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27.07.2025 à 14:12

Thaïlande — Cambodge : cinq points sur la géopolitique d’une frontière explosive 

Gilles Gressani

Depuis jeudi 24 juillet, la Thaïlande et le Cambodge s'affrontent sur leur frontière.

Comment comprendre cette escalade ?

Quels sont les principaux facteurs de tension ?

Quelle est la position des gouvernements de Bangkok et de Phnom Penh ?

Michel Foucher, l'un des principaux spécialistes de la géographie des frontières, signe une analyse en cinq points du grand contexte de cette crise géopolitique et de ses possibles solutions.

L’article Thaïlande — Cambodge : cinq points sur la géopolitique d’une frontière explosive  est apparu en premier sur Le Grand Continent.

Texte intégral (4921 mots)

1 — Des tensions à l’escalade 

L’explosion des tensions entre la Thaïlande et le Cambodge ce jeudi 24 juillet couvait depuis le début de l’année autour de quelques zones frontalières dont le tracé est mal délimité — secteurs de Prasat Ta Muen Thom, puis du Triangle d’Émeraude — et dans un contexte de surenchère politique 1.

En février, des soldats et des civils cambodgiens ont escaladé les ruines d’un temple contesté datant de l’empire khmer, Prasat Ta Muen Thom, et ont entonné un chant patriotique. Ils ont été confrontés à des soldats thaïlandais, qui s’opposaient à cette revendication implicite de souveraineté cambodgienne. Plusieurs vidéos de l’affrontement ont circulé sur les réseaux sociaux, attisant les sentiments nationalistes dans les deux pays

Après l’incendie le 1er mai d’un pavillon commémorant la zone des trois frontières, l’attention s’est ensuite tournée vers le Triangle d’émeraude, où se rejoignent le Cambodge, le Laos et la Thaïlande. Les autorités thaïlandaises ont cherché à étouffer les rumeurs selon lesquelles les troupes cambodgiennes auraient déclenché l’incendie, déclarant publiquement que l’origine du feu était innocente. 

Mi-mai, l’armée thaïlandaise a signalé que les troupes cambodgiennes creusaient des tranchées dans la zone contestée, mais qu’elles avaient accepté de se retirer à la suite de discussions entre les commandants locaux. Le 28 mai, un affrontement a coûté la vie à un lieutenant cambodgien dans la même zone, connue en Thaïlande sous le nom de Chong Bok et au Cambodge sous le nom de Mom Bei.

Le 23 juin, en réponse à une série de restrictions mutuelles, les autorités thaïlandaises ont ordonné la fermeture complète des points de passage frontaliers, sans préciser de date de réouverture. 

Le 23 juillet, soit la veille du début des hostilités, le gouvernement thaïlandais a accusé le Cambodge d’avoir posé de nouvelles mines terrestres à la frontière, causant des incidents graves (dont la perte d’une jambe) à au moins deux militaires thaïlandais le 16 juillet.

2 — Quel est le point de vue du Cambodge ?

Convoquée à la suite de l’escarmouche mortelle du 28 mai, une réunion de la Commission mixte des frontières Cambodge-Thaïlande s’est tenue le 14 juin à Phnom Penh afin de discuter des questions frontalières. Cette réunion à huis clos a été coprésidée par Lam Chea, ministre cambodgien chargé des affaires frontalières, et par Prasas Prasasvinitchai, ancien ambassadeur de Thaïlande au Cambodge et conseiller pour les affaires frontalières auprès du ministère thaïlandais des Affaires étrangères 2.

Le Premier ministre cambodgien Hun Manet a déclaré dans un message publié vendredi 13 juin qu’il s’agissait de la première réunion de cette commission après une interruption de 12 ans. Il a indiqué qu’à cette occasion, son pays aurait invité la Thaïlande à saisir la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye à propos de quatre zones frontalières contestées, à savoir Mom Bei, le temple Ta Moan Thom, le temple Ta Moan Tauch et le temple Ta Krabei.

