18.12.2025 à 06:00
Human Rights Watch
(Washington, 18 décembre 2025) – Les membres de l’agence fédérale chargée de l'application des lois en matière d’immigration aux États-Unis sont couramment masqués et sans identification visible lors d’opérations, ce qui aggrave le caractère abusif et irresponsable de la campagne de déportation massive menée par l'administration Trump, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Ces pratiques généralisées et vaguement définies sont fondamentalement incompatibles avec l'obligation qui incombe aux États-Unis de veiller à ce que les abus commis par les forces de l'ordre fassent l'objet d'enquêtes et de sanctions.
« Les agents des forces de l'ordre devraient être identifiables, afin de pouvoir être tenus responsables en cas d’abus », a déclaré Belkis Wille, directrice adjointe de la division Crises, conflits et armes à Human Rights Watch. « Ce genre de pratique opaque devrait être une exception et non la norme, et est particulièrement alarmante dans le contexte des nombreux abus observés lors d’arrestations de personnes migrantes ces derniers mois. »
Depuis le retour au pouvoir du président Donald Trump en janvier 2025, son administration a mené une campagne abusive de rafles et d'arrestations de personnes migrantes – principalement des personnes de couleur – dans tout le pays. Bon nombre de ces raids visent des lieux où les Latino-Américains travaillent, font leurs achats, mangent et vivent. Des agents ont appréhendé des personnes dans des tribunaux et lors de rendez-vous prévus avec des agents de l'immigration, ainsi que dans des lieux de culte, des écoles et ailleurs. De nombreux raids ont été marqués par un recours soudain et injustifié à la force, créant un climat de peur dans de nombreuses communautés de personnes migrantes.
Ces opérations de contrôle de l'immigration ont souvent été menées par des agents de l'Autorité de l’immigration et des douanes (Immigration and Customs Enforcement, ICE) portant des masques et, dans certains cas, des vêtements civils. Les agents dissimulent régulièrement les insignes de leur agence et utilisent des véhicules banalisés pour arrêter des personnes se trouvant dans des voitures, des tribunaux, des écoles, des lieux de travail, des domiciles, ou dans la rue et dans les transports publics.
Sur son site web, l'ICE justifie la pratique répandue du port du masque par la « prévention du doxing » (c’est-à-dire la divulgation en ligne d’informations personnelles sur une personne). Ce type de justification généralisée et globale pour dissimuler l'identité des agents n'est toutefois pas compatible avec les obligations des États-Unis en matière de droits humains, sauf lorsque cette pratique est nécessaire et proportionnée pour répondre à des préoccupations particulières en matière de sécurité, selon Human Rights Watch. Lorsqu'elles sont appliquées de manière générale et par défaut, ces mesures constituent un obstacle à la responsabilité, ce qui est incompatible avec les obligations des États-Unis en matière de droits humains. L'anonymat affaiblit également l’efficacité de mesures dissuasives, favorise l'impunité et sape le respect des droits.
Human Rights Watch a mené des entretiens avec 18 personnes qui ont été témoins d'arrestations, ou qui ont été elles-mêmes arrêtées par des personnes non identifiables dans cinq villes des États-Unis depuis le 20 janvier. Toutes ces personnes ont évoqué leur sentiment de crainte lors de ces incidents, ainsi qu’un sentiment d’impuissance si elles étaient maltraitées, d'autant plus que les agents étaient non identifiables. Human Rights Watch a également examiné des dizaines de vidéos d'interpellations et d'arrestations menées par des agents masqués, et publiées sur les réseauxsociaux.
