18.08.2025 à 09:00
(Los Angeles, 18 août 2025) – Les forces de l’ordre ont répondu aux manifestations qui se sont déroulées entre le 6 et le 14 juin 2025 contre les raids d’immigrants en Californie, à Los Angeles et dans ses environs, en faisant usage d’une force excessive et en faisant preuve d’une brutalité délibérée, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.
Les policiers ont tiré des gaz lacrymogènes, des billes au poivre, des balles en mousse dure et des grenades assourdissantes directement sur des manifestants, journalistes et d’autres observateurs, souvent à bout portant et fréquemment sans avoir été provoqués, et sans donner d’avertissement suffisant. Des dizaines de personnes ont été blessées et souffrent de contusions et graves lacérations, de fractures, de commotions cérébrales, d’une amputation du doigt et de lésions oculaires graves.
« Les raids généralisés contre les immigrants ont terrorisé les communautés de Los Angeles et poussé des milliers de personnes à descendre dans les rues pour manifester », a déclaré Ida Sawyer, directrice de la division Crises, conflits et armes à Human Rights Watch. « La réponse agressive des forces de l’ordre aux niveaux local, étatique et fédéral à ces manifestations a été de violemment réprimer le droit du public à exprimer son indignation et celui des médias à informer en toute sécurité. »
Les manifestations ont été déclenchées par une escalade spectaculaire du nombre de raids contre les immigrants à Los Angeles et dans ses environs, après que l’administration Trump a ordonné à l’agence chargée de l’immigration et des douanes (Immigration and Customs Enforcement, ICE) d’augmenter le nombre d’arrestations quotidiennes d’immigrants sans papiers. Des agents fédéraux lourdement armés ont fait irruption dans des magasins, des entrepôts, des hôtels, des restaurants, des fermes, des stations de lavage de voitures, des stands de tacos et d’autres lieux de travail, et ont arrêté ceux qu’ils soupçonnaient d’être sans papiers dans le but de les expulser.
Human Rights Watch a observé les manifestations, s’est rendu sur les lieux des raids menés par l’ICE à Los Angeles et dans ses environs du 10 au 14 juin et a interrogé 39 personnes, parmi lesquels des manifestants, des journalistes, des observateurs spécialistes des questions juridiques, des secouristes bénévoles, des défenseurs des droits des immigrants et des organisateurs, ainsi que d’autres personnes touchées par ces raids. Les chercheurs ont analysé plusieurs poursuites judiciaires, des documents de la Los Angeles Press Club, des informations publiées dans les médias, ainsi que des photos et vidéos enregistrées pendant les manifestations et publiées sur les réseaux sociaux ou partagées directement avec les chercheurs.
Human Rights Watch a recensé 65 cas dans lesquels les agents des forces de l’ordre de diverses unités locales, étatiques et fédérales ont blessé des manifestants, des journalistes et d’autres observateurs, bien que leur nombre réel soit probablement beaucoup plus élevé. Au cours des trois semaines qui ont suivi le 6 juin, plus de 280 personnes ont contacté l’American Civil Liberties Union (ACLU) de Californie du Sud, et ont pour la plupart signalé avoir été blessées par des agents des forces de l’ordre alors qu’elles participaient à des manifestations.
Les premières manifestations importantes ont commencé le 6 juin, quand des agents de l’ICE ont fait des descentes dans plusieurs endroits, dont deux usines d’Ambiance Apparel dans le Fashion District à Los Angeles. Le 7 juin, une altercation entre un groupe de manifestants et des agents fédéraux armés et des adjoints du département du shérif de Los Angeles (LASD) a eu lieu dans la banlieue de Paramount, en face d’un magasin Home Depot juste à côté d’un complexe de bureaux où une descente était prévue.
Dans une directive publiée le 7 juin, le président américain Donald Trump a déclaré que les manifestations de Los Angeles « constituaient une forme de rébellion contre l’autorité du gouvernement des États-Unis », a fait appel à la Garde nationale et a autorisé le déploiement de « tout autre membre des forces armées régulières si nécessaire ». Le 9 juin, l’administration a mobilisé 700 marines en service actif qui ont rejoint plusieurs milliers de soldats de la Garde nationale, dont la mission principale est de garder les bâtiments fédéraux. Des responsables locaux et étatiques se sont opposés aux mesures prises par Trump, alors même que la police locale avait agi de manière agressive pour mettre fin aux manifestations.
À partir du 6 juin et jusqu’au 14 juin au moins, les manifestants se sont rassemblés tous les jours devant le Metropolitan Detention Center, où des agents détenaient de nombreuses personnes sans papiers. Les manifestants ont également défilé devant d’autres bâtiments du gouvernement dans les environs du centre-ville de Los Angeles.
Human Rights Watch a maintes fois été témoin et documenté des cas où des agents des forces de l’ordre ont obligé des manifestants à quitter certaines zones, souvent sans justification apparente et sans donner d’ordres ou d’avertissements clairs et audibles. Des policiers ont fréquemment pointé et fait usage de dispositifs de lancement de projectiles « moins létaux » directement contre des manifestants, parfois à bout portant, notamment en tirant des gaz lacrymogènes, des billes au poivre, des balles en mousse dure et des grenades assourdissantes. Ces armes, bien que moins mortelles que les balles, peuvent causer des blessures graves et être parfois mortelles.
