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18.11.2024 à 15:52
Pourquoi les chats ont envahi Internet
Justine Simon, Maître de conférences, Université de Franche-Comté, ELLIADD, Université de Franche-Comté – UBFC
Texte intégral (1834 mots)
Des chats partout : en dessins, en photos, en vidéos, en GIFs, en mèmes… Ils sont devenus les véritables stars d’Internet. Qu’ils fassent des blagues, des câlins ou des bêtises, leurs images circulent sans fin sur les réseaux sociaux. Mais pourquoi ces animaux ont-ils envahi nos écrans ? Et que nous révèlent-ils sur notre société et sur le fonctionnement des plates-formes que nous utilisons au quotidien ?
Cela fait plusieurs années que j’étudie la propagation des images sur les réseaux sociaux, qu’elles soient humoristiques ou plus sérieuses. C’est dans les années 2000 que le chat est devenu un objet central de la viralité avec des formats comme les « LOLcats » (2007) et cette viralité s’est accentuée avec la montée en puissance des réseaux sociaux (comme Facebook, YouTube, Instagram et TikTok).
Au cours de ma recherche sur les #ChatonsMignons (c’est le terme que j’utilise pour désigner ce phénomène viral), j’ai relevé plusieurs aspects fascinants, comme l’utilisation symbolique du chat en politique ou sa dimension participative, lorsque des internautes créent des mèmes.
Un mème est un élément décliné massivement sur Internet et qui s’inscrit dans une logique de participation. Il peut s’agir d’un texte, d’une image (fixe ou animée), d’un son, d’une musique ou une combinaison de ces différents éléments.
À lire aussi : Le mème : un objet politique
On peut également noter le renforcement des liens sociaux que le partage d’images de chats crée, et enfin, leur capacité à générer des émotions fortes.
Le chat en politique, un symbole multiple
Les chats ne sont pas seulement mignons : ils sont aussi des symboles très puissants. En analysant un total de 4 000 publications sur Twitter, Instagram et TikTok – une veille de contenus et une recherche par mots-clés ont été menées sur une période de quatre mois (d’octobre 2021 à janvier 2022) – il est apparu que le chat pouvait revêtir de nombreux masques.
Parfois, il est un outil de mobilisation collective, parfois une arme pour la propagande politique. Par exemple, un GIF de chat noir effrayé peut symboliser la résistance politique et renvoyer à l’imaginaire anarchiste, dans lequel le chat noir incarne la révolte.
À l’inverse, Marine Le Pen utilise aussi les #ChatonsMignons pour adoucir son image dans une stratégie de dédiabolisation – c’est ce que je nomme le « catwashing » : une stratégie de communication politique qui vise à donner une image trompeuse des valeurs portées par une personnalité politique.
Le chat devient alors un symbole politique, parfois pour défendre des idées de liberté, parfois pour cacher des messages plus inquiétants.
Même Donald Trump a mentionné le félin durant la campagne présidentielle américaine, dans une formule absurde accusant les migrants de manger des chiens et des chats lors du seul débat télévisé l’opposant à Kamala Harris,créant ainsi un buzz monumental.
Cette déclaration a généré une vague de mèmes et de réactions sur les réseaux, au départ pour la tourner au ridicule, puis elle a été récupérée par les pro-Trump. Ce raz-de-marée de mèmes a pris une importance démesurée au point de faire oublier le reste du débat. On peut alors s’interroger : n’était-ce pas une stratégie volontaire de la part du camp républicain ?
La participation des internautes : un jeu collectif
Car les mèmes de chats, en particulier les célèbres « lolcats », sont devenus des éléments clés de la culture Internet participative. Ces images de chats avec des textes souvent absurdes ou mal écrits constituent une façon décalée de s’exprimer en ligne.
En partageant et en réinventant ces mèmes, les internautes s’approprient le phénomène des #ChatonsMignons pour créer une sorte de langage collectif.
L’exemple du « Nyan Cat », un chat pixelisé volant dans l’espace avec une traînée d’arc-en-ciel, montre bien à quel point les chats sont intégrés à la culture participative du web.
Ce mème, créé en 2011, est devenu emblématique, avec des vidéos de plusieurs heures sur fond de boucle musicale kitsch et hypnotique.
Plus récemment, le mème « Chipi chipi chapa chapa cat », apparu en 2023, a suivi une ascension virale similaire (28 millions de vues sur ces dix derniers mois pour cette vidéo), prouvant que les chats sont loin de lasser les internautes.
La culture participative pousse ces derniers à relever des défis : créer de nouveaux contenus, utiliser des références cachées et partager ces créations à grande échelle. Avec l’arrivée de plates-formes comme TikTok, ce phénomène s’accélère : chaque vidéo devient un terrain de jeu collectif. Mais ce jeu peut aussi servir des objectifs sérieux, comme dans les cas d’activisme en ligne.
