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17.09.2025 à 16:30
TikTok et les jeunes : rentabilité et fabrique du mal-être
Texte intégral (1721 mots)

Tutoriels de suicide, hashtags valorisant l’anorexie, vidéos de scarification… Le rapport parlementaire, publié le 11 septembre 2025, dresse un constat glaçant des effets psychologiques de TikTok sur les mineurs. L’application, loin d’être un simple divertissement, apparaît comme une véritable « fabrique du mal-être », structurée par une architecture algorithmique qui capte et qui exploite l’attention des adolescents pour maximiser sa rentabilité.
Si les députés proposent d’interdire l’accès aux réseaux sociaux avant 15 ans, l’enjeu va bien au-delà de la seule régulation juridique. Ce que révèle le rapport de la commission parlementaire d’enquête sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs, publié le 11 septembre 2025, c’est l’émergence de nouvelles fragilités liées aux environnements numériques. Ce mélange de design addictif, de spirales algorithmiques et de logiques économiques tend à fragiliser les jeunes usagers.
Dès lors, la question centrale ne porte pas seulement sur l’âge d’accès aux plateformes, mais sur notre capacité collective à construire une régulation adaptée, capable de protéger les mineurs sans les exclure du monde numérique.
Comment protéger efficacement les mineurs face à la puissance des algorithmes sans les priver d’un espace numérique devenu incontournable dans leur socialisation et leur développement ?
La fabrique algorithmique de la vulnérabilité
Le rapport parlementaire décrit TikTok comme une « machine algorithmique » conçue pour capter l’attention des utilisateurs et pour les enfermer dans des spirales de contenus extrêmes. L’architecture du fil repose sur l’idée simple que plus un contenu retient le regard longtemps, plus il sera recommandé à d’autres utilisateurs. Ce mécanisme transforme la durée d’attention en indicateur de rentabilité, au détriment de la qualité ou de l’innocuité des contenus.
En quelques minutes, un adolescent peut passer d’une vidéo anodine à des tutoriels de scarification, des incitations à l’anorexie (#SkinnyTok) ou au suicide. Amnesty International a montré que, dès les douze premières minutes, plus de la moitié des contenus recommandés à un « profil dépressif » concernaient l’anxiété, l’automutilation ou le suicide. L’algorithme ne reflète donc pas seulement les préférences. Il construit également un environnement qui accentue les vulnérabilités psychiques.
Dans une perspective des sciences de l’information et de la communication (SIC), discipline qui étudie la manière dont les technologies et les dispositifs médiatiques structurent nos pratiques sociales et nos représentations, ce processus illustre une « fabrique de vulnérabilités communicationnelles ». Autrement dit, l’architecture technique de TikTok ne se contente pas de diffuser des contenus, elle façonne les conditions mêmes de réception et d’usage.
Il s’agit d’un design pensé pour exploiter l’économie de l’attention, reposant sur la gratification immédiate et la logique de la récompense aléatoire. Comme le souligne Ulrich Beck dans sa théorie de la « société du risque », les technologies produisent elles-mêmes les dangers qu’elles prétendent encadrer. TikTok illustre ce paradoxe avec un espace de divertissement qui se transforme en espace de mise en danger systémique.
En ce sens, la toxicité décrite dans le rapport n’est pas une dérive accidentelle, mais une conséquence structurelle du modèle économique de la plateforme. L’algorithme, optimisé pour maximiser le temps passé en ligne, tend mécaniquement à privilégier les contenus les plus radicaux ou perturbants, car ce sont ceux qui retiennent le plus l’attention.
L’opacité algorithmique comme enjeu central
L’un des constats majeurs de la commission d’enquête concerne l’opacité des algorithmes de TikTok. Malgré plus de sept heures d’audition des représentants de la plateforme, les députés soulignent le caractère insaisissable de son fonctionnement : absence d’accès aux données brutes, impossibilité de vérifier les critères de recommandation, communication limitée à des éléments généraux et souvent contradictoires. Autrement dit, le cœur technique de l’application algorithmique reste une boîte noire dont l’intelligibilité est encore questionnée.
Cette opacité n’est pas un simple détail technique puisqu’elle conditionne directement la capacité à protéger les mineurs. Si l’on ne sait pas précisément quels signaux (durée de visionnage, likes, pauses, interactions) déclenchent la recommandation d’un contenu, il devient impossible de comprendre pourquoi un adolescent vulnérable est exposé en priorité à des vidéos sur l’anorexie, sur le suicide ou sur l’automutilation. Le rapport qualifie ce manque de transparence d’« obstacle majeur à la régulation ».
Cette situation illustre la notion de gouvernance algorithmique. Il s’agit des dispositifs qui, tout en organisant nos environnements informationnels, échappent largement à l’intelligibilité publique. Cette asymétrie entre la puissance des plateformes et la faiblesse des institutions de contrôle génère ce que l’on peut qualifier de vulnérabilité communicationnelle systémique.
Le rapport insiste ainsi sur la nécessité d’outils européens d’audit des algorithmes, mais aussi sur l’importance d’une coopération renforcée entre chercheurs, autorités de régulation et acteurs de la société civile. L’enjeu n’est pas seulement de contraindre TikTok à être plus transparent, mais de créer les conditions d’une intelligibilité collective de ces dispositifs techniques. C’est à ce prix que la protection des mineurs pourra devenir effective et que l’Europe pourra affirmer une souveraineté numérique crédible.
L’économie du mal-être
Le rapport parlementaire souligne également que la toxicité de TikTok n’est pas accidentelle ni le fruit d’une intention malveillante, mais qu’elle découle de son modèle économique, d’une logique marchande où le mal-être est rentable.
Ce mécanisme illustre ce que les chercheurs appellent l’« économie de l’attention ». Sur TikTok, le temps de visionnage devient la ressource centrale. Plus un adolescent reste connecté, plus ses données alimentent le ciblage publicitaire et la valorisation financière de la plateforme. Or les émotions négatives (peur, sidération, fascination morbide) génèrent souvent une rétention plus forte que les contenus positifs. Les spirales algorithmiques ne sont donc pas de simples accidents, mais la conséquence directe d’une optimisation économique.
Cette dynamique s’inscrit dans un capitalisme de surveillance, où l’expérience intime des individus est extraite, analysée et transformée en valeur marchande. Dans le cas de TikTok, les comportements vulnérables des mineurs (hésitations, clics répétés, visionnages prolongés de contenus sensibles) deviennent autant de données monétisables.
Ainsi, il ne s’agit pas seulement de protéger les jeunes contre des contenus toxiques, mais de comprendre que la plateforme a intérêt à maintenir ces contenus en circulation. Le problème est donc structurel. TikTok n’est pas seulement un réseau social qui dérape, c’est aussi une industrie qui prospère sur la captation du mal-être.
Au-delà de TikTok
En définitive, le rapport sur TikTok agit comme un miroir grossissant des mutations de nos environnements numériques. Il ne s’agit pas seulement de pointer les dangers d’une application. Il s’agit également de questionner les logiques économiques et algorithmiques qui façonnent désormais la socialisation des plus jeunes.
L’enjeu n’est pas de bannir un réseau social, mais plutôt de concevoir une régulation capable d’intégrer la complexité des usages, la diversité des publics et les impératifs de protection. La notion de sécurité communicationnelle fournit ici une clé de lecture en ce sens qu’elle invite à penser ensemble santé psychique, gouvernance algorithmique, souveraineté numérique et innovation responsable.
TikTok n’est donc pas une exception, mais le symptôme d’un modèle qu’il devient urgent de réformer. L’avenir de la régulation ne se jouera pas uniquement sur cette plateforme. Elle se jouera aussi dans la capacité des sociétés européennes à redéfinir les règles du numérique à la hauteur des enjeux générationnels qu’il engage.

