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14.12.2025 à 17:58

Changer les algorithmes des réseaux sociaux suffit à réduire l’hostilité politique

Tiziano Piccardi, Assistant Professor of Computer Science, Johns Hopkins University
En utilisant un nouvel outil web, des chercheurs ont pu établir qu’une simple réorganisation de l’ordre des posts sur les réseaux sociaux suffit à apaiser le climat sur la plateforme.
Texte intégral (1107 mots)
Des chercheurs ont développé un outil web open source permettant de réorganiser en temps réel les fils d’actualité de participants consentants sur X (anciennement Twitter). Bangla Press

Les fils d’actualité des réseaux sociaux sont conçus pour capter notre attention. Mais de simples ajustements dans les algorithmes qui les sous-tendent permettent d’apaiser le débat public.


Réduire la visibilité des contenus polarisants dans les fils d’actualité des réseaux sociaux peut diminuer de manière tangible l’hostilité partisane. Pour parvenir à cette conclusion, mes collègues et moi avons développé une méthode permettant de modifier le classement des publications dans les fils d’actualité, une opération jusque-là réservée aux seules plateformes sociales.

Le réajustement des fils pour limiter l’exposition aux publications exprimant des attitudes anti-démocratiques ou une animosité partisane a influencé à la fois les émotions des utilisateurs et leur perception des personnes ayant des opinions politiques opposées.

Je suis chercheur en informatique spécialisé dans l’informatique sociale, l’intelligence artificielle et le web. Comme seules les plateformes de réseaux sociaux peuvent modifier leurs algorithmes, nous avons développé et rendu disponible un outil web open source permettant de réorganiser en temps réel les fils d’actualité de participants consentants sur X, anciennement Twitter.

S’appuyant sur des théories des sciences sociales, nous avons utilisé un modèle de langage pour identifier les publications susceptibles de polariser les utilisateurs, par exemple celles prônant la violence politique ou l’emprisonnement des membres du parti adverse. Ces publications n’étaient pas supprimées ; elles étaient simplement classées plus bas dans le fil, obligeant les utilisateurs à défiler davantage pour les voir, ce qui a réduit leur exposition.

Nous avons mené cette expérience pendant dix jours, dans les semaines précédant l’élection présidentielle américaine de 2024. Nous avons constaté que limiter l’exposition aux contenus polarisants améliorait de manière mesurable ce que les participants pensaient des membres du parti adverse et réduisait leurs émotions négatives lorsqu’ils faisaient défiler leur fil d’actualité. Fait notable, ces effets étaient similaires quel que soit le parti politique, ce qui suggère que l’intervention bénéficie à tous les utilisateurs, indépendamment de leur affiliation.

Pourquoi c’est important

Une idée reçue veut que l’on doive choisir entre deux extrêmes : des algorithmes basés sur l’engagement ou des fils purement chronologiques. En réalité, il existe un large éventail d’approches intermédiaires, selon les objectifs pour lesquels elles sont optimisées.

Les algorithmes de fil d’actualité sont généralement conçus pour capter votre attention et ont donc un impact significatif sur vos attitudes, votre humeur et votre perception des autres. Il est donc urgent de disposer de cadres permettant à des chercheurs indépendants de tester de nouvelles approches dans des conditions réalistes.

Notre travail ouvre cette voie : il montre comment étudier et prototyper à grande échelle des algorithmes alternatifs, et démontre qu’avec les grands modèles de langage (LLM), les plateformes disposent enfin des moyens techniques pour détecter les contenus polarisants susceptibles d’influencer les attitudes démocratiques de leurs utilisateurs.

Quelles autres recherches sont menées dans ce domaine

Tester l’impact d’algorithmes alternatifs sur des plateformes actives est complexe, et le nombre de ces études n’a augmenté que récemment.

Par exemple, une collaboration récente entre des universitaires et Meta a montré que passer à un fil chronologique n’était pas suffisant pour réduire la polarisation. Un effort connexe, le Prosocial Ranking Challenge dirigé par des chercheurs de l’Université de Californie à Berkeley, explore des alternatives de classement sur plusieurs plateformes pour favoriser des résultats sociaux positifs.

Parallèlement, les progrès dans le développement des LLM permettent de mieux modéliser la façon dont les gens pensent, ressentent et interagissent. L’intérêt croît pour donner davantage de contrôle aux utilisateurs, en leur permettant de choisir les principes qui guident ce qu’ils voient dans leur fil – par exemple avec Alexandria, une bibliothèque des valeurs pluralistes ou le système de réorganisation de fil Bonsai. Les plateformes sociales, telles que Bluesky et X, s’orientent également dans cette direction.