Le chat, un outil de sociabilité
Ils jouent aussi un rôle important dans la manière dont les gens se connectent et interagissent en ligne, et cela ne se réalise pas que dans un registre humoristique, comme pour les mèmes. Le chat favorise ainsi un lien social qui traverse les frontières géographiques et culturelles, rassemblant des individus autour de l’amour des animaux.
Partager une photo de son propre animal domestique devient une façon de se montrer tout en restant en arrière-plan. C’est ce qu’on appelle l’extimité, c’est-à-dire le fait de rendre publics certains aspects de sa vie privée. Le chat sert alors d’intermédiaire, permettant de partager des émotions, des moments de vie, tout en protégeant son identité.
Ainsi, beaucoup de gens publient des photos d’eux en visioconférence avec leur chat sur les genoux. Ce type de contenu met en avant non seulement leur quotidien, mais aussi la relation particulière qu’ils entretiennent avec leur animal. Ces échanges dépassent la simple publication de photos de son chat ou de « selfiecats » (selfies pris avec son chat).
Il s’agit de mettre en valeur une expérience collective, où chaque interaction avec une image de chat contribue à une conversation globale. Le « selfiecat » est ainsi devenu un moyen d’exprimer et de valoriser cette complicité unique, aux yeux de tous.
Dans de nombreux cas, la relation entre l’humain et le chat est mise en avant comme une expérience partagée, créant une sociabilité numérique autour de cette humanité connectée. Les membres des communautés se retrouvent pour commenter, échanger des anecdotes ou des conseils, et ces interactions virtuelles renforcent les liens sociaux.
En ce sens, les chats deviennent plus qu’un simple objet de viralité : ils sont le ciment d’une forme de sociabilité numérique qui permet aux gens de se rassembler, de se comprendre et de se soutenir, même sans se connaître.
Les chats, une machine à émotions
Enfin, si les #ChatonsMignons sont si viraux, c’est parce qu’ils sont capables de provoquer des émotions fortes. Les chats ont un regard, une posture et des mimiques si proches de celles des humains qu’ils nous permettent d’exprimer toute une gamme d’émotions : de la joie à la frustration, en passant par l’étonnement ou la colère.
Cette puissance affective explique pourquoi ils génèrent autant de clics et de partages. Sur les réseaux sociaux, où tout repose sur l’attention et l’engagement, les chats deviennent de véritables machines à clics. Les plates-formes profitent de cette viralité pour capter l’attention des utilisateurs et monétiser leur temps passé en ligne.
Les chats ont envahi le web parce qu’ils sont bien plus que des créatures mignonnes. Ils sont des symboles, des outils de participation, des créateurs de liens sociaux et des déclencheurs d’émotions. Leur succès viral s’explique par leur capacité à s’adapter à toutes ces fonctions à la fois. En fin de compte, les #ChatonsMignons nous apprennent beaucoup sur nous-mêmes, nos besoins d’expression et la manière dont nous interagissons dans un monde hyperconnecté.
Justine Simon est l’autrice de « #ChatonsMignons. Apprivoiser les enjeux de la culture numérique », paru aux éditions de l’Harmattan.
Justine Simon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
14.11.2024 à 17:27
Spartacus, célèbre gladiateur, était-il un révolutionnaire ?
Christian-Georges Schwentzel, Professeur d'histoire ancienne, Université de Lorraine
Texte intégral (3514 mots)
Le gladiateur thrace Spartacus est à l’origine de la troisième guerre servile, le plus important soulèvement d’esclaves contre la République romaine, entre 73 et 71 av. J.-C. Pacifiste, anticapitaliste, révolutionnaire : au fil de l’histoire, sa vie a été romancée, interprétée et instrumentalisée. Mais que sait-on vraiment de son destin ?
Au début du XXe siècle, Spartacus, meneur de la grande révolte des esclaves qui fit trembler Rome, de 73 à 71 av. J.-C., est vu comme le précurseur des mouvements révolutionnaires communistes. C’est pourquoi, en Allemagne, Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht choisissent son nom comme figure de proue de leur Ligue Spartakiste, ou « Spartakusbund » (1914-1919).
« Que veut Spartacus ? » (« Was will Spartacus ? ») peut-on lire sur une affiche éditée par la Ligue. La réponse est inscrite sur les têtes d’une hydre que Spartacus s’apprête à trancher, en référence au deuxième des travaux d’Hercule, le héros de la mythologie avec lequel le révolutionnaire est ici confondu. Spartacus veut éliminer le « nouveau militarisme » (« Neuer Militarismus »), le capitalisme (« Kapitalismus ») et la noblesse terrienne des junkers, propriétaires de grands domaines (« Junkertum »).
