07.10.2024 à 20:31
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Nous avons une annonce importante à vous faire : ce samedi 12 octobre, nous organisons une grande soirée de soutien au local des Diables bleus ! 🗓 Quand ? Samedi 12 octobre à partir de 18h📍 Où ? Local des Diables bleus, 29 route de Turin, Nice Ce sera l’occasion parfaite de se retrouver, d’échanger autour d’un verre et de soutenir Mouais dans une ambiance conviviale et festive. Au programme :🎶 Musique live (DJ Feo),🍻 Bar (bières, vin, punch, sirops)🎙 Discussions, rencontres et.. Read More
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Nous avons une annonce importante à vous faire : ce samedi 12 octobre, nous organisons une grande soirée de soutien au local des Diables bleus !
Quand ? Samedi 12 octobre à partir de 18h
Où ? Local des Diables bleus, 29 route de Turin, Nice
Ce sera l’occasion parfaite de se retrouver, d’échanger autour d’un verre et de soutenir Mouais dans une ambiance conviviale et festive.
Au programme :
Musique live (DJ Feo),
Bar (bières, vin, punch, sirops)
Discussions, rencontres et peut-être quelques surprises !
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N’hésitez pas à venir accompagné(e) et à partager l’invitation autour de vous ! Plus on est nombreux, plus la fête sera belle.
Merci encore pour votre soutien et votre engagement ! Nous vous attendons nombreuses et nombreux le 12 octobre, et d’ici là, bonne lecture du dernier numéro de Mouais.
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01.10.2024 à 11:42
admin
Le 29 octobre dernier sur France Inter, c’est le drame : Guillaume Meurice compare en direct Benyamin Netanyahou, premier ministre israélien d’extrême-droite, à « une sorte de nazi, mais sans prépuce ». Résultat : une suspension, suivie d’un renvoi à l’issue d’une procédure kafkaïenne. Retour avec lui sur cette histoire, sur le rôle de l’humoriste, et sur la mise au pas de l’audiovisuel public. Mačko Dràgàn : Lors de notre dernier.. Read More
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Guillaume Meurice : Le passage en hebdomadaire de notre émission [« c’est encore nous », émission quotidienne, était devenue « le Grand dimanche soir »], à la rentrée dernière était déjà quand même un signe inquiétant. Puis, une bonne semaine avant ma mise à pied, donc en mai, Adèle Van Reeth [directrice de France Inter, par ailleurs compagne de Raphaël Enthoven, NDLR] nous a annoncé la suppression d’un tiers du budget de l’émission. La suite, tu la connais… J’ai donc plutôt tendance à considérer qu’ils ont utilisé ça, le procès en antisémitisme supposé de cette blague, comme un argument commode, sans eux-même trop y croire. D’autant que la justice française, suite à la plainte [déposée par l’Organisation juive européenne, et qui a donné lieu à une enquête préliminaire menée par la brigade de répression de la délinquance contre la personne du parquet de Nanterre], avait acté qu’il n’y avait pas de problème, et a donc validé la blague ; j’étais donc sûr de pouvoir la faire.
G.M. : Exactement. Et puis, ils ont beaucoup changé de discours, de stratégie, d’éléments de langage au fur et à mesure de leurs prises de parole publiques. D’abord, c’était la blague. Après, ça a été la mise en garde de l’ARCOM. Après encore, ça a été l’attitude que j’aurais eue vis-à-vis d’eux. Ils ont pas mal louvoyé, tout simplement parce que c’est un vrai problème de liberté d’expression, en fait. Et personne ne l’ignore. Ils savent donc que s’ils vont sur ce terrain-là ils sont sûrs de perdre, ce qui les pousse à instrumentaliser d’autres éléments.
De mon côté, je vais aller aux Prud’hommes. Je suis en train de monter le dossier avec mon avocat. Ça va être un peu long… Mais tu sais quoi, ils s’en foutent, en vrai, de cette histoire. Ils s’en foutent de gagner, de perdre, parce que que ce n’est pas leur pognon. C’est ça qui est terrible. Ils s’en foutent de dilapider les ressources de l’audiovisuel public. Et c’est très problématique qu’ils agissent comme du patronat de base, comme s’ils étaient propriétaires de la boite et qu’ils avaient investi leur argent dedans, comme un boulanger avec ses trois employés.
G.M. : Ouais, c’était la cata (rires). Mais ils font tout ça en service commandé, sans logiques économiques ou gestionnaires derrière. On leur demande de dégager Meurice, ils dégagent Meurice, c’est tout, ils font le taf.
C’est pour ça que pendant les convocations, les entretiens, que je faisais avec un représentant syndical car je suis syndiqué à Sud, n’étaient pas de haute volée quoi. J’aurais bien aimé que cela soit l’occasion d’un débat sur le service public, le rôle de l’humoriste, il y aurait eu plein de choses à dire, dans cette procédure, mais ça n’a pas été le cas. Malgré les soutiens en interne, les pétitions, etc., ils n’ont pas changé de ligne, pas débattu. Ils ont obéi aux ordres.
G.M. : A aucun moment je ne me suis posé la question. Je suis humoriste, j’ai fait une blague, pourquoi je m’excuserais pour avoir bien fait mon travail ? C’est pourtant ce qu’on m’a demandé, et c’est ce que j’ai répondu à Sibyle Veil [directrice générale de Radio France] la première fois que je l’ai eue au téléphone, c’était donc en novembre. Ça devait être le mercredi, genre trois jours après la chronique. Elle m’a dit que ce serait bien que je fasse un mot d’excuse, j’ai dit, « bah non ». Puis elle m’a dit que ce serait bien que je prenne la parole pour dire que vous êtes conscient d’avoir choqué les gens, je lui ai dit « bah si je fais ça aujourd’hui je fais ça toutes les semaines en fait, et ma chronique elle s’appelle Pardon ».
C’est ridicule. Mais ce sont des gens qui cèdent facilement aux pressions. Je lui ai expliqué que si elle m’appelait, c’est juste car Pascal Praud avait décidé d’en faire un sujet, de cette blague. Et donc qu’elle cédait aux pressions de l’extrême-droite, mais ça c’est son choix, son attitude, pas la mienne. C’est sa life, pas la mienne (rires).
G.M. : Exactement, je crois que c’est ça, après je t’avoue j’ai pas tout suivi, mais je crois que c’est ça. Après, au-delà du côté gauchiste ou pas gauchiste, c’était surtout un endroit de l’audiovisuel public français où il était encore possible de faire de l’humour satirique, c’est-à-dire de l’humour sur l’actu, avec un regard critique sur les gens qui sont censés nous représenter, tu vois ce que je veux dire ? Ce sont des espaces de liberté qui se réduisent de plus en plus. Et le service public garantissait ça, car il était supposé être beaucoup moins soumis à la pression, déjà économique, car on a moins de pub, et politique, car les dirigeants sont censés être « indépendants ». Tu noteras que je mets des guillemets (rires).
G.M. : De toute façon, c’est ça l’objectif final, c’est de privatiser, tu connais tu le truc. Pour privatiser un service public, c’est toujours la même technique, il faut le faire dysfonctionner, comme ça tu le revends pas cher à tes copains millionnaires. Ça, ça marche partout, dans tous les services publics, dans tous les pays. Donc quand les gens me disaient « Vous faites beaucoup d’audience, ça vous protège », je leur répondais que ça n’était même pas dans leur grille de lecture. Limite, ils auraient aimé qu’on fasse moins d’audience, ils auraient pu nous virer plus facilement. Ou en tous les cas avec moins de bruit autour de nous, moins d’articles… Mais voilà, si l’émission qui nous remplace fait moins d’audience, ils s’en foutent. Ils ont juste répondu aux ordres de nous jarter, ou bien ils ont été zélés au point de vouloir supprimer toute parole un poil contestataire, car tu parles d’enclave gauchiste, mais on était quand même des bisounours. S’ils ont peur de gens comme moi, qui suis juste pour une meilleure répartition des richesses, les droits des femmes, l’écologie… C’est qu’il leur en faut peu !
G.M. : (rires) Ben on commence à être nombreux sur la liste ! Nicole Ferroni [non reconduite en 2021 pour des raisons encore obscures], Florence Mendez [elle est partie après avoir fait état du « harcèlement » qu’elle aurait subi dans l’émission « La Bande originale » de Nagui]… Mais en interne, ça s’organise. En mai et juin, il y a eu des grèves pour moi, et des grèves contre justement le projet de réforme de l’audiovisuel public. Et les grèves pour moi, c’était pas tant en solidarité que sur le principe que si ça m’arrive à moi, ça peut arriver à toutes les personnes qui défendent plus ou moins le même combat, et qui se font la même idée de la fonction du service public. Donc il y a eu ça, ainsi qu’une motion de défiance de la rédac’ vis-à-vis d’Adèle Van Reeth. En 12 ans à France Inter, je n’ai jamais vu ça. Ça n’a pas tellement d’impact au niveau juridique, mais c’est quand même la rédaction de la première radio de France qui dit à sa patronne : « vu ce que vous avez fait ces derniers temps ont ne vous fait pas du tout confiance », donc vraiment ça n’est pas rien. Je ne sais pas si c’est déjà arrivé, c’est à toi de vérifier, c’est toi le journaliste après tout (rires) [vérification faite, donnez-moi un Albert Londres, ça ne semble être jamais arrivé à Radio France, mais en 1996, le Président de France Télévisions Jean-Pierre Elkabbach a du démissionner deux mois après une motion de défiance, de même que le directeur de l’information du même groupe, Laurent Guimier, en 2022].
