28.05.2025 à 17:47
En vrac du mois de Mai
Tristan
Des nouvelles d’Elon Musk, ce génie
- Twitter a enregistré le départ de 11 millions d’utilisateurs européens en moins d’un an, dont 2,7 millions de Français. En même temps, Les ventes de Tesla en France ont chuté de 60 % par rapport à avril 2024 ;
- Elon Musk’s apparent power play at the Copyright Office completely backfired ;
- Tesla Starts Accepting Cybertruck Trade-Ins – According to Tesla, a Cybertruck Loses $35,000 Over 6,000 Miles ($5.6 Per Mile). Tesla accepte de racheter les Cybertrucks à ses propriétaires. Mais voilà, le rachat se fait à un prix inférieur de 35 000 USD si la machine 10 000 km, soit 3,5 USD par km parcouru. (sans compter le prix de la charge, de l’assurance, etc.) Les autres garages proposaient des prix moindres, en rachetant la voiture moins de la moitié de son prix d’achat, alors qu’elle juste un an.
- Tornado warnings delayed because of DOGE cuts. Les efforts d’Elon Musk de raboter les crédits de l’état fédéral américain ont fait que lors d’une tornade les habitants concernés ont été prevenus avec du retard par l’agence locale météo, avec des morts à la clé ;
- Le vaisseau de la fusée Starship de SpaceX explose pour la troisième fois consécutive ;
- Musk avait promis 2000 milliards de dollars d’économies pour le budget fédéral “Finalement, le bilan est bien moins élevé que prévu : il part ce mercredi en catimini, avec un bilan mitigé, estimé à 150 milliards de dollars d’économies. Un chiffre qui pourrait même avoir été gonflé, selon plusieurs médias américains.” Comment on appelle un surdoué qui atteint 5% environ de son objectif, déjà ?
Des nouvelles de l’IA
- L’entreprise Klarna, qui avait licencié des collaborateurs pour les remplacer par l’IA faire marche arrière. Au passage, l’article rappelle qu’une entreprise sur 4 ayant déployé l’IA a trouvé que l’investissement est positif. Il y en a encore moins qui déploient l’IA à grande échelle.
- Fascinant : l’histoire en podcast d’Hypnocratie, un livre qui explique que nous entrons dans “un système où le pouvoir n’opère plus par la force ou la persuasion, mais par la modulation directe de nos états de conscience”. Détail qui a son importance : l’auteur n’existe pas en tant que tel, c’est le travail conjoint d’un philosophe et d’une IA, chose qui n’est dévoilée qu’après le succès du livre. Vertigineux !
- Anecdote amusante (et flippante) rapportée par Matoo sur son blog, où une IA, à qui on demande de traduire un texte depuis le chinois, donne une réponse totalement inventée mais plausible. Il s’est avéré en fait que l’IA n’arrivait pas à accéder au document PDF de départ et donc, pour ne pas déplaire, a inventé un document qui correspondrait plus ou moins aux interrogations de l’utilisateur de l’IA.
- Aux États-Unis, un homme s’adresse à son meurtrier via un avatar généré par IA ;
- L’IA durable n’est, à l’heure actuelle, qu’une chimère, qui commente les chiffres d’une étude de Cap Gemini, Developing sustainable Gen AI (format PDF) ;
- Reddit users ‘psychologically manipulated’ by unauthorized AI experiment. Des de faux utilisateurs d’un forum Reddit, pilotés par IA, ont fait croire à des utilisateurs des histoires incroyables avant de réveler leur nature. Les utilisateurs n’ont pas bien vécu la chose, évidemment.
- Comment la recherche est inondée de papiers de mauvaise qualité générée par IA ;
- Petit manuel de résistance aux introductions des IA dans une organisation, par Richard Hanna ;
- Une vidéo fascinante démontrant les capacités de l’IA Veo 3 de Google à générer de la vidéo. Tout ce qui est vu et entendu dans cette vidéo est généré par une IA. Rien n’est vrai (à par l’empreinte environnementale générée, bien sûr). Mettez-bien la piste audio sur “Anglais Etats Unis original” en cliquant sur la roue dentée. Cerise sur le gâteau, la mise en abime consistant à montrer des personnages alors qu’ils apprennent lors d’un micro-trottoir qu’ils sont en fait généré par une IA. On retrouve plein de styles de vidéos, une sitcom façon Friends, un soap-opera des années 1980, de la SF. Cela pose beaucoup de questions quant à la perception de la réalité via des écrans. Avec autant de capacité à générer facilement et rapidement des choses fausses, pourra-t-on encore se fier à ce qu’on voit et entend dans le futur ? Oui, bien sûr, avant il y avait Photoshop et les effets spéciaux du cinéma, mais on avait appris à se méfier de la pub qui retouchait les mannequins et on savait bien que les super-héros n’existent pas vraiment (ou du moins ils ne volent pas). Ce qui change maintenant c’est que toute image sur écran peut être fausse et produite rapidement et à moindre coût. Cela va changer le rapport à la vérité.
- Si la vidéo générée devient indiscernable d’un témoignage capté, la vérité devient-elle une esthétique plutôt qu’une preuve ?, expliquent Gilles Guerraz et Caroline Thireau (avec d’autres extraits de vidéos de Veo 3) ;
- What Sam Altman Told OpenAI About the Secret Device He’s Making With Jony Ive. En gros, un petit appareil qui se porte autour du cou, comparable à l’AI Pin qui n’a pas fonctionné. Il a une caméra, un micro et pas d’écran et se connectera aux PC et smartphone dont il utilisera l’écran ;
- Comment l’IA aide à dessiner des puces plus optimisées (avec des morceaux de loi de Moore dedans) ;
- Firefox Tests AI-Powered Perplexity Search Engine Directly in Browser… Bon, on peut douter de la pérennité de mettre de l’IA générative dans un moteur de recherche à une époque où il faudrait faire preuve de sobriété. Mais en plus, le patron de Perplexity dit que son propre navigateur (à venir) va pister tout ce que font les internautes pour leur afficher des ‘publicité hyper personnalisées’. Tout. va. bien !!!