« Je voudrais réitérer à mes compatriotes que, même si la Thaïlande refuse ou reste silencieuse, le Cambodge agira de manière unilatérale », a déclaré Hun Manet, précisant que le ministère cambodgien des Affaires étrangères enverrait une lettre officielle à la CIJ le 15 juin concernant le différend ayant trait à ces quatre régions 3.

Mardi 2 juillet, une délégation d’experts internationaux est arrivée au Cambodge afin de discuter du dépôt de plaintes devant la CIJ. Le professeur Jean-Marc Sorel a été le conseiller juridique du Cambodge dans le cadre de la procédure devant la CIJ concernant la zone entourant le temple de Preah Vihear. Il a rencontré le premier ministre cambodgien dès son arrivée pour discuter de la poursuite du processus devant mener à un règlement du différend frontalier devant la CIJ 4.

Mardi 2 juillet, une délégation d’experts internationaux est arrivée au Cambodge pour discuter du dépôt des affaires devant la CIJ. Le professeur Jean-Marc Sorel a été le conseiller juridique du Cambodge dans le cadre de la procédure devant la CIJ concernant la zone entourant le temple de Preah Vihear. Il a rencontré Hun Manet dès son arrivée pour « discuter de la poursuite du processus visant à porter le différend frontalier » devant la CIJ. « Le professeur Jean-Marc Sorel était un membre important de l’équipe de conseillers juridiques et d’avocats qui a aidé le Cambodge à gagner le procès concernant l’interprétation de la décision de la CIJ de 1962 relative au temple de Preah Vihear en 2011-2013 », a déclaré le premier ministre cambodgien.

Hun Manet a ajouté que le gouvernement cambodgien restait déterminé à porter l’affaire devant la CIJ : « Le Cambodge est déterminé à porter devant la CIJ les différends frontaliers concernant les temples de Ta Moan Thom, Tamoan Toch et Ta Krabei ainsi que la région de Mom Bei afin de trouver une solution pacifique et fondée sur le droit international ».

En 1962, la Cour internationale de justice a jugé que le temple de Preah Vihear se trouvait sur le territoire relevant de la souveraineté du Cambodge et que la Thaïlande devait retirer toutes ses forces stationnées sur place. La Cour a également affirmé que cet arrêt conférait au Cambodge la souveraineté non seulement sur le temple, mais aussi sur le promontoire sur lequel il est construit. Elle a également indiqué que la Thaïlande devait se retirer de l’ensemble de la zone environnante, et pas seulement de la structure du temple. Lors des audiences de 2013, Jean-Marc Sorel a fait valoir que l’arrêt de la CIJ de 1962 reconnaissait implicitement la souveraineté du Cambodge sur le temple et ses environs, sur la base de cartes historiques et de l’acceptation préalable de la Thaïlande 5.

Le secrétaire général de l’Académie royale du Cambodge, Yang Peou, se dit confiant quant à l’expertise et aux capacités de Sorel pour aider le Cambodge à saisir la CIJ de ces nouvelles affaires. « La Thaïlande a le droit de déclarer si elle accepte la décision de la Cour, mais le Cambodge a tout de même poursuivi la procédure judiciaire, car il estime qu’il est impossible de régler le différend de manière bilatérale, compte tenu des nombreuses violations du protocole d’accord de 2000 survenues au cours des deux dernières décennies. » 6

Un véhicule militaire cambodgien transporte un lance-roquettes dans la province d’Oddar Meanchey, au Cambodge, le vendredi 25 juillet 2025.
Des soldats thaïlandais examinent une zone frontalière de la province d’Ubon Ratchathani afin de détecter d’éventuelles mines antipersonnel.

3 — Quel est le point de vue de la Thaïlande ?

