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▸ les 10 dernières parutions

13.05.2024 à 18:33

Candidats aux élections européennes : le tri des hebdomadaires

Maxime Friot

Texte intégral (810 mots)

La Une d'un journal, en l'occurrence ici d'un hebdomadaire, ne saurait résumer en tout point sa ligne éditoriale, ni effacer les enquêtes qui peuvent, parfois, être publiées en pages intérieures. Mais elle est un fort indicateur de ce qui intéresse les directions éditoriales, et de ce qui mérite, selon elles, d'être mis en valeur. Et, par déduction, de ce qui le mérite moins. Démonstration appliquée à la couverture des différents candidats aux élections européennes...

Depuis le 1er janvier et jusqu'au 13 mai, nous avons relevé toutes les fois où une tête de liste aux élections européennes était affichée en Une d'un hebdomadaire : Le Point, L'Express, Marianne, L'Obs, La Tribune dimanche, le Journal du dimanche, Le Figaro Magazine, Aujourd'hui en France, Valeurs actuelles, Franc-Tireur. Quant à Télérama, Challenges, L'Humanité magazine et Paris Match, ils n'ont mis aucun candidat à la Une. Bilan : un gros déséquilibre et de nombreux absents.

Plus ou moins critiques, ce sont les Unes affichant Jordan Bardella (RN) qui sont les plus nombreuses : L'Express, Le Journal du dimanche, Valeurs actuelles, Le Point, Marianne (avec Marine Le Pen pour ces deux derniers) et La Tribune dimanche (avec Gabriel Attal).

Et ce n'est pas tout, puisque Bardella est aussi en Une, aux côtés de Raphaël Glucksmann et de Valérie Hayer, dans La Tribune dimanche (encore) et Aujourd'hui en France (avec ce titre : « Bardella toujours plus haut »).

Ou encore dans Le Figaro Magazine, cette fois aux côtés de Marion Maréchal (Reconquête) et François-Xavier Bellamy (LR) :

Derrière Bardella, c'est Raphaël Glucksmann (Place publique - PS) qui tire son épingle du jeu. Deux fois aux côtés du candidat du RN et de Valérie Hayer (cf. supra), il est aussi trois fois seul en Une :

Enfin, les deux autres têtes de listes à apparaître seules sont Valérie Hayer (Renaissance), dans Franc-Tireur

Et Marion Maréchal, dans Valeurs actuelles :

Récapitulons : Bardella apparaît 11 fois ; Glucksmann 5 fois ; Valérie Hayer 3 fois ; Marion Maréchal 2 fois ; et François-Xavier Bellamy 1 fois.

Récapitulons d'une autre façon : Manon Aubry (LFI), Marie Toussaint (EELV), Léon Deffontaines (PCF) ou encore Nathalie Arthaud (LO) n'apparaissent jamais en Une des hebdomadaires. Vous avez dit pluralisme ?

Maxime Friot

10.05.2024 à 16:50

Purge politique à France Inter

Pauline Perrenot

Les méfaits d'Adèle Van Reeth, suites.

- En direct de France Inter / ,
Texte intégral (1879 mots)

Dans la lignée de ses prédécesseurs, la directrice de France Inter, Adèle Van Reeth, poursuit le travail de destruction de la radio publique.

D'aucuns diront aigrement qu'il ne restait plus grand-chose à sauver de France Inter, cette « douce machinerie néolibérale » si bien décrite par l'ancien attaché de production Maxime Cochelin, harnachée de sa « vraie-fausse ligne éditoriale : une acceptation sans concession de l'ordre existant », rompue au tempo de l'exécutif et imbibée de ses éléments de langage au point de « créer une anti-réalité », un « anti-réel [...], purgé de toute remise en cause des hiérarchies en place ». Mais il reste encore à casser. Des programmes, des vrais ; des journalistes, des vrais ; des équipes. La directrice Adèle Van Reeth ne consacre que le pire : élargir la surface de la matinale, céder du terrain à l'extrême droite au point que Jordan Bardella puisse saluer publiquement des relations normalisées, ouvrir grand les vannes de l'éditorialisation et orchestrer de faux débats recyclant les éternels mêmes intervenants moyennant quelques cautions...

Sans doute revigorée par la relégation aboutie (sans grève au sein de la rédaction de la radio) de l'émission « C'est encore nous », anciennement « Par Jupiter », de Charline Vanhoenacker, l'autoritaire patronne aurait tort de ne pas poursuivre sa stratégie du choc. Car c'est bien ce que décrivent conjointement la société de producteurs et productrices et celle des journalistes de France Inter dans un communiqué interne que nous avons reproduit. En plus de la convocation de Guillaume Meurice par la direction de Radio France pour faute grave « en vue d'une éventuelle sanction disciplinaire » – à la suite de la réitération d'une blague qui lui avait valu un interrogatoire devant la police et une surréaliste remontrance de la direction –, la liste des politiques envisagées donne le tournis [1] : amputation d'un tiers du budget du « Grand dimanche soir » – l'émission de Charline Vanhoenacker, encore elle – ; remplacement de « La Terre au Carré » par « une émission de sciences et d'écologie plus "narrative" », expurgée de la chronique de Camille Crosnier, du « reportage Grand Format » mensuel de Giv Anquetil et de la chronique « Le Jour où » d'Annaëlle Verzaux ; enfin, disparition pure et simple des « Vies françaises » de Charlotte Perry et de « C'est bientôt demain », d'Antoine Chao – les quatre derniers cités sont d'anciens journalistes de l'équipe de Daniel Mermet. À propos de deux d'entre eux, nous écrivions dans Les médias contre la gauche :

Dans la presse, certains îlots parviennent encore à tirer leur épingle du jeu. Mais peut-on se satisfaire de quelques oasis dans le désert ? Notamment dans l'audiovisuel, où le reportage et l'enquête sociale finissent toujours par disparaître des grilles traditionnelles. Sur France Inter, l'émission « Comme un bruit qui court », qui avait succédé à « Là-bas si j'y suis » – enterrée par Laurence Bloch en 2014 –, a été à son tour éjectée de l'antenne en 2019 par la même directrice, et ce malgré de bons chiffres d'audience [2]. La direction invoquait alors la nécessité de « renouveler l'antenne » avant de se trahir pour de bon : l'émission était « trop militante » [3].

Le saccage se poursuit dans la même veine : la direction s'attaque aux (maigres) espaces restants où peuvent encore s'articuler reportage et critique sociale. Avec, en prime, cette affligeante mesquinerie : l'éviction du répondeur de « La terre au carré », où des anonymes sont habitués à relayer, par exemple, des initiatives militantes.