Dans un cas, le 25 mars vers 17 h 15, au moins six agents, tous en civil et à bord de véhicules banalisés de l' , sans s'identifier, ont interpellé et arrêté Rümeysa Öztürk, 30 ans, étudiante diplômée de l'université Tufts, qui avait apparemment été prise pour cible pour avoir écrit un article d'opinion dans un journal étudiant appelant Tufts à « reconnaître le génocide palestinien » et à se désengager des investissements liés à Israël. Rümeysa Öztürk, qui vivait aux États-Unis depuis six ans, a raconté l'incident à Human Rights Watch ; l’épisode a également été filmé par des caméras de vidéosurveillance.
Rümeysa Öztürk marchait dans la rue lorsque plusieurs personnes masquées l'ont abordée, lui ont pris de force son téléphone et son sac à dos, et lui ont passé les menottes. Elle a déclaré que lorsqu'elle leur a demandé qui ils étaient et leur a demandé de montrer leurs badges, l'un d'eux a répondu qu'ils étaient « de la police » et un autre a brandi un collier en or, mais elle n'a pas vu de badge et cela ne l'a pas aidée à les identifier. Sur les images, on entend un passant demander aux agents : « Pourquoi cachez-vous vos visages ? » Rümeysa Öztürk a déclaré qu'on ne lui avait présenté aucun document justifiant son arrestation. Elle a ensuite été emmenée de force hors de l'État et détenue illégalement.
« C'était une sensation horrible », a déclaré Rümeysa Öztürk. « Je ne pensais pas qu'ils étaient de la police, car je n'avais jamais vu des policiers s'approcher et emmener quelqu'un de cette manière. Je pensais que c'étaient des personnes qui me harcelaient, et j'avais vraiment très peur pour ma sécurité... En tant que femme qui a voyagé et vécu seule dans différents pays pour mes études, je n'avais jamais ressenti une peur aussi intense pour ma sécurité, jusqu'à ce moment-là. »
Une femme qui a été témoin de nombreuses descentes et interpellations à Chicago depuis le mois d'août a déclaré : « J'ai eu affaire à des agents qui refusaient de s'identifier. Cela ajoute un niveau de peur supplémentaire. Ce ne sont pas des policiers identifiables, qui pourraient être tenus publiquement responsables. » Un habitant de Washington, qui a également été témoin de nombreuses arrestations par des agents masqués de l'ICE depuis le mois d'août, a déclaré que ces tactiques avaient « complètement détruit toute la confiance que nous avions dans les forces de l'ordre locales et fédérales ».
De nombreux observateurs ont suggéré que la terreur que ces tactiques instillent est délibérée. Un juge d'un tribunal fédéral américain a affirmé dans une décision que « l'ICE se masque pour une seule raison : terroriser les Américains afin qu'ils restent dociles... Nous n'avons jamais toléré une police secrète armée et masquée ». Le tribunal a rejeté la justification avancée par l'ICE pour se masquer, la qualifiant de « malhonnête, sordide et déshonorante ».
Ces derniers mois, les médias ont rapporté des cas de personnes se faisant passer pour des agents fédéraux qui ont kidnappé, agressé sexuellement et extorqué des victimes, exploitant leurs craintes liées à l'application des lois sur l'immigration. Cela montre à quel point la frontière entre les criminels et les agents des forces de l'ordre peut être floue lorsque les agents fédéraux eux-mêmes ne sont pas identifiables, a observé Human Rights Watch.
Plusieurs États américains ont pris des mesures en vue d’adopter des lois au niveau étatique visant à empêcher les agents des forces de l'ordre de dissimuler leur identité lors d'interactions publiques. Il est toutefois peu probable que ces initiatives puissent être efficacement appliquées. Au niveau fédéral, un projet de loi nommé « Visible Identification Standards for Immigration-Based Law Enforcement Act (VISIBLE) Act », soutenu par les sénateurs Cory Booker et Alex Padilla, imposerait aux agents de l’ICE l’obligation de porter une forme d’identification lisible, et l’interdiction de porter des masques non médicaux.
