14.11.2025 à 14:48
Maureen Damman
Vous n’avez pas eu le temps de suivre l’actu ? Voici 10 bonnes nouvelles à ne surtout pas manquer cette semaine. 1. Nouvelle ligne de train de nuit Une nouvelle ligne de train de nuit reliera, à partir d’avril 2026, la gare de Bâle, près de la frontière française, à Malmö en Suède, via plusieurs […]
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Une nouvelle ligne de train de nuit reliera, à partir d’avril 2026, la gare de Bâle, près de la frontière française, à Malmö en Suède, via plusieurs arrêts en Allemagne et au Danemark. (France 3)
Des travailleurs sans-papiers, employés sans contrat ni protection par le sous-traitant NTI dans des centres de tri des déchets en Île-de-France pour le compte de Veolia et Suez, saisissent aujourd’hui les prud’hommes afin de faire reconnaître leur préjudice. (Reporterre)
Budget de la Sécu 2026 : l’Assemblée nationale a adopté 2 amendements imposant l’affichage obligatoire du Nutri‑Score sur les emballages alimentaires sous peine d’une contribution de 5 % du chiffre d’affaires. Elle a également adopté une taxe pour les entreprises utilisant de l’hexane dans la production d’huiles végétales. (Reporterre)
En Vendée, un projet de surf-park à 250 mètres de l’océan, à Talmont-Saint-Hilaire, qui plus est sur une zone classée Natura 2000, suscite l’opposition de surfeurs et d’écologistes qui ont déjà mené 2 actions et promettent de continuer. 14 espèces sont menacées. (Reporterre)
La station de ski Céüze 2000 dans les Hautes-Alpes démonte ses remontées mécaniques pour promouvoir un tourisme de pleine nature. Il s’agit d’un tournant pour ce territoire, qui montrera peut-être la voie. (Geo)
La participation des femmes dans les accords de paix réduit jusqu’à 37 % le risque de reprise d’un conflit si elle est combinée à un leadership des Nations Unies. (The Conversation)
Une étude finlandaise montre que des enfants jouant dans des bacs à sable enrichis en sol forestier et exposés à une biodiversité microbienne accrue présentent une amélioration de leur microbiote cutané, intestinal et de leurs défenses immunitaires en quelques semaines seulement. (The Guardian)
La Environment and Land Court of Kenya a confirmé la révocation de la licence d’une centrale à charbon de 1 050 MW dans l’archipel de Lamu, jugée non conforme en matière d’évaluation environnementale et de participation publique. Le projet menaçait des mangroves, des herbiers de posidonie et des récifs coralliens protégés.(Mongabay)
Les députés polonais ont voté l’interdiction de l’élevage d’animaux à fourrure, avec une fermeture progressive des fermes d’ici à 2033, ainsi qu’une interdiction immédiate de nouvelles installations.(30 millions damis)
L’Irak traverse des élections législatives marquées par un climat relativement pacifique. Le retrait de Moqtada al‑Sadr de la vie politique, la présentation indépendante de l’Organisation Badr et l’affaiblissement des milices pro-Iran ont contribué à cette nouveauté. (Les-crises)
– Mauricette Baelen
The post Train, prud’hommes et nutri-score : les 10 bonnes nouvelles de la semaine first appeared on Mr Mondialisation.14.11.2025 à 14:31
Maureen Damman
Vous n’avez pas eu le temps de lire l’actu ? Voici les 10 infos à ne pas manquer cette semaine. 1. Des militants en désharmonie Le Collectif Palestine Action France a perturbé un concert de l’Orchestre philharmonique d’Israël à la Philharmonie de Paris. Des militants ont affirmé avoir été violemment pris à partie par des […]
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Le Collectif Palestine Action France a perturbé un concert de l’Orchestre philharmonique d’Israël à la Philharmonie de Paris. Des militants ont affirmé avoir été violemment pris à partie par des spectateurs. (Politis)
Dans le projet de loi de la Sécurité sociale pour 2026, le gouvernement prévoit un transfert de 1,6 milliard d’euros de la branche » accidents du travail/maladies professionnelles » vers la branche générale de la Sécu, un discret mais coûteux cadeau au patronat… au détriment de la population. (Politis)
Les ONG Sherpa et Les Amis de la Terre ont assigné le groupe pétrolier Perenco en justice en France pour des » préjudices écologiques » commis en République démocratique du Congo. Le procès pourrait avoir lieu d’ici 2026-2027. Merci la presse indépendante ! (Disclose)
Le groupe Galeries Lafayette a mis fin à son contrat d’affiliation avec Société des Grands Magasins (SGM) concernant sept magasins provinciaux, après que SGM ait annoncé l’accueil de la marque Shein, un choix jugé incompatible avec l’image de la marque par Galeries Lafayette. (LSA-conso)
À la COP30 à Belém, les peuples autochtones revendiquent une place centrale dans les négociations climatiques : leur savoir ancestral et leur lien profond avec les écosystèmes sont présentés comme essentiels pour la lutte contre le dérèglement climatique. (Futura-sciences)
En France, plus de 9 millions de m² de bureaux sont vacants, dont plus de la moitié en Île-de-France : cette vacance immobilière symbolise la crise de l’espace urbain liée au télétravail, à la sur-offre de tertiaire et à la transformation des usages. Rendez les logements ! (LVSL)
Les aides publiques aux petits aéroports français profitent surtout aux compagnies low-cost, aux jets privés et aux grands patrons sur des lignes désertées, alors même que l’aviation intérieure régresse. (Vert)
L’UKIP (parti britannique d’extrême droite) organise des raids racistes contre des exilés sur le littoral français, notamment autour de Dunkerque. Des associations dénoncent un laisser-faire des autorités. (Basta!)
Le gouvernement envisage de supprimer partiellement la prime de Noël pour les foyers sans enfants tout en durcissant l’accès aux découverts bancaires. Des mesures qualifiées d’attaques contre les plus pauvres. Seules les personnes bénéficiaires de certains minima sociaux peuvent obtenir cette prime. (Frustration)
TotalEnergies figure officiellement dans la délégation française à la COP30, avec cinq émissaires accrédités et des badges d’accès aux zones réservées aux négociateurs. (Mediapart)
– Mauricette Baelen
The post Philharmonie, patronat et Perenco : les 10 actualités de la semaine first appeared on Mr Mondialisation.14.11.2025 à 05:00
Mr Mondialisation
Dans un monde de plus en plus autocentré où la part de l’ego est prépondérante, admettre s’être trompé apparaît comme une grande difficulté pour beaucoup de personnes. Or, ce comportement empêche d’évoluer et donc de faire bouger la société, qui a pourtant radicalement besoin de changement. On vous présente cinq points pour une transformation positive. […]
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Savoir se remettre en question et reconnaître ses erreurs présente bien des avantages, autant d’un point de vue individuel que collectif. Que ce soit pour s’affranchir du système capitaliste, mais aussi pour lutter contres ses propres biais et contre les écueils de ses certitudes. Un cheminement indispensable pour fonder des communautés plus juste et plus saine. Mr Mondialisation vous propose cinq raisons d’accepter d’avoir tort.
Admettre s’être trompé, c’est sortir d’une logique de compétition propre au capitalisme, comme si nos croyances étaient une marchandise à défendre. Faire cet effort, c’est donc déjà organiser une rupture avec le dogme de la « réussite » imposé par le néolibéralisme. Ce qui compte alors, ce n’est plus de « gagner » la bataille de la pensée, mais plutôt de rechercher la vérité en percevant un échange comme une réelle opportunité de s’améliorer et de partager des idées.
Dans cette ligne directrice, concéder que l’on peut faire fausse route, c’est aussi un premier pas vers la lutte contre un système dominant qui semble couler de source. Le capitalisme ne reconnaît d’ailleurs non seulement jamais ses erreurs, mais il impose également son fonctionnement comme la seule possibilité. Souligner les aberrations du capitalisme, c’est déjà contester la légitimité de son pouvoir.
Par là, en s’extrayant de cette logique, on se bat contre cette idéologie. En outre, il devient plus facile de lutter contre ses biais en admettant que notre propre façon de penser a été en partie forgée par le système dans lequel nous évoluons. De ce fait, se remettre plus souvent en question permet donc de déconstruire ses idées préconçues et d’ouvrir son esprit à des alternatives concrètes.
Reconnaître ses torts, c’est aussi apprendre à se détacher de son ego et à dépasser le culte du « moi ». Cette vanité, érigée en valeur centrale dans nos sociétés individualistes, constitue un piège de la pensée. Lorsqu’on fait passer sa fierté avant la recherche de justesse ou de vérité, on s’expose inévitablement à des erreurs de jugement.
Au contraire, cultiver une forme d’humilité — non pas comme effacement de soi, mais comme ouverture à la complexité — permet d’accueillir à la fois la raison et l’émotion dans notre manière de comprendre le monde. Car les émotions ne sont pas des obstacles à la lucidité : elles signalent nos valeurs, nos blessures, nos attachements, et peuvent nourrir une réflexion plus fine et plus humaine. L’enjeu n’est donc pas de juger sans émotion, mais de reconnaître ce que nos émotions nous apprennent sans qu’elles dominent entièrement notre regard.
Ainsi, remettre en question ses certitudes ne relève pas de la faiblesse, mais du courage.
L’autocritique, enfin, ouvre à la compréhension de l’autre plutôt qu’à sa domination. Elle constitue un outil précieux, y compris pour celles et ceux qui ont raison : savoir échanger sans attaquer, écouter sans se sentir menacé·e, favorise la réciprocité et la possibilité d’une remise en question mutuelle.
Quelqu’un qui ne reconnaît jamais ses torts peut susciter de la méfiance. À l’inverse, être capable de se remettre en question favorise la confiance, puisque cela montre une forme d’ouverture d’esprit et de culture du dialogue. Cela permet également de gagner en crédibilité et d’être plus facilement pardonné.
La coopération entre les individus encourage forcément des modes de vie plus collectifs et plus justes. Par là, on navigue donc vers des sociétés plus horizontales où « ceux qui savent » feront preuve de plus de modestie et n’iront pas humilier ou écraser le reste de la population. Se remettre en question, reconnaître ses torts et s’excuser peut apaiser les interactions et être indispensable pour une véritable démocratie et des forces collectives durables.
L’autocritique s’avère être un pilier de tout mouvement de transformation de la société. Parce qu’admettre ses erreurs, c’est également tirer des leçons pour l’avenir afin de ne pas les reproduire. À l’inverse, rester cantonné sur ses positions peut induire en erreur, sans aucune perspective d’évolution.
De plus, savoir se questionner évite un endoctrinement aveugle et une soumission à une personnalité forte ou à une idéologie qui imposerait sa vision au plus grand nombre (à ce titre, l’exemple de l’URSS est riche en enseignements). Par là, apprendre des échecs des organisations passées est une démarche précieuse.
S’il existe un refus idéologique de sortir d’un système dominant, qui est pourtant un échec sur beaucoup de plans, ce n’est pas uniquement à cause de l’influence médiatique ou du manque de démocratie, c’est bien aussi parce qu’il est compliqué pour beaucoup d’admettre avoir vécu dans l’erreur pendant de nombreuses années.
Néanmoins, cette acceptation est une des clefs d’une porte vers des systèmes alternatifs, des fonctionnements différents qui ne seraient plus considérés comme de simples utopies. Un cheminement d’autant plus difficile lorsque l’on a soutenu bec et ongle un champ politique.
Toutefois, même si cette évolution peut être lente, elle apparaît malgré tout comme indispensable pour s’extraire du fatalisme distillé par le capitalisme. Derrière les discours voulant nous inculquer une certaine forme de fatalité, il existe cependant une voie vers d’autres types de sociétés : décroissance, entraide, démocratie, etc. Une route qui passera nécessairement par des changements profonds de mentalité.
– Simon Verdière
Photo de couverture de Kindel Media
The post Top 5 des bonnes raisons d’avoir tort first appeared on Mr Mondialisation.13.11.2025 à 12:03
Mr Mondialisation
On en est là. Éruptions de joie et autres expressions de réjouissances. 42 personnes se sont noyées en mer suite à un naufrage au large de la Libye, très loin de la France. Mais voilà, ces personnes ne sont pas françaises, ce qui semble justifier des commentaires d’une malfaisance confondante. L’information publiée par le Figaro […]
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Hier 12 novembre 2025, le Figaro titrait : Naufrage au large de la Libye : 42 personnes présumées mortes. On apprend dans cet article que quarante-deux personnes sont décédées en mer après le naufrage d’une embarcation transportant plusieurs dizaines de migrants au large des côtes libyennes, selon un communiqué des Nations unies. Très loin de la France, donc.
Ce type de nouvelle est tristement banal. Entre 2 000 et 3 000 personnes meurent chaque année lors d’une tentative de traversée de la Méditerranée, principalement vers l’Italie, la Grèce ou l’Espagne. De manière rituelle, Le Figaro informe son lectorat de la nouvelle. Mais ce n’est pas de l’étonnement ou de la tristesse que ceci génère, mais bien une effusion de joie. Et on ne parle pas de 2-3 messages isolés. 90% des commentaires fêtent la mort dans d’atroces souffrances d’êtres humains parfaitement anonymes. Hommes, femmes, enfants, vieillards. Une banalisation du mal qui en dit long sur l’état de cette presse autant que de la mentalité venimeuse de celles et ceux qui la lisent.