Fabrice Lollia ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
17.09.2025 à 16:29
Pourquoi tout le monde n’a pas le sens de l’orientation
Texte intégral (1612 mots)

Vous êtes plutôt du genre à vous repérer partout dès la première fois, ou à encore sortir le GPS après plusieurs années dans le même quartier ? Ah ! le fameux « sens de l’orientation » ! On entend souvent que les femmes en manqueraient, tandis que les hommes posséderaient « un GPS intégré ». Mais la réalité est beaucoup plus subtile… Alors, d’où vient ce « sens de l’orientation », et pourquoi diffère-t-il tant d’une personne à l’autre ?
Vous marchez dans la rue à la recherche de l’adresse que votre amie vous a donnée… mais qu’est-ce qui se passe dans votre cerveau à ce moment-là ? La navigation spatiale mobilise un véritable orchestre de nombreuses fonctions cognitives.
D’un côté, des processus dits de « haut niveau » : localiser son corps dans l’espace, se représenter mentalement un environnement, utiliser sa mémoire, planifier un itinéraire ou encore maintenir un objectif. De l’autre, des processus plus automatiques prennent le relais : avancer, ralentir, tourner… sans même y penser.
En réalité, le « sens de l’orientation » n’est pas une capacité unique, mais un ensemble de tâches coordonnées, réparties entre différentes zones du cerveau, qui travaillent de concert pour que vous arriviez à bon port.
Le cerveau cartographe
S’il existe bien une structure cérébrale particulièrement impliquée, c’est l’hippocampe. Cette structure jumelle, une par hémisphère, possède une forme allongée qui rappelle le poisson dont elle tire son nom.

