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16.11.2025 à 10:43

Gemini 3.0 – Le moment de vérité de Google est-il enfin arrivé ?

Romain Leclaire

L’air est électrique dans la Silicon Valley. Un frisson parcourt l’industrie technologique, un nom est sur toutes les lèvres, Gemini 3.0. Le prochain grand modèle de langage de Google est sur le point d’être lancé et ce n’est pas une simple mise à jour logicielle. C’est potentiellement le point culminant d’une transformation stratégique qui dure […]
Texte intégral (2020 mots)
Un fond dégradé en rose et bleu avec deux étoiles brillantes blanches stylisées au centre, symbolisant peut-être l'innovation technologique.

L’air est électrique dans la Silicon Valley. Un frisson parcourt l’industrie technologique, un nom est sur toutes les lèvres, Gemini 3.0. Le prochain grand modèle de langage de Google est sur le point d’être lancé et ce n’est pas une simple mise à jour logicielle. C’est potentiellement le point culminant d’une transformation stratégique qui dure depuis trois ans, un pari à plusieurs milliards de dollars qui pourrait modifier la hiérarchie de l’intelligence artificielle.

Le PDG de Google, Sundar Pichai, a lui-même amorcé la pompe, promettant une sortie avant la fin de l’année. Les employés de l’entreprise, de leur côté, multiplient les allusions énigmatiques sur les réseaux sociaux. L’industrie retient son souffle. Préparez-vous à l’impact. Pour comprendre pourquoi ce lancement est si important, il faut rembobiner de quelques années. Fin 2022, le lancement de ChatGPT par OpenAI a eu l’effet d’une bombe atomique. Du jour au lendemain, Google, le roi incontesté de la recherche et de l’information, s’est retrouvé dans la position inconfortable du géant endormi, de l’acteur historique dépassé par une startup agile. La narrative médiatique était claire, il avait raté le train de l’IA générative. C’était la première menace existentielle réelle pour l’entreprise depuis des décennies.

Logo de Gemini 3.0 avec un fond dégradé violet et rose.

En interne, ce fut le « code rouge ». Google, confronté à un péril qu’il n’avait pas vu venir, a dû pivoter à une vitesse fulgurante. Des équipes entières ont été réaffectées, des projets réorientés, tout cela dans un effort frénétique pour intégrer l’IA générative au cœur de ses produits phares, de la recherche à l’espace de travail. Depuis lors, le géant assoupi s’est réveillé en sursaut. Et il l’a fait avec des atouts considérables. C’est ce que l’on appelle l’avantage « full-stack » de Google. Contrairement à beaucoup de ses concurrents qui dépendent de partenariats complexes, le géant américain maîtrise toute la chaîne de valeur. Il ne se contente pas de construire les modèles d’IA (comme Gemini), il possède également les canaux de distribution les plus larges au monde (Android, Chrome, la recherche) et l’infrastructure sous-jacente (Google Cloud, et surtout, ses propres puces TPU optimisées pour l’IA).

Cette indépendance stratégique lui a permis d’éviter le réseau enchevêtré d’alliances et de dépendances qui caractérise aujourd’hui une grande partie de l’écosystème IA, un écosystème qui alimente les craintes d’une bulle spéculative. Les résultats commencent à se voir. Le nombre d’utilisateurs de Gemini grimpe en flèche. Point important, l’IA n’a pas (encore) cannibalisé la vache à lait publicitaire de l’entreprise. Conséquence directe, les appels à la démission de Sundar Pichai, autrefois bruyants, se sont tus.

Une banane avec le logo de Google sur une fond jaune.

Aujourd’hui, l’anticipation autour de Gemini 3.0 a atteint son paroxysme. Sur X et dans les tréfonds de divers serveurs Discord, les « AI truthers » (les passionnés et limiers de l’IA) sont convaincus que le prochain modèle de l’entreprise est déjà déployé, testé secrètement dans la nature. Ce n’est pas une pure théorie du complot, Google a l’habitude de tester ses modèles en semi-clandestinité avant un lancement officiel. Mais l’excitation dépasse largement le cercle des initiés. L’ensemble du secteur attend de voir quel lapin Mountain View va sortir de son chapeau. Les attentes sont incroyablement élevées. On murmure que Gemini 3.0 sera exceptionnellement doué pour le codage et la génération multimédia. Une version améliorée de « Nano Banana », l’outil de génération d’images viral maison, est d’ailleurs attendue comme faisant partie intégrante de la nouvelle version.

