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10.02.2025 à 22:00

Au Kurdistan irakien, des fonctionnaires en grève de la faim réclament le paiement de leurs salaires

Marion Fontenille

Il y a un va-et-vient continu à l'intérieur de la grande tente installée face au siège des Nations Unies de la ville de Souleymanié, la deuxième ville du Kurdistan irakien. Les proches et les amis se rendent au chevet des grévistes dont les corps commencent à faiblir après quatre jours sans s'alimenter. Onze employés de la fonction publique, principalement des enseignants, ont décidé d'entamer une grève de la faim pour protester contre le non-versement de leurs salaires. Certains ont même (…)

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Texte intégral (1972 mots)

Il y a un va-et-vient continu à l'intérieur de la grande tente installée face au siège des Nations Unies de la ville de Souleymanié, la deuxième ville du Kurdistan irakien. Les proches et les amis se rendent au chevet des grévistes dont les corps commencent à faiblir après quatre jours sans s'alimenter. Onze employés de la fonction publique, principalement des enseignants, ont décidé d'entamer une grève de la faim pour protester contre le non-versement de leurs salaires. Certains ont même fait la route des villages alentour pour prendre part à la protestation.

Assis sur l'un des lits de camp, Dilshad Mirani vient d'être perfusé après quatre jours de grève par l'équipe médicale qui effectue sa première visite. « Je sens que mon corps s'affaiblit, mais je suis déterminé à aller jusqu'au bout. C'est la première grève de la faim que nous organisons dans le pays en 34 ans », explique le maître d'école, à l'origine du mouvement. Il fait partie du groupe des « professeurs contestataires », créé en 2014 afin de coordonner les manifestations dans la région.

« Nous avons reçu nos derniers salaires en novembre 2024, depuis plus rien. Au cours des dix dernières années, 54 salaires ne nous ont jamais été versés. Nous avons manifesté à plusieurs reprises ces dernières années, mais le gouvernement régional du Kurdistan ne nous écoute pas, donc nous avons décidé de changer nos méthodes ».

Des fonctionnaires pris à la gorge économiquement

Assis à ses côtés, son collègue Dilshad Baban, lui aussi sous perfusion, ajoute, « je ne me souviens pas d'une année durant laquelle j'ai reçu mes 12 mois de salaire. Certaines années, nous n'avons pas reçu jusqu'à cinq mois de salaires consécutifs ». En moyenne, le salaire d'un enseignant s'élève à 700 euros. Ce professeur de biologie a rejoint la contestation dès ses débuts il y a dix ans. « La plupart des professeurs sont obligés de trouver un deuxième emploi. Certains sont même ouvriers sur des chantiers pour pouvoir survivre. »

Selon un décompte détaillé publié sur le site Kurdistan Watch en décembre dernier, entre 2015 et 2024, 58 mois de salaires ont été versés en intégralité, contre 44 mois partiellement. Le gouvernement régional du Kurdistan devrait un total d'environ 17 milliards d'euros (23 billions 116 milliards de dinars irakiens) à tous les fonctionnaires de la région – qui représentent un cinquième de la population.

C'est en désespoir de cause que Fazil s'est joint au mouvement. Ses gestes sont lents, et chaque phrase est entrecoupée d'une déglutition laborieuse. Ce professeur d'arts plastiques depuis 18 ans veut montrer l'exemple à la future génération.

« Je me bats pour mes enfants et mes élèves. Je veux leur apprendre qu'ils ne vont pas simplement à l'école pour apprendre à lire et à écrire, mais aussi pour connaître leurs droits et apprendre à les défendre », explique-t-il, sa petite-fille sagement assise sur ses genoux.

Sa femme, Dlsoz se tient au bout du lit, elle hoche la tête en écoutant son mari. « Il est normal de venir le soutenir. Je suis moi aussi employée de la fonction publique. Je partage la même douleur et les mêmes problèmes. Nous ne gagnons plus d'argent, nous perdons toute dignité. Comment peut-on vivre avec un salaire tous les 60 ou 70 jours ? », interroge-t-elle, « et dès que nous les recevons, nous devons rembourser nos dettes auprès de nos proches ». Un cercle vicieux intenable, d'autant que l'aide diminue, leur entourage, également issu de la fonction publique, subit la même pression.

