02.12.2025 à 11:00
Human Rights Watch
(Washington) – Les mesures prises par l'administration Trump en matière d'immigration aux États-Unis compromettent la protection des personnes sans papiers ayant été victimes de crimes, en entravant la capacité des forces de l'ordre à enquêter sur ces crimes en vue de poursuivre leurs auteurs, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui.
2 décembre 2025 “We Need U”Le rapport de 50 pages, intitulé « “We Need U”: How the U Visa Builds Trust, Counters Fear, and Promotes Community Safety » (« “On a besoin du visa U” : Comment le visa U renforce la confiance des victimes, atténue la peur et favorise la sécurité communautaire »), constate que la politique d'expulsion de migrants menée par l'administration Trump sape les programmes fédéraux de visas qui offrent aux victimes de crimes la possibilité d'obtenir un statut de résident légal lorsqu'elles coopèrent avec les forces de l'ordre. Les nouvelles directives en matière d'application de la loi, qui permettent notamment aux agents du Service américain de l'immigration et des douanes (Immigration Customs Enforcement, ICE) d'appréhender des personnes dans des lieux auparavant sûrs tels que les tribunaux et les centres de santé, ont un effet fortement dissuasif sur des personnes migrantes qui souhaiteraient signaler des crimes à la police, ou demander une ordonnance de protection.
« Malgré les discours musclés de l'administration Trump sur la répression de la criminalité, ses politiques et mesures en matière d’immigration profitent à des auteurs de violences, désormais moins exposés au risque d'être arrêtés et poursuivis », a déclaré Sara Darehshori, consultante auprès de Human Rights Watch et auteure du rapport. « Si l'administration Trump souhaite sérieusement lutter contre la criminalité, elle devrait étendre et améliorer les programmes de visas qui permettent aux victimes de signaler les crimes, sans crainte d'être elles-mêmes expulsées. »
Le Congrès a créé le visa U en 2000 pour aider à lutter contre la violence sexiste, reconnaissant que les femmes et les enfants sans papiers sont particulièrement vulnérables aux abus et peu susceptibles de signaler les crimes par crainte d'être expulsés. Dans le cadre du programme de visas U, les victimes de viol, de violence domestique, de traite et de 25 autres types de crimes peuvent obtenir un statut de résident-e légal-e si elles coopèrent avec les forces de l'ordre ou un autre organisme de certification, s’il est avéré qu’elles ont subi d’importants abus physiques ou mentaux importants, et si elles sont par ailleurs admissibles aux États-Unis.
Ce programme vise à empêcher les agresseurs d'utiliser la menace d'expulsion comme moyen de dissuasion pour empêcher les victimes de contacter la police, et à renforcer la capacité des forces de l'ordre à enquêter sur ces crimes, en vue de poursuivre leurs auteurs.
Entre mai et octobre 2025, les chercheuses ont mené 43 entretiens dans diverses villes des États-Unis, avec des agents des forces de l'ordre, des avocats spécialisés en droit de l'immigration, des victimes de crimes et des activistes, afin de mieux comprendre l'impact du programme de visas U.
Dans un cas, par exemple, le compagnon d'une femme l'a brutalement battue en juin 2023. Il l'a frappée à coups de poing, lui a coupé la main et le visage avec un couteau, l'a frappée avec une bouteille et l'a étranglée jusqu'à ce qu'elle perde connaissance. Il a menacé de la tuer, lui disant qu'elle finirait dans un « sac mortuaire ». Elle a été transportée aux services d’urgences d'un hôpital, où elle a été soignée pour de graves lacérations et une fracture de l'épaule. Pendant son séjour à l'hôpital, elle a trouvé le courage de signaler les violences au département de police de New York, une décision qui, selon elle, lui a sauvé la vie. Elle attend désormais son visa U.
« Les agresseurs recourent régulièrement à des menaces pour empêcher leurs victimes de contacter la police, soulignant qu’elles risquent d’être expulsées du pays, et/ou séparées de leurs enfants », a expliqué Sara Darehshori. « Les tactiques agressives utilisées par l'agence ICE sous l'administration Trump risquent de rendre les survivantes plus réticentes que jamais à demander l'aide dont elles ont besoin. »
Une enquête menée par l'ONG Alliance for Immigrant Survivors renforce les craintes que les pratiques répressives de l'administration Trump aient donné aux agresseurs un outil puissant pour contrôler leurs victimes. Sur les 170 activistes et avocats interrogés à l'échelle nationale au printemps 2025, plus de 75 % ont déclaré que leurs client-e-s avaient peur de contacter la police et plus de 70 % ont déclaré que leurs client-e-s hésitaient à se rendre au tribunal pour y livrer leur témoignage.
Les avantages du programme de visas U vont au-delà des cas de violence conjugale et des communautés immigrées. Des études établissent un lien entre les auteurs de violences domestiques et un large éventail d'autres crimes commis en dehors du domicile. Les personnes interrogées ont décrit des cas où des victimes immigrées ont apporté une aide essentielle dans des affaires de vol de salaire, de meurtres, de vols, de crimes haineux et de viols ou d'agressions sexuelles commis par des inconnus. Elles ont également décrit les nombreux dispositifs prévus dans le cadre du programme de visas U, pour détecter les fausses déclarations.