Les salariés de Radio France dénoncent « une atteinte grave au pluralisme » [4]. « Purge politique » est plus approprié. Sur fond de future cure austéritaire, de surcroît : le 23 avril, la CGT de Radio France alertait une nouvelle fois sur les dangers du projet de holding visant à regrouper les sociétés de l'audiovisuel public, repris à son compte par la ministre de la Culture Rachida Dati. Un « projet de démantèlement en règle de la radio de service public » porteur d'un risque « évident » de « réductions massives d'effectifs et de contenus », « une dégradation des conditions de travail [...] et des productions. » Les organisations syndicales « déposeront des préavis de grève pour les 23 et 24 mai ». La grève appelée le 12 mai pour « la défense de la liberté d'expression » est l'occasion d'y adjoindre des mots d'ordre politiques contre le (nouveau) tour de vis idéologique qu'endosse sans ciller la « première radio de France ».

Interrogée par Le Monde (3/05), la direction de France Inter fait péniblement valoir un « souci de lisibilité de la grille ». Un journaliste avance quant à lui une explication renversante : « Les directions de France Inter et de Radio France, condamne-t-il, "tremblent devant les posts de @MediasCitoyens", le compte X anonyme qui a fait de la station publique, jugée trop critique envers le gouvernement, l'une de ses cibles préférées et de "La Terre au carré", qualifiée "d'extrême gauche", son bouc émissaire. » En d'autres termes, une direction tout ouïe aux aboiements macronistes et à leurs cercles d'influences d'une part ; aux cris d'orfraie de l'extrême droite contre le fort réputé « gauchisme » de la radio publique, d'autre part : les deux (seuls) courants auxquels le duo Adèle Van Reeth-Sibyle Veil ne cesse de donner des gages.

La veille de ces révélations, le professeur d'économie Gilles Raveaud rappelait d'ailleurs qu'une (vieille) revendication ne cesse, quant à elle, de rester lettre morte : « Il n'y a aucune page d'archives de Bernard Maris [économiste assassiné dans les attentats contre Charlie Hebdo, NDLR] sur France Inter. Notamment de sa chronique quotidienne "L'autre économie". Il me semble que ça en dit long sur l'état d'esprit des dirigeants de cette chaîne. » (X, 2/05) « L'esprit Charlie », là encore.

Parce qu'il faut bien rire un peu, terminons avec deux archives récemment déterrées par des internautes. Dans la première, Adèle Van Reeth confie d'un air solennel surjoué son « bien fou » d'être entourée d'« humoristes qui sont irrévérencieux, qui n'ont aucune notion du respect, du sacré ». Dans la seconde, l'indéboulonnable Léa Salamé confesse l'« obsession » qui l'anime aux commandes de la matinale de France Inter : « Pas d'aller chercher, déceler la vérité, [mais] qu'il y ait un moment » : « Le plus important, évidemment que ce n'est pas la question, mais c'est le moment ! Ce n'est même pas la réponse, c'est le moment. C'est-à-dire que peu importe la question, peu importe la réponse, il faut qu'il y ait un moment [...], que l'auditeur soit surpris. Pour moi, un bon journaliste, c'est quelqu'un qui va faire un moment. » Piétiner des salariés, piétiner la pensée critique, piétiner le pluralisme, piétiner toute forme de contre-pouvoir : voilà qui devrait fournir à la vedette du « service public » un joyeux « moment » à médi(a)t(is)er.

***

Post-scriptum. Des pensées à M le magazine du Monde, qui en septembre 2023, alignait les mièvreries journalistiques ordinaires pour mieux tresser les lauriers d'Adèle Van Reeth : une patronne qui « fait entendre sa différence à France Inter ». Pour sûr. Quoiqu'en matière de sape des programmes et de répression de la critique, elle puisse se targuer de faire fructifier un vieil héritage patronal.

Pauline Perrenot


[1] À ce tableau de chasse, il faut ajouter la suppression de l'émission « La Librairie francophone ». L'écrivain et journaliste Sorj Chalandon écrit à ce propos : « Après 18 ans d'antenne aux commandes de la formidable "Librairie francophone" Emmanuel Kherad, son animateur, a été viré par le service public. […] Mépris, indifférence, goujaterie, violence, sottise. Tout ce que la littérature essaie de combattre. »

[2] Depuis 2019, les deux animateurs, Antoine Chao et Charlotte Perry, se sont vus gracieusement confiés deux émissions, respectivement « C'est bientôt demain » (15 minutes le dimanche à 14h40) et « Des vies françaises » (10 minutes le samedi à 6h11). Vous avez dit déclassement ?

[4] Lire aussi les communiqués du SNJ-CGT Radio France (5/05) et du SNJ Radio France (7/05).

10.05.2024 à 15:01

Racisme, France Inter, transphobie et compagnie : revue de presse de la semaine

Elvis Bruneaux

Du 03/05/2024 au 09/05/2024.

- L'actualité des médias
Texte intégral (1414 mots)

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n'est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 03/05/2024 au 09/05/2024.

Critique des médias

« "Les grandes gueules" de la démagogie et du racisme ont libre antenne sur RMC Story », Télérama, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Selon les médias, le RN n'est plus raciste », Arrêt sur images, 8/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Comment les médias Bolloré ont harcelé Nassira El Moaddem », Arrêt sur images, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Morandini-Praud-Hanouna, porte-voix de la fachosphère », Acrimed, 6/05.

« La journaliste Nassira El Moaddem harcelée : la machine médiatique, caisse de résonance de la fachosphère », Télérama, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Transphobie : la nouvelle panique des médias d'extrême droite », Blast, 6/05.

« "Spectre", "menace" : les mots des médias sur les préavis de grève », Arrêt sur images, 4/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Unes de l'Équipe : où sont les femmes ? », Arrêt sur images, 6/05 [article complet réservé aux abonnés].

« CNews a sciemment ignoré l'alerte interne sur son émission anti-IVG », Les Jours, 7/05 [article complet réservé aux abonnés].

« "Radars : 2 milliards de recette", la fausse info relayée partout », Arrêt sur images, 7/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Correspondante en Palestine. "Le but est de nous garder hors-jeu" », Orient XXI, 8/05.

« Colombe : le fantasme journalistique qui cochait (presque) toutes les cases », France Inter, 8/05.

« Beligh Nabli sur les plateaux télé : un vrai expert face aux experts en carton », Le Média, 8/05.

Dans les rédactions

« Avis de tempête à France Inter, où la rédaction subit une remise au pas à marche forcée », Mediapart, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« À France Inter, producteurs et journalistes s'inquiètent du "virage éditorial" qui s'annonce en septembre », Télérama, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« A France Inter, journalistes et producteurs s'inquiètent pour leur liberté d'expression », Le Monde, 4/05 [article complet réservé aux abonnés].

« À France Inter, un élan de solidarité inédit contre la direction », Mediapart, 8/05 [article complet réservé aux abonnés].

« France Inter coupe le micro à l'écologie et aux luttes », Reporterre, 7/05.

« Inquiétudes à Radio France après l'annonce de nouvelles coupes budgétaires », Télérama, 7/05 [article complet réservé aux abonnés].