Son rôle dans la navigation spatiale est souvent illustré par une étude devenue emblématique.
L’équipe de recherche s’intéressait à la plasticité cérébrale, cette capacité du cerveau à se réorganiser et à adapter ses connexions en fonction des apprentissages. Elle a alors remarqué que la partie postérieure de l’hippocampe des conducteurs et conductrices de taxi à Londres était plus développée que celle de personnes n’ayant pas à mémoriser le plan complexe de la ville et qui n’y naviguent pas au quotidien. Preuve, s’il en fallait, que notre cerveau s’adapte selon les expériences.
Le sens de l’orientation n’est pas inné
C’est une des questions qu’a voulu explorer Antoine Coutrot au sein d’une équipe internationale, en développant Sea Hero Quest, un jeu mobile conçu pour évaluer nos capacités de navigation. Le jeu a permis de collecter les données de plus de 2,5 millions de personnes à travers le monde, du jamais vu à cette échelle pour le domaine.
Les participant·e·s ne partageaient pas seulement leurs performances dans le jeu, mais fournissaient également des informations démographiques (âge, genre, niveau d’éducation, etc.), la ville dans laquelle iels avaient grandi, ou encore leurs habitudes de sommeil.
Alors, les hommes ont-ils vraiment « un GPS dans la tête » ? Pas tout à fait.
Les données révèlent bien une différence moyenne entre les sexes, mais cette différence est loin d’être universelle : elle varie en fonction du pays, et tend à disparaître dans ceux où l’égalité de genre est la plus forte. En Norvège ou en Finlande, l’écart est quasi nul, contrairement au Liban ou à l’Iran. Ce ne serait donc pas le sexe, mais les inégalités sociales et les stéréotypes culturels qui peuvent, à force, affecter la confiance des personnes en leur capacité à se repérer, et donc leurs performances réelles.
L’âge joue aussi un rôle : durant l’enfance, nous développons très tôt les compétences nécessaires à l’orientation et à la navigation spatiales. Après 60 ans, les capacités visuospatiales déclinent, tout comme le sens de l’orientation, qui repose, comme on l’a vu, sur de nombreuses fonctions cognitives.
À lire aussi : Proprioception et équilibre : notre « sixième sens » varie d’un individu à l’autre
… mais façonné par l’environnement
L’endroit dans lequel on grandit semble également impliqué. Celles et ceux qui ont grandi dans de petits villages sont souvent plus à l’aise dans de grands espaces. À l’inverse, les citadin·e·s, habitué·e·s à tout avoir à quelques pas, se repèrent mieux dans les environnements denses et complexes.
La forme même de la ville, et plus précisément son niveau d’organisation (que l’on appelle parfois « entropie »), influence également nos capacités d’orientation. Certaines villes très organisées, aux rues bien alignées, comme de nombreuses villes états-uniennes, présentent une entropie faible. D’autres, comme Paris, Prague ou Rome, plus « désorganisées » à première vue, possèdent une entropie plus élevée. Et ce sont justement les personnes ayant grandi dans ces villes à forte entropie qui semblent développer un meilleur sens de l’orientation.
Même l’âge auquel on apprend à conduire peut jouer. Les adolescent·e·s qui prennent le volant avant 18 ans semblent mieux se repérer que celles et ceux qui s’y mettent plus tard. Une exposition plus précoce à la navigation en autonomie sans aide extérieure (adulte, GPS…) pourrait donc renforcer ces compétences.
En somme, ce qu’on appelle le sens de l’orientation n’est pas prédéfini. Il se construit au fil des expériences, de l’environnement, et des apprentissages.

Atlas Thébault Guiochon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
17.09.2025 à 16:27
Le labubu, la peluche virale qui explique comment naissent (et disparaissent) les tendances
Texte intégral (2997 mots)