Human Rights Watch a documenté 39 cas de journalistes blessés par les forces de l’ordre, dont la plupart tenaient des caméras et portaient des badges identifiant clairement leur appartenance à la presse. Plusieurs d’entre eux semblent avoir été délibérément pris pour cible. Le 8 juin, un policier a tiré un projectile à impact cinétique directement sur Lauren Tomasi, une journaliste australienne de 9News, alors qu'elle faisait un reportage en direct à la télévision depuis le centre-ville de Los Angeles, lui laissant une contusion à la jambe.
Nick Stern Click to expand Image Photojournalist Nick Stern’s wound and the canister that was lodged in his leg. © 2025 Nick SternA deputy from the Los Angeles Sheriff’s Department fired a flash-bang device directly at British photojournalist Nick Stern, as he was covering the protest in Paramount and neighboring Compton, on June 7, 2025. Doctors later performed surgery to remove a three-inch canister from Stern’s leg, which had left a gaping hole that exposed muscle tissue.
Ryanne Mena Click to expand Image © 2025 Ryanne MenaLos Angeles Daily News reporter Ryanne Mena was hit with kinetic impact projectiles fired by Department of Homeland Security officers twice, first in her leg on June 6 in downtown Los Angeles, and then to her head in Paramount on June 7, giving her a concussion.
Jeremy Cuenca Click to expand Image © 2025 Jeremy CuencaPolice officers fired kinetic impact projectiles at journalist Jeremy Cuenca in downtown Los Angeles in the early afternoon on June 8, at close range, nearly severing the top of his little finger, damaging his camera, and leaving a large bruise on his inner thigh. Cuenca was in surgery for four hours later that day, as doctors worked to reattach his finger
Marshall Woodruff Click to expand Image © 2025 Marshall WoodruffOn June 14 in downtown Los Angeles, police officers fired less lethal projectiles at Marshall Woodruff, a filmmaker and photographer documenting police conduct during the protests, hitting him in the face and arm. The injuries caused a fracture to his face, serious bruising on his arm, and severe eye damage. Two months later, Woodruff remains unable to see out of his right eye.
Lauren TomasiOn June 8, a police officer fired a kinetic impact projectile directly at Lauren Tomasi, an Australian journalist from 9News, while she was reporting live on television from downtown Los Angeles, leaving a bruise on her leg.
Le 9 juin, un policier du Département de la police de Los Angeles (LAPD) a tiré à bout portant sur trois personnes, toutes connues pour leur engagement dans la lutte contre l’impunité policière, à l’aide de projectiles à impact cinétique (en mousse dure), causant à chacune d’entre elles de graves douleurs pendant plusieurs jours, selon deux de ces activistes et des vidéos examinées par Human Rights Watch. Avant de tirer sur l’un d’entre eux à l’aine, le policier a déclaré : « Je vais te tirer dessus parce que tu m’empêches de me concentrer. »
Un secouriste bénévole, qui a lui-même été hospitalisé après avoir été blessé par un projectile en mousse dure qui lui a causé une blessure profonde et béante, a déclaré avoir passé plusieurs heures dans le centre-ville de Los Angeles le 14 juin pour venir en aide à des personnes qui demandaient de l’aide. Parmi elles se trouvaient des manifestants touchés par des projectiles et saignant au niveau de la tête ou du visage, l’un d’entre eux avec une jambe cassée, et d’autres ayant des difficultés à voir ou à entendre à cause des grenades assourdissantes et des gaz lacrymogènes.
Quelques actes de violence contre la police, ainsi que des destructions de biens, ont été commis par des manifestants, principalement au début des manifestations. Human Rights Watch a constaté que la plupart des actes de violence perpétrés par des manifestants ont eu lieu à la suite d’actes de violence des forces de l’ordre, et que seule une minorité de manifestants s’était livrée à des actes de destruction. Dans la mesure où certains individus se sont livrés à des actes violents ou destructeurs, les forces de l’ordre n’ont pas limité leurs ripostes agressives à ces individus.
Human Rights Watch a établi que les forces de l’ordre avaient clairement violé le droit international relatif aux droits humains. Ces conclusions ont aussi des implications quant à la protection des droits civils garantie par la Constitution des États-Unis, ainsi qu’à deux lois récemment amendées de l’État de Californie, qui imposent des limites sévères quant aux circonstances et aux modalités dans lesquelles les forces de l’ordre peuvent recourir à la force pour disperser des manifestations et qui prévoient des mesures de protection pour les journalistes qui couvrent ces manifestations.
Le 31 juillet, Human Rights Watch a écrit au département de la Sécurité intérieure (Department of Homeland Security, DHS), au LAPD et au LASD, mais n’a pas reçu de réponse.
Dans une déclaration du 23 juin, le chef de la police de Los Angeles, Jim McDonnell, a déclaré que le LAPD procéderait à une « évaluation complète de chaque incident impliquant l’usage de la force » et prendrait des mesures à l’encontre de tout policier « qui n’aurait pas respecté » les normes établies du LAPD. Bien qu’il ait déclaré que les manifestations avaient « le plus souvent été marquées par des formes d’expression pacifiques », il a ajouté qu’elles avaient parfois été « détournées par des actes de violence, de vandalisme et d’agression criminelle » et que « les policiers étaient en droit de prendre des mesures rapides et mesurées pour prévenir d’autres dommages et rétablir la sécurité publique ».