La Thaïlande sait qu’elle n’a en effet aucune possibilité de gagner cherche donc à éviter de se présenter devant la Cour, tout en continuant de faire perdurer sa prétention aussi longtemps qu’elle le pourra. Le Cambodge a naturellement le réflexe inverse.

« La décision de la Thaïlande de ne pas accepter la compétence obligatoire de la Cour internationale de justice (CIJ) reflète la position mûrement réfléchie de ce pays, selon laquelle tout moyen de résolution des différends entre États doit être exercé en tenant dûment compte du contexte spécifique de chaque affaire, de la nature de la situation et des intérêts souverains en jeu », a déclaré le ministère thaïlandais des Affaires étrangères dans un communiqué publié le lendemain de la saisine de la CIJ par le Cambodge 7.

Selon lui, le recours à un tiers n’est pas toujours propice au maintien de relations amicales entre les États, en particulier dans des domaines sensibles comportant des dimensions historiques, territoriales ou politiques complexes. Si des progrès ont été réalisés dans la délimitation des frontières avec le Laos et le Vietnam (respectivement 86 % et 84 % du processus achevés), les négociations bilatérales avec la Thaïlande sont au point mort. Le Cambodge accuse la Thaïlande d’utiliser une carte dessinée unilatéralement qu’il rejette fermement, la qualifiant de source des différends actuels et passés.Rappelons que le statut de la CIJ fait partie intégrante de la Charte des Nations unies. Par conséquent, tous les États membres de l’ONU reconnaissent, par défaut, la juridiction de la CIJ, sauf s’ils ont émis une réserve ou exclu expressément sa compétence. Dans l’affaire du du Temple de Preah Vihear, la Thaïlande a attrait à sa juridiction n’ayant fait ni réserve ni dénonciation expresse avant que le Cambodge introduise cette affaire à la Cour. Après sa « défaite » prononcée par l’arrêt de la Cour en 1962, le roi thaïlandais en personne a prononcé une déclaration affirmant que son pays n’était absolument pas d’accord avec cette décision, mais qu’en tant qu’État civilisé, il allait l’appliquer. C’était la première expression d’une longue série de déclarations thaïlandaises s’inscrivant dans la théorie du persistent objector 8. Immédiatement après la déclaration royale, le gouvernement thaïlandais a dénoncé sa déclaration d’acceptation obligatoire de la juridiction de la CIJ.

4 — Les trois sources d’une rivalité géopolitique frontalière

4.1 — L’histoire d’une région disputée

L’histoire du Cambodge et de la Thaïlande est intimement liée, marquée par un sentiment de mépris et d’admiration réciproques. Elle est marquée par des différends profonds et amers dont les Khmers et les Thaïlandais se souviennent et ne peuvent oublier de génération en génération. Les bas-reliefs d’Angkor Wat témoignent ainsi de la lutte entre les Siamois et les Khmers.

Historiquement, la Thaïlande et le Cambodge se sont disputé une petite partie de leur frontière terrestre de 817 km, en particulier la zone autour du temple de Preah Vihear, que les Thaïlandais appellent Phra Viharn. Les origines de ce différend remontent au XXe siècle, à l’époque de la domination coloniale française, lorsque la Thaïlande (alors le Siam) a signé un traité délimitant les frontières septentrionales entre les deux pays. Entre 1941 et 1953, période durant laquelle le Cambodge était sous domination française, la région a changé de mains à de nombreuses reprises.

Rappelons que sans la mission archéologique française (l’École française d’Extrême-Orient) qui a découvert les ruines d’Angkor, puis sans le protectorat français qui a au sens propre protégé le Cambodge, ce pays aurait été conquis par la Thaïlande et le Vietnam. Durant l’occupation japonaise, la Thaïlande avait d’ailleurs annexé les provinces de Battambang et de Siem Reap, où se trouvent les ruines d’Angkor. Ces provinces ont été restituées sous la pression française en 1945.