Un pacifiste ?
Dès le début de sa révolte, Spartacus n’a de cesse d’organiser ses troupes pour en faire une puissante armée sur le modèle romain. Il est proclamé commandant en chef par ses hommes qui lui remettent les faisceaux pris à l’ennemi, raconte l’historien latin Florus (Abrégé de l’histoire romaine, III, 21).
Cet assemblage de bâtons, liés par des lanières autour d’une hache, était à Rome un symbole du pouvoir des magistrats. En s’appropriant les attributs de ses ennemis, Spartacus se pose en chef militaire à la manière romaine. C’est pourquoi, à la fin du chapitre qu’il lui consacre, Florus définit assez logiquement le leader de la révolte comme une sorte d’imperator (quasi imperator).
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Au printemps 72 av. J.-C., lors d’une cérémonie d’hommage rendu à ses hommes morts sur le champ de bataille, Spartacus oblige des légionnaires romains qu’il a faits prisonniers à se battre entre eux, comme des gladiateurs. Ainsi, il n’abolit pas les combats sanglants mais, par esprit de vengeance, il inverse le rapport de force entre les dominants et les dominés. Il n’est donc, à proprement parler, ni pacifiste ni antimilitariste. Comment en serait-il autrement ? Pour mener à bien sa mission, le révolutionnaire emploie les mêmes armes que ses ennemis.
Il n’a pas non plus aboli l’esclavage. Aucun auteur antique n’évoque cette idée qui ne lui est certainement jamais passée par la tête, tant l’esclavage semblait être une évidence à son époque.
Un anticapitaliste ?
Lors de son séjour à Thurium, en Italie du Sud, durant l’hiver 73-72 av. J.-C., Spartacus échange le butin de ses pillages contre le fer et le bronze que lui apportent des commerçants. Selon l’historien antique Appien (Guerres civiles, I, 117), « il interdit aux marchands d’introduire dans la ville des objets d’or et d’argent et aux siens de rien acheter de ce genre ». S’agissait-il d’un rejet des métaux précieux vus comme potentiellement corrupteurs ?
Spartacus avait alors pour priorité de fabriquer des armes. L’or et l’argent ne présentaient aucun intérêt pour lui. L’interdit qui frappait les métaux précieux ne procédait pas d’un choix idéologique. Spartacus n’envisageait pas d’instaurer un État anticapitaliste, mais un régime militaire, tout entier consacré à l’effort de guerre.
L’idéologie religieuse de Spartacus
L’écrivain antique Plutarque (Vie de Crassus, 8) nous révèle que Spartacus était accompagné de son épouse, originaire comme lui de Thrace. Tous deux appartenaient au peuple des Maedi dont le territoire se trouvait au sud-ouest de l’actuelle Bulgarie. C’était une prêtresse de Dionysos, ou Bacchus pour les Romains : « Sa femme qui était du même peuple que lui, était une prophétesse (mantiké), initiée aux mystères (orgiasmoi) de Dionysos ».
Elle avait été vendue comme esclave en même temps que son époux et expédiée depuis la Thrace jusqu’en Italie. Un jour, alors que Spartacus s’était endormi, peu de temps avant son arrivée au marché d’esclaves de Rome, un serpent s’enroula autour de son visage. La prophétesse interpréta cet accident comme un prodige, signe d’une grande puissance à venir pour l’homme ainsi intronisé par Dionysos. On devine, à partir de ce passage de Plutarque, que Spartacus se disait le protégé du dieu et fondait son autorité sur des croyances religieuses.
Le thème du choix divin manifesté par un reptile se retrouvera plus tard dans l’Histoire Auguste. On raconte qu’un serpent se serait enroulé, au IIIe siècle apr. J.-C., autour de la tête du futur empereur Maximin, lui aussi d’origine thrace, tandis qu’il dormait (Histoire Auguste, « Les deux Maximin », XXX, 1).
Cette dimension théocratique ne remet nullement en cause le caractère révolutionnaire de la révolte de Spartacus. En effet, le culte de Dionysos était considéré comme subversif par la noblesse romaine, parce qu’il s’adressait indistinctement aux hommes et aux femmes, aux citoyens et aux étrangers. C’est en raison de cette mixité sociale, considérée comme dangereuse pour l’État romain, que le Sénat avait interdit le culte de Bacchus, en 186 av. J.-C., lors de la fameuse affaire dite « des Bacchanales ».
Spartacus pouvait donc se présenter comme l’envoyé terrestre de Dionysos, une sorte de messie, dont la mission était de libérer les opprimés et de se venger des Romains persécuteurs.
Des révoltes messianiques
Avant la révolte de Spartacus, deux autres soulèvements comparables avaient déjà eu lieu en Sicile. Dans les années 140-139 av. J.-C., des esclaves en fuite s’étaient rangés sous l’autorité d’un Syrien nommé Eunous.