Des journalistes, des manifestants et des observateurs spécialisés dans les question juridiques ont introduit plusieurs actions en justice contre la ville et le comté de Los Angeles et contre le DHS pour les dommages causés pendant ces manifestations. Plusieurs poursuites pour des abus commis par le passé par les forces de l’ordre lors de manifestations à Los Angeles ont coûté des millions de dollars de dommages et intérêts aux contribuables, mais n’ont abouti qu’à un nombre limité, voire à aucune condamnation établissant les responsabilités des agences et hauts responsables impliqués dans ces abus, pas plus qu’à des changements dans les méthodes utilisées par les forces de l’ordre.
« Les forces de l’ordre de Los Angeles ont fait usage d’une force brutale, excessive et inutile contre des personnes qui défendaient les droits humains et celles qui couvraient les manifestations pour les médias », a conclu Ida Sawyer. « Toutes les agences chargées du maintien de l’ordre impliquées dans ces événements devraient respecter le droit à la liberté d’expression et de manifestation, protéger les journalistes et veiller à ce que les responsables des abus rendent des comptes. »
Suite détaillée en anglais : en ligne ici.
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Articles
Le Figaro L’Humanité Mediapart/AFP
18.08.2025 à 06:00
(Johannesbourg, le 18 août 2025) – Des Sénégalais déplacés par les raz-de-marée que le changement climatique aggrave et rend plus fréquents subissent des violations continues de leurs droits humains, sans aucune solution durable en vue, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.
18 août 2025 « En attendant Dieu »Ce rapport de 77 pages, intitulé « ‘En attendant Dieu’ : Déplacements dus aux inondations et réinstallation planifiée de pêcheurs à Saint-Louis, au Sénégal » , concerne des familles qui ont tout perdu lorsque les inondations côtières ont frappé leurs communautés historiques de pêcheurs de la péninsule de la Langue de Barbarie en 2015 et 2016. Elles ont été déplacées vers un site appelé Khar Yalla, que les autorités sénégalaises reconnaissent comme impropre à l'habitation permanente. Par leur inaction, les autorités ont violé leurs droits économiques, sociaux et culturels, et les ont exclues d'une réinstallation planifiée liée au climat, qui a bénéficié à d'autres membres de leurs communautés.
« L'expérience de Khar Yalla montre qu'une planification inadéquate des réinstallations liées au climat peut entraîner des déplacements prolongés, au lieu de solutions durables », a déclaré Erica Bower, chercheuse sur les déplacements liés au changement climatique à Human Rights Watch. « Le Sénégal devrait remédier de toute urgence aux violations des droits à Khar Yalla et élaborer une politique qui garantisse que les futures communautés déplacées par le climat reçoivent un soutien adéquat, notamment une réinstallation planifiée respectueuse des droits. »
Human Rights Watch a mené des entretiens auprès de plus de 100 personnes, dont des personnes déplacées, des responsables gouvernementaux et des experts, et a analysé des images satellite, des publications universitaires ainsi que des documents du gouvernement sénégalais, de la Banque mondiale, d'agences des Nations Unies et d'organisations non gouvernementales.
Les quelque 1 000 personnes qui vivent à Khar Yalla, à l'extérieur du centre-ville de Saint-Louis, sont issues de communautés centenaires de pêcheurs de la Langue de Barbarie, une zone fortement exposée aux conséquences de la crise climatique. Après avoir perdu leurs maisons lors des inondations côtières et avoir vécu plusieurs mois sous des tentes, les familles ont accepté le projet des autorités locales de les reloger temporairement à Khar Yalla, fin 2016.
Les autorités leur avaient assuré que ce serait une solution de courte durée et leur ont accordé des permis temporaires pour occuper des maisons construites pour un autre projet de relogement destiné à d'autres ménages exposés aux inondations, qui n’avait pas abouti.
Cependant, les familles déplacées sont toujours à Khar Yalla, privées de services essentiels et vivant dans des conditions qui violent leur droit à un logement convenable. Il y a une promiscuité extrême, pas d’électricité et pas de système de traitement des déchets. Le site est situé en zone inondable ; pendant la saison des pluies, les eaux usées pénètrent dans les maisons et contaminent l'approvisionnement en eau.
L'incapacité du gouvernement à fournir les services essentiels à Khar Yalla ou à le connecter aux services d'autres régions a violé les droits des populations à l'éducation et à la santé. On estime qu'un tiers des enfants ne sont pas scolarisés ; un grand nombre de personnes ont dû renoncer aux soins de santé.
Les familles y sont également confrontées à des violations constantes de leur droits à un niveau de vie suffisant et de prendre part librement à la vie culturelle. Les revenus de la plupart des ménages ont été réduits à des niveaux inférieurs au seuil de pauvreté international pour un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure comme le Sénégal, et les gens ont du mal à nourrir leur famille. Les autorités ont échoué à combler ces lacunes.
Les membres de la communauté peinent à maintenir leurs moyens de subsistance liés à la pêche dans la Langue de Barbarie, à cinq kilomètres de là, compte tenu de la distance et du coût élevé des taxis et des bus privés. La perte des moyens de subsistance liés à la pêche a également des conséquences culturelles négatives. La pêche « c'est toute notre vie », a déclaré un homme âgé de Khar Yalla.
