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07.03.2025 à 15:23

Masculinisme : une longue histoire de résistance aux avancées féministes

Laura Verquere, chercheuse en sciences de l'information et de la communication , Sorbonne Université
La montée des discours masculinistes peut sembler inédite, mais elle s’inscrit dans une histoire longue. Retour sur cette idéologie qui avance toujours en réaction aux progrès des droits des femmes.
Texte intégral (2007 mots)
Forme d’antiféminisme, le masculinisme cible particulièrement les femmes qui défendent leurs droits et leur émancipation. AlbertShakirov/Shutterstock

La montée de l’extrême droite à l’échelle mondiale, couplée au relâchement de la modération sur les réseaux sociaux numériques, donne l’impression d’une nouvelle percée des discours masculinistes, teintés de conservatisme. Toutefois, cette recrudescence s’inscrit dans une longue histoire de réaction aux avancées féministes et se manifeste aujourd’hui sous des formes variées.


Depuis plusieurs mois, et de manière accélérée depuis l’élection de Donald Trump, on assiste à un regain des prises de parole masculinistes. L’une des plus spectaculaires est celle de Mark Zuckerberg, en janvier 2025. Le patron de Meta a annoncé la suppression du fact-checking sur ses réseaux sociaux, invoquant une liberté d’expression menacée par un moralisme « woke ». Dans le même élan, il met fin aux programmes internes de diversité et d’inclusion du groupe.

Pour justifier sa décision, il a convoqué un lexique ouvertement masculiniste : selon lui, il était temps de « re-masculiniser » les entreprises prétendument émasculées par les valeurs féministes, lesquelles auraient trop longtemps entravé l’énergie positive masculine et sa nécessaire agressivité.


À lire aussi : Dérives masculinistes de Zuckerberg et de Musk : le numérique en mâle de virilité ?


Il s’aligne ainsi sur Elon Musk, propriétaire de X (anciennement Twitter). La fin de la modération sur cette plateforme a favorisé la diffusion des idées conservatrices et masculinistes. L’affirmation de ces valeurs au sommet de pays comme les États-Unis, le Brésil, l’Argentine ou la Russie et des grandes entreprises de la tech peut sembler inédite, mais elle s’inscrit en réalité dans une recrudescence ancrée dans une histoire longue, en perpétuelle recomposition au gré des contextes sociaux, politiques et historiques. Avant d’en retracer les généalogies, quelques précisions sémantiques s’imposent.

Défendre la cause des hommes

Si le terme de masculinisme se répand avec la montée des extrêmes droites à travers le monde, son usage prête à confusion, se mêlant souvent à des notions voisines telles que virilité et masculinités. Les masculinités, au pluriel, désignent la diversité des normes, des pratiques et des représentations du masculin, qui se construisent en relation avec le féminin et évoluent à travers l’histoire.

La virilité, en revanche, se réfère à un ensemble de qualités et de valeurs perçues comme immuables – force, courage, vigueur – qui s’imposent aux hommes à travers les époques sous des formes toujours renouvelées. Elle tend à instaurer une hiérarchie dans les rapports de genre : conçue pour dominer, la virilité constitue un idéal régulièrement mobilisé par les discours masculinistes pour réaffirmer leur hégémonie.

Contrairement à la misogynie, qui exprime une haine et un mépris envers les femmes, ou au sexisme, qui désigne un système maintenant les femmes en situation d’infériorité sociale, économique et politique par rapport aux hommes, le masculinisme suit une logique plus spécifique, bien qu’il s’en nourrisse largement.


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S’il a failli, un temps, désigner l’engagement des hommes pour les droits des femmes (comme relaté dans l’ouvrage de Christine Bard, Mélissa Blais et Francis Dupuis-Déri), l’usage du suffixe « -isme » cherche avant tout à créer une symétrie avec le féminisme, dans une logique d’opposition.

Forme d’antiféminisme, le masculinisme ne s’attaque pas à toutes les femmes, mais cible particulièrement celles qui défendent leurs droits et leur émancipation.

Les discours masculinistes reposent sur trois postulats principaux. D’abord, le « mythe de l’égalité déjà-là », selon lequel l’égalité entre les sexes serait atteinte, rendant les revendications féministes obsolètes. Ensuite, la théorie de « l’effet pervers », qui considère que le féminisme serait allé trop loin, inversant l’ordre de genre et créant une guerre des sexes. Enfin, le discours de la « crise de la masculinité », étudié notamment par Francis Dupuis-Déri, qui met en scène une supposée mise en péril des hommes dans divers domaines : l’éducation, la famille ou encore les institutions judiciaires.