Habile metteur en scène, selon Florus (Abrégé de l’histoire romaine, III, 20), il se faisait passer pour un magicien : une noix percée contenant du soufre incandescent qu’il plaçait dans sa bouche, lui permettait d’impressionner ses auditeurs en crachant des étincelles lorsqu’il prédisait l’avenir.
Eunous prétendait être doué de dons prophétiques et interprétait les songes que lui envoyait la grande déesse syrienne, Atargatis qui, disait-il, communiquait avec lui. Il se faisait passer pour le prophète de cette divinité. Comme plusieurs de ses prédictions s’étaient réalisées, il acquit un immense prestige et en profita pour prendre le titre royal (basileus) et le nom d’Antiochos, référence explicite au souverain séleucide du moment : Antiochos VII Évergète qui régnait alors sur la Syrie. Le roi des esclaves organisa une cour et fit frapper des monnaies à l’effigie de Déméter, déesse considérée comme l’équivalent grec d’Atargatis. Eunous-Antiochos s’appuyait sur une idéologie théocratique qui faisait de lui un souverain choisi par la divinité et envoyé sur terre pour y réaliser sa mission salvatrice : l’affranchissement des populations soumises à l’ordre romain.
Moins de trente ans après la mort d’Eunous, une nouvelle guerre servile éclata en Sicile (104-100 av. J.-C.). Ce soulèvement fut mené par un chef charismatique, du nom de Salvius, qui prétendait lui aussi posséder le don de divination.
Dionysos en Campanie
En choisissant de se référer à Dionysos, Spartacus se révèle particulièrement habile. Ce dieu était adoré en Thrace, mais aussi en Italie du sud. En Campanie, région de Naples, où éclata la révolte, Bacchus faisait figure de protecteur du Vésuve, comme le montre une fresque découverte à Pompéi, aujourd’hui exposée au musée archéologique de Naples. Or, c’est au sommet de ce volcan, véritable forteresse naturelle, que Spartacus et ses hommes se réfugièrent dans les premiers temps de la révolte. Peut-être leur avait-il fait croire que Dionysos lui-même lui avait désigné ce lieu.
Après la répression des Bacchanales en 186 av. J.-C., Rome ne parvint pas à éradiquer le culte incriminé, comme en témoigne l’extraordinaire fresque de la Villa des Mystères, à Pompéi, réalisée dans les années 70 av. J.-C, c’est-à-dire à peu près à la même époque que la révolte de Spartacus.
Depuis sa découverte au début du XXe siècle, ce chef-d’œuvre de la peinture romaine a fait l’objet de diverses interprétations, parfois contradictoires. Une certitude néanmoins : la fresque est en lien avec Dionysos, représenté mollement étendu dans les bras d’une femme. Il paraît à la fois ivre et heureux.
D’autres scènes suggèrent des pratiques mêlant érotisme et extase. On voit une ménade, c’est-à-dire une femme possédée par le dieu, en train de danser, tout en jouant avec les cymbales qu’elle tient au-dessus de sa tête. Elle exécute une danse rythmée et bondissante, si bien que, sous l’effet du mouvement, sa tunique se soulève largement, dévoilant son dos et ses cuisses.
La femme de Spartacus se livrait peut-être, elle aussi, à de telles transes lorsque, possédée par son dieu, elle proclamait que son époux était le révolutionnaire choisi par Dionysos venu inverser l’ordre du monde romain en faveur des défavorisés.
Christian-Georges Schwentzel intervient dans « Spartacus et les gladiateurs », numéro inédit de « Secrets d’Histoire », présenté par Stéphane Bern, mercredi 20 novembre 2024, sur France 3.
Christian-Georges Schwentzel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
13.11.2024 à 17:12
Comment va évoluer l’île de loisirs de Vaires-Torcy, site des JO 2024 ?
Antoine Marsac, Maitre de conférences en sociologie du sport, Université Gustave Eiffel
Texte intégral (2640 mots)
L’île de loisirs de Vaires-Torcy, en Île-de-France, existait avant les JOP, mais l’événement a été l’occasion d’y opérer de nouveaux aménagements. Quel héritage Paris 2024 va-t-il laisser sur place ? Et quels sont les effets de ces évolutions sur le site et sur celles et ceux qui fréquentent habituellement cette île de loisirs ?