Et après

Cette étude n'est qu'un premier pas vers la conception d’algorithmes conscients de leur impact social potentiel. De nombreuses questions restent ouvertes. Nous prévoyons d’étudier les effets à long terme de ces interventions et de tester de nouveaux objectifs de classement pour traiter d’autres risques liés au bien-être en ligne, comme la santé mentale et le sentiment de satisfaction. Les travaux futurs exploreront comment équilibrer plusieurs objectifs – contexte culturel, valeurs personnelles et contrôle par l’utilisateur – afin de créer des espaces en ligne favorisant des interactions sociales et civiques plus saines.

Retrouvez dans le Research Brief de The Conversation US une sélection travaux académiques en cours résumés par leurs auteurs.

The Conversation

Cette recherche a été partiellement financée par une subvention Hoffman-Yee du Stanford Institute for Human-Centered Artificial Intelligence.

14.12.2025 à 11:49

Dans l’Italie du XVIIIe siècle, les femmes s’insurgeaient contre le harcèlement sexiste et sexuel subi dans les confessionnaux

Giada Pizzoni, Marie Curie Research Fellow, Department of History, European University Institute
Les archives du Vatican montrent qu’au XVIIIᵉ siècle, des Italiennes ont signalé des cas de harcèlement et d’abus aux autorités ecclésiastiques.
Texte intégral (1718 mots)

Blagues obscènes, questions intrusives, gestes déplacés : les archives inquisitoriales du Vatican montrent que le harcèlement sexuel au confessionnal était une réalité pour de nombreuses femmes dans l’Italie du XVIIIᵉ siècle – et que certaines ont osé le signaler.


L’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes définit le harcèlement sexuel comme « la situation dans laquelle un comportement non désiré à connotation sexuelle, s’exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, survient avec pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’une personne et, en particulier, de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». Les agissements sexistes découlent du pouvoir et visent à exercer un contrôle psychologique ou sexuel. Dans les deux cas, les victimes se sentent souvent confuses, seules, et se croient parfois responsables des abus subis.

En tant qu’historienne, je cherche à comprendre comment les femmes ont vécu et affronté ces comportements intimidants. Je m’intéresse en particulier au harcèlement pendant la confession dans l’Italie du XVIIIe siècle. Les femmes catholiques se rendaient au confessionnal pour partager leurs doutes et leurs espoirs sur des sujets allant de la reproduction aux menstruations, mais elles étaient parfois confrontées à des remarques méprisantes ou déplacées qui les déstabilisaient.

Un déséquilibre des pouvoirs

Les archives du Vatican nous montrent que certains des hommes qui ont tenu ces propos avaient tendance à en minimiser la portée, les qualifiant de simples marques de camaraderie ou de curiosité, voire de vantardise. Ils ont pourtant rabaissé les femmes qui, après ces échanges, étaient bouleversées ou en colère. Ces femmes étaient souvent plus jeunes que leurs confesseurs, elles avaient moins de pouvoir et pouvaient subir des menaces les contraignant à se taire. Pourtant, les archives nous montrent également que certaines, jugeant ces échanges inappropriés, se sont opposées à ces abus.

Les archives contiennent les procès-verbaux des tribunaux de l’Inquisition, qui, dans toute la péninsule italienne, traitaient les signalements de harcèlement et d’abus dans les confessionnaux. Pour les femmes, la confession était primordiale car elle dictait la moralité. Le devoir d’un prêtre était de demander aux femmes si elles étaient de bonnes chrétiennes, et la moralité d’une femme était liée à sa sexualité. Les canons de l’Église enseignaient que le sexe devait être uniquement hétérosexuel, génital et se dérouler dans le cadre du mariage.

Mais si la sexualité était encadrée par un code moral de péché et de honte, les femmes étaient des agents sexuels actifs, apprenant par l’expérience et l’observation. Le fonctionnement interne du corps féminin était mystérieux pour elles, mais le sexe ne l’était pas. Alors que les hommes lettrés avaient accès à des traités médicaux, les femmes apprenaient grâce aux connaissances échangées au sein de la famille et avec les autres femmes. Cependant, au-delà de leur cercle quotidien, certaines femmes considéraient le confessionnal comme un espace sûr où elles pouvaient se confier, remettre en question leurs expériences et demander des conseils sur le thème de la sexualité. Les ecclésiastiques agissaient alors comme des guides spirituels, des figures semi-divines capables d’apporter du réconfort, ce qui créait un déséquilibre de pouvoir pouvant conduire à du harcèlement et des abus.