G.M. : (fait la moue) Mouais… Pour moi, ça risque ambigu. Et de toute façon, l’ARCOM, c’est un un problème. Ils se considèrent comme indépendants, mais le patron de l’ARCOM, il est nommé par Macron. Donc, fin de la blague. Ce n’est que des stratégies politiques.
Ils virent C8, mais ils laissent Cnews… Enfin bon, pour moi, c’est assez inaudible. Et en plus, pour mettre quoi à la place ? Une chaîne du Printemps Républicain [Raphael Enthoven, compagnon d’Adèle Van Reeth on le rappelle, récupère un créneau TNT]. Pour moi, c’est pas pas sérieux, c’est pas démocratique. Je me suis pas réjoui, même pas par petit plaisir coupable. Je trouve que ça victimise Hanouna qui va de toute façon façon faire faire la même chose sur Canal +. Je trouve la stratégie, déontologiquement et pragmatiquement, assez nulle. Mais c’est des macronistes, donc je ne suis pas étonné que leur stratégie soit nulle (rires). Je me suis dit « Ah ouais, ils font de la merde. Comme d’habitude ». Ils sont dans la réaction. Je les ai vu à l’œuvre dans mon histoire : ce sont de sens qui paniquent énormément. Ils n’ont pas de stratégie à long terme. Il ont juste voulu un peu taper les doigts sur Bolloré, mais ça ne va rien changer. Il va faire pareil ailleurs. Le problème, c’est la détention des médias par des milliardaires, on ne va pas tourner autour du pot. Moi, je te ferais une grande convention citoyenne des médias et je te balayerais tout ça avec la voix des gens : Qu’est-ce que que vous voulez des gens ? Comment vous voulez être informés ? Avec qui ? Avec quoi ? Qui contrôle tout ça ?
G.M. : Je vais faire faire une réponse en deux temps. Le premier, c’est que je suis d’accord avec toi, c’est les faf qui imposent leur tempo. Moi, dans ma polémique, ce qui m’a surpris, ce n’est pas que les fafs soient des fafs et qu’ils me détestent. Ils jouent leur partition, c’est normal. Ce qui m’a surpris, c’est que les macronistes embrayent autant, et qu’ils jouent dans l’orchestre, en faisant même les solistes. Mais bon, l’alliance des libéraux et des fachos, dans les période de tension, ça s’est toujours passé comme ça. Quand il faut sauver leur cul, les libéraux, ils ne voient vraiment aucun inconvénient au fascisme.
Et pour ce qui est des derniers espaces de liberté qui nous restent… Là pour l’instant, on a Internet, mais c’est un espace de liberté très précaire j’ai envie de dire, car la chaîne télé que tu crées sur YouTube, Monsieur Google il peut te l’enlever du jour au lendemain. Et il y a les algorithmes… Donc ouais, c’est pas la panacée, quoi. Mais le merdier, c’est les rapports de domination, sur le sait. Plus quelqu’un a le pouvoir, plus va va en abuser. Donc Youtube, Google, etc., ils vont faire comme Bolloré, ils ne vont pas se gêner.
G.M. : Excellente idée (rires) ! Pour ce qui est de l’accusation d’antisémitisme, c’est le tabou français. C’est un pays qui a tellement collaboré pendant la Seconde Guerre mondiale que maintenant il se refait la cerise avec ça. Donc, non, ça ne m’a pas heurté plus que ça, même si évidemment j’y ai réfléchi, car ça peut arriver à tout le monde de faire des blagues oppressives sans s’en rendre compte, car on est hélas traversé par ça.
Après, oui, j’ai reçu des menaces de mort, mon numéro a fuité… C’est le truc le plus chiant de l’histoire. Et c’est vrai que tout ça, ça peut en effrayer certains. Ce qui est arrivé à Blanche et Aymeric [qui ont fait l’objet d’un déluge de haine sur les réseaux suite à un sketch où ils ironisaient sur l’instrumentalisation des accusations d’antisémitisme contre les opposant au génocide en cours en Palestine], qui sont un peu moins rompu que moi à ce type de polémique, ça des laisses traces quand même. Ça les a inquiété. Et ce qui terrifiant, c’est que ça démonétise le terme. Car si tu te souviens, pendant que tout le monde était occupé à me traiter d’antisémite, il y avait des néonazis qui défilaient tranquillement à Paris, le 11 mai, avec leur drapeau, dans le plus grand des calmes, et autorisés par la préfecture.
Pour ce qui est de ta proposition de syndicat des humoriste, c’est vraiment une question intéressante. Je serai très curieux de voir ce que ça donne, même si ça ne marche pas. Après, c’est délicat. C’est un milieu plutôt individualiste, et surtout où le principe, c’est de ne rien prendre au sérieux, de tout tourner en dérision. Mais je me demande si on ne va pas y être contraint, à force de se faire virer de partout…
Le blocage, c’est que beaucoup d’humoristes ont peur de devenir des militants. Il y a une une crainte de ça. Le : « Non, mais nous on fait juste des blagues ». Ce à quoi je dis, d’accord, mais tu fais des blagues dans un contexte socio-économique qui fait que, si ça se trouve, tu ne vas plus pouvoir faire de blagues. Donc tu ferais bien de te de préoccuper du contexte dans lequel tu fais tes tes blagues. Et, éventuellement, d’aller en manif…
1 On y lit notamment : « Si elle assure ne pas en vouloir à son chroniqueur, elle juge toutefois qu’il aurait pu faire un geste envers les auditeurs « froissés » par sa plaisanterie. « Le 28 avril, il a refait sa blague à l’antenne. Je ne lui en veux pas, mais j’ai senti ce soir-là, que ça nous remettait en danger », se souvient-elle ». lemonde.fr/actualite-medias/article/2024/07/12/charline-vanhoenacker-en-a-peine-dix-ans-on-est-passe-de-je-suis-charlie-a-la-police-judiciaire_6248893_3236.html.
2 Voir à ce sujet la vidéo de Usul et Lumi pour Blast : FRANCE TV, RADIO FRANCE : LA MISE À MORT PROGRAMMÉE DU SERVICE PUBLIC, juin 2024.
A lire également : Avis de tempête à France Inter, où la rédaction subit une remise au pas à marche forcée, Yunnes Abzouz, 3 mai 2024
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26.09.2024 à 11:57
admin
En octobre 2023, Géraldine Guntz, 52 ans, attachée territoriale à la mairie de Nice, se donnait la mort par pendaison. Retrouvée chez elle par l’une de ses filles, une plainte contre X a été déposée pour faire la lumière sur les causes du suicide. Selon les témoignages récoltés, peu de doutes sur celles-ci : son travail. En tirant le fil, plusieurs agents ont fait état d’un « système mafieux »,.. Read More
Cet article « Omerta », « système mafieux », « terreur », suicide : immersion dans l’enfer de la mairie de Nice est apparu en premier sur MOUAIS.
Le 7 octobre 2023, Géraldine Guntz, 52 ans, juriste de formation, fonctionnaire territoriale de catégorie A à la mairie de Nice, est retrouvée pendue par l’une de ses deux filles, chez elle. Malgré un signal d’alerte fort envoyé fin août à sa cheffe de service Véronique Borré. Dans une lettre adressée à celle-ci, Géraldine demande expressément une mutation de service avant, écrit-elle, « d’atteindre un point de non retour » (voir document ci-après). Tous les agents et agentes rencontrées au cours de cette enquête ont tous témoigné d’une solide travailleuse, ne comptant pas ses heures. Nul n’a fait part d’une quelconque fragilité psychologique qui aurait pu la mener au suicide, bien au contraire. Quelles sont les raisons qui ont poussé Géraldine Guntz à commettre l’irréparable ? Plongée dans le système infra-municipale, où le personnel fait état d’un « système mafieux », d’une « omerta » généralisée, notamment suite au suicide de cette agente, de restructurations permanentes. En un mot : « terreur », au sein de la mairie.