Les autorités ont également contrecarré les tentatives des dirigeants de Khar Yalla de reconvertir les personnes dans de nouvelles professions. « Nous n’avons aucun soutien de la part des autorités, et lorsque nous avons essayé de trouver notre propre solution, ils nous ont empêché de le faire », a déclaré une femme à Khar Yalla.
De plus, le gouvernement n'a pas inclus les familles de Khar Yalla dans le projet de relocalisation permanente, lié au climat, de 15 000 pêcheurs de la Langue de Barbarie vers un site à l'intérieur des terres appelé Djougop, mis en œuvre dans le cadre du Projet de Relèvement d’urgence et de Résilience de Saint-Louis, financé par la Banque mondiale.
Parmi les bénéficiaires figurent plus de 200 familles qui ont également été déplacées de la Langue de Barbarie par les inondations côtières, en 2017 et 2018, puis hébergées temporairement dans des tentes à Khar Yalla. La Banque mondiale et le gouvernement ont réinstallé ces familles à Djougop, après avoir déterminé que Khar Yalla n'était pas un site de réinstallation permanent approprié. Mais les familles déplacées en 2015 et 2016 ont été laissées pour compte.
Une réinstallation planifiée peut faciliter la mise en place d’une solution durable pour les personnes déplacées par les catastrophes climatiques, à condition qu'elle inclue les personnes en situation de déplacement prolongé et que le processus de planification respecte les normes relatives aux droits humains, notamment une consultation significative des personnes affectées. Aucun processus de ce type n'a été mis en place pour les familles qui ont été déplacées en 2015 et 2016.
« Nous nous demandons parfois si les autorités nous considèrent comme des êtres humains », a déclaré Khady Gueye, une dirigeante de la communauté de Khar Yalla. Les responsables gouvernementaux interrogés ont fait preuve d'une méconnaissance de Khar Yalla. Certains ont même nié que les familles aient été déplacées par les inondations.
Le gouvernement sénégalais est tenu, en vertu du droit national et international, de respecter et de réaliser les droits économiques, sociaux et culturels des personnes et de les protéger des risques raisonnablement prévisibles pour leurs droits, notamment les impacts du changement climatique tels que l'élévation du niveau de la mer.
Le Sénégal a investi davantage que de nombreux pays pour soutenir les communautés déplacées par le climat, mais a injustement laissé les familles de Khar Yalla à l'écart de ces mesures. « Pour atteindre son objectif de devenir un leader mondial en matière d'adaptation au changement climatique, le Sénégal doit mettre fin aux violations des droits humains à Khar Yalla et planifier l'avenir », a déclaré Fatoumata Kine Mbodji de Lumière Synergie pour le Développement.
Le Sénégal devrait ratifier la Convention de Kampala pour protéger les droits des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Il devrait également élaborer une politique sur la réinstallation planifiée liée au climat, qui prévoie des mécanismes permettant aux communautés déplacées par le climat de demander un soutien, privilégie une consultation significative et établit des critères de sélection des sites de réinstallation afin de garantir le respect des droits des bénéficiaires tout au long de la réinstallation.
La Banque mondiale devrait également réformer ses politiques. Les politiques actuelles ont été conçues pour les réinstallations effectuées dans le cadre de projets de développement, qui sont fondamentalement différentes des réinstallations planifiées liées au climat. Les nouvelles politiques devraient exiger des pays bénéficiaires de ces projets qu'ils identifient les personnes déplacées pour les périodes les plus longues et qui ont besoin d'une solution durable.
« Il est urgent que le Sénégal et la Banque mondiale changent de politique car les réinstallations planifiées ne feront que se multiplier à mesure que la crise climatique s'intensifie », a conclu Erica Bower. « Les politiques devraient être axées sur les droits des personnes déplacées par la crise climatique, comme les familles de Khar Yalla. »
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Médias
France Info France Inter
Afrik.com
14.08.2025 à 06:00
(Beyrouth) – Les autorités iraniennes ont maltraité et fait disparaître de force des détenus de la prison d’Evin qui avaient survécu à l’attaque menée par les forces israéliennes le 23 juin 2025, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Human Rights Watch a également conclu que les frappes israéliennes contre la prison constituaient un crime de guerre manifeste.
Malgré les appels et les demandes répétées des prisonniers et de leurs familles, les autorités iraniennes n’ont pris aucune mesure pour protéger la vie et la sécurité des détenus avant l’attaque. Après l’attaque, les autorités ont maltraité les survivants pendant leur transfert vers d’autres prisons, et lors de leur retour à Evin, et les ont détenus dans des conditions cruelles et dangereuses. Le traitement réservé aux prisonniers après l’attaque porte toutes les marques de la répression généralisée menée par les autorités iraniennes, en particulier en période de crise.