4.2 — Le droit international comme source paradoxale de tension

Après l’indépendance, les troupes thaïlandaises ont occupé la région en 1954. En réponse, le Cambodge a porté le différend devant la Cour internationale de justice (CIJ) qui, en 1962, a statué en faveur du Cambodge. C’est le deuxième facteur de tensions. Ce dernier a permis de cristalliser au plus haut point ce sentiment charnel et répulsif entre les deux peuples. Car comme il s’agit d’un des grands classiques de la jurisprudence internationale, affaire du Temple de Preah Vihéar, (mais aussi récente avec la décision de 2013) de la CIJ, il lui donne un écho planétaire, ce qui enrage encore davantage les populations des deux côtés de la frontière qui ne veulent pas perdre la face devant le monde entier qui, pensent-elles, les regarde.

La Thaïlande n’a pas accepté l’arrêt de la CIJ, contestant l’interprétation de la carte de 1907 présentée comme preuve. La Thaïlande a notamment soutenu qu’elle n’avait jamais reconnu officiellement la carte de 1907, même si elle avait été utilisée pendant une longue période, et a affirmé que l’arrêt de la CIJ ne s’appliquait qu’aux terrains immédiats des temples, et non à la région frontalière au sens large. En 2013, à la demande du gouvernement cambodgien, la CIJ a réitéré son arrêt de 1962, soulignant la souveraineté du Cambodge sur l’ensemble du complexe des temples et exhortant la Thaïlande à retirer ses troupes de la région.

La question de la frontière refait surface régulièrement, provoquant des ruptures diplomatiques entre les deux pays. Le différend a resurgi lorsque le Cambodge a tenté d’inscrire le temple de Preah Vihear sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, d’abord en 2008, puis en 2011, année au cours de laquelle des affrontements entre les troupes des deux pays ont causé la mort d’une quarantaine de personnes.

4.3 — L’usage interne des frontières

Un troisième facteur est le jeu de la politique nationale. Puisque la question des frontières rassemble profondément les populations, les dirigeants politiques utilisent ce moment d’unité à des fins politiques internes, comme lors des élections, ou pour dépasser des crises politiques, comme celle que connaît actuellement la Thaïlande, où le gouvernement est faible et menacé à la suite de la suspension de la Première ministre. L’ancien premier ministre Hun Sen — ayant dirigé depuis 1985 — est coutumier des interférences dans la politique intérieure thaïlandaise 9.

Même si l’on ne parle plus aujourd’hui du Temple de Preah Vihear, mais de quatre autres lieux, la question juridique principale est la suivante : les traités de 1904 et 1907, signés par la France et la Thaïlande, sont-ils valables ? Ces traités ont non seulement permis de délimiter la frontière terrestre entre les deux pays (le Cambodge a récupéré toute la province de Siem Reap, qui signifie d’ailleurs « le Siam vaincu », et celle de Battambang), mais aussi le tracé maritime entre ces pays.

Très soucieuse de ne pas voir se consolider une prescription acquisitive des territoires qu’elle réclame (les provinces de Siem Reap et de Battambang), la Thaïlande exprime régulièrement et méthodiquement sa puissance publique sur ces territoires contestés, conformément à la théorie du persistent objector, et ce depuis 1962, date à laquelle la Cour internationale de justice avait déclaré que le Cambodge était en droit d’invoquer les traités de 1904 et de 1907. 

D’une part, même si ces traités avaient été signés par la France, celle-ci agissait au nom du Cambodge, qui n’avait jamais cessé d’exister, car il n’était pas une colonie, mais un protectorat. D’autre part, même si ces traités avaient été conclus sous la contrainte de la force navale française, ils restaient valables, car à cette époque, la violence n’était pas contraire au droit.

Des manifestants brandissent des pancartes devant l’ambassade du Cambodge à Bangkok, à la suite de la blessure par des mines terrestres de deux soldats lors d’une patrouille frontalière dans la région de Chong Bok.
Hun Sen, au centre, salue des personnes qui ont fui la zone frontalière de la province de Preah Vihear, près de la frontière entre le Cambodge et la Thaïlande, au Cambodge, le jeudi 26 juin 2025.