À travers ces arguments se construit alors un discours de la « cause des hommes » qui rassemblent différentes revendications, comme celles des pères divorcés ou des hommes victimes de violences. La situation se serait inversée : ils se positionnent comme les victimes d’un supposé bouleversement des hiérarchies de genre, adoptant un langage proche de celui des discours féministes qu’ils scrutent et détournent habilement à leur avantage.

Mouvements réactionnaires

Si les mouvements et idées masculinistes gagnent en visibilité dans l’espace public, notamment à la suite des élections de plusieurs présidents conservateurs dans le monde, ils ne sont en rien nouveaux. Selon l’historienne Christine Bard, leur histoire est aussi ancienne que celle des mouvements féministes, les deux suivant des trajectoires étroitement liées. La première utilisation du terme apparaît à la fin du XIXe siècle, sous la plume de la féministe radicale Hubertine Auclert, pour désigner la suprématie du masculin.

Cependant, ce n’est qu’à partir des années 1980 que les groupes masculinistes commencent à se structurer davantage, s’intensifiant en tant que mouvements réactionnaires en réponse à la deuxième vague féministe, centrée sur la lutte pour le droit à la libre disposition de son corps.

L’histoire des antiféminismes pourrait ainsi se lire en miroir de celle des féminismes : le masculinisme avance toujours en réaction aux progrès des droits des femmes et aux transformations sociales. Pour Christine Bard, nous pourrions même inverser la perspective en considérant que « l’antiféminisme précède le féminisme », par anticipation à l’émancipation tant redoutée.

En France, le masculinisme s’organise principalement autour des associations de défense des droits des pères, luttant pour la garde alternée lors de séparations conjugales (SOS Papa, SVP Papa, etc.), ainsi que de groupes de parole non mixtes où les hommes expriment leur mal-être lié à leur condition dans la société contemporaine.

Au Canada, le masculinisme est particulièrement dynamique, et selon la sociologue Mélissa Blais, spécialiste des études du genre et de la pensée féministe, il représenterait même la branche la plus active de l’antiféminisme.

Le masculinisme, qui est à la fois une idéologie et un mouvement social, peut conduire à des violences mortelles. Le 6 décembre a été désigné au Canada comme la Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, en réponse à une attaque meurtrière à l’École polytechnique de Montréal en 1986, où 14 jeunes femmes ont été tuées par Marc Lépine, un jeune homme de 25 ans qui déclarait « haïr les femmes ».

Aujourd’hui, le masculinisme adopte des formes de plus en plus réactionnaires et revendique ouvertement ses liens avec l’extrême droite, les courants conservateurs et les religions. Nostalgique d’un passé glorieux face à une modernité « décadente », il cherche à restaurer la « grandeur virile de la civilisation », à l’image des thèses racistes et xénophobes qui redoutent l’effondrement des « civilisations blanches et chrétiennes ».

La nébuleuse masculiniste contemporaine

Bien qu’ils reposent sur des principes communs – l’idée que les droits des hommes seraient menacés –, les masculinismes sont pluriels et en constante évolution. Ils se modifient au gré des contextes historiques et des formes prises par les revendications et luttes féministes ; qu’il s’agisse de la critique de l’accès des femmes à la citoyenneté et à la procréation médicalement assistée, ou de la menace des droits des personnes transgenre.

Les masculinismes poursuivent des causes variées : défense des droits des pères, « reconquête » du pouvoir dans la séduction hétérosexuelle, lutte contre « le risque » de l’indifférenciation des sexes, etc. La cause masculiniste peut se manifester de manière plus subtile à travers des discours qui ne sont pas directement antiféministes, comme la quête individualiste de santé, du bien-être et du développement personnel, souvent associée à un culte hygiéniste et viril du corps.

Des discours qui se développent sur divers terrains, à la fois hors ligne – au sein d’associations, de groupes d’entraînement ou de mobilisations – et en ligne, sur les réseaux sociaux traditionnels (TikTok, YouTube, X…) ainsi que sur des plateformes spécialisées (Reddit, 4chan, Twitch) et des forums. Dans ces espaces, censés réhabiliter une virilité « perdue ou menacée », on peut parfois trouver des appels à la violence, au viol et au meurtre.

Mais que l’on ne s’y trompe pas. Si, observées depuis ces groupes, leurs idées peuvent sembler marginales, elles circulent largement au-delà de ces cercles actifs et se banalisent, y compris dans les espaces institutionnels. Ce phénomène n’est pas limité à l’extrême droite ; il peut aussi s’immiscer, sous des formes plus discrètes ou déguisées, dans des espaces progressistes et libéraux comme le révèle, aux États-Unis, la rencontre entre le monde supposé progressiste de la tech et les conservateurs libéraux.