Le programme de visas U est loin d'être parfait, a observé Human Rights Watch. Le nombre de visas disponibles est trop limité, et les victimes doivent parfois attendre des années avant l’obtention d’un visa. La procédure peut aussi parfois sembler arbitraire, car les forces de l'ordre disposent d'un large pouvoir discrétionnaire pour décider de délivrer ou non l'attestation requise pour qu’une demande soit acceptée.
Néanmoins, ce programme est un outil essentiel pour assurer la sécurité de nombreuses personnes aux États-Unis, et pour permettre au gouvernement de respecter ses obligations en matière de droits humains, notamment en matière de lutte contre la violence sexiste et de protection des victimes. Le Congrès devrait adopter des mesures visant à renforcer et à étendre ce programme, a déclaré Human Rights Watch.
« L’obtention d’un visa U aide à surmonter la peur qui réduit souvent les survivantes au silence, et leur fournit la sécurité nécessaire pour demander de l'aide et soutenir les enquêtes sans mettre en danger le bien-être de leur famille », a déclaré Saloni Sethi, commissaire du Bureau du maire de New York chargée des questions de violences domestiques et sexistes. « Renforcer et rationaliser le processus d'obtention du visa U permettrait à davantage de survivantes signaler les abus et de recevoir le soutien qu'elles méritent ; cela aiderait à poursuivre les auteurs de ces crimes, et contribuerait à renforcer la sécurité à New York. »
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02.12.2025 à 02:00
Human Rights Watch
(Bangkok, le 2 décembre 2025) – Le gouvernement de Hong Kong devrait garantir une enquête transparente et s’assurer que les responsables des actes répréhensibles liés à l'incendie résidentiel qui a fait au moins 151 morts et 79 blessés soient tenus de rendre des comptes, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.
Le 26 novembre, un incendie s'est déclaré à Wang Fuk Court, un complexe résidentiel en cours de rénovation. Les enquêtes préliminaires du gouvernement ont constaté que certains matériaux de construction recouvrant les huit bâtiments ne respectaient pas les normes de sécurité incendie et 13 personnes liées à l'entreprise de maintenance ont été arrêtées pour homicide involontaire. Les autorités de Hong Kong devraient créer une commission indépendante pour enquêter sur l'incendie, cesser de réprimer les critiques et abandonner les charges retenues contre les trois personnes arrêtées pour leur militantisme pacifique.
« L’incendie de Wang Fuk Court soulève de graves inquiétudes quant à la répression exercée par le gouvernement chinois sur ce qu’étaient auparavant des médias libres, un parlement démocratique et une société civile dynamique à Hong Kong, et quant à l’impact de cette répression sur les questions de surveillance gouvernementale et de sécurité », a déclaré Elaine Pearson, directrice de la division Asie de Human Rights Watch. « Il est crucial que les individus qui demandent des réponses concernant cet incendie tragique ne soient pas traités eux-mêmes comme des criminels. »
Depuis l’incendie, les demandes pour que le gouvernement rende des comptes se sont multipliées. Les habitants de Wang Fuk Court avaient déjà protesté contre le recours à cette entreprise de maintenance présentant un bilan médiocre en matière de conformité, invoquant la manipulation de soumissions d'offres et la corruption. Ils avaient également déposé des plaintes relatives à la sécurité, notamment concernant les matériaux de construction, que les autorités ont ignorées, selon les médias.
Les autorités de Hong Kong ont réprimé les critiques et initiatives citoyennes pacifiques. Le 28 novembre, des centaines de personnes se sont rassemblées à proximité de Wang Fuk Court pour faire des dons et distribuer des fournitures aux victimes. Mais à mesure que cette initiative gagnait en popularité, le gouvernement a envoyé la police, a exigé que les bénévoles partent, et fait prendre le contrôle du site par des employés du gouvernement.
Le 29 novembre, la police a arrêté Miles Kwan Ching-fung, un étudiant universitaire qui avait lancé une pétition en ligne, réclamant une enquête indépendante. Kwan aurait été arrêté pour présomption d’« intention séditieuse », un crime contre la sécurité nationale. Bien qu'il ait été aperçu quittant le poste de police le 1er décembre, la police n'a divulgué aucune information concernant l'affaire. La pétition en ligne de Kwan et le compte Instagram associé ont été supprimés.
Le 1er décembre, des médias locaux ont indiqué que la police de la sécurité nationale avait arrêté deux personnes – un bénévole qui portait secours aux victimes et l'ancien conseiller de district Kenneth Cheung Kam-hung – soupçonnées d'« incitation à la haine contre le gouvernement ». Là encore, la police n'a fourni aucune information.