5 — Quelles voies de sortie ?

Les problèmes liés aux frontières doivent être considérés comme des questions techniques (tracés, cartographie de référence, accords antérieurs, bonnes pratiques et précédents de règlement) et traités comme tels, avec l’appui d’experts 10. Il est donc essentiel de les dépolitiser, car les opinions publiques sont binaires et rétives à la complexité sur ces sujets.

Ce nouveau recours à la CIJ marque un changement par rapport à la position traditionnelle du Cambodge, qui privilégie une politique de négociation pacifique fondée sur le principe de l’uti possidetis juris, afin d’éviter le recours à la CIJ, le cas de Preah Vihar constituant une exception. Il avait convenu que l’arrêt de la CIJ en 2013 constituait un cas d’espèce et que son application avait été reportée d’un commun accord, en raison de la situation politique en Thaïlande. Sur le fond, il faudra bien que les deux pays négocient même après un éventuel arrêt de la CIJ qui serait défavorable pour la Thaïlande.

Bangkok peut mettre en avant la nécessité d’une relation apaisée et rappeler que, en tant que membres de l’ASEAN, les deux pays sont liés par un traité d’amitié et de coopération les engageant à régler pacifiquement leur conflit. La Malaisie, qui assurera la présidence de l’ASEAN en 2025, pourrait être impliquée, même si le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures est une règle.

Les mécanismes existants pour les négociations bilatérales devraient permettre de trouver un compromis plus fiable. En vertu d’un protocole d’accord de 2000, la Commission mixte des frontières est chargée de procéder conjointement au relevé et à la délimitation de la frontière terrestre. Cette commission, qui est censée se réunir au moins une fois par an, mais qui ne l’a pas fait depuis 2012, s’est réunie à Phnom Penh les 14 et 15 juin. Toutefois, le Cambodge a insisté pour ne pas discuter des quatre zones litigieuses figurant dans sa requête devant la Cour internationale de justice (CIJ). L’organe a toutefois prévu une réunion extraordinaire en septembre 11.

Au-delà de l’utilisation optimale de cette commission, les deux parties doivent saisir toutes les occasions d’apaiser les tensions et d’éviter les malentendus. Le Comité général des frontières, créé en 1995 pour permettre des échanges ministériels sur la sécurité des frontières, et le Comité régional des frontières, chargé de faciliter les discussions entre les commandants militaires locaux, devraient se réunir aussi souvent que nécessaire. La réunion du Comité régional des frontières, initialement prévue les 27 et 28 juin, a été annulée.

Un premier geste de bonne volonté de la part de Bangkok serait d’arrêter la construction d’une copie d’Angkor Wat dans la province de Buri Ram, frontalière du Cambodge.

Un autre geste serait de rouvrir les quinze postes frontaliers, lieux d’un intense commerce licite (5 milliards de dollars en 2024, avec un excédent de 3 milliards pour la Thaïlande) ; on compte environ un demi-million de travailleurs cambodgiens en Thaïlande (plus des saisonniers), qui souhaitent rester sur place malgré les appels d’Hun Sen à rentrer.Pour l’instant, il est impératif que les deux parties s’abstiennent de toute action ou déploiement susceptible d’entraîner une escalade et des affrontements militaires imprévus. Les risques de nouveaux combats, qui seraient préjudiciables aux deux parties, sont évidents et devraient inciter les décideurs à rétablir le statu quo ante à la frontière. Les zones contestées sont petites et sans importance, si ce n’est qu’elles constituent des symboles sacrés de la patrie dans l’imaginaire nationaliste des deux pays 12.