« Nous sommes fatigués de ces autorités qui prétendent être un ‘gouvernement' mais qui restent sourdes à nos demandes. Je veux recevoir mon salaire directement depuis Bagdad, comme cela a été décidé par la Cour fédérale irakienne. Je ne fais plus confiance aux autorités de la région du Kurdistan », conclut Fazil avant de s'allonger.


Au sixième jour de la grève de la faim, lors d'une conférence de presse, le 2 février, le porte-parole du gouvernement régional du Kurdistan, Peshawa Hawrami, a accusé les organisateurs du mouvement de s'être alliés à des chefs de milices irakiennes pour servir leur agenda. « Nous considérons que certains des enseignants grévistes agissent comme des intermédiaires pour des éléments anti-kurdes », a-t-il déclaré.

Des liens que les personnes visées ne démentent pas, à commencer par Dilshad Mirani, dont des photos aux côtés de Rayan Al-Kildani, le chef de la milice de la Brigade de Babylon, une milice chrétienne pro-Iran, ont été partagées sur les réseaux sociaux. Le « professeur contestataire » s'en est défendu publiquement, expliquant être « prêt à travailler avec n'importe quel groupe irakien disposé à défendre leur cause ».

Batailles politiques et luttes d'influence

Comment expliquer une décennie d'impasse ? Au commencement était le pétrole. Dès 2014, la guerre contre l'État islamique aggrave des tensions déjà existantes entre Erbil, la capitale régionale du Kurdistan, et Bagdad, la capitale fédérale. À cela s'ajoutent, au fil des ans, la forte baisse des prix mondiaux du pétrole et les répercussions économiques de la pandémie de Covid-19, qui ont des répercussions sur les revenus du gouvernorat.

En mars 2023, suite à un arbitrage, le Kurdistan irakien n'est plus autorisé à exporter du pétrole sans l'aval du gouvernement irakien. L'accord trouvé dans la foulée avait entériné la fin de l'indépendance financière de la région autonome du Kurdistan, en échange d'une redevance régulière, payée par l'État fédéral. Début février, une reprise des exportations de pétrole a été approuvée, grâce à un amendement budgétaire prévoyant une augmentation de la compensation pour les coûts de production et de transport du pétrole. Selon le président de la région autonome du Kurdistan irakien, Nechirvan Barzani, c'est « une étape prometteuse », bien qu'il faille sans doute attendre plusieurs mois avant la mise en œuvre du nouveau tarif.

Par ailleurs, la plainte contre le gouvernement de la région du Kurdistan pour ses retards récurrents dans le paiement des salaires déposée il y a quelques années par des avocats et des fonctionnaires contestataires de Souleymanié auprès de la Cour suprême fédérale irakienne n'est pas restée lettre morte. Deux décisions de justice ont suivi, il y a un an : les autorités à Erbil doivent « remettre au gouvernement fédéral tous leurs revenus pétroliers et non pétroliers et se plier à un audit des comptes ».

Le gouvernement fédéral est également sommé par la justice irakienne de verser directement les salaires aux fonctionnaires dans le Kurdistan, sans passer par les autorités locales.

« C'est tout l'enjeu de la digitalisation et du paiement par service bancaire des salaires. La guerre se joue sur leur domiciliation », explique Tom Préel, doctorant en sciences politiques à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, rattaché au Centre européen de sociologie et de sciences politiques (CESSP).

« Le gouvernement régional du Kurdistan, sous grosse influence du PDK [Parti démocratique du Kurdistan qui domine le gouvernement kurde, ndlr] souhaite que les salaires soient domiciliés dans des banques à Erbil qui sont – pour les banques connues – assez proches de certains acteurs au sein du parti. Du côté de Bagdad, le gouvernement fédéral souhaite domicilier ces salaires dans des banques qui sont affiliées directement à l'État central irakien », poursuit le chercheur.

Deux systèmes de distribution des salaires se font donc face : Myaccount, pour recevoir ses revenus depuis les banques kurdes, et Tatween, depuis la banque nationale irakienne. Ce dernier a la préférence des manifestants de Souleymanié.

Tom Préel résume ainsi la situation : « C'est une lutte d'influence entre la périphérie et l'État central, dans un rapport de décentralisation-centralisation. » Une autre ligne de fracture apparaît, cette fois entre les frères ennemis : les principales formations politiques du Kurdistan autonome. L'UPK, qui contrôle le sud du Kurdistan autour de Souleymanié, en soutenant la décision de la Cour suprême fédérale et donc le système Tatween, se positionne comme un contre-acteur face au PDK.