« C’est quelqu’un qui écrivait très bien », relate Katia* au sujet de Géraldine, une proche qu’elle surnomme « Gégé ». « Son truc, c’était les délibérations ». Insatisfaite dans son travail après dix ans de bons et loyaux services, alors qu’elle se voit confier une tâche supplémentaire sur la partie financière, elle demande à changer de service pour devenir chargée de mission aux instances délibérantes, sous l’égide du Directeur général des services (DGS). « Deux services ont été créés très récemment au sein de cette DPACT [Direction de pilotage, appui et contrôle et transformations]. En synthèse, les domaines respectifs : finances/instances. Cet affichage n’est pas neutre et pourrait me conduire à terme à devoir renoncer au suivi des instances pour me consacrer exclusivement au suivi budgétaire. J’y suis fermement opposée et avant d’atteindre un point de non-retour, je préfère anticiper », écrit Géraldine Guntz, dans un courrier daté du 25 août 2023, adressé à Christian Estrosi ainsi qu’à Véronique Borré et le DGS, Olivier Breuilly. Dans un premier temps la demande est acceptée. Mais Véronique Borré se ravise. Quelques jours plus tard, Géraldine Guntz se donne la mort. « Elle s’y est opposée car Géraldine était corvéable à merci. Elle avait fortement maigri les derniers temps », raconte Claude*, une proche de Géraldine Guntz. Dans la fin de son courrier, celle-ci rappelle ses qualités : « dynamique, intègre, […] pragmatique, prises de position contrôlées, habituée à travailler dans l’ombre, résiste au stress malgré la pression environnante, […] loyale. » Une qualité nécessaire dans un certain système… Tous les rapports d’évaluation que nous avons pu consulter ne disent pas autre chose : « Agent sérieux, rigoureux et autonome, expert dans son domaine qui démontre de réelles capacités de gestion de situations professionnelles complexes, et contribuent à les résoudre dans un contexte sous tension ». Une fonctionnaire exemplaire en somme.
Après le suicide, aucun mot dans les messageries internes. « Madame Borré niait sa responsabilité » poursuit Claude. Il a fallu attendre la réaction du syndicat SUD Solidaires pour dénoncer « l’omerta ». Dans un mail interne adressé aux fonctionnaires par la section syndicale on peut lire : « Suite au suicide d’une de nos collègues, cela fait maintenant plusieurs jours que nous attendions une communication de notre employeur, la mise en place de mesures de soutien psychologique pour tou.te.s celles et ceux qui en auraient besoin… Mais non… RIEN! Au lieu de ça, c est une omerta qui s’est installée dans les services, chacun.e restant seul.e avec son mal être et ses angoisses. Cela est insoutenable ! Dans l’attente d’une réaction de notre administration, nous appelons donc l’ensemble des agent.e.s de nos 3 collectivités a sortir lundi à midi devant leur lieu de travail et à observer ensemble une minute de silence en mémoire de Géraldine. »
Katia s’emporte :« On nous a dit que la famille ne voulait pas ébruiter l’affaire. Ce qui est faux il y a eu plainte contre X derrière. On a demandé à chercher le quoi et pas le qui. Pour ne pas mettre [Véronique] Borré dans la merde ». « Ils ont fait en sorte que personne ne vienne [à la commission d’enquête]. Ils ont dit aux agents si vous n’y allez pas, ce n’est pas grave », poursuit-elle. Fin septembre, Géraldine pleure souvent en réunion. « J’ai été pertubé par son état et sa confusion, Elle se sent cornérisée », écrit Stéphane Dupont, le directeur administratif et financier du service, dans les documents d’enquête auxquels nous avons eu accès. Finalement, début octobre elle apprend que sa mutation a été refusée. « Le vendredi soir elle était prostrée dans le canapé. Elle appelle le samedi matin à 10 heures en demandant à Véronique Borré : laissez-moi partir », relate Katia. Selon les documents d’enquête interne, Véronique Borré donne sa version : « J’ai décroché car je sais qu’elle ne va pas bien. Elle me dit merci car elle a pu dormir grâce à moi, car elle faisait des insomnies. Elle a parlé de ce qu’elle pensait de moi : rien de négatif. » Le samedi dans la nuit, Géraldine se donne la mort. Elle passera ensuite une semaine à l’hôpital avant de décéder.
Contactée pour répondre à toutes les questions qui se posent suite à ce drame, Véronique Borré, par l’entremise du service presse de la mairie, a dans un premier temps demander une carte de presse préalable à toute réponse. Laquelle n’est pas nécessaire pour exercer la fonction de journaliste comme nous ne cessons de le rappeler. Puis après avoir reçu un scan de notre carte (par ailleurs plus valide mais qu’importe), elle a ensuite argué d’une enquête en cours pour éviter de répondre aux questions. Un entretien lui a également été proposé de notre part. En effet, une plainte contre X a été déposée par la famille Guntz fin décembre 2023. Dans un premier temps, une enquête interne au service et seulement au service de Géraldine a été menée. La justice doit maintenant passer. En attendant de connaître le résultat de l’enquête, analyse d’un système municipal où la gestion de l’administration ressemble plus à « un système mafieux » selon les personnes interrogées dans l’enquête qu’à une mairie digne de la cinquième ville de France.
« C’est le couple Borré qui dirige la mairie. Estrosi est rarement là, il passe tout son temps à Paris », affirme Alex, rencontré autour d’un verre près de la place de la Libération. « On les appelle les Thénardier », abonde Claude au sujet d’Anthony et Véronique Borré. Lui est premier adjoint à la sécurité, au logement et à la rénovation urbaine, mais dirige aussi Côte d’Azur Habitat d’une main de fer, premier bailleur social du département. C’est lui qui a lancé la première convention pour appliquer une double peine aux condamnés résidant dans un logement social, permettant l’expulsion. Une première en France, dont il se targue allègrement. Elle, est Directrice générale adjointe à la Sécurité, la proximité, et la citoyenneté, mais est également vice-présidente à la Région Sud sur ces mêmes questions. En juin 2023, Le Figaro titrait un de ses articles sur sa partie web « À Nice, le tout-puissant couple Borré derrière Christian Estrosi ». Fidèle parmi les fidèles depuis 2009, lorsque Christian Estrosi était ministre de l’industrie, (son directeur de cabinet de l’époque était… Olivier Breuilly), Anthony Borré se verrait sans doute parrain à la place du parrain. En attendant, il montre sa loyauté et comme son mentor, n’hésite à cumuler les postes de pouvoir, et avec sa femme, gère les affaires courantes et les combats politiques.
Parmi tous les agents rencontrés un mot revient toujours. « Terreur ». « Ils ne font rien directement. C’est la peur qu’ils inspirent qui fait que les gens se restreignent », affirme Mélissa*. « Aujourd’hui, seul le maire décide des avancées de carrière. Fini la Commission administrative paritaire. Si on ne rentre pas dans le sérail, on n’a aucune chance ». Un serment d’allégeance pour se promouvoir ? Voilà qui rappelle un certain type de système. « Je préfère mourir de faim que de rentrer dans ce système », poursuit-elle, qui connaissait également très bien Géraldine. Alors que nous discutons, un coup de téléphone vient interrompre notre échange. Elle met en haut-parleur. Un de ses collègues, la voix tremblante et énervée raconte qu’il ne peut pas prendre ses vacances car sinon « c’est trop la merde quand je reviens ». Mélissa lui demande de prendre soin de lui et qu’elle n’a pas envie de le voir tomber comme Géraldine. Elle dit avoir confier au premier adjoint, Anthony Borré, que « 70% des agents sont en danger ». « La dernière fois, il y en avait un qui me disait qu’il ne pouvait même pas prendre de vacances. On lui demandait d’en prendre, mais il n’en prenait pas parce que sinon, la somme de travail s’accumule pendant les vacances et il préfère ne pas en prendre », abonde Katia.
« Géraldine était au service DGA de Mme Borré. Elle gérait un très grand périmètre d’action avec une pression permanente. Ne pouvant plus supporter cette charge, elle a fait la demande de changer de poste. Mme Borré a dit oui dans un premier temps, le DGS également. Puis elle s’est ravisée. Elle s’est pendue peu après », confirme Mélissa. « Moi-même, j’ai fait une dépression. On retourne la violence contre nous-même pour ne pas l’envoyer aux autres. J’ai eu des envies suicidaires. Anthony et Véronique Borré ne sont pas malveillants. Ce n’est pas le pouvoir qu’elle exerce, mais celui qu’elle induit. C’est la mafia, ça l’a toujours été. J’ai l’intime conviction que si on avait accepté sa mutation, elle [Géraldine] serait encore envie », conclut-elle.
Les agents rencontrés dénoncent également un organigramme en perpétuel mouvement. Des restructurations, des services asséchés, voire des services fantômes. « Depuis 2002, ce n’est pas moins de 32 organigrammes », affirme Katia. Soit près d’un et demi par an en moyenne. « L’incompétence est devenue la compétence chez nous. »
« Géraldine arrivait entre 6 heures et 6 heures et demi, mais elle badgeait plus tard pour être dans les règles », détaille Katia. Selon les données issues du badge, Géraldine passait en moyenne 9 heures au travail par jour avec 21 minutes de pause. Loin des 35 heures légales… Claude rappelle que c’est la norme pour bon nombre d’agents. « On est censé les mettre sur un compte épargne temps puisque en tant que fonctionnaire on n’a pas d’heures supplémentaires. Mais on n’en voit jamais la couleur ».
Dans le même temps que le suicide de Géraldine Guntz, une autre affaire sordide a montré le peu de cas que se font les instances dirigeantes de la mairie du personnel. Gérard Manzanares, agent municipal au service collecte et déchetterie est retrouvé mort chez lui après plusieurs mois. Il est enterré dans la fosse commune, faute de proches à prévenir. Sauf que les services municipaux ne semblent pas avoir chercher bien loin, puisque des membres de sa famille se sont manifestés peu après l’enterrement. Au final, 39 personnes, dont des agents municipaux se sont rendus à ses funérailles.