The Conversation

Laura Verquere ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

07.03.2025 à 15:21

Masculinité et politique à l’ère du trumpisme

Francis Dupuis-Déri, Professeur, Université du Québec à Montréal (UQAM)
Le masculinisme est plus en plus visible dans la sphère politique et médiatique. Quels sont ses soubassements idéologiques ? Comment expliquer son emprise croissante ?
Texte intégral (2117 mots)
Associé à la force, à la puissance et à la domination, le masculinisme, dont Donald Trump est adepte, se fonde sur des conceptions erronées des différences entre hommes et femmes. DannyOliva/Shutterstock

Le masculinisme – courant qui accuse le féminisme d’être responsable d’une « crise de la masculinité » et qui propose de valoriser les qualités considérées viriles – est de plus en plus visible dans la sphère politique et médiatique. Quels sont ses soubassements idéologiques ? Comment expliquer son emprise croissante ?


Il y a quelques jours, Mark Zuckerberg a prétendu que les entreprises privées étaient « émasculées » et a suggéré de revaloriser l’« énergie masculine », associée à la « compétitivité » et l’« agressivité ». Cette victime de l’« énergie féminine » n’est, après tout, que la troisième fortune mondiale…

Selon sa conception de l’être humain, relevant du sens commun, la masculinité et la féminité détermineraient des attitudes et des compétences physiques, cognitives et mêmes morales fondamentalement différentes selon le genre, et même mutuellement exclusives.

Qu’importe que la science montre que ces différences sont en grande partie imaginées selon des conceptions fantaisistes de la préhistoire, du cerveau ou des hormones, autant de sujets complexes dont bien des gens se croient spécialistes en répétant des faussetés.

Le mythe de la caverne conjugale, par exemple, est en fait une projection de notre modèle familial contemporain sur la préhistoire, le père quittant aujourd’hui le bungalow pour aller au travail comme son ancêtre quittait la caverne, dit-on, pour aller chasser le mammouth.


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Or plusieurs spécialistes ont conclu qu’on ne pourra jamais déterminer les rôles de nos ancêtres simplement à partir de quelques os, de l’ADN, de silex taillés, de quelques restes de semailles : rien de tout cela nous indique réellement qui chassait, qui pêchait, qui s’occupait des enfants et des malades. Il semble aussi pour le moins douteux que toutes les communautés de nos ancêtres aient été identiques pendant des centaines de milliers d’années.

D’autres disciplines ont aussi remis en question pareilles certitudes quant aux différences de genre, influencées par les biais et stéréotypes sexuels d’aujourd’hui, y compris dans l’observation des espèces animales. En fait, les différences entre individus femelles, d’une part, ou mâles, d’autre part, sont bien plus importants qu’entre la moyenne des femelles et des mâles, y compris dans l’espèce humaine. En réalité, hommes et femmes sont bien plus similaires que différents du point de vue de leur anatomie (deux bras, deux jambes, cerveau similaire, etc.) et de leurs capacités physiques, cognitives et morales.

Insensible à la réalité humaine, le genrisme préfère répéter qu’il y a deux genres fondamentalement différents, éternels et immuables, au risque de colporter des erreurs et des faussetés au sujet de la préhistoire, des animaux, du cerveau, etc.

Cette représentation des genres est avant tout politique, c’est-à-dire liée à la question du pouvoir. En 2019, l’American Psychological Association précisait que la « masculinité » est caractérisée par le « stoïcisme, la retenue de ses émotions, la compétition, la domination et l’agressivité », autant de caractéristiques qui placent les hommes et les femmes en relations hiérarchiques, le masculin étant « naturellement » en position de supériorité, le féminin en position de soumission.

Aujourd’hui, des politiciens et des influenceurs, dont le célèbre Andrew Tate qui vient de trouver refuge aux États-Unis alors qu’il est accusé en Roumanie d’exploitation sexuelle, y compris de mineures, jouent à fond cette carte de la masculinité associée à la force, à la puissance et à la domination, comme les présidents Vladimir Poutine pêchant torse nu en Sibérie ou Emmanuel Macron frappant un sac de boxe. « La masculinité est de retour », s’est exclamé pour sa part Elon Musk, l’homme le plus riche du monde et bras droit (c’est le cas de le dire) de Donald Trump, le lendemain de la cérémonie d’assermentation présidentielle.

Donald Trump lui-même se présente comme un mâle alpha, prônant ouvertement l’agression sexuelle des femmes (« Grab them by the pussy »), en ayant lui-même agressé plusieurs. Son nouveau cabinet compte une grande majorité d’hommes, contrôlant les postes les plus importants, dont certains ont manœuvré pour que la Roumanie relâche l’influenceur Andrew Tate.