L’île de loisirs de Vaires-Torcy (IdL) a accueilli, cet été, les épreuves d’aviron et de canoë-kayak des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024. C’est l’un des trois sites mondiaux à pouvoir recevoir l’ensemble des épreuves de rame et de pagaie. Ce site a dû réaliser d’importantes transformations structurelles depuis son élection comme site olympique pour répondre aux attentes du cahier des charges olympique (aménagements sportifs, voies d’accès…). L’IdL a su se réinventer afin d’accueillir le méga évènement, tout en conservant ses espaces de loisirs destinés à la population locale. Mais l’équilibre demeure fragile, car la dualité entre sport de haute performance et espace de loisirs fait émerger un questionnement sur les aménagements de l’IdL de Vaires-Torcy. Quels sont les aménagements de l’île avant et pendant les JOP ? Quel héritage Paris 2024 va-t-il laisser ? Quels sont les effets de ces évolutions sur les utilisateurs de cette IdL ?
Une enquête menée au moyen de photographies, d’observation et d’entretiens semi-directifs nous permet d’éclairer le mode de gestion du site, les différentes pratiques et les aménagements dans cette IdL appartenant à la Région Île-de-France (IDF). Elle apportera également des éléments d’éclairage et d’interrogations sur les répercussions de ces aménagements olympiques pour les promeneurs.
Un côté sportif et un côté loisirs
D’une superficie de 350 hectares, c’est l’une des plus vaste IdL de région parisienne. Au cœur de l’agglomération Paris Vallée de la Marne, elle se situe à 32,8 km en partant de Paris Notre-Dame sur les communes de Vaires-sur-Marne, Torcy et Chelles ainsi qu’à quelques kilomètres de l’Institut National du Sport de l’Expertise et de la Performance. Cet espace naturel aménagé accueille les champions de rame ainsi que les Franciliens à la recherche d’un îlot de fraîcheur. L’IdL possède deux espaces : un côté sportif (Vaires-sur-Marne) avec son bassin balisé d’eau calme, ses stades d’eau vive et un côté loisirs (Torcy) avec ses lieux de baignade, équitation, et ses chemins de promenade.
Elle représente une échappatoire dans la vie urbaine en IDF, synonyme « d’ailleurs compensatoire » pour les riverains. Elle conjugue espaces de détente et loisirs sportifs offrant aux utilisateurs des espaces nautiques sportifs et de promenade proche de leur domicile. Elle se définit comme un complexe « réunissant dans un site naturel proche de la population à desservir, les éléments propices à la pratique des activités de pleine nature et d’études culturelles, ainsi que la détente et la régénération ».
Ouverte en 1990, cette île de loisirs accueille des compétitions d’aviron et de canoë-kayak depuis son ouverture. Après sa sélection comme site olympique, le site de Vaires-sur-Marne a été réaménagé pour les JOP de 2024. Premier site olympique français livré au Comité d’Organisation des JOP 2024 en 2019, il devient la pierre angulaire des sports de rame et de pagaie. Pendant les JOP, ce site accueille 36 000 visiteurs par jour, faisant de lui le deuxième en capacité après le Stade de France.
Cohabitation entre le public et les sportifs de haut niveau
Avec 612 000 visiteurs par an, l’IdL est l’un des sites les plus fréquentés d’Île-de-France. Son orientation de haute performance lui confère des particularités très spécifiques. Elle est gérée par une délégation de service public – à l’avenir, la région Île-de-France propriétaire souhaite confier la gestion des îles de loisirs à des délégataires – avec un double enjeu : le sport de haute performance et l’accès aux loisirs publics. Sa renommée s’est faite grâce à ses deux stades d’eau vive, offrant des conditions d’entraînement optimales.
L’Ile de loisirs a dû réaménager ses équipements sportifs et extra sportifs pour accueillir les JOP, pour un coût de 101 millions d’euros. Le bassin, balisé par les lignes d’eau sur deux kilomètres, constitue le pilier de l’IdL avec une tour d’arrivée, un ponton de départ, cinq pontons d’embarquement et débarquement (accessibles aux personnes à mobilités réduites (PMR)) ainsi qu’une route bitumée destinée aux entraîneurs pour le suivi des athlètes. Des installations éphémères comme les gradins, les tours TV, une ligne de bouées anti-vagues sont installées.
Avec ses chemins adaptés aux mobilités douces et accessibles aux PMR, l’IdL (hors secteur haut niveau) est ouverte 24h/24 aux visiteurs.
L’impact des JOP
Mais les restructurations du site ferment partiellement l’IdL au public. Ces transformations perturbent la biodiversité, les habitudes et la fréquentation du site par ses usagers. Si la construction du stade nautique a transformé environ un quart du site, la question de la protection de l’environnement n’en demeure pas moins prégnante. Les conséquences sont une disparition des mares, des roselières, une modification de la faune et de la flore.