Popularisé par les réseaux sociaux et des stars internationales, comme Lisa du groupe de K-pop Blackpink, Rihanna ou Dua Lipa, le labubu, une petite peluche fabriquée en Chine, s’arrache aux quatre coins du monde. La labubumania incarne à elle seule la mécanique des tendances au XXIe siècle.
Il y quelques semaines, par curiosité, je suis entré dans un magasin Pop Mart dans un centre commercial de Kuala Lumpur (Malaisie). Je ne savais pas que j’étais sur le point d’assister à une scène sociologiquement fascinante : des adultes et des adolescents secouant des boîtes fermées, essayant de deviner quel personnage ils allaient obtenir en fonction du poids ou de la forme. Ils regardaient les vitrines, murmuraient des noms, comparaient les modèles avec l’excitation de ceux qui s’apprêtent à acheter bien plus qu’un simple jouet. Tous cherchaient la même chose : un labubu. Mais personne ne savait s’il obtiendrait celui qu’il désirait.
Cette petite figurine aux oreilles pointues, sourire espiègle et grands yeux hallucinés n’était pas seulement un jouet en vinyle. C’était un symbole. Un objet de désir. Et aussi une illustration parfaite pour comprendre comment fonctionnent les tendances au XXIe siècle.
De monstre de niche à star virale
Labubu est né en 2015 de l’imagination de l’artiste hongkongais Kasing Lung, dans l’univers de The Monsters. Pendant des années, il est resté un personnage marginal, apprécié par les fans de l’art toy et du design underground asiatique. Tout a changé lorsque Pop Mart a acquis les droits et l’a transformé en phénomène mondial : des centaines de versions, des collaborations avec des marques de luxe, éditions limitées et un système de vente en boîtes surprises (blind boxes) qui ne permettent pas de voir leur contenu, ont transformé l’achat de labubus en un petit rituel de hasard et de suspens.
Le véritable boom a eu lieu en avril 2025, lorsque la chanteuse thaïlandaise Lisa, qui compte plus de 100 millions d’abonnés sur Instagram et est membre du groupe féminin de k-pop Blackpink, a publié sur le réseau social une photo d’elle avec plusieurs labubus accrochés à son sac à main. Rihanna et Dua Lipa ont suivi, la photo est devenue virale sur TikTok et des millions de fans ont surgi dans le monde entier. Labubu est passé d’un produit de niche à un produit viral. D’une nouveauté à une mode. D’un objet à un phénomène.
Mais comment cela se produit-il ? Comment quelque chose d’aussi spécifique et rare peut-il devenir un objet de désir pour des millions de personnes à travers le monde ?
Quand l’innovation se comporte comme la matière
Dans ma thèse de doctorat, j’ai proposé une théorie interdisciplinaire inspirée de l’idée de modernité liquide développée par le philosophe polono-britannique Zygmunt Bauman et du comportement des liquides et des gaz, tant au repos qu’en mouvement (la mécanique des fluides). Je suggère que l’innovation est la matière dont est faite la mode. Et comme toute matière, elle peut se trouver dans trois états : solide, liquide et gazeux.
À son tour, l’innovation peut se trouver dans trois phases : nouveauté, tendance et mode. Ce parallélisme n’est pas métaphorique, mais structurel. Tout comme l’eau change d’état en fonction de la température et de la pression, les innovations se transforment également en fonction du contexte social, culturel et économique.
La nouveauté est l’état solide : elle a une forme, elle est dense, statique et circule entre quelques personnes. Selon la théorie de la diffusion des innovations, développée au milieu des années 60 par le sociologue américain Everett Rogers, cette étape correspond aux innovateurs. Il s’agit d’une proposition à forte valeur symbolique, mais sans diffusion massive.
Lorsqu’elle commence à se répandre, elle devient une tendance et se liquéfie : elle circule, s’adapte, relie les communautés. C’est à ce stade qu’apparaissent les « early adopters », une expression qui désigne les individus qui ont pour habitude d’acheter quasiment systématiquement les nouveaux produits dans une catégorie de produit donnée. C’est le moment où l’idée commence à faire l’objet de discussions.
Lorsqu’elle atteint le point de fusion, elle franchit le gouffre de Moore : la fracture critique dans le cycle d’adoption d’un produit innovant. Ses premiers utilisateurs sont généralement des fans de nouveautés, à l’affût de toute innovation pour la tester. En revanche, le marché de masse ne franchit le cap que lorsque l’innovation a déjà été testée et validée par d’autres.
Dans la viralité des modes ou l’adoption des dernières innovations, une fois le fossé franchi, il existe un point critique (tipping point) où la contagion est déjà très difficile à arrêter. Elle entre dans le mainstream ou le marché de masse et se transforme en mode : elle passe à l’état gazeux, se généralise, perd de sa densité, devient omniprésente… jusqu’à s’évaporer.
Ce processus est cyclique. De nombreuses innovations restent figées. D’autres ne se consolident jamais et ne circulent pas. Certaines s’évanouissent rapidement, presque aussitôt qu’elles apparaissent. Le désir et l’innovation, comme la matière, ont besoin de conditions pour se maintenir.
Qui décide de ce que nous désirons (et pour combien de temps)
Le Labubu a traversé toutes ces phases. Il a commencé comme une figure marginale (solide), est devenu tendance en touchant de nouveaux publics (liquide) et a atteint l’état gazeux en devenant viral à l’échelle mondiale.
Les labubus sont sur TikTok, ornent des sacs à main de luxe et font l’objet d’articles de presse. Ce qui était au départ un symbole de distinction est en train de devenir un brouhaha visuel. Un signe que le cycle touche à sa fin. Et qu’un autre est peut-être sur le point de commencer.
Mais les tendances ne changent pas d’elles-mêmes. Tout comme l’eau a besoin de changement de températures et de pressions pour se transformer, les modes répondent également à des stimuli externes. Dans ce cas : les marques, les algorithmes, les consommateurs et les influenceurs.
La température culturelle est générée par les campagnes, les lancements, le contenu visuel. La pression symbolique provient du désir collectif : la communauté qui reproduit les gestes, les fans qui recherchent l’objet, l’envie d’appartenir.
Et puis, il y a des forces motrices, comme les influenceurs, qui agitent le système de l’intérieur, validant certaines tendances et en écartant d’autres.
« Je suis comme ça »
Aujourd’hui, la visibilité ne dépend pas tant de ce que l’on est, mais du nombre de fois où l’on peut être partagé. C’est ainsi qu’émergent ce que j’appelle les micro-identités liquides : des façons rapides et flexibles de dire « Je suis comme ça » dans une culture où ce moi est mutable, partagé, esthétique et performatif.
Comme l’explique le sociologue britannique Anthony Giddens, dans la société actuelle, en modernité tardive, le moi devient un projet réflexif, construit à partir des images, des choix et des récits disponibles.
Et dans un monde qui, selon les termes du philosophe coréen et lauréat du prix Princesse des Asturies 2025 Byung-Chul Han, « récompense la visibilité et la performance constante », chaque tendance devient un masque provisoire. Un labubu n’est pas seulement un objet : il représente l’appartenance, l’affection partagée, voire un langage générationnel.
Dans cet écosystème volatile, nous sommes des corps flottant dans un fluide symbolique : nous nous poussons, nous nous heurtons, nous changeons de forme… au rythme du marché.
Du battage médiatique au vide : flotter, saturer, disparaître
Le format de la boîte surprise (« blind box ») ajoute également une dimension émotionnelle : nous n’achetons pas seulement un objet, mais aussi l’expérience même de désirer, d’espérer, de tenter sa chance. Dans une culture saturée de prédictions algorithmiques, le hasard introduit une touche de mystère. Pour le philosophe français Roland Barthes, la mode est un langage. Aujourd’hui, nous pourrions dire que ce langage s’exprime avant tout sur le plan émotionnel.

