10.08.2025 à 07:00
Le vrai problème de l’agriculture.
aplutsoc2
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La carte illustrant cet article provient de l’excellente page Facebook climatologique et agronomique de Serge Zaka. Voici ses commentaires : « Nous rentrons dans le cœur de la canicule. Les 40°C devraient être dépassés en France pendant au moins 5 jours. Cette durée est particulièrement remarquable. Jusqu’à 41.1°C dans la vallée du Rhône aujourd’hui. Sur le réseau principal de Météo-France, les 40°C sont 19 fois plus fréquent depuis l’an 2000. Oui, vous avez bien lu, 19 fois plus fréquents. »
« Je n’arrive toujours pas à y croire. Les prévisions de lundi restent unanimes et alarmantes sur l’ensemble des modèles. Avec des températures brutes de 40 à 44 °C sur de vastes régions, nous dépasserons largement les seuils de tolérance de tous les végétaux et animaux présents. Il ne s’agirait pas simplement de records mensuels battus, mais de records absolus pulvérisés, non pas de façon isolée… mais par dizaines. Si ces prévisions se réalisent, c’est un cauchemar absolu pour tous les agriculteurs du sud-ouest de la France. »
PENDANT CE TEMPS, que font les gros richards subventionnés qui dirigent la FNSEA et la Coordination rurale ? Ils appellent à une seconde loi Duplomb pour pouvoir mettre des néonicotinïdes partout ; ils veulent toujours faire dissoudre par Bayrou et Retailleau, tout à fait complaisants avec eux, l’Agence Française de la Biodiversité qu’en attendant ils attaquent physiquement ; et ils fantasment sur l’idée d’engloutir Sandrine Rousseau sous un océan de purin – leur purin, sous-produit de leur production.
Rarement secteur de la production, justement, aura été si mal représenté : par des industriels agro-financiers cherchant à organiser une clientèle misérable en milices de nervis. A un moment donné, ça suffit : c’est le message des près de 2,2 millions de signatures portant l’exigence majoritaire d’abrogation de la loi Duplomb : à la campagne comme à la ville, le mensonge sur « les agriculteurs » ne prend plus !
Il nous faut un régime et un gouvernement démocratiques, qui, face à l’urgence, socialise le sol, exproprie les richards qui polluent, permette ainsi à la petite production de prospérer pour de bon, protège forêts et zones humides, et appelle toute l’Europe à affronter les narcopétroliers planétaires pour qui l’humanité peut bien griller, les Trump et les Poutine !
Débat public d’Aplutsoc sur la situation française
Dimanche 21 septembre 14 h
Maltais rouge 40 rue de Malte Paris 11° + Zoom nous contacter.
08.08.2025 à 14:49
Victoire contre l’acétamipride, transformons l’essai pour l’abrogation de la loi Duplomb !
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Texte intégral (551 mots)
Le Conseil constitutionnel a statué sur plusieurs sujets jeudi 7 août. Aucune illusion n’est de rigueur envers cette institution créée par et pour la V° République. Cependant, cette constitution autoritaire n’a pu se délester de textes comportant des éléments de garantie des droits, dans son préambule et dans divers additifs. Le Conseil constitutionnel avait donc une difficulté concernant la loi Duplomb : la charte de l’environnement, incorporée à la constitution en 2005, est de toute évidence, à la lettre, en contradiction avec cette loi.
Le Conseil constitutionnel a fait service minimum mais il a du coup porté un coup à l’offensive des pollueurs trumpistes : il a censuré la disposition sur les néonicotinoïdes dont l’acétamipiride, et a émis une « réserve » sur les mégabassines. C’est bien le moins !
Mais il valide le reste de la loi et du coup la procédure elle-même, par laquelle une loi a été votée par le parlement sans débat, ce qui, en démocratie, en entrainerait l’annulation !
Si le Conseil constitutionnel a du casser l’article le plus connu de la loi Duplomb, sans vouloir aller plus loin, c’est évidemment en raison de 2,1 millions et plus de signatures exigeant son abrogation.
Les capitalistes qui se font passer pour des agriculteurs et des paysans, à la tête de la FNSEA et de la Coordination rurale, les Duplomb and co, hurlent que betteraviers et autres marchands de noisettes seront ruinés par la concurrence européenne ! Il est vrai que l’exécutif Macron/Bayrou/Retailleau, qui a soutenu la loi du cancer et son adoption sans discussion, est mal placé pour exiger des autres gouvernements européens l’interdiction des néonicotinoïdes !
Le Conseil constitutionnel a en outre censuré l’allongement de la durée de rétention des personnes étrangères condamnées dans l’attente de leur expulsion, en raison du principe de droit selon lequel la détention provisoire doit toujours être une exception, et ne peut donc être systématisée dans telle ou telle circonstance. Ce principe procède de l’Habeas corpus, acte fondateur de l’Etat de droit (Angleterre, 1689) : nulle personne ne peut être emprisonnée sans motif notifié et sans les moyens de sa défense, et son intégrité corporelle et morale doit être préservée. L’Etat de droit, pour Retailleau comme pour les Trump et les Poutine, est l’ennemi : il proclame que le « bien commun », cher aux Stérin et aux J.D. Vance, est au-dessus de l’Etat de droit.