- Nice veut prédire les crises grâce à l’IA et la surveillance des réseaux sociaux. Rappelons, comme le fait l’article, que suite aux attentats de Charlie Hebdo, en 2015, le maire de Nice, Christian Estrosi avait accessoirement déclaré être « à peu près convaincu que si Paris avait été équipée du même réseau de caméras que le nôtre, les frères Kouachi n’auraient pas passé trois carrefours sans être neutralisés et interpellés ». Or, un an plus tard, alors que la ville ne dénombrait encore que 1 256 caméras, surveillées par 70 fonctionnaires, le terroriste de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice avait pourtant été filmé par plusieurs d’entre elles alors qu’il effectuait au volant d’un poids lourd de 19 tonnes pas moins de 11 repérages sur la promenade des Anglais entre le 11 et le 14 juillet, dont 3 d’une trentaine de minutes, mais sans pour autant être identifié.
- Énorme : Faire tourner LLama 2 sur un Pentium 2 et Windows 98, c’est possible !
- ’S’il fallait demander la permission avant d’utiliser le travail des artistes pour entraîner l’IA, cela tuerait cette industrie’ explique l’ancien patron des affaires publiques de Meta/Facebook (c’est Nick Clegg, qui est accessoirement ancien premier ministre du Royaume-Uni). On rappellera qu’Aaron Swartz a été poursuivi en justice pour avoir téléchargé des études scientifiques, avec à la clé une sanction d’un million de dollars et 35 ans de prison, qu’il a évité en se suicidant à l’age de 26 ans. Les patrons de Meta, Google et OpenAI eux, ne risquent rien.
Des nouvelles de l’autonomie stratégique (auparavant souveraineté)
- Mes camarades du CIGREF La dépendance technologique aux softwares & cloud services américains : une estimation des conséquences économiques en Europe. Chaque année, 265 milliards d’euros, soit près de 80 % des achats européens de logiciels et de services cloud, remontent vers des fournisseurs américains. À eux seuls, ces flux entretiennent 1,9 million d’emplois outre-Atlantique, directs, indirects et induits. Si, en 2035, 15% de ces dépenses étaient retenues au sein de l’économie européenne, elles entraîneraient la création d’environ 500 000 emplois directs, indirects et induits au profit de celle-ci. Voir aussi sur ZDNet.
- Harvard study: Open source has an economic value of 8.8 trillion dollars. L’étude : The Value of Open Source Software, by Manuel Hoffmann, Frank Nagle and Yanuo Zhou, ici au format PDF. Ce qui est très intéressant ici, c’est qu’investir dans le développement de logiciels libres ici en Europe permettrait d’apporter une valeur 2000 fois supérieure à ce qui est investit. Qu’attendons-nous pour le faire, sachant que le logiciel libre est un allié de choix (et fiable, en plus, lui !) pour développer l’autonomie stratégique ?
Des nouvelles de la sobriété, de l’écologie, etc.
- Philippe Bihouix : « Le monde d’après sera celui de la sobriété systémique », lors d’une interview par Hervé Kempf, fondateur de Reporterre. Existe aussi en vidéo et en podcast ;
- Moins de voitures et moins d’IA : le plaidoyer de Jean-Marc Jancovici dans l’émission Quotidien. Du coup, j’ai donné à Décarbonons la France, et vous ?
- Cycliste tué par un SUV à Paris : un rapport d’expertise vient éclairer le fait qu’il s’agit d’un homicide volontaire ;
- Le réchauffement climatique devrait dépasser 1,5 °C d’ici à 2029, selon l’Organisation météorologique mondiale ;
- Tout-sécuritaire : appel à dérailler, un billet d’Olivier Hamant dont je recommande la lecture. Il est commu pour avoir écrit Antidote au culte de la performance. La robustesse du vivant. Dans un billet sur Linked, il résume : “En luttant contre les politiques sociales depuis des années et en freinant sur la culture, l’écologie ou la participation citoyenne, on réduit la robustesse des territoires, et on les fragilise. On pousse à l’addiction (le mono-lien), contre l’adaptabilité (le multi-liens). La violence suit, et le besoin de sécurité se trouve ainsi renforcé. La doctrine du tout-sécuritaire est d’abord celle de l’extrême-droite, mais elle a été adoptée sans retenue par la droite et le centre: la sécurité est devenue un levier du pouvoir (Retailleau, Darmanin, Wauquiez, etc. sont tous des adeptes de ce culte). Soit ils sont incompétents pour ne pas voir la boucle toxique qu’ils entretiennent, soit ils ont bien lu Machiavel, et trouvent là un levier idéal pour assouvir leur pulsion de pouvoir. Je penche pour la seconde hypothèse, qui explique la première: le pouvoir rend aveugle.”
- J’avais loupé cette vidéo TED de Johan Rockström, créateur de Planetary Boundaries (les limites planétaires) : Le point de bascule du changement climatique - et où nous en sommes ;
- Comment installer Ubuntu et redonner vie à un vieux Mac Intel ? Create a bootable USB stick on macOS ;
- Train vs Avion : quel est le juste prix ? Une comparaison fouillée entre les tarifs aériens et ferroviaires par Carbone4, ça nous change des propos façon café du commerce ;
- Neuf indicateurs pour mesurer l’urgence climatique, bien pratiques pour visualiser ce sujet complexe ;
- Assez incroyable : Computational Public Space, pour faire de l’informatique à plusieurs, sans écrans. Cela remet en cause plein de choses (gens isolés face à leurs écrans, production centralisée du logiciel, etc. ) ;
- John Carmack (auteur de DOOM) : « le monde pourrait fonctionner sur du matériel plus ancien si l’optimisation logicielle était prioritaire » ;
- Comment récupérer un vélo à assistance électrique free-floating pour pouvoir à nouveau s’en servir… Pas facile, forcément, mais intéressant.