Enfin, le président peut aussi compter sur des milices comme les Proud Boys, organisation non mixte d’hommes, dont les chefs prétendent « vénérer les ménagères ».

La masculinité contre-attaque

La principale faiblesse du genrisme réside dans la réalité concrète de la vie humaine, puisque les caractéristiques associées à la masculinité sont tout simplement humaines, et qu’on les retrouve aussi chez les femmes, et vice versa. Quel que soit son genre, chaque être humain peut être courageux, fort, compétitif, agressif, doux, bienveillant, dépendant, rationnel ou émotif. Avec leurs deux mains, hommes et femmes peuvent exécuter les mêmes tâches, quelles qu’elles soient, changer des couches, offrir des fleurs, circuler sur le Web, conduire une voiture, tirer à la carabine.

Or comme ces identités de genre sont fondées sur des illusions, hommes et femmes ont développé des stratégies pour mettre en scène leur genre et l’incarner aux yeux des autres. Côté masculin, une manière de montrer qu’on est un homme, un « vrai », est de faire preuve de misogynie et surtout d’homophobie. On l’a vu au Brésil et en Hongrie, où Jair Bolsonaro et Viktor Orban attaquent les femmes et les personnes de la diversité de genre et sexuelle.

Le même scénario est à l’œuvre avec le trumpisme, qui accuse la « diversité » de tous les maux qui frappent les États-Unis, de la défaite militaire en Afghanistan à des accidents aériens. Depuis des années, des activistes du Parti républicain font bannir des milliers de livres de bibliothèques publiques, sous prétexte qu’ils prônent la « diversité ». Une fois réélu, le président Donald Trump a ciblé les minorités de genre et sexuelle, en particulier les trans, à qui l’armée vient de fermer la porte. Tout cela renforce à la fois l’idée que la masculinité est menacée, et qu’elle doit être puissante.

Or ces manœuvres participent d’un jeu d’illusion. Ainsi, pour expliquer l’élection de Trump, bien des analystes ont souligné l’importance du vote des hommes qui seraient abandonnés depuis des années par le Parti démocrate au profit des femmes et de la « diversité ». Pourtant, les républicains ont bien plus parlé des « minorités » que les démocrates, pendant l’élection. Ils ont même investi plus de 200 millions de dollars en publicités télévisées contre les trans, véritable obsession trumpiste.

Dans des États ayant appuyé massivement Trump, comme le Nebraska (76 %) et le Wyoming (72 %), les hommes ont un salaire annuel comparé à celui des femmes supérieur de 30 % au Nebraska (51 304 US$ pour 36 188 US$) et supérieur de 34 % de plus au Wyoming (54 064 US$ pour 35 857 US$ au Wyoming), soit supérieur d’environ 15 000 dollars à 20 000dollars en faveur des hommes. Au niveau national, les hommes ont en moyenne un salaire 16 % plus élevé que les femmes, et leur richesse globale est 60 % plus importante que celle des femmes. Ces écarts ont différentes causes, mais le résultat reste que les hommes s’en tirent bien mieux économiquement que les femmes, contrairement à ce que laissent croire les thèses victimisant les hommes pour expliquer la victoire de Trump.

Comme pour les identités de genre, la réalité socio-économique est donc souvent une affaire de perception et d’illusion. Si vous êtes convaincus que le masculin doit être supérieur au féminin, alors la simple perception que les femmes ou les trans prennent trop de place vous apparaîtra comme un scandale dont les hommes seraient victimes. C’est cette colère que les politiques virilistes et misogynes attisent et entretiennent d’autant plus facilement que ces hommes dirigent les gouvernements, qu’ils sont à la tête des plus grandes fortunes et entreprises privées, y compris des conglomérats médiatiques et des principaux médias sociaux.

Ce qui est plus difficile, c’est d’expliquer les causes de cette poussée masculiniste au sein de l’élite politique, économique et médiatique. On peut avancer deux hypothèses non mutuellement exclusives : il s’agit d’un backlash (retour de bâton) contre les mobilisations féministes des dernières années contre les violences sexistes (#MeToo) et contre les avancées de la diversité de genre et sexuelle. Et il s’agit aussi de postures et de discours (misogynes, antiféministes, masculinistes) qui sont inhérents aux forces politiques, sociales et culturelles d’extrême droite, qui sont de plus en plus influentes et auxquelles contribuent Bolsonaro, Orban et Trump, entre autres.

The Conversation

À titre de professeur, Francis Dupuis-Déri a reçu des financements pour mener ses recherches sur l'antiféminisme, l'homophobie et la transphobie du Chantier sur l'antiféminisme, du Réseau québécois en études féministes (RéQEF), et du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH).