Le Congrès devrait enquêter sur la brutalité des activités actuelles liées au contrôle de l'immigration, notamment les opérations de contrôles et les arrestations effectuées par des agents non identifiables ; le Congrès devrait examiner les conséquences spécifiques du port de masques sur la capacite à enquêter sur des abus et à sanctionner les responsables, a ajouté Human Rights Watch.
« Permettre à des agents masqués et non identifiés d'appréhender des membres de communautés sans s'identifier sape la confiance dans l'état de droit, et crée un vide dangereux où les abus peuvent se multiplier, exacerbant le risque de violences injustifiées lors d’arrestations », a conclu Belkis Wille.
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17.12.2025 à 18:15
Human Rights Watch
(Beyrouth) – Le gouvernement yéménite et le Conseil de transition du Sud (CTS), soutenu par les Émirats arabes unis, devraient immédiatement fournir des informations sur le sort du journaliste Naseh Shaker et le libérer sans condition, ont déclaré conjointement 35 organisations, dont Human Rights Watch, dans une lettre adressée au président et au vice-président du Conseil de direction présidentielle du Yémen.
17 décembre 2025 Continued Detention of Yemeni Journalist Naseh Shaker for Over Two YearsNaser Shaker, 35 ans, est un journaliste yéménite qui a subi une disparition forcée perpétrée par les autorités du CTS le 21 novembre 2023, alors qu'il se rendait à Beyrouth pour y participer à une formation organisée par la Fondation Samir Kassir. Le CTS contrôle plusieurs gouvernorats du Yémen, dont la capitale provisoire, Aden. Les autorités n'ont pas fourni d’informations sur le lieu de détention de Naser Shaker à sa famille, ni à ses représentants légaux ou aux organisations locales et internationales, malgré des demandes répétées.
« Le Conseil de transition du Sud devrait cesser de recourir fréquemment au harcèlement et à la détention arbitraire de journalistes et de défenseurs des droits humains au Yémen, et de les soumettre à des disparitions forcées », a déclaré Niku Jafarnia, chercheuse sur le Yémen et Bahreïn à Human Rights Watch.
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17.12.2025 à 13:10
Human Rights Watch
(Bruxelles) – L’approbation par le Parlement européen, le 16 décembre 2025, des amendements finaux affaiblissant considérablement la législation phare de l’Union européenne en matière de responsabilité des entreprises compromet gravement la capacité de l’Union européenne à tenir les entreprises pour responsables des atteintes aux droits humains et à l’environnement, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.
Le vote sur la directive relative au devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (Corporate Sustainability Due Diligence Directive, CSDDD) met un terme à huit mois de lobbying intense de l’industrie, à un processus décisionnel opaque et à des négociations chaotiques. Les amendements adoptés réduisent le nombre d’entreprises couvertes par la loi et suppriment l’obligation pour celles-ci de mettre en œuvre des plans de transition climatique.
« La loi pionnière de l’Union européenne sur la responsabilité des entreprises a été vidée de sa substance », a déclaré Hélène de Rengervé, responsable senior du plaidoyer sur la responsabilité des entreprises à Human Rights Watch. « Le texte final montre que les intérêts des entreprises sont désormais prioritaires par rapport aux droits des travailleurs, des communautés et à la protection de l’environnement. »
La version initiale de cette législation, adoptée en 2024 et qui devait entrer en vigueur en 2026, imposait aux grandes entreprises de plus de 1 000 employés, établies ou opérant dans l'UE, de prévenir et de s'attaquer aux violations des droits humains et aux dommages environnementaux tout au long de leurs chaînes d'approvisionnement mondiales.
Les institutions européennes ont désormais convenu de repousser à juillet 2028 l’obligation pour les États membres de transposer la directive en droit national, la loi ne devenant contraignante pour les entreprises qu’en juillet 2029.