Signaler les cas de harcèlement

Certaines femmes victimes d’abus dans le confessionnal l’ont signalé à l’Inquisition, et les autorités religieuses les ont écoutées. Dans les tribunaux, les notaires ont consigné les dépositions et les accusés ont été convoqués. Au cours des procès, les témoins ont été contre-interrogés afin de corroborer leurs déclarations. Les condamnations variaient : un ecclésiastique pouvait être condamné à jeûner ou à faire des exercices spirituels, à être suspendu, exilé ou envoyé aux galères (travaux forcés).

Les archives montrent qu’au XVIIIe siècle en Italie, les femmes catholiques comprenaient parfaitement les blagues grivoises, les métaphores et les allusions qui leur étaient adressées. En 1736 à Pise, par exemple, Rosa alla trouver son confesseur pour lui demander de l’aide, inquiète que son mari ne l’aime pas, et il lui conseilla « d’utiliser ses doigts sur elle-même » pour éveiller son désir. Elle fut embarrassée et rapporta cet échange inapproprié. Les documents d’archives montrent fréquemment que les femmes étaient interrogées si leur mariage ne produisait pas d’enfants : on leur demandait si elles vérifiaient que leur mari « consommait par derrière », dans le même « vase naturel », ou si le sperme tombait à l’extérieur.

En 1779, à Onano, Colomba a rapporté que son confesseur lui avait demandé si elle savait que pour avoir un bébé, son mari devait insérer son pénis dans ses « parties honteuses ». En 1739, à Sienne, une femme de 40 ans sans enfant, Lucia, s’est sentie rabaissée lorsqu’un confesseur lui a proposé de l’examiner, affirmant que les femmes « avaient des ovaires comme les poules » et que sa situation était étrange, car il suffisait à une femme « de retirer son chapeau pour tomber enceinte ». Elle a signalé cet échange comme une ingérence inappropriée dans sa vie intime.

Les archives du confessionnal montrent des exemples de femmes à qui l’on disait : « J’aimerais te faire un trou » ; qui voyaient un prêtre frotter des anneaux de haut en bas sur ses doigts pour imiter des actes sexuels ; et à qui l’on posait la question suggestive de savoir si elles avaient « pris cela dans leurs mains » – et chacune de ces femmes comprenait ce qui était insinué. Elles comprenaient aussi que ces comportements relevaient du harcèlement. Autant d’actes et de paroles que les confesseurs considéraient, eux, comme du flirt – comme lorsqu’un prêtre invita Alessandra à le rejoindre dans le vignoble en 1659 – étaient jugés révoltants par les femmes qui rapportaient ces événements (Vatican, Archivio Dicastero della Fede, Processi vol. 42).

L’effet déconcertant des abus

À cette époque, le stéréotype selon lequel les femmes plus âgées n’avaient plus de sexualité était très répandu. En effet, on croyait que les femmes dans la quarantaine ou la cinquantaine n’étaient plus physiquement aptes à avoir des rapports sexuels, et leur libido était ridiculisée par la littérature populaire. En 1721, Elisabetta Neri, une femme de 29 ans qui cherchait des conseils pour soulager ses bouffées de chaleur qui la mettaient hors d’état de fonctionner, s’est entendu dire qu’à partir de 36 ans, les femmes n’avaient plus besoin de se toucher, mais que cela pouvait l’aider à se détendre et à soulager son état.

Les femmes étaient également interrogées de manière fréquente et répétée sur leur plaisir : se touchaient-elles lorsqu’elles étaient seules ? Touchaient-elles d’autres femmes, des garçons ou même des animaux ? Regardaient-elles les « parties honteuses » de leurs amies pour comparer qui « avait la nature la plus grande ou la plus serrée, avec ou sans poils » (ADDF, CAUSE 1732 f.516) ? Pour les femmes, ces commentaires représentaient des intrusions inappropriées dans leur intimité. D’après les harceleurs masculins, il s’agissait d’une forme de curiosité excitante et une façon de donner des conseils : un frère franciscain, en 1715, a ainsi démenti avoir fait des commentaires intrusifs sur la vie sexuelle d’une femme (ADDF, Stanza Storica, M7 R, procès 3).