- « La société civile en réseau peut faire mieux que tous les Gafam réunis » ;
Des nouvelles du capitalisme
- « Dieselgate » : dix ans après la révélation de la fraude, un bilan sanitaire exorbitant. “Les émissions excédentaires de gaz toxiques auraient causé 16 000 morts en France depuis 2009, selon une étude inédite. Le retrait des dispositifs frauduleux pourrait éviter 8 000 morts supplémentaires, d’ici à 2040, et 45 milliards d’euros de pertes économiques.”
- A shareholder is Suing UnitedHealth for Giving “Too Much Care” to Patients After the CEO was Murdered. (Notons que contrairement à ce que dit l’article, ça n’est pas Blackrock, mais un autre actionnaire). Vous vous souvenez de United Healthcare, l’assurance US qui traitait mal ses clients en leur refusant de payer des traitements médicaux qui pouvaient leur sauver la vie ? Un type a tué le PDG de la boite à cause de ça. Alors United Healthcare a décidé de mieux rembourser ses clients. Et du coup, un de ses actionnaires poursuit l’entreprise en justice parce que de telles pratiques (bonnes pour les clients) grignotent les marges !
- Toujours chez United Health, un nouveau scandale s’annonce : Revealed: UnitedHealth secretly paid nursing homes to reduce hospital transfers. En gros, d’après des lanceurs d’alerte, United Health donne des primes aux maisons de retraite pour les encourager à ne pas envoyer leurs pensionnaires à l’hôpital, ce qui peut se faire au détriment de la santé des pensionnaires… En effet, un pensionnaire envoyé à l’hôpital revient beaucoup plus cher à son assurance maladie (United Health), et plutôt moins cher à la maison de retraite.
- Pendant ce temps-là, on découvre que la même UnitedHealth donnait des primes à des maisons de retraite pour qu’elles évitent d’envoyer des patients à l’hôpital. Parce que forcément, ça coûte plus cher. Évidemment, les personnes agées, sans soin, ont vu leurs santé dépérir plus rapidement.
- ‘Nous allons dire adieu à 30 ans d’inefficacité, de gaspillage’ : le Royaume-Uni lance la renationalisation du train ;
- « Les entreprises de capture du CO₂ dans l’air émettent plus de carbone qu’elles n’en éliminent ». Et pas qu’un peu : “En 2024, loin de capter 1 % des émissions mondiales, l’entreprise n’a réussi à extraire que 105 tonnes de CO₂ de l’atmosphère. Sur son site Internet, l’entreprise reconnaît qu’elle ne parvient même pas à compenser ses propres émissions – estimées à 1 700 tonnes de CO₂ par an, sans compter les voyages de presse. Au lieu des 400 millions de tonnes d’émissions négatives, Climeworks annonce maintenant vouloir devenir la première entreprise d’émissions négatives à devenir neutre en carbone avant 2030… Dès 2015, une étude publiée dans Nature rappelait que la capture du CO₂ directement dans l’air, pour passer à plus grande échelle, devrait consommer des quantités colossales d’énergie – plus du quart de l’énergie mondiale – à une seule tâche : aspirer le carbone de l’atmosphère.” ;
- L’extrême-droite technologique contre la démocratie. La Tech sous Trump (1/2) par Sébastien Broca. Une 2e partie est prévu, mais celle-ci est déjà bien longue !
- Scandale des eaux en bouteille : comment un rapport sanitaire défavorable à Nestlé a été modifié par l’Etat , alors que l’eau était polluée (elle contenait des traces de matières fécales aka “de la merde”) et traitée de façon illégale. Sans surprise, la consommation de Perrier en baisse de 14% depuis le début de l’année.
Texte intégral (3370 mots)
Des nouvelles d’Elon Musk, ce génie
- Twitter a enregistré le départ de 11 millions d’utilisateurs européens en moins d’un an, dont 2,7 millions de Français. En même temps, Les ventes de Tesla en France ont chuté de 60 % par rapport à avril 2024 ;
- Elon Musk’s apparent power play at the Copyright Office completely backfired ;
- Tesla Starts Accepting Cybertruck Trade-Ins – According to Tesla, a Cybertruck Loses $35,000 Over 6,000 Miles ($5.6 Per Mile). Tesla accepte de racheter les Cybertrucks à ses propriétaires. Mais voilà, le rachat se fait à un prix inférieur de 35 000 USD si la machine 10 000 km, soit 3,5 USD par km parcouru. (sans compter le prix de la charge, de l’assurance, etc.) Les autres garages proposaient des prix moindres, en rachetant la voiture moins de la moitié de son prix d’achat, alors qu’elle juste un an.
- Tornado warnings delayed because of DOGE cuts. Les efforts d’Elon Musk de raboter les crédits de l’état fédéral américain ont fait que lors d’une tornade les habitants concernés ont été prevenus avec du retard par l’agence locale météo, avec des morts à la clé ;
- Le vaisseau de la fusée Starship de SpaceX explose pour la troisième fois consécutive ;
- Musk avait promis 2000 milliards de dollars d’économies pour le budget fédéral “Finalement, le bilan est bien moins élevé que prévu : il part ce mercredi en catimini, avec un bilan mitigé, estimé à 150 milliards de dollars d’économies. Un chiffre qui pourrait même avoir été gonflé, selon plusieurs médias américains.” Comment on appelle un surdoué qui atteint 5% environ de son objectif, déjà ?