À signaler, aussi

« L'UJFP demande un droit de réponse à France 5 suite à des accusations infondées », UJFP, 8/05.

« Après le scandale, "Playboy" rompt avec son éditeur », Arrêt sur images, 6/05 [article complet réservé aux abonnés].

« La controversée commission d'enquête sur la TNT adopte in extremis les conclusions de son rapporteur, le député Aurélien Saintoul », Le Monde, 7/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Affaire Cauet : l'animateur accusé de viols perd contre NRJ Group et ne reviendra pas à l'antenne », Le Figaro, 7/05.

« Le Parisien, France 2, Le Point, Que choisir, Franceinfo : le CDJM publie six nouveaux avis », CDJM, 8/05.

Liberté d'expression

« Menaces, pressions et violences se concentrent sur les journalistes traitant d'écologie », Mediapart, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Liberté d'expression : les attaques politiques, les fautes du service public », Mediapart, 3/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Guillaume Meurice convoqué : fin de la liberté d'expression sur le service public ? », Le Média, 7/05.

« Grève à Radio France dimanche 12 mai pour défendre la liberté d'expression », Télérama, 7/05.

« Classement mondial de la liberté de la presse 2024 : le journalisme sous pressions politiques », RSF, 3/05.

« La liberté d'informer attaquée de toutes parts », Le Monde, 6/05.

« France : RSF proteste contre la venue de Xi Jinping, un des plus grands prédateurs de la liberté de la presse », RSF, 6/05.

Et aussi, dans le monde : Argentine, États-Unis, Ukraine, Israël, Malaisie...

Retrouver toutes les revues de presse ici.


[1] Précisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie pas forcément que nous y souscrivons sans réserve.

06.05.2024 à 09:45

Morandini-Praud-Hanouna, porte-voix de la fachosphère

Maxime Friot

TV Bolloré, ou comment illustrer ce qu'on dénonce.

- Racisme, antisémitisme, xénophobie, homophobie / ,
Texte intégral (1228 mots)

Le 30 avril, la journaliste Nassira El Moaddem (Arrêt sur images, ex-i-Télé, ex-France Inter) tweete en réaction à une décision de la Fédération française de football [1] : « Pays de racistes dégénérés. Il n'y a pas d'autres mots. La honte. » Ce qui lui vaut d'être prise pour cible par l'extrême droite sur les réseaux sociaux et de subir menaces et insultes racistes et sexistes. La campagne se déroule ensuite sur les plateaux de la TV Bolloré, qui décuplent le torrent de haine.

Jean-Marc Morandini est le premier à dégainer. Le 1er mai, sur CNews, il introduit le sujet en précisant que ce tweet l'a mis « hors de [lui] », avant de tendre le micro à… Julien Odoul (RN) qui appelle Radio France à la suspendre (alors qu'elle n'y travaille plus) et conclut : « Si elle n'est pas contente, elle se casse. » Problème, comme le révèle Morandini qui s'enorgueillit d'avoir mené l'enquête – une enquête de basse police sur les « origines » de Nassira El Moaddem : « Elle est née dans le Loir-et-Cher, c'est une journaliste française. Ses parents sont marocains, ses parents sont originaires du Maroc. » Courtois avec l'élu RN qui pense comme lui, Jean-Marc Morandini se fait ensuite plus mordant – c'est le moins que l'on puisse dire – avec son autre interlocuteur, Rost, qui se refuse à « condamner » les propos de Nassira El Moaddem, même s'il dit ne pas les reprendre à son compte.

Sélection des injonctions hystériques de Morandini :

Rost, ça vous fait bondir aussi j'espère ? […] Mais vous devriez être vent debout, Rost. « Pays de racistes dégénérés », on accepte que la France soit traitée comme ça par une journaliste française ? […] Dites que c'est honteux alors ! […] Parce que votre réaction c'est de dire « oui, il y a des racistes », c'est pas ça la question, mais c'est honteux d'écrire ça ! C'est honteux ! […] Vous condamnez ce tweet ? […] Est-ce que vous condamnez ce tweet, Rost ? […] Est-ce que vous condamnez ce tweet ? Attendez, je pose la question autrement, est-ce que vous êtes solidaire de ce tweet ? Est-ce que vous êtes solidaire de ce tweet ? Est-ce que vous êtes solidaire de ce tweet ? […] Est-ce que vous validez « pays de racistes dégénérés » ? […] Est-ce que vous validez ? […] Est-ce que vous validez ou pas « pays de racistes dégénérés » ? Vous êtes incapables de condamner ! […] C'est honteux de pas pouvoir condamner ces propos ! C'est honteux de pas pouvoir condamner ces propos ! […] Les yeux dans les yeux : c'est honteux de pas condamner ces propos ! C'est honteux ! […] Vous me faites bondir Rost, là. Ça ne vous ressemble pas. Ça ne vous ressemble pas ! Oui, il y a des racistes en France, mais on n'est pas un pays de racistes dégénérés, vous êtes incapable de dire ça ? […] Mais est-ce qu'elle a raison ou pas ? Est-ce qu'elle a raison ou pas ? […] Est-ce qu'elle a raison ou pas ? […] Incroyable. Incroyable, Rost. Incroyable ce que vous faites. C'est incroyable. Mais vous vous rendez compte de ce que vous dites ? […] Si vous êtes pas capable de dire oui ou non sur « la France est un pays de racistes dégénérés », c'est très grave !

Quoi que l'on puisse penser de ce tweet, on conviendra qu'entre « il y a des racistes en France » et « pays de racistes dégénérés », la nuance n'est pas si grande qu'elle justifie une telle furie. D'autant que CNews, tout en le dénonçant violemment, montre que le racisme est désormais suffisamment assumé pour qu'on puisse, sur ses plateaux de télévision, se targuer d'avoir vérifié l'ascendance d'une journaliste, ou proposer à cette même journaliste, française mais manifestement pas autant que d'autres, de se « casser ». Il est parfaitement clair que ce sont le nom et les « origines » supposées de son autrice, comme le montre d'ailleurs « l'enquête » aussitôt menée par Morandini, qui le rendent insupportable aux yeux du présentateur de CNews : n'est-ce pas là la définition même du racisme ?

Le soir même, c'est Pascal Praud qui prend le relais – sa thèse : « On va à l'affrontement des communautés » –, avant de remettre ça le lendemain matin (2/05)... L'affaire est évidemment traitée par Cyril Hanouna et sa cour dans « Touche pas à mon poste » (C8), le même jour. Le tweet de Nassira El Moaddem ? « La lie de ce qui peut être fait en journalisme » explique-t-il. C'est un expert qui parle.