Ces commentaires révèlent aussi les composantes d’un narratif politique et médiatique fondé sur la désinformation, la haine et la déshumanisation. Quoi qu’on puisse individuellement penser des mouvements migratoires et des moyens de les gérer, rien ne justifie un tel manque d’humanité. Par ailleurs, il existe des causes et des faits qui ne peuvent être ignorés. Parmi les intox et sophismes communs distillés dans ces commentaires, on retrouve notamment : l’idée que l’arrivée de migrants sur les côtés françaises serait massive, la croyance que des associations humanitaires « subventionnées » faciliteraient l’arrivée des migrants ou encore que « la gauche » serait responsable de ces morts… Étudions ces questions pour y voir plus clair.
Première constatation, il n’existe pas de route maritime directe vers la France. Pratiquement aucune de ces embarcations n’arrivent sur les côtés françaises, bien surveillées et plus difficiles d’accès pour des raisons géographiques. Par ailleurs, l’ouverture de ports pour les navires humanitaires est toujours bloquée par la France.
Ainsi, le rapport UNHCR / IOM « Joint Annual Overview » (2023) indique seulement 260 arrivées sur les côtes françaises sur 212 100 tentatives, soit 0,12%. La part des traversées visant directement la France est pratiquement nulle. C’est tellement insignifiant que le rapport ne s’attarde même pas sur ces cas français. C’est un fait, la France n’est pas une cible pour les passeurs tant ses côtes sont radicalement gardées et les associations jugées « de gauche » n’ont pas le pouvoir d’y changer quoi que ce soit.