Plus de 62 % des usagers habitent à moins de 10 kilomètres du site[9] : la fermeture et les modifications d’accès aux espaces en réaménagement ont donc eu un fort impact sur ses utilisateurs. Ce sont principalement des familles, des jeunes, des retraités, des sportifs ou des personnes à mobilité réduite. Pour certains, l’IdL permet de se ressourcer et de pratiquer une activité physique :
« Il fait beau, le ciel est bleu, l’eau, ça scintille ça brille, vous voyez là, moi ça me fait des micro-vacances ! […] Tous les gens qui habitent en appartement […] on a besoin de jardin, de nature. »
(Passante)
A l’approche des JOP, les travaux de restructuration posent un réel problème aux promeneurs :
« Moi je viens ici car j’aime bien faire mon sport ici. C’est pour la détente. […]. C’est calme. C’est reposant […] mais là c’est plus possible. »
Ou encore :
« Tous ces grillages, toutes ces clôtures qui font que l’on a l’impression qu’on est parqués ».
Après les JOP, ces usagers ont repris la tradition de la promenade. Nous avons observé lors de nos visites que les usagers empruntaient alors des chemins annexes à ceux de l’IdL. La mise en œuvre du site en configuration « spectacle » a impacté directement les usagers qui, depuis le 17 juin dernier, se voient restreints à certaines zones. Sa fermeture pendant la période estivale impacte les familles ne partant pas en vacances. En effet, elle participe à une migration de la population vers d’autres îles de loisir à proximité, engendrant une augmentation des problèmes de surveillance et de sécurité de ces sites.
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Cette enquête a mis en évidence les conséquences du réaménagement du site olympique de Vaires-sur-Marne pour ses usagers. Les JOP ont connu un véritable succès auprès des spectateurs et des athlètes, leur offrant les conditions optimales pour performer ; ils sont néanmoins à l’origine de répercussions sur les espaces de promenade ainsi que sur l’écosystème de ce site.
Les années post olympiques vont être déterminantes pour l’avenir de l’IdL de Vaires-Torcy, en fonction de l’orientation choisie par les instances dirigeantes. Quels vont être les droits d’accès et d’utilisation des équipements du site, quel sera le public visé ? Les espaces de promenade seront-ils rétablis ?
Ce travail a été mené dans le cadre de l’atelier de recherche NUMCAP 3 de la Graduate School Program du Labex Futurs urbains de l’Université Gustave Eiffel.
Lucile Barbaudy, Antoine Lefebvre et Aristide Vidagbandji, étudiants en Master 2 STAPS, Sport et sciences sociales, ont contribué à la rédaction de cet article.
Antoine Marsac ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
12.11.2024 à 17:37
Trente-cinq ans après la chute du mur, Berlin est divisée sur le devenir des bâtiments de l’ex-RDA
Katrin Schreiter, Senior Lecturer in German and History, King's College London
Texte intégral (2108 mots)
Le 35e anniversaire de la chute du mur de Berlin, événement qui a symbolisé l’effondrement du communisme en Europe de l’Est et marqué la fin de la guerre froide, est l’occasion de faire le point sur ce qu’il reste de l’Allemagne de l’Est (RDA) dans la capitale allemande.
Les vestiges du mur dans la partie orientale de la ville, dont le plus visible est la « East Side Gallery » le long de la Spree à Berlin-Friedrichshain, sont devenus une attraction touristique. De même, l’ancien poste-frontière américain, Checkpoint Charlie, est une étape très fréquentée sur la carte touristique de Berlin.
De nombreuses dalles de béton originales du mur ont été offertes à l’étranger. Un morceau portant des graffitis de l’artiste Jürgen Grosse, connu sous le nom d’Indiano, est exposé à l’extérieur du musée impérial de la guerre de Londres.
Ce qui reste du mur de Berlin est une ligne de démarcation qui tend à s’effacer et qui fait trébucher les passants sur cette partie de l’histoire allemande, quand le pays a été divisé pendant 40 ans et qu’il y avait un « mur de protection antifasciste » censé séparer les Allemands de l’Est de l’attrait de l’Ouest capitaliste.
Cependant, le touriste attentif remarquera que les monuments de l’ancienne RDA disparaissent peu à peu du paysage berlinois. Le patrimoine architectural est transformé par les urbanistes – victime du désir politique d’encadrer le passé de l’Allemagne de l’Est.
Tous les types d’amiante ne se valent pas
Ce qui symbolise le mieux cette disparition progressive est le Palais de la République, le bâtiment parlementaire et espace public en verre, acier et béton de la RDA. Il a été érigé en 1976 sur le site du palais des Hohenzollern, qui abritait autrefois la famille régnante de l’Allemagne impériale, mais qui a été détruit pendant la guerre. La découverte d’amiante dans le « palais du peuple » est-allemand dans les années 1990 a fait de sa démolition une option rationnelle. Elle eu lieu au début des années 2000.