Des nouvelles de l’IA
- L’entreprise Klarna, qui avait licencié des collaborateurs pour les remplacer par l’IA faire marche arrière. Au passage, l’article rappelle qu’une entreprise sur 4 ayant déployé l’IA a trouvé que l’investissement est positif. Il y en a encore moins qui déploient l’IA à grande échelle.
- Fascinant : l’histoire en podcast d’Hypnocratie, un livre qui explique que nous entrons dans “un système où le pouvoir n’opère plus par la force ou la persuasion, mais par la modulation directe de nos états de conscience”. Détail qui a son importance : l’auteur n’existe pas en tant que tel, c’est le travail conjoint d’un philosophe et d’une IA, chose qui n’est dévoilée qu’après le succès du livre. Vertigineux !
- Anecdote amusante (et flippante) rapportée par Matoo sur son blog, où une IA, à qui on demande de traduire un texte depuis le chinois, donne une réponse totalement inventée mais plausible. Il s’est avéré en fait que l’IA n’arrivait pas à accéder au document PDF de départ et donc, pour ne pas déplaire, a inventé un document qui correspondrait plus ou moins aux interrogations de l’utilisateur de l’IA.
- Aux États-Unis, un homme s’adresse à son meurtrier via un avatar généré par IA ;
- L’IA durable n’est, à l’heure actuelle, qu’une chimère, qui commente les chiffres d’une étude de Cap Gemini, Developing sustainable Gen AI (format PDF) ;
- Reddit users ‘psychologically manipulated’ by unauthorized AI experiment. Des de faux utilisateurs d’un forum Reddit, pilotés par IA, ont fait croire à des utilisateurs des histoires incroyables avant de réveler leur nature. Les utilisateurs n’ont pas bien vécu la chose, évidemment.
- Comment la recherche est inondée de papiers de mauvaise qualité générée par IA ;
- Petit manuel de résistance aux introductions des IA dans une organisation, par Richard Hanna ;
- Une vidéo fascinante démontrant les capacités de l’IA Veo 3 de Google à générer de la vidéo. Tout ce qui est vu et entendu dans cette vidéo est généré par une IA. Rien n’est vrai (à par l’empreinte environnementale générée, bien sûr). Mettez-bien la piste audio sur “Anglais Etats Unis original” en cliquant sur la roue dentée. Cerise sur le gâteau, la mise en abime consistant à montrer des personnages alors qu’ils apprennent lors d’un micro-trottoir qu’ils sont en fait généré par une IA. On retrouve plein de styles de vidéos, une sitcom façon Friends, un soap-opera des années 1980, de la SF. Cela pose beaucoup de questions quant à la perception de la réalité via des écrans. Avec autant de capacité à générer facilement et rapidement des choses fausses, pourra-t-on encore se fier à ce qu’on voit et entend dans le futur ? Oui, bien sûr, avant il y avait Photoshop et les effets spéciaux du cinéma, mais on avait appris à se méfier de la pub qui retouchait les mannequins et on savait bien que les super-héros n’existent pas vraiment (ou du moins ils ne volent pas). Ce qui change maintenant c’est que toute image sur écran peut être fausse et produite rapidement et à moindre coût. Cela va changer le rapport à la vérité.
- Si la vidéo générée devient indiscernable d’un témoignage capté, la vérité devient-elle une esthétique plutôt qu’une preuve ?, expliquent Gilles Guerraz et Caroline Thireau (avec d’autres extraits de vidéos de Veo 3) ;
- What Sam Altman Told OpenAI About the Secret Device He’s Making With Jony Ive. En gros, un petit appareil qui se porte autour du cou, comparable à l’AI Pin qui n’a pas fonctionné. Il a une caméra, un micro et pas d’écran et se connectera aux PC et smartphone dont il utilisera l’écran ;
- Comment l’IA aide à dessiner des puces plus optimisées (avec des morceaux de loi de Moore dedans) ;
- Firefox Tests AI-Powered Perplexity Search Engine Directly in Browser… Bon, on peut douter de la pérennité de mettre de l’IA générative dans un moteur de recherche à une époque où il faudrait faire preuve de sobriété. Mais en plus, le patron de Perplexity dit que son propre navigateur (à venir) va pister tout ce que font les internautes pour leur afficher des ‘publicité hyper personnalisées’. Tout. va. bien !!!
- Nice veut prédire les crises grâce à l’IA et la surveillance des réseaux sociaux. Rappelons, comme le fait l’article, que suite aux attentats de Charlie Hebdo, en 2015, le maire de Nice, Christian Estrosi avait accessoirement déclaré être « à peu près convaincu que si Paris avait été équipée du même réseau de caméras que le nôtre, les frères Kouachi n’auraient pas passé trois carrefours sans être neutralisés et interpellés ». Or, un an plus tard, alors que la ville ne dénombrait encore que 1 256 caméras, surveillées par 70 fonctionnaires, le terroriste de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice avait pourtant été filmé par plusieurs d’entre elles alors qu’il effectuait au volant d’un poids lourd de 19 tonnes pas moins de 11 repérages sur la promenade des Anglais entre le 11 et le 14 juillet, dont 3 d’une trentaine de minutes, mais sans pour autant être identifié.
- Énorme : Faire tourner LLama 2 sur un Pentium 2 et Windows 98, c’est possible !
- ’S’il fallait demander la permission avant d’utiliser le travail des artistes pour entraîner l’IA, cela tuerait cette industrie’ explique l’ancien patron des affaires publiques de Meta/Facebook (c’est Nick Clegg, qui est accessoirement ancien premier ministre du Royaume-Uni). On rappellera qu’Aaron Swartz a été poursuivi en justice pour avoir téléchargé des études scientifiques, avec à la clé une sanction d’un million de dollars et 35 ans de prison, qu’il a évité en se suicidant à l’age de 26 ans. Les patrons de Meta, Google et OpenAI eux, ne risquent rien.