Mais ce langage obéit également à des lois physiques. Le principe d’Archimède dit qu’un corps immergé dans un fluide déplace un volume équivalent. Il en va de même dans la mode : lorsqu’une tendance s’impose, une autre est évincée. Le marché symbolique n’est pas infini. Seul ce qui parvient à supplanter une autre esthétique peut flotter. En devenant populaires, les labubu ont remplacé les figures kawaii telles que Molly ou Sonny Angel.
Et comme tout gaz, la hype a tendance à se dissiper. La surexposition épuise le désir. Des copies apparaissent, le mystère disparaît, la saturation s’installe. Et alors, le cycle recommence : nouvelles versions, plus de pression, hausse de la température.
Le mystère de ce qui arrive (et disparaît)
Wang Ning, fondateur et directeur général de Pop Mart, a su lire le point de fusion exact de ces objets. En 2025, après avoir ajouté 20 milliards de dollars à sa fortune grâce à la viralité de Labubu, il est apparu dans les classements comme le 79e homme le plus riche du monde. Car comprendre le quand, plutôt que le quoi, reste le véritable pouvoir.
Ce modèle de « mode liquide » ne cherche pas à expliquer les caprices esthétiques, mais à révéler le processus par lequel une innovation naît, se développe et finit par disparaître. Car les tendances, même si elles semblent imprévisibles, ont aussi une structure. Elles ne flottent pas au hasard : elles changent d’état en fonction de la pression du désir collectif et de la température culturelle qui les entoure.
Le véritable défi pour les marques n’est pas de détecter la nouveauté, mais de savoir à quel stade du cycle elle se trouve. Est-elle encore solide et marginale, avec un risque élevé de disparaître sans avoir transcendé ? Est-elle déjà en phase liquide, gagnant en popularité ? Ou est-elle déjà gazeuse, omniprésente mais sur le point de s’évaporer ?

Pour les consommateurs, leur position sur cette courbe dépend du risque qu’ils sont prêts à prendre. Certains adoptent ce qui deviendra une mode avant même qu’elle ait un nom. D’autres attendent qu’elle soit sûre, validée, presque obligatoire. Et entre les deux, des millions de micro-identités apparaissent et disparaissent comme une flamme.
Le labubu ne fait pas exception. C’est un cas parfait : né comme une curiosité, il s’est répandu comme une tendance et a explosé comme une mode. Aujourd’hui, il flotte partout. Mais il se peut aussi que sa présence commence bientôt à se dissiper.

