20.10.2025 à 13:26
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« Si quelque chose est surprenant, c'est que cela n'arrive pas tous les jours. »
- 20 octobre / Avec une grosse photo en haut, Positions, 2Ce bref texte de nos camarades des éditions Tabor, sises dans la Val Susa, rend hommage à la famille Ramponi, encore inconnue du grand public en France. En effet, leur geste exemplaire a fait l'objet d'un silence médiatique presque total dans le pays où des gendarmes ont pu assassiner en toute impunité sur ses terres un paysan du nom de Jérôme Laronze, voici trois ans. Des fois que l'acte de vengeance de la famille Ramponi donne des idées à certains de ces agriculteurs pris à la gorge tant par les banques que par la PAC...
Une traduction d'Alèssi Dell'Umbria.
Il est trois heures du matin, le 15 octobre, lorsqu'à Castel d'Azzano, au sud de Vérone, des dizaines de carabiniers font irruption dans une ferme habitée par deux frères et une sœur. Une histoire de dettes et de saisies. Déjà expropriés de leurs terres, c'est maintenant au tour de leur maison. Mais les trois ont rempli la maison de gaz et, comme ils l'avaient promis, ils font tout sauter. Le grondement, les flammes, l'effondrement. Résultat : trois carabiniers morts et une trentaine de blessés. La sœur est également gravement blessée. Tous les trois sont arrêtés. Les gros titres : « Le plus grand massacre de carabiniers depuis Nassiriya en Irak ».
Franco Ramponi est né en 1960, Dino en 1962, Maria Luisa en 1965. Écoutez ce qu'en disent les journaux, peu importe lesquels, ils sont tous pareils : « Ils étaient descendus de la montagne et ils étaient étranges. Comme leurs parents. » « Les champs à cultiver, les vaches à traire à l'aube. C'est là que s'arrêtait le monde de ces frères et sœurs, encore plus unis après la mort de leur père et de leur mère. » « Une vie misérable », répètent-ils ici. Ceux qui vivent à Castel d'Azzano affirment que Franco, Dino et Maria Luisa n'allaient même pas faire leurs courses au village. « Ils n'avaient jamais demandé d'aide à la municipalité, raconte la maire, et après l'éventuelle expulsion, nous avions proposé de les héberger dans un hôtel ou une chambre d'hôtes. Ils ont tout refusé ». Voici le ton des commentateurs : « Un aperçu de la vie paysanne qui a survécu à la modernité et qui a conduit à cette tragédie ». « Un attachement à leur maison et à leur terre qui était devenu une obsession, une pathologie, au point de les conduire à cet acte extrême ». Vous avez bien entendu, défendre sa maison et sa terre serait une « pathologie » aux yeux du journaliste qui, imaginons-nous, descend tous les jours de son petit appartement milanais pour faire ses courses. Alors que ces montagnards déracinés et déplacés dans la plaine « ne voulaient pas aller dans un B&B » et « n'allaient même pas faire leurs courses » !!! Voilà le mépris atavique que le citoyen bourgeois moderne et sophistiqué nourrit pour le paysan, pire encore s'il est montagnard, rustre, grossier, ignorant, sale parce que lié à la terre et aux animaux. Un mépris anthropologique pour ces « survivants de la modernité », qui émerge dans toute sa virulence lorsque la colère paysanne explose, mais qui reste sous-jacent tant que le paysan reste sage et silencieux, travaillant dur, la tête baissée, pour remplir les rayons de leurs maudits supermarchés ou petites boutiques bio.