« Une affaire désormais tristement banale, qui témoigne de l'interconnexion de la fachosphère et d'une mécanique bien huilée où réseaux sociaux, télévision bollorisée et acteurs politiques – dont le Rassemblement national – jouent la même partition. », écrit à juste titre Libération (2/05). Une affaire qui rappelle la spécificité de la TV Bolloré et de ses têtes d'affiche : se faire les porte-voix de la fachosphère... et « une spécialité de jeter [des individus] en pâture [...], déclenchant contre [eux] des torrents de menaces de morts et d'insultes », ainsi que le documentait Mediapart dans le quatrième épisode de la série « Haine et désinformation : CNews vue de l'intérieur » : « Pascal Praud : l'heure des cibles ». Une affaire entendue : comme le relevait Nassira El Moaddem, à qui Acrimed apporte tout son soutien, les vagues de haine raciste qu'elle subit « correspondent toujours aux directs de leurs émissions ».

Maxime Friot


[1] « Laïcité : comment la FFF lutte contre le phénomène du port de collants et de casques dans le foot amateur », RMC, 30/04.

03.05.2024 à 19:19

« Une atteinte grave au pluralisme de l'antenne de France Inter »

Communiqué de la SDPI et de la SDJ de France Inter.

- En direct de France Inter / ,
Texte intégral (716 mots)

Nous relayons le communiqué de la SDPI et de la SDJ de France Inter du 3 mai 2024.

A Adèle Van Reeth, Directrice de France Inter

Paris, le 3 mai 2024,

Nous avons appris, jeudi 2 mai, la convocation de Guillaume Meurice par la direction de Radio France à un « entretien préalable en vue d'une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'à la rupture anticipée de (son) contrat de travail ». Il lui a également été signifié de « cesser toute activité professionnelle à Radio France » et de « ne pas se présenter à son poste de travail avant ledit entretien ». La SDPI et la SDJ de France Inter voient dans cette décision un signe très inquiétant pour la liberté d'expression, valeur que défend Radio France. Nous demandons le maintien à l'antenne de Guillaume Meurice, sans délai.

Cette convocation inacceptable semble être le symptôme d'un virage éditorial plus large.

L'émission « Le Grand dimanche Soir » portée par Charline Vanhoenacker et qui fait salle comble chaque dimanche, explose les audiences, mais pourrait être amputée d'un tiers de son budget à la rentrée de septembre. Une décision annoncée par la direction de France Inter, qui compte ainsi supprimer les sketches collectifs de l'émission, autant dire son essence-même.

Comment la direction de France Inter, justifie-t-elle cette coupe drastique ? Nous étions nombreux, il y a un an, à dénoncer la disparition de la quotidienne « Par Jupiter », animée par la même équipe et à nous interroger sur les motivations de la direction. Alors que ses audiences étaient excellentes, aucun autre projet n'était avancé au même moment pour la remplacer. L'objectif n'était-il pas, déjà, de se séparer d'une bande d'humoristes devenus trop gênants politiquement ?

Ce qui ressemble à un virage éditorial nous inquiète d'autant plus qu'il ne concerne pas seulement « Le Grand dimanche Soir ».

Nous avons été effarés d'apprendre que « La Terre au Carré » s'arrêtait à la rentrée prochaine pour laisser place à une émission de sciences et d'écologie plus « narrative » toujours présentée par Mathieu Vidard mais sans Camille Crosnier. Un projet incluant une chronique de Camille Crosnier dans cette future émission a été proposé à la direction mais il a été refusé tout comme la présence du répondeur avec les messages des auditeurs.

Comment justifier une telle décision à un moment où les préoccupations environnementales n'ont jamais été aussi importantes ? Radio France a pourtant fait de son « Tournant environnemental » un engagement clef.

Enfin, tous les reportages des programmes vont disparaître de la grille de rentrée : « Le reportage Grand Format » de Giv Anquetil et « Le Jour où » d'Annaëlle Verzaux, tous deux diffusés dans « La Terre au Carré » ; « Des vies françaises », de Charlotte Perry ; et « C'est bientôt demain », d'Antoine Chao. Autant de rendez-vous qui donnent, sur le terrain, la parole à des personnes qu'on n'entend plus ailleurs ; et qui ont en commun une école d'écriture radiophonique riche de sons.

Tous ces rendez-vous constituent pour nous l'identité de France Inter. Ils portent les valeurs du service public, de liberté d'expression, de pluralisme auxquelles nous sommes toutes et tous très attaché.es, et répondent à la mission d'une radio d'offre, qualitative et exigeante.

Cette mission de représenter le pluralisme de la société, la direction de Radio France assure la défendre. Au moment où nos audiences n'ont jamais été aussi fortes – avec pour exemple 542 000 auditeurs supplémentaires en un an pour « Le Grand dimanche Soir » –, les équipes dénoncent des décisions dangereuses pour les valeurs de notre radio.

Nous refusons ce qui nous apparaît une atteinte grave au pluralisme de l'antenne de France Inter.

La Société des Producteurices de France Inter (SDPI), et la Société des Journalistes (SDJ) de France Inter

03.05.2024 à 11:22

Guillaume Meurice, « C ce soir », « Quotidien » et compagnie : revue de presse de la semaine

Elvis Bruneaux

Texte intégral (1224 mots)

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n'est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 26/04/2024 au 02/05/2024.

Critique des médias

« "C ce soir", ou quand la bourgeoisie chic organise sa propre cécité », Blast, 28/04.

« Iran-Israël : difficile de suivre une actu complexe avec des flash info », Arrêt sur images, 26/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Femmes humiliées chez Ardisson : le revers de sa médaille », Arrêt sur images, 27/04, [article complet réservé aux abonnés].

« Procès médiatique en antisémitisme : peut-on encore défendre les insoumis ? », Blast, 28/04.

« Kendji Girac : "Quotidien" accusée de véhiculer des clichés anti-gitans », Arrêt sur images, 29/04, [article complet réservé aux abonnés].

« Marine Le Pen, Gabriel Attal, JO… "Quotidien" en lice pour la médaille d'or de l'impertinence ?, Samuel Gontier, Télérama, 26/04 [article complet réservé aux abonnés].

« "Quelle époque !" et l'alcool : touche pas à ma franchouillardise », Arrêt sur images, 30/04 [article complet réservé aux abonnés].

« "La domination de la finance juive" : BFMTV mise en demeure par l'Arcom après avoir déformé des propos de Dominique de Villepin », Pure Médias, 30/04.

« Élèves musulmanes : "mensonge" et "stigmatisation" sur LCI », Arrêt sur images, 1/05 [article complet réservé aux abonnés].

« "J'ai infiltré le plateau de BFM" : le récit terrible d'un journaliste indépendant », Le Média, 1/05.

« Une journaliste attaquée par l'extrême droite : la mécanique bien huilée du harcèlement raciste », Libération, 2/05 [article complet réservé aux abonnés].

Économie des médias

« Face à Pierre-Édouard Stérin, le propriétaire de Valeurs actuelles se positionne pour racheter Marianne », La Lettre, 2/05 [article complet réservé aux abonnés].