Des actes, plutôt que des promesses

Le 1er février, au cinquième jour de la grève, trois personnes ont été hospitalisées. Le ministre des Finances du gouvernement régional du Kurdistan affichait son « bon espoir de recevoir l'argent pour payer les salaires de janvier 2025 ce dimanche 2 février ». En vain. Son homologue de Bagdad, lui, ne s'est toujours pas exprimé. En coulisses, les délégations d'Erbil et de Bagdad poursuivent leurs réunions à huis clos.

Lundi 3 février, des milliers de personnes ont défilé dans les rues de Souleymanié. Le gouverneur Nechirvan Barzani s'est exprimé quelques heures plus tard déclarant suivre de près la situation des grévistes et avoir reçu leur message. « Je presse les enseignants et les employés de prendre en considération leur santé et de mettre un terme à leur grève de la faim ».

Malgré tout, les fonctionnaires sont déterminés à poursuivre leur mouvement jusqu'à obtenir une garantie d'un paiement régulier de leurs salaires, et cela sur le long terme. « Nous resterons ici jusqu'à récupérer nos droits ou jusqu'à la mort » affirme Fazil, son étiquette « gréviste » rouge et blanche autour du cou. Au Kurdistan irakien, l'espoir fait vivre, ou mourir de faim.


Mise-à-jour (11.02.25, 9h00, CET) : Les fonctionnaires ont reçu leur salaire du mois de janvier 2025, le 10 février 2025, mais ils continuent toutefois la grève de la faim, à ce jour, car ils réclament encore le paiement de tous les arriérés de salaires, et un accord sur les modes de règlement bancaire.

Mise-à-jour (11.02.25, 18h00, heure locale) : La grève de la faim a été suspendue ce mardi 11 février 2025 en fin de journée, après quinze jours, bien que toutes les revendications des grévistes n'aient pas été satisfaites, à savoir : le paiement de l'intégralité des arriérés de salaires, la garantie d'un versement mensuel régulier et un accord sur les modalités de règlement bancaire. Les fonctionnaires en grève ont été transportés à l'hôpital sous les applaudissements de plusieurs centaines de personnes rassemblées devant la tente installée deux semaines plus tôt.

06.02.2025 à 11:40

Hollywood face à l'IA : la négociation collective pose les bases pour le futur du travail

À l'origine, l'avant-garde désignait le détachement de soldats précédant le gros des troupes dans un contexte militaire. Dans la sphère culturelle, le concept d'avant-garde a été redéfini par l'écrivain français Henri de Saint-Simon et repris par la suite dans la littérature et les arts pour désigner les artistes qui, à l'instar des éclaireurs militaires, se positionnent à la tête des innovations, remettant en cause les normes établies pour ouvrir la voie à de nouvelles formes d'expression. (…)

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Texte intégral (1898 mots)

À l'origine, l'avant-garde désignait le détachement de soldats précédant le gros des troupes dans un contexte militaire. Dans la sphère culturelle, le concept d'avant-garde a été redéfini par l'écrivain français Henri de Saint-Simon et repris par la suite dans la littérature et les arts pour désigner les artistes qui, à l'instar des éclaireurs militaires, se positionnent à la tête des innovations, remettant en cause les normes établies pour ouvrir la voie à de nouvelles formes d'expression.

Dans le cas du mouvement porté par les acteurs et scénaristes hollywoodiens en 2023, cette tradition avant-gardiste des artistes a pris un nouveau sens. Confrontés à l'impact perturbateur de l'intelligence artificielle (IA) sur leurs activités créatives, non seulement ont-ils défendu leurs droits, mais ils ont également créé un précédent historique en abordant les implications éthiques et professionnelles des technologies émergentes dans le cadre d'une négociation collective précédée d'une grève des scénaristes et des acteurs.

Dans un effort conjoint entre les deux catégories de travailleurs, les négociations collectives emmenées par des syndicats, tels que celui des scénaristes (la WGA, Writers Guild of America) et celui des acteurs (la SAG-AFTRA, Screen Actors Guild‐American Federation of Television and Radio Artists) ont permis de mettre en place des accords historiques autour de l'utilisation de l'IA, qui constituent une réponse pionnière face au phénomène croissant de la « plateformisation » et de l'automatisation du travail culturel.