« A l’époque, [Jacques] Médecin (maire de 1966 à 1990 – N.D.L.R.], on pouvait le critiquer. Ce n’était pas un saint, loin de là. Même avec [Jacques] Peyrat (maire de 1995 à 2008 – N.D.L.R.), on pouvait. Mais avec Estrosi ça a changé rapidement. On se sent menacé sur nos primes. On est sûr d’être sanctionnés si on l’ouvre. Personne ne parle politique de peur d’avoir des oreilles qui traînent », continue Claude*. Plusieurs témoignages ont abondé en ce sens. Elle pointe également le manque d’opposition qui permettrait de contrebalancer certains pouvoirs exorbitants à la mairie. « Il a donné à manger à ses opposants donc il est tranquille ». Aujourd’hui, effectivement, le conseil municipal comporte Marc Concas, et Patrick Mottard, tous deux ex-socialistes, et figures de proue de l’opposition niçoise dans les années 2000. Ce dernier a mené la liste de gauche plurielle en 2001, réalisant le meilleur score de « gauche » depuis la 1947, échouant ainsi à 3 500 voix d’écart avec Jacques Peyrat. En 2020, l’opposition la plus à gauche s’être trouvée être menée par Jean-Marc Governatori. Si certains ont le cœur trop à gauche, lui a l’écologie au centre (selon le nom de son mouvement), donc à droite. Sur sa liste figurait le chevalier blanc (cassé) de la politique, Jean-Christophe Picard, ex-président de l’association de lutte contre la corruption en politique Anticor, également présent sur celle d’Olivier Bettati en 2014, lequel est passé par le FN pour revenir dans le giron estrosiste en tant que conseiller cette année. Vous suivez ? A Nice, la gauche institutionnelle n’existe pas et l’extrême droite s’acoquine avec Estrosi, comme Gaël Nofri, ex-directeur de campagne de Jean-Marie Le Pen, aujourd’hui adjoint au stationnement. Toutes les voix dissonantes sont silenciées à coup de procédures-baillons ou intégrées dans le camp estrosiste. Comme par exemple David Nakache, l’un des adversaires favoris d’Estrosi. Il avait du se pourvoir jusqu’en cassation afin d’être relaxé, pour avoir oser émettre l’idée qu’une mairie vraiment à gauche « mettrait fin à la corruption et au système clientéliste à Nice », lors des élections municipales de 2020.
Ou encore, dans un registre plus affectif, Frédéric Maurice, rédacteur en chef de l’agence de Nice de Nice-Matin et Erwann Le Hô, directeur du Centre LGBT, mariés fièrement par Christian Estrosi fin août 2024, avec ce message sur X : « Très heureux d’officier ce matin pour unir deux personnes que je connais si bien, Erwann et Frédéric. C’est un privilège en tant que Maire d’être présent à leurs côtés pour les marier officiellement, et marquer le début d’une nouvelle vie. Félicitations à eux ! ». Il va être difficile de continuer à accorder une quelconque confiance dans notre canard local vue la proximité qu’entretient son rédacteur en chef avec l’édile niçois. Pour rappel, la Métropole Nice Côte d’Azur et la Commune de Nice financent à hauteur de 1,6 million d’euros par an le groupe Nice-Matin par l’achat d’annonces publicitaires, selon les données disponibles sur le site du ministère de l’Economie, regroupées par Macellum, moteur de recherche de marchés publics.
Bons de commande post-tempête Alex dans le viseur de la justice qui a amené à 21 perquisitions en début d’année, dérapages financiers pour le Grand Prix de Formule 1 financé par la Métropole pourtant situé dans le département voisin du Var, dette municipale à hauteur d’un milliard d’euros, frisant la mise sous tutelle étatique, nomination de Rabah Souchi, condamné en première instance à six mois de prison avec sursis (il a fait appel) pour avoir commandité la charge contre Géneviève Legay en mars 2019. Il est évident que la guerre ouverte entre le clan Ciotti, proche du Département, et le clan Estrosi qui tient la mairie et la Métropole est à l’origine d’un certain nombre de révélations ces derniers mois. A l’origine de la dénonciation des notes de frais exorbitantes liées au Grand Prix, Christelle d’Intorni, proche d’Eric Ciotti et réélue députée dès le premier tour dans la 5ème circonscription des Alpes-Maritimes ce 30 juin 2024. Le groupement chargé de l’organisation du Grand Prix, dont Christian Estrosi souhaitait la tenue prochaine à Nice, a affiché une dette de 32 millions d’euros, mettant ainsi la structure gestionnaire en liquidation.
De son côté, comme à son habitude, Estrosi se place en victime. Il ne sait rien de tout ce dont il est accusé, n’a rien vu, rien entendu, et n’a rien fait de prohibé. L’étau se resserre mais rien ne semble pouvoir atteindre le chef de la municipalité. En attendant, une fonctionnaire s’est suicidé. La justice doit maintenant faire son travail pour mettre au jour les causes et circonstances de la mort.
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23.09.2024 à 13:23
admin
Inoxtag a produit un film documentaire qui parle d’un défi et des moyens qu’il a mis en œuvre pour y parvenir. Mais aussi d’altérité, de l’idée qu’on ne grandit qu’au contact des autres, d’addiction au smartphone et d’émancipation. Des messages naïfs, aussi mignons qu’une vidéo de chatons, et qui entrent en résonance avec des millions d’individus. Kaizen (réalisé par Basile Monnot issu de la pub), qui met en scène les.. Read More
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Kaizen (réalisé par Basile Monnot issu de la pub), qui met en scène les aventures du youtubeur Inoxtag et ses potes, a attiré 300 000 personnes en salles lors de son avant-première, essentiellement des jeunes spectateurs, ce qui est totalement inédit (mis en ligne sur Youtube dès le lendemain, il cumulera 25 millions de vues en seulement 4 jours avant d’être diffusé sur TF1). Un film qui aimerait parler d’une jeunesse qui se cloisonne et s’oublie, mais dont la flamme de l’aventure peut être attisée.
Né en 2002, Inès Benazzouz (aka Inoxtag) a toujours fait des vidéos, des stream de collégien (longues émissions en direct et face caméra) durant lesquels il joue à Minecraft et Fortnite, puis il a commencé à documenter sa vie (sa nouvelle voiture, son nouveau chien et le dressage adapté, son nouvel appartement…), à se lancer des défis (dormir dans une forêt hantée, vivre seul sur une île déserte durant une semaine…) et créer des concepts (avec d’autres youtubeurs vedettes). Le gamin tout seul sur son ordinateur qui commente des images a su s’entourer et faire fructifier sa popularité.
Progressivement, il se laisse dépasser par le nombre de vidéos à produire mensuellement pour faire vivre son équipe, frôlant même le burn-out, et ne parvient plus à trouver du sens à ce qu’il fait. Il va donc se contraindre à sortir de ses routines, documentant ses expériences (parfois totalement seul), cherchant à concilier ses impératifs de productions et la volonté de vivre une expérience qui l’aiderait à sortir de l’enfance. Sortir de sa chambre, de sa famille, de son réseau d’amis, un schéma classique dans la construction d’un individu.
Inès accumule les dizaines de millions de vues sur Youtube, mais pour les mériter, pour se sentir légitime, encore faut-il avoir accompli une prouesse se dit-il : toute personne confrontée à la célébrité est hantée par ce sentiment. Souvenez-vous par exemple de Jérôme Jarre et de sa Love Army : en 2017, alors qu’il est très populaire sur le réseau social Vine (vidéos rigolotes et visage poupin de Jérôme), il se lance dans une guerre contre l’extrême-pauvreté (les Rohingyas, faisant alors l’objet d’un génocide, vivent dans un immense bidonville) avec l’idée que son renom puisse servir à quelque chose de concret et d’utile. Qu’il ne soit plus acclamé pour son chouette sourire de petit blondinet, mais pour une action historique d’utilité publique.
Inoxtag, lui, a opté pour gravir la plus haute montagne du monde. C’est le rite initiatique qu’il s’est choisi pour entrer dans le monde adulte. Il aurait pu s’engager dans l’armée, faire un tour du monde en stop, entrer dans le Guinness Book en cuisinant la plus grande pizza du monde, mais l’Everest est la suite logique de sa quête : partir à l’autre bout du Monde, au plus haut du Monde. Ainsi, non seulement on le considérera enfin comme un bonhomme, mais en plus il sera loué pour sa prouesse sportive, et pour avoir tenu parole.
Personne n’est contraint à « se dépasser ». Mais ici, il ne s’agit pas de devenir un surhomme, plutôt de s’imposer un cadre de vie correspondant à l’objectif. Pousser de la fonte pour afficher de voluptueux biceps, c’est finalement facile (comme d’autres youtubeurs, Inoxtag a également filmé sa transformation musculaire), s’entraîner une année pour devenir alpiniste est plus ardu et constitue un challenge potentiellement fructueux en nombre de vues.