« Après le départ de Nicolas de Tavernost, quel avenir pour M6 ? », Télérama, 30/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Groupe Lagardère : mis en examen pour abus de biens sociaux, Arnaud Lagardère se démet de son mandat de PDG », Libération, 30/04.

« Droits voisins : Mediapart lance la bataille de la transparence contre Google », Mediapart, 28/04.

Dans les rédactions

« Jean-François Achilli licencié par Radio France pour "manquements répétés aux obligations déontologiques", Le Monde, 29/04.

« Journalistes : la tentation de l'extrême droite », Blast, 30/04.

« L'humoriste Guillaume Meurice convoqué à un entretien préalable au licenciement par Radio France », Le Monde, 2/05.

« En soutien à Nassira El Moaddem », Arrêt sur images, 2/05.

« Attaques de Rachida Dati contre "Libération" : notre réponse aux propos indignes d'une ministre », Libération, 26/04.

« RTL en crise d'identité : "On ne sait plus assez exprimer l'air du temps" », Télérama, 30/04 [article complet réservé aux abonnés].

À signaler, aussi

« "On ne parviendra pas à endiguer les flux d'informations incontrôlées si le public ne fait pas preuve lui-même de vigilance" », Le Monde, 27/04 [tribune complète réservée aux abonnés].

« Paris 2024 : la presse écrite s'organise pour une couverture à enjeux », Le Monde, 28/04 [article complet réservé aux abonnés].

« CNews rafle la diffusion de la première messe des Jeux olympiques de Paris », Libération, 30/04.

Et aussi, dans le monde : Sénégal, Niger, Pakistan, Burkina Faso, Russie...

Retrouver toutes les revues de presse ici.


[1] Précisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie pas forcément que nous y souscrivons sans réserve.

02.05.2024 à 17:09

« C ce soir », ou quand la bourgeoisie chic organise sa propre cécité

Maxime Cochelin

Reprise d'un texte paru sur Blast.

- Débats télévisés / ,
Texte intégral (3929 mots)

Nous publions, avec leur accord et sous forme de tribune [1], ce texte paru sur Blast le 28 avril 2024. (Acrimed)

Lancée en janvier 2021, l'émission « C ce soir » s'est inscrite sous une devise signée par le physicien Etienne Klein « Débattre, c'est argumenter pour ne pas se battre ». Portée par l'animateur Karim Rissouli, la proposition a vite suscité les émules d'une partie des autres médias. Dès février de la même année, pour France Inter, Redwane Telha titre sa chronique : « "C ce soir" est-elle déjà la meilleure émission de la télévision française ? ». En l'espace d'un mois, le rendez-vous serait déjà devenu « incontournable ». Même ambiance à Libération, en novembre 2022, où Jonathan Bouchet-Petersen (souvent invité de l'émission, par ailleurs) analyse « C ce soir » comme à « contre-courant de l'hanounisation du paysage médiatique ». Ou encore le journal Causette, en décembre 2023, qui encense une contre-proposition, un « pari de l'intelligence » face à « la télé poubelle ».

L'opération semble réussie. À en croire les mots de son animateur phare, c'est dans cette perspective que l'émission s'est construite. Contre les sbires de Bolloré, contre le « clash » et les petites phrases, et pour le « débat d'idées ». Un ton qui se veut « apaisé », une discussion qui se propose de « faire varier les registres de parole » pour contribuer à « réparer la société ». Une philosophie dans laquelle semble s'inscrire Camille Diao, présentatrice elle aussi, qui appuie sur la nécessité d'avoir « des voix issus d'autres milieux sociaux à la télé ». « C ce soir » serait ainsi une émission de rupture, qui, au cœur de la dérive des médias mainstream, incarnerait une tentative de lutte. Une sorte d'interstice de la machine où la complexité du réel aurait la place de se déployer. Vraiment ?

1. Le débat est mort, vive le débat !

Commençons par la forme : du débat. Ça commence mal, tant cette « proposition » ne cesse d'être mise en place partout. Sur France Inter, par exemple, la transformation a été impulsée par la direction. Portée par le diagnostic d'une société « fracturée », motivée par l'objectif d'avoir un « regard neutre » et toucher le plus de personnes possibles, la station a dû construire des débats sur des débats. C'était d'abord une émission d'été, « Le débat de midi », que l'auteur de ces lignes a programmé. Puis des billets d'humeur dans la matinale, pour représenter toutes les sensibilités (même l'extrême droite, qu'importe les oppositions de la rédaction). Le débat éco du vendredi, entre Thomas Piketty et Dominique Seux, et puis maintenant, une case de plus de 10 minutes chaque matin, animée par Léa Salamé, qui oppose des « débatteurs ». Créer de l'opposition pour, avec « objectivité », rendre compte du « réel ». Persuadés que c'est bien de ça dont il est question dans notre chère époque : réconcilier les avis divergents, « réparer ». En gros, jouer sur les mêmes plates-bandes que le reste du paysage.

Lorsque « C ce soir » débarque en 2021, l'émission s'inscrit dans ces mutations du service public audiovisuel : reprendre la forme surreprésentée dans les médias de droite ou d'extrême droite pour, supposément, le faire « mieux » qu'eux. Les débats, en effet, sont aujourd'hui surtout une affaire d'Hanouna, de Pascal Praud, et autres Grandes Gueules, qui ne cessent de poser des questions sur des questions, appuyées sur des chroniqueurs qui jouent les « pour » et les « contre ». C'est eux les premiers de cordée du dispositif, qui, à force de faire grandir leurs audiences, ont fini par imposer leur forme. Le meilleur moyen de faire passer des idées de manière « souterraine » : ça s'embrouille, ça fait du bruit, ça s'oppose un peu, et on finit par en oublier l'inanité du cadrage préalable. Et c'est pour essayer de la conquérir, cette audience-là, que le service public a reproduit la formule, à sa sauce. « C ce soir » s'inscrit dans cet élan, davantage mimétique qu'antagonique, au cœur d'une vague que l'émission prétend surplomber.

Pourtant, les invités sont globalement les mêmes que partout. La volonté d'offrir une tribune à « d'autres milieux sociaux » est (très) loin d'être flagrante. Des personnalités que l'on peut entendre dans bien d'autres endroits se succèdent, celles qui représentantes de ci ou de ça, rattachées à telle ou telle institution, ont réussi à accumuler un gros capital médiatique. Des Thomas Legrand, Olivier Babeau, Pierre-Henri Tavoillot, Charles Consigny, Pablo Pillaud-Vivien, des gens pour qui les médias sont devenus un fonds de commerce tant ils en maîtrisent les codes. Ils savent rebondir, réagir, faire passer leurs idées en un temps record et, pour la plupart, se connaissent. Aucune entorse n'est faite à l'espace de respectabilité bourgeoise habituelle du paysage médiatique, et quand tel est le cas, forcé par « l'actu », le mépris de classe se déchaîne. Quand des personnalités osent sortir du cadre, on retourne l'émission pour leur expliquer qu'il faut mieux se tenir, et puis, in fine, on ne les invite plus jamais (cf. Rima Hassan). Laure Adler, chroniqueuse permanente, forte d'une carrière de quarante ans à Radio France, complète chacun des tableaux d'invités. Pas non plus des plus populo. Les mêmes gens qui font la même chose qu'ailleurs, c'est-à-dire débattre entre eux : la supposée rupture n'est définitivement pas des plus évidentes. Une affaire de « ton », peut-être ?