Des nouvelles de l’autonomie stratégique (auparavant souveraineté)
- Mes camarades du CIGREF La dépendance technologique aux softwares & cloud services américains : une estimation des conséquences économiques en Europe. Chaque année, 265 milliards d’euros, soit près de 80 % des achats européens de logiciels et de services cloud, remontent vers des fournisseurs américains. À eux seuls, ces flux entretiennent 1,9 million d’emplois outre-Atlantique, directs, indirects et induits. Si, en 2035, 15% de ces dépenses étaient retenues au sein de l’économie européenne, elles entraîneraient la création d’environ 500 000 emplois directs, indirects et induits au profit de celle-ci. Voir aussi sur ZDNet.
- Harvard study: Open source has an economic value of 8.8 trillion dollars. L’étude : The Value of Open Source Software, by Manuel Hoffmann, Frank Nagle and Yanuo Zhou, ici au format PDF. Ce qui est très intéressant ici, c’est qu’investir dans le développement de logiciels libres ici en Europe permettrait d’apporter une valeur 2000 fois supérieure à ce qui est investit. Qu’attendons-nous pour le faire, sachant que le logiciel libre est un allié de choix (et fiable, en plus, lui !) pour développer l’autonomie stratégique ?
Des nouvelles de la sobriété, de l’écologie, etc.
- Philippe Bihouix : « Le monde d’après sera celui de la sobriété systémique », lors d’une interview par Hervé Kempf, fondateur de Reporterre. Existe aussi en vidéo et en podcast ;
- Moins de voitures et moins d’IA : le plaidoyer de Jean-Marc Jancovici dans l’émission Quotidien. Du coup, j’ai donné à Décarbonons la France, et vous ?
- Cycliste tué par un SUV à Paris : un rapport d’expertise vient éclairer le fait qu’il s’agit d’un homicide volontaire ;
- Le réchauffement climatique devrait dépasser 1,5 °C d’ici à 2029, selon l’Organisation météorologique mondiale ;
- Tout-sécuritaire : appel à dérailler, un billet d’Olivier Hamant dont je recommande la lecture. Il est commu pour avoir écrit Antidote au culte de la performance. La robustesse du vivant. Dans un billet sur Linked, il résume : “En luttant contre les politiques sociales depuis des années et en freinant sur la culture, l’écologie ou la participation citoyenne, on réduit la robustesse des territoires, et on les fragilise. On pousse à l’addiction (le mono-lien), contre l’adaptabilité (le multi-liens). La violence suit, et le besoin de sécurité se trouve ainsi renforcé. La doctrine du tout-sécuritaire est d’abord celle de l’extrême-droite, mais elle a été adoptée sans retenue par la droite et le centre: la sécurité est devenue un levier du pouvoir (Retailleau, Darmanin, Wauquiez, etc. sont tous des adeptes de ce culte). Soit ils sont incompétents pour ne pas voir la boucle toxique qu’ils entretiennent, soit ils ont bien lu Machiavel, et trouvent là un levier idéal pour assouvir leur pulsion de pouvoir. Je penche pour la seconde hypothèse, qui explique la première: le pouvoir rend aveugle.”
- J’avais loupé cette vidéo TED de Johan Rockström, créateur de Planetary Boundaries (les limites planétaires) : Le point de bascule du changement climatique - et où nous en sommes ;
- Comment installer Ubuntu et redonner vie à un vieux Mac Intel ? Create a bootable USB stick on macOS ;
- Train vs Avion : quel est le juste prix ? Une comparaison fouillée entre les tarifs aériens et ferroviaires par Carbone4, ça nous change des propos façon café du commerce ;
- Neuf indicateurs pour mesurer l’urgence climatique, bien pratiques pour visualiser ce sujet complexe ;
- Assez incroyable : Computational Public Space, pour faire de l’informatique à plusieurs, sans écrans. Cela remet en cause plein de choses (gens isolés face à leurs écrans, production centralisée du logiciel, etc. ) ;
- John Carmack (auteur de DOOM) : « le monde pourrait fonctionner sur du matériel plus ancien si l’optimisation logicielle était prioritaire » ;
- Comment récupérer un vélo à assistance électrique free-floating pour pouvoir à nouveau s’en servir… Pas facile, forcément, mais intéressant.
- « La société civile en réseau peut faire mieux que tous les Gafam réunis » ;
Des nouvelles du capitalisme
- « Dieselgate » : dix ans après la révélation de la fraude, un bilan sanitaire exorbitant. “Les émissions excédentaires de gaz toxiques auraient causé 16 000 morts en France depuis 2009, selon une étude inédite. Le retrait des dispositifs frauduleux pourrait éviter 8 000 morts supplémentaires, d’ici à 2040, et 45 milliards d’euros de pertes économiques.”
- A shareholder is Suing UnitedHealth for Giving “Too Much Care” to Patients After the CEO was Murdered. (Notons que contrairement à ce que dit l’article, ça n’est pas Blackrock, mais un autre actionnaire). Vous vous souvenez de United Healthcare, l’assurance US qui traitait mal ses clients en leur refusant de payer des traitements médicaux qui pouvaient leur sauver la vie ? Un type a tué le PDG de la boite à cause de ça. Alors United Healthcare a décidé de mieux rembourser ses clients. Et du coup, un de ses actionnaires poursuit l’entreprise en justice parce que de telles pratiques (bonnes pour les clients) grignotent les marges !