Le chef du Bureau de la sécurité de Hong Kong, Chris Tang Ping-Keung, a accusé des personnes de diffuser de la désinformation et a qualifié de tels actes de « déstabilisateurs pour Hong Kong ». Le Bureau du gouvernement chinois pour la sauvegarde de la sécurité nationale à Hong Kong a averti que tout acteur « anti-Chine et anti-Hong Kong » qui tenterait d’utiliser la catastrophe pour « inciter à la haine envers le gouvernement » serait puni en vertu des lois draconiennes de la ville sur la sécurité nationale.
Les autorités de Hong Kong ne devraient pas réagir aux critiques publiques qui suivent les catastrophes d'une manière similaire au gouvernement chinois, a déclaré Human Rights Watch. Après le tremblement de terre du Sichuan en 2008, la collision ferroviaire à grande vitesse de Wenzhou en 2011 et l'épidémie de Covid-19 à Wuhan en 2022, les autorités chinoises ont emprisonné des citoyens appelant à rendre des comptes, ont réduit au silence des lanceurs d’alerte, des victimes et leurs familles, ont censuré des informations, et ont même détruit des preuves.
En revanche, les autorités de Hong Kong avaient réagi à un incendie meurtrier en 1996, alors que Hong Kong était encore une colonie britannique, en menant une vaste enquête indépendante ayant permis d'améliorer les normes de sécurité des bâtiments.
L'oppression actuelle à Hong Kong n'a pas complètement dissuadé les gens d'exprimer publiquement leurs opinions. Des milliers de Hongkongais ont déposé des fleurs près de Wang Fuk Court. Après l’arrestation de Kwan, des Hongkongais de l’étranger, notamment ceux qui ont fui en raison des lois draconiennes sur la sécurité nationale, ont lancé une pétition en ligne pour exiger des comptes, et ont organisé des veillées et des manifestations en Australie, en Allemagne, au Japon, au Royame Uni, et dans d’autres pays.
« Le gouvernement de Hong Kong devrait mettre en place une enquête indépendante sur l'incendie au lieu de menacer d'arrêter les personnes qui posent des questions difficiles », a conclu Elaine Pearson. « Cette tragédie est irréversible, mais les autorités peuvent éviter de l'aggraver en exigeant que les responsables – y compris des représentants du gouvernement – rendent des comptes pour leurs actes et en indemnisant adéquatement les victimes. »
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Articles
Yahoo/AFP TV5Monde Libération
Le Parisien Ouest-France Journal de Montréal
01.12.2025 à 09:30
Human Rights Watch
(Genève, 1er décembre 2025) – Le traité international qui interdit les mines terrestres antipersonnel sauve des vies civiles, mais est gravement menacé par le retrait de certains pays et par de nouveaux cas d’utilisation de ces mines, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch à l’occasion de la publication du rapport « Landmine Monitor 2025 ». Les États parties à ce traité devraient prendre des mesures immédiates et fermes pour contrer ces développements qui mettent des vies en danger.
Click to expand Image La couverture du rapport « Landmine Monitor 2025 », montrant des victimes de mines antipersonnel parmi les personnes qui manifestaient contre l’utilisation de ces armes, le 26 novembre 2024 à Siem Reap, au Cambodge, lors de la cinquième Conférence d’examen de la Convention d’Ottawa de 1997 sur l’interdiction de telles armes. © 2025 ICBLCe rapport de 163 pages évalue la mise en œuvre et le respect de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel de 1997, qui interdit de manière exhaustive l'utilisation des mines antipersonnel et exige des États parties qu'ils détruisent leurs stocks, déminent les zones touchées et viennent en aide aux victimes.
« Les gouvernements devraient clairement condamner la décision de certains États de se retirer de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, et rejeter toute tentative de suspendre les obligations fondamentales inscrites dans ce traité lors de conflits armés », a déclaré Mark Hiznay, directeur adjoint du programme Crises, conflits et armes de Human Rights Watch et co-rédacteur du rapport Landmine Monitor 2025. « Une réponse forte est essentielle non seulement pour sauver des vies, mais aussi pour préserver le respect du droit international humanitaire et des droits humains. »
Les mines antipersonnel tuent et blessent des personnes de manière indiscriminée. Elles sont généralement posées manuellement, mais peuvent également être dispersées par des avions, des roquettes, des tirs d'artillerie, des drones ou des véhicules spécialisés. Les mines terrestres non déminées restent dangereuses jusqu'à ce qu'elles soient localisées et détruites. La présence de mines dans des terres est susceptible de provoquer le déplacement de civils, d’entraver l'acheminement d'aide humanitaire et d’empêcher les activités agricoles.
Au 1er décembre 2025, 166 pays avaient adhéré au traité, dont les Îles Marshall et Tonga en 2025.
Cinq États ont toutefois décidé de se retirer de la Convention en 2025, invoquant des préoccupations liées à la sécurité régionale. Le 27 juin, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont déposé leurs notifications de retrait, suivies de la Finlande le 10 juillet et de la Pologne le 20 août. Ces retraits prendront effet six mois après ces dates respectives, si ces États ne reconsidèrent pas leur position ou ne s'engagent pas dans un conflit armé pendant cette période.