La transformation psychique est également recherchée par Inès, il explique qu’il souhaite ardemment être devenu autre à la fin de l’aventure. Et il découvre que pour « se dépasser », il faut s’instruire (le seul livre qu’il ait lu jusqu’à présent est celui d’un alpiniste, « enfin, j’ai lu un résumé » déclare-t-il sur le plateau de La Clique sur Canal +), chercher de l’aide, écouter et apprendre, et surtout rencontrer et s’ouvrir aux autres. C’est en tout cas ce qu’il dit, pas forcément ce que l’on voit dans ses vidéos.
Les rites de passage qui sortent le jeune adulte de la puberté sociale, symbolisés jadis par le service militaire et le départ du foyer familial, ont cédé la place à une transition plus progressive parsemée de rites ponctuels (les fameux défis). Mais la construction progressive d’une maturité sociale dépend de l’investissement personnel et des leçons tirées des épreuves constituées par ces rites. Et surtout la conscientisation que ce processus est personnel et intime.
Inès rencontre donc des professionnels qui vont le former et l’entraîner, il va découvrir du pays et de la diversité sociale en Corse, en Savoie, sur les routes de France, de La Réunion, en Islande… Son message aux jeunes : sortez de chez vous, confrontez-vous au Monde. Ce qu’il fait en images, en toute extimité. Car Inès est accro à son téléphone et aux écrans, comme nombre de jeunes qui le suivent, il dit en avoir conscience et désire se désintoxiquer. Or, c’est par les réseaux qu’il existe et qu’il prospère. Pour appréhender ce paradoxe, il va donc se lancer des challenges, c’est ce qui est censé l’aider à décrocher de son équipe, sa team, et de ses followers.
Pour rencontrer l’autre, le mieux est de partager. C’est ce qu’il éprouve un an avant l’Everest en passant sa première nuit en haute-montagne avec David, dormant par moins vingt degrés à la belle étoile. Pour tisser des liens, rien de tel que d’affronter ensemble une épreuve. Brothers in arms, compagnons du froid dans les cimes. Comme pour nombre d’adolescents, l’iconographie militaire et ses promesses d’aventures, rendues dans des clips publicitaires léchés et qui flattent l’esprit d’équipe, de famille, de frères d’armes en terrain hostile, font fantasmer Inès. C’est ce qu’il veut vivre : une épreuve et une team de paires de couilles pour l’affronter.
Partir à l’aventure, c’est aussi découvrir des humains qui ont d’autres aspirations, comme ce jeune homme rencontré sur une virée en camping-car, qui rêve de créer une micro-ferme pédagogique et qui cultive des produits biologiques. Inès lui parle d’un jeu vidéo où tu peux être fermier, le gars connaît et cela l’amuse, une connivence éphémère se crée.
Pourtant, au gré de ses voyages, on ne sait pas ce que Inoxtag a retenu de ces échanges, en quoi il a grandi. Le post-adolescent sent bien que les éléments sont là, mais il ne sait pas comment les articuler pour progresser.
Le jeune youtubeur découvre que les voyages forment la jeunesse, qu’un agriculteur peut être un « Einstein » car il maîtrise l’art de greffe botanique, que la Tome de Savoie se fait avec du lait de vache, que pour pêcher des palourdes il faut gratter le sable humide… L’apprentissage de la vie hors écrans, par l’action, pas forcément par la réflexion, et avec une curiosité limitée à ce qui correspond au format de ses vlog.
Tu seras un homme mon fils, aux yeux du Monde et de tes followers, et de ta maman également. Cette maman qu’on entend parfois dans le film et qui se montre fière de son fils enfin sorti de sa chambre. Par cette aventure, Inès sort du foyer familial, s’affranchit de ses détracteurs, des servitudes liées à son métier et des préjugés de classe, c’est ce qu’il pense. Lui, le fils d’un chauffeur et d’une infirmière, qui a su construire les conditions qui lui permettent de déplacer des montagnes ou de partir sur les routes de France en voyage organisé par son pote, filme ses petits pas vers le monde adulte.
L’émancipation est un produit marketing comme un autre finalement, même si la dissonance cognitive guette puisque l’affranchissement des normes est avant tout un processus intellectuel intérieur. Inès souhaite-t-il réellement maturer, ou simplement présenter l’évolution Shônen (mangas pour adolescents) d’Inoxtag ?
La chose est documentée, la jeunesse numérique, ayant grandi avec les réseaux sociaux et les sites de rencontres, souffre du manque d’altérité. Lorsqu’elle se déplace en discothèque ou en festival, ce n’est plus pour rencontrer de nouvelles personnes mais majoritairement pour passer du bon temps entre amis, et près de la moitié des moins de 24 ans n’ont pas de vie sexuelle, l’omniprésence des écrans étant directement mise en cause par les sociologues. Une jeunesse coincée dans son techno-cocon.
Les jeunes citadins évoluent dans des établissements scolaires carcéraux, grilles et sas d’entrée, se déplacent sous les yeux des caméras, sont géolocalisés par leurs parents, surprotégés dans un monde qui s’effondre pourtant et dont ils voient disparaître la biodiversité. L’extérieur est dangereux, terrorisme et événements climatiques, la conforteresse d’un rectangle lumineux et tactile les fige dans une existence refusant l’effraction liée à la prise de risque, pourtant indispensable dans la construction de soi car elle permet d’expérimenter le rapport à la réalité, à soi et aux autres.
Choisir l’Everest, c’est symboliquement se confronter au danger, et déjouer la mort lente de l’addiction ou la mort subite de la pulsion suicidaire. C’est le message perçu par les jeunes spectateurs : ton Everest est peut-être juste à côté de chez toi, il n’a pas besoin de culminer à 8849 mètres, mais il te sortira de ta bulle, tu y croiseras d’autres humains, tu seras confronté à tes limites, tu feras des expériences sensorielles, tu apprendras et tu t’amélioreras.
Le film a bien compris qu’il pouvait entrer en résonance avec une population jeune, un peu perdue et en manque de réel. Le parcours du jeune streamer devenu grand baroudeur reproduit ainsi un récit initiatique assez banal, tel l’écuyer qui devient roi, le fermier Jedi, la Cendrillon princesse, le Citizen Kane. Ou le pauvre qui devient millionnaire.
Inès est donc officiellement sorti de l’enfance. C’est en tout cas ce que veut montrer le film. Est-ce un documentaire ? Oui, car la vidéo documente le cheminement d’un jeune homme qui s’est donné publiquement pour défi de gravir le Chomolungma, la déesse mère des vents. Entraînements, escalades, déambulations, le personnage possède un arc narratif, souffre, rit, découvre, semble évoluer. Utilise-t-il les codes du documentaire ? Non, le film hybride le style Youtube avec des plans très composés, des séquences aux allures publicitaires ou issues du clip, des captations en GoPro ou caméras d’appoint, en drone, d’autres images entièrement générées par ordinateur, ce qui peut rendre le rendu assez incohérents visuellement, sortant le spectateur de l’immersion promise. Certaines séquences ressemblent même aux « campagnes immersives » publicitaires de l’Armée de Terre ou à une vidéo pour Décathlon (le réalisateur à également travaillé pour cette entreprise).
Le budget médian en France pour produire un documentaire est de 500000 euros, Kaizen aurait coûté 2 millions, largement financés par des sponsors. Donc les marques se voient à l’écran, beaucoup plus que dans d’autres films. Inoxtag a même participé directement à des publicités, par exemple pour SFR, spot dans lequel il déclare « je me suis rendu compte qu’on n’avait pas toujours besoin d’être connectés et scotchés à nos écrans. Sortons dehors, allons faire du sport, faisons de nouvelles rencontres. Bref, reconnectons-nous aux choses essentielles de la vie » ; le slogan étant « pour un monde digital plus sûr ». On peut savourer l’ironie. Le film n’est donc pas une œuvre isolée, il complète d’autres vidéos, d’autres récits et d’autres partenariats commerciaux.
Est-ce un bon documentaire ? Inoxtag est quasiment de tous les plans. Donc pour l’apprécier, il est primordial d’aimer le personnage, sa façon de parler, son « naturel » et sa bonne bouille, rire à ses blagues, être intéressé par ses problèmes de santé, bref compatir. Il n’est pas évident de parvenir à construire cette empathie durant le seul visionnage de Kaizen.
Kaizen n’est pas un documentaire sur la montagne (elle n’est qu’un décor), ni sur les alpinistes (ils ne sont que figurants), il ne s’intéresse pas à l’esprit d’équipe tant vantée (les comparses couillus n’apparaissent que brièvement), ni à la marchandisation de l’évasion (rien sur les tarifs, sur l’organisation), ni au tourisme de l’extrême (qui sont ces gens qui font la queue au sommet de l’Everest ?), et il n’accorde que peu de place aux sherpas (un tiers des morts annuels sur l’Everest sont des sherpas), aux guides, aux autochtones. Kaizen ne s’intéresse qu’à son héros et sa réussite personnelle.
Inès est ce petit chat filmé alors qu’il tente d’accéder au toit de la maison : on le voit réfléchir et hésiter, s’élancer et sauter, c’est mignon tout plein et on ne se pose aucune question sur le lieu du tournage ou sur la conception du toit, on est juste attendri et heureux pour ce chat. La vidéo du chat est innocente car elle ne nous questionne pas sur la finalité (pourquoi ce toit ?), l’environnement de l’action (où est-on ? Que doit-on savoir sur ce lieu ?) et le message y est simpliste (à force de pugnacité, la chat parvient à son but).