2. Lumières tamisées, réel oublié

À « C ce soir », l'éclairage est doux, le grand écran habituel des plateaux télés est remplacé par une belle baie vitrée, et les invités ne sont pas derrière une table mais, jambes croisées, sur de belles chaises à cuir rouge. De raffinés guéridons sont disposés au centre. C'est le débat d'apéro, mais certainement pas celle du camping. Rangez le Ricard, place au joli verre de vin. On discute entre gens respectables, de manière posée, sous l'œil avisé de Karim Rissouli qui ne manquera pas de faire redescendre les envolées colériques. Le plateau ne doit pas « ressembler à l'hémicycle de l'Assemblée nationale ou du Sénat », il ne faut pas « échanger avec des gants de boxe » et garder une boussole en tête : maintenir son « rôle de médiation ». Bien obligé de reconnaître que l'ambiance dénote, en effet, des émissions bolloréennes.

Chaque édition est structurée à partir d'une question. Pour se limiter à la Saison 4, quelques-unes d'entre elles : « Privé-Public : la nouvelle guerre scolaire » ; « Dette, chômage : faut-il remettre les Français au travail » ; « Rwanda : la France a-t-elle laissé faire ? » ; « Violences entre jeunes : un manque d'autorité ? ». De manière plutôt transparente, le cadrage de « C ce soir » ne semble en rien dénoter des autres productions médiatiques. La colonne vertébrale à partir de laquelle l'équipe choisit ses questions et pose le centre de gravité du futur « débat » s'inscrit dans une « actualité » des plus classiques, rythmée par les agissements politiciens et les fausses polémiques. Par exemple, quand bien même les travaux sociologiques [2], les retours associatifs et les témoignages divers attestent du contraire, on se demandera quand même si la violence des jeunes est liée à un manque d'autorité. Pourquoi ? Parce que le gouvernement le dit. Donc ça mérite d'être débattu, même si ça tourne dans le vide.

« C ce soir » construit ainsi, comme la plupart de ses concurrents, des échanges en dehors du réel. « La France a-t-elle laissé faire au Rwanda ? » La réponse est oui, et tous les gens sérieux sont d'accord. Alors, comment faire pour malgré tout en faire un débat ? D'abord, trouver un méchant. Dénicher quelqu'un, avec un soupçon de respectabilité (faut pas faire n'importe quoi non plus), capable d'apporter la contradiction. Pour le Rwanda, ce méchant, c'était Jean Glavany, ancien ministre dont tout le monde avait oublié l'existence. Son rôle était clair : créer le débat là où il n'y en a pas. Ce qu'il a fait, en racontant n'importe quoi, dans une confusion affligeante, sans être rectifié par Camille Diao, à la présentation ce jour-là. Et ce jusqu'à provoquer la colère (en retenue) de Vincent Duclerc, historien mandaté par Macron, sur une ligne tout à fait raisonnable dans cette affaire. Une contre-réalité sort de terre : Glavany d'un côté, qui nie catégoriquement la responsabilité de la France dans un élan quasi conspirationniste, un ventre mollasson au milieu, et puis Duclerc, qui devient l'autre opposée, parce que lui, historien, accable la France mitterandienne. Deux personnalités avec une compétence diamétralement opposée mises au même niveau par le dispositif, présentées comme deux « avis » sur un même sujet, et puis libre aux spectateurs de trancher. C'est la « médiation » façon « C ce soir », avec une formule reproduite sur la plupart des sujets.

3. Cascade de dépolitisation

Ce mardi 23 avril, l'émission s'interroge : « Palestine : le débat interdit ? ». Avant d'embrayer, le lendemain « Débat public : l'impossible nuance ? », et le pompon, le surlendemain : « Emmanuel Macron : seul rempart contre les populistes ? ». Un exercice dont « C ce soir » est devenu spécialiste : dénoncer la violence, les oppositions, pour se poser en solution apaisée et raisonnable. Pour ce qui est de la situation à Gaza, les invités, globalement tous d'accord, se sont adonnés à une série de poncifs sur le manque de complexité des échanges, la polarisation des positions, la formation de deux camps qui ne se parlent plus. Énième validation de la thèse bourdieusienne [3] : les goûts sont avant tout des dégoûts. Là, ça transpire. Dégoût pour les gens qui s'énervent, les gens qui expriment leur souffrance un peu trop fort, qui brandissent leur désaccord. La vérité, le réel, se trouve plutôt chez eux, réunis en cercle comme des sages, adeptes de la mesure. Dans cette ambiance feutrée, rien n'empêche ainsi Joann Sfar de déclarer qu'il n'y a pas d'apartheid en Israël, ou encore que, en France, nous utilisons les « populations du Moyen-Orient pour régler notre propre psychanalyse » vis-à-vis de la guerre d'Algérie. Et ça passe. C'est même publié sur les réseaux sociaux. Comme le terrain a été préparé en amont, comme il a été convenu qu'on était entre gens respectables, ça glisse.

Rissouli et son équipe sont probablement honnêtes dans leur démarche. C'est sans doute porté par une croyance très habermassienne dans la délibération [4], dans la formation d'un espace public libre, que les débats menés par « C ce soir » sont organisés. À y regarder de près, par le refus de l'expression d'une conflictualité consistante (et donc par la mise à l'écart de toute une série d'invités potentiels), l'émission dénote par sa grande dépolitisation. Le dispositif met en scène des micro-confrontations entre gens d'une même classe sociale, articulées sur l'espace médiatique dominant, et passe la plupart du temps à côté des véritables points de tensions. Il arrive, et c'est le cas en ce moment, que l'histoire s'accélère, se déploie dans sa dimension tragique, se déchaîne. Dans ces configurations, certains tiennent la digue, d'autres l'oublient. Face à une situation génocidaire, il n'est pas affaire de nuances : on se serre les coudes pour faire arrêter cette ignominie. Face à un gouvernement qui sombre de plus en plus dans le fascisme, il n'est pas affaire de nuances : on se serre les coudes, là aussi, pour s'insurger et faire front. Par leur refus de regarder le réel en face, « C ce soir » s'inscrit dans ceux qui, artisans de la troisième voie, ont poussé vers « La République du centre » [5], persuadés d'assister à la fin de l'histoire. Une sorte de conservatisme chic et intello : le futur n'est plus affaire de renversements, mais de rectifications. Avec un peu de discussion apaisée, de pédagogie, la démocratie triomphera et avec elle l'émancipation collective. Malheureusement, (spoiler alert), le néolibéralisme n'a jamais fonctionné comme ça [6].