En quête de conseils avisés, les femmes confiaient leurs secrets les plus intimes à ces érudits, et elles pouvaient être déconcertées par l’attitude que leurs confesseurs affichaient souvent. En 1633, Angiola affirmait avoir « tremblé pendant trois mois » après avoir subi des violences verbales (ADDF, vol. 31, Processi). Les remarques déplacées et les attouchements non désirés choquaient celles qui en étaient victimes.

Le courage de s’exprimer

Il est indéniable que la sexualité est un objet culturel, encadré par des codes moraux et des agendas politiques qui font l’objet de négociations constantes. Les femmes ont été sans cesse surveillées, leur corps et leur comportement étant soumis à un contrôle permanent. Cependant, l’histoire nous enseigne que les femmes pouvaient être conscientes de leur corps et de leurs expériences sexuelles. Elles discutaient de leurs doutes, et certaines se sont ouvertement opposées au harcèlement ou aux relations abusives.

Au XVIIIe siècle en Italie, les femmes catholiques n’avaient pas toujours les mots pour qualifier les abus dont elles étaient victimes, mais elles savaient reconnaître qu’elles ne vivaient pas toujours un échange « honnête » dans le confessionnal, et parfois elles ne l’acceptaient pas. Elles ne pouvaient pas y échapper, mais elles avaient le courage d’agir contre un tel abus.

Une culture d’abus sexuels est difficile à éradiquer, mais les femmes peuvent s’exprimer et obtenir justice. Les événements des siècles passés montrent qu’il est toujours possible de dénoncer, comme c’est encore le cas aujourd’hui.


Note de l’auteur : les références entre parenthèses dans le texte renvoient à des documents consultables conservés dans les archives du Vatican.

The Conversation

Giada Pizzoni a reçu une bourse Marie Skłodowska-Curie de la Commission européenne.

14.12.2025 à 11:48

Comment transformer l’aura des stars en multiplicatrice de dons

Thomas Leclercq, Professeur ordinaire en marketing, IESEG School of Management (LEM-CNRS 9221), Head of Marketing and Sales Department, IÉSEG School of Management
Étienne Denis, Professeur de Marketing, EDHEC Business School
Steven Hoornaert, Professeur en marketing digital; IESEG School of Management, Univ. Lille, CNRS, UMR 9221 - LEM - Lille Economie Management, F-59000 Lille, France, IÉSEG School of Management
Comment transformer l’aura d’une célébrité en soutien à une cause d’intérêt général ou à une association ? Réponses en graphiques, grâce à trois études menées auprès de centaines de donateurs.
Texte intégral (1331 mots)
Plusieurs jours après la guerre entre Israël et le Hezbollah, le chanteur Mika a lancé un appel aux dons sur ses réseaux sociaux afin de soutenir les populations civiles du Liban, notamment les enfants. IgnazioFiorenza/Shutterstock

Une recherche met en lumière les stratégies permettant de transformer l’aura des célébrités en crédibilité à l'égard d’une cause d’intérêt général. Alors, ces leaders d’opinion permettent-ils aux associations de récolter davantage de dons ? D’influencer nos élans de générosité ? Explications en graphiques.


Les célébrités, et plus récemment les influenceurs, ne se contentent plus de divertir : ils orientent nos choix. Des marques que nous achetons, jusqu’aux positions que nous adoptons sur des enjeux éthiques, leur empreinte est partout. Ils s’imposent comme de véritables sources d’information pour les consommateurs.

Leur influence ne s’arrête pas aux décisions de consommation. Acteurs, humoristes ou streamers façonnent nos élans de générosité et les causes que nous choisissons de soutenir. De nombreuses personnalités mettent en avant leur engagement caritatif : Pierre Garnier avec Imagine for Margo, Florence Foresti avec la Fondation des femmes ou encore Omar Sy avec les Restaurants du cœur. Côté influenceurs, le ZEvent 2025 a marqué les esprits : en trois jours de marathon sur Twitch, plus de 16,2 millions d’euros ont été récoltés grâce à des figures comme ZeratoR, Kameto ou Baghera Jones.

Pour mieux comprendre ces mécanismes, nous avons mené une série d’études pour comprendre si l’aura des célébrités apportait une crédibilité envers la cause à soutenir. Concrètement, nous avons présenté à des consommateurs plusieurs personnalités, ambassadrices d’une cause, et analysé si elles avaient un impact positif sur la crédibilité des causes d’intérêt général.