Les détails juridiques à l'origine des saisies sont peu intéressants, les raisons sont sociales, et ceux qui vivent dans les zones montagneuses et rurales savent bien qu'elles n'ont rien d'exceptionnel. Au contraire. Les familles d'agriculteurs, les exploitations agricoles, les petites entreprises artisanales étranglées par les dettes et réduites, tant qu'elles le peuvent, à travailler pour enrichir les banques, c'est presque la norme. C'est là la véritable tragédie, outre le fait que trois pauvres gens passeront – nous le craignons – le reste de leurs jours en prison. La seule chose exceptionnelle, c'est que ces frères ont eu le courage, la folie lucide si vous voulez, de résister à tout prix, au lieu de se suicider en se pendant dans leur garage ou en se laissant mourir à petit feu à coups de psychotropes et de télévision (comme devraient le faire tous les citoyens honnêtes et respectueux de la loi, n'est-ce pas ?). Et ils ont même eu l'audace – ces rustres – de tenir parole : tant sur le pacte de ne jamais abandonner qu'ils avaient apparemment conclu entre eux, que sur la promesse faite publiquement lors de la précédente tentative d'expulsion : « Si vous revenez, on fait tout sauter ». Boum. Aussitôt dit, aussitôt fait. Quelle surprise, n'est-ce pas ? Que quelqu'un, à l'ère moderne, puisse encore accorder de la valeur à la parole donnée, est manifestement quelque chose d'incroyable pour nos contemporains (c'est certainement le cas, ou plutôt c'était le cas, pour ces carabiniers « très expérimentés » qui sont allés se faire écraser sous les décombres de la ferme). En ce sens, il s'agit vraiment d'un « aperçu de la vie paysanne qui a survécu à la modernité », car dans le monde paysan, la parole donnée était sacrée. Alors qu'aujourd'hui, elle ne vaut plus rien, seuls les insignes et la paperasse ont de la valeur dans la modernité. Cette modernité qui, pour s'imposer et nous amener là où nous en sommes, a exproprié, déraciné, humilié et désintégré tout tissu communautaire, tout réseau de voisinage, tout sentiment de solidarité humaine. Et qui a laissé tout le monde isolé et désarmé face à un pouvoir impitoyable, implacable, bureaucratique, inhumain. Et qui aujourd'hui s'étonne et verse des larmes de crocodile quand quelqu'un estime n'avoir plus rien à perdre et n'éprouve aucune pitié pour ces héroïques serviteurs de l'État qui viennent dans l'obscurité de la nuit enfoncer sa porte pour lui prendre sa maison après lui avoir pris tout le reste. Regardez un peu !
Allez vous faire foutre. Si quelque chose est surprenant, c'est que cela n'arrive pas tous les jours.
TABOR, 17 Octobre 2025.
20.10.2025 à 13:25
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Notice : La plupart de ces peuples ont vécu en marge de la mondialisation, soit bien avant, soit bien après, ailleurs, à côté. Peuples incomplets, partiels, fragmentaires. Leur organisation se caractérise souvent par un trait singulier qu'on ne saisit pas toujours au premier regard. Le travail ethnographique consiste à saisir ce trait dont tout découle.
Les guerres passées qui ont opposé les Elbènes et les Omberliths ont été si terribles qu'aucun de ces deux peuples, encore traumatisés par les violences inouïes qu'ils se sont mutuellement infligées, n'en reconnaît l'existence : elles ne sont ni racontées, ni même nommées. Le déni est si puissant qu'il va jusqu'à laisser les enfants des deux peuples ennemis se fréquenter. Quand une jeune Elbène et un jeune Omberlith se rencontrent et se rapprochent, irrésistiblement attirés l'un par l'autre, personne ne les dissuade, mais les fiancés sentent une tension muette et palpable autour d'eux, dont leur amour se nourrit. Le mariage est célébré dans un silence orageux, les jeunes mariés étant seuls à danser sous les yeux de leurs familles accablées, dans une lenteur de valse tragique. L'enfant qui naît de ce mariage ne parlera jamais.
Dénués de défense immunitaire, les Rogues ont toujours eu une santé fragile. Mais depuis la dernière pandémie de dracémie noire, les choses se sont considérablement aggravées : le rapport, dans la population, des individus malades et des individus sains s'est inversé, à tel point qu'on traite désormais les négatifs, devenus minoritaires, comme de pénibles anomalies. Il est autorisé de leur cracher dessus, ou de chercher à les infecter par les moyens les plus abjects. Pour échapper à ce sort, les négatifs ne sortent qu'en contrefaisant la conduite des malades, toussent, boîtent, se tordent. Mais l'absence des taches noires sur leur peau, typiques de la dracémie, finit tôt ou tard par les démasquer.
Vous avez beau être quelqu'un de doux et de civilisé, un bon mari, un bon père, une épouse modèle, si vous croisez un Négranglot, vous aurez naturellement envie de passer vos nerfs sur lui, comme tout le monde. Tout en eux y invite. Ils ont cette moue d'abattement lippue, cette posture voûtée, les épaules tombantes, qui excite la main à leur donner au passage une tape derrière la tête. Ils ne seront pas surpris. Jamais une plainte chez un Négranglot. Les femmes de nombreux peuples les pincent, les griffent, les lacèrent, trouvant en eux un prétexte pour arborer ces ongles longs, affutés et durcis, qu'elles vernissent de rose ou de violet. Si même vous riez joyeusement en les frappant, ils pourront bien rire avec vous. Ne se défileront pas. Ils ont depuis trop longtemps intégré leur fonction de souffre-douleur : depuis tant de générations, le harcèlement leur est devenu si naturel qu'ils semblent tout faire pour recevoir les coups. Ils en rajoutent dans leur insupportable moue, qui prendra parfois l'arrogance idiote du chameau, mariée à la tristesse du Saint-Bernard. Des peuples ennemis ont fraternisé grâce à leur persécution commune des Négranglots. Dans les grandes occasions diplomatiques, on en amène toujours deux ou trois pour sceller les pactes de paix. Si vous sentez votre poing se serrer à proximité d'un Négranglot, surtout ne retenez pas votre geste. Ce serait très mal vu. Les représentants des autres peuples vous soupçonneraient aussitôt de vouloir conserver contre eux cette agressivité que vous n'exprimez pas contre un Négranglot. La paix est très fragile. Elle est l'honneur des Négranglots.