06.03.2025 à 15:35

Féminicides : comment mieux protéger le commun des mortelles ?

Margot Giacinti, Docteure en science politique et post doctorante, Université de Lille
Quand il n’y a pas mort d’homme : retour sur l’histoire de la notion de « féminicide » et sur les chantiers à mener pour mieux protéger les femmes.
Texte intégral (2225 mots)

Le concept de « féminicide » est essentiel à la sécurité des femmes. Comment pourrait-on combattre ce qui n’est pas nommé ? Dans les médias, la notion de crime passionnel semble enfin avoir disparu. L’enjeu est désormais sur ce qu’on met derrière le terme féminicide, et comment on l’interprète. Les recherches de la politiste Margot Giacinti reviennent sur l’histoire de cette notion et offrent des pistes concrètes pour mieux protéger les femmes.


Le féminicide est le meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme. Cette définition voit le jour sous la plume de la sociologue Diana Russell qui, après avoir travaillé à identifier cette forme spécifique de violence dans les années 1970, signe en 1992 avec sa consœur Jill Radford l’ouvrage fondateur, Femicide: The Politics of Woman Killing (New York, éditions Twayne).

D’abord approprié par les chercheuses et militantes d’Amérique latine dans les années 2000, le concept se diffuse lentement en Europe à partir des années 2010. En France, il faut attendre les premiers comptages du collectif Féminicides par compagnon ou ex (2016) et le début des collages féminicides, en 2019, pour que sa diffusion soit assurée à l’échelle nationale.

Pourtant, ni le féminicide comme fait social ni sa dénonciation ne sont des nouveautés. Depuis le XIXe siècle, des militantes féministes tentent d’identifier et de théoriser ce crime. Mais leurs idées sont demeurées minoritaires (ou plutôt minorisées) et, faute de trouver un écho dans l’opinion, sont restées méconnues.

Un travail de dévoilement généalogique de la notion, couplé à l’analyse d’affaires judiciaires, permet de saisir les biais sociohistoriques qui ont entravé l’émergence de ce concept clé. Il permet également d’identifier les marges de progression qui demeurent dans la lutte contre cette forme de violence extrême contre les femmes.


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Le féminicide, un concept utile pour se défaire des catégories patriarcales

En théorisant le féminicide, les féministes ont cherché à rompre avec deux lectures qui se sont construites historiquement aux XIXe et au XXe siècles, et qui ont perduré jusqu’au XXIe siècle.

D’une part, la lecture conjugaliste, qui ne s’intéresse qu’au meurtre entre époux (laissant dans l’ombre les féminicides sur concubines, sur inconnues, etc.) et qui symétrise les violences dans le couple. D’autre part, la lecture passionnelle, qui érige ce meurtre en crime passionnel, conséquence d’un trop-plein d’amour – pardonnable pour certains, comme on le voit par exemple dans la littérature romantique.

À rebrousse-poil de ces acceptions, le concept de féminicide constitue une manière radicalement différente de penser le crime, qui se défait des lectures patriarcales, conjugaliste et passionnelle. Le féminicide touche l’ensemble de la classe des femmes, les victimes étant ciblées spécifiquement parce qu’elles sont des femmes, c’est-à-dire qu’elles vivent dans des sociétés qui les placent dans des positions de subalternité et de vulnérabilité structurelles et qui entérinent ainsi la possibilité pour les hommes de les dominer.

La chanteuse mexicaine Vivir Quintana et le choeur El Palomar interprétant la célèbre Cancion sin miedo (Chanson sans peur) contre les féminicides.

Dans les écrits des féministes, le féminicide devient un crime produit par le rapport de domination qu’est le genre. Il n’est donc pas corrélé à la seule sphère conjugale et ses contextes de réalisation sont variés : intimité sexuelle ou affective (meurtre d’une épouse, d’une concubine, d’une ex, d’une femme exerçant la prostitution), sphère familiale non conjugale (meurtre d’une mère, d’une sœur, d’une fille), relation amicale et, plus largement encore, le milieu professionnel ou l’espace public.

Ne pas restreindre les analyses et le comptage des féminicides à la sphère conjugale

En France, la réception du concept, lorsqu’elle a eu lieu, a été restreinte à la seule sphère conjugale. D’ailleurs, le chiffre généralement retenu pour le nombre annuel de féminicides en France est celui du rapport de la Délégation aux victimes (DAV) du ministère de l’intérieur, rapport qui n’utilise pourtant pas la catégorie féminicide, mais celle de « morts violentes au sein du couple ».