Les fonds auraient pu être investis dans la réparation du bâtiment, si l’on avait voulu sauver ce patrimoine architectural emblématique de la RDA. Mais les forces conservatrices ont mobilisé un fort soutien politique en faveur d’un projet très controversé pour le remplacer : la reconstruction partielle du palais des Hohenzollern.
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Les partisans du projet mettent en avant la tradition et l’histoire commune de tous les Allemands. Les opposants évoquent les crimes coloniaux de l’empire. Ce débat se poursuit depuis que le nouveau bâtiment abrite le Forum Humboldt, un musée qui abrite une collection « interculturelle » d’objets coloniaux qui n’appartiennent pas légitimement à l’Allemagne.
Entre-temps, le Centre international des congrès, un complexe de conférences situé à l’ouest de Berlin qui a également été construit avec de l’amiante dans les années 1970, a été, lui, inscrit sur la liste des bâtiments à préserver.
Un patrimoine en voie de neutralisation
En parallèle, la ville a adopté une approche différente pour d’autres bâtiments plus utilitaires, avec par exemple l’effort de restructuration des célèbres plattenbauten préfabriqués – les grands immeubles d’habitation qui dominent le paysage urbain dans la partie est de la ville.
Selon l’Agence statistique allemande, entre 1970 et 1990, la RDA a construit environ 1,9 million d’appartements dans des blocs de ce type pour lutter contre une grave pénurie de logements. Ces immeubles sont devenus cultes au début des années 2000, lorsqu’il est devenu à la mode pour les étudiants universitaires et les jeunes actifs berlinois de vivre dans ces immeubles. Les préoccupations relatives à l’insuffisance de l’espace de vie dans une capitale en pleine expansion ont justifié les investissements réalisés par la ville pour moderniser ces bâtiments.
Mais une approche aussi utilitaire du patrimoine architectural est-allemand prive sans doute les bâtiments tels que les plattenbauten de leur signification politique. En étant rénovés en vue d’une utilisation future, ils sont aussi « neutralisés ».
Ces dernières années, un certain nombre de plattenbauten situés en dehors de Berlin ont été inscrits sur la liste des bâtiments à préserver. Le mois dernier, une mesure similaire a été annoncée pour le centre de Berlin. Elle concerne des habitations situées dans les rues Münzstraße, Torstraße, Neue et Alte Schönhauser Straße et Dircksenstraße.
Mais quiconque connaît le quartier sait que les bâtiments qui s’y trouvent ont été construits par les urbanistes est-allemands lors de la « redécouverte » du patrimoine architectural berlinois dans les années 1980. Ils imitent le style des immeubles d’appartements du début du siècle et n’ont rien en commun avec les gigantesques plattenbauten modernistes qui avaient contribué à résoudre la crise du logement en Allemagne de l’Est.
Berlin, ville de la guerre froide et nouveau siège du gouvernement de l’Allemagne réunifiée, reste un espace urbain particulier. Les préjugés conscients ou inconscients des politiciens entrent inévitablement en jeu lorsqu’ils décident quels bâtiments sont autorisés à rester debout et lesquels sont démolis.
Katrin Schreiter ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
10.11.2024 à 19:36
Quincy Jones, maître incontesté de l’arrangement musical
Jose Valentino Ruiz, Associate Professsor of Music Business and Entrepreneurship, University of Florida
Texte intégral (1991 mots)
Sur la pochette de certains des albums les plus mémorables et les plus vendus de tous les temps, vous trouverez la mention « Produit et arrangé par Quincy Jones ». Un gage de qualité qui ne s’est jamais démenti.
Quincy Jones, décédé le 3 novembre 2024 à l’âge de 91 ans, a transformé notre conception de l’arrangement musical. Son travail a traversé les décennies et les genres, du jazz à la pop en passant par le hip-hop et la musique de film. Il a travaillé avec des icônes de la pop comme Michael Jackson, Frank Sinatra, Ray Charles et Aretha Franklin, mais aussi avec des artistes moins connus comme Lesley Gore et Tevin Campbell.
Chacun de ses projets, de ses collaborations et de ses incursions dans de nouveaux genres a redéfini ce que signifie arranger de la musique.
En tant que professeur d’économie musicale et d’entrepreneuriat, j’ai étudié et enseigné les techniques de Jones, qui, je l’espère, pourront inspirer la prochaine génération de musiciens.
Un maître de l’architecture musicale
L’art de l’arrangement musical, a priori, peut sembler un concept abstrait.
Alors qu’un compositeur écrit la mélodie et l’harmonie, un arrangeur façonne l’expérience de l’auditeur, en choisissant quels instruments jouent à quel moment, comment les textures se construisent et à quels moments les dynamiques changent.
L’arrangement transforme une partition en une œuvre d’art qui trouve un écho auprès des auditeurs. Par essence, un arrangeur agit comme un architecte musical, concevant la structure d’une chanson afin de raconter une histoire captivante.