Le timing de Google est parfait, car il y a une opportunité en or à saisir. ChatGPT 5, lancé cette année, a fait plus de bruit avant sa sortie qu’après. Il a été mal accueilli. Est-ce le signe que l’IA entre dans sa période de banalité, celle des rendements décroissants ? Ou OpenAI, après une course folle, a-t-il simplement perdu son mojo ? Si Gemini 3.0 est le succès fracassant que l’on anticipe, la dynamique du marché pourrait s’inverser totalement. Des sources internes glissent que le nouveau modèle est extrêmement impressionnant. Un tel succès donnerait à la firme américaine une chance de reprendre la première place, une position qu’elle convoite ardemment depuis le début de ce boom de l’IA générative. Ce serait un scénario catastrophe pour OpenAI, qui ne possède pas l’infrastructure « full-stack » de Google et dont l’avance reposait en grande partie sur son avantage de premier entrant et ses nombreuses alliances industrielles.

Avant de crier victoire, Google doit surmonter deux obstacles majeurs. Le premier est un problème de marque. Dans l’esprit du grand public, ChatGPT est devenu le « Kleenex » de l’IA. C’est le nom qui vient immédiatement à l’esprit, un réflexe. Ironiquement, « Google » est lui-même devenu un verbe synonyme de recherche en ligne. L’entreprise doit maintenant faire face à la même puissance de marque qu’elle a elle-même créée dans un autre domaine. Le second obstacle est le fossé du nombre d’utilisateurs. Les chiffres, bien qu’impressionnants, montrent la route qu’il reste à parcourir. Google a récemment annoncé que son application Gemini avait atteint 650 millions d’utilisateurs mensuels actifs. C’est énorme. Mais en comparaison, ChatGPT en revendique environ 800 millions. L’écart d’engagement est considérable. La popularité croissante de Gemini auprès des jeunes utilisateurs est un atout certain, mais la pente reste raide.

Sundar Pichai, CEO de Google, s'exprimant lors d'un événement avec le logo Google en arrière-plan.

Les paris de longue date de Google sur le cloud, les puces maison et ses équipes de recherche fondamentale (Google Brain et DeepMind) semblent enfin payer. L’entreprise a méticuleusement aligné toutes ses pièces sur l’échiquier. Si Gemini 3.0 est le succès qu’il promet d’être, Google n’aura plus qu’à ne pas commettre d’impair. La balle est dans son camp.

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16.11.2025 à 10:14

Le gourou de Meta tourne le dos aux LLM pour parier sur les modèles du monde

Romain Leclaire

C’est un véritable séisme qui secoue le monde de la Big Tech. L’un des scientifiques les plus importants et respectés de l’intelligence artificielle, Yann Le Cun, serait sur le point de quitter Meta. Selon plusieurs rapports crédibles, le chercheur en chef de la recherche fondamentale en IA, un véritable parrain du domaine âgé de 65 […]
Texte intégral (1677 mots)
Un homme souriant portant des lunettes, avec des cheveux grisonnants, se tient devant un public. L'arrière-plan est flou, laissant apparaître des silhouettes de personnes.

C’est un véritable séisme qui secoue le monde de la Big Tech. L’un des scientifiques les plus importants et respectés de l’intelligence artificielle, Yann Le Cun, serait sur le point de quitter Meta. Selon plusieurs rapports crédibles, le chercheur en chef de la recherche fondamentale en IA, un véritable parrain du domaine âgé de 65 ans, s’apprêterait à claquer la porte. Lui, qui disposait de ressources quasi illimitées dans l’entreprise américaine, ne croit plus à l’approche actuelle. Il veut abandonner la course aux grands modèles de langage (LLM) qui fascine l’industrie.

Pourquoi partir maintenant ? C’est la question à un milliard de dollars. Meta dépense sans compter, débauchant les meilleurs experts en IA et, selon un post de blog de Mark Zuckerberg en juillet dernier, fait des progrès si fulgurants que la superintelligence est désormais en vue. Alors, pourquoi leur cerveau en chef de l’IA jetterait-il l’éponge ? La réponse, Yann Le Cun la suggère depuis longtemps. Il est devenu célèbre ces derniers temps pour ses critiques acerbes des LLM. Pour lui, lorsqu’il s’agit d’atteindre une intelligence de niveau humain, les modèles tels que nous les connaissons sont une impasse. En avril 2024, il déclarait qu’un LLM est fondamentalement une voie de sortie, une distraction, un cul-de-sac. Peu importe à quel point les géants de la tech les « scalent », c’est-à-dire augmentent leur taille et leurs données.