Au moins 22 États parties, le Comité international de la Croix-Rouge et la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL), ainsi que le Secrétaire général des Nations Unies, plus de 100 lauréats du prix Nobel et d'autres personnalités éminentes ont exprimé leur profonde inquiétude face à ces retraits. Au moins 80 000 personnes à travers l'Europe ont signé une pétition exhortant ces cinq pays à ne pas se retirer du traité.
Le 21 juillet, l'Ukraine a annoncé sa décision de suspendre ses obligations au titre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, jusqu'à la fin de la guerre avec la Russie, une mesure qui aussi suscité des inquiétudes. Cette suspension est illégale au regard du traité, selon lequel l’interdiction du recours aux mines ne peut être levée pendant un conflit armé. Plusieurs États ont fait part à l'ONU de leurs objections à la suspension de l'Ukraine.
La Russie a largement utilisé des mines antipersonnel en Ukraine depuis son invasion à grande échelle de ce pays le 24 février 2022, faisant des milliers de victimes et contaminant de vastes zones du territoire. Par exemple, les forces russes ont utilisé des drones quadricoptères pour disperser des mines antipersonnel dans la ville de Kherson et aux alentours, tuant des dizaines de civils et en blessant des centaines d’autres, ainsi que l’a signalé Human Rights Watch.
Play VideoAu cours de l'année écoulée, des photos et des vidéos publiées sur les réseaux sociaux indiquent les forces armées ukrainiennes ont accru leur recours aux mines antipersonnel, bien que l'ampleur de cette utilisation reste incertaine. L'Ukraine a demandé et reçu des mines antipersonnel des États-Unis en novembre et décembre 2024. Des informations accessibles au public suggèrent également que l'Ukraine fabrique des mines, notamment pour les déployer à l'aide de drones.
L'Ukraine continue d'enquêter sur les informations selon lesquelles en 2022, ses forces auraient utilisé des mines antipersonnel dans et autour de la ville d'Izioum, alors occupée par les forces russes.
Le rapport Landmine Monitor 2025 comprend également des documents attestant de la nouvelle utilisation de mines antipersonnel par les forces armées nationales de la Corée du Nord, de l'Iran et du Myanmar en 2024, et au cours du premier semestre 2025.
En juillet 2025, lors des affrontements frontaliers avec le Cambodge, la Thaïlande a accusé les forces militaires cambodgiennes d'avoir posé des mines antipersonnel le long de la frontière, et des informations ont fait état de soldats thaïlandais blessés par des mines antipersonnel. Le Cambodge a nié ces allégations.
Des groupes armés non étatiques ont utilisé des mines terrestres dans au moins 13 pays en 2024 et au cours du premier semestre 2025, en particulier dans la région du Sahel en Afrique, en Colombie, en Inde, au Pakistan et au Myanmar.
Le rapport Landmine Monitor 2025 a fait état d'au moins 6 279 personnes tuées ou blessées – dont 1 945 mortellement – par des mines terrestres et de restes explosifs de guerre dans 52 pays et régions en 2024. Les civils représentaient 90 % de toutes les victimes recensées, tandis que les enfants représentaient 46 % des victimes dont l'âge avait été enregistré.
En 2024, l'utilisation de mines par les forces armées du Myanmar a fait 2 029 victimes enregistrées dues aux mines terrestres ou aux restes explosifs de guerre, soit le nombre le plus élevé de tous les pays. Durant cette année, la junte du Myamar a posé des mines terrestres dans des maisons, des villages et des fermes, ainsi que Human Rights Watch l’a documenté.
La Syrie est classée deuxième dans ce triste bilan, avec 1 015 personnes tuées ou blessées par des mines antipersonnel en 2024, selon les chiffres du Landmine Monitor. En avril 2025, Human Rights Watch a documenté les dommages importants causés par la contamination massive par les mines terrestres dans toute la Syrie, notamment pour les personnes déplacées qui rentraient chez elles après la chute du gouvernement de Bachar al-Assad en décembre 2024.
Au total, 1 115 kilomètres de terres contaminées ont été déminés dans le monde en 2024, soit près de trois fois plus qu'en 2023, et 105 640 mines antipersonnel ont été détruites.
Malgré une augmentation du financement global de la lutte antimines, principalement en faveur de l'Ukraine, le financement international de ces efforts a diminué de 5 % en 2024. Les États-Unis sont restés le principal donateur, mais leur contribution a diminué de plus d'un tiers par rapport à 2023.
Certains États parties touchés par la contamination par les mines terrestres, en particulier ceux d'Afrique subsaharienne, ont continué à rencontrer des difficultés pour obtenir un soutien financier de la part des donateurs internationaux.
« Le déminage des terres contaminées est essentiel pour sauver des vies, et pour permettre aux habitants déplacés de retourner à leurs terres afin d’y reprendre leurs activités en tant que moyens de subsistance », a conclu Mark Hiznay. « Les États préoccupés devraient veiller à ce que tous les pays nécessitant des opérations de déminage bénéficient d'une aide à cet égard. »
Le rapport « Landmine Monitor 2025 » est publié par la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL), la coalition mondiale d'organisations non gouvernementales qui a reçu le prix Nobel de la paix en 1997. Human Rights Watch a cofondé cette campagne en 1992, et contribue chaque année au rapport Landmine Monitor.