Peuple inapparent, diasporique, caméléon. Les Hidounas vivent disséminés parmi les autres peuples dont ils miment les manières. Ils contrefont à la perfection les Kèvres, les Zaans ou les Pfulats. Jamais un Hidouna ne doit se démasquer : si vous croyez en tenir un, il niera. Il préférera mourir plutôt que de s'avouer Hidouna. Jamais il ne doit se réunir avec un autre Hidouna, au risque de mettre en danger leur communauté. C'est précisément par leur isolement qu'ils sont liés entre eux. Ne se parlent jamais. Les Hidounas ont depuis si longtemps pris l'habitude de se cacher et de se travestir qu'ils n'ont plus aucune identité propre. Leur seule identité réside en fait dans ce déguisement même, à quoi ils s'accrochent comme à un semblant de sens.
On a souvent remarqué que, chez les Urchols, l'acte sexuel paraît extrêmement brutal : les partenaires sur le lit se reniflent, se jaugent, se tournent autour comme deux lutteurs avant le combat. Ils se poussent, s'esquivent, se rusent l'un l'autre. C'est à qui va prendre l'autre, sans se faire surprendre. Ce comportement s'explique. C'est en effet pendant l'acte sexuel que se fixent, temporairement, les caractères mâle et femelle entre les partenaires, en fonction de leur rapport de forces. Le gynospire, organe labile et capricieux, se déploie pendant la phase nuptiale et circule librement, à une vitesse sanguine, entre les deux corps en lutte. Peu à peu, il entre en turgescence, ralentit, se loge là où un corps s'invagine, se fixe chez celui qui se laisse prendre au plaisir. L'Urchol fécondé portera l'enfant. L'autre peut respirer, jusqu'à la prochaine fois.
La graisse d'Omphale est leur denrée de base. Les Dréhpals s'en servent autant pour l'alimentation que pour les travaux manuels. On bénit et fortifie les enfants en les frictionnant de graisse à la naissance. Pour sa nuit de noces, l'épouse n'apparaît nue à l'époux que si elle en est luisante de la tête aux pieds. Enhardie alors, phosphorescente, chevauchante. Raffinée, la graisse est incolore. Elle sent un mélange de musc et de châtaigne. Les Dréhpals savent produire la graisse par des techniques rigoureuses. Autant pour des raisons sanitaires que religieuses, la graisse doit être extraite sur la chair vive. L'Omphale mort pénétrant par vos pores vous ferait tourner le sang comme du lait. Les Dréhpals ne peuvent rien faire sans la précieuse graisse. Hypersensibles, ils succombent à tout autre aliment s'il n'est pas préparé avec elle, conservé en elle. On ne s'étonnera pas, par conséquent, que les Dréhpals élèvent les derniers Omphales : on ne peut encore en trouver que dans leurs réserves naturelles et dans leurs parcs de production. Les Omphales, dont la reproduction est rigoureusement contrôlée, sont d'éternels adolescents. Immatures, rampants. S'attachent à leurs maîtres. Au parc, un enfant Dréhpal joue volontiers avec un Omphale qui lui devient fidèle. L'enfant et l'Omphale s'entendent comme chiots fous, batifolent, s'embrassent. C'est bon pour la graisse future. Un beau matin, on fait écorcher son Omphale par l'enfant. L'enfant pleure avec son Omphale en lui plantant le couteau dans l'aorte, la main guidée par son père. C'est ainsi qu'un Dréhpal grandit. Il prend conscience de la vraie valeur des choses. Puis on plonge l'enfant dans une baignoire remplie de la graisse de sa victime sacrifiée, dont il ressort adulte. À ceux qui voudraient voir aboli ce qu'ils appellent un esclavage, les Dréhpals répondent placidement que sans leur culture ancestrale ininterrompue, les Omphales auraient disparu depuis longtemps.