« La réponse des autorités iraniennes vis-à-vis des prisonniers traumatisés d’Evin qui venaient d’assister à la mort et aux blessures de certains de leurs codétenus lors de l’attaque israélienne du 23 juin a été de les maltraiter », a déclaré Michael Page, Directeur adjoint de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch. « Les autorités iraniennes ont commis toute une série d’abus à l’encontre des prisonniers suite à cette attaque, notamment des passages à tabac, des insultes et des menaces lors des transferts, et ont détenu les prisonniers dans des conditions épouvantables qui ont mis en danger leur vie et leur santé. Les condamnés à mort et les personnes victimes de disparitions forcées courent désormais un risque accru d’être torturés ou exécutés. »
Entre le 24 juin et le 29 juillet, Human Rights Watch a interrogé et s’est entretenu avec 23 membres des familles de prisonniers, avec d’anciens défenseurs des droits humains ayant été détenus et avec d’autres sources bien informées au sujet de l’attaque israélienne du 23 juin contre la prison d’Evin et du traitement réservé aux prisonniers par les autorités iraniennes à la suite de cette attaque. Les chercheurs ont également passé en revue plusieurs témoignages sur le traitement des prisonniers, obtenus par le biais d’autres organisations de défense des droits humains et communiqués à Human Rights Watch, ainsi que des témoignages publics provenant de prisonniers et de leurs familles.
Human Rights Watch a écrit aux autorités iraniennes pour obtenir des informations sur le sort et le lieu de détention des prisonniers, en particulier ceux qui sont détenus dans des centres de détention gérés par le ministère du Renseignement et l’Organisation du renseignement du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI). Les autorités n’ont pas répondu à ces requêtes.
Selon les témoignages de plusieurs prisonniers, les forces de sécurité ont été déployées peu après l’attaque dans les quartiers de la prison d’Evin, notamment les quartiers 4 et 8, où sont détenus de nombreux prisonniers politiques de sexe masculin. Elles ont ordonné aux prisonniers de quitter les lieux en les menaçant avec des armes à feu et en leur laissant très peu de temps – voire pas du tout - pour rassembler leurs effets personnels. Les forces de sécurité ont menotté les prisonniers de sexe masculin deux par deux et les ont fait monter dans des bus pour leur faire faire un trajet de plusieurs heures, tout en les insultant et en les menaçant avec leurs armes.
Le transfert de centaines de prisonniers de sexe masculin vers la prison d’Evin aux premières heures de la journée du 8 août, 46 jours après l’attaque, a également été marqué par des violences. D’après les informations obtenues par Human Rights Watch, les forces de sécurité ont utilisé des matraques et des armes à décharge électrique pour passer à tabac plusieurs prisonniers politiques qui protestaient contre le fait d’être menottés et contre le transfert de condamnés à mort vers des centres de détention séparés.
Après l’attaque, les autorités ont transféré les prisonniers vers deux grands centres de détention de la province de Téhéran : la prison de Shahr-e Rey, connue sous le nom de prison de Qarchak, pour les femmes, et la grande prison centrale de Téhéran, connue sous le nom de prison de Fashafouyeh, pour les hommes. Les autorités n’ont pas donné d’informations sur le sort et le lieu de détention de certains prisonniers détenus par les services de sécurité et de renseignement, notamment des dissidents, des activistes des droits humains et des personnes possédant la double nationalité ou de nationalité étrangère. Pour certains d’entre eux, les autorités se sont contentées de les autoriser à passer un bref appel téléphonique à leur famille pour les informer qu’ils étaient détenus dans des cellules à l’isolement, parfois dans des lieux inconnus.
Le 23 juin, les autorités ont transféré Ahmadreza Djalali, un médecin de nationalité suédoise et iranienne détenu arbitrairement et qui risque d’être exécuté à tout moment, vers une destination inconnue. Au 9 août, les autorités avaient refusé, malgré les demandes qui leur avaient été adressées, de donner la moindre information sur son sort et le lieu où il se trouve, ce qui équivaut à une disparition forcée.
Les disparitions forcées constituent des crimes graves au regard du droit international et sont considérées comme étant toujours en cours tant que le sort des personnes disparues et leur lieu de détention restent inconnus.
Le refus des autorités de révéler le sort et le lieu de détention des détenus et de certains prisonniers a aussi renforcé les craintes concernant les prisonniers transgenres détenus dans la zone de quarantaine de la prison d’Evin. Une femme transgenre qui a été détenue en quarantaine à Evin par le passé a déclaré à Human Rights Watch que de nombreux prisonniers transgenres « n’ont personne » et qu’ils sont coupés de leur famille « qui les rejette ». Elle a fait part de ses inquiétudes dans ces termes : « même s’ils étaient blessés ou morts, personne ne le saurait, car leurs familles ne sauraient peut-être même pas qu’ils se trouvaient là-bas ».
Les craintes concernant l’imminence de certaines exécutions se sont par ailleurs accrues pour six autres condamnés à mort. Vahid Bani Amerian, Pouya Ghobadi, Akbar « Shahrokh » Daneshvarkar, Babak Alipour et Mohammad Taghavi Sangdehi ont été séparés des autres prisonniers lors du transfert du 8 août et auraient été emmenés à la prison de Ghezel Hesar, dans la province d’Alborz, où sont systématiquement transférés les condamnés à mort avant leur exécution. Un autre homme, Babak Shahbazi, a quant à lui été transféré à la prison de Ghezel Hesar plus tôt dans la semaine.
Les familles des prisonniers des prisons de Qarchak et de Fashafouyeh ont décrit à Human Rights Watch des conditions de détention épouvantables, caractérisées par des cellules mal ventilées, sales et surpeuplées, où de nombreux prisonniers sont contraints de dormir à même le sol, ainsi que par un manque d’accès à l’eau potable et à des installations adéquates pour le maintien d’une hygiène personnelle. Ces conditions mettent en danger la vie et la santé des détenus.