C’est une autre intox persistante : celle qui voudrait que « les ONG » soient financées par l’État ou l’Union européenne pour encourager les migrations. C’est totalement faux. En réalité, ces structures humanitaires sont quasi inexistantes en Méditerranée française, et ne reçoivent aucune subvention publique pour leurs opérations de sauvetage.
Les quelques navires humanitaires qui sillonnent encore la Méditerranée ne remplissent pas les doigts d’une main.

On retrouve principalement en mer SOS Méditerranée et Médecins Sans Frontières, deux ONG qui agissent en autonomie totale, souvent au prix de procédures administratives lourdes, d’interdictions de ports et d’une hostilité politique constante, y compris en France. Leur mission ? Sauver des vies, sans se préoccuper de la politique. Rien de plus, rien de moins. Dans le vide laissé par les États européens, ce sont ces équipages civils qui évitent chaque année des centaines morts. Ceux-ci manquent cruellement de moyens et ne peuvent que sauver une petite fraction des naufragés.
Parler de « business de l’immigration » ou d’une « industrie subventionnée du sauvetage » relève d’une désinformation pure et simple parsemée de racisme, martelée pour détourner les yeux de causes bien réelles : les guerres, la misère, les passeurs, l’exploitation des ressources, les dictatures et choix politiques sans oublier le changement climatique qui poussent des gens ordinaires à risquer leur vie pour fuir leur pays. Les morts sont si nombreux en mer que les motifs pour prendre un tel risque d’y laisser sa vie sont viscéraux, motivés par une situation humanitaire critique. L’idée que ces gens désespérés prennent le risque de mourir pour des droits sociaux fantasmés ne tient pas la route, d’autant que les aides existantes ne sont pas aussi alléchantes que le laisse entendre l’extrême-droite.

