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09.05.2024 à 13:16

Eurovision 2024 en Suède : le destin international des Nordiques sur le devant de la scène

Florent Parmentier, Secrétaire général du CEVIPOF. Enseignant, Sciences Po

Cyrille Bret, Géopoliticien, Sciences Po

La tenue de l’Eurovision en Suède est l’occasion de revenir sur la façon dont, depuis sa création en 1956, le concours reflète l’étroitesse des liens entre le pays hôte et la Finlande voisine.
Texte intégral (1933 mots)

La tenue de l’Eurovision en Suède est l’occasion de revenir sur la façon dont, depuis sa création en 1956, le concours reflète l’étroitesse des liens entre le pays hôte et la Finlande voisine.

Le samedi 11 mai prochain, Malmö, capitale de la Scanie, en Suède, accueillera la finale du 68ᵉ concours de l’Eurovision, un événement télévisé regardé par près de 200 millions de téléspectateurs chaque année, ce qui en fait l’une des émissions de divertissement les plus suivies au monde. Bien antérieur à The Voice et à Star Academy, le concours de l’Eurovision est la compétition musicale la plus ancienne encore active car elle a été lancée en 1956. C’est surtout, en raison de sa structure, un miroir déformant des identités européennes, exagérant certains stéréotypes ou perceptions culturelles d’un pays à l’autre. Spectacle officiellement apolitique, il charrie chaque année son lot d’émotions musicales, de polémiques sur les votes et de moments de célébration artistique.

Pour autant, cet événement festif est aussi un lieu où se manifestent régulièrement les dynamiques géopolitiques du moment, comme on a pu le constater en 2022 avec une victoire jugée très politique de l’Ukraine, et comme on le vérifie encore cette année, la participation d’Israël suscitant la controverse. L’Eurovision reflète également des relations spéciales entre certains pays participants. Parmi eux, les relations entre les États centre-européens, les Balkans et les pays nordiques montrent des solidarités de vote qui semblent se vérifier au fil des éditions.

La Suède et la Finlande, deux États ayant fait le choix de rejoindre ensemble l’Union européenne en 1995 et l’OTAN en 2022, se distinguent par une relation étroite et durable, mise en lumière à travers leurs participations respectives au concours. Cette année plus que jamais, le concours de l’Eurovision est à bien des égards une affaire de Nordiques : dans ce show télévisuel continental, ces « petits » pays jouent chaque année une grande partie de leur soft power en Europe.

Entre Suède et Finlande, une harmonie désormais bien établie

Cinquante ans après le succès du groupe mythique ABBA, la Suède, avec ses sept victoires à l’Eurovision (leader en la matière, à égalité avec l’Irlande), jouit d’un statut à part dans le concours. C’est d’ailleurs à un Suédois, Martin Österdahl, que l’Union européenne de Radio-télévision a confié en 2020 les clés de son programme vedette dans le rôle de Superviseur exécutif. Österdahl a succédé au Norvégien Jon Ola Sand (2010-2020), qui avait pris la suite d’un autre Suédois, Svante Stockselius (2003-2010). L’an passé, le concours a été remporté par la chanteuse suédoise Loreen, le Finlandais Käärijä arrivant en deuxième position – une proximité au classement que l’on peut voir comme un clin d’œil aux liens étroits qui unissent ces deux pays.

En effet, la Finlande et la Suède partagent une longue histoire marquée par des siècles de coexistence. La Finlande a été une partie intégrante du Royaume de Suède pendant près de 700 ans, de la première croisade suédoise vers 1150 jusqu’à la guerre russo-suédoise de 1809 à l’issue de laquelle elle devient, par la force, un grand-duché autonome de l’Empire russe.

Depuis son indépendance en 1917, liée à l’abdication du tsar Nicolas II, cette dernière a maintenu des relations privilégiées avec la Suède, renforcées par des similitudes linguistiques, culturelles et politiques. Politiquement, depuis plusieurs décennies, un premier ministre suédois effectue souvent son premier déplacement en Finlande, et vice versa.

Avec son autre voisin, l’Union soviétique, puis la Russie, la Finlande a essayé de coexister au gré des tensions politiques, dans un rapport complexe et le plus souvent dissonant. Pour le dire autrement, la Finlande a failli connaître le destin actuel de l’Ukraine. Le maréchal Carl Mannerheim (1867-1951), héros national et président du pays de 1944 à 1946, l’homme qui a empêché l’invasion par l’URSS du fait de l’organisation de la défense du territoire lors de la Guerre d’hiver (1939-1940), avait conservé jusqu’à sa mort un portrait du tsar Nicolas II dans son salon.

Dans les confrontations de la Guerre d’Hiver et de la Guerre de continuation (1941-1944), la Finlande a réussi à préserver son indépendance à l’égard de l’URSS. Mais elle y a perdu une grande partie de sa jeunesse, son berceau historique de Carélie et, durant toute la guerre froide, sa liberté d’action en matière internationale. La « finlandisation » de la politique étrangère du pays a désigné l’extrême prudence à laquelle les autorités finlandaises ont été condamnées durant l’ère soviétique : au moindre faux pas, la Finlande risquait d’être déstabilisée par l’URSS.

Cela n’a pas empêché la Finlande de présenter au concours de l’Eurovision des candidats d’origine russe, comme Victor Klimenko à l’Eurovision 1965 ou Kirill Babitzin à l’Eurovision 1984. Plus surprenant, des candidats finlandais ont participé au concours de l’Intervision, concours du bloc de l’Est, et l’une d’elle, Marion Rung (participante de l’Eurovision en 1962 et 1973), l’a même remporté en 1980.

Signe de cette proximité, la langue suédoise bénéficie d’un statut officiel en Finlande, où elle compte près de 300 000 locuteurs, soit environ 5 % de la population (contre 15 % au début du XIXe siècle). Dans le même temps, les Finlandais forment la plus grande minorité ethnique en Suède (environ 675 000 personnes). De nouveaux éléments, tels que le statut de langue officielle minoritaire accordé au finnois en Suède, ou le nombre de consulats de part et d’autre (21 consulats finlandais en Suède, 17 consulats suédois en Finlande), renforcent encore davantage les liens étroits existant entre les deux pays.

Le concours Eurovision 2024 mettra en évidence les caractéristiques distinctes de la « voie nordique » suivie entre autres par la Suède et la Finlande, chacune avec sa propre approche. Mais, dans un contexte européen marqué par la guerre, les spectateurs se souviendront que cette harmonie entre voisins a été bâtie au prix d’efforts militaires et diplomatiques historiques.

L’Eurovision, reflet de l’amitié suédo-finlandaise

L’Eurovision, spectacle apparu dans des années 1950 afin de renforcer l’intégration des peuples européens, reflète également l’amitié durable entre la Suède et la Finlande à travers les artistes qui représentent ces deux nations. Depuis 1975, sur le plan comptable, la Suède est à la fois le pays pour lequel la Finlande a le plus voté, et celui qui a reçu le plus de votes de la part de la Finlande, ce qui témoigne d’une relation d’échange et de soutien mutuel. La réputation tenace d’un concours qui serait « géopolitique » plutôt qu’artistique est souvent liée à la constatation de ce type.