Les prisonniers politiques de la prison de Qarchak sont détenus dans la zone de quarantaine, où on leur a signifié qu’ils resteraient indéfiniment. Un défenseur des droits humains qui y a été détenu a déclaré à Human Rights Watch que la zone de quarantaine était le pire endroit de la prison, conçu pour la détention temporaire de nouveaux détenus, avec des murs maculés de vomi et d’excréments. Un autre défenseur des droits humains qui a été détenu dans cette prison a déclaré que les conditions y étaient « impropres, même pour des animaux ».
Un proche d’un défenseur des droits humains emprisonné a déclaré à Human Rights Watch que la prison de Fashafouyeh était infestée d’insectes et que son proche emprisonné avait attrapé six ou sept punaises de lit dans ses draps en une seule matinée. Un membre de la famille d’un autre prisonnier politique a déclaré que les prisonniers était couverts de piqûres d’insectes.
D’après les informations obtenues par Human Rights Watch, les autorités de la prison de Fashafouyeh ont également infligé aux familles des prisonniers des traitements inhumains, cruels et dégradants en procédant à des fouilles corporelles intrusives et humiliantes avant les visites. Une source bien informée a déclaré que dans certains cas, les proches des prisonniers, y compris des enfants, avaient été contraints de se déshabiller complètement pendant les fouilles, leur causant une détresse extrême.
Human Rights Watch est également profondément préoccupé par la situation des prisonniers qui ont été renvoyés dans les quartiers 7 et 8 de la prison d’Evin le 8 août, compte tenu des dommages importants subis par plusieurs installations pénitentiaires essentielles à la santé et au bien-être des prisonniers, notamment le dispensaire et la salle des visites. Ces préoccupations sont d’autant plus vives que les autorités ont depuis longtemps pour habitude de priver les prisonniers, en particulier les prisonniers politiques arbitrairement détenus, de soins médicaux adéquats.
L’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus, également connues sous le nom de Règles Nelson Mandela, fixent des normes minimales pour le traitement des détenus en matière de santé et la surface minimale au sol, et stipulent que chaque détenu doit disposer de ventilation et d’eau potable.
Les États membres de l’ONU devraient exhorter les autorités à libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement et à révéler le sort et le lieu de détention des prisonniers qu’elles ont fait disparaître de force.
« Les autorités iraniennes ne devraient pas profiter des frappes israéliennes contre la prison d’Evin pour infliger davantage de mauvais traitements aux prisonniers, en particulier à ceux qui n’auraient jamais dû être incarcérés », a déclaré Michael Page. « Les États membres de l’ONU devraient faire pression sur le gouvernement iranien pour qu’il suspende immédiatement toute exécution programmée, libère toutes les personnes détenues arbitrairement, garantisse des conditions de détention humaines et sûres, et mette fin à l’angoisse des familles des personnes disparues de force en révélant leur sort et leur lieu de détention. »
Lire l'enquête complète en anglais ici.
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14.08.2025 à 06:00
(Beyrouth) – Les frappes aériennes israéliennes sur la prison iranienne d’Evin à Téhéran, le 23 juin 2025, étaient illégalement indiscriminées et constituent un crime de guerre manifeste, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les frappes ont touché plusieurs bâtiments du complexe et tué au moins 80 personnes, selon les déclarations officielles iraniennes, dont des prisonniers, des membres de leurs familles et du personnel pénitentiaire, en l'absence de toute cible militaire évidente.
Plus de 1 500 prisonniers auraient été détenus à la prison d'Evin au moment de l'attaque, dont de nombreux activistes et dissidents détenus par le gouvernement iranien en violation de leurs droits. Les frappes, menées pendant les heures de visite, ont considérablement endommagé le parloir, la cuisine centrale, la clinique médicale et les sections où étaient détenus des prisonniers, y compris des prisonniers politiques.
« Les frappes israéliennes sur la prison d'Evin le 23 juin ont tué et blessé des dizaines de civils sans aucune cible militaire évidente, en violation des lois de la guerre et elles constituent un crime de guerre manifeste », a déclaré Michael Page, directeur adjoint de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch. « L'attaque israélienne a mis en grave danger la vie déjà précaire des prisonniers d'Evin, dont beaucoup sont des dissidents et des activistes détenus à tort. »
Entre le 24 juin et le 29 juillet, Human Rights Watch a mené des entretiens auprès de 22 personnes au sujet de l'attaque, dont des proches de victimes et de prisonniers, d'anciens prisonniers d'Evin et d'autres personnes ayant une connaissance approfondie de la prison. Human Rights Watch a écrit aux autorités iraniennes et israéliennes les 2 et 7 juillet respectivement, pour demander des informations, mais n'a pas reçu de réponse.
Human Rights Watch a également analysé et vérifié des vidéos et des photographies des frappes israéliennes publiées par les médias et sur les réseaux sociaux, ainsi que des documents partagés directement avec les chercheurs, et des images satellite prises avant et après les frappes. Human Rights Watch n'a pas pu se rendre sur place, l'Iran n'autorisant pas l'accès aux organisations indépendantes de défense des droits humains.