Autre idée reçue : « la gauche » encouragerait les traversées ou bloquerait toute politique migratoire. C’est faux, et les faits le montrent.
En France, aucune formation politique majeure n’a remis en cause la fermeture des frontières ni le durcissement continu des conditions d’accueil. Même les partis qui se réclament des valeurs humanistes se contentent de quelques déclarations symboliques, souvent timides, pour ne pas perdre une partie de leur électorat. Sur le terrain, le silence domine, et les politiques menées depuis plusieurs années ne diffèrent guère de celles de la droite ou de l’extrême droite sur le fond.
Depuis plus d’une décennie, la logique sécuritaire s’est imposée comme un consensus transversal. Elle s’habille de mots techniques : “lutte contre les passeurs”, “maîtrise des flux”, “gestion des frontières” mais masque une réalité brutale : celle d’un verrouillage généralisé de l’Europe. Derrière chaque décret, chaque accord bilatéral avec la Libye, la Tunisie ou le Maroc, c’est le même principe qui prévaut : empêcher les départs, à tout prix ! Affirmer que la gauche – dont le pouvoir politique est inexistant – encouragerait l’immigration dans un tel contexte relève du mensonge et de l’aveuglement idéologique.

Le paradoxe, c’est que ces politiques censées sauver des vies en “décourageant” les traversées les rendent au contraire plus mortelles que jamais, ce qui explique l’augmentation des décès en mer. Les routes changent, se rallongent, se déplacent vers des zones plus dangereuses pour éviter les contrôles. Là où les garde-côtes européens n’interviennent plus, les naufrages se multiplient dans le silence. Et pendant ce temps, les discours politiques comme médiatiques se contentent de désigner des coupables imaginaires : les ONG, “Bruxelles” (qui a bon dos), les humanistes, sans oublier une gauche fantasmée qui n’existe plus que comme repoussoir sémantique.
Dans les faits, la gauche institutionnelle a déserté la question migratoire et n’a de toute manière concrètement aucun pouvoir politique depuis longtemps. Elle ne propose plus ni projet alternatif, ni vision solidaire, ni parole claire sur ce que devrait être une politique humaine et rationnelle des migrations. Résultat : le terrain est laissé libre à ceux qui, depuis vingt ans, façonnent le débat avec des mots de peur : invasion, submersion, identité, frontière. Et dans ce brouhaha de certitudes anxieuses, la compassion s’efface, l’analyse se tait, et la raison abdique. C’est dans ce terreau fétide fondé sur l’ignorance que naissent les commentaires que vous lisez sur Le Figaro : désigner un coupable politique dont le pouvoir n’existe pas, fermer les yeux sur des pertes humaines évitables, et enfin se réjouir de la mort d’êtres humains.

On parle toujours des migrants, jamais des raisons qui les poussent à partir. Derrière chaque traversée, il y a pourtant un enchaînement de causes identifiables et singulières pour chaque individu : guerres civiles, effondrement économique, répression politique, désastre climatique, etc. Selon les données du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), près de 90 % des personnes qui tentent la traversée de la Méditerranée fuient des situations de crise aiguë. Ce ne sont pas des “aventuriers économiques” qui aspirent au RSA, mais des familles, des étudiants, des travailleurs, des enfants.
L’Afrique subsaharienne, par exemple, subit de plein fouet les effets conjugués du changement climatique et de l’instabilité politique : désertification, raréfaction de l’eau, conflits pour les ressources. En parallèle, les politiques commerciales et extractivistes menées par les pays riches maintiennent une dépendance structurelle. Dans ce contexte, partir devient souvent le seul horizon. Parlons aussi des thoniers géants Européens qui vident les stocks de poissons des côtes africaines, laissant des dizaines de milliers d’individus sans ressource. Et ces règles qui permettent aux causes migratoires de se perpétuer, la France et les pays européens en sont directement responsables pour des questions d’intérêts économiques supérieurs. Notre appétit capitaliste se moque bien de la souffrance locale qui pousse des individus à fuir leur pays. Et voilà comment NOS pauvres en viennent à détester d’AUTRES pauvres qui subissent les mêmes effets délétères d’un système injuste.

Ignorer ces causes par pure haine de l’autre revient à se tromper de combat. Les mêmes qui se réjouissent d’un naufrage prétendent “lutter contre l’immigration” sans jamais questionner les mécanismes qui la provoquent par pure fainéantise intellectuelle. Pas sûr même qu’ils seraient en mesure de lire et de comprendre cet article tant, ailleurs, on leur sert une soupe simplifiée en 3 mots niveau Pascal Praud : l’immigration nous menace. Les guerres alimentées par des ventes d’armes européennes, l’exploitation des terres africaines par des multinationales, le dérèglement climatique mondialisé, tant de causes sont directement liées à notre civilisation insatiable qui dicte les règles sans partage depuis trop longtemps.
Traverser les mers avec 50% d’y laisser sa peau, n’est pas un choix, c’est le symptôme d’un déséquilibre global. Oui, c’est une situation terriblement complexe qui demande des solutions tout aussi complexes. Tant qu’on refusera de regarder en face cette complexité, les morts continueront de s’accumuler, invisibles, loin des côtes françaises, mais au cœur même de notre indifférence collective. Se réjouir de la mort de gens dans la détresse, c’est le degré zéro de l’intelligence émotionnelle et une honte absolue envers ce qui fait fondamentalement de nous des humains. Et si nous ne sommes plus capables d’humanité la plus élémentaire, alors tout devient possible, surtout le pire.