On ne sait s'il faut attribuer à l'histoire tourmentée de leurs ancêtres la propension des femmes Ull à ululer et à pousser leurs cris terribles pendant l'acte sexuel. Jadis envahis par les Djilmans féroces, les Ull mâles ont tous été massacrés, et leurs femmes forcées à toutes les turpitudes, qui furent bientôt couvertes par l'hypocrisie du mariage. Interdites de décision et presque de parole dans l'espace public, les survivantes asservies ont investi l'espace nuptial, tournant la seule vocifération qu'on leur autorisait. Les époux Djilmans, flattés par cette expression apparente de leur force virile, ont laissé prendre au ululement des proportions extravagantes. On dit que, à l'époque, les Ull entraient en contact par cette langue gutturale dont les pointes suraiguës traversent allègrement les murs, et qu'elles se communiquaient entre elles des messages codés, pour se manifester leur solidarité contre leurs infects époux. La ruse s'est transmise de mère en fille. Le chant sexuel de la femme Ull ressemble aujourd'hui encore, alternativement, à une plainte d'agonie et à un rugissement de colère. Mais les descendantes Ull n'ont cependant plus à souffrir les outrages que connurent leurs ancêtres. Elles sont au contraire brillantes et volubiles, responsables, directrices, banquières, très insérées dans la nouvelle société. Leur ululement n'est plus compris de personne, même pas d'elles-mêmes, qui en usent cependant encore comme d'un charme. Les imitatrices des Ull sont nombreuses, mais se démasquent d'elles-mêmes par le ridicule de leur contrefaçon. Quand quelqu'un a la chance de connaître une véritable femme Ull, il ne peut pas se tromper.
Les Omouks sont les esclaves des Azuri. On a oublié son origine, mais l'esclavage séculaire des Omouks a remarquablement survécu à l'ère du droit universel, en mimant son apparence. Les Azuri sont d'une visible politesse, pleins d'une sollicitude feinte envers les Omouks. Ils les entretiennent dans l'illusion de leur égalité, en les berçant habilement des signes d'une considération qu'ils n'éprouvent pas. Les Omouks, flattés, se laissent ainsi duper. Ils prennent de grands airs pour parler de choses futiles, arborent des manières exagérément distinguées, parce qu'ils croient ainsi plaire aux Azuri. Ils voudraient se fondre parmi eux, mais ils les imitent pourtant très mal. Les Azuri se gardent bien de souligner le ridicule de leurs esclaves. Ils en tirent d'eux davantage encore de profit et de plaisir, leur demandant toutes sortes de « services d'amis » sur un ton de connivence, leur « empruntant » sans cesse leurs femmes pour la nuit, sous prétexte de vouloir les soulager de leurs charges, leur faisant souffrir toutes sortes de blessures pour en être eux-mêmes épargnés. Les Omouks, de leur côté, ne demandent rien. Ils se font croire à leur consentement bien qu'ils n'aient en réalité aucun pouvoir effectif de résister à leur unilatérale servitude. L'illusion suffit à assurer leur bonheur, à moins que celui-ci ne soit encore qu'un leurre, tant les Omouks sont devenus experts en duperie et en dissimulation. Mais les Azuri, trop confiants par nature, sont tellement sûrs d'avoir trouvé la formule du parfait esclavage, qu'ils ne se méfient pas.
Les Agnoli sont le peuple le plus en guerre qui soit : ils ouvrent des conflits sans arrêt, toujours sur plusieurs fronts simultanés. Mais ils mènent toutes leurs guerres hors de chez eux, loin de leur territoire protégé, de telle sorte que la population Agnoli, haïe par tous ceux qui ont dû souffrir les invasions et les exactions de son armée, se croit pourtant la plus pacifique et la plus innocente au monde. Les Agnoli sont vraiment insupportables.
Quand deux Saphorites s'entendent pour essayer de s'accoupler, il n'est pas dit qu'ils y parviennent. La phase d'accouplement proprement dite, fort brève, est en effet précédée par une phase préliminaire étendue, pendant laquelle les partenaires doivent se synchroniser par un rite respiratoire rigoureux. Chacun enfonce sa spire dans l'autre, et il faut alors parvenir à respirer en spirale, non pas l'un avec l'autre, mais l'un dans l'autre. Si l'un des deux partenaires a le réflexe ou l'impatience de sortir son ténacule avant que ne soit composée la forme complète du rythme en spirale, ça ne va pas. Tous les autres Saphorites sont alertés par le cri typique de la victime. Ils s'attroupent, encerclent le coupable. Ils font tourbillonner leurs spires, s'en servant pour détruire son ténacule, qui mettra plusieurs mois à repousser. (Sans ténacule, sa spire restera inerte, inutile.) Par contre, si les partenaires atteignent le seuil rythmique requis pour l'accouplement, ils précipitent ensuite la phase d'accouplement, qui ne les intéresse plus guère. Elle leur semble en effet bien fade au regard du stade de consentement rythmique mutuel qu'il viennent de franchir au prix d'une si longue concentration. Cet état constitue l'essentiel de l'accomplissement sexuel chez les Saphorites.