- Toujours chez United Health, un nouveau scandale s’annonce : Revealed: UnitedHealth secretly paid nursing homes to reduce hospital transfers. En gros, d’après des lanceurs d’alerte, United Health donne des primes aux maisons de retraite pour les encourager à ne pas envoyer leurs pensionnaires à l’hôpital, ce qui peut se faire au détriment de la santé des pensionnaires… En effet, un pensionnaire envoyé à l’hôpital revient beaucoup plus cher à son assurance maladie (United Health), et plutôt moins cher à la maison de retraite.
- Pendant ce temps-là, on découvre que la même UnitedHealth donnait des primes à des maisons de retraite pour qu’elles évitent d’envoyer des patients à l’hôpital. Parce que forcément, ça coûte plus cher. Évidemment, les personnes agées, sans soin, ont vu leurs santé dépérir plus rapidement.
- ‘Nous allons dire adieu à 30 ans d’inefficacité, de gaspillage’ : le Royaume-Uni lance la renationalisation du train ;
- « Les entreprises de capture du CO₂ dans l’air émettent plus de carbone qu’elles n’en éliminent ». Et pas qu’un peu : “En 2024, loin de capter 1 % des émissions mondiales, l’entreprise n’a réussi à extraire que 105 tonnes de CO₂ de l’atmosphère. Sur son site Internet, l’entreprise reconnaît qu’elle ne parvient même pas à compenser ses propres émissions – estimées à 1 700 tonnes de CO₂ par an, sans compter les voyages de presse. Au lieu des 400 millions de tonnes d’émissions négatives, Climeworks annonce maintenant vouloir devenir la première entreprise d’émissions négatives à devenir neutre en carbone avant 2030… Dès 2015, une étude publiée dans Nature rappelait que la capture du CO₂ directement dans l’air, pour passer à plus grande échelle, devrait consommer des quantités colossales d’énergie – plus du quart de l’énergie mondiale – à une seule tâche : aspirer le carbone de l’atmosphère.” ;
- L’extrême-droite technologique contre la démocratie. La Tech sous Trump (1/2) par Sébastien Broca. Une 2e partie est prévu, mais celle-ci est déjà bien longue !
- Scandale des eaux en bouteille : comment un rapport sanitaire défavorable à Nestlé a été modifié par l’Etat , alors que l’eau était polluée (elle contenait des traces de matières fécales aka “de la merde”) et traitée de façon illégale. Sans surprise, la consommation de Perrier en baisse de 14% depuis le début de l’année.
18.05.2025 à 20:16
Low Tech et vélo
Tristan
Avec l’ami Ploum, nous avons été invités à participer à l’événement Parlons Vélo Massy pour y parler de Low-Tech (et de vélo) dans le cadre de cet événement très sympathique.
Il pensait y aller en RER avec son épouse et leur fils, alors que pour ma part, je prevoyais de faire les presque 20 km à vélo, d’autant que le trajet passe par la fameuse coulée verte. Quelques arrangements plus tard, nous voilà tous ensemble à vélo, Madame et le fiston sur un cargo de location, Ploum et moi sur deux de mes vélos, mon Gravel titane et mon Brompton G-Line, que nous avons interchangé, pour qu’il puisse aussi bien tester un vélo en titane (une première pour lui) et un pliant (aussi une première). Ploum a publié juste avant l’événement un petit manifeste low-tech. À mon tour d’écrire un article sur le sujet, mélange de ce que je pense et de ce qui s’est dit lors de la table ronde.
Low Tech, un essai de définition
Il existe plein de définitions du concept de Low-Tech ! Alors forcément, j’ai commencé à demander à wikipédia, à chercher comment c’est défini par Philippe Bihouix, l’auteur de l’excellent L’âge des Low-Tech. J’ai aussi cherché sur le Web, par exemple chez Ecoconso.be, qui explique bien tout cela. Mais faute de définition officielle, je concocte la mienne.
L’approche Low-Tech, c’est une approche de la technologie qui rassemble plusieurs points clés :
- Sobriété : conception simple, juste ce qu’il faut de technologie, pas plus.
- Efficience : consomme peu de ressources tout en fournissant ce qu’on lui demande.
- Durabilité : pourra être utilisé pendant longtemps (solide, basé sur des technologies qui existeront encore dans plusieurs années et qu’on a le droit d’utiliser…).
- Maintenabilité : facile à entretenir soi-même, avec des outils et des pièces standards.
- Facilité d’utilisation : facile à utiliser par tout le monde.
- Local : utilise des ressources locales autant que possible.
Et ça n’est pas… l’absence de technologie. C’est comme dit plus haut, juste ce qu’il faut de technologie. Pas assez, et l’objet n’est pas à la hauteur du besoin, et si on met trop de technologie, on perd en maintenabilité, en bidouillabilité. Mais le vélo, c’est technologique ! Fabriquer un tube d’acier, un roulement à billes, un câble de dérailleur, un pneu, ça demande beaucoup d’énergie, de savoir faire et de machines. (Ajout : la fabrication d’un vélo à l’usine Raleigh en Angleterre en 1945). Merci Florian !
Low Tech et vélo
Dans la conversation à Massy, on a abordé les cas où il y avait — pour nous — trop de technologie, par exemple les dérailleurs électriques Shimano Di2 qu’il faut recharger régulièrement. Chez le fabricant SRAM, il y en a même qui sont sans fil (donc 2 batteries à recharger). Il n’y a eu personne dans l’assistance pour défendre un tel système, mais j’ai déjà croisé des sportifs qui ne juraient que par lui. (Merci à Fassil qui m’indique sur Mastodon cet article sur le sujet : The Cost of Convenience: Taking a Hard Look at Wireless Shifting. Le journaliste conclut que les manettes à friction, c’est mieux que le dérailleur électrique. Pour moi qui ne jure que par les systèmes indexés à câble, cela me fait passer pour un fan de high-tech !)