Côté finlandais, on retrouve des traces de cette proximité à divers niveaux. La première candidate finlandaise à l’Eurovision, Laura Kinnunen, a été réfugiée en Suède pendant la Seconde Guerre mondiale, comme une partie des Finlandais ayant fui les guerres avec l’URSS. Plusieurs candidats étaient issus de familles suédophones : Marion Rung, déjà citée (1962, 1973), Monica Apselund (1977) et Ami Apselund (1983), Jari Sillanpaä (2004), Axel Ehnström (2011) ou Krista Siegfrieds (2013), illustrent la diversité et la richesse de cette relation. De manière intéressante, la dernière chanson chantée en suédois l’a d’ailleurs été par une candidate finlandaise en 2012, la dernière chanson en suédois par des Suédois remontant à 1998.

Alors que la Suède a participé à 62 éditions de l’Eurovision, remportant sept fois le concours, la Finlande a beaucoup moins brillé. Si le pays caracole depuis plusieurs années en tête du classement PISA sur l’éducation ou de celui des pays les plus heureux du monde établi par l’ONU, il a aussi terminé à la dernière place du concours onze fois, dont trois fois avec aucun point. Il aura fallu attendre 2006 et le surprenant groupe Lordi avec « Hard Rock Hallelujah » pour que la Finlande obtienne enfin une victoire.

Malgré des résultats contrastés entre ces deux États, l’Eurovision reste un terrain d’expression culturelle où les liens suédo-finlandais se renforcent à chaque participation.

De la lumière de l’actualité aux feux de la rampe

L’Eurovision, bien plus qu’un simple concours de musique, est le reflet des relations entre les nations européennes, agissant comme un miroir qui tour à tour grossit, reflète, déforme ou éblouit.

Pour la Suède et la Finlande, cet événement emblématique offre une plate-forme permettant de célébrer leur amitié et leur histoire partagée. L’édition 2024, en raison de son lieu, Malmö, mettra en lumière le destin si particulier des Nordiques depuis le début de la guerre d’Ukraine : elle rappellera aux pays fondateurs de l’Union européenne et de l’OTAN que ces États aux populations et aux économies dynamiques mais réduites sont capables de peser sur le destin du continent.

Au-delà des performances musicales, l’Eurovision constitue un moment où les frontières s’effacent et où la musique unit les peuples, comme elle illustre parfois des désaccords durables entre voisins. Le prochain palmarès nous offrira probablement une fois de plus ce genre de paradoxe au moment du décompte des votes.

The Conversation

Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.

09.05.2024 à 13:00

Les Sapeurs africains : au-delà des apparences, un discours militant

Daouda Coulibaly, PhD, Professeur-Associé, EDC Paris Business School

La Sape – Société des ambianceurs et des personnes élégantes –, c’est un style inimitable né en Afrique centrale au début du XXᵉ siècle.
Texte intégral (2271 mots)
Jocelyn Armel dit le Bachelor. Un des Sapeurs les plus médiatisés. Connu pour ses sorties, ses pubs, ses interviews emblématiques mais surtout pour son combat pour la Sape, les Sapeurs et l’Afrique. En Mode sape flashy et toujours ce grand détail qui fait la différence ! Author provided

On peut les croiser dans les métros parisiens, dans le quartier de la goutte d’0r ou encore lors des grands événements de mode à Londres, Milan, Bruxelles, Dubaï… Ce sont majoritairement des hommes, africains, noirs avec un look vestimentaire atypique, flashy et qui cherchent à se faire remarquer : on les nomme Sapeurs africains ou encore « black dandies ».

Ces Sapeurs (et sûrement pas pompiers), qui se réclament de la Sape (Société des ambianceurs et des personnes élégantes) sauvent les apparences par un style vestimentaire luxueux, décalé, griffé et baroque. Ils veulent enflammer à travers leur discours, leur style et la théâtralisation de leurs faits et gestes.

Histoire, genèse et évolutions

Le mouvement de la Sape est né en Afrique centrale. Les travaux des ethnologues et des historiens sur la question semblent attribuer le port de Bacongo (rivière qui sépare les deux Congo), comme point de départ de cette sous-culture dans les années 1919-1920. Trente ans après, dans les années 1950, la Sape va connaître un nouvel élan et prendre son envol. Les premiers émigrés congolais (dont des anciens combattants) de retour au pays rapportent des produits perçus comme luxueux ou d’apparat : objets de marque, accessoires, vêtements ou chaussures de grandes marques.

C’est à partir de là que commencent, dans les quartiers des deux Congo (Brazzaville et Kinshasa), les premières parades, les défilés, les confrontations. Sur le même principe que les battles de danse, il faut montrer, démontrer et prouver ses capacités et aptitudes à la Sape ; les gestes, la voix, la démarche, le regard… autrement dit la communication paraverbale y est essentielle pour se démarquer, outre l’exhibition de vêtements de grandes marques. Alors un peu partout au Congo-Brazzaville et au Congo-Kinshasa, des foules se forment pour assister aux joutes, contempler, soutenir et acclamer ces « esthètes noirs », œuvres d’art vivantes et de surcroît, mieux habillés que les colons blancs eux-mêmes.

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Par la suite, dans les années 1970, des groupes d’étudiants congolais quittent la terre natale pour gagner la France. Le mouvement connaît un nouveau souffle avec des jeunes comme Aurlus Mabele, Djo Ballard, Ricley Loubaky, Jocelyn Armel, Ben Moukacha ou encore Papa Wemba qui deviendront rapidement des figures emblématiques et historiques du mouvement.

À partir des années 1984-1985, le mouvement optimise son organisation et la MEC (Maison des Étudiants de Congolais) devient le berceau de la Sape en France. La MEC se situait au 20 rue Béranger, dans le IIIe arrondissement de Paris. Tous les étudiants et quelques commerçants congolais (Congo-Brazzaville et Congo-Kinshasa) fréquentaient la MEC. Pour le roi de la Sape, Djo Balard et quelques doyens du mouvement comme Ben Moukacha, Jocelyn Armel, Nono Ngando (tous rencontrés dans le cadre de cette recherche), la MEC est le point de départ officiel de la Sape authentique. C’est à partir de la MEC que le mouvement a pris son véritable envol et s’est internationalisé. Djo Balard explique :

« La MEC, c’est la Mecque des Sapeurs. Quasiment tout a commencé là-bas. C’était la fête tout le temps ; des moments forts de compétitions mais dans la bonne humeur et dans la Sape. On voyait des silhouettes bien habillées. On faisait chanter les couleurs et les marques. Il fallait voir ça. À la MEC, le slogan c’était : être bien habillé, le crier, le savourer et même le jurer. »

Un mouvement médiatisé

Presque partout en Afrique et dans quelques grandes capitales européennes, surtout à Paris, on parlait de ce nouveau groupe d’africains, de noirs très élégants et passionnés qui fréquentent les boutiques comme Hermès, Yves Saint Laurent, Cardin, Prada, Balmain, Yamamoto, Lobb, Weston, Dior, Cerutti 1881, Preston… En quelques années, le mouvement de la Sape gagne le monde de la presse, des médias et du net. On en parle en Europe et particulièrement en France où les Sapeurs parisiens continuent de faire du « buzz » pour démocratiser et populariser leur mouvement voire leur doctrine. Dans les milieux des années 80, le réalisateur français Thomas Gilou réalise le film Black Mic Mac qui a été un premier clin d’œil culturel « mainstream » à ce mouvement.