Frédéric Bisson
20.10.2025 à 13:25
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En médecine, la psychose s'explique comme un excès de dopamine, un esprit surexcité par ses propres signaux. Mais si le même déséquilibre s'appliquait à la culture ? Nous vivons dans une société saturée de dopamine.
Le « normal » n'est peut-être que celui qui partage la psychose du plus grand nombre. Si l'individu psychotique croit que le monde lui parle directement, notre époque semble marquée par le même mécanisme, mais à l'échelle collective. Jacques-Alain Miller parle de la psychose ordinaire, cette psychose devenue banale. Autrefois, la psychose représentait une rupture exceptionnelle dans le rapport du sujet à la réalité. Aujourd'hui, nous vivons dans un monde où tout parle, tout le temps : écrans, publicités, notifications, voix, algorithmes. Chaque message exige une réponse, chaque image appelle une réaction. Le monde extérieur est devenu un cri continu pour capter notre attention.
Cette surcommunication ne produit pas plus de sens, mais moins. Quand tout doit signifier quelque chose, le sens lui-même perd son poids. Comme Narcisse, nous voyons notre reflet partout ; comme Écho, nous ne répondons que par répétition, un dialogue sans distance et sans silence. Le langage n'est plus un médium pour comprendre, mais un écho de lui-même, un miroir où l'homme cherche désespérément un éclat de réel. Dans cette cacophonie de signes et de stimuli, le symbolique perd sa force d'organisation. L'homme reste seul face à son reflet, privé d'un langage capable de le porter.
Ainsi, la société commence à ressembler à la structure psychotique. Elle manque d'une référence commune, mais surproduit du sens pour combler le vide. Le conspirationnisme, le narcissisme, les algorithmes autoréférentiels et l'économie dopaminique des réseaux sociaux convergent vers la même tentative : reconstruire un ordre perdu. Là où le psychotique entendait des voix, nous recevons des notifications. Là où il voyait des signes dans la rue, nous déchiffrons des motifs sur nos écrans.
Nous vivons tous avec ce sentiment diffus d'être observés, manipulés, à la fois invisibles et surexposés, comme si le monde en savait plus sur nous que nous-mêmes. Et dans ce malaise se glisse aussi le désir : être vus, mesurés, reconnus. Nous cherchons le Grand Autre que nous avons détruit.
La psychose de notre temps n'apparaît donc pas comme une catastrophe individuelle, mais comme un symptôme collectif. Une société qui parle sans écouter, qui communique sans signifier, qui se croit éveillée alors qu'elle rêve les yeux ouverts.
Le philosophe coréen Byung-Chul Han décrit l'ère numérique comme une époque où l'être humain a perdu sa cohérence intérieure. Icare, fils de Dédale, s'enfuit du labyrinthe sur des ailes de cire et de plumes, mais s'éleva trop haut et tomba lorsque le soleil fit fondre ses ailes. Le mythe rappelle la condition de l'homme moderne, qui perd la mesure dans sa propre ascension, lorsque la lumière devient ivresse et la hauteur, chute.
Dans la lumière constante des écrans et des notifications, il n'existe plus d'espace pour le silence, la réflexion ou la lenteur. Tout est visible, tout est immédiat, tout doit être communiqué. Dans cette réalité surexposée, le moi se fragmente et se dissout en instants d'attention sans durée. Han appelle cela la schizophrénie numérique, une condition culturelle où la pensée n'a plus le temps de se penser elle-même, où l'expérience ne devient jamais expérience parce que tout doit être partagé aussitôt. L'homme vit à la surface de lui-même, constamment actif, mais privé de vie intérieure.
À mes yeux, la paranoïa n'est pas seulement une forme de folie, mais une tentative de sauver le moi de la désintégration. Ce que l'on appelle paranoïa n'est pas un vide de sens, mais un travail désespéré de production de sens.
Chez un patient X, on peut observer cela clairement. Il dirige sa colère contre un autre homme qu'il perçoit comme menaçant ou moqueur, mais cet autre n'est en réalité qu'une image de lui-même. Il réagit contre la part de lui qu'il sent jugée, contre sa fierté, sa honte, sa faiblesse, son insuffisance. Ses gestes deviennent symboliques, comme s'il tentait de détruire un reflet qu'il ne supporte pas de voir. La dimension paranoïaque apparaît ici comme une tentative dramatique de restaurer un moi en voie d'effondrement.