– Mr Mondialisation
Sources
– Naufrage au large de la Libye : 42 personnes « présumées mortes » ; Le Figaro 12/11/25
-Migrants and Refugee Movements through the Central Mediterranean Sea in 2023 ; rapport de l’UNHCR, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés
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13.11.2025 à 05:00
Mr Mondialisation
De consultant urbain à cofondateur d’un écovillage en Bretagne, Jean-Christophe Anna a tout quitté pour bâtir un autre modèle de société. À travers L’Archipel du Vivant et son MOOC sur la biorégion, il propose une alternative radicale à la transition écologique : reconstruire le monde à partir du vivant. Changer le monde à l’échelle planétaire […]
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Changer le monde à l’échelle planétaire ? Une illusion, selon Jean-Christophe Anna. Pour lui, la véritable révolution se joue localement, où les humains et non-humains réapprennent à cohabiter, voire à réhabiter. Entre utopie concrète et philosophie politique, il défend la biorégion comme réponse crédible à l’effondrement écologique et social en cours.

Jean-Christophe Anna : « Je me définis comme un rebelle amoureux du vivant et un utopiste biorégionaliste. Avant, j’étais un maillon du système, tout en étant conscient que nous vivions dans une société complètement folle et profondément inégalitaire.
En 2017, j’ai opéré une bascule aussi profonde que radicale. J’ai d’abord adopté tous les petits gestes : bannir le plastique, privilégier le local, bio et de saison, renoncer à l’avion… Après avoir été végétarien pendant un an, je suis devenu végan et antispéciste à l’automne 2018.
Cela n’a pas été sans conséquence sur mes proches. Aujourd’hui, je passe chaque semaine d’un univers à l’autre. Je vis entre deux mondes que tout oppose : une semaine ancrée dans le vivant, où j’habite dans une tiny house sans eau ni électricité, au sein d’un écovillage que j’ai cofondé en centre Bretagne ; et une semaine à Strasbourg, métropole urbaine avec sa pollution, ses injonctions à la consommation et ses rondes de policiers, gendarmes et militaires, où j’ai la garde alternée de mon fils de 14 ans. D’un côté, le monde de demain en train d’émerger ; de l’autre, celui d’aujourd’hui, en cours d’effondrement. »
Jean-Christophe Anna : « L’Archipel du Vivant est l’aboutissement d’une intense réflexion de trois ans, ponctuée d’expériences diverses et variées et de belles rencontres.
Dès ma bascule, j’ai rapidement compris que nous nous trompions de combat : le climat n’est qu’un symptôme et un facteur aggravant de la catastrophe écologique. Mais c’est le vivant qui est exterminé par la quasi-totalité des activités humaines. Le climat ne disparaîtra pas, il se dérègle. Le vivant quant à lui est en danger de mort.
Il faut alors tout repenser pour instaurer un système politique véritablement démocratique fondé sur de petites unités locales (les communes) plutôt que sur l’État-nation et sa démocratie représentative qui ni représentative, ni démocratique.
Jean-Christophe Anna : « L’Archipel du Vivant est une ONG dont la raison d’être est de créer une société au service du vivant en contribuant à l’émergence de biorégions.
Nous poursuivons deux missions. D’un côté, notre site internet vise à informer pour permettre une meilleure appréhension de la catastrophe écologique et la découverte du monde alternatif.
De l’autre, notre Mooc « Biorégion – Comment habiter autrement la Terre » qui est une formation en ligne de 7 semaines et notre aventure immersive « Biotopie – l’utopie biorégionale » de 5 jours en présentiel à l’école des Vivants, fondée par Alain Damasio, ont pour objectif d’impulser une dynamique biorégionale dans les territoires.

Une multitude de ces initiatives existent dans les ruralités, en marge du système dominant — écovillages, écolieux, recycleries, cafés associatifs, repair cafés, épiceries solidaires, monnaies locales, ZAD… Cependant, ces initiatives restent éparpillées, encore trop isolées les unes des autres.
Bien entendu, elles peuvent s’unir pour organiser une fête de village ou un événement culturel. Mais elles ne font pas système dans une perspective de résilience pour affronter l’effondrement et encore moins dans un objectif politique d’autonomie, d’autodétermination, d’affranchissement des institutions et de l’État-nation. Notre objectif est donc de mettre en lien ces initiatives, de les « archipéliser » pour les amener à s’organiser politiquement.
Éco-anarchiste, l’utopie biorégionale puise ses racines chez Élisée Reclus et Pierre Kropotkine. Elle a justement pour vocation finale de faire sécession avec l’État-nation. »
Jean-Christophe Anna : « La biorégion originelle est nord-américaine. Elle est née au milieu des années 1970. En France, ce concept est porté par quelques personnes et quelques organisations : Guillaume Faburel (Société écologique du post-urbain), Mathias Rollot, le collectif Hydromondes, et enfin Agnès Sinaï, Yves Cochet et Benoît Thévard (Institut Momentum). Nous ne sommes encore qu’une poignée à travailler dessus.
La première définition de la biorégion est l’œuvre d’Allen Van Newkirk en 1975, l’année de ma naissance. Nous avons donc, la biorégion et moi, fêté nos 50 ans cette année ! Ce mouvement a abouti à la rédaction d’un texte véritablement fondateur du biorégionalisme, coécrit par Peter Berg et Raymond Dasmann : Reinhabiting California publié en 1977.
Anticapitaliste, anti-étatique, anti-nationaliste et anti-raciste, le biorégionalisme entretient une très grande proximité avec d’autres courants écologistes : l’antispécisme et l’écologie décoloniale, le municipalisme libertaire et le décroissantisme, l’écologie profonde et l’écoféminisme. Comme le pense Doug Aberley, le biorégionalisme incarne une véritable démarche de résistance susceptible d’agréger l’ensemble des luttes écologiques, sociales et culturelles. »
Jean-Christophe Anna : « Une biorégion, c’est une région de vie, un territoire caractérisé par le vivant qu’il héberge, par les formes de vie qui y habitent et son harmonie écosystémique, hydrographique, géographique, topographique et climatique. La biorégion s’affranchit donc des frontières artificielles, administratives humaines pour épouser les contours du vivant.
« La biorégion est aussi une utopie, un projet politique d’autodétermination : une manière de repenser comment les humains habitent et réhabitent un territoire en respectant le vivant. »
La biorégion se caractérise par la souveraineté et l’autonomie de la plus petite unité politique pour tout sujet qui relève de son périmètre. Seules les questions qui concernent toute la biorégion ou la confédération de biorégions, celles relatives par exemple à la santé, l’éducation ou la justice, sont traitées au niveau de chaque biorégion ou au niveau de la confédération.
Dans une logique de démocratie directe, chaque unité politique locale est systématiquement sondée avant la prise de toute décision. Plusieurs allers-retours entre l’assemblée globale et l’unité locale vont alors se succéder avant que la décision soit adoptée.
Au Chiapas zapatiste dont l’organisation politique est proche de la philosophie biorégionale, les mandats sont courts, impératifs, révocables, non reconductibles et non rétribués. Ils sont exercés par des personnes qui ne sont en aucun cas des professionnels de la politique. »