On a ensuite abordé la problématique des vélos Angell. Électriques, super design, mais avec de grave problèmes de conception au point qu’il est recommandé de ne plus les utiliser. À l’heure de la table ronde, les serveurs d’Angell ne sont plus accessibles.
Van Moof, qui a fait faillite avant d’être racheté, a donné des sueurs froides à ses clients, puisqu’ils risquaient de ne plus pouvoir utiliser leur vélo, car ces derniers sont connectés à des serveurs Internet dont ils dépendent pour fonctionner. Les factures de ces serveurs n’étant plus payées, les vélos pouvaient être immobilisés, même s’ils fonctionnaient correctement d’un point de vue mécanique. On voit bien ici la limite au trop-plein de technologie.
Alors que nous commencions à dire du mal du vélo électrique (je vois des enfants sur des trottinettes électriques avec une selle rajoutée, alors qu’ils feraient mieux de faire du vélo), j’ai rappelé que le vélo à assistance électrique n’était pas nécessairement mauvais. Il permet à certaines personnes en situation de handicap ou en surpoids ou ayant des trajets longs ou à fort dénivelé de pratiquer le vélo, chose qu’ils ne pourraient pas faire autrement. C’est là qu’on réalise que le curseur qui sépare la low-tech de la high-tech dépend aussi du besoin de l’utilisateur.
Low Tech contre système capitaliste
L’animateur de la table ronde a voulu aborder la low-Tech sous un aspect politique, et il a bien fait. Car si on peut regretter l’emprise écrasante de la High-Tech, il faut la remettre dans le contexte économique du capitalisme et de la société de consommation. Un parent qui offre une trottinette électrique à son enfant, qui a pourtant bien besoin de se dépenser physiquement, ne réalise pas forcément qu’il lui fait du mal, en l’empêchant de faire de l’exercice, car il croit lui faire plaisir, parce que l’objet est désirable. Cela nous pousse à penser la place du capitalisme, de la consommation, de la publicité et des modes dans la destruction du vivant qui est en cours.
Quand la bicyclette inspirait la high tech
Il y a une vieille vidéo de Steve Jobs que j’adore. Il dit que pour lui, “l’ordinateur est une bicyclette pour l’esprit”, ce qui est une façon très intéressante d’en parler. Plus de détails sur le contexte et le document évoqué : How the bicycle beats evolution and why Steve Jobs was so taken with this fact. En substance, alors que la bicyclette permet à l’humain d’aller plus vite avec moins d’effort, Steve Job, à la fin des années 1970, voyait l’ordinateur personnel comme étant une bicyclette pour l’esprit. J’adore cette approche, elle me touche profondément, mais quand je regarde le numérique aujourd’hui, l’addiction aux applications mobiles, à son empreinte environnementale, aux dérives de l’IA d’un point de vue social et du rapport à la vérité, aux dégâts provoqués par les réseaux sociaux, je me dis qu’on a perdu de vue cette vision.
Pour aller plus loin
- Ma collègue d’OCTO Sara Boucherot a publié une série de podcasts sur la Low-Tech dont je recommande vivement l’écoute si le sujet vous intéresse !
- Via un autre collègue d’OCTO, Sébastien Roccaserra, une interview du mythique Alan Kay (inventeur de l’interface graphique), qui disait :
When you put a person into a car, their muscles wither. You put a person into an information car, and their thinking ability withers. I wouldn’t put a person within 15 yards of a computer unless I was absolutely sure that it was a kind of a bike for them.
Ce qui donne, traduit par mes soins :
Quand vous mettez une personne dans une voiture, elle perd ses muscles. Quand vous mettez une personne dans une voiture informationnelle, elle perd sa capacité à penser. Je ne mettrais pas d’ordinateur à proximité d’une personne à moins d’être certain qu’il ne soit comme un vélo pour elle.
- Toujours via Sébastien Rocaserra, le livre Le désir de nouveautés, l’obsolescence au cœur du capitalisme (XVe-XXIe siècle) de Jeanne Guien interrogée par Salomé Saqué sur Blast : Pourquoi notre désir de nouveauté est une fabrication du capitalisme ? ;
Texte intégral (1738 mots)
Avec l’ami Ploum, nous avons été invités à participer à l’événement Parlons Vélo Massy pour y parler de Low-Tech (et de vélo) dans le cadre de cet événement très sympathique.
Il pensait y aller en RER avec son épouse et leur fils, alors que pour ma part, je prevoyais de faire les presque 20 km à vélo, d’autant que le trajet passe par la fameuse coulée verte. Quelques arrangements plus tard, nous voilà tous ensemble à vélo, Madame et le fiston sur un cargo de location, Ploum et moi sur deux de mes vélos, mon Gravel titane et mon Brompton G-Line, que nous avons interchangé, pour qu’il puisse aussi bien tester un vélo en titane (une première pour lui) et un pliant (aussi une première). Ploum a publié juste avant l’événement un petit manifeste low-tech. À mon tour d’écrire un article sur le sujet, mélange de ce que je pense et de ce qui s’est dit lors de la table ronde.
Low Tech, un essai de définition
Il existe plein de définitions du concept de Low-Tech ! Alors forcément, j’ai commencé à demander à wikipédia, à chercher comment c’est défini par Philippe Bihouix, l’auteur de l’excellent L’âge des Low-Tech. J’ai aussi cherché sur le Web, par exemple chez Ecoconso.be, qui explique bien tout cela. Mais faute de définition officielle, je concocte la mienne.
L’approche Low-Tech, c’est une approche de la technologie qui rassemble plusieurs points clés :
- Sobriété : conception simple, juste ce qu’il faut de technologie, pas plus.
- Efficience : consomme peu de ressources tout en fournissant ce qu’on lui demande.
- Durabilité : pourra être utilisé pendant longtemps (solide, basé sur des technologies qui existeront encore dans plusieurs années et qu’on a le droit d’utiliser…).