Ben Mukasha, Un des doyens et figure emblématique de la Sape. Ici, à Lille dans le cadre d’une séance photo pour les besoins d’un article de recherche. Fourni par l'auteur

Le styliste et designer Paul Smith lance en 2010 une collection Sape pour rendre un vibrant hommage au penchant coloré, vivant, flashy et décalé du style vestimentaire des Sapeurs africains. Le célèbre photographe anglais Martin Parr, lors d’un séjour en 2011 dans la capitale française, rend visite aux Sapeurs et présente une exposition de photos dans le quartier de la Goutte d’or (XVIIIe arrondissement). Une exposition très fortement relayée par la presse, les réseaux sociaux et les blogs de professionnels (mode, photo…). Enfin, le créateur Christian Louboutin, lance en 2016 une collection de chaussures hommes Printemps Eté inspiré du modèle Kitendi (kitendi désigne le mouvement de la Sape en lingala, langue parlée dans une grande partie de l’Afrique centrale).

Derrière la Sape, un discours militant

Les pratiques vestimentaires peuvent dépasser l’expressivité individuelle ou collective pour entrer dans le champ religieux, symbolique ou politique. Mon travail de recherche, qui s’inscrit dans le champ des études postcoloniales et des « subaltern studies » (qui désignent l’étude des personnes, minorités ou groupes ignorés, peu reconnus ou dominés par la race, la classe sociale, le genre, l’orientation sexuelle, l’« ethnie » ou la religion) a pour objet d’explorer le sens et l’impact de la consommation démonstrative de luxe vestimentaire des Sapeurs noirs africains.

Les Sapeurs ne sont pas des clients traditionnels pour les marques de luxe. Ils sont en quête de reconnaissance sociale et s’approprient les marques. Le luxe, justement, avec ses différents degrés d’appréciation, étant employé ici comme le référentiel d’un groupe d’appartenance.

Ce qui fait le style particulier du Sapeur, c’est sa manière très codifiée de porter les accessoires, les marques, les couleurs, les motifs et de créer ainsi une tenue originale en référence au modèle occidental classique. Les accessoires sont présents à l’excès : chaussures, écharpe, chaussettes, sous-vêtements, pochette, ceinture, montres, lunettes, chapeau, cigare, cosmétiques, parfums et maquillage. Cette profusion est là pour souligner le discours du Sapeur : il s’agit de « cogner fort » c’est-à-dire de faire forte impression dans un contexte compétitif. En exhibant un maximum de griffes de luxe, on souligne tout à la fois l’authenticité de la tenue, sa créativité personnelle et un brin d’humour et de subtile provocation.

Les Sapeurs lors du Tournage du film du Réalisateur Jean Pascal Zadi, Tout simplement Noir. Ici, rue Panama, dans le XVIIIᵉ arrondissement. Un samedi après-midi Sapologique ! Fourni par l'auteur

Le Sapeur cherche à signaler sa présence aux autres, à se faire remarquer : l’excès de couleurs, de marques et d’accessoires le transforme en acteur du théâtre social, qu’il rend soudain bien plus visible. Par son accoutrement original, il réclame un droit de se faire plaisir, mais aussi de paraître, d’exister et d’interpeller.

Ces vêtements bruissants de symboles

Le vêtement remplit plusieurs fonctions : pratique, utilitariste, institutionnel, symbolique, esthétique… Chez les Sapeurs, le vêtement de valeur permet de porter un discours politique. Et ce discours plaide la dignité. La Sape s’oppose à l’humiliation liée à la pauvreté et à la condition du client « étranger ou noir » qui peut être perçu comme illégitime dans les magasins de luxe.

Le passé colonial joue aussi un rôle dans ce besoin de réparation et de justice. Dans l’histoire récente du continent africain, la tenue kaki et le casque colonial ont longtemps représenté le pouvoir politique et militaire des Blancs ; avec la Sape, l’image du pouvoir s’inverse et la griffe de luxe, le chapeau, le cigare, la canne, le costume étincelant permettent de gagner de la reconnaissance, de dépasser symboliquement l’humiliation de la domination coloniale – tout en rappelant qu’elle a eu lieu.

Enfin, il y a un terme très important dans le monde des Sapeurs, c’est l’ambiance : les Sapeurs sont des ambianceurs. Ils se mettent en scène dans la rue et favorisent une sociabilité intense, en créant des attroupements. Les vêtements colorés et luxueux, la danse des griffes, le flot de paroles (comme un sorte de transe), la musique chaleureuse et l’ambiance électrique provoquent l’admiration collective, la légitimation entre pairs et valident le statut du Sapeur.

The Conversation

Daouda Coulibaly ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

09.05.2024 à 12:56

« Interdire les écrans » ou « éduquer au numérique » : l’insoutenable alternative

Anne Cordier, Professeure des Universités en Sciences de l’Information et de la Communication, Université de Lorraine, Université de Lorraine

Remis fin avril 2024 au président de la République, le rapport intitulé « Enfants et écrans : À la recherche du temps perdu » suscite de nombreuses réactions. Quelques observations.
Texte intégral (2324 mots)

Fin avril 2024, la « Commission Écrans », a rendu au président de la République son rapport pour réguler les pratiques numériques des jeunes. Intitulé « Enfants et écrans : À la recherche du Temps perdu », le texte suscite depuis de nombreuses réactions, particulièrement centrées sur la problématique sanitaire. L’application de certaines de ses recommandations, notamment l’interdiction des réseaux sociaux avant 15 ans, apparait sujet à caution.

Les 29 propositions oscillent entre « interdiction totale des écrans » et nécessité de « mieux former au numérique ». Face aux interrogations suscitées par cette apparente ambivalence, les co-présidents de cette Commission insistent sur la complémentarité de ces propositions qui sont à tenir ensemble. Interdire les écrans et éduquer au numérique : cet « en même temps » est-il effectivement possible ?

Face aux risques, le choix du repli

Les vifs débats autour de la place des écrans dans nos espaces intimes, professionnels et sociaux s’ancrent dans une « société du risque » particulièrement inquiète de son avenir, notamment de sa capacité à faire face aux transformations technologiques. Si on peut reconnaître une accélération de ces préoccupations, celles-ci s’inscrivent dans un mouvement anthropologique connu, celui de la « panique morale ». Ce phénomène des paniques morales exprime une crainte quant à la déstabilisation des valeurs sociétales, et se cristallise autour des usages juvéniles desdits écrans et des conséquences de ces usages sur la santé mentale et sociale des enfants et adolescents, ainsi que sur leur développement cognitif et leur culture générale.