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01.12.2025 à 06:00
Human Rights Watch
(La Haye) – Les pays membres de la Cour pénale internationale (CPI) devraient intensifier leurs efforts afin de protéger la Cour et les organisations de défense des droits humains qui font campagne en faveur de la justice, face aux attaques les ciblant, a déclaré Human Rights Watch dans un nouveau rapport. Ce document de 22 pages comprend des recommandations détaillées en vue de la 24ème session annuelle de l’Assemblée des États parties de la CPI, qui se tiendra à La Haye (Pays-Bas) du 1er au 6 décembre 2025.
En 2025, l’administration américaine du président Donald Trump a infligé des sanctions à des responsables de la Cour, à une experte des Nations Unies et à des organisations palestiniennes de la société civile ; ces mesures constituent une véritable attaque contre la justice et l’état de droit international. Les mandats d’arrêt russes émis en 2023 et 2024 à l’encontre de responsables de la CPI demeurent en vigueur. En juin, la Cour a fait face à une deuxième grave cyber-attaque à des fins d’espionnage.
« Les efforts de gouvernements pour porter atteinte à la CPI reflètent plus généralement les attaques contre l’état de droit mondial, avec pour objectif d’invalider les institutions qui entendent demander des comptes aux responsables des pires crimes », a déclaré Liz Evenson, directrice du programme Justice internationale de Human Rights Watch. « Les pays membres de la CPI devraient rester fermes dans leur défense de la Cour, afin que la justice impartiale puisse demeurer un pilier de l’ordre international fondé sur les règles. »
Cette session de l’Assemblée se tiendra dans un contexte d’importantes avancées réalisées par la CPI au cours de l’année écoulée. En mars, les Philippines ont remis à la Cour l’ancien président Rodrigo Duterte pour qu’il réponde à des accusations de crimes contre l’humanité liés à la tristement célèbre « guerre antidrogue » du pays, qui a tué des dizaines de milliers de personnes. En octobre, lors d'un procès qui a fait date, les juges de la CPI ont condamné un ancien chef de milice « Janjawid » pour des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis dans le Darfour, au Soudan.
Le 6 février, le président Trump a émis un décret présidentiel qui autorise à geler les avoirs et à interdire l’entrée sur le territoire des représentants de la CPI et d’autres personnes contribuant à son travail. Ce décret cherche clairement à protéger des responsables américains et israéliens face aux inculpations dont ils pourraient faire l’objet devant la CPI. En novembre 2024, les juges de la CPI ont émis des mandats d’arrêt contre le Premier ministre Benyamin Netanyahou et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant, pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité présumés commis à Gaza.
Le gouvernement des États-Unis s’est servi du décret présidentiel pour infliger des sanctions au Procureur de la CPI, aux deux procureurs adjoints, à six juges de la Cour, à la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 et à trois éminentes organisations palestiniennes de défense des droits humains : Al-Haq, le Centre Al-Mezan pour les droits humains et le Centre palestinien pour les droits humains.
Les sanctions des gouvernements ne devraient être employées que pour cibler ceux qui commettent des crimes graves, et non pas ceux qui documentent ces crimes ou rendent justice à leurs victimes, a déclaré Human Rights Watch.
Si elles ne sont pas contrôlées, les sanctions américaines pourraient faire gravement reculer la lutte mondiale contre l’impunité. Les personnes et les organisations ciblées par les sanctions des États-Unis ont perdu des financements, mais aussi l’accès à leurs comptes bancaires et à d’autres services financiers, et font l’objet de restrictions sur les médias sociaux. Afin de prendre un minimum de risques, les institutions financières respectent généralement les sanctions américaines et peuvent refuser de façon préventive des transactions avec la CPI, ce qui met en péril le travail qu’elle accomplit dans le monde entier.
Les pays membres de la CPI devraient profiter de l’occasion offerte par la session de l’Assemblée pour démontrer leur soutien fort en faveur de la Cour et les défenseurs des droits humains, a déclaré Human Rights Watch. Les États parties à la CPI ont fait des déclarations individuelles et conjointes condamnant les sanctions des États-Unis. Ils peuvent s’appuyer sur ces déclarations, lors de la session, pour montrer qu’ils ne seront pas dissuadés de la soutenir.
Les États membres devraient aussi s’engager à prendre davantage de mesures concrètes afin de limiter, voire, si c’est possible, annuler les effets des sanctions et d’autres mesures coercitives contre la Cour, ses responsables et les personnes coopérant avec elle, y compris au sein de la société civile. L’Union européenne n’a toujours pas agi pour utiliser sa loi de blocage, qui pourrait apporter une mesure de protection face aux effets illégaux des sanctions américaines. Lors de la session, les États membres de l’UE devraient appeler à l’application de cette loi.