Le constat est peut-être dur, mais il est nécessaire de le porter. Tous les instruments par lesquels la rationalité néolibérale porte atteinte au corps politique, et à l'idée même de démocratie [7], ont aussi cours sur le plateau de « C ce soir » : violence de classe, détestation du conflit, séparation entre un camp de la raison et les autres. Représentation presque parfaite de l'incapacité de notre « démocratie » contemporaine à intégrer les différents antagonismes dans une optique de progrès social. Il aurait fallu sortir des cours de Sciences Po pour creuser un peu plus loin qu'Habermas, par exemple jusqu'à Rancière [8]. C'est justement parce que la partie supérieure du corps social est passée à l'offensive devant la remise en cause grandissante de leurs positions que la société s'est « fracturée ». Encore une fois, même si Rissouli semble l'avoir raté, le diagnostic a été fait [9], corroboré par une série d'événements univoques. Lorsque « C ce soir » crée des débats à partir des éléments de langage politiciens, l'équipe ne fait que jouer une chorégraphie hors-sol, une mise en scène de ce qui « oppose », en surface, les membres d'un même bloc : le bloc bourgeois. On reproduit la même mélodie qu'ailleurs, LFI c'est l'extrême, la NUPES sûrement aussi, le Printemps Républicain c'est de gauche, et ainsi de suite. Comment ne pas y voir une tentative (peut-être inconsciente) de camouflage, qui, par une fausse complexité, positionne les discussions en dehors de ce qui compte vraiment, c'est à dire la radicalisation d'une classe dirigeante sans socle, sans légitimité, poussée dans ses retranchements ?

Conclusion : la meilleure émission de télé ?

Malgré ces critiques, sommes-nous en mesure de réfuter Redwane Telha lorsqu'il déclare que « C ce soir » est « la meilleure émission de la télé » ? Malheureusement, peut-être pas. Même si l'émission ne réinvente rien, elle reste parfois, dans quelques cas, une légère bullette d'air frais. Parce que les invités sont loin d'être tous inconsistants, et que certains, avec habileté, parviennent à contourner quelque peu un dispositif qui n'est pas des plus restrictifs. De fait, Camille Diao, Karim Rissouli et Laure Adler apportent une tonalité particulière et peuvent, parfois, laisser passer des idées pertinentes qui seraient censurées ailleurs.

Dans un paysage médiatique des plus sclérosés, où l'extrême droite a fait son nid et torpille les réfractaires, « C ce soir » apparaît peut-être comme le moins pire. Sur les ruines de « l'illusion » d'un tripartisme progressiste [10], l'émission tente, comme un baroud d'honneur, de rappeler au bloc bourgeois qu'il existe une alternative au destin fasciste qui se profile : mieux vaut le néolibéralisme que l'extrême droite. Intention louable ? Sans doute, pour les quelques-uns qui auraient oublié l'interpénétration structurelle de ces deux mouvements [11]. Cher Karim, chère Camille, chère Laure, votre plaidoirie est anachronique : le bloc bourgeois a déjà viré à tribord. Et c'était parfaitement prévisible. Vous avez raté le wagon de l'histoire et maintenant, par votre résistance au diagnostic, vous vous rendez complices de ceux que vous pensez combattre. Organiser sa propre cécité sous un vernis « critique » pour maintenir un statu quo impossible, n'est-ce pas là le meilleur allié des pires dérives ? Voilà un débat qui, lui, mériterait d'être mené.

Maxime Cochelin


[1] Les articles publiés sous forme de « tribune » n'engagent pas collectivement l'association Acrimed, mais seulement leurs auteurs dont nous ne partageons pas nécessairement toutes les positions.

[2] Sans aucune exhaustivité : Mohammed Marwan, « Y'a embrouille ». Sociologie des rivalités de quartier, Stock, Paris, 2023 // Coquard Benoît, Ceux qui restent. Faire sa vie dans les campagnes en déclin, La Découverte, Paris, 2019 // Peugny Camille, Pour une politique de la jeunesse, Seuil, Paris, 2022.

[3] Bourdieu Pierre, La distinction. Critique sociale du jugement, Éditions de minuit, Paris, 1979.

[4] Habermas Jürgen, L'espace public, Payot, Paris, 1988.

[5] Furet François, Jacques Julliard et Pierre Rosanvallon, La République du centre. La fin de l'exception française, Calmann-Lévy, Paris, 1994.

[6] Laval Christian, Haud Guéguen, Pierre Dardot et Pierre Sauvêtre, Le choix de la guerre civile. Une autre histoire du néolibéralisme, Lux, Montréal, 2021.

[7] Brown Wendy, Défaire le démos. Le néolibéralisme, une révolution furtive, Amsterdam, Paris, 2018.

[8] Rancière Jacques, La haine de la démocratie, La Fabrique, Paris, 2005.

[9] Denord François et Lagneau-Ymonet Paul, Le concert des puissants, Raisons d'agir, Paris, 2016.

[10] Amable Bruno et Stefano Palombarini, L'illusion du bloc bourgeois. Alliances sociales et avenir du modèle français, Raisons d'agir, Paris, 2018.

[11] Chamayou Grégoire, La société ingouvernable. Une généalogie du libéralisme autoritaire, La Fabrique, Paris, 2018.

30.04.2024 à 11:00

Sortie de Médiacritiques n°50 : Journalisme politique

Acrimed

Parution le 19 avril.

- Médiacritiques
Lire plus (360 mots)

Le Médiacritiques n°50 est sorti de l'imprimerie le 19 avril. À commander dès maintenant sur notre site ou à retrouver en librairie. Et surtout, abonnez-vous !

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26.04.2024 à 10:38

TV5 Monde, « Télématin », « C à vous » et compagnie : revue de presse de la semaine

Elvis Bruneaux

Texte intégral (1455 mots)

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n'est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 19/04/2024 au 25/04/2024.

Critique des médias

« "Vous pouvez rejoindre le Hamas si vous voulez" – Mon (éphémère) expérience de chroniqueur sur BFM TV », Frustration, 25/04.

« "Tsahal" dans votre salon », Le Monde diplomatique, mai 2024.

« Orientalisme, impérialisme et couverture des médias dominants de la Palestine », Contretemps, 19/04.

« Mineurs délinquants : foire à la répression sur les chaînes info et chez Hanouna », Samuel Gontier, Télérama, 19/04 [article complet réservé aux abonnés].

« L'émission "Télématin" sur France 2 a-t-elle diffusé un "publireportage" sur Jordan Bardella en Isère ? », Libération, 25/04 [article complet réservé aux abonnés].

« "Soirée continue" : France 2 trie les bons et les mauvais autistes », Arrêt sur images, 22/04.

