollars, avant d’atteindre son all-time high le jour de l’investiture de Trump, le 20 janvier. Depuis, l’actif numérique a perdu près d’un quart de sa valeur.
- Au vendredi 14 mars, dans la matinée, un bitcoin s’échange pour 82 895 $, soit 24,1 % de moins par rapport au pic atteint il y a près d’un mois (109 228 $).
- Malgré les annonces de l’administration Trump visant à encourager les investissements dans les cryptomonnaies, le cours du bitcoin poursuit sa tendance à la baisse.
- Cette tendance n’a pas été inversée par la signature par Trump le 6 mars d’un décret présidentiel établissant la création d’une « réserve stratégique » de cryptomonnaies, ni par l’organisation le lendemain du premier « Sommet de la Maison-Blanche sur les actifs numériques ».
Initialement appelé « Sommet sur les cryptos » (avant d’être renommé quelques jours plus tard 1), le grand événement de Trump qui visait à témoigner de la volonté de son administration à légitimer le bitcoin a eu l’effet inverse. Les investisseurs ont été déçus de la portée des annonces de la Maison-Blanche, qui n’a pas autorisé l’achat de nouvelles cryptomonnaies mais seulement le regroupement d’actifs déjà détenus par le gouvernement fédéral à la suite de saisies.
Le cofondateur d’Impossible Cloud Network, Kai Wawrzinek, a parlé d’un « exercice exemplaire en matière de relations publiques — alors qu’il promettait de grands changements pour la crypto, le président américain n’a pratiquement rien fait » 2.
- Les acteurs du monde de la cryptomonnaie ont contribué au cours du premier semestre 2024 (soit durant la campagne présidentielle) à près de la moitié (43,5 %) du total des dons des entreprises aux plateformes de soutien aux candidats (PAC) : 119 millions de dollars, un chiffre sans précédent.
- Si Trump a beaucoup œuvré pour ces acteurs depuis le 20 janvier, notamment en ordonnant à la Securities and Exchange Commission (SEC), l’organisme fédéral de réglementation et de contrôle des marchés financiers, d’interrompre voire d’abandonner ses enquêtes pesant sur Binance, Coinbase et d’autres grandes plateformes d’échange de cryptomonnaie, le marché n’a pas réagi aux annonces de l’administration Trump comme celle-ci espérait.
- Le vol fin février de 1,5 milliard de dollars d’Ether — la deuxième cryptomonnaie la plus valorisée après le Bitcoin — stockés sur un portefeuille hors-ligne (cold wallet) par des hackers nord-coréens a également contribué à entretenir le cycle négatif débuté fin janvier.
Le président américain et sa famille ont largement bénéficié de l’engouement pour les crypto actifs suscité par l’élection de novembre. Au-delà du lancement en janvier de sa propre cryptomonnaie, capitalisée à plus de 2,3 milliards de dollars, Trump a également tenu des discussions via des intermédiaires avec le fondateur de la plateforme Binance, Changpeng Zhao (CZ), qui pourrait aboutir à l’octroi d’un pardon présidentiel ainsi qu’à un retour de la plateforme sur le marché américain.
- CZ a plaidé coupable en novembre 2023 à des accusations de blanchiment d’argent et de violation des sanctions américaines. Il a servi une peine de prison de 4 mois de mai à septembre 2024, et vit désormais à Abou Dabi. Sa plateforme, Binance (dont il n’est plus PDG mais demeure l’actionnaire majoritaire), a également dû payer une amende de 4,3 milliards de dollars.
- Depuis l’an dernier, des membres de la famille de Trump ont engagé des discussions avec Zhao sur un accord qui pourrait aboutir au retour de Binance aux États-Unis (où la plateforme ne peut plus opérer depuis 2019) et à une potentielle grâce de l’ex-PDG en échange d’une prise de participation par Trump dans l’entreprise 3.
- Celle-ci pourrait passer par World Liberty Financial (WLF), une entreprise de crypto lancée en septembre 2024 qui compte parmi ses membres les 3 fils de Trump, Barron, Eric et Don Jr.
En novembre, quelques semaines après la victoire de Trump, le fondateur de la cryptomonnaie TRON, Justin Sun, avait investi 30 millions de dollars dans WLF alors qu’il faisait face à des accusations de la Securities and Exchange Commission (SEC). Fin février, la SEC annonçait demander à un juge fédéral la suspension de l’enquête pour fraude visant Sun.
Sources
- White House Press Release – White House to Host First Ever Crypto Summit, The American Presidency Project, 28 février 2025.
- Crypto market sinks as Trump’s Bitcoin reserve plan sparks volatility and skepticism », The Block, 10 mars 2025.
- Trump Family Has Held Deal Talks With Binance Following Crypto Exchange’s Guilty Plea », The Wall Street Journal, 13 mars 2025.