La loi révisée a été adoptée à l’issue d’un processus politique profondément défaillant et non transparent, a déclaré Human Rights Watch. Ce processus a débuté le 8 novembre 2024, lorsque la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé une série de lois dites « Omnibus » visant à simplifier le Pacte vert pour l’Europe. Les modifications proposées, rendues publiques seulement en février 2025, ont affaibli des dispositions essentielles de la loi sur la responsabilité des entreprises, rendant plus difficile pour les victimes de violations des droits humains de poursuivre les entreprises en justice.
Le lobbying exercé par des entreprises européennes et américaines, en particulier du secteur des énergies fossiles, a fortement influencé les propositions de la Commission. Des entreprises américaines ont également obtenu que le président Donald Trump fasse pression pour affaiblir la directive dans le cadre des négociations commerciales entre les États-Unis et l’Union européenne.
La société civile a été largement exclue du processus. La Médiatrice européenne a estimé que la Commission européenne n’avait pas justifié de manière suffisante l’urgence invoquée, ni le choix d’introduire ces modifications sans garantir une préparation transparente, fondée sur des preuves et inclusive des propositions législatives. Cela constitue une violation des propres principes de bonne législation de la Commission et relève d’un cas de mauvaise administration. Ce qui s’est produit porte atteinte à la crédibilité de l’UE, a déclaré Human Rights Watch.
Human Rights Watch, aux côtés de 170 organisations de la société civile, ainsi que des dizaines d’entreprises et d’investisseurs, s’est opposé aux modifications introduites par la loi Omnibus. Malgré cela, de nombreux amendements ont été adoptés par les États membres et le Parlement européen, où les partis centristes se sont associés à l’extrême droite pour pouvoir les approuver.
La loi amendée conserve toutefois certaines exigences importantes, notamment l’obligation fondamentale pour les entreprises de mettre en place des processus de diligence raisonnable significatifs en matière de droits humains et d’environnement sur l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement. Une proposition visant à limiter cette obligation aux seuls fournisseurs directs a finalement été rejetée.
Les entreprises resteront aussi tenues de mettre en œuvre une approche fondée sur les risques, en donnant la priorité aux situations les plus graves, tout en ayant l’obligation de traiter l’ensemble des atteintes existantes ou potentielles identifiées dans leur chaîne d’approvisionnement.
En revanche, les entreprises ne seront plus obligées de mettre en œuvre des plans de transition climatique visant à surveiller et, à terme, à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre conformément à l'accord de Paris sur le climat, pourtant ratifié par l’ensemble des États membres de l’UE. Or, les plus grandes entreprises, désormais seules à être concernées par la loi, sont responsables de l’équivalent de près des deux tiers des émissions annuelles totales de dioxyde de carbone (CO₂) de l’UE, selon une étude récente.
Au total, les modifications adoptées ont réduit de 70 % le nombre de groupes d’entreprises de l’UE concernées par la directive, passant de 3 363 à 980. Elles ont également supprimé l’obligation pour les États membres de mettre en place un cadre harmonisé au niveau européen permettant de poursuivre les entreprises devant la justice pour des violations des droits humains, compliquant ainsi considérablement l’accès à la justice pour les victimes.
« La loi telle qu’amendée est très loin de l’ambition initiale d’une législation véritablement transformatrice en matière de responsabilité des entreprises », a conclu Hélène de Rengervé. « Mais les communautés, les travailleurs et les partenaires de la société civile doivent malgré tout s’appuyer sur ce qu’il en reste pour continuer à lutter en faveur de la justice pour les victimes d’abus commis par des entreprises à travers le monde. »
16.12.2025 à 22:00
Human Rights Watch
(Washington) – Human Rights Watch a publié aujourd'hui un document « Questions-Réponses » détaillé, analysant les frappes menées par l'administration Trump contre des bateaux dans les Caraïbes et le Pacifique. À ce jour, 26 frappes signalées ont tué illégalement au moins 95 personnes, dont aucune n'a été identifiée par le gouvernement américain.