Une analyse de la carrière du chercheur français, publiée par le Wall Street Journal, pourrait expliquer les raisons probables de ce divorce. L’été dernier, Alexandr Wang, un jeune prodige de 28 ans et co-créateur de la sensation ChatGPT, est devenu le chef de l’IA chez Meta. Ce fanatique des LLM est ainsi devenu le patron de Yann Le Cun. De plus, l’entreprise a recruté un autre scientifique en chef relativement jeune, Shengjia Zhao, pour superviser ce dernier cette année. L’annonce de Meta vantait la percée de Zhao en matière de scaling. Or, Le Cun ne croit plus en cette méthode. L’organigramme de Meta semble être un chaos excentrique, divisé en plusieurs groupes distincts, et des centaines de personnes ont été licenciées le mois dernier pour tenter de remettre de l’ordre. Dans ce contexte, Le Cun, le vétéran, se retrouve marginalisé par une nouvelle garde obsédée par une approche qu’il juge stérile.

L’impasse des LLM: l’intelligence du chat

Un rapport du Financial Times suggère que Yann Le Cun va maintenant fonder une startup axée sur ces fameux « modèles du monde ». Mais pourquoi est-il fasciné par cette idée ? Lors d’un discours détaillé au AI Action Summit à Paris en février, il a expliqué sa vision. Pour lui, qui a travaillé sur les lunettes intelligentes de Meta, l’avenir de l’IA réside dans les « wearables » (technologies portables).

Nous devrons interagir avec ces futurs appareils comme s’ils étaient des personnes et c’est là que le bât blesse. Les LLM ne comprennent tout simplement pas le monde comme les humains. Avec eux, nous ne pouvons même pas reproduire l’intelligence d’un chat ou d’un rat. Pour illustrer son propos, il propose une expérience de pensée simple qu’un humain réussit sans effort, mais qui est impossible pour un LLM:

« Si je vous dis, imaginez un cube flottant dans l’air devant vous. Maintenant, faites le pivoter de 90 degrés autour d’un axe vertical. À quoi ressemble-t-il ? Il vous est très facile d’avoir ce modèle mental d’un objet en rotation. Un LLM peut écrire un poème sur un cube flottant, mais il ne peut pas réellement vous aider à interagir avec lui. Il ne le voit pas, il ne le comprend pas. »

La différence fondamentale réside dans les données. Les LLM sont formés sur une quantité de texte qu’il faudrait 450 000 ans pour lire. Mais un enfant de quatre ans, qui n’a été éveillé que 16 000 heures, a déjà traité un nombre impressionnant de données sensorielles sur le monde, en voyant et en touchant. C’est cette interaction avec le réel, bien plus que le texte, qui forge l’intelligence. Le modèle dont rêve Le Cun, sur lequel il avait déjà commencé à travailler chez Meta, est radicalement différent. Il contiendrait une estimation de l’état du monde sous forme d’une représentation abstraite de tout ce qui est pertinent dans le contexte. Plutôt que de prédire le prochain mot dans une phrase, il anticipe l’état résultant du monde qui se produira après que vous ayez pris cette séquence d’actions.

Une image représentant deux hommes en tenue professionnelle, l'un pointant du doigt et tenant un microphone, l'autre s'exprimant avec les mains, entourés d'un symbole infini bleu sur un fond beige.

Ces modèles du monde permettraient de construire des systèmes capables de planifier des actions, éventuellement de manière hiérarchique, afin de remplir un objectif, et des systèmes capables de raisonner. Le Cun insiste également sur le fait que de tels systèmes seraient plus sûrs. Leur contrôle serait intégré à leur conception, plutôt que d’être des « boîtes noires » mystérieuses qui crachent du texte et que l’on doit affiner péniblement. Il décrit sa vision comme un problème d’optimisation: le modèle cherche à trouver une compatibilité entre l’état actuel du monde et un état désiré, en trouvant les solutions les plus efficaces.