Chez le paranoïaque, il se produit un déplacement : l'intérieur est projeté vers l'extérieur. Tout ce qui ne peut être contenu dans le moi devient un « quelqu'un là-bas » qui contrôle, observe, se moque ou parle de moi. L'expérience paranoïaque naît comme l'écho de cette projection :
Ils parlent de moi.
Ils rient de moi.
Tout ce qui arrive a quelque chose à voir avec moi.
Cela peut sembler irrationnel, mais c'est en réalité l'effet d'un mécanisme profondément humain. Quand le lien avec l'ordre symbolique, le langage, la communauté, l'Autre garant du sens, se rompt, le monde commence à parler. Il parle directement, sans intervalle, sans filtre symbolique. C'est pourquoi le psychotique entend des voix ou voit des signes partout. Ce n'est pas qu'il interprète mal la réalité, mais que la réalité elle-même a perdu son échafaudage de sens.
La paranoïa n'existe pas seulement chez l'individu. Elle vit aussi dans la culture, et c'est peut-être là qu'elle se manifeste le plus clairement. Une société devient paranoïaque lorsqu'elle perd foi en son autorité symbolique, en Dieu, en la nation, en la vérité. Quand il n'existe plus de référence commune, tout devient affaire de soupçon, de contrôle et d'intentions cachées. Le complotisme et la mentalité du « tous contre tous » surgissent quand le langage et la confiance s'effondrent.
En Europe, cette nouvelle paranoïa s'étend. La France prolonge la vidéosurveillance algorithmique jusqu'en 2027, la Norvège adopte une loi sur la sécurité numérique renforçant le contrôle de l'État, et les drones dans les aéroports suscitent la peur de menaces invisibles. Le continent se protège de tout et finit par se surveiller lui-même. Le soupçon n'est plus l'exception, mais le système : une société qui se protège de tout, jusqu'à ne plus se protéger que d'elle-même.
Aux États-Unis, le même schéma se déploie, mais de manière plus extrême. Le soupçon est devenu une part de l'identité nationale, une culture fondée sur la surveillance, la polarisation et la guerre permanente contre un ennemi invisible. L'État collecte les données de ses propres citoyens au nom de la sécurité, tandis que la population répond par des théories du complot, le culte des armes et une méfiance profonde envers les institutions. L'espace politique est transformé en salle des miroirs où vérité et mensonge circulent avec le même poids. L'Amérique se protège de tout, mais à la fin, surtout d'elle-même.
Franco « Bifo » Berardi montre comment le capital a transformé la vie psychique elle-même en matière première. Le psychocapitalisme n'est pas seulement un système économique, mais un principe. Ce qui relevait autrefois de l'expérience intérieure, de l'attention, du désir et des émotions est désormais intégré dans la logique du marché. L'économie ne produit plus seulement des biens, mais aussi des humeurs, des rythmes et des affects. Le but du capital n'est pas de satisfaire des besoins, mais de maintenir le système nerveux en mouvement. La psychose n'y apparaît donc pas comme une rupture du système, mais comme son moteur : une circulation surchauffée de sens, de dopamine et de communication qui doit sans cesse se renouveler. En ce sens, la psychose n'est pas une erreur de l'économie, mais sa formule : une surchauffe calculée de la vie intérieure de l'homme, garantissant une croissance continue.
Dans L'Anti-Œdipe, Deleuze et Guattari décrivent le capitalisme comme une machine schizophrénique. Il détruit toutes les structures, toutes les lois, toutes les frontières, pour ensuite les reproduire sous forme de marchandises. C'est là que naît le paradoxe : la société craint la psychose, mais l'imite dans son propre rythme. La production de sens, de biens, d'identité et d'information est devenue ininterrompue, sans limite, euphorique. L'état schizophrénique — la dissolution de l'identité, le flux du désir, la perte du centre — n'est plus l'exception, mais la norme. Chez Deleuze et Guattari, la schizophrénie devient la dernière liberté de l'homme, celle qui échappe à toute organisation et crée de nouvelles connexions entre tout ce qui a été brisé.
La folie est aussi un regard social et historique. Dans L'Histoire de la folie, Foucault écrit que le fou est défini par celui qui détient le langage. Chaque époque possède sa propre forme de raison, et donc sa propre forme de folie. Ce ne sont plus l'Église ou l'asile qui séparent le rationnel de l'irrationnel, mais la technologie et l'économie. Ceux qui ne produisent pas, ne communiquent pas, ne performent pas, sont silencieusement définis comme malades. La psychose devient alors la ligne de partage, celle qui montre qui ne s'intègre pas dans la machine rationnelle du capitalisme. Dans une société qui se croit éclairée, la folie persiste encore, mais sous une forme plus sophistiquée.