Parmi les autres questions de l’ordre du jour de l’Assemblée, figure le fait que certains pays membres de la CPI – l’Italie, la Hongrie et le Tadjikistan – n’ont pas coopéré pour l’arrestation d’individus recherchés par la Cour qui se trouvaient sur leur territoire. Sans arrestations, la Cour ne peut pas rendre justice ; or elle compte sur les gouvernements pour procéder à ces arrestations.
C’est la première fois en 24 ans que l’Assemblée tiendra une séance plénière consacrée à la question de la non-coopération. Elle se penchera sur une décision des juges de la Cour selon laquelle la Hongrie a bafoué ses obligations légales lorsqu’elle a manqué d’arrêter le Premier ministre Benyamin Netanyahou lors de sa visite à Budapest en avril. Les pays membres ne devraient pas rater cette occasion de s’acquitter de leur responsabilité d’appliquer les conclusions des juges et de préparer le terrain pour traiter de telles futures décisions devant l’Assemblée, a déclaré Human Rights Watch.
Les pays membres de la CPI détermineront également le budget de la CPI pour 2026. La Cour a émis une requête conservatrice du point de vue comptable, axée avant tout sur la résilience de l’institution face aux défis actuels, parmi lesquels les sanctions américaines. Les pays membres devraient veiller à ce que la Cour dispose de ressources suffisantes dans son budget ordinaire de l’année prochaine, afin de la rendre aussi résiliente que nécessaire, tout en continuant à mener à bien son mandat international, a déclaré Human Rights Watch.
« La CPI a ses failles, mais elle demeure le tribunal de dernière instance pour des milliers de victimes et de proches qui n’ont aucun autre recours », a conclu Liz Evenson. « En montrant un front uni lors de leur session annuelle, les pays membres de la CPI peuvent adresser un message clair et fort : ils restent inébranlables et implacables dans leur lutte pour la justice. »
28.11.2025 à 21:13
Human Rights Watch
(Berlin, 28 novembre 2025) – La désignation par la Russie de Human Rights Watch comme organisation étrangère « indésirable », annoncée aujourd’hui par le ministère russe de la Justice, est un nouveau signe de la répression exercée par le Kremlin, a déclaré Human Rights Watch. Cette désignation équivaut à une interdiction de toute activité de l'organisation en Russie.
« Depuis plus de trois décennies, le travail de Human Rights Watch dans la Russie post-soviétique visait à inciter le gouvernement à respecter les droits humains et les libertés », a déclaré Philippe Bolopion, directeur exécutif de Human Rights Watch. « Notre travail n'a pas changé, mais ce qui a changé de manière dramatique, c'est l'adoption accélérée par le gouvernement de politiques dictatoriales, l'intensification alarmante de la répression et l'ampleur des crimes de guerre commis par les forces russes en Ukraine. »
Le bureau du Procureur général russe a pris la décision d'interdire Human Rights Watch le 10 novembre, comme l'indique le registre des organisations « indésirables » du ministère de la Justice mis à jour le 28 novembre. Les motifs officiels de cette décision n’ont pas été rendus publics.
En avril 2022, six semaines après le début de l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, les autorités russes avaient révoqué l'enregistrement du bureau de Human Rights Watch à Moscou, qui était opérationnel depuis 1992. Ce bureau avait alors dû fermer ses portes, mais le travail de Human Rights Watch au sujet de la Russie, qui avait débuté en 1978 durant l’ère soviétique, s’est poursuivi.
La loi sur les organisations « indésirables » est l'un des outils les plus puissants parmi l'arsenal de lois répressives adoptées par les autorités russes au cours des dernières années, afin de réduire au silence toute voix critique à l'égard du gouvernement, et de neutraliser les organisations civiques indépendantes.
En vertu de la Loi fédérale russe 129-FZ du 3 juin 2015, le parquet peut désigner comme « indésirable » toute organisation étrangère ou internationale qui porterait atteinte à la sécurité, à la défense ou à l'ordre constitutionnel de la Russie. Les organisations « indésirables » et leurs documents sont interdits en Russie. Les personnes qui continuent à collaborer avec ces organisations, que ce soit en Russie ou à l'étranger, s'exposent à des sanctions administratives et pénales, pouvant aller jusqu'à six ans de prison. Les autorités interprètent la notion de « collaboration » de manière large et arbitraire.
En 2021, Andrei Pivovarov, un activiste politique, a été condamné à quatre ans de prison pour des publications sur les réseaux sociaux qui, selon les autorités, faisaient la promotion d'Open Russia, un mouvement d'opposition politique désigné comme « indésirable ». En 2024, les autorités russes l'ont libéré et expulsé du pays. En mai 2025, un tribunal de Moscou a condamné Grigory Melkonyants, un éminent défenseur des droits humains et observateur électoral russe, à cinq ans de prison après que les autorités aient injustement assimilé le groupe russe d'observation électorale Golos au Réseau européen des organisations d'observation électorale, qualifié d'« indésirable » en 2021.