Un pari fou pour l’avenir

Pour l’instant, tout cela reste basé sur des fuites et des rapports crédibles. Yann Le Cun n’a même pas confirmé son départ ou la création de sa startup. Si sa vision semble encore un peu floue et théorique, c’est normal. Ce que le français a en tête est un pari fou. Il cherche à provoquer une nouvelle explosion des capacités de l’IA, aussi bouleversante que celle de ChatGPT. Cela pourrait prendre des années, voire une éternité et coûter des milliards de dollars d’investissement, avant que quelque chose de vraiment remarquable n’en émerge. Mais le départ d’une figure de cette envergure n’est pas anodin. Il parie sa réputation et son héritage sur le fait que toute l’industrie, y compris son ancien employeur, fait fausse route.

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15.11.2025 à 17:06

Voyage dans le temps à Megiddo – Un pressoir à vin de 5 000 ans et les rituels secrets des Cananéens

Romain Leclaire

L’histoire a une façon fascinante de refaire surface là où on ne l’attend pas, souvent sous les coups de pioche de la modernité. En Israël, dans le nord du pays, des travaux routiers prévus pour développer une autoroute ont involontairement ouvert une fenêtre spectaculaire sur un passé incroyablement lointain. À l’est de la cité antique […]
Texte intégral (1947 mots)
Vue aérienne reconstituée de la cité antique de Megiddo, entourée de collines et de terres agricoles, montrant des structures architecturales entourées de murs fortifiés.

L’histoire a une façon fascinante de refaire surface là où on ne l’attend pas, souvent sous les coups de pioche de la modernité. En Israël, dans le nord du pays, des travaux routiers prévus pour développer une autoroute ont involontairement ouvert une fenêtre spectaculaire sur un passé incroyablement lointain. À l’est de la cité antique de Megiddo, un nom qui résonne avec l’histoire biblique et la stratégie militaire, des archéologues ont mis au jour des trésors qui améliorent notre compréhension de la vie à l’âge du bronze.

Imaginez la surprise des équipes sur le terrain, un pressoir à vin vieux de 5 000 ans et un ensemble de récipients rituels, dont un en forme d’animal, datant de 3 300 ans. Ces découvertes sont des indices précieux sur les Cananéens, ce peuple qui habitait le Levant à partir d’environ 3 000 ans avant notre ère. Elles nous offrent un aperçu rare de la naissance de la production de vin dans la région et des pratiques rituelles complexes qui s’y déroulaient. Megiddo, connu sous le nom de « Tel Megiddo » (un « tel » étant cette colline artificielle caractéristique formée par des siècles et des siècles d’occupation humaine superposée) est fouillé par les archéologues depuis plus d’un siècle. Le site a toujours été considéré comme un pilier pour comprendre l’urbanisme ancien et les pratiques religieuses cananéennes. Cependant, comme l’expliquent les chercheurs de l’Autorité des Antiquités d’Israël (IAA) dans la vidéo suivante, les fouilles actuelles ont eu lieu à l’est du tel principal, dans une zone jusqu’alors moins explorée.

C’est là que réside la grande nouveauté. Ces découvertes révèlent une nouvelle facette de la vie antique, nous montrant ce qui se passait en dehors des murs fortifiés de la cité. Elles dessinent la matrice complexe entre le centre urbain dense, dont les preuves ont été trouvées sur le tel, et les activités périphériques, peut-être plus rurales, agricoles ou spécialisées, qui se déroulaient dans la campagne environnante.

La trouvaille la plus ancienne est tout simplement stupéfiante. Les chercheurs ont exhumé un petit pressoir à vin, sculpté avec soin directement à même la roche. Ce n’est pas seulement sa méthode de construction qui impressionne, mais son âge. Il date de la période du Bronze ancien IB, soit entre 3300 et 3100 avant notre ère. Pour situer le contexte, c’est l’époque des toutes premières grandes phases d’urbanisation dans la région, bien avant que les pyramides d’Égypte n’atteignent leur apogée.

Il s’agit, ni plus ni moins, de la plus ancienne preuve directe de production de vin dans cette région. Ce pressoir n’était pas un élément isolé dans le paysage. Tout autour de lui, les archéologues ont trouvé les restes de nombreux bâtiments résidentiels. Cela suggère fortement que l’installation vinicole était un élément central et important pour la communauté locale. Fait crucial, cela indique aussi que l’ancienne Megiddo s’étendait bien au-delà des limites établies du tel que nous connaissions jusqu’à présent.