Autrefois, l'homme était prisonnier de la culpabilité et de l'interdit. Aujourd'hui, il est prisonnier de l'illimitation, perdu dans un océan de choix, d'exigences et de responsabilités. Nous sommes libres d'être tout, mais nous n'en avons plus la force. L'effondrement ne se manifeste plus par un cri, mais par un silence, un effacement lent du rythme humain, une hyperfonction déguisée en réussite. Comme l'a écrit Alain Ehrenberg, ce n'est plus l'époque de la névrose, mais celle de la dépression. L'homme se brise non pas parce qu'il est empêché, mais parce que plus rien ne l'empêche.
Mark Fisher décrit le même mécanisme à l'échelle sociale. Il appelle cette condition le réalisme capitaliste, la croyance qu'aucune autre réalité n'est possible. Nous savons que le système nous détruit, mais nous ne parvenons pas à imaginer quoi que ce soit en dehors de lui. Les jeunes ne souffrent plus de culpabilité, mais de vide ; non de l'interdiction, mais de l'absence de sens. C'est un système qui continue de fonctionner longtemps après que l'espoir s'est éteint.
À la fin, il semble, comme l'avait pressenti Baudrillard, que nous vivons dans une forme de psychose simulée. Le monde ne fait que refléter sa propre lumière, une réalité qui ne renvoie plus vers rien d'extérieur, mais se replie lentement sur elle-même. Les signes se sont détachés de la signification, la copie a remplacé l'original, et il ne reste que des miroirs se réfléchissant à l'infini. L'homme joue le rôle principal dans son propre hologramme, entouré d'images qui prétendent pointer vers la vérité, mais ne renvoient qu'à elles-mêmes.
Ce n'est pas la folie au sens classique, mais une psychose parfaitement fonctionnelle, une surface lisse, sans rupture, sans profondeur, sans silence. Peut-être est-ce justement cette stabilité qui est la plus inquiétante : un monde qui ne s'effondre jamais, mais qui a depuis longtemps cessé d'être réel. Comme Arachné, nous avons tissé une image si parfaite qu'elle nous a emprisonnés. La toile que nous filons n'est plus une œuvre d'art, mais une prison.
Sara Tetzchner
20.10.2025 à 13:23
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Un lundisoir avec Christophe Darmangeat
- 20 octobre / Avec une grosse photo en haut, lundisoir, 4, HistoireAvec cet entretien, nous débutons une nouvelle série thématique de lundimatin autour de « la guerre ». La guerre est dans toutes les têtes. Mais elle y est sur un mode abstrait, verbal, pauvre et nu. Nous voulons contribuer à sa reconquête conceptuelle. Une idée n'est concrète que lorsqu'elle est rapportée à la multitude des expériences réelles qui la constitue. Une idée n'est utile que lorsqu'elle pense en intériorité des mécanismes et des logiques qui nous permettent d'en saisir la réalité. Ce soir, nous accueillons l'anthropologue Christophe Darmangeat pour son volumineux Casus belli. La guerre avant l'État. Dans ce livre, publié en 2025 à La Découverte, Darmangeat déploie une vaste typologie des « confrontations » fondée sur des séries de cas ethnographiques fascinants.
Le concept de « guerre » ne renvoie et ne circonscrit plus qu'une forme précise et déterminée de confrontation parmi d'autres formes. La guerre y est définie comme une « confrontation discrétionnaire résolutive », c'est-à-dire : une confrontation collective sans accord préalable entre participants (l'agresseur ne demande pas l'autorisation d'attaquer) dont la résolution repose sur l'anéantissement de l'adversaire permettant d'asseoir sa propre « suprématie ». Mais, comme nous allons le voir, si toutes les guerres sont des confrontations, toutes les confrontations ne sont pas des guerres. La faide (ou feude), c'est-à-dire la vendetta, est une confrontation discrétionnaire comme la guerre, mais elle est résolue d'une autre façon que la guerre : non par la suprématie, mais par l'équilibre des comptes en homicides. La faide (la vendetta) est une confrontation par « règlement de comptes » qui passe par des « homicides de compensation ». La fin de cette confrontation n'est pas la suprématie par anéantissement de la force ennemie ; mais l'équilibre dans les comptes. Ce qui est frappant dans la définition de ces deux confrontations (guerre et faide), c'est qu'elles sont pensées comme pacifiste dans leurs finalités. La fin d'une guerre comme d'une vendetta est de mettre un terme à la faide ou la guerre par la faide et la guerre soit en atteignant l'équilibre soit en obtenant la suprématie.