Jean-Christophe Anna : « Contrairement à l’État-nation dont les frontières sont censées le mettre à l’abri de toute menace étrangère ou aux idées de repli sur soi véhiculées par l’extrême droite, la biorégion n’est pas un territoire fermé.
Elle n’a pas vocation à se protéger de l’extérieur, mais à accueillir l’altérité, notamment les personnes migrantes, et pas uniquement les réfugié·es climatiques, mais aussi les personnes qui quitteront les villes lorsque ces dernières seront devenues inhabitables. La biorégion constituera alors un espace refuge.
En outre, la biorégion a également pour ambition de créer une société libérée de tout rapport de pouvoir et de domination, aussi bien entre humains et non humains que dans les rapports inter-humains. »
Jean-Christophe Anna : « Après de nombreux échanges avec Guillaume Faburel – avec qui j’ai travaillé au sein de la Société écologique du post-urbain, nous avons, en 2022, co-organisé deux séminaires dédiés spécifiquement à la biorégion, avec plusieurs associations dont le Réseau RELIER, l’Institut Momentum, HALEM ou encore le Mouvement Colibris.
Il en est sorti l’appel « Concevoir une biorégion depuis son espace écologique de vie.«
Nous avons défini plusieurs repères adaptés à la configuration géographique européenne et à la descente énergétique et matérielle liée à l’effondrement de notre civilisation : un diamètre de 20 à 30 km (selon la topographie), 20 000 à 40 000 habitants, environ 4 300 m² par personne pour garantir l’autonomie (alimentation, chauffage, habitat). Tout le monde ne va pas nécessairement mettre les mains dans la terre pour la cultiver, mais cette surface individuelle est viable, à condition bien sûr que l’artificialisation cesse un jour.
Nous avons alors eu l’idée de concevoir un Mooc afin de toucher un maximum de monde avec une formule en ligne plus souple qu’une formation classique physique. La première session a débuté en janvier 2024 et nous venons d’achever la quatrième session. »
Jean-Christophe Anna : « MOOC signifie Massive Open Oline Course, donc en français « une formation en ligne, ouverte à toutes et tous. » Avec ce MOOC, nous proposons une découverte théorique de l’utopie biorégionale.
Il s’articule autour de cinq grands enjeux : L’extermination du vivant, notre manière d’habiter la Terre (ville, métropole…), l’effondrement et les risques systémiques, les dominations et les oppressions systémiques et pour finir le déni démocratique. Chaque semaine, les participant·es explorent des modules et sous-modules multimédias, à savoir trois sous-modules par module, un défi à relever, et une rubrique « pour aller plus loin ».
S’appuyant sur du contenu théorique, notre Mooc Biorégion a également une forte dimension interactive avec des visios hebdomadaires et une communauté en ligne sur Mattermost. Les participant·es peuvent ainsi interagir directement. D’autant plus que toutes les personnes inscrites aux différentes sessions du Mooc sont localisées sur une carte GogoCarto. Plusieurs d’entre elles se sont déjà rencontrées sur leur territoire.
Le tout représente environ 20 heures d’autoformation pour la formule basique, et jusqu’à 40 heures pour la formule enrichie. Les contenus restent accessibles pendant plusieurs mois jusqu’à la session suivante. Les visios sont animées par des facilitatrices et des facilitateurs formé·es par Fertiles. Cette année, nous avons ajouté une approche émotionnelle en abordant chacun des cinq grands enjeux, avec des questions comme « Comment vivez-vous l’extermination du vivant ? »
Les retours sont très positifs : nous adaptons le contenu au fil des sessions. À ce jour, 340 à 350 personnes ont participé au MOOC. »
Jean-Christophe Anna : « Il fonctionne sur le principe d’une participation libre et consciente. Lors de chaque session, nous comptons entre 60 et 80 personnes inscrites. Parmi elles, environ 25 à 40 personnes s’engagent vraiment dans le Mooc jusqu’au bout. Ce sont elles qui contribuent financièrement. »
Jean-Christophe Anna : « Afin de compléter cette première approche biorégionale théorique en ligne, nous invitons les participantes et participants à prolonger l’expérience dans une aventure immersive opérationnelle qui se déroule en présentiel sur 5 jours.
« La prochaine édition de cette aventure « Biotopie » aura lieu du 23 au 29 novembre en Centre-Bretagne, à Mellionnec. »
Ce sera une immersion complète, avec un escape game pour trouver des réponses concrètes aux immenses défis à relever, un jeu de l’entraide, proposé par notre partenaire Adaptation Radicale, simulant un effondrement, une réflexion collective sur les habitudes, les besoins, les atouts et faiblesses, les leviers et les freins, la co-construction d’une stratégie biorégionale, une cartographie créative du territoire biorégional, l’écriture d’un récit utopique et sa mise en scène théâtrale avec notre partenaire futurs proches, une reconnexion au vivant en forêt avec notre partenaire Identi’Terre, la découverte d’initiatives alternatives locales et des soirées conviviales et artistiques, notamment avec notre partenaire Frissons Sauvages. »
Jean-Christophe Anna : « Notre ambition est de donner aux participantes et participants une boîte à outils afin d’impulser une dynamique biorégionale dans leurs territoires respectifs.
Dans l’idéal, il faudrait que plusieurs biorégions déclarent leur indépendance de manière simultanée ou rapprochée dans le temps au moment-même où l’effondrement atteindra son stade ultime. Ou du moins qu’elles déstabilisent l’État.
Car si une biorégion devait avoir des velléités sécessionnistes de manière trop isolée, elle serait immédiatement écrasée par les forces de l’ordre en subissant la folie répressive totalement décomplexée du gouvernement français. »
Jean-Christophe Anna : « Après deux premiers livres pour y partager mon constat Le climat n’est pas le bon combat, et un autre Écrivons ensemble un nouveau récit pour sauver la vie, je travaille actuellement sur un récit utopique d’anticipation.
L’action principale de ce roman se déroule en 2047. L’ère biorégionale a succédé à l’ancienne ère, celle du système dominant actuel qui s’est effondré et des États-nations qui ont disparu. On y découvre les différentes facettes d’une confédération de trois biorégions, 12 ans après leur déclaration d’indépendance. C’est à nous désormais d’écrire un nouveau récit collectif, d’inventer nos propres règles pour nous mettre au service du vivant ! »
– Propos recueillis par Maureen Damman
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Mr Mondialisation
80 %. C’est le pourcentage d’espèces « vivantes » qu’abritent forêts et sols français, mais aussi celui de l’augmentation de la mortalité des arbres en 10 ans, d’après l’inventaire forestier national. Deuxième puits mondial de carbone après l’océan, la forêt séquestre 1,5 fois plus de carbone que ce que les États-Unis émettent annuellement. Beaucoup d’essences sont […]
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L’inventaire forestier national est sans appel : les conséquences du changement climatique se traduisent par une très forte augmentation de la mortalité des arbres, passant de 7,4 millions de mètres cube par an (Mm3/an) entre 2005 et 2013 à 13,1 Mm3/an entre 2013 et 2021. Leur croissance est aussi impactée, avec une baisse significative de 4 % : « la surface forestière touchée actuellement par le dépérissement est équivalente au cumul des surfaces touchées par les incendies de ces 35 dernières années », conclut sinistrement l’inventaire.
Sur le podium des espèces les plus touchées par la mortalité se retrouve d’abord l’épicéa, devant le châtaignier et le frêne. Sur la période 2018-2022, la production de bois d’épicéa est inférieure aux coupes et à la mortalité, très fortement liées à un petit coléoptère, le scolyte, qui profite du prolongement des saisons chaudes et des hivers doux pour proliférer, se loger et se nourrir dans les épicéas communs.
Roulement de tambours : comment lutte-t-on à l’heure actuelle contre les scolytes ? En faisant des coupes d’épicéa. Un cercle vicieux donc, comme on en compte beaucoup dans les problématiques du changement climatique.