Transformer l’aura en crédibilité

Notre première étude, intuitive, consiste à choisir une personnalité dont l’histoire est directement liée à la cause. Par exemple, des personnalités telles que Selena Gomez et Lady Gaga peuvent être des ambassadrices crédibles pour les causes liées à la santé mentale chez les jeunes, compte tenu des traumatismes qu’elles ont vécus dans leur jeunesse. Il en va de même pour le combat d’Emma Watson pour l’égalité homme-femme, renforcé par son expérience des traitements des jeunes femmes et adolescentes dans l’industrie cinématographique.

La seconde étude repose sur ce que les chercheurs appellent le transfert de sens. Dans ce processus, les symboles associés à une personne sont transférés à un produit, une marque ou une organisation. De cette manière, une personnalité peut apporter à la cause son aura culturelle, son univers ou ses valeurs symboliques à une cause, même sans lien direct apparent.

Quand la notoriété devient expertise

Dans une étude auprès de 200 répondants, nous avons testé l’impact de l’attractivité de la personnalité ambassadrice sur son niveau de crédibilité perçue envers la cause et le nombre de dons générés.

À cette fin, nous avons indiqué aux participants de l’étude que le tennisman Andy Muray était le nouvel ambassadeur de « Let’s Green Up ! », une ONG fictive. Dans un premier groupe, nous avons décrit le tennisman en insistant sur son attractivité et son aura. Dans un second groupe, nous avons présenté une description plus neutre du sportif. Nous avons ensuite mesuré la crédibilité perçue de la personnalité grâce à des affirmations telles que « Cet influenceur est une source d’information fiable » ou « Je peux faire confiance à cette personne ».

Les répondants avaient enfin la possibilité de faire un don à l’ONG proposée. Les résultats sont unanimes : la présence de cette aura est une condition essentielle au succès des campagnes de récolte de dons. Elle fait augmenter la chance de faire un don de 43 % à 54 %.

Un passé qui donne du poids

Au-delà de leur aura, certaines célébrités renforcent leur crédibilité en mettant en avant un lien personnel avec la cause qu’elles soutiennent. Lorsque Mika s’engage auprès d’associations venant en aide au Liban, son message gagne en force, car il souligne son attachement à ce pays d’origine.

Pour tester cette hypothèse, nous avons réalisé une seconde étude auprès de 402 répondants. Ces derniers pouvaient soutenir une cause associée à une personnalité, en faisant varier le type de cause et la personnalité. Pour ce faire, nous avons comparé l’efficacité de l’annonce quand la cause est soutenue par Léonardo DiCaprio, célébrité connue pour son aura, et Greta Thunberg, davantage connue pour son activisme. Nous avons d’abord comparé des groupes où ces personnalités soutenaient une campagne pour l’écologie, en lien avec le passé des deux célébrités, et une autre campagne soutenant l’accès à l’éducation. Nous avons ensuite mesuré la crédibilité de la personnalité ambassadrice.

Lorsque ce lien est mis en évidence, la crédibilité de la célébrité ou de l’influenceur envers la cause augmente donc davantage.

Le pouvoir du transfert symbolique

Même lorsqu’elles n’ont pas de lien direct avec une cause, les célébrités peuvent lui donner de la crédibilité en y associant leur univers symbolique. Un humoriste qui prête son image à une campagne solidaire, ou une chanteuse pop qui soutient la recherche médicale, n’est pas forcément expert du sujet. Ce transfert de sens, présenté plus haut, permet aux associations de toucher le public par ricochet, en capitalisant sur l’image culturelle de la personnalité.

Nous avons réalisé une troisième étude auprès de 400 répondants. L’idée : inviter les participants à soutenir une association pour l’écologie. Dans un groupe, la personnalité ambassadrice est Keanu Reeves et dans l’autre, Eminem. Nous avons pu établir au préalable que Eminem démontrait un capital symbolique plus important que Keanu Reeves. Dans les deux cas, nous avons fait varier l’attractivité et l’aura de la personnalité ambassadrice en la présentant dans une posture favorable ou neutre.

Les résultats montrent qu’une personnalité présentant un capital symbolique plus élevé, comme Eminem, est perçue comme étant davantage crédible, ce qui accroît leur capacité à générer un élan de générosité.

The Conversation

Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.

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