Sandra Bravo Durán ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
17.09.2025 à 16:26
Robert Laurent-Vibert, le patron humaniste de Pétrole Hahn
Texte intégral (2576 mots)

Robert Laurent-Vibert, l’un des dirigeants emblématiques de l’entreprise Pétrole Hahn, disparu prématurément il y a cent ans, était un patron atypique. En intellectuel lettré, il considérait que la culture générale est utile à l’homme d’affaires.
Érudit, chef d’entreprise de Pétrole Hahn, Robert Laurent-Vibert (1884-1925), dont l’œuvre fut couronnée par la restauration du château de Lourmarin en Provence, semble appartenir à une époque lointaine.

Sa vie brève comme sa forte personnalité sont des modèles pour qui s’intéresse aux valeurs de l’humanisme en entreprise. Il a su discerner les différences entre travail intellectuel et travail d’affaires. Alors que le premier exige du temps, des recherches patientes et minutieuses, le second veut la rapidité dans l’étude et l’esprit de décision. Laurent-Vibert s’est ingénié à passer de l’un à l’autre domaine, grâce à son goût de l’action secondé par une belle capacité d’adaptation.
En humaniste, il accorde toute son attention à la qualité de vie de ses employés dont il améliore les conditions de travail et le quotidien. En philanthrope, il estime impérieux pour l’homme d’affaires de protéger la civilisation française par l’intermédiaire de ses artistes et de ses scientifiques, en leur procurant laboratoires, bibliothèques ou bourses d’études.
Orphelin devenu chef d’entreprise
Orphelin à l’âge de 10 ans, Robert est adopté par la famille lyonnaise Vibert, proche de ses parents biologiques, les Laurent. François Vibert, son père adoptif, devient, en 1901, propriétaire-fabricant en France du « pétrole pour les cheveux », inventé par Charles Hahn : le fameux « Pétrole Hahn » ! En 1885, ce pharmacien créé une lotion capillaire à base de pétrole, solution aujourd’hui contestée comme le souligne l’article de Ouest-France. En 1896, François Vibert lance sa fabrication en France. C’est ici que s’est joué le destin de Robert Laurent-Vibert.
L’enrichissement rapide de son père adoptif permet à Robert d’acquérir une excellente éducation à l’école Ozanam puis au Lycée Ampère, à Lyon, où Édouard Herriot, son professeur, le pousse vers des études littéraires. À l’École normale supérieure de la rue d’Ulm (Paris), le jeune homme entreprend des études d’histoire. Il réussit l’agrégation et entre à l’École française de Rome. Mais il ne peut poursuivre sa carrière de professeur et de chercheur, car son père, malade, l’appelle pour le seconder dans l’entreprise. Il finit par en devenir le directeur en 1912 et par jouer un rôle prépondérant dans le développement de celle-ci grâce à son recours à la publicité et à son management moderne.
Pionnier de la publicité
L’homme d’affaires a laissé des témoignages probants de son implication dans l’avenir des établissements Vibert, non seulement en tant que chef d’entreprise visionnaire, mais aussi par son humanisme. Devenu président du Syndicat de la parfumerie, s’inspirant des patrons avant-gardistes du XIXe siècle, il crée dans sa société un modèle social qui accorde à ses salariés congés payés et allocations familiales.
Pétrole Hahn lui doit également son statut de société anonyme. Après la Première Guerre mondiale, son succès est tel qu’on l’appelle au gouvernement pour devenir conseiller du Commerce extérieur. Dans les années 1920, le passage de la réclame à la publicité stimule les ventes. Un homme d’affaires aussi attentif et bien renseigné que Laurent-Vibert ne peut pas manquer de s’y intéresser. Il fait appel à des illustrateurs talentueux pour représenter, façon Art déco ou sur le modèle des affiches de cinéma, le précieux flacon et ses effets sur celles et ceux qui l’emploient pour leur bénéfice. Il fait ainsi la connaissance de Benjamin Rabier avec lequel il entreprend de moderniser la communication publicitaire des produits Pétrole Hahn.