En fait, ce qu'il est important de comprendre ici c'est que les confrontations ne doivent pas être pensées en fonction de la nature de ses agents. Par exemple, ce n'est pas l'État qui fait la guerre. La guerre n'est pas le propre de l'État. Pour comprendre une confrontation, il faut en déterminer les motifs et les fins. Ce sont à la fois les modes de circonscription du début et de la fin de la confrontation d'une part, et les motifs ou mobiles de la confrontation d'autre part qui en caractérisent le sens et le concept. Si la guerre et la faide sont deux confrontations « discrétionnaires résolutives », c'est parce qu'elles commencent sans prévenir l'adversaire et s'achèvent selon une « résolution » présente à l'esprit de celles et ceux qui la mènent (équilibre ou suprématie).
On verra qu'il y a bien d'autres formes de confrontations : par exemple, des confrontations où l'on s'accorde au préalable sur le lieu, l'heure et la durée du combat. Ce sont les duels collectifs. On sait comment ça commence, on est d'accord entre adversaires pour commencer et on sait où et comment cela doit se finir. Mieux encore : il y a des confrontations qui n'ont pas de résolution, qui sont non-résolutives, et dont la fin est indéfinie et, peut-être, infinie. C'est le cas des chasses aux têtes, des confrontations de deuil ou celles de vengeances. Les Wari' de l'Ouest amazonien, par exemple, ne pratiquent pas la vengeance sur le mode de la vendetta qui, elle, doit rétablir l'équilibre des comptes homicides. Ils la pratiquent, lit-on chez Beth Conklin, comme « un impératif permanent, ontologique, découlant d'un état d'inimitié absolue entre deux populations. » (cité p. 107).
Pour commencer à appréhender la guerre, rien de mieux que d'en passer par une anthropologie typologique de la guerre avant l'État et donc, non pas une anthropologie de la guerre, mais des confrontations dont la guerre n'est qu'un aspect. En enrichissant ainsi les distinctions conceptuelles, le travail de Darmangeat est une parfaite introduction au concept.
La guerre est devenue, en quelques années, l'élément de langage le plus insistant. Notre temps serait soudainement devenu héraclitéen. Sa métaphore s'est propagée dans l'espace mental aussi vite que la poudre. La longue paix américaine - série de guerres dissimulées et rendues invisibles à la conscience confort de l'Occident - est terminée. Dans un autre contexte, on peut lire chez l'anthropologue Bruno Latour récemment décédé : « Il y a maintenant une guerre des mondes. La paix, l'hypocrite paix de la modernité, est bel et bien terminée. » (81) [1] Aussi, sur un autre plan, les budgets militaires mondiaux ont-ils explosés. Un vieil empire a déferlé sur l'Ukraine. La vengeance coloniale illimitée a frappé Gaza. Au Nord et au Sud Kivu les activités du M23 s'intensifient. On massacre autour de Karthoum. Pas une semaine sans qu'un missile parte d'Inde ou du Pakistan. Un vieux temple suscite de nouvelles querelles entre la Thaïlande et le Cambodge. Le Sahel est en cendre. Et lorsque les faiseurs de paix sont les fascistes eux-mêmes il semble que la paix est nullité. [2]
Mais en réalité, il n'y a rien de moins clair que la guerre. Rien de moins évident. La nature et l'essence de sa réalité est politique et historique, en somme, changeante. Il n'y a pas de guerre absolue, pas de loi définitive, pas de mécanisme fondamental. Il devient nécessaire de se faire une culture non de guerre mais de la guerre. Il devient nécessaire de ne plus se contenter des vaines images, des métaphores fictives, de l'idée vague. Il convient de commencer à maîtriser et dominer intellectuellement la guerre. Car quiconque sait penser la guerre peut penser la paix. Or nous voulons penser la paix véritable. La paix pleine et entière. La paix perpétuelle. Pour cela, il nous faut donc savoir ce avec quoi on la distingue. Pour apprendre, aussi, d'un même geste, à faire la paix parce que l'on aura su faire son contraire.
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Comme tout un chacune, notre rédaction passe beaucoup trop de temps à glaner des vidéos plus ou moins intelligentes sur les internets. Aussi c'est avec beaucoup d'enthousiasme que nous avons décidé de nous jeter dans cette nouvelle arène. D'exaltations de comptoirs en propos magistraux, fourbis des semaines à l'avance ou improvisés dans la joie et l'ivresse, en tête à tête ou en bande organisée, il sera facile pour ce nouveau show hebdomadaire de tenir toutes ses promesses : il en fait très peu. Sinon de vous proposer ce que nous aimerions regarder et ce qui nous semble manquer. Grâce à lundisoir, lundimatin vous suivra jusqu'au crépuscule. « Action ! », comme on dit dans le milieu.
[2] Ce climat est tel que le jury de l'agrégation de philosophie, dans l'espoir de susciter des vocations, a décrété que le thème de cette année serait « LA PAIX ».