Jones avait une approche visionnaire de l’arrangement. Il ne se contentait pas de combler les lacunes d’une mélodie en ajoutant un rythme de batterie et une section de cuivres ; il créait un récit musical qui donnait à chaque instrument une raison d’être, guidant les auditeurs dans un voyage émotionnel.
Depuis ses premières collaborations dans les années 1950 et 1960 avec de grands noms du jazz comme Count Basie et la star du R&B Ray Charles, jusqu’à ses superproductions avec Michael Jackson, Jones considérait l’arrangement comme un outil permettant de guider les auditeurs d’un moment musical à l’autre.
Sublimer les voix
Son travail sur l’album live Sinatra at the Sands n’est qu’un exemple parmi d’autres.
Jones a créé des arrangements de big band luxuriants et énergiques qui complètent parfaitement la voix douce et chaude de Sinatra. Le choix des cuivres et les changements de dynamique amplifient le charisme de Sinatra, transformant l’album en une expérience vivante, presque cinématographique. Contrairement à de nombreux arrangements qui restent souvent en arrière-plan, ceux de Jones occupe le devant de la scène, se fondant harmonieusement avec la voix de Sinatra tout en ajoutant de la profondeur à l’ensemble de la performance.
Dans « I Can’t Stop Loving You » de Ray Charles, Jones utilise des sons orchestraux et des voix d’arrière-plan pour faire ressortir la voix de Charles, créant ainsi une expérience riche en émotions pour les auditeurs. En associant intelligemment les voix teintées de gospel de Charles à un arrangement orchestral raffiné, il parvient à transcrire la tension entre le chagrin et la résilience – une démonstration de sa capacité à communiquer des émotions complexes par le biais d’un arrangement.
Transformer les chansons en histoires
L’habileté de Quincy Jones à utiliser les arrangements pour raconter des histoires est encore plus manifeste dans sa collaboration avec Michaël Jackson.
Des albums comme Thriller et Off the Wall ont mis en évidence le talent de Jones pour superposer les sons de manière inventive. Sur Thriller, il combine des éléments électroniques et acoustiques pour créer un paysage sonore multidimensionnel, établissant de nouvelles normes de production.
Sa capacité à incorporer des textures, des voix de fond et des choix d’instruments uniques – tels que la narration emblématique de l’acteur Vincent Price sur la chanson « Thriller » – a transformé la musique pop, ouvrant la voie aux futurs producteurs pour qu’ils expérimentent cette forme de narration dans leurs propres arrangements.
Avec « Bad », Jones a repoussé les limites du genre en mélangeant des rythmes funk avec des structures pop, donnant à au titre un attrait intemporel.
L’arrangement de la chanson comporte des couches de rythme et d’harmonie qui créent un sentiment de tension et de puissance, renforçant le message de confiance et de défi de Jackson. Chaque instrument et chaque voix utilisé sur « Bad » a sa raison d’être, créant un son audacieux et engageant.
Un riche héritage pédagogique
Pour ceux qui enseignent la production musicale et la musique, l’approche de Jones est une mine d’or de leçons pratiques.
Tout d’abord, son engagement en faveur de la fusion des genres enseigne aux élèves l’importance de la polyvalence. La carrière de Jones démontre que le mélange de jazz, de pop, de funk et même d’éléments classiques peut créer quelque chose d’innovant et d’accessible. À travers son travail, on peut apprendre à se libérer des contraintes de la production quand elle est associée à un seul genre, en étudiant plutôt comment divers styles musicaux peuvent fonctionner ensemble pour créer des sons frais et attrayants.
Par ailleurs, Quincy Jones montre aussi comment les arrangements permettent de construire une narration.
Dans mes cours, j’encourage les élèves à se poser des questions : comment chaque élément musical soutient-il l’arc émotionnel de la chanson ? En étudiant les arrangements de Jones, les élèves apprennent à se considérer comme des conteurs, et non comme de simples ingénieurs du son. Ils peuvent commencer à considérer l’arrangement comme une forme d’art à part entière, qui a le pouvoir de captiver le public en l’entraînant dans un voyage musical.
Enfin, le travail de Quincy Jones montre le pouvoir du travail collectif. Sa volonté de travailler dans différents genres et avec une grande variété d’artistes – chacun apportant des perspectives uniques – démontre la valeur de l’ouverture d’esprit et de l’adaptabilité.
L’œuvre de sa vie nous rappelle que la musique est plus qu’un simple son ; c’est une expérience façonnée par des décisions minutieuses et intentionnelles, chaque son et chaque silence d’un morceau de musique servant un but précis.
Jose Valentino Ruiz est le CEO de JV Music Enterprises.