L'enquête sur l'attaque du 23 juin contre la prison d'Evin fait partie d'une enquête plus large de Human Rights Watch sur les hostilités du 13 au 25 juin entre Israël et l'Iran, y compris les attaques de missiles balistiques iraniens sur des zones peuplées en Israël.
Les forces israéliennes ont mené des frappes sur la prison d'Evin, un complexe de 43 hectares dans le district 1 de Téhéran, entre 11h17 et 12h18 le 23 juin. Aucun avertissement préalable ne semble avoir été donné. Des images satellite, des vidéos et des témoignages montrent des impacts de frappes endommageant des bâtiments distants de plusieurs centaines de mètres.
Les frappes ont détruit l'entrée principale sud de la prison et une autre entrée au nord. Le bâtiment d'information des visiteurs, adjacent à l'entrée principale, a été entièrement détruit. Des proches de détenus et d'anciens détenus ont indiqué que de nombreuses familles fréquentent le bâtiment des visiteurs, notamment pour livrer des vêtements et des médicaments. Les frappes ont également touché le parloir, un complexe judiciaire abritant des procureurs adjoints, et ont gravement endommagé ou détruit plusieurs bâtiments du centre pénitentiaire, où se trouvent la clinique médicale et plusieurs services pénitentiaires.
Deux prisonniers politiques dans le quartier central 4 de la prison, Abolfazl Ghadiani et Mehdi Mahmoudian, ont décrit dans un compte rendu accessible au public les « bruits d'explosions répétées » à midi près de leur quartier. Ils ont vu la clinique brûler et l'entrepôt de nourriture et d'hygiène détruit. À 14 heures, ont-ils déclaré, les prisonniers avaient exhumé 15 à 20 corps des décombres, dont ceux d'autres prisonniers, du personnel de la clinique, des employés de l'entrepôt, ainsi que des gardes et des responsables de la Section 209, un centre de détention géré par le ministère du Renseignement où les dissidents sont régulièrement détenus.
Le Dr Saeedeh Makaremi, bénévole à la clinique, a publié sur Instagram qu'après les frappes, des prisonniers l'avaient sauvée des décombres. Elle a ensuite subi une intervention chirurgicale majeure, notamment une réimplantation de la main. Des médias d’État ont rapporté qu'un médecin a également été tué dans la clinique.
Les frappes ont endommagé des bâtiments et des véhicules à l'extérieur des parties nord du complexe pénitentiaire, tuant et blessant des résidents, dont Mehrangiz Imenpour, un artiste de 61 ans. Des médias nationaux ont signalé qu'Ali Asghar Pazouki, un homme d'affaires de 69 ans, a été tué à l'extérieur du complexe.
Human Rights Watch a constaté des dommages dans, ou à proximité, des sections de la prison utilisées pour détenir des personnes accusées d'atteintes à la sécurité nationale, notamment des activistes et des dissidents. Il s'agit des quartiers 4 et 8, des sections 209, 240, 241 et 2A, ainsi que du quartier des femmes. La principale section de quarantaine, où étaient détenues des personnes transgenres, a également été endommagée. Les autorités iraniennes n'ont pas communiqué sur l'état de santé ni sur le lieu de détention de nombreux prisonniers de ces sections, ce qui constitue des disparitions forcées en violation du droit international des droits humains.
En vertu du droit international humanitaire, également appelé lois de la guerre, les prisons sont présumées être des biens civils. L'enquête de Human Rights Watch n'a trouvé aucune preuve de la présence de cibles militaires dans le complexe pénitentiaire d'Evin au moment des frappes israéliennes. Aucune des sources interrogées, dont les prisonniers récemment libérés, les membres de leurs familles et les avocats qui se sont rendus à plusieurs reprises à la prison, n'a déclaré avoir connaissance de la présence de personnel, d'armes ou de matériel militaires iraniens dans l'enceinte de la prison.
Les déclarations des ministres israéliens immédiatement après l'attaque n'ont fait aucune mention de cibles militaires dans l'enceinte de la prison, mais ont présenté les frappes comme faisant partie des attaques d'Israël contre les institutions répressives de l'Iran. Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a écrit immédiatement après l'attaque qu'Israël avait frappé la prison d'Evin en raison de ses fonctions comme « agence de répression gouvernementale ». Une publication du ministre des Affaires étrangères Gideon Sa’ar sur X indiquait que la prison d’Evin avait été frappée en représailles aux attaques de l'Iran contre des civils en Israël.
Plusieurs heures après les frappes, l'armée israélienne a confirmé l'attaque, et un porte-parole militaire a affirmé, sans donner de preuves ni de détails, que l'Iran avait mené des « opérations de renseignement contre l'État d'Israël, y compris du contre-espionnage » dans la prison. Un porte-parole de l'armée israélienne a répété les mêmes allégations ce jour-là lors d'une interview avec les médias. La déclaration des Forces de défense israéliennes réitérait les déclarations précédentes du gouvernement selon lesquelles la prison d'Evin était un « symbole d'oppression pour le peuple iranien ».
Les lois de la guerre applicables au conflit armé international entre Israël et l'Iran interdisent les attaques visant des civils et des biens civils, qui ne font pas de distinction entre civils et combattants, ou qui sont susceptibles de causer aux civils ou aux biens civils des dommages disproportionnés par rapport à l'avantage militaire attendu. Les attaques indiscriminées incluent celles qui ne visent pas une cible militaire spécifique. Même si certains individus de la prison d’Evin étaient des militaires iraniens, l’attaque à grande échelle aurait été illégalement disproportionnée.