L’étude des affaires de meurtres de femmes, au XIXe comme au XXIe siècle, prouve pourtant que le genre est bien le déterminant commun de l’ensemble des féminicides, dans ou hors du couple. Ainsi, les femmes exerçant le travail du sexe ou subissant des logiques de traite ne sont pas exemptes des violences mortelles, comme l’illustre le meurtre, en 2018, de Vanesa Campos.

Les activités politiques de certaines militantes font aussi d’elles des proies de choix, comme cela s’est vu avec la tentative d’assassinat sur Louise Michel en 1888 ou, plus récemment, avec l’enquête magistrale « Femmes à abattre », du collectif Youpress, sur les féminicides de femmes politiques.

Exclure des comptages et des analyses les féminicides en dehors du couple revient donc à faire un usage partiel et partial du concept. Cela rejoue des lectures conservatrices qui ont failli dans la lutte contre les violences de genre en échouant à identifier les féminicides et ses logiques particulières. Inversement, utiliser le concept tel que formulé par les féministes apparaît essentiel pour mieux saisir la manière dont le genre détermine les crimes et pour dévoiler d’autres formes, encore dissimulées, de féminicides, à l’instar des disparitions de femmes non résolues ou des suicides forcés (suicide d’une victime, consécutif aux violences qu’elle a subies).

La création d’un pôle judiciaire cold cases à Nanterre a notamment pu mettre en lumière la dimension genrée des disparitions non résolues : sur 82 affaires, 56 concernaient des femmes. De même, la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences (Miprof) comptabilise 773 suicides forcés de femmes victimes de violences conjugales en 2023.

Cela modifie considérablement la proportion de féminicides sur le territoire français, puisque seules 93 « morts violentes » de femmes dans le cadre du couple avaient été décomptées par la DAV pour l’année 2023.

Mieux évaluer la menace de mort et soutenir les tentatives d’émancipation des victimes

Un second enjeu pour les politiques publiques en matière de lutte contre les violences est la poursuite de l’analyse de la mécanique du féminicide.

Nos travaux ont mis au jour que la menace de mort était largement sous-évaluée dans les affaires de féminicides, alors qu’elle constitue souvent un signal fort d’un passage à l’acte imminent, notamment si le futur meurtrier possède une arme, ou s’il a déjà un script de mise à mort en tête (« Je vais t’étrangler »).

Le Commun des mortelles, Margot Giacinti
Le Commun des mortelles. Faire face aux féminicides, de Margot Giacinti. éditions Divergences, 2025

Les enquêtes sur les violences faites aux femmes en France telles que l’enquête « Violences et rapports de genre : contextes et conséquences des violences subies par les femmes et par les hommes » (Virage), 2020 ont montré que les femmes déclarent souvent les violences qu’elles considèrent les plus graves et qui sont aussi celles les plus reconnues par la justice, à savoir les violences physiques. Aujourd’hui, un questionnaire d’accueil dans le cadre de violences au sein du couple permet aux forces de police et de gendarmerie d’enquêter en détail sur les violences subies par la victime (violences verbales, psychologiques et économiques, physiques et sexuelles). Si la question de la menace de mort figure bien dans la trame, elle doit cependant être davantage investiguée, en particulier sur le plan du nombre, de la récurrence et du type de menaces, et couplée à celle de la possession d’arme.

De même, on a montré que c’est souvent quand les femmes agissent – en quittant le conjoint, en fuyant le domicile, en dénonçant les violences à un tiers – qu’elles se font tuer. Cette capacité d’agir – ou agentivité – a un rôle essentiel dans le féminicide : c’est lorsque les victimes tentent, comme elles le peuvent, de résister à la violence des hommes qu’elles peuvent faire l’objet de violences redoublées et mortelles, car ces actions s’exercent de manière contraire à la volonté des hommes, en transgression de l’ordre patriarcal.

Bien souvent, ces gestes d’agentivité constituent un moment critique où le risque d’être tuée est grand. Que l’on soit un ou une proche, ou une connaissance, de la victime, identifier ces moments et soutenir sa démarche, en restant vigilant, disponible et mobilisable, apparaît fondamental pour espérer lutter durablement contre les féminicides.

La politisation du féminicide, grâce à la ténacité des mouvements sociaux, a permis, plus d’un siècle après les écrits des féministes de la première vague, la mise à l’agenda d’un pan – encore bien petit – de cet immense problème public. Seule la poursuite de la lutte peut espérer réduire voire endiguer l’ensemble des féminicides et répondre ainsi à l’injonction brûlante des collages féministes : « Pas une de plus. »

The Conversation

Margot Giacinti est membre de conseil d'administration du Planning Familial du Rhône (MFPF69). Dans le cadre de son post-doctorat, elle est financée au titre de ses recherches par l'IERDJ et la Direction de l'Administration Pénitentiaire (DAP).