16 décembre 2025 Questions-réponses : Opérations militaires américaines dans les Caraïbes et le PacifiqueCe document vise à fournir des réponses pour mieux comprendre les implications juridiques et en matière de droits humains de cette campagne militaire menée par les États-Unis. Le document explique pourquoi ces frappes constituent des exécutions extrajudiciaires au regard du droit international des droits humains, et expose les failles de l’argumentation de l'administration Trump, qui affirme que les États-Unis sont engagés dans un conflit armé avec des « narco-terroristes ».
Le document décrit aussi diverses obligations qui incombent aux États-Unis, notamment d'enquêter sur les exécutions illégales, de traduire en justice les responsables et d'offrir des voies de recours efficaces aux familles des victimes. Enfin, le document « Questions-Réponses » identifie les mesures concrètes que le Congrès devrait prendre, notamment la tenue d'audiences publiques, la mise en place d'enquêtes indépendantes et la création d'une commission spéciale chargée d’examiner les décisions juridiques et opérationnelles liées à ces frappes.
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16.12.2025 à 14:52
Human Rights Watch
Chaque année, Human Rights Watch fait le point sur les progrès réalisés en matière de droits des enfants dans le monde. De l'amélioration de l'accès à l'éducation au renforcement des protections en temps de guerre, voici quelques faits marquants de l'année 2025.
De nouvelles données de l'Organisation internationale du travail et de l'UNICEF ont révélé que le nombre d'enfants obligés de travailler avait diminué de 20 millions par rapport à 2020.Le Malawi et le Japon ont tous deux supprimé les frais de scolarité dans les écoles secondaires publiques. Le Vietnam a instauré la gratuité des frais de scolarité pour tous les élèves des écoles publiques, de la maternelle au secondaire.Le Brésil a adopté une loi historique pour protéger les droits des enfants en ligne, devenant ainsi le premier pays d'Amérique latine à adopter une loi spécifique en faveur des enfants.La Bolivie, la Grenade, le Burkina Faso, le Portugal et le Koweït ont tous relevé l'âge minimum légal du mariage à 18 ans. Aux États-Unis, les états du Maine, de l'Oregon et du Missouri ont interdit le mariage des enfants.En septembre, 92 pays se sont réunis pour la première fois afin d'examiner officiellement la possibilité d'un nouveau traité international pour garantir la gratuité de l'éducation pour tous les enfants, de la maternelle au secondaire. À ce jour, 60 pays se sont engagés à soutenir ce traité.La Thaïlande, la Tchéquie et la Suisse ont interdit toutes les formes de châtiments corporels infligés aux enfants, portant à 70 le nombre total de pays ayant adopté une telle interdiction.Les États-Unis et le Kosovo ont approuvé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, un engagement politique visant à protéger l'éducation pendant les conflits armés, portant à 122 le nombre de pays ayant approuvé cette déclaration.La Chine a lancé un programme de subventions pour les familles ayant des enfants de moins de 3 ans, tandis que les Fidji, le Japon, le Maroc, la Turquie et la Tunisie ont augmenté les allocations pour les enfants, et le Royaume-Uni a annoncé qu'il supprimerait la « limite de deux enfants » pour les familles bénéficiant d'une aide sociale liée aux enfants. Ces mesures peuvent jouer un rôle important dans la réduction de la pauvreté infantile: rien qu'au Royaume-Uni, la suppression de la limite de deux enfants devrait permettre à environ 450 000 enfants de sortir de la pauvreté relative d'ici 2030.Le procureur de la Cour pénale internationale a demandé des mandats d'arrêt contre deux hauts dirigeants talibans pour des violations graves commises à l'encontre de femmes et de filles en Afghanistan, invoquant la persécution fondée sur le genre, un crime contre l'humanité.Le gouvernement de l'État d'Australie-Occidentale a annoncé un nouveau programme de réparation pour les « générations volées », des enfants autochtones qui ont été retirés de force à leurs familles dans le cadre de politiques racistes mises en place au début des années 1900 et qui ont perduré jusqu'aux années 1970.Partout dans le monde, les enfants continuent de faire face à de graves menaces pour leurs droits, mais ces exemples montrent que des améliorations réelles sont possibles.