Suite aux condamnations des deux activistes, le projet « « Soutien aux prisonniers politiques » de Memorial, une importante organisation russe de défense des droits humains, les avaient qualifiés de prisonniers politiques.
Les autorités russes ont désigné au moins 280 organisations comme « indésirables » et les tribunaux ont prononcé des condamnations administratives et pénales, y compris par contumace, à l'encontre de centaines de personnes. Parmi les organisations désignées comme « indésirables » figurent d'éminentes fondations de la société civile, des organisations de défense des droits humains, des organisations environnementales, ainsi que des médias indépendants russes de premier plan. De nombreux membres et employés d’organisations ou médias qualifiés d’ « indésirables » ont dû quitter le pays et se réinstaller à l’étranger ; ces organisations ou médias ou dû s’enregistrer en tant qu'entités étrangères, afin de poursuivre leur travail.
Depuis son adoption en 2015, la loi sur les « organisations indésirables » a été critiquée à plusieurs reprises par les organismes et experts internationaux des droits humains notamment le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et la Commission de Venise, un organe consultatif du Conseil de l'Europe. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies, chargé d’interpréter le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie, ont exhorté les autorités russes à abroger ou réviser cette loi.
« Qualifier les organisations de défense des droits humains d'indésirables est une mesure effrontée et cynique », a conclu Philippe Bolopion. « Mais cela ne fait que renforcer notre détermination à documenter les violations des droits humains et les crimes de guerre commis par les autorités russes, et à veiller à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes. »
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Articles
LaLibre.be 7sur7.be LaPresse.ca
20Minutes.ch LeDevoir.com
28.11.2025 à 13:00
Human Rights Watch
(Nairobi) – Les inquiétudes concernant les irrégularités, l’ingérence politique et les pressions sécuritaires risquent de mettre en question la crédibilité et le caractère inclusif d’élections cruciales en République centrafricaine, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Le scrutin, prévu pour le 28 décembre, comprendra des élections présidentielle et législatives, mais aussi des élections municipales pour la première fois depuis des décennies.
« Les élections en République centrafricaine détermineront la trajectoire politique du pays pour les années à venir », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. « Malgré des progrès tangibles vers l'établissement de la paix, les obstacles à la participation de l'opposition, le dysfonctionnement administratif et les craintes d'un retour à la répression pourraient priver de leurs droits électoraux de larges pans de la population. »
Ces élections seront tenues à la suite du référendum constitutionnel très controversé de 2023, qui a supprimé la limitation du nombre de mandats présidentiels et a ainsi ouvert la voie à un maintien au pouvoir du président Faustin-Archange Touadéra pour une durée indéfinie. La période officielle de campagne doit débuter le 13 décembre.
Deux des personnalités politiques les plus éminentes du pays, les anciens premiers ministres Anicet-Georges Dologuélé et Henri-Marie Dondra, ont été empêchés de se présenter à l’élection présidentielle jusqu'au 14 novembre, date à laquelle le Conseil constitutionnel a décidé de les autoriser à se porter candidats. Cette décision tardive s'inscrit dans une tendance manifeste à des manœuvres administratives qui ont entravé de façon disproportionnée les politiciens de l'opposition tout en favorisant le parti au pouvoir, le Mouvement Cœurs Unis (MCU), a déclaré Human Rights Watch.
Les deux politiciens susmentionnés sont largement considérés comme les seuls adversaires crédibles à Faustin-Archange Touadéra. « Nous avons été dans les faits retardés pendant que le MCU se mobilisait », a déclaré Anicet-Georges Dologuélé à Human Rights Watch. Leur admission tardive dans la course soulève des questions quant à l’aspect équitable du choix présenté aux électeurs, a déclaré Human Rights Watch.
Ces développements interviennent alors que des doutes croissants subsistent quant à la capacité de l'Autorité Nationale des Élections à organiser le scrutin. Des défaillances dans la planification logistique, des listes électorales incomplètes et un personnel insuffisamment formé pour travailler dans les bureaux de vote, en particulier en dehors de Bangui, la capitale, sont des problèmes potentiels.
À Bangui, des activistes de la société civile ont fait part de leur inquiétude quant à la capacité des quelque 6 700 bureaux de vote à ouvrir à temps, voire à ouvrir tout court. Les électeurs ruraux, déjà entravés par l'insécurité et des moyens de transport limités, pourraient se retrouver dans les faits exclus. Ce manque de préparation non seulement sape la confiance dans le processus, mais fait également craindre que les chiffres de participation ne soient fortement biaisés en faveur de la capitale.
Le gouvernement a cherché à renforcer la confiance dans les élections en signant une série d'accords de paix avec divers groupes armés. Ces accords, qui éludent la question de la reddition de comptes pour les violations des droits humains et les potentiels crimes de guerre commis dans le passé, ont néanmoins créé des conditions de stabilité qui n'avaient pas été observées depuis des années. Cependant, plusieurs activistes de la société civile, journalistes, responsables de l'ONU et diplomates s'interrogent sur la durabilité de ces accords de paix, notamment celui signé le 19 novembre avec le Mouvement patriotique pour la Centrafrique (MPC).