Les artistes ont dénoncé le recours par les studios à des algorithmes pour générer des scénarios et le développement d'images et de sons numériques simulant le jeu des acteurs grâce aux technologies d'hypertrucage (« deepfake ») et à d'autres outils d'IA générative.

Hollywood sur le pied de guerre : IA, droits du travail et clauses pionnières

La grève de la WGA a débuté le 2 mai 2023 et les acteurs de la SAG-AFTRA l'ont rejointe le 14 juillet de la même année, dans le cadre d'une mobilisation commune qui a duré près de six mois. Cet épisode d'une ampleur sans précédent dans l'industrie depuis 1960 s'est achevé le 9 novembre 2023, avec la signature d'un accord historique entre les syndicats et l'Alliance des producteurs de cinéma et de télévision (AMPTP, Alliance of Motion Picture and Television Producers).

Pendant cette période, les productions états-uniennes ont été presque entièrement paralysées, ce qui a eu des répercussions sur les grandes productions hollywoodiennes, les séries télévisées et le contenu des plateformes de diffusion en continu (ou « streaming »). Les réunions visant à résoudre le conflit ont pour la majeure partie eu lieu à Los Angeles, épicentre de l'industrie du divertissement.

Le soutien de personnalités telles que Meryl Streep, George Clooney, Jennifer Lawrence, Viola Davis et Mark Ruffalo, ainsi que des dirigeants syndicaux Fran Drescher et Duncan Crabtree-Ireland, a permis de maintenir la pression sur l'AMPTP, qui a finalement accepté d'intégrer des clauses novatrices pour réglementer l'IA et protéger les travailleurs.

L'accord final conclu entre les syndicats et l'AMPTP comprend plusieurs dispositions innovantes destinées à répondre à ces préoccupations. L'une des clauses les plus importantes stipule que les studios ne peuvent pas utiliser des images, la voix ou le jeu des acteurs numérisés sans leur consentement explicite préalable. Il a également été convenu que tout recours à des doublures numériques ou à des voix de synthèse devrait être rémunéré de façon équitable.

L'accord stipule également que les scénarios générés par l'IA ne peuvent pas remplacer les scénaristes humains dans le processus de création. Si un brouillon généré par l'IA est utilisé, les scénaristes doivent être rémunérés pour leurs révisions et leurs éditions, ce qui garantit leur participation active et leur reconnaissance en tant qu'auteurs de l'œuvre finale.

Une innovation importante a été la création d'un comité de surveillance de l'impact de l'IA, qui évaluera chaque année l'impact de ces technologies sur l'industrie. Ce comité, composé de représentants des syndicats et des studios, aura le pouvoir de proposer des mises à jour de la convention collective afin de s'adapter aux nouveaux développements technologiques.

L'accord aborde également l'utilisation de l'IA dans la personnalisation du contenu sur les plateformes de diffusion en continu. Bien que les algorithmes restent un outil important, les syndicats ont réussi à obtenir que les travailleurs créatifs soient informés de la manière dont leurs contributions seront utilisées dans ces systèmes, afin de garantir une plus grande transparence et de protéger les droits d'auteur.

« Cet accord ne se contente pas de mettre en place des protections fondamentales, il crée également un précédent pour d'autres secteurs. Les travailleurs doivent avoir leur mot à dire dans l'intégration des technologies émergentes qui affectent leurs moyens de subsistance », selon M. Crabtree-Ireland.

Au cours d'une activité consacrée à la négociation collective et à l'IA organisée par le ministère brésilien du Travail en collaboration avec l'OIT, le négociateur de la SAG-AFTRA a souligné que « l'accent est mis sur le droit à être informé chaque fois que l'employeur utilise un artiste de synthèse, en particulier quand cela touche aux droits d'auteur. Nous souhaitons garantir des espaces où les talents humains et créatifs peuvent trouver leur place. »

Il a également souligné qu'il est possible de protéger les travailleurs. Et que la négociation collective est un « instrument fondamental qui permet à la classe ouvrière de résister et d'insister sur ses revendications sans renoncer aux avancées déjà acquises ».