05.03.2025 à 15:55

X, Instagram, Twitch, TikTok, Youtube, Bluesky : de nouvelles règles s'imposent

Dominique Boullier, Professeur des universités émérite en sociologie. Chercheur au Centre d'Etudes Européennes et de Politique Comparée, Sciences Po
Quitter X ou Facebook pour migrer vers d’autres réseaux obéissant aux mêmes logiques ne résoudra pas les problèmes posés par les plateformes. Comment repenser l’espace des médias et des échanges numériques ?
Texte intégral (1956 mots)

Quitter X ou Facebook pour migrer vers d’autres réseaux obéissant aux mêmes logiques ne résoudra pas les problèmes posés par les plateformes. De nouvelles règles s’imposent.


Dans le contexte de choc politique et médiatique lié à l’élection de Donald Trump et aux prises de position des magnats des médias sociaux, les alternatives proposées aux individus semblent peser de peu de poids face aux plateformes qui s’affranchissent de tout droit. Les initiatives ont fleuri récemment au moment où Musk a promu sur sa plateforme une orientation d’extrême droite qualifiant toutes les autres de « wokistes ».


À lire aussi : X, Meta, Amazon et Google : le moment de bascule pro-Trump


Cependant, les problèmes étaient déjà là du temps du premier patron de Twitter, Jack Dorsey, ils ont été aggravés lorsque Musk a racheté la plateforme. La fuite actuelle soutenue par des opérations comme #quitteX marque un désaccord politique, mais n’est pas fondée sur la critique même de la fonction de ce type de plateforme virale, sur son architecture ni sur sa pertinence dans l’espace public.

Ainsi, se réfugier sur BlueSky, firme privée, qui reproduit l’ancien Twitter, sans questionner l’intérêt d’un tel système d’alerte cognitive permanente pour engendrer de la viralité, est une réaction à courte vue.

Les propagandistes du Kremlin (Colon, 2023 ont désorienté les opinions publiques sur Twitter. Ils recommencent déjà sur Bluesky. Rien ne justifie ce modèle de réseau et rien ne justifie que les politiques y soient présents encore alors que leurs quêtes de visibilité leur fait perdre tout contrôle à travers des réactions trop rapides, trop tranchées, non argumentées, et générant une réputation souvent illusoire ou alors délétère par la violence que cette viralité recherchée privilégie.

Mastodon constitue une alternative différente puisque complètement open source, contrôlée par les collectifs, et organisée en instance que l’utilisateur peut choisir, pour des effets de réseau plus limités et des effets de viralité nuls.

Quelles solutions ?

Les réseaux sociaux des années 2000 ont muté et doivent en fait être répartis en trois types de plateforme aux fonctions médiatiques et sociales bien différentes. Des régulations différentes doivent leur être appliquées sur le territoire européen ou même par pays, et non en fonction du nombre d’abonnés, comme veut le faire le DSA (Digital Services Act).


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Premièrement, certaines plateformes sont devenues des médias qui organisent le débat autour de contenus. C’est le cas de Twitter, de Facebook, d’Instagram et YouTube, de Twitch, de Reddit ou encore de TikTok. Leur fonction d’amplification, de viralité selon une orientation éditoriale, est essentielle, mais on les traite encore comme de simples hébergeurs, sans responsabilité sur les contenus publiés.

La couverture de la section 230 du Decency Act états-unien, qui les traite comme de simples fournisseurs d’accès, doit être retirée. Leurs récents passages à l’acte, politiques, ont choqué mais ils ont le mérite de montrer qu’il s’agit de médias avec une politique éditoriale (algorithmique) délibérée et orientée.

Ces plateformes et leurs propriétaires doivent donc demander une autorisation de publier analogue à tout autre publication et se voir contrôlées de la même manière que les autres médias (leur passage sous la supervision de l’Arcom en France est un bon signe). Leurs propriétaires devront répondre devant les tribunaux de tous les contenus illégaux publiés sur leur support. Pour l’éviter, ils devront appliquer une modération a priori et un contrôle éditorial.

Il n’est donc pas question de les empêcher d’avoir leur ligne éditoriale, mais de leur demander de l’assumer et, pour cela, d’interdire, selon les lois des pays, des publications racistes, antisémites, sexistes, homophobes, discriminantes ou incitatrices à la haine et à la violence, ou au harcèlement. Ils devront sans doute faire payer leurs abonnés pour prendre en charge toute cette activité de modération.