Pourtant une importante et robuste étude américaine, menée sur le long terme auprès de 12000 enfants entre 9 et 12 ans, conclut sans hésitation à l’absence de lien entre temps passé « devant les écrans » et incidence sur les fonctions cérébrales et le bien-être des enfants. Pourtant encore, en France, une enquête longitudinale d’envergure, déployée cette fois auprès de 18000 enfants depuis leur naissance, montre que ce sont des facteurs sociaux qui jouent un rôle prépondérant dans le développement de l’enfant.

Malgré ces faits scientifiques, le débat autour de la place desdits écrans dans notre société se polarise, et se caractérise récemment par une ultraradicalisation des postures, ce qui a pour premier effet de porter préjudice à la compréhension de tout un chacun. Au cœur de ce débat, les « écrans ». L’emploi de ce terme générique est en soi problématique, et à l’origine de nombreuses confusions et conclusions hâtives. Les objets techniques qu’il recouvre sont multiples, invisibilisant la diversité et la complexité de leurs usages, du jeu à l’information, en passant par la communication. Distinguer les activités qui ont les écrans pour support a son importance.

Des pratiques d’enseignement (au) numérique à considérer

Le soir de la remise du rapport produit par la « Commission Écrans », le premier ministre Gabriel Attal a enjoint « l’éducation nationale [à] balayer devant sa porte », de façon à cesser en son sein l’usage de « l’écran pour l’écran ». Un tel propos ne manque pas de surprendre. Cette attaque, vécue comme telle par de nombreux enseignants et personnels de direction, est incompréhensible quand on connaît la vivifiante production pédagogique des enseignants en matière d’éducation par le numérique et au numérique. Incompréhensible aussi quand on sait déjà les difficultés qu’ils rencontrent dans leurs établissements pour faire face à des thématiques complexes comme la protection des données personnelles des mineurs ou encore le phénomène de (cyber-) harcèlement.

Enfants et écrans : l’Éducation nationale doit « balayer devant sa porte », estime Attal (Le Parisien, avril 2024).

Tout comme celui d’« écran », le terme « numérique à l’école » ne signifie pas grand-chose. Il tend même, sans jeu de mots, à faire écran à la diversité de situations, de pratiques et de contenus didactiques expérimentés dans les classes. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. En 2020, un rapport, publié par le Centre national d’étude des systèmes scolaires (CNESCO), a fait le point à travers une vaste revue de littérature engagée par des spécialistes du champ, sur les interrelations entre « numérique et apprentissages scolaires ». Sa conclusion soulignait combien le scénario pédagogique prévalait pour le recours aux outils numériques dans la classe. C’est l’alliance entre stratégie d’enseignement et objectifs d’apprentissages qui fait le sens de l’éducation par le/au numérique.

Ainsi il parait absurde de « bannir les écrans des écoles maternelles » – comme le préconise le rapport de la « Commission Écrans » – alors que les programmes scolaires mentionnent, dès la fin de la Grande Section, la capacité attendue des enfants « à utiliser des objets numériques (appareil photo, tablette, ordinateur) ». De plus, les propositions didactiques des enseignants de maternelle témoignent d’un souci d’allier développement de compétences langagières et exploitation de ressources numériques. Une méta-analyse de 19 études scientifiques montre d’ailleurs que le recours à la tablette numérique auprès d’enfants âgés de 2 à 5 ans favorise – à condition qu’ils soient accompagnés d’adultes – l’amélioration de la capacité à résoudre des problèmes, le développement de compétences mathématiques ou encore de vocabulaire.


À lire aussi : Débat : Pourquoi le numérique doit s’apprendre à l’école


C’est tout au long de la scolarité que les compétences numériques sont pensées dans la classe et développées de façon réfléchie, bénéficiant de l’appui des connaissances scientifiques dans le domaine. La Direction du Numérique pour l’Éducation finance des projets de recherche (« Groupes de Travail Numériques »), qui ont précisément pour mission de produire des travaux destinés non seulement à évaluer les pratiques numériques dans l’enseignement et les apprentissages, mais aussi à soutenir les acteurs – enseignants, personnels de direction et d’encadrement, notamment – dans la mise en œuvre de scénarios efficients.

Exemple d’un dispositif mettant le numérique au service de l’apprentissage de l’orthographe, la « twictée » (France 3 Paris Île-de-France, avril 2015)

Un de ces groupes de recherche (GTnum EMILIE) inscrit son travail autour du grand triptyque organisateur des apprentissages des langages « Dire, Lire, Écrire » pour favoriser une éducation aux médias et à l’information ancrée dans les réalités éducatives et sociales à destination des élèves de cycles 2 et 3.

Conjointement, face à la menace que constitue incontestablement l’empire des GAFAM sur les libertés individuelles et collectives, le cadre éthique dans lequel se déploient ces usages numériques fait l’objet d’une réflexion partagée par les enseignants et personnels d’encadrement. Ceux-ci sont de plus en plus soucieux d’adopter des usages et des pratiques en cohérence avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) mais aussi avec des valeurs – celles des communs numériques – en adéquation avec l’idéal de l’école républicaine.

Derrière des discours clivants, des enjeux éducatifs majeurs

La question dudit numérique dans l’éducation dépasse très largement le cadre de l’école, et la sphère privée fait l’objet également de toutes les attentions. Là encore, le discours politique et médiatique apparait clivant, le premier ministre n’hésitant pas à affirmer le 30 novembre 2023 : « Concernant l’usage des écrans à la maison, nous sommes proches d’une catastrophe sanitaire et éducative ». Encore une fois, les travaux scientifiques ne corroborent pas cette affirmation. Ils mettent en avant des usages sociaux différenciés des objets connectés selon les médiations parentales à l’œuvre, mais aussi plus largement les contextes culturels.

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S’il est évident que l’intégration de cet objet socialement partagé constitue un défi pour l’exercice de la parentalité, il n’en reste pas moins que les parents font face, et ont besoin tout à la fois d’informations fiables sur le sujet et de soutien. Comme le montrait en 2021 une enquête menée auprès de 1852 parents d’enfants âgés entre 6 et 11 ans, ils attendent de l’école la prise en charge de compétences comme « évaluer/vérifier l’information » et « se protéger du cyberharcèlement », jugées essentielles pour la réussite scolaire et à l’intégration sociale de leur enfant.

Depuis plusieurs années, les politiques publiques ont saisi la nécessité absolue d’établir des dynamiques territoriales engageant les acteurs dans toute leur pluralité, qui témoignent d’un souci de favoriser la co-éducation par le/au numérique. Les territoires numériques éducatifs (TNE) illustrent cette prise de conscience. Ces dispositifs ne sont pas exempts de critiques, documentées d’ailleurs par la recherche, mais ils ont le mérite de tenter de répondre aux enjeux complexes par la conjugaison d’actions de formation et d’accompagnement, de production de ressources et de maillage entre les différentes instances. Ils ont aussi le mérite de considérer la question de la place dudit numérique dans notre société pour ce qu’elle est : une question de pouvoir d’agir collectif, une question d’égalité sociale, économique et culturelle d’accès – à l’information, aux sociabilités, aux industries culturelles, mais aussi aux démarches administratives et aux droits sociaux.