Le Conseil constitutionnel a par ailleurs validé la loi sur les élections municipales à Paris, Lyon et Marseille et le durcissement des règles sur l’immigration à Mayotte.
Répétons le : c’est la lame de fond des 2,1 millions de signatures qui seule explique l’annulation de cette disposition de la loi Duplomb. Pour l’abrogation, comme pour empêcher le budget Bayrou de casser le temps de travail et les droits sociaux, la mobilisation généralisée et donc centralisée contre les lieux de pouvoir est nécessaire, dès la rentrée !
07.08.2025 à 14:31
Mégafeux et pyrocumulus, France.
aplutsoc2
Texte intégral (740 mots)
Les mégafeux sont apparus en Australie vers 2003, mais le terme n’est employé que depuis 2013 : ces très grands feux de forêts provoquent des convections atmosphériques produisant la formation de nuages mélangés de suie, dont la foudre propage l’incendie ailleurs, les pyrocumulus. Ce phénomène avait été repéré, et décrit, auparavant seulement lors des éruptions volcaniques – et dans les « champignons » des explosions nucléaires.
La Californie, la Grèce, le Portugal, puis l’Espagne, les ont connus depuis : c’est la destruction totale des paysages de ces pays et leur désertification qui sont engagées.
Les mégafeux ne sont pas la seule forme d’incendie dont le nombre et l’ampleur est causée par le réchauffement climatique provoqué par la combustion humaine des hydrocarbures, moyen industriel de consommer de l’énergie à moindre coût et puissant palliatif objectif à la tendance cyclique et croissante à la baisse du taux général de profit nécessairement induite par l’accumulation capitaliste.
Ainsi, dès les années 1990 et avant, les forêts tropicales et équatoriales, Amazonie, Congo, Bornéo …, sont rongées par un type spécifique de feux, déclenchés le plus souvent de façon volontaire pour défricher en vue de créer des cultures comme le soja ou l’huile de palme, qui ne s’arrêtent plus de progresser par le biais des sols humides, pendant des années : très polluants, ils asphyxient les villes indonésiennes et malaises dès 1997. En 2017 le président Bolsonaro au Brésil a levé tout obstacle légal aux incendies volontaires de destruction de l’Amazonie menés par les firmes de l’agro-business et les pauvres pionniers en freelance qui leurs servent d’éclaireurs, et Lula de retour au pouvoir n’a pas fait grand-chose pour limiter les dégâts.
De même les forêts boréales en Sibérie et au Canada soit affectées par des incendies gigantesques.
Si, dans cette « classification » des feux de l’époque de la crise biogéoclimatique, nous prenons la formation de pyrocumulus comme la différence spécifique des « mégafeux », alors nous pouvons dire que ce phénomène inconnu dans le passé historique vient d’arriver en France. Lors de la canicule de 2022, arrivée, là aussi pour la première fois, par la voie par où venait auparavant la fraicheur, l’ouest atlantique, sur la France et les îles britannique, des mégafeux se sont amorcés dans les Landes. Mais les incendies des Corbières, dans l’Aude, qui sont déjà les plus grands par leur surface (plus de 17 000 hectares à l’heure où sont écrites ces lignes) depuis 1949, et les plus rapides connus, viennent de voir, dans l’après-midi du mercredi 6 août 2025, se former, par l’ascension d’air brûlant, un angoissant pyrocumulus, analogue à ceux qui sont apparus en masse sur les montagnes du Sud-Est de l’Australie lors de l’été austral 2003. Ce serait alors le cas le plus proche des zones tempérées non méditerranéennes (ici, en limite méditerranéenne, mais le bassin aquitain devient de plus en plus une fournaise chaque été) d’un tel phénomène.
Si la finalité sociale résidait dans les besoins humains et donc naturels, un tel évènement serait de nature « Pearl Harbour », produisant une mobilisation générale pour stopper le processus catastrophique au niveau déjà atteint et faire face à ses conséquences.
François Bayrou : « L’évènement aujourd’hui, c’est un évènement qui est lié au réchauffement climatique et lié à la sécheresse. » Sans blague ?
Pour rappel, Macron, vœux de fin d’année 2022 : « Qui aurait pu prédire la crise climatique ? ». Sans blague …

06.08.2025 à 12:15
La Lettre d’Informations Syndicales du RESU : parution du numéro 15 !
aplutsoc
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A l’heure où l’Ukraine connaît un net accroissement de la pression militaire russe et après un mouvement populaire de la jeunesse ukrainienne rejetant avec succès une loi anti-démocratique et pro-oligarchie, la parution du numéro 15 de la Lettre d’Informations Syndicales du RESU (Réseau Européen de Solidarité avec l’Ukraine) est la bienvenue pour répondre au besoin de faire connaître largement les luttes sociales et syndicales menées par le peuple ukrainien.
