20.12.2021 à 20:00
lundimatin
Cela faisait un moment que nous voulions, à lundisoir, parler de féminisme. Mais c’était pas évident de trouver les bonnes coordonnées au cœur d’une question à la fois aussi vaste et intime. D’un côté il y a ce phénomène désormais médiatique : la libération de la parole des femmes. Et oui ça y est, les femmes ont appris à parler, il leur arrive même de déposer plainte, de signer des tribunes, voire de coller des affiches. À cela on pourrait être tentés de répondre : les femmes ont toujours parlé, il n’y avait juste pas grand monde qui écoutait, à peu près aucun média pour leur donner de l’écho. Ou encore : parler ne sera jamais suffisant. Les mots, les témoignages, ne sauront jamais être une riposte à la mesure de tous les coups que nous avons pris et continuons de prendre.
Et puis il y a aussi ce bruit permanent, ces acouphènes interminables que l’on ressent : tout le monde parle désormais de féminisme, tout le temps. Et tout le monde a son petit mot à dire sur la question, soit pour geindre de l’apocalypse matriarcal final (lol), soit pour se valoriser personnellement d’en être la plus belle et pure représentante. Des codes, de l’entre-soi et cet épuisant besoin de reconnaissance.On a donc voulu essayer de contourner tout ça ou peut-être de trouver quelques raccourcis. L’idée c’était d’ouvrir une discussion avec des femmes qui nous semblaient avoir quelques idées de méthode ou des pistes de réflexions pour dégommer le patriarcat.Trouver le ton, l’angle, les mots n’est pas simple. Comment parler de moyens alors qu’on ne sait même pas si l’on vise la même chose ? Mais aussi : comment déterminer des fins alors que le geste prescriptif est une des marques de fabrique du même patriarcat qu’il s’agit de démolir ?On a lancé un paquet d’invitations et on s’est dit qu’on allait laisser les micros enregistrer, que ça s’improviserait et qu’on avait suffisamment confiance en et entre nous pour s’épargner une direction. Beaucoup n’ont pas pu se joindre pour cette émission mais beaucoup sont venu.e.s aussi.Bref, on a tenté un truc, et il a été difficile pour certaines de participer, et pour d’autres de se taire, pas évident pour certaines de déborder, et pour d’autres de rester en place - mais on a essayé de clarifier quelques enjeux, évité quelques questions qui nous semblaient peut être trop lointaines.Qu’est-ce qu’une pratique féministe ? Comment sortir d’une position purement défensive ? Comment contrer celles (pratiques comme positions) qui nous affaiblissent ? Et donc : poser la question de notre propre puissance. Ce sont à peu près les coordonnées que nous avons retenues de cette première rencontre qui en appelle évidemment d’autres (on va pas tarder à envoyer de nouvelles invitations).Ce lundisoir, on a donc parlé de transmission, d’alliances, et de comment défoncer des ronces avec des pelles.
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13.12.2021 à 20:00
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La fondation Luma, à vocation philanthropique, sise dans la ville d’Arles, revendique son engagement pour la création sous toutes ses formes. Son plus éclatant symptôme est une tour érigée par l’architecte Frank Gehry inaugurée en juillet dernier. Du haut de ses 56 mètres, elle surplombe la cité. Position confortable depuis laquelle sa fondatrice – l’héritière Maja Hoffmann, environ 450e fortune mondial grâce à l’empire pharmaceutique Hoffmann-Laroche, qui s’est notamment illustré par la catastrophe industrielle de Seveso – peut remodeler la ville de 53000 habitants à la guise de ses ambitions.
Quelques amis arlésiens de passage par la mégalopole nous ont suggéré de manger ladite tour. « Quel appétit ! », nous sommes-nous d’abord réjouis. « Mais quel mauvais esprit ! », nous sommes-nous ensuite offusqués. Mais c’était avant de les écouter. Bonne dégustation.