- Maintenabilité : facile à entretenir soi-même, avec des outils et des pièces standards.
- Facilité d’utilisation : facile à utiliser par tout le monde.
- Local : utilise des ressources locales autant que possible.
Et ça n’est pas… l’absence de technologie. C’est comme dit plus haut, juste ce qu’il faut de technologie. Pas assez, et l’objet n’est pas à la hauteur du besoin, et si on met trop de technologie, on perd en maintenabilité, en bidouillabilité. Mais le vélo, c’est technologique ! Fabriquer un tube d’acier, un roulement à billes, un câble de dérailleur, un pneu, ça demande beaucoup d’énergie, de savoir faire et de machines. (Ajout : la fabrication d’un vélo à l’usine Raleigh en Angleterre en 1945). Merci Florian !
Low Tech et vélo
Dans la conversation à Massy, on a abordé les cas où il y avait — pour nous — trop de technologie, par exemple les dérailleurs électriques Shimano Di2 qu’il faut recharger régulièrement. Chez le fabricant SRAM, il y en a même qui sont sans fil (donc 2 batteries à recharger). Il n’y a eu personne dans l’assistance pour défendre un tel système, mais j’ai déjà croisé des sportifs qui ne juraient que par lui. (Merci à Fassil qui m’indique sur Mastodon cet article sur le sujet : The Cost of Convenience: Taking a Hard Look at Wireless Shifting. Le journaliste conclut que les manettes à friction, c’est mieux que le dérailleur électrique. Pour moi qui ne jure que par les systèmes indexés à câble, cela me fait passer pour un fan de high-tech !)
On a ensuite abordé la problématique des vélos Angell. Électriques, super design, mais avec de grave problèmes de conception au point qu’il est recommandé de ne plus les utiliser. À l’heure de la table ronde, les serveurs d’Angell ne sont plus accessibles.
Van Moof, qui a fait faillite avant d’être racheté, a donné des sueurs froides à ses clients, puisqu’ils risquaient de ne plus pouvoir utiliser leur vélo, car ces derniers sont connectés à des serveurs Internet dont ils dépendent pour fonctionner. Les factures de ces serveurs n’étant plus payées, les vélos pouvaient être immobilisés, même s’ils fonctionnaient correctement d’un point de vue mécanique. On voit bien ici la limite au trop-plein de technologie.
Alors que nous commencions à dire du mal du vélo électrique (je vois des enfants sur des trottinettes électriques avec une selle rajoutée, alors qu’ils feraient mieux de faire du vélo), j’ai rappelé que le vélo à assistance électrique n’était pas nécessairement mauvais. Il permet à certaines personnes en situation de handicap ou en surpoids ou ayant des trajets longs ou à fort dénivelé de pratiquer le vélo, chose qu’ils ne pourraient pas faire autrement. C’est là qu’on réalise que le curseur qui sépare la low-tech de la high-tech dépend aussi du besoin de l’utilisateur.
Low Tech contre système capitaliste
L’animateur de la table ronde a voulu aborder la low-Tech sous un aspect politique, et il a bien fait. Car si on peut regretter l’emprise écrasante de la High-Tech, il faut la remettre dans le contexte économique du capitalisme et de la société de consommation. Un parent qui offre une trottinette électrique à son enfant, qui a pourtant bien besoin de se dépenser physiquement, ne réalise pas forcément qu’il lui fait du mal, en l’empêchant de faire de l’exercice, car il croit lui faire plaisir, parce que l’objet est désirable. Cela nous pousse à penser la place du capitalisme, de la consommation, de la publicité et des modes dans la destruction du vivant qui est en cours.
Quand la bicyclette inspirait la high tech
Il y a une vieille vidéo de Steve Jobs que j’adore. Il dit que pour lui, “l’ordinateur est une bicyclette pour l’esprit”, ce qui est une façon très intéressante d’en parler. Plus de détails sur le contexte et le document évoqué : How the bicycle beats evolution and why Steve Jobs was so taken with this fact. En substance, alors que la bicyclette permet à l’humain d’aller plus vite avec moins d’effort, Steve Job, à la fin des années 1970, voyait l’ordinateur personnel comme étant une bicyclette pour l’esprit. J’adore cette approche, elle me touche profondément, mais quand je regarde le numérique aujourd’hui, l’addiction aux applications mobiles, à son empreinte environnementale, aux dérives de l’IA d’un point de vue social et du rapport à la vérité, aux dégâts provoqués par les réseaux sociaux, je me dis qu’on a perdu de vue cette vision.
Pour aller plus loin
- Ma collègue d’OCTO Sara Boucherot a publié une série de podcasts sur la Low-Tech dont je recommande vivement l’écoute si le sujet vous intéresse !
- Via un autre collègue d’OCTO, Sébastien Roccaserra, une interview du mythique Alan Kay (inventeur de l’interface graphique), qui disait :
When you put a person into a car, their muscles wither. You put a person into an information car, and their thinking ability withers. I wouldn’t put a person within 15 yards of a computer unless I was absolutely sure that it was a kind of a bike for them.
Ce qui donne, traduit par mes soins :
Quand vous mettez une personne dans une voiture, elle perd ses muscles. Quand vous mettez une personne dans une voiture informationnelle, elle perd sa capacité à penser. Je ne mettrais pas d’ordinateur à proximité d’une personne à moins d’être certain qu’il ne soit comme un vélo pour elle.
- Toujours via Sébastien Rocaserra, le livre Le désir de nouveautés, l’obsolescence au cœur du capitalisme (XVe-XXIe siècle) de Jeanne Guien interrogée par Salomé Saqué sur Blast : Pourquoi notre désir de nouveauté est une fabrication du capitalisme ? ;
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