De la même manière, le frêne souffre de la chalarose, causée par le champignon Hymenoscyphus fraxineus, qui apprécie la compagnie d’un autre coléoptère : l’agrite du frêne. Aucune mesure de traitement n’existe en dehors de coupes et d’abattage pour éviter la propagation de ce duo meurtrier.
Certains frênes montrent heureusement une résistance naturelle à la maladie, un espoir pour la sélection et la plantation de souches plus résistantes, et pour le phénomène de « résistance croisée » – la résistance à l’un aide à résister à l’autre – selon le chercheur Michael Eisenring.
Enfin, le châtaignier dispute la troisième place avec le pin, le chêne, le sapin, et bien d’autres, tous victimes de parasites, sécheresses et feu de forêts.
Les forêts françaises ne font pas exception et les mêmes constats sont dressés partout dans le monde. Sans parler de la déforestation qui a augmenté, en Amazonie, de 33 % par rapport à 2023 selon les données de l’Institut National de Recherche Spatiales (INPE), l’Afrique n’est pas en reste, avec, sur la période 2010-2020, une disparition nette de 3,94 millions d’hectares de forêts, un chiffre en hausse par rapport aux décennies précédentes et très supérieur à celui de l’Amérique du Sud (2,60 millions d’hectares), selon la fondation FARM.