Pourtant, toute œuvre est évidemment politique, qu’elle l’affiche clairement ou non, que cela soit revendiqué ou délicatement suggéré, et c’est ce qu’un spectateur qui n’est pas intime d’Inès va ressentir, éprouver, c’est la couleur qui lui restera en tête après le visionnage.
Puisque l’œuvre comporte un message politique, quel est-il ? On l’a vu, l’objectif du producteur et du réalisateur n’est pas de parler de la nature à laquelle il faudrait se reconnecter, des sportifs de haut niveau, des méfaits du tourisme de masse, des effets de mode chez les riches, ou du dépassement de soi. On parle d’un jeune homme qui, grâce à une notoriété qu’il a su faire fructifier, peut assouvir quasiment tous ses désirs, y compris faire la queue au sommet de l’Everest. C’est long et tortueux, sûrement difficile pour lui, mais le chaton a finalement atteint le toit grâce à son équipe, son hélicoptère et ses équipements de marques.
Voici donc un gars issu d’un milieu populaire, devenu millionnaire sous les yeux de ses fans, année après année. Normal que les médias dominants accueillent à bras ouverts ce nouveau transfuge de classe dont le message est « croire en ses rêves », nouvelle figure de la méritocratie. Un joli conte comme Léa Salamé les adore pour une interview sur France Info toute en minauderies.
Le message probablement ressenti par les novices d’Inoxtag est moins « dépassons-nous et déconnectons des réseaux » que « avec de l’argent, on peut se lancer tous les défis ». Évidemment que l’ascension n’est pas chose aisée, mais il ne s’agit pas non plus d’un exploit sportif inouï puisque, durant la période du tournage, plus de 600 bourgeois ont atteint le sommet lors de la ruée annuelle.
Et comme le film accumule d’authentiques scènes publicitaires façon North Face, le capitalisme est bien présent à l’écran, il est un allié de l’aventure, voire sa finalité car il financera d’autres défis.
La réussite première du Kaizen est médiatique et commerciale : 310000 spectateurs (en seulement deux jours de projections) sont venus en salles découvrir un documentaire gratuitement visionnable en haute qualité sur Youtube. Les distributeurs et documentaristes critiquent la méthode et le fond, les alpinistes chevronnés se gaussent, les anticapitalistes médisent, les écologistes dénoncent, et le succès est là.
De plus, cet événement montre de manière éclatante que Youtube a définitivement remplacé la télévision : avec 11 millions de vues en 24 heures et 25 millions en 4 jours, Inoxtag explose les records et rivalise avec la meilleure audience de l’histoire de la télévision française (24 millions de téléspectateurs devant la finale de Coupe du monde 2022, France/Argentine).
D’ailleurs, la chaîne de Inoxtag a gagné plus de 300000 abonnés dès le lendemain de la diffusion, les recherches Google ont bondi et ses autres vidéos engrangent de nombreuses nouvelles vues. De quoi faire plaisir aux sponsors et publicitaires. Le budget investi dans le film a largement été remboursé par les recettes en salles, Inès et son équipe devrait en percevoir 500000 euros. Sur Youtube, Inoxtag a optimisé les recettes :« c’est gratuit, mais je vais mettre à masse de publicité » a-t-il déclaré.
L’autre grande réussite est d’avoir fédéré une solide communauté de fans, qui s’est considérablement agrandie ces derniers jours, et d’avoir inspiré quantité d’entre eux, parfois à petite échelle, parfois pour une totale remise en question aussi définitive qu’une décision adolescente. Cette aventure passionne parce qu’on y trouve ce qu’on avait même oublié : un certain goût de liberté (sécurisée avec une connexion SFR). Même si les valeurs prônées sont simples, on ne peut qu’être en accord avec les conseils qu’Inès délivre avec sa bonne humeur.
La question n’est pas « va-t-il y avoir encore plus de touristes dans l’Himalaya ? », puisque, le tarif se situant entre 55000 et 70000 euros pour une ascension, les p’tits français ne vont pas se ruer. Elle n’est pas non plus « Inoxtag est-il devenu multimillionnaire ? », il réussit financièrement oui, c’est juste un constat. Mais d’autres questions viennent en tête : a-t-il initié les jeunes à la montagne ? Aux enjeux écologiques ? Aux comportements addictifs ? Aux conditions de vie d’un sherpa ? On pourrait refaire à l’infini le documentaire pour qu’il aborde mieux ou plus profondément tel ou tel aspect, se concentrer sur les parents d’Inès, sur son équipe, sur les déchets et la pollution engendrés par l’expédition… La proposition d’Inoxtag est autre, elle est lui, un lui réinventé et mis en scène.
Donc la question en suspend est : que va faire Inoxtag de cette nouvelle popularité ? Il dit avoir conscience que ses messages touchent des dizaines de millions d’individus ; à grand pouvoir grande responsabilité dirait un super-héros. Alors comment utiliser cette puissance ? Une nouvelle Love Army ou une aventure aquatique d’Inès dans un sous-marin ? Se filmer à bord de son yacht acheté à Monaco ou s’engager en politique ?
« Et Dieu dans tout ça ? » l’a questionné une Léa Salamé pétrie de préjugés face au jeune français de père algérien (donc forcément musulman), « je ne suis pas croyant » a déclaré Inès. Toujours est-il qu’aujourd’hui beaucoup croient en Inoxtag.
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17.09.2024 à 19:53
admin
Du dubitatif, du mouaiseux, et la meilleur des joies que vous pouvez vous offrir, c’est de vous abonner : www.mouais.org/abonnements2024 À lire dans ce numero : Entretien avec Guillaume Meurice, edito de Ludivine Bantigny, convoi de l’eau, lutte contre mégabassines, enquête sur “la mafia municipale nicoise”, reportage en Palestine, camps climat en Allemagne, et des coups de griffe, des Quiz, des jeux, l’agenda de mouais, la lutteuse du mouais, une.. Read More
Cet article Mouais nouvelle formule : 44 pages et un poster central. Le numéro septembre octobre #52 “lutter”, vient de sortir. est apparu en premier sur MOUAIS.
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À lire dans ce numero : Entretien avec Guillaume Meurice, edito de Ludivine Bantigny, convoi de l’eau, lutte contre mégabassines, enquête sur “la mafia municipale nicoise”, reportage en Palestine, camps climat en Allemagne, et des coups de griffe, des Quiz, des jeux, l’agenda de mouais, la lutteuse du mouais, une anarchive “Athènes contre les JO” et le poster central détachable…
44 pages à lire en 2 mois.
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16.09.2024 à 14:43
admin
Ce lundi, la police a réprimé le dernier bastion d’opposition au projet d’autoroute A69 entre Castres et Toulouse. Connu nationalement pour ses actions pour protéger les arbres, Thomas Brail, grimpeur arboriste devenu l’une des figures de proue du mouvement contre ce projet absurde. En grimpant aux arbres notamment, comme dans son métier, et parfois jusqu’à la grève de la faim et de la soif. Entretien. Tu peux résumer le projet.. Read More
Cet article A69 : Thomas Brail, un arboriste en lutte contre une autoroute absurde est apparu en premier sur MOUAIS.
Le projet de l’A69, c’est 23 kilomètres d’autoroute entre Castres et Toulouse. Ce projet va artificialiser 400 hectares de terre agricole. Il a déjà rasé 17 hectares d’espaces boisés. Au-delà de ça, il y a plus d’une centaine d’agriculteurs sur le carreau, qui peinent à joindre les deux bouts puisque leur exploitation est morcelée par rapport à ce projet-là. C’est 90% d’avis défavorables sur l’enquête publique environnementale. L’autorité environnementale a donné un avis défavorable, le comité national de protection de la nature également. Malgré cela, le projet, qui date de plus de 30 ans, voit le jour. Il est porté par les laboratoires Pierre Fabre, très implanté dans le secteur. Ce n’est pas un projet d’utilité publique, mais pour une entreprise privée, puisque l’autoroute prend naissance aux pieds de l’établissement de Pierre Fabre. C’est tout cela qu’on dénonce.
On avait un peu espoir avec le Nouveau Front populaire, car ils se sont positionnés contre (bien que Carole Delga, présidente de la région Occitanie, défend le projet – N.D.LR.). Mais on voit bien qu’il y a un net recul des politiques aujourd’hui. On a l’exemple de Sivens qui s’est arrêté car il y a eu une catastrophe (mort de Rémi Fraisse par une grenade – N.D.L.R.). On espère que ça ne va pas en arriver là, mais on a toujours espoir que les recours sur le fond nous donnent raison. Maintenant, il est vrai qu’on a un sérieux problème avec les juridictions de la région. Tous les recours que l’on porte au tribunal sont toujours déboutés. Il y a une forte pression politique et des laboratoires Pierre Fabre. Cela pose la question de la séparation des pouvoirs.