Les violations graves des lois de la guerre commises par des individus avec une intention criminelle – c’est-à-dire délibérément ou par négligence – constituent des crimes de guerre. Les gouvernements sont tenus d'enquêter sur les crimes de guerre présumés commis par leurs forces ou sur leur territoire, et de poursuivre les responsables comme il se doit. Israël et l'Iran ont tous deux un historique d'impunité et de réticence à enquêter conformément au droit international, et encore moins à poursuivre les auteurs d'éventuels crimes de guerre commis par leurs forces. Tous les gouvernements ont l'obligation de coopérer, dans la mesure du possible, afin de faciliter les enquêtes et les poursuites appropriées sur les crimes de guerre présumés.
« L’attaque israélienne illégale contre la prison d’Evin met en évidence les conséquences de l'impunité dont jouissent depuis longtemps les auteurs de graves violations du droit de la guerre», a conclu Michael Page. « Pour aggraver les choses, les forces israéliennes ont mis en grand danger des prisonniers qui étaient déjà victimes de la répression brutale des autorités iraniennes. »
Lire l'enquête complète en anglais ici.
13.08.2025 à 20:11
(Washington, 13 août 2025) – La présidente du Pérou, Dina Boluarte, a promulgué une loi d'amnistie garantissant l'impunité pour les crimes graves commis pendant le conflit armé interne qu’a connu ce pays, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.
Le Congrès péruvien a adopté cette loi le 9 juillet, et la présidente Boluarte l'a promulguée le 13 août. Cette loi accorde une amnistie générale aux membres des forces armées, de la police et des comités d'autodéfense accusés ou faisant l'objet d'une enquête pour des crimes présumés commis pendant le conflit armé interne qui a touché le Pérou entre 1980 et 2000. La loi prévoit également la remise en liberté des personnes précédemment condamnées pour des crimes commis lors de ce conflit armé, et actuellement âgées de plus de 70 ans.
« Cette loi est tout simplement une trahison envers les victimes péruviennes », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « La loi sape des décennies d'efforts pour garantir l'obligation de rendre des comptes pour les atrocités commises, et affaiblit davantage encore l'état de droit dans le pays. »
Le 24 juillet, la Cour interaméricaine des droits de l'homme avait enjoint au Pérou de s'abstenir d'appliquer le projet de loi jusqu'à ce qu'elle analyse la compatibilité de l'amnistie avec ses précédentes décisions concernant les abus commis pendant le conflit armé.
Le 31 juillet, cependant, lors d'une cérémonie de la police nationale à Lima, la présidente Boluarte avait déclaré que son gouvernement ferait avancer le projet de loi, quelle que soit la position de la Cour.
Pendant le conflit armé, les forces de sécurité péruviennes ont commis de graves abus, dont plusieurs crimes de guerre, tels que des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des actes de torture, des violences sexuelles et d'autres violations graves des droits humains. Selon la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation, environ 70 000 personnes ont été tuées et plus de 20 000 ont disparu entre 1980 et 2000. Les tribunaux péruviens ont prononcé des condamnations définitives dans plus de 150 affaires, et plus de 600 autres sont toujours en instance, selon le Coordonnateur national des droits humains.
En vertu de la Convention américaine relative aux droits de l'homme, ainsi que du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), le Pérou a l'obligation légale d'enquêter sur les violations graves des droits humains, d’engager des poursuites et de sanctionner les auteurs de tels abus. Les lois d'amnistie qui empêchent l'obligation de rendre des comptes pour des crimes tels que les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et la torture violent cette obligation, et privent les victimes de leur droit à la justice.
Ces dernières années, l'administration Boluarte, le Congrès et d'autres autorités ont défié à plusieurs reprises les ordonnances de la Cour interaméricaine des droits de l'homme. En décembre 2023, le Tribunal constitutionnel péruvien, en violation des obligations de ce pays en tant qu’État partie à la Convention américaine relative aux droits de l'homme, a ordonné la libération de l'ancien président Alberto Fujimori, au pouvoir de 1990 à 2000, qui purgeait une peine de 25 ans de prison pour violations graves des droits humains. Malgré l'ordre de la Cour qui enjoignait au Pérou de ne pas libérer Fujimori dans l'attente de son évaluation des faits, le gouvernement Boluarte a procédé à sa libération.
Le 6 juin 2024, le Congrès péruvien avait déjà approuvé un précédent projet de loi établissant un délai de prescription pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis avant 2003. Le 1er juillet 2024, la Cour interaméricaine des droits de l'homme avait émis une ordonnance qui enjoignait à l’État péruvien de ne pas faire avancer ce projet de loi, en raison de son incompatibilité apparente avec le droit international des droits humains. Toutefois, la présidente Boluarte n'avait pas opposé son veto à ce projet de loi, qu’elle avait promulguée en tant que loi en août 2024.
« Le Pérou rejoint les rangs du Nicaragua, du Venezuela et d'autres pays qui défient la Cour interaméricaine des droits de l'homme et, ce faisant, bafouent les droits des victimes », a conclu Juanita Goebertus. « La loi d'amnistie n'aurait jamais dû être adoptée, et devrait être abrogée. »
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