À lire aussi : Avec les « classes éloignées en réseau », les écoles rurales jouent collectif


Une telle intention passe par le fait de ne pas culpabiliser les adultes dans la sphère privée, et de leur redonner avant tout l’autorité et le pouvoir d’agir sur leurs propres usages pour ensuite pouvoir entrer en dialogue avec les enfants. Une conception coercitive de l’éducation par le/au numérique s’accommode mal avec une éducation aux médias et à l’information favorisant au quotidien réflexivité et développement d’une culture critique.

Le rapport « Enfants et Écrans : à la recherche du temps perdu » a le mérite de poser un sujet crucial sur la table : quelle conception de notre société, du vivre-ensemble, et des médiations, parentales et professionnelles, voulons-nous ? Toutefois, il succombe à de nombreux endroits à un discours catastrophiste et à la tentation de faire primer l’interdiction sur l’éducation. Voilà qui occulte une importante partie de la littérature scientifique sur les réalités sociales et culturelles des pratiques numériques. En misant sur des préconisations empreintes d’interdits, ne laisse-t-on pas planer le risque de rompre le dialogue et de renoncer à une prise en charge éducative de ces enjeux numériques ? Cette démission serait tout simplement une défaite collective.

The Conversation

Anne Cordier a reçu des financements de la Direction du Numérique pour l'Education dans le cadre des projets GTnum ELN (2020-2023) et Emilie (2023-2026).

09.05.2024 à 12:56

Dans le Pacifique, l’agonie de l’île de Nauru

Shérazade Zaiter, Juriste International- Auteure, Université de Limoges

Cette petite île du Pacifique, qui a connu une ruée vers son phosphate à la fin du siècle dernier, illustre les conséquences tragiques de l’exploitation irresponsable des ressources naturelles.
Texte intégral (1967 mots)

Le 27 février dernier, l’Union européenne a voté un texte élargissant la liste des crimes environnementaux et harmonisant les sanctions en la matière dans l’Union européenne. Début février, le procureur de la Cour pénale internationale Karim Khan proposait à son tour de poursuivre les crimes environnementaux sans modifier son statut, estimant que les dégâts environnementaux sont souvent cause ou conséquence de crimes de guerre ou contre l’humanité, sur lesquels elle a déjà la compétence. Dans Le manifeste contre la corruption environnementale qu’elle vient de publier aux éditions Érick Bonnier, ce sont ces thématiques que Shérazade Zaiter, juriste internationale, spécialiste en droit des affaires et droit à l’environnement et enseignante à l’Université de Limoges, explore.

Elle y dénonce des crimes qui viennent accentuer la crise environnementale et met en lumière ceux qui tentent de combattre cette corruption. Nous reproduisons ici l’extrait du livre consacré au destin tragique de Nauru, une petite île du Pacifique qui illustre de manière poignante les conséquences de la corruption environnementale.


La République de l’île de Nauru, minuscule joyau perdu dans l’immensité de l’océan Pacifique, illustre de manière glaçante les conséquences de la corruption environnementale. Qualifié de « pays qui s’est mangé lui-même », situé à près de 4835 kilomètres de l’Australie, il s’étend sur seulement 22 kilomètres carrés.

Son plateau central est entouré d’une bande côtière, où se concentre la majeure partie de sa population. L’origine de son malheur a commencé en 1906, lorsque d’immenses gisements de phosphate ont été découverts sur ce plateau. Sa corne d’abondance a ouvert la boîte de Pandore, et c’est ainsi que débuta la lente agonie de l’île de Nauru.

Le phosphate est un sel précieux, utilisé dans la fabrication d’engrais et d’explosifs. Riche en phosphore, c’est un élément essentiel pour la croissance des plantes, il augmente le rendement des cultures. Ce gisement minéral, dont la qualité est la meilleure au monde, couvre 70 % de l’île.

De la prospérité à l’effondrement

Les colons allemands ont d’abord bénéficié de son exploitation, puis l’Australie a pris le relais en 1914, en prenant le contrôle de l’île jusqu’en 1968. Cette année-là, Nauru est devenue la plus petite république au monde. Son indépendance lui a apporté une prospérité économique sans précédent.

En poursuivant l’exportation de phosphate, Nauru a connu une croissance rapide de sa richesse. En 1974, le pays affichait le deuxième produit intérieur brut par habitant le plus élevé au monde, générant 225 millions de dollars australiens. Nauru a brillamment instauré un modèle d’État-providence exempt d’impôts, où l’éducation, les transports, les services de santé, et même le logement sont entièrement pris en charge par l’État, sans aucun frais pour ses citoyens.

Au début des années 1990, avec le déclin des gisements de phosphate, l’économie de Nauru a sombré dans la crise. Malgré les investissements immobiliers du gouvernement pour contrer cette situation, ceux-ci se sont révélés désastreux. Des scandales de détournement de fonds et de corruption impliquant des politiciens et des personnalités influentes ont éclaté. Contribuant à la détérioration des infrastructures et des services publics.

Des choix politiques ont facilité l’octroi de contrats favorables à des entreprises étrangères en échange de faveurs, entraînant des conséquences désastreuses. Avec une augmentation des saisies, un effondrement de l’industrie et une succession de gouvernements, Nauru a été contrainte d’élaborer diverses stratégies pour restaurer ses finances.

Cela comprenait le blanchiment d’argent étranger, la vente de passeports et même l’accueil rémunéré de réfugiés clandestins, ce qui a attiré l’attention négative d’organisations telles que l’ONU, l’OCDE et Amnesty International.

Des paysages défigurés

La méthode d’exploitation minière, la plus courante, était l’exploitation à ciel ouvert. Elle consiste à retirer les couches de terre, de sable et de roches qui recouvrent les gisements de phosphate. Des machines lourdes, telles que des pelles mécaniques et des bulldozers, étaient utilisées pour extraire les roches phosphatées.

Les paysages ont été profondément modifiés, avec de vastes zones déboisées et des cratères, laissés par l’extraction du phosphate. L’excavation en tranchées était préférée, lorsque les gisements de phosphate étaient proches de la surface. Les tranchées étaient creusées pour atteindre les couches de phosphate, en enlevant les couches de terre et de sable à l’aide d’excavateurs. Elle a entraîné des impacts néfastes sur l’environnement, avec des perturbations majeures du paysage et des sols.

Le dragage marin était employé pour extraire les phosphates des dépôts marins, à proximité de Nauru. Cette technique consiste à utiliser des bateaux équipés de dispositifs de dragage, pour aspirer les sédiments marins contenant du phosphate. Le mélange de sédiments était ensuite traité pour en extraire le phosphate. Les écosystèmes marins ont été gravement perturbés, affectant la faune et la flore marines et modifiant les habitats côtiers.