On vante les qualités du produit non seulement dans la presse et les magazines, mais aussi sur des cartons publicitaires, des chromos, des buvards, des cartes postales, des timbres, des calendriers, des puzzles, des enseignes lumineuses… Et, si, dès 1905, sous l’égide de François Vibert, Petrole Hahn se fait connaître en Grande-Bretagne et en Allemagne, de 1920 à 1924, la Grèce et le Canada, la Chine, l’Australie et l’Amérique du Sud l’adoptent à leur tour. Laurent-Vibert n’hésite pas à voyager lui-même dans toute l’Europe et jusqu’en Amérique, curieux des innovations de ce pays, pour commercialiser ses produits.
Première Guerre mondiale, de l’Europe à l’Orient
Retour sur sa vie personnelle. Pendant la Première Guerre mondiale, il fait preuve de qualités humaines remarquables : aptitude à évaluer les situations, à prendre des décisions, esprit d’initiative… Ne reculant pas devant le danger, il participe activement aux combats et se montre soucieux de préserver la vie de ses hommes. Il laisse de nombreux carnets de notes et de croquis qui en témoignent.
Remis de graves blessures, il est envoyé à Salonique de 1916 à 1918, où il crée une société pour favoriser les échanges commerciaux entre la France et la Macédoine. Il s’intègre au cercle des amis cultivés de Jules Lecoq, proviseur du lycée français, en anime les échanges culturels littéraires et archéologiques et fait la connaissance de nombreux intellectuels dont Henri Bosco. Parallèlement, il fonde la Revue franco-macédonienne en 1916, mensuel dont les articles sont rédigés par des officiers, sous-officiers et soldats de l’armée d’Orient.
Il reste toute sa vie attaché à l’Orient où il revient très souvent, rendant compte de ses voyages dans des récits attachants.
« Mission civilisatrice »
Idéaliste, passionnément patriote, il croit en la mission civilisatrice de son pays. Dès 1910, il insiste sur les facteurs économiques portant en germe les futurs conflits. Après la guerre, il est attentif aux dangers résultant de la complaisance de la France à l’égard de l’Allemagne. Il écrit en ce sens à son ancien maître Herriot pour l’alerter. Son intérêt pour l’histoire lui insuffle la conviction que celle-ci ne doit jamais être rejetée au profit d’une nouvelle ère qui s’ouvre, censée balayer les erreurs du passé.
Cette attitude prend corps dans la restauration du château de Lourmarin (Vaucluse), qu’il découvre dans un grand état d’abandon en 1920 lors d’une excursion. Il en fait l’acquisition dans le but d’en entamer la reconstruction et de créer une fondation dont la mission serait de devenir un centre d’art et de culture. Dans son travail de restauration, l’architecte Henri Pacon – à qui le chantier fut confié – sut exploiter les solutions techniques apportées par la modernité, tout en respectant les recherches historiques de Robert.

Fréquenté par des visiteurs du monde entier, à la fois résidence d'artiste, lieu d'exposition, de concerts et de conférences, l’endroit est devenu aujourd’hui un lieu de visite incontournable du Lubéron, surnommé « la petite Villa Médicis de Provence ».
Source de réflexion
Tout au long de sa vie, Robert Laurent-Vibert publie des revues, écrit des pièces de théâtre et plus tard des livres de voyage. Il fréquente de nombreux érudits, a des relations proches avec l’éditeur Georges Crès ou le maître-imprimeur Maurice Audin dont il fréquente les ateliers et leurs machines, prétendant qu’il est nécessaire pour sa santé de respirer l’odeur de l’encre d’imprimerie.
Mu par la soif des connaissances, l’amour de la création, un attachement aux autres, et une détermination à transmettre savoir et découvertes, Robert Laurent-Vibert a déployé dans ses activités une énergie remarquable. Trop tôt disparu en 1925 dans un accident de la route, voyageur infatigable, lecteur, écrivain, collectionneur, il eut une vie aussi trépidante que riche. À la fois dirigeant d’entreprise talentueux et généreux humaniste, il reste aujourd’hui un exemple et une source de réflexion pour tous.