Avançons maintenant de quelques siècles. L’équipe a également découvert un ensemble d’artefacts datant d’une période ultérieure, mais tout aussi fascinante, l’âge du bronze récent II, soit entre 1400 et 1200 avant notre ère. Ces objets n’ont pas été jetés ou perdus par hasard. Ils ont été délibérément et soigneusement enterrés ensemble, ce qui indique qu’il s’agissait d’offrandes rituelles. Parmi elles se trouve une pièce remarquable, une maquette miniature en céramique représentant un temple. Cette dernière, ainsi que des jarres de stockage, des cruches et des cruchons (dont certains importés de Chypre, témoignant de réseaux commerciaux déjà bien établis) et un ensemble de récipients très spéciaux, peignent un tableau vivant des pratiques religieuses de l’époque.

Une jarre en forme d'animal, accompagnée de petits bols, découverte lors de fouilles archéologiques à Megiddo, Israël, datant de l'âge du bronze.

C’est cet ensemble de récipients, probablement utilisés pour des libations, qui captive le plus l’attention. Il se compose d’un récipient principal en forme de bélier et de plusieurs petits bols. La plupart du temps, les archéologues ne trouvent que des fragments isolés de tels objets rituels. Découvrir un ensemble complet, retrouvé intact et enterré d’une manière qui suggère manifestement sa fonction, est un événement remarquable. Selon l’IAA, c’est la toute première fois dans l’histoire archéologique de la région que nous avons un aperçu direct de la manière dont les Cananéens utilisaient concrètement ces objets lors de leurs cérémonies.

Le fonctionnement de cet ensemble est ingénieux. Les chercheurs expliquent que les Cananéens utilisaient probablement un petit bol doté d’une anse pour verser un liquide (peut-être du lait, de l’huile précieuse, ou du vin) dans un autre petit entonnoir en forme de bol, qui était directement fixé sur le dos du bélier. La tête du bélier elle-même était façonnée comme un bec verseur. Une fois le récipient en forme d’animal rempli, il suffisait de le pencher vers l’avant pour que le liquide s’écoule cérémonieusement de sa bouche. Il était alors recueilli dans un autre petit bol placé juste devant lui. Ce dispositif sophistiqué pouvait servir à plusieurs fins. Le liquide pouvait être bu directement au bec verseur, peut-être par un prêtre ou un participant au rituel. Il pouvait aussi être versé dans le plus petit récipient pour être consommé, ou, plus probablement, offert en cadeau votif à une divinité.

Représentation d'un artefact ancien en pierre ou en terre cuite, probablement un petit réceptacle ou une structure de forme irrégulière, avec une ouverture à l'avant et des détails texturés sur les parois.

L’emplacement de ces offrandes est tout aussi révélateur. Elles ont été enterrées en vue directe de la zone du grand temple de Tel Megiddo, datant de la même période (l’âge du bronze récent II). Cette proximité visuelle, combinée à leur position extérieure à la ville principale, suggère aux chercheurs l’existence d’un culte populaire cananéen. Il se pourrait que celui-ci ait été pratiqué par les agriculteurs locaux ou les habitants des environs qui, pour une raison ou une autre, ne pouvaient pas accéder au temple principal, plus formel, situé à l’intérieur de la cité. C’était peut-être un sanctuaire plus accessible, en plein air. D’ailleurs, certaines des offrandes ont été enterrées juste à côté d’un grand affleurement rocheux, qui a très bien pu servir d’autel naturel, un lieu de culte improvisé mais important, en dehors des murs de Megiddo, le long du chemin menant à la porte principale de la ville.

Chaque coup de pioche de ce projet routier a donc révélé non pas un, mais deux instantanés d’époques importantes. D’un côté, les tout débuts de la viticulture, au commencement même de la vie urbaine. De l’autre, un aperçu intime des rituels religieux quotidiens, pratiqués à l’ombre de la grande métropole de Megiddo. Ces découvertes éclairent d’une lumière nouvelle l’histoire d’une région dont le passé antique, grâce à ces artefacts extraordinaires, nous semble soudain un peu moins obscur.

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