16.12.2025 à 06:00
Human Rights Watch
(Nairobi) – Des miliciens ont tué au moins 22 civils et en ont blessé beaucoup d'autres lors d'une attaque menée fin novembre 2025 contre un village du territoire de Kwamouth, dans l'ouest de la République démocratique du Congo, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Des témoins originaires du village de Nkana, situé à environ 75 kilomètres au nord-est de Kinshasa, la capitale, ont déclaré que des miliciens armés de fusils et de machettes avaient mené une attaque apparemment en guise de représailles, dans le cadre de tensions intercommunautaires croissantes.
Des témoins ont déclaré que le 23 novembre, vers 4 heures du matin, des combattants Mobondo de l'ethnie Yaka ont attaqué le village de Nkana. Les assaillants sont allés de maison en maison, tuant principalement des villageois de l'ethnie Teke, dans leurs maisons et alors qu'ils tentaient de fuir. Des villageois ont expliqué que les combattants avaient accusé les Teke de Nkana de refuser d'installer un nouveau chef coutumier Yaka et avaient envoyé des messages à certains Teke avant l'attaque, leur disant qu'ils seraient punis.
« Les violences à Kwamouth ne sont qu'un exemple parmi de nombreux conflits ethniques meurtriers en RD Congo », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. « L'attention mondiale portée aux accords de paix dans l'est de la RD Congo ne doit pas faire oublier les violences et les injustices qui sévissent sans contrôle ainsi que les cycles d'impunité dans d'autres domaines. »
Human Rights Watch a mené des entretiens avec 18 personnes en novembre et décembre, dont 5 témoins, 6 proches des victimes, des membres du personnel médical local et des chefs communautaires du territoire de Kwamouth, dans la province de Maï-Ndombe.
Depuis juin 2023, la milice Mobondo, nommée d'après ses amulettes mystiques et armée de machettes, de couteaux, de lances, d'arcs et de flèches, ainsi que de fusils de chasse et d'assaut militaires, a attaqué des villages Teke, incendié des maisons et tué des dizaines de personnes.
Depuis des années, les activistes de la société civile, les groupes de défense des droits humains et les autorités traditionnelles mettent en garde contre la présence et les activités croissantes des milices ethniques. Les violences récentes font écho à la crise intercommunautaire documentée par Human Rights Watch entre 2022 et 2023, lorsque des milices des communautés Teke et Yaka ont tué des centaines de civils lors d'une vague d'attaques dans la région.
Cette récente attaque souligne l'incapacité du gouvernement congolais à renforcer la sécurité dans la région malgré des avertissements répétés concernant les violences, a déclaré Human Rights Watch.
« Quand ils ont enfoncé ma porte, je me suis enfuie avec mon petit-fils », a déclaré une femme de 70 ans à propos des récentes violences. « Ils m'ont tiré dessus plusieurs fois. Une balle a touché mon pied, mais j'ai continué à courir. Si j'étais restée une seconde de plus, ils nous auraient tués. »
Un autre villageois a raconté que les combattants avaient tiré sur sa famille alors qu'elle tentait de s'échapper : « Ma mère portait ma fille sur son dos. La première balle l'a touchée [sa mère] en plein cœur. La deuxième lui a transpercé les côtes et a touché ma fille au ventre. » Sa mère est morte sur le coup, et sa fille de 5 ans est décédée à l'hôpital le 5 décembre.