Sources
  1. ici.
  2. Cambodia, Thailand start talks over border issues after recent skirmish, Xinhua, 14 juin 2025.
  3. Cambodia to file complaint with UN court over border disputes with Thailand : PM, Xinhua, 14 juin 2025.
  4. Cfr. Manet meets with international legal expert, The Nation Thailand, 1er juillet 2025.
  5. Jean-Marc Sorel returns to advise Cambodia in new legal battle at The Hague, Khmer Times, 3 juillet 2025.
  6. Thailand’s position in response to Cambodia’s submission on 15 June 2025 of a letter to the International Court of Justice (ICJ) related to the Emerald Triangle (Mom Bei), Ta Moan Thom, Ta Moan Tauch and Ta Krabei temples, Ministère des Affaires étrangères du Royaume de Thaïlande, 16 juin 2025.
  7. persistent objector permet à un État souverain de se soustraire à une règle de droit coutumier en formation, à condition qu’il s’y oppose de manière claire, constante et dès l’origine.
  8. Border Dispute with Cambodia Sparks Political Disarray in Thailand, Crisis Group, 1er juillet 2025). Une autre source est le journaliste spécialiste en géopolitique régionale, Kavi Chongkittavorn, qui fait autorité dans ses analyses publiées dans le Bangkok Post. Enfin, l’Institut français de recherche sur l’Asie du Sud-Est contemporaine (IRASEC), situé à Bangkok, dispose d’une réelle expertise régionale. Du côté cambodgien, il ne fait aucun doute que l’appui de Jean-Marc Sorel, juriste français confirmé, est jugé décisif pour porter à nouveau le contentieux devant la CIJ. Il s’entretient en langue française avec le premier ministre Hun Manet. L’actuel ambassadeur de France à Bangkok, Jean-Claude Poimboeuf, a servi comme ambassadeur au Cambodge (2014-2017). Il connaît donc les deux approches. Notons que les relations bilatérales franco-cambodgiennes sont de très bonne qualité (plusieurs visites officielles en France, projet confirmé de venue du Président français au Cambodge fin 2026 pour le XXème sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie). De son côté, la Thaïlande entend se rapprocher des instances francophones, notamment via l’Association parlementaire de la francophonie.
  9. Border Dispute with Cambodia Sparks Political Disarray in Thailand, Crisis Group, 1er juillet.
  10. id.
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27.07.2025 à 08:05

Qui est Zhang Youxia, le général susceptible de jouer un rôle central dans le cas d’une succession à Xi Jinping ?

Ramona Bloj

Si Xi Jinping semble conserver un contrôle absolu sur l’appareil étatique, plusieurs signes suggèrent qu’il n’est pas pour autant immunisé face toute contestation.

Dans le scénario d’un retrait contraint de Xi du pouvoir, c’est l’armée qui pourrait jouer un rôle central, et notamment le premier vice-président de la Commission militaire centrale, le général Zhang Youxia.

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Texte intégral (1219 mots)

Afin de « tester » la popularité du président chinois et tenter de quantifier une éventuelle perte d’influence sur les structures du Parti, le China Media Project (CMP) a comparé début juillet le nombre de mentions du nom du président dans les premières pages du Quotidien du peuple, principal organe du PCC.

  • L’analyse du CMP révèle que Xi apparaît moins souvent depuis le début de l’année qu’en 2023 — une baisse de 14 % sur la période janvier-juillet 1.
  • Les auteurs de l’étude se refusent toutefois à tirer des conclusions sur la seule base de ces chiffres, soulignant que l’écart avec les autres cadres du Parti demeure conséquent.
  • Le nom du Premier ministre Li Qiang est apparu à 99 reprises depuis janvier, le président de la Conférence consultative politique Wang Huning 57 fois, et le premier vice-Premier ministre du Conseil des affaires de l’État, Ding Xuexiang, 55.
  • Xi, quant à lui, figurait dans 323 premières pages du journal.