Ce modèle de médias est simple, il existe, il fonctionne, il est inutile de chercher à inventer des règles de modération que les plateformes ne veulent pas appliquer ou qu’elles détournent – et qui exigent des moyens disproportionnés pour la police et la justice. Qu’attend-on pour le mettre en œuvre dans un pays, même si l’Europe ne veut pas se mettre d’accord ?

Deuxièmement, d’autres plateformes proposent des fonctions de messagerie : c’est le cas de Messenger, de WhatsApp, de Telegram, de Signal, etc. Les fonctions de téléphonie/visiophonie/échange de documents relèvent dans ce cas des télécommunications et restent réglées par les principes du fournisseur d’accès. Cependant, leur détournement en médias est déjà bien avancé sur Telegram ou sur WhatsApp puisque des vastes groupes de contact y sont autorisés. Il est facile d’interdire des groupes de plus de 150 comptes correspondant au maximum de l’interconnaissance possible.

Le passage au-delà de cette limite devrait entraîner le changement de statut vers celui de médias comme indiqué précédemment. Mais à la différence des plateformes médias, il serait possible de déléguer la responsabilité juridique aux administrateurs de ces listes, ce qui pourrait arranger les plateformes et reconnaître le rôle essentiel des collectifs et de leurs animateurs dans la régulation immédiate.

Troisièmement, enfin, d’autres plateformes peuvent continuer à fonctionner comme le faisaient les réseaux sociaux du Web 2.0, avec un nombre d’amis limité à l’interconnaissance (150 personnes) et une responsabilité des administrateurs de groupe pour réguler ce qui peut s’apparenter à du trolling, à du harcèlement ou à des contenus illégaux. Dans ce cas, en effet, une régulation spécifique est nécessaire, car c’est la seule innovation véritable par rapport aux régimes médiatiques précédents. Là aussi la viralité est contrôlée puisque rien ne sort directement du groupe.

L’essentiel reste que, dans toutes ces architectures, des dispositifs de ralentissement de la viralité soient rendus obligatoires.

En effet, la viralité est l’ennemi principal sur les plans cognitif, politique, culturel et civilisationnel. Cela n’empêche pas la lutte contre les émetteurs ou propriétaires extrémistes ni contre les désinformateurs professionnels des régimes autoritaires. Mais tous bénéficient plus que les autres de ces architectures toxiques de propagation accélérée.

Les dégâts cognitifs et culturels de ce rythme haché sous forme d’alerte permanente, de réactivité stimulée par les récompenses qu’affichent les vanity metrics (scores de like, de partage, de followers ou de commentaires) sont désormais visibles dans l’espace public. Chacun apprend à provoquer les réactions avec des contenus stimulants et choquants, dont le score de nouveauté (Vosoughi, 2018) est élevé.

Les plateformes jouent sur les deux tableaux : la durée d’exposition, en maintenant les utilisateurs sur la plateforme en flattant leurs habitudes (la bulle de filtre) mais aussi le choc en les encourageant à réagir et à faire réagir par des contenus surprenants (le score de nouveauté).

Ralentir ce processus oblige à viser les processus cognitifs de base, en exigeant des plateformes qu’elles mettent en place un tableau de bord permanent pour monitorer sa propre activité et sa vitesse de réaction, comme on le fait pour tout véhicule. Chaque signal constitue une alerte permanente qui peut ensuite être équipée de seuils pour choisir son niveau de réactivité, puis de règles qui imposent un ralentissement général de la réactivité et donc de la viralité.

Cela donne ensuite un outil pour les plateformes responsables qui veulent ralentir la viralité dans certaines situations, pour certains thèmes. Ces dispositifs doivent faire partie du cahier des charges à imposer à toutes les plateformes qui veulent opérer sur le territoire européen.

L’interdiction de la publicité serait la mesure radicale qui casserait le modèle économique de ces plateformes qui menacent la santé mentale et le débat public. Car, c’est le moteur des rémunérations publicitaires qui entraîne le paramétrage des algorithmes en faveur de la viralité, et cela en toute opacité, ce qui empêche d’auditer correctement ces algorithmes. Mais cela semble difficile à imposer alors même que les médias de masse dépendent eux aussi de la publicité.

L’Europe et la France ont les moyens d’agir

L’Europe et la France ont les moyens de réagir et de restructurer ce paysage médiatique numérique laissé en roue libre qui finit par détruire les principes mêmes du débat démocratique. À condition de définir ce que sont ces réseaux et de leur appliquer les règles existantes sans adhérer à la manœuvre libertarienne de prétendue menace sur la liberté d’expression états-unienne. Le contrôle doit porter sur la viralité (le free reach) et non sur l’expression (« free speech »), et cela change tout en matière d’acceptabilité de ces mesures.

The Conversation

Dominique Boullier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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