Human Rights Watch a documenté la mort de 22 civils, dont quatre femmes et quatre enfants. Parmi les personnes tuées figuraient deux fils du chef coutumier du village, le président local de la Croix-Rouge et un fonctionnaire des impôts de la province. Un soldat de l'armée congolaise, qui gardait le village avec un petit contingent de militaires de la marine qui s'est enfui en traversant le fleuve Congo lorsque l'attaque a commencé, a également été tué. Les villageois ont déclaré que les proches des victimes avaient enterré les membres de leurs familles après le départ des assaillants. D'autres ont été enterrés par les soldats à leur arrivée dans le village.
Click to expand Image © 2025 Human Rights WatchLe personnel médical de la commune de Maluku, à l'est de Kinshasa, a déclaré que plusieurs patients étaient arrivés dans un état critique, tandis que d'autres civils blessés avaient fui vers le Congo-Brazzaville par le fleuve pour se faire soigner.
L'attaque a contraint des centaines d'habitants à fuir vers Maluku ou à traverser le fleuve pour se réfugier au Congo-Brazzaville. Des témoins ont déclaré que les familles avaient tenté d'évacuer les personnes âgées, les blessés et les jeunes enfants. Depuis, l'armée a tenté d'encourager les villageois à retourner à Nkana, mais beaucoup ont refusé et ont ainsi perdu l'accès à leurs maisons et à leurs champs, aggravant une situation humanitaire déjà très précaire.
À la suite de l'attaque, les autorités congolaises ont déployé des militaires dans la région et ont annoncé l'ouverture d'une enquête sur les meurtres. Les habitants ont raconté qu'une délégation de membres de la communauté Teke s'était rendue à Kinshasa avec les corps des victimes pour protester contre ce qu'ils ont qualifié de silence et d'inaction du gouvernement. Certains législateurs ont appelé l’Assemblée provinciale de Maï-Ndombe à adopter des mesures urgentes pour faire face à la crise humanitaire.
Le peuple Teke a historiquement possédé une grande partie des terres et des titres coutumiers du territoire de Kwamouth, qui fait partie du plateau de Bateke (littéralement « le plateau du peuple Teke ») qui s'étend jusqu'à la périphérie de Kinshasa. Au fil des années, les membres des communautés Yaka, Mbala, Suku et d'autres communautés des provinces voisines de Kwilu et Kwango ont formé la main-d'œuvre agricole des propriétaires fonciers du territoire de Kwamouth ou sont devenus agriculteurs en échange d'une taxe coutumière versée aux chefs coutumiers Teke, que les agriculteurs Teke paient également.
Les milices Mobondo ont multiplié les attaques depuis le milieu de l’année 2025, ciblant des villages situés le long du fleuve Congo, notamment Mbanzale et Mayala en juin, une attaque le long de la Route nationale 17 en août et une attaque le 2 septembre dans la zone forestière de Limpwobo. Malgré des déploiements militaires périodiques, aucune présence sécuritaire permanente du gouvernement n'a été établie, laissant les communautés rurales exposées à de nouvelles attaques.
Les autorités congolaises devraient garantir une enquête approfondie et impartiale sur les responsables des attaques des milices, a déclaré Human Rights Watch. Elles devraient également veiller à ce que les villageois touchés bénéficient d'une aide médicale et psychologique et que les personnes déplacées aient accès à un abri, à de la nourriture et aux services de base.
Le gouvernement devrait mettre en œuvre, avec une participation significative des communautés concernées, un programme de démobilisation des combattants Mobondo, annoncé le 2 décembre, et convoquer un forum de paix pour apaiser les tensions intercommunautaires dans la province de Maï-Ndombe, annoncé en septembre.
« La lutte contre la violence communautaire dans l'ouest de la RD Congo requiert la justice et l’obligation de rendre des comptes, la mise en place de systèmes d'alerte efficaces, et un engagement concret à démanteler les structures qui permettent aux groupes armés de prospérer », a conclu Lewis Mudge. « Les gouvernements concernés et les organes des Nations Unies devraient aider les autorités congolaises à y parvenir. »
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