« Européennes, sondage et RN : la bourde de Franceinfo », Arrêt sur images, 19/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Médias et quartiers populaires peuvent-ils se comprendre ? », Le Monde, 20/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Les quartiers populaires, mal aimés des médias ? », Le Monde, 22/04.

Économie des médias

« Les titres de l'éditeur du magazine "Têtu" vendus à plusieurs acquéreurs », Le Monde, 19/04 [article complet réservé aux abonnés].

« TV5Monde en discussion pour ouvrir son capital à plusieurs pays africains critiqués pour la liberté de la presse », Le Monde, 24/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Qui pour prendre la tête de TV5 Monde ? », La Lettre, 22/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Le média en ligne "Factuel" est en cessation de paiement », Le Monde, 22/04.

« Rachat de Lagardère : Vivendi gagne une bataille devant la Cour de justice européenne », L'Informé, 19/04, [article complet réservé aux abonnés].

« Médias : qui veut se payer Marianne ? », L'Humanité, 21/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Devant les salariés de "Marianne", Denis Olivennes confirme la recherche d'un repreneur », Le Monde, 22/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Nicolas de Tavernost s'en va après trente-sept ans à la tête de M6, remplacé par David Larramendy, Le Monde, 23/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Groupe Le Monde : communiqués du Pôle d'indépendance et du Fonds pour l'indépendance de la presse, Le Monde, 23/04.

« Audiovisuel public : une réforme en mal d'objectif défini », Le Monde, 19/04, [article complet réservé aux abonnés].

« Réforme de l'audiovisuel public : pour Rachida Dati, un dossier bouclé en main », Libération, 23/04 [article complet réservé aux abonnés].

Dans les rédactions

« Aux "Echos", la nomination de Christophe Jakubyszyn validée par la rédaction », Libération, 25/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Les journalistes de La Voix du Nord saisissent le médiateur sur la question des droits voisins », La Lettre, 24/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Le Canard enchaîné lance un dernier assaut pour écarter le journaliste Christophe Nobili », La Lettre, 19/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Canard enchaîné : mais que se passe-t-il chez le palmipède ? », Blast, 24/04.

À signaler, aussi

« L'Arcom met en garde France 5 après le passage de Xavier Niel dans "C à vous" », La Lettre, 25/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Le pluralisme, un travail de pros », Les Jours, 23/04 [article complet réservé aux abonnés].

« "Charlie Hebdo" relaxé en appel pour diffamation envers une école musulmane de Valence », Le Monde, 23/04 [article complet réservé aux abonnés].

« La plainte visant Guillaume Meurice après son sketch sur Benyamin Nétanyahou classée sans suite », Le Monde, 22/04.

« L'AFP gagne contre Marine Le Pen en cassation », La Lettre, 22/04 [article complet réservé aux abonnés].

Et aussi, dans le monde : Italie, Hong Kong, Tchad, Afghanistan...

Parution

« Journalisme politique », Médiacritiques n°50, avril-juin 2024.

Retrouver toutes les revues de presse ici.


[1] Précisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie pas forcément que nous y souscrivons sans réserve.

19.04.2024 à 12:18

Marianne, Jean-François Achilli, élections et compagnie : revue de presse de la semaine

Elvis Bruneaux

Texte intégral (1198 mots)

Critique des médias : une revue de presse hebdomadaire. Si ce n'est exhaustive, au moins indicative [1]. Au programme : du 12/04/2024 au 18/04/2024.

Critique des médias

« Arnacœurs, princes charmants et perfidie : M6 réhabilite la télé trash », Samuel Gontier, Télérama, 12/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Quotidien : pourquoi l'extrême droite attaque Yann Barthès », Blast, 14/04.

« Alain Minc et Jacques Attali, l'éternel retour des duettistes médiatiques », Acrimed, 18/04.

« Fact-checking, quand les médias n'écoutent pas les faits », Arrêt sur images, 17/04 [article complet réservé aux abonnés].

« CHU de Rennes : la double casquette de l'avocat de "Ouest-France", Arrêt sur images, 16/04 [article complet réservé aux abonnés].

« "Mariés au premier regard" (et divorcés juste après) : le roman-photo stéréotypé de M6 », Arrêt sur images, 14/04.

Économie des médias

« Daniel Kretinsky envisage de céder l'hebdomadaire "Marianne", Le Monde, 15/04 [article complet réservé aux abonnés].

L'hebdomadaire "Marianne" lâché par Daniel Kretinsky », Libération, 16/04, [article complet réservé aux abonnés].

« Rachat d'Euronews : le Syndicat national des journalistes réclame une enquête parlementaire », Le Monde, 13/04.

« Le groupe Centre France-La Montagne sonne l'alarme sur sa situation financière », La Lettre, 18/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Audiovisuel public : le grand regroupement ? », Le Monde, 15/04.

« Renforcer l'audiovisuel public ne se fera pas avec des "fusions-suppressions", SNJ France-Télévisions, 16/04.

« Jean-Noël Jeanneney, historien : "La fusion de l'audiovisuel public nous ramènerait au temps antédiluvien du gargantuesque ORTF", Le Monde, 13/04.

Dans les rédactions

« La première société des journalistes de l'histoire de Nice-Matin voit le jour », La Lettre, 12/04, [article complet réservé aux abonnés].

« La rédaction de "Marianne" dénonce "la brutalité des méthodes" de Daniel Kretinsky », Le Monde, 17/04.

« De l'affaire Cahuzac au livre de Bardella, l'étrange vie "professionnelle personnelle" de Jean-François Achilli, journaliste phare de France Info », Libération, 17/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Jean-François Achilli, un journaliste "pro" et "complexe" rattrapé par ses liens avec les politiques, Télérama, 18/04 [article complet réservé aux abonnés].

« A Radio France, tolérance zéro avec les journalistes qui font bons "ménages" avec la com », Libération, 17/04 [article complet réservé aux abonnés].

« Simon Collin accusé de viol : la plainte qui secoue "Playboy" », Arrêt sur images, 15/04 [article complet réservé aux abonnés].

À signaler, aussi

« Elections européennes : ce qu'il faut savoir sur le décompte du temps de parole des candidats et de leurs soutiens », Le Monde, 15/04.

« Élections européennes 2024 : les règles fixées par l'Arcom », Arcom, 15/04.

« Concentration des médias, indépendance des rédactions… Faut-il croire les journalistes ? », L'Humanité, 18/04.

« "Nous implorons les gouvernements, les organisations internationales et toutes les bonnes volontés à se mobiliser pour garantir l'évacuation sûre des journalistes palestiniens de Gaza" », Le Monde, 13/04.

Et aussi, dans le monde : Grande-Bretagne, Italie, Russie, Togo, Haïti, Chine...

Retrouver toutes les revues de presse ici.


[1] Précisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie pas forcément que nous y souscrivons sans réserve.

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