Il fut un temps où, basé sur les « performances » des puits de carbone des dernières décennies, on crut à l’augmentation infinie de leur capacité à le séquestrer. Malheureusement, ces capacités ont chuté en 2023, entre autres, à cause des sécheresses et incendies. (De quoi nous rappeler certains scenarii sur la croissance infinie). Les premières hypothèses avancèrent que 2023 était l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec une très forte concentration de CO2 dans l’atmosphère – près de 86 % par rapport à 2022 – jusqu’à ce que l’été 2024 dépasse celui de 2023.
L’inventaire forestier national de l’IGN confirme ces données sur la dernière décennie étudiée : « le puits [ndlr les forêts] s’est établi à 40 millions de tonnes de CO2 par an en moyenne sur la période 2013-2021, diminuant d’un tiers en une décennie ». Pire, certaines forêts pourraient émettre plus de CO2 qu’elles n’en capturent, ce qui, d’après Philippe Ciais, du Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, pourrait se produire d’ici 2026, si les tendances observées depuis quinze ans se poursuivent.

L’idée est simple comme bonjour : planter des arbres adaptés aux nouvelles conditions climatiques d’un lieu donné. Par exemple, dans la moitié nord de la France, qui subit aussi des sécheresses de plus en plus fréquentes, les chênes verts ou tauzins qui consomment peu d’eau, pourraient assister leurs cousins locaux. Une équipe de scientifiques a créé les jardins partagés, espaces de cohabitation entre des espèces d’ici et d’ailleurs.
Alexis Ducousso, généticien à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, raconte :
« Nous y avons planté 107 populations d’arbres venant de toute l’Europe, avec l’objectif d’évaluer ce “mélange” sur trente ans. Nos résultats montrent notamment que le chêne sessile est particulièrement adaptable : il s’épanouit sans broncher de l’Écosse à la Turquie. De même, le sudiste chêne pubescent peut migrer vers les Hauts-de-France sans trop de problème. »
Malheureusement, la migration montre ses limites : un arbre qui a besoin de moins d’eau pour vivre en bonne santé humidifie moins la forêt. Pour les autres essences ou pour les animaux, aussi ceux que nous sommes, ce type d’arbres serait moins efficace pour contrer les canicules, et pourrait même accélérer les sécheresses. Idem, si l’on donne plus de place aux pins et aux eucalyptus, très inflammables, ne pourrait-on pas augmenter les feux de forêts ?

La mangrove – écosystème côtier tropical typiquement caractérisé par des arbres et des arbustes adaptés à des conditions de variations de salinité et de niveaux d’eau – stocke jusqu’à 4 fois plus de carbone que les forêts.
En plus de stocker du carbone, les mangroves protègent les littoraux des tempêtes, freinent l’érosion des côtes, filtrent les pollutions et sont de véritables nurseries pour la biodiversité marine. Pourtant, on ne cesse de les détruire partout dans le monde, pour l’élevage intensif de crevette en Asie ou pour le charbon de bois en Afrique, si ce n’est pour les constructions littorales déjà fragilisées par l’érosion.

Restaurer les écosystèmes forestiers à leur état sauvage permet de créer des forêts diversifiées. Ces forêts sont naturellement caractérisées par une multitude de processus écologiques complexes qui leur confèrent une grande résilience face aux perturbations.
Parmi les défenseurs les plus remarquables de cette cause se trouve le botaniste Francis Hallé. Particulièrement connu pour son engagement en faveur du retour des forêts primaires en Europe, Hallé souligne que les forêts primaires, qui n’ont jamais été touchées par les activités humaines, sont essentielles non seulement pour la biodiversité, mais aussi pour la santé écologique globale de la planète. Elles agissent comme des réservoirs de biodiversité, des puits de carbone et des protecteurs naturels contre l’érosion des sols et les catastrophes naturelles.

En Europe, l’une des dernières forêts considérées véritablement primaires celle de Bialowieza, à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, n’a subi aucune transformation anthropique depuis au moins huit cents ans. Sa protection est donc cruciale, non seulement pour la conservation de ses centaines d’espèces de faune et de flore, mais aussi comme symbole et modèle de ce que pourraient être d’autres forêts si elles étaient laissées à leur propre dynamique.
Pourtant, certains défendent l’idée de donner un prix, et donc une valeur aux forêts, pour les faire « exister » dans le système capitaliste actuel. Dans un podcast de France Culture, intitulé faut-il donner un prix à la nature pour la protéger ?, Catherine Aubertin, économiste de l’environnement explique le concept de service écosystémique de la manière suivante : « Les écologues ont introduit la notion de service écosystémique afin de défendre la nature. Cette notion englobe l’ensemble des services que la nature peut fournir aux populations, comme par exemple la production alimentaire. Le concept a été créé pour capter l’attention des décideurs politiques. Aujourd’hui, on assiste à l’émergence du principe du pollué-payeur… » L’une des approches consiste à attribuer un prix ou une valeur monétaire à la nature, de façon similaire à ce qui a été envisagé pour la problématique climatique.

Parce qu’aujourd’hui, dans de nombreux pays, les entreprises sont des personnes, alors que ni les animaux, ni les végétaux ne le sont, l’avocat sud-africain Cormac Cullinan, fondateur du mouvement des droits du vivant, cherche à donner une personnalité juridique à la forêt.
De nombreuses initiatives vont déjà dans ce sens : la Nouvelle-Zélande accorde au fleuve Whanganui le statut d’entité vivant en 2017, l’Ouganda reconnaît des droits à la nature en 2019, la lagune espagnole Mar Menor obtient le statut de personnalité juridique en 2022. De quoi inspirer les Français, qui ont demandé une déclaration des droits de la Loire en 2024.
– Maureen Damman
Photo de Ron Lach. Pexels.
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