Les risques pour l'industrie créative

L'introduction d'outils d'IA générative tels que ChatGPT, Midjourney et DALL-E permet de générer des scénarios, de créer des images conceptuelles et de modifier les voix et les visages de manière hyperréaliste. Par exemple, des plateformes telles que DeepDub proposent déjà des services de doublage automatisé basé sur l'IA, tandis que des outils tels que Runway ML permettent d'éditer des vidéos complexes à l'aide de quelques instructions textuelles seulement.

L'impact de ces technologies ne se limite pas à la création de contenu. Les plateformes de diffusion en continu, telles que Netflix et Amazon Prime Video, ont intégré des algorithmes d'IA pour analyser les données des consommateurs et prédire quels types de productions auront du succès, influençant ainsi les décisions créatives avant même que le processus d'écriture ne commence.

Cela réduit l'autonomie des créateurs et donne la priorité à des produits conçus pour maximiser le rendement commercial plutôt que d'encourager l'originalité artistique.

En outre, les acteurs vocaux et les artistes de doublage sont directement menacés par des outils, tels que Respeecher, qui peuvent synthétiser des voix pour créer des dialogues en plusieurs langues ou modifier les intonations sans intervention humaine. Cette utilisation de l'IA menace des milliers d'emplois et soulève des questions éthiques sur la propriété intellectuelle et le consentement.

Le rapport récemment publié par la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs (CISAC) souligne que d'ici 2028, les auteurs de musique et de créations audiovisuelles pourraient perdre respectivement 24 % et 21 % de leurs revenus en raison de l'impact de l'IA générative sur l'industrie culturelle. Ces chiffres représentent une perte cumulée de 22 milliards d'euros (22,93 milliards de dollars US). A contrario, le marché des contenus générés par l'IA connaîtra une croissance exponentielle, passant de 3 milliards d'euros (3,12 milliards de dollars US) aujourd'hui à 64 milliards d'euros (66,55 milliards de dollars US) en 2028.

Björn Ulvaeus, président de la Confédération, estime que, même si l'IA est un outil qui a le potentiel de révolutionner l'industrie, son développement ne doit pas se faire au détriment des droits des créateurs.

L'organisation plaide en faveur de la transparence et de lois sur la rémunération qui permettent le partage des retombées économiques entre les entreprises technologiques du secteur et les artistes originaux.

Dans le secteur de la musique, on estime que les créations générées par l'IA représenteront 20 % des revenus des plateformes de diffusion en continu et jusqu'à 60 % dans les bibliothèques musicales d'ici 2028. Cela pourrait tout particulièrement affecter les auteurs-compositeurs et les artistes indépendants, qui dépendent de plateformes telles que Spotify pour distribuer leurs œuvres.

Dans le domaine de l'audiovisuel, les scénaristes et les réalisateurs sont également confrontés à une baisse potentielle de 15 à 20 %.

Mobilisations dans d'autres secteurs

L'impact de l'IA sur l'industrie créative soulève un dilemme fondamental : les progrès technologiques peuvent-ils coexister avec les droits des créateurs ? Les grèves à Hollywood et les rapports tels que celui de la CISAC sont les signes d'un secteur qui refuse de perdre de son identité humaine.

Si l'IA promet de transformer la manière dont la culture est produite et consommée, ce progrès ne sera durable que si les droits des travailleurs créatifs sont garantis.

L'expérience d'Hollywood a trouvé un écho au-delà de l'industrie du divertissement et inspiré les travailleurs d'autres secteurs touchés par l'automatisation et l'intelligence artificielle. Un cas notable est celui des youtubeurs allemands qui, avec le soutien du syndicat IG Metall, ont négocié avec des plateformes telles que YouTube pour obtenir une plus grande transparence dans les algorithmes de monétisation et garantir des revenus plus équitables. Cet exemple montre que l'organisation collective peut être efficace même dans les professions hautement numérisées.

En outre, ce cas souligne la valeur du soutien du public et de la solidarité entre les travailleurs. La création de comités de surveillance et de clauses adaptées est un modèle susceptible d'être reproduit dans d'autres secteurs pour garantir que les technologies sont utilisées de manière éthique et équitable.

À mesure que l'intelligence artificielle continue de transformer des industries entières, l'accord conclu à Hollywood constitue un exemple précieux pour d'autres secteurs. Qu'il s'agisse de protéger les droits des travailleurs ou de réglementer l'utilisation de technologies émergentes, cet épisode démontre l'efficacité de la négociation collective comme outil permettant de garantir les droits des travailleurs à l'ère du numérique.

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