Pollutions des sols et des eaux

Plus récemment, la récupération par dissolution in situ a été utilisée. Cette technique implique l’injection d’une solution chimique, dans les couches de phosphate, pour le dissoudre. La solution est ensuite pompée et traitée. Si cette méthode a réduit les dommages environnementaux directs, elle a entraîné des problèmes de gestion des déchets chimiques, avec la pollution des sols et des eaux souterraines. Les conséquences environnementales sont inimaginables.

L’histoire de Nauru, le « pays qui s’est mangé lui-même », 26 juillet 2020 (Brut).

80 % des terres sont dévastées, et 40 % des récifs coralliens sont morts. Les écosystèmes, autrefois riches et diversifiés, sont cruellement altérés. Les habitats naturels, dévoués depuis des millénaires à une multitude d’espèces végétales et animales, réduits en miettes. Les résidus toxiques, tels que les métaux lourds et les substances chimiques nocives, infiltrent les terres autrefois florissantes. Les sols stériles et appauvris, désormais sujets à l’érosion, laissent place à une triste désertification. Les rivières autrefois claires et vivantes sont souillées, leur pureté transformée en un miroir trouble de contamination.

La ceinture de corail, autrefois éclatante, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Les rejets issus de l’exploitation minière ont dégradé des habitats marins. La biodiversité marine, riche et prospère, réduite au silence. Comme si cela ne suffisait pas, la situation géographique de Nauru rend le pays particulièrement vulnérable à l’augmentation du niveau des mers, conséquence directe du dérèglement climatique. Tôt ou tard, les habitants devront quitter leur île pour leur propre survie. Une autre question se posera alors : quel État va leur ouvrir les bras ?

Désastre sanitaire

Au-delà des dommages visibles, les ravages environnementaux ont également touché les communautés locales. La dépendance économique, apportée par cette ressource précieuse, s’est avérée un fardeau difficile à supporter. La mauvaise gestion crée une dépendance excessive, à l’égard de l’importation de biens, et de produits alimentaires. L’île a connu une transition trop rapide vers un mode de vie sédentaire.

Ajoutée à cela, l’alimentation fortement fondée sur les produits importés, riches en sucres et en matières grasses affecte directement le bien-être et la santé des habitants : cela se traduit par une augmentation alarmante de l’obésité et des maladies associées, telles que le diabète de type 2 et les maladies cardiovasculaires.

Nauru est devenu l’un des pays les plus touchés par l’obésité, affichant l’un des taux les plus élevés au monde. Le tabagisme est également très répandu, avec 47 % de fumeurs réguliers. Les taux de mortalité infantile, juvénile et adulte sont élevés, l’espérance de vie est de 55 ans en moyenne, 49 pour les hommes. L’environnement naturel de l’île, qui a subi une détérioration alarmante, ne permet plus aux 14 000 habitants de s’adonner à des activités physiques, et d’avoir un mode de vie sain.

Accepter la corruption ou périr

L’île de Nauru nous rappelle les conséquences tragiques de l’exploitation irresponsable des ressources naturelles. Cette gestion inconsciente a entraîné une spirale de corruption et de compromis, mettant en péril la stabilité et le développement de l’île. Pour assurer sa survie et préserver son avenir, elle est confrontée à un dilemme difficile, celui d’accepter la corruption ou de périr.

Son état économique précaire, crée une porte ouverte à toutes sortes de compromis et de transactions douteuses. Un exemple frappant est le versement mensuel effectué aux dix-huit parlementaires composant son Assemblée Nationale. Cette somme d’argent provient des coffres de Taïwan. Il s’agit d’un pot-de-vin, destiné à remercier Nauru de l’avoir reconnu en tant que nation souveraine et indépendante.

C’est une pratique courante dans les îles du Pacifique, que les pays asiatiques ont instaurée dans le but de s’attirer les faveurs des 11 micro-États insulaires de la région. Cette stratégie leur permet de bénéficier du soutien de ces nations lors de votes importants à l’Assemblée Générale des Nations unies. D’autres exemples existent, comme la promesse de la Russie de réparer le port en ruines de Nauru. En échange de ces travaux, l’île a accepté de reconnaître l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, deux provinces autonomes de Géorgie envahies en 2008 par la Russie, en tant que territoires indépendants.

Nauru nous montre que la détérioration de l’environnement affecte le droit à la vie, à la santé, au travail et à l’éducation. En raison de sa petite taille et du manque de données disponibles, elle n’est pas prise en compte dans l’indice de perception de la corruption. Il est difficile d’avoir une image complète et précise de son niveau de corruption.

Sa taille et sa population restreintes peuvent justement offrir des opportunités pour mettre en place des mesures de gouvernance plus transparentes, et des mécanismes de lutte contre la corruption, plus efficaces. Le pays pourrait ainsi renforcer la confiance et la transparence au sein des institutions internationales. Cela permettrait de consolider la confiance des citoyens et d’assurer une gestion responsable des affaires publiques.

The Conversation

Shérazade Zaiter est membre d'Avocats sans Frontières et du Centre International de Droit Comparé de l'Environnement.

09.05.2024 à 12:56

Réindustrialisation, préservation du foncier : comment mieux s’accorder entre entreprises et collectivités ?

Nicolas Gillio, chef de mission « Economie et territoire », Cerema

Mieux connaître le foncier, savoir le recycler et négocier… Les autorités publiques peinent parfois à articuler leurs ambitions avec celles des entreprises, malgré des envies de réindustrialisation.
Texte intégral (2176 mots)
Une friche industrielle en périphérie de Caen Frédéric Bisson / Flickr, CC BY-NC-ND

Zéro artificialisation nette (ZAN) d’ici 2050 et réindustrialisation : ces deux objectifs affichés par le gouvernement sont-ils compatibles ? L’industrie ne représente que 5 % de l’artificialisation des sols ce qui reste relativement faible en comparaison avec des secteurs tels que le commerce ou l’extraction minière. La limitation de l’artificialisation des sols peut aussi avoir pour objectif de préserver nos capacités à accueillir des projets industriels dans les décennies à venir.

L’accès au foncier est aujourd’hui un enjeu stratégique pour les activités économiques et notamment industrielles. L’industrie se trouve notamment en compétition avec l’agriculture, le logement ou les équipements publics. Pour cela, une articulation entre projets industriels et stratégies publiques locales devient indispensable et suppose de surmonter plusieurs obstacles que nous avons étudiés dans un travail de recherche récent.

Quatre pistes de progrès ont été identifiées en particulier : mieux connaître le foncier économique disponible, anticiper le coût de recyclage foncier des sites économiques, retrouver une maîtrise publique du foncier industriel et combler les carences des collectivités en termes d’animation de leur foncier économique (négociation, mobilisation, facilitation).

Améliorer la connaissance du foncier économique disponible

La première des difficultés relevées tient à la connaissance des espaces disponibles. Sans une connaissance fine du foncier et de ses caractéristiques, il sera difficile d’intervenir efficacement pour une collectivité territoriale ou un opérateur public.