Le nom d’un général largement inconnu hors de Chine, Zhang Youxia, n’apparaît pas dans l’étude du CMP. Pour cause, il est une figure bien plus discrète à l’intérieur même de la vie politique chinoise. Zhang est toutefois susceptible de jouer à l’avenir un rôle central si les équilibres politiques venaient à bouger — et si Xi venait à perdre sa place de « noyau dur » (核心) au sein de la direction du Parti —, en amont du 21e congrès national du PCC, prévu pour 2027.

  • Zhang Youxia est un militaire de carrière. Né en 1950 à Pékin, il rejoint l’Armée populaire de libération (APL) dès ses 18 ans, puis monte progressivement les échelons avant d’intégrer le Bureau politique du Parti en 2017 ainsi que la Commission militaire centrale (CMC).
  • Fils du général Zhang Zongxun, ami proche de Xi Zhongxun, père de Xi Jinping, il a pris part à la guerre sino-vietnamienne de 1979, ce qui en fait l’un des rares généraux en poste disposant d’une expérience de terrain, perçue comme un rare atout par le dirigeant chinois.
  • Depuis 2022, Zhang Youxia est le membre le plus âgé du Politburo suite à la suppression par Xi des normes relatives aux limites d’âge. Seuls trois de ses membres âgés de plus de 68 ans ont pu continuer à exercer leurs fonctions à l’issue du 20e Congrès : Zhang, le ministre des Affaires étrangères Wang Yi et Xi Jinping.
  • Âgé de 75 ans, Zhang est de trois ans l’aîné de Xi.

De nombreux analystes avaient été surpris du maintien de Zhang à son poste à l’issue du dernier congrès. Pour certains, sa reconduction signalait la mise en avant par le dirigeant chinois de deux priorités : une loyauté sans faille au sein des plus hautes instances de l’État, et une préparation au combat en vue d’une prise de contrôle par la force de Taïwan 2. Xi a fixé 2027 comme année au cours de laquelle l’armée chinoise devait devenir une force « moderne », afin de marquer le centenaire de la fondation de l’APL. 

  • Zhang a survécu aux purges menées ces dernières années au sein de l’APL. Le mois dernier, le vice-amiral Li Hanjun, chef d’état-major de la marine, ainsi que le directeur du département du travail politique de la CMC, Miao Hua, ont été démis de leurs fonctions.
  • Fin mars, c’est le numéro deux de l’APL, le général He Weidong, qui a mystérieusement cessé d’apparaître lors de réunions et d’événements officiels. En novembre, une enquête a été ouverte sur le ministre de la Défense Dong Jun.
  • Depuis 2023, 45 responsables de l’armée ainsi que du complexe militaro-industriel ont été démis de leurs fonctions, parmi lesquels 17 commandants opérationnels, 8 responsables de la logistique et des achats et 9 commissaires politiques 3.

Zhang Youxia est impliqué au plus haut niveau dans les efforts de modernisation de l’APL, les relations bilatérales avec la Russie mais également les investissements menés dans le cadre des Nouvelles routes de la soie 4. Comme le note le chercheur à l’Asia Society Policy Neil Thomas : « Le parti commande les armes, mais tout successeur devra au moins obtenir l’acceptation, voire le soutien, de la direction de l’APL […] En cas de crise de succession, Zhang Youxia pourrait tenter de soutenir un fidèle de Xi prêt à apaiser les tensions politiques avec l’armée » 5.

Sources
  1. Visualizing Power in China’s Press », China Media Project, 10 juillet 2025.
  2. Xi Jinping wants ready soldiers and loyal generals », The Economist, 3 novembre 2022.
  3. China Brief Volume 25, Issue 14, The Jamestown Foundation, 26 juillet 2025.
  4. Three Warriors Who Made America’s Enemies So Fearsome », Bloomberg, 23 octobre 2021.
  5. China’s unspoken question : who will succeed Xi Jinping ? », Financial Times, 17 février 2025.
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