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06.12.2021 à 17:00
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Le fardeau qui pèse sur les épaules, l’épuisement dans lequel certains ont le sentiment de traîner leur vie « comme un landau sous l’eau », la tristesse et l’abattement même dans lesquels nous pouvons nous trouver, toutes ces sensations de fatigue et de vides modernes sont-elles condamnées à une lecture et un traitement individuels ? Les dispositifs qui écoutent, soutiennent, aident ne privent-ils pas d’une mise en collectif de ces souffrances et de leur devenir politique ? Ne faut-il pas entendre dans nos intenses fatigues modernes qui semble avoir cédé sur tout désir le bouillonnement de la révolte à bas bruit ? C’est ce qu’essaie de penser Romain Huët dans l’excellent De si violentes fatigues, Les devenirs politiques de l’épuisement quotidien, à partir d’une enquête ethnographique et sociologique au long cours au sein d’une association de prévention contre le suicide. Nous en avons discuté avec lui.
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29.11.2021 à 20:00
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Nous en choyons - nourrissons, castrons, enfermons - certaines, à jamais enfants de nos foyers. Nous en mangeons et exploitons d'autres, tuées et dépecées le plus souvent en masse et loin de nos regards, entre autres pour nourrir les premières. Notre relation aux bêtes et nos sensibilités à leur égard sont un summum de contradictions et de problèmes éthiques dont une féroce division du travail peine à nous sauver. La chasse avec toutes les controverses qu'elle suscite est un des lieux les plus vifs pour penser ce mélange d'affects et d'élans qui nous traversent, nous laissant bien peu tranquilles quand il s'agit de repenser notre place parmi les vivants. Charles Stépanoff, anthropologue, spécialiste du chamanisme sibérien et auteur du très beau L'animal et la mort. Chasses, modernité et crise du sauvage, nous permet d'explorer ces territoires.
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08.11.2021 à 20:00
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Janvier 2014, la commune du Rojava est proclamée dans le nord de la Syrie historiquement kurde. Le PYD (parti de l’union démocratique) proche du PKK (parti des travailleurs du kurdistan) prend le contrôle de la zone et annonce l’instauration d’une zone autonome politiquement en s’inspirant du socialisme libertaire et du confédéralisme démocratique. L’expérience politique se retrouve néanmoins rapidement prise dans un étau militaire aux multiples fronts et ennemis.
Au fil des années, de nombreux volontaires internationaux ont rejoint la commune pour voir ce qui s’y expérimentait et défendre la zone des offensives de Daesh et de la Turquie notamment. Le front du Rojava pose de très nombreuses questions politiques, géopolitiques et stratégiques, quant à son rapport à la révolution syrienne, au démocratisme plutôt relatif du PKK, à sa forme-partie ou à ce que signifie pratiquement et éthiquement d’être acculé à une confrontation militaire. Beaucoup a déjà été dit et débattu à propos du Rojava, dans nos pages notamment, et comme pour toute tentative révolutionnaire, ce bilan se fera au fil des années, du recul et de l’évolution de ces expérimentations.
Pour ce lundisoir, nous avons rencontré Alexis qui a passé plus de 3 ans là-bas et a notamment participé à l’ouvrage collectif Hommage au Rojava publié en septembre 2020 aux éditions Libertalia. Nous lui avons proposé de nous raconter, sans surplomb, ce que cela pouvait signifier pratiquement de partir au Rojava, d’y combattre et d’en revenir.
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31.10.2021 à 19:00
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Comment comprendre les obsessions monstrueuses dont l'époque entoure ce qu'elle appelle « l'islam » ? Est-il possible, comme le font des voix minoritaires et bien intentionnées, de n'y voir qu'un aspect collatéral du racisme et de la démagogie gestionnaire ? Ou la continuation de vieilles logiques policières et contre-insurrectionnelles ?Cette interview de Mohamad Amer Meziane, auteur d'un livre intitulé "Des Empires sous la terre, histoire écologique et raciale de la sécularisation", aidera à aborder ces questions en prenant un peu de hauteur historique et théorique. Outre les analyses imposantes qu'il développe concernant le caractère impérial des Etats nations modernes ou la dimension écologique de la sécularisation, cet ouvrage permet de comprendre en quoi une loi sur le séparatisme ou un Eric Zemmour ne sont que les effets les plus récents d'un processus historique de sécularisation qui « loin de toute séparation de la religion et de la politique (...) est une manière de politiser la religion en lui faisant jouer le rôle de la race ».
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