Plusieurs étapes viennent d’être franchies en l’espace de quelques mois. Des inventaires locaux des zones d’activités économiques instaurés par la loi Climat & Résilience d’août 2021 permettent désormais à chaque collectivité d’avoir une vision plus précise du foncier économique sur son territoire avec les périmètres, les propriétaires et les occupants de chaque zone. Plusieurs régions ont renforcé ces inventaires locaux par des observatoires régionaux afin de consolider et d’homogénéiser les inventaires locaux. Le niveau national était le moins avancé sur ces questions mais propose désormais un premier dispositif, France Foncier+, axé sur la recherche de disponibilités foncières par les entreprises et investisseurs privés.

Avec ces trois niveaux de connaissance et d’observation, les décideurs disposent d’un socle d’outils très complémentaires, même si les différentes échelles peuvent entrer en concurrence. Plusieurs territoires n’en font pourtant pas encore usage. 64 % des intercommunalités ne disposent pas d’un observatoire du foncier économique. La mise en visibilité de sites économiques et de terrains disponibles éveille aussi des craintes sur les territoires : concurrence entre des entreprises extérieures au territoire et des entreprises locales pour l’accès au foncier, révélation de difficultés à commercialiser le foncier ou au contraire de l’absence de foncier disponible sur d’autres…

Favoriser le recyclage foncier des sites économiques

Outre l’amélioration de la connaissance, notre travail insiste sur l’importance à ce que les collectivités limite l’inadéquation entre stratégies publiques locales et projets industriels par des actions de recyclage foncier des sites économiques. Les friches constituent un vivier important de terrains pouvant être remis sur le marché moyennant des opérations parfois très couteuses de dépollution et de réaménagement.

Plus de 10 000 friches sont recensées par l’inventaire national Cartofriches développé par le Cerema. Malgré le potentiel qu’elles représentent, la localisation des sites ne correspond pourtant pas nécessairement aux critères recherchés par les investisseurs. Les exploiter requiert ainsi des expertises et une ingénierie locale afin de vérifier leurs caractéristiques, leur coût de remise en état et leur capacité d’accueil.

Le projet Novacieries à Saint-Chamond (Loire) ou le site de Stellantis dans le Pays de Montbéliard (Doubs) ont su opérer une « mue » efficace afin d’accueillir de nouvelles activités prenant le relais de la sidérurgie et de l’automobile. Les halles industrielles du premier site ont été reconverties en locaux d’activités, programmes d’habitat, pôle de loisirs et de formation. S’y implantent également des entreprises comme Linamar qui conçoit des pièces de moteur automobile, SICAF, expert en câblage d’armoire électrique ou BIC, Leader français des consommables d’hygiène et des essuyages textiles. Dans d’autres cas l’existence de friches permet de tester de nouvelles activités sur le territoire : le site de l’ancienne usine de batterie Saft de Noisy-le-Sec, dans l’Est parisien, a été racheté par L’Établissement public foncier d’Île-de-France pour porter le foncier et en faire une « Usine des transitions », abritant des activités économiques centrées sur la transition environnementale. Le site sera occupé de manière temporaire par ces activités avant d’engager une reconversion plus poussée. L’urbanisme transitoire devient ici un outil pertinent en raison de la souplesse qu’il permet.

Pour les collectivités, se réapproprier le foncier

Si des collectivités locales se réapproprient d’anciens sites comme dans l’Est parisien, une dissociation entre le foncier et le bâti peut ensuite être imaginée pour répondre au besoin de coordonner les projets industriels privés avec les volontés publiques locales. Le mécanisme est simple et ancien pour les collectivités : garder la propriété de certains terrains et octroyer des droits réels immobiliers aux entreprises pour construire un bâtiment moyennant le versement d’une redevance foncière sur une durée de 18 à 99 ans. Cela permet aux autorités publiques de sélectionner les activités qui présentent un intérêt économique et collectif pour leur territoire, cohérentes entre elles et permettant par exemple de préserver l’emploi. Face au renchérissement du coût de l’immobilier, les entreprises cherchent, de leurs côtés à concentrer leurs dépenses d’investissement sur l’outil de production et cette dissociation peut leur être avantageuse.

Le développement de sociétés de portage foncier à long terme constitue une autre réponse pour se réapproprier le foncier. Il s’agit de sociétés foncières à capitaux publics ou mixtes qui réhabilitent un patrimoine foncier et industriel puis le mettent en location auprès d’entreprises utilisatrices de manière temporaire ou dans le cadre d’un bail commercial classique.

Encore émergent, ce type de structure a déjà atteint des résultats significatifs sur des territoires tendus et où l’acquisition foncière nécessite des moyens financiers importants. À Lyon-Vénissieux, la SAS USIN, constitué d’un actionnariat privé et public a ainsi recyclé une vaste emprise foncière dans l’agglomération lyonnaise (11 hectares) sur le site occupé anciennement par une usine Bosch.

Un rôle d’animation

Les services économiques des collectivités ont traditionnellement investi le champ de la promotion économique et de la commercialisation des terrains. Cela a néanmoins débouché sur un modèle caricatural fondé sur la compétitivité, l’attractivité, la métropolisation et l’excellence. Or, la réponse aux besoins des entreprises repose beaucoup sur la bonne combinaison des réponses en termes d’urbanisme et de développement économique et sur un bon usage du foncier qui permet d’accélérer les procédures d’autorisation par la suite comme les permis de construire.

Les besoins des entreprises peuvent rapidement changer en la matière. Un commercial nous rapporte :

« On a beaucoup de clients qui peinent à formuler leur demande et qui nous sollicitent pour la reformuler. Il y a de plus en plus de demandes de réversibilité notamment. »

Il faut ainsi pour les autorités publiques savoir se muer en animateur. L’intensification des dispositifs d’animation économique autour du foncier nécessite une aptitude à la négociation du foncier et de l’immobilier d’entreprise. Celle-ci prend des formes variées et de manière plus ou moins encadrée entre la collectivité, des intermédiaires et des entreprises utilisatrices de terrains et de locaux. C’est dans le processus de négociation que le rôle de la collectivité et de son service économique doit être aussi intensifié. Comme le rappelle ce promoteur, la négociation permet à chacun de gagner du temps dans ses recherches :

« On a eu des demandes sur des zones précises afin d’implanter 5 000 m2 et on avait sollicité Valence Agglo pour savoir s’ils avaient du foncier. Ils ont su nous dire non : c’était bien d’avoir un interlocuteur avec une vraie maîtrise du métier. Ils ont leur propre architecte-conseil, on passe directement par eux, ils sont à même de donner les réponses. »

C’est autour de ces quatre axes que les objectifs de réindustrialisation pourront se concrétiser sur nos territoires tout en limitant l’artificialisation des sols. D’autres facteurs entrent évidemment en ligne de compte (impact environnemental, recrutement, logement, financement) mais s’agissant du foncier, il semble indispensable de changer de modèle. Ce changement nécessite de passer d’une approche fondée uniquement sur la commercialisation d’un foncier « simple support » à des activités vers un modèle où le foncier devient une ressource stratégique gérée comme une ressource patrimoniale au sens financier et écologique du terme. Les activités économiques sont alors « encastrées » dans une approche globale de transition territoriale.