Danièle Henky ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
17.09.2025 à 16:25
Repenser les examens pour aider les étudiants à progresser : l’évaluation universitaire comme dialogue
Texte intégral (1135 mots)
Pour que les devoirs sur table et les notes soient de réels outils de progression pour les étudiants, il ne suffit pas de rendre publiques les grilles d’évaluation. Encore faut-il s’assurer que les étudiants en comprennent bien les enjeux et la mise en œuvre. Explication à partir d’une recherche-action dans une université britannique.
« Travail superficiel », « manque de rigueur » ou encore « absence de pensée critique »… De telles observations, relevées sur des copies d’étudiants, restent floues et sont souvent perçues comme arbitraires.
Si l’enjeu d’une évaluation est de permettre aux étudiants de comprendre leurs lacunes pour progresser, ne faudrait-il pas envisager une autre orientation et privilégier le dialogue ?
Discuter des notes avant de rendre une copie
Nombre d’universités tentent de mettre l’accent sur des modalités d’évaluation plus transparentes, incluant des grilles de critères à respecter afin d’obtenir la note attendue. La formulation des attendus demeure néanmoins souvent opaque et ces grilles restent mal comprises ou voire ignorées par les étudiants. Des expressions comme « démontrez une compréhension approfondie » ou « utilisez des sources pertinentes » peuvent sembler évidentes aux enseignants. Mais elles ne le sont pas toujours pour les étudiants, surtout s’il s’agit de les traduire en actions concrètes.
En France, un rapport du comité d’évaluation de l’enseignement supérieur souligne que l’évaluation reste bien souvent trop floue, disparate et peu en phase avec les compétences visées par les formations. Il appelle à un ciblage plus clair et collectif des pratiques d’examen par les universités.
Lorsque les évaluations sont multiples (dans des contextes de cours massifiés et de délais courts par exemple), les retours se transforment rapidement en simple procédure administrative, c’est-à-dire quelques lignes copiées-collées, et perdent leur fonction pédagogique.
Une recherche-action menée dans une université britannique a testé une alternative : organiser des temps de dialogue autour des grilles d’évaluation, en amont des rendus de devoirs des étudiants puis après la restitution des notes. Plutôt que de découvrir les attendus une fois leur copie notée, les étudiants ont pu poser leurs questions à l’avance, commenter les termes ambigus, et co-construire une compréhension de ce qui était attendu.
Les discussions entre étudiants et professeurs ont permis de clarifier des notions souvent floues : qu’est-ce qu’un raisonnement rigoureux ? Comment différencier un travail « bon » d’un travail « excellent » ? L’objectif de ces échanges n’était pas de simplifier les exigences, mais de traduire les attentes dans un langage clair, afin de placer les étudiants au centre du processus d’évaluation et en les rendant pleinement acteurs de leur apprentissage.
Mieux comprendre pour réussir
Les résultats ont été probants : les étudiants qui ont participé à ces dialogues ont obtenu de meilleures notes. Tous ont validé leurs modules, certains ont même obtenu suite à cette expérience les meilleurs résultats qu’ils aient eus depuis le début d’année. Mais au-delà des notes, le plus frappant a été le changement d’attitude des étudiants : ils ont manifesté moins d’anxiété, plus d’engagements, une meilleure compréhension des attentes.
Cette approche repose sur un principe simple, mais souvent oublié : le feedback est une conversation, non un verdict. Cela rejoint les travaux de chercheurs comme David Carless, qui défendent l’idée que l’évaluation doit être un pur moment d’apprentissage et non une fin en soi. Or, pour cela, encore faut-il encore que les étudiants puissent échanger avec l’enseignant. L’évaluation cesse alors d’être un outil de tri, pour devenir un levier de progression.
Au lieu d’envoyer des commentaires impersonnels, pourquoi ne pas organiser un atelier, une discussion collective, une relecture croisée ? Ce n’est pas une question de temps supplémentaire, mais de changement de posture : passer d’un modèle descendant à une relation co-constructive entre l’enseignant et l’étudiant.
Évaluer à l’heure de l’IA
Avec la montée en puissance des outils comme ChatGPT, une inquiétude s’installe et un nombre important d’universités s’interrogent : « Comment savoir qui a rédigé ce devoir ? », « Faut-il multiplier les contrôles, mieux les surveiller ou sanctionner ? » Une autre stratégie consiste à assortir toute évaluation d’un échange mutuel entre professeur et étudiant.
Des chercheurs stipulent qu’encadrer plutôt qu’interdire l’IA apparaît comme la solution la plus équilibrée pour préserver l’éthique tout en encourageant l’innovation pédagogique. Une évaluation ouverte ou un dialogue, où les critères sont explicités, discutés et interprétés mutuellement, s’inscrit parfaitement dans cette démarche : elle protège contre la tricherie, tout en valorisant l’autonomie de l’étudiant.
Quand l’étudiant sait qu’il devra expliquer sa démarche, discuter ses choix, relier son travail aux critères attendus, il devient plus difficile de simplement copier une production générée par une IA. Le dialogue devient alors un outil anti-triche naturel, parce qu’il repose sur une compréhension vivante du savoir, pas sur la restitution mécanique d’un résultat. L’évaluation ouverte ou dialogue n’est donc pas seulement plus juste, elle est aussi plus résistante aux dérives technologiques.
Le dialogue autour de l’évaluation peut être un rempart naturel contre les dérives de l’IA, à condition que ce dernier soit préparé en amont, ciblé sur les apprentissages et porteur d’objectifs pédagogiques clairs. Il doit offrir à chacun les mêmes chances de participation, dans un climat à la fois détendu et exigeant. L’enjeu n’est pas seulement de discuter des notes, mais de permettre à l’étudiant de comprendre, progresser, valoriser ses compétences et ainsi de capitaliser ses acquis.

Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.