Au cours de la dernière décennie, de nombreuses déclarations de paix ont rapidement échoué, les promesses de désarmement, d'inclusion politique ou de partage des ressources n'ayant pas été tenues. Un journaliste a déclaré à Human Rights Watch : « Les groupes armés ont été achetés pour garantir la tenue des élections. Le désarmement est devenu une arnaque… Nous verrons très probablement ces groupes reprendre leurs attaques une fois que l'argent sera épuisé… [jusqu'à] la prochaine série d'élections. »
Sans véritables efforts de désarmement, les accords actuels serviront davantage de gestes symboliques renforçant l'impunité que de mécanismes pour une stabilité durable, a déclaré Human Rights Watch.
L'environnement politique inégalitaire a incité de nombreux partis d'opposition à appeler à un boycott total des élections. Les dirigeants du Bloc républicain pour la défense de la Constitution (BRDC), une coalition d'opposition, ont déclaré à Human Rights Watch qu'ils étaient préoccupés par l'obstruction des candidats, par les lacunes administratives des autorités électorales et par le monopole du gouvernement sur les médias et les ressources de l'État.
Ce boycott, ainsi que les retards subis par Anicet-Georges Dologuélé et Henri-Marie Dondra, ouvriront très probablement la voie à un parlement dominé par le parti actuellement au pouvoir. Une législature sans une vraie surveillance par l'opposition risque de compromettre des institutions déjà faibles, a déclaré Human Rights Watch. « Nous avons besoin de contrôles sur l'exécutif », a expliqué un homme politique à Human Rights Watch. « Je crains que ces élections, déjà biaisées, ne constituent un test pour les principes de responsabilité démocratique. »
Une certaine rhétorique xénophobe en ligne suscite également des inquiétudes. Anicet-Georges Dologuélé a dû renoncer à sa nationalité française pour se porter candidat à l’élection présidentielle, car les personnes occupant des fonctions élevées ne sont pas autorisées à avoir aussi la citoyenneté d'un autre pays. Néanmoins, certains groupes associés au parti au pouvoir diffusent des déclarations en ligne pour débattre de « qui est un vrai Centrafricain », visant l'opposition. Au moment du référendum constitutionnel de 2023, les attaques en ligne contre ses opposants se sont intensifiées avant le vote.
Henri-Marie Dondra a déclaré à Human Rights Watch qu'en plus d'autres contraintes, deux de ses frères avaient été arrêtés, et l'un d'eux est toujours en détention provisoire sans inculpation, apparemment pour des raisons politiques.
Les élections se tiendront dans le contexte d'une réduction prévue de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA). Cette mission, qui a pour mandat de protéger les civils et de surveiller les violations des droits humains, ainsi que de soutenir les élections, devrait réduire sa présence, en partie en raison des contraintes budgétaires pesant sur les opérations de maintien de la paix de l'ONU et du souhait de certains États membres de voir leurs responsabilités transférées aux autorités nationales.
Une présence réduite de l'ONU pourrait exposer les communautés, en particulier celles dans les régions touchées par le conflit, à la contrainte et aux représailles des milices si les accords de paix ne sont pas respectés. Certains diplomates à Bangui ont déclaré à Human Rights Watch que la Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) et l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), qui pourraient surveiller les élections, n’ont toujours pas été confirmées un mois avant le scrutin et ne seront très probablement pas en mesure d'effectuer une surveillance en dehors de Bangui.
Malgré ces préoccupations, des activistes de la société civile et des journalistes font état de certaines améliorations. « La situation est meilleure qu’il y a quelques années, la répression s'est atténuée », a déclaré un journaliste à Human Rights Watch. « Cependant, nous devons rester vigilants. Une fois qu'il aura consolidé son contrôle total sur le parlement et les administrations municipales, le MCU contrôlera la manière dont nous discutons de la politique gouvernementale, de la sécurité et du développement. » Les autorités devraient veiller à ce que les journalistes et les activistes puissent continuer à exercer librement leur travail sans craindre de représailles ou de répression, a déclaré Human Rights Watch.
À un mois des élections, le gouvernement devrait lever tous les obstacles à la participation de l'opposition et garantir un accès égal à la campagne électorale et aux médias. Les autorités devraient libérer les personnes détenues sans fondement juridique crédible, y compris le frère d’Henri-Marie Dondra. Les partenaires internationaux de la République centrafricaine devraient surveiller le respect des normes internationales lors des élections, et la réduction de la présence des forces de maintien de la paix devrait être reconsidérée si les groupes armés attaquent à nouveau des civils.
« La République centrafricaine se trouve à un carrefour, et des élections crédibles ne pourront avoir lieu tant que des préoccupations légitimes ne sont pas prises en compte », a conclu Lewis Mudge. « La voie vers la stabilité du pays dépend de processus politiques inclusifs et compétitifs qui reflètent la volonté de toutes les communautés, et pas seulement de celles qui ont accès au pouvoir. »