The Conversation

Nicolas Gillio a été chercheur associé au laboratoire PACTE Territoires de Université de Grenoble Alpes Il est membre du Réseau National de l'Economie Territoriale (RNET)

07.05.2024 à 15:48

Que nous dit la suspension de Guillaume Meurice sur la satire politique française ?

Guillaume Grignard, Chercheur FNRS en sciences politiques, Université Libre de Bruxelles (ULB)

L’humoriste Guillaume Meurice a été suspendu de France Inter après avoir réitéré sa blague sur Benjamin Nétanyahou : qu’est-ce que cela dit de l’état de notre société ?
Texte intégral (1472 mots)

Dans un court article d’une œuvre immense, le médiéviste français Jacques le Goff s’est penché sur le rire au Moyen-Âge et nous disait une formule célèbre qu’on peut paraphraser ainsi « Dis-moi de quoi et de qui tu ris, et je te dirais qui tu es ».

Depuis les polémiques autour de la blague de Guillaume Meurice en octobre 2023 et son amplification récente qui a amené l’humoriste à être écarté de l’antenne de France Inter, beaucoup a été dit et plus que jamais cette discorde largement médiatisée et relayée dit quelque chose sur la France d’aujourd’hui. Cet article a comme objectif de cerner cette problématique par le prisme interdisciplinaire des travaux sur l’humour.

Analyse d’une blague

La littérature spécialisée sur le rire reconnaît en général trois grandes écoles qui appréhendent le phénomène : l’incongruité – utilisée souvent en linguistique – qui explique le rire par le décalage entre ce qui est attendu et ce qui survient ; le rire de supériorité – dont on retrouve traces chez Hobbes ou Bergson – qui analyse le rapport social entre le rieur et sa victime ; et le rire de libération de tendance freudienne qui concerne le lien entre le rire et les tabous.

La particularité de la blague de Guillaume Meurice, comparant Benyamin Nétanyahou à « une sorte de nazi sans prépuce » est qu’elle s’inscrit dans toutes les catégories. Il y a à la fois un élément paradoxal, utiliser le mot « nazi » pour qualifier un dirigeant israélien, un rapport particulier entre le rieur et sa cible et une référence à un organe génital.

Le deuxième élément me semble particulièrement intéressant à investiguer. En adressant ce sarcasme au premier ministre israélien, Guillaume Meurice utilise à la fois cet humour d’inversion des rapports de force puisqu’il s’en prend à quelqu’un qui a plus de pouvoir que lui. Il recourt alors à l’humour comme arme des opprimés. Mais en même temps, en osant cette formulation incongrue, il blesse une partie de la communauté juive, traumatisée par l’holocauste. Cette formule humoristique, quoiqu’on en pense à titre personnel, montre bien toute l’ambivalence de l’humour, à la fois arme des plus faibles et alibi innocent pouvant permettre toute interprétation. S’il ne fait aucun doute que Guillaume Meurice n’est ni antisémite, ni auteur d’une blague antisémite comme l’a démontré d’ailleurs la justice en classant sans suite la plainte qui lui était adressée, la blague qu’il a prononcée et réitérée illustre la polarisation que peut générer l’humour.

Des outils linguistiques pour analyser l’humour

En m’appuyant sur un article fondamental pour la discipline par le linguiste Patrick Charaudeau, j’ai établi une grille de codage originale pour mesurer le discours des humoristes lors d’émissions en radio et en télévision. Cette grille s’inspire directement des théories de la supériorité et permet de mesurer la cible et la manière avec laquelle les humoristes ciblent les personnalités politiques.

Appliquée à l’émission Le grand dimanche soir, cette grille démontre comment le spectre politique français divisé en trois grands blocs lors des élections présidentielles 2022, se reproduit et se reconstruit au cours de cette émission. En outre, cette émission est désormais en public, ce qui permet d’intégrer le niveau d’applaudissement et les réactions des spectateurs.

L’analyse s’appuie alors sur des travaux en sociologie pour montrer comment l’émission rassemble un auditoire de gauche pour se moquer à la fois de la majorité présidentielle et des mandataires politiques du Rassemblement national, sur fond de guerre médiatique avec CNews et L’heure des pros, qui se prennent mutuellement pour cible à intervalle régulier.

Pour repartir sur le propos introductif emprunté à Jacques le Goff, cette analyse démontre que la France est un pays profondément divisé aujourd’hui et que l’humour amplifie cette division en accentuant les frontières entre les groupes politiques. Loin d’apaiser les tensions et d’offrir une soupape qui rassemble l’hexagone, l’émission Le grand dimanche soir, tirée par le public présent sur place et les excellentes audiences, rassemble la France progressiste face à l’extrême droite et à la majorité présidentielle. Loin d’épouser ici les approches psychologiques qui voient l’humour comme une forme de guérison, cette émission est plutôt un théâtre politique au contenu foisonnant pour les politologues, qui reproduit le rapport de force à l’Assemblée nationale.

L’humour comme thermomètre démocratique

La polémique autour de la blague de Guillaume Meurice nous invite à tempérer les vertus pacificatrices qu’on attribue régulièrement à l’humour. Au contraire, inspiré par le livre plutôt pessimiste de Bergson et d’autres ouvrages récents qui vont dans la même direction, l’humour apparaît dans ce contexte comme une arme politique de la division qui cristallise les identités entre les groupes et où chaque camp se rassemble contre les autres par l’alibi innocent du comique.

Il m’apparaît important de bien nuancer et préciser le propos. Il ne s’agit pas de dire ici que les humoristes de France Inter ont l’intention de diviser le pays davantage chaque dimanche, leurs intentions sont éminemment bienveillantes. Mais au contraire, il s’agit de montrer comment la division profonde de la société française, conjuguée à la présence du public qui excite le show dominical, s’exporte sur les planches des humoristes qui deviennent malgré eux des figures politiques de leur public. À aucun moment lors de mes recherches, je n’ai rencontré d’humoristes qui étaient sincèrement convaincus de jouer un rôle politique ou qui revendiquaient une quelconque forme de militantisme. Ce ne sont pas les humoristes qui ont un impact sur la société, c’est tout au contraire la société qui impacte leur travail et l’ampleur que prennent leurs blagues.


À lire aussi : De quoi riait-on au Moyen Âge ?


En conclusion, l’humour apparaît ainsi comme un véritable thermomètre démocratique, de quoi peut-être formuler une loi ou une relation de causalité à démontrer dans de futures recherches : plus une société démocratique parvient à rire d’elle-même, mieux elle se porte. A contrario, plus la société est divisée, moins elle parvient à se rassembler par le rire. L’ambivalence de l’humour apparaît alors comme un outil pertinent pour penser la solidité démocratique d’une société. L’éviction provisoire de Guillaume Meurice de France Inter serait ainsi le signal d’une France profondément divisée et marquée par la haine de l’autre camp, de quoi donner à l’humour un champ particulièrement fécond dans l’optique des élections présidentielles de 2027.

The Conversation

Guillaume Grignard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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