Oui, il y a plusieurs zones qui sont déjà investies par des personnes qui luttent contre ce projet. Je suis très admiratif du travail qu’ils font. Parce qu’ils sont là en permanence. Moi, j’ai un travail, une maison, un fils, il y a l’école à gérer, il y a le boulot, j’ai une entreprise. Mais heureusement qu’il y a tous ces jeunes-là qui luttent sur le terrain. Et je pense que si j’avais leur âge, je ferais de même parce que parce qu’à partir du moment où on ne vous propose pas d’avenir, qu’est-ce qu’il vous reste ? Juste le fait de se battre pour se dire que c’était à nous de prendre les choses en main.
Je ne suis pas le seul. Ce mouvement s’est quand même pas mal propagé. Il y a de plus en plus de grimpeuses et de grimpeurs qui suivent un petit peu ce qui a été fait. Après, il y a d’autres mouvements qui émergent aussi un peu partout. Et tant mieux, il n’y a pas que le GNSA [Groupe national de surveillance des arbres – N.D.L.R.]. Je pense que la défense des arbres, aujourd’hui, elle passe par le côté physique, l’action, il faut monter dedans. Parfois, il n’y a que ça pour arriver à les sauver quand les tronçonneuses arrivent.
Oui, ça, c’était pour le projet de la Tour Eiffel, avec une bagagerie qui allait être construite au pied d’un des plus vieux platanes, plus âgé que la Tour Eiffel, que Gustave Eiffel avait clairement protégé lors de la construction de la Tour. Quand je vois qu’en 2024, on n’est pas fichu d’avoir la conscience que Gustave Eiffel avait pour ses arbres lors de la construction de la tour Eiffel, alors que maintenant on a besoin des arbres… On fait tout l’inverse, c’est triste.
Ouais, je suis jardinier et puis après j’ai dévié vers grimpeur arboriste. Mais bon, je sais faire les deux, je connais les deux. Je sais planter des arbres, j’en ai planté des milliers dans ma vie.
Ils n’arrivent pas à comprendre la différence entre un arbre centenaire et un arbre jeune. Clément Beaune, ministre des Transports a dit en substance : « oui, on supprime des arbres, mais on en replante dix fois plus ».
C’est ce qu’on dit aujourd’hui dans les médias, et tout le monde l’a bien compris ; le discours qu’on porte aujourd’hui, il fait écho. Clairement, on dit que quand on coupe un vieil arbre qui a 200 ou 300 000 feuilles, quand vous implantez un jeune, il n’y a que 20 ou 30 feuilles, ça ne marche pas. C’est le ratio qui importe, c’est le nombre de feuilles qui importent dans un arbre. Si vous coupez un arbre de 100 ans, il va falloir attendre cent ans avant que celui que vous avez planté donne les mêmes bénéfices. Tout ça aujourd’hui, on le démonte clairement.
On dit aussi qu’à partir de 40 degrés, quand c’est des épisodes qui durent plus longtemps, un arbre n’est plus en capacité d’absorber l’eau, ni par les poils absorbants qui sont sous les feuilles, ni par les racines, ni par les lenticelles au niveau des écorces. Il n’y a plus rien qui absorbe l’eau, parce que l’arbre ferme son système hydrique. Vous avez beau arroser un arbre, s’il fait trop chaud, il ne prend plus l’eau. C’est pour ça que nos arbres crèvent aujourd’hui.
Oui, j’avais déjà commencé depuis bien longtemps, ça faisait déjà 2-3 ans que j’étais actif. J’ai grimpé l’arbre et puis j’ai commencé à faire une vidéo en disant voilà, je suis dans un arbre. Puis la mobilisation s’est mise en place.
Je pense que le discours que je porte, il est cohérent parce que c’est mon métier déjà, je sais de quoi je parle. J’ai fait des conférences avec les plus grands, avec Francis Hallé. Je côtoie beaucoup de personnalités et je suis reconnu, je pense, aujourd’hui dans le milieu. C’est assez affligeant parce que c’est un peu comme le discours que portent les scientifiques. Je n’aimerais pas être un scientifique aujourd’hui, m’être tapé dix ou douze ans d’études pour produire un rapport et qu’on vous dise, ben non, oui, finalement, d’accord, mais bon, merci. Ça n’a aucun sens. Et je préférerais toujours suivre les avis d’un scientifique que les avis d’un politique qui nous disent on va s’en sortir, ne vous inquiétez pas, tout va bien. Après, je pense que je coche un peu toutes les cases qui plaisent aux médias : père de famille qui porte un discours parce qu’il a peur pour son gamin, chef d’entreprise.
Je ne suis pas militant, je ne suis pas écologiste, je ne suis pas activiste, je ne suis rien du tout. Moi je suis un père de famille qui est sur cette planète avec son gamin et qui se dit, demain qu’est-ce qu’on fait si on ne se bouge pas aujourd’hui ? C’est tout. Donc moi j’essaie de casser cette image de l’activiste, écologiste et militant. Mais ça veut dire quoi en fait ? Ça ne veut rien dire, on est tous dans la galère. Donc arrêtons de nous mettre tous les uns et les autres dans des boîtes pour mieux nous diviser. Je suis dans des arbres pour les sauver et si tout le monde faisait un peu pareil, on s’en sortirait, je pense.
C’est le cœur qui a parlé. Je suis allé m’accrocher dans un arbre en 2019 à Mazamet (Tarn). C’est la première action que j’ai faite. Je l’ai faite parce que c’est mon métier, parce que j’aime les arbres. Mais je reste persuadé qu’il faut des têtes. Il faut des personnes qui incarnent, des personnes vers qui l’opinion publique puisse se se retrouver, s’identifier. Je ne sais pas en quoi c’est mal. Alors après il ne faut pas idéaliser, il ne faut pas glorifier non plus C’est clair que ça m’est tombé dessus. C’est un peu comme dans Spider-Man, son oncle lui dit qu’un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. Donc quand on a les micros qui viennent vers vous et que vous devez porter une parole, il faut que cette parole soit légitimée au niveau du collectif. Il est vrai que j’ai fait l’objet d’attaque parfois en disant que je personnifiais la lutte mais je n’ai rien voulu de tout ça. Si quand je fais une vidéo il y a 60 000 ou parfois jusqu’à 1 million de vues, why not ? Et tant mieux si ça sert à la lutte. Donc, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe. Dans quelques années, j’ai dit que quand le GNSA sera bien stable, je me retirerai parce que je ne me sens pas indispensable. Je me retirerai, d’autres prendront le relais et la machine sera lancée.
Pendant 40 jours, j’ai fait une grève de la faim. La grève de la soif, j’ai fait 14 heures, et puis après, j’ai perdu connaissance. Ce n’est pas des choses que je préconise de faire et je ne les recommande à personne et surtout pas aux jeunes qui ne savent plus quoi faire aujourd’hui. Je leur demande de ne pas faire ce qu’on a fait. Mais l’impact que ça a eu, c’est qu’aujourd’hui, tu me demandes une interview et c’est que tout le monde me demande à ce qu’on puisse parler, à ce qu’on puisse dénoncer ces projets écocides. Donc, oui, c’est réussi, clairement, puisqu’on est sur le devant de la scène médiatique. Quand je me dis qu’il faut chaque fois en arriver là pour qu’on soit entendu, c’est triste.
Non, il y a toujours une contestation. Il y a les deux, il y a le juridique qui est en cours. Il se passe toujours des choses. De toute façon, ce projet-là, il va traîner des casseroles au cul pendant longtemps parce que personne n’en veut et parce qu’il fait du bruit à l’international. L’idée, c’est que même si on venait à ne pas arriver à le stopper et qu’il voit le jour, je pense qu’ils vont quand même réfléchir à deux fois maintenant s’ils veulent nous coller des projets comme ça, parce que les citoyens, ils en auront ras-le-bol. Voilà, c’est ce qu’il faut se dire. Il faut aussi donner un peu d’espoir pour l’avenir.
Ils ont investi au capital de l’A69. C’est vraiment leur bout de route. On l’a su par l’enquête qu’a menée la cellule d’investigation de France Inter. Ils ne sont pas tout blancs.
Oui, c’est pour ça qu’on est vent debout, c’est que cette nationale n’est pas du tout saturée, elle est fluide. Moi je suis à Toulouse pour prendre le train. On ne fait pas une autoroute alors qu’il y a une nationale qui n’est pas saturée. Ils ont foutu une douzaine de ronds-points, ce qui signifie que nous, utilisateurs de la nationale, on va perdre maintenant du temps en l’empruntant, puisqu’il y a des déviations de partout.
« Trouver les arbres », ça s’appelle. C’est un portrait de comment un simple citoyen, à un moment donné, se retrouve en première ligne médiatique au niveau national. C’est mon histoire. L’importance des arbres, leur rôle essentiel. Ce n’est pas le but de parler que de moi. C’est de dire qu’on a besoin des arbres, tout simplement.
Mais maintenant, on commence à en avoir une vision un peu utilitariste. Qu’est-ce que tu penses des solutions fondées sur la nature, par exemple la plantation d’arbres en ville pour créer des îlots de fraîcheur. Est-ce que les agroforêts comme ça peuvent remplacer un petit peu ce qu’on a détruit ?
Le problème aujourd’hui, c’est qu’on a compris qu’il fallait remettre des arbres dans les villes, donc on en remet. Mais en fait, ce qui nous intéresse avant tout, c’est comment les arbres vont pouvoir nous être utiles. Donc oui, on plante des arbres parce qu’on veut qu’ils fassent frais dans les villes. Mais moi, ce que je dénonce aujourd’hui, c’est qu’il faudrait planter des arbres pour qu’ils nous servent, c’est sûr, mais aussi de savoir comment ils vont être bien dans ce milieu-là, comment ils vont être bien entretenus, comment on va les chérir, tout simplement. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. On plante des arbres parce qu’il faut planter des arbres, parce qu’on sait qu’il fait chaud dans les villes. Ça s’arrête là, en fait, la pensée aujourd’hui.
Je pense qu’il y a une vraie prise de conscience quand même. C’est aussi pour ça que nous on fait du bruit médiatiquement parce que je pense que n’importe quel citoyen lambda, il a compris aujourd’hui que quand il est en ville, il vaut mieux se promener sous une allée d’arbre plutôt que dans une avenue, une rue où il n’y a que du goudron et du bitume. Des livres comme celui de Peter Wohlleben, « La vie secrète des arbres » nous aide. Mais en fait, j’ose le dire, on ne connaît rien des arbres. Il n’y a pas de cerveau, on ne sait pas comment ça fonctionne c’est un truc qui me fascine au plus haut point. Alors qu’un animal, on sait que c’est un peu foutu comme nous. Tu as plus le cerveau, tu tombes, il n’y a plus rien et tout est terminé. Mais un arbre, on ne sait rien. Et ce alors que, ils sont bien plus résilients face aux épisodes climatiques. Ils ont subi tellement de changements. Ils essayent de s’adapter alors que les animaux ou les êtres humains, on périclite vite fait. Je trouve que le végétal, le vert, a une résilience assez impressionnante. Il faudrait que ce soit enseigné dans les écoles, pour que ça marque, pour que ça fonctionne mieux plus tard.
Non, je ne suis pas blasé, je suis en colère. Mais la colère, elle est moteur. Et par contre, je ne suis pas haineux parce que la haine, elle est destructrice. Moi, je suis juste en colère. J’en ai besoin, cette colère, pour avancer. Sinon, ça ne fonctionne pas. Je fait ce que j’ai à faire et si personne ne s’y met, tant pis, c’est pas grave. Comme je dis, j’avais lu un bouquin sur la guerre 39-45, c’est à peu près 200 000 résistants qui ont sauvé la France. Il y avait pas mal de personnes qui attendaient que ça se passe. Il ne faut pas les attendre. Les résistants, ils ne sont pas nombreux. Mais en tout cas, ce sont eux qui œuvrent pour que demain, les personnes qui ne font rien puissent profiter un petit peu encore de cette planète. Une fois qu’on a bien agréé ça dans notre cerveau, on n’est plus dépité. Voilà, on avance, on s’est dit qu’il faut le faire, c’est comme ça.
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04.09.2024 à 16:13
admin
Mouais relaye le communiqué de nos camarades de Rapport de Force, média indépendant dont le compte Twitter-X a été brutalement et sans appel supprimé par le réseau social d’Elon Musk. Avec des dizaines d’autres médias, nous demandons que leur compte soit rétabli. Sans avertissement, sans justification et sans possibilité de faire appel, le 27 août, X (anciennement Twitter) a suspendu le compte de Rapports de force, qui compte près de.. Read More
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Sans avertissement, sans justification et sans possibilité de faire appel, le 27 août, X (anciennement Twitter) a suspendu le compte de Rapports de force, qui compte près de 12 000 abonné·es. Il est plausible qu’un raid de signalements malveillants ait été à l’origine de cette suspension. Toutefois, l’absence totale d’explication de la part du réseau social d’Elon Musk laisse planer le doute. Cette situation soulève de profondes inquiétudes, car elle touche à la liberté d’expression et à la liberté de la presse. La presse indépendante joue un rôle fondamental en tant que contre-pouvoir dans une démocratie. Depuis sept ans, les journalistes de Rapports de force s’attachent à documenter l’actualité des mouvements sociaux, offrant une couverture souvent absente des grands médias traditionnels. Ce travail est indispensable pour donner la parole à celles et ceux qui luttent pour leurs droits et pour exposer des réalités souvent occultées. Censurer Rapports de force revient non seulement à museler une voix indépendante, mais aussi à remettre en question le pluralisme de la presse. Que des réseaux sociaux puissent suspendre des comptes, sans préavis ni recours, interroge sur l’avenir pour la liberté de la presse sur ces espaces numériques, qui sont devenus des vecteurs majeurs de l’information.
Nous sommes bien conscients que des alternatives à X (Twitter), telles que Mastodon, doivent être développées pour sortir de cette impasse, et nous y sommes présents. Mais celles-ci restent modestes dans leur portée.
En attendant, nous ne pouvons accepter ce précédent dangereux. Loin de n’être qu’un simple incident, la suspension du compte de Rapports de force sur X (Twitter) soulève des questions fondamentales sur la concentration du pouvoir médiatique entre les mains de quelques grandes entreprises et sur l’arbitraire de leurs décisions. Nous réclamons que X (Twitter) rétablisse immédiatement le compte de Rapports de force sur sa plateforme. La liberté de la presse ne peut être négociée, elle doit être protégée et respectée en toutes circonstances.
Médias signataires : Acrimed, Afrique XXI, Alternatives Économiques, Au Poste, Bastamag, Blast, Cerises la coopérative, Chabe, Disclose, Fakir, IPNS, L’Alterpresse68, L’arrière Court, La Brèche, La Déferlante, La revue Pays, Le Ch’ni, Le courrier des Balkans, Le Media-TV, Le Poing, Le Poulpe, Les Jours, Lisbeth Media, Médiacités, Mediacoop, Mediapart, Mediavivant, Mouais, Orient XXI, Politis, Rapports de force, Reflets-info, Reporterre, Rue89 Bordeaux, Rue89 Lyon, Rue89 Strasbourg, Streetpress,
Autres signataires : Louise Bihan (journaliste à l’Insurgée), la CGT, SNJ-CGT, Simon Duteil (ex co-délégué général de Solidaires), Fonds pour une presse libre, FSU, Les Autres Voix de la Presse, SNJ-Solidaires, Solidaires 34 et 69, SPIIL, Union syndicale Solidaires, Youpress, Michael Zemmour (économiste)
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28.08.2024 à 16:31
admin
Ca y est. Votre cher mensuel dubitatif se donne un nouvel élan. Nouvelle adresse mail pour les newsletters, nouvelle formule, site en réfection très prochaine (aide bienvenue, s’il y a des webdesigner dans l’assistance). Alors que nous sommes arrivé au 52ème numéro à paraître ce mois de septembre, il a été établi en conférence de rédaction que le format mensuel devenait trop difficile à tenir. Nous changeons donc de périodicité.. Read More
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Ca y est. Votre cher mensuel dubitatif se donne un nouvel élan. Nouvelle adresse mail pour les newsletters, nouvelle formule, site en réfection très prochaine (aide bienvenue, s’il y a des webdesigner dans l’assistance).
Alors que nous sommes arrivé au 52ème numéro à paraître ce mois de septembre, il a été établi en conférence de rédaction que le format mensuel devenait trop difficile à tenir. Nous changeons donc de périodicité et passons à un bimestriel, soit un numéro tous les deux mois, six par an. Le tarif au numéro passe de 4 euros à 7 euros. Celui à l’abonnement ne bouge pas pour l’instant. Quarante petits euros à l’année. Pour s’abonner c’est par là : https://mouais.org/abonnements2024/
Nous souhaitons, avec cette pagination accrue, remettre plus de contenus courts, drôle et satirique, comme à nos débuts, mais également laisser plus de place à la maquettiste, aux illustrations, prendre plus de temps pour nos enquêtes, aérer le journal.
Nouvelles rubriques à venir également : chroniques culture (rap, ciné, jeux), des pastilles, des ficanasseries (commérages en niçois), des quizz. Et toujours de l’actu d’aqui (d’ici), du local donc, mais aussi de l’international, en poursuivant de relater le massacre en Palestine, des coups de griffe du chat noir, des analyses, reportages et enquêtes.
Ce numéro de rentrée sera à notre image : dubitatif et anarcho-vénère. Un édito de l’historienne Ludivine Bantigny, une interview de Guillaume Meurice, un dossier central sur les luttes locales, luttes de territoire (convoi de l’eau, mégabassines, récits de Cisjordanie et lutte contre l’A69, contre l’extension de l’aéroport de Nice).
Pour franchir un cap, nous avons besoin de vous : ce journal est aussi et surtout le vôtre. N’hésitez pas à nous partager vos contenus, vos illustrations, à nous aider à le diffuser autour de vous. Par exemple en devenant diffuseur militant avec l’envoi de cinq Mouais par numéro, à vendre dans vos cercles, l’abonnement est offert en échange. Si vous avez également des points de diffusion à proposer nous sommes preneurs (librairies, cafés, bar, kiosque).
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On vous laisse là-dessus.
Mouais est bien vivant et plus vivace que jamais.
Viva ! (comme on dit par chez nous)
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