Ce numéro couvre les informations de la période de février à juillet 2015.
Un numéro à faire circuler le plus largement possible !
Sommaire
- Éditorial : Arrêtez la saisie des biens de la FPU
- Appel des syndicats ukrainiens : arrêtez la terreur russe, protégez la paix et la justice
- Campagne :
- Arrêtez les importations de gaz russe !
- Soutien des syndicats ukrainiens au front
- Luttes des femmes en Ukraine
- Luttes étudiantes en Ukraine
- Luttes des personnes LGBTI+ en Ukraine
- Luttes environnementales en Ukraine
- Autres actualités et analyses sur l’Ukraine
- Luttes des travailleurs de la santé en Ukraine
- Luttes des travailleurs en Ukraine – chemins de fer
- Autres nouvelles syndicales d’Ukraine
- Problèmes sociaux en Ukraine
- Luttes communautaires en Ukraine
- Luttes environnementales en Ukraine
- Autres contributions
- Solidarité (appels aux dons)
- Solidarité avec les travailleurs et les syndicats ukrainiens (actualités)
- Luttes ouvrières en Biélorussie
- Analyse :
- Trois ans de guerre en Ukraine : le point de vue d’un syndicaliste russe, par Kirill Buketov, secrétaire politique de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation
- Évolution du mouvement syndical en Ukraine, par Oleksandr Skiba
- Lectures complémentaires
Disponible en deux versions : langue française, langue anglaise.
06.08.2025 à 11:10
Interventions Syndicales Numéro 11 – Août 2025 – Avis de parution
aplutsoc
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Sortir un bulletin Interventions Syndicales au cœur de l’été ! La situation le justifie. Car rarement ce moment de fin juillet début août, d’ordinaire le plus atone de l’année, n’aura été autant dominé, de bas en haut, par les conversations portant sur ce qui pourrait, sur ce qui devrait, se passer à la rentrée, dans un mois et demi …
La faute au budget Bayrou, bien sûr, dont le commentaire tient une bonne place de ce numéro. La faute à la capitulation devant les exigences « commerciales » de Trump des États européens, les mêmes qui laissent la famine génocidaire détruire la population de Gaza, qui n’arment pas immédiatement l’Ukraine pour que Poutine, et Trump avec lui, se prenne un grand coup.
Et donc, la faute à la perspective d’une censure de Bayrou, car cette fois-ci le RN ne peut pas le sauver sous peine de perdre sa base ! Censure de Bayrou qui, Macron refusant tout gouvernement démocratique issu de la majorité relative qui a gagné les législatives qu’il a provoquées l’an dernier, pourrait le conduire à nommer un gouvernement d’ « union des droites » avec Retailleau et le soutien, avec ou sans participation, du RN !
Au sommaire de ce numéro estival :
- Edito – pages 1 / 2
- Non, la dette ne doit pas être remboursée… – page 2
- Budget Bayrou : Sa vérité et la nôtre – pages 3 /4
- Accord Europe-états Unis: une capitulation au profit de l’extrême droite – page 5
N’hésitez pas à partager ce numéro d’Interventions Syndicales dans votre entourage personnel, professionnel, militant..
Envoyez commentaires, contributions ou critiques sur notre boite mail : aplutsoc [@] netc.eu
05.08.2025 à 17:34
Guerre mondiale : quid ? par Vincent Présumey.
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Texte intégral (9178 mots)
Le spectre de la guerre mondiale est là, depuis quelques années déjà.
Récemment, on a même vu Trump manier ce spectre de manière gesticulatoire pour donner l’impression qu’il « fait quelque chose », alors qu’il livre l’Ukraine à Poutine, et pour que l’on parle d’autre chose dans la grande presse US que de l’affaire Epstein, c’est-à-dire l’affaire Trump/Epstein. Medvedev, bouffon de Poutine, ayant pondu l’un de ses messages habituels, Trump a prétendu le prendre au sérieux et envoyer des sous-marins (à propulsion nucléaire ou à charges nucléaire, on ne sait) dans les « zones appropriées » (?). En fait, tout ce dont il menace réellement Poutine ce sont des mesures commerciales à échéance, pour l’heure, du 8 août : ce n’est en rien une menace et rappelons que la Russie (avec la Corée du Nord et la Biélorussie !) est jusque-là le seul Etat à ne PAS avoir subi les tarifs commerciaux de Trump !
Justement, ces tarifs commerciaux, au niveau (en fait énorme) de 15%, ont été, au nom des Etats européens, entérinés par la « présidente » de la Commission européenne Van der Leyen, ce contre quoi la France notamment proteste, mais sans rien envisager pour l’heure qui mette en cause le système institutionnel qui permet une telle opération. Les relations entre les puissances européennes, c’est-à-dire les plus anciennes puissances capitalistes-impérialistes, l’Amérique et l’Asie, et entre elles, sont totalement mises en cause par la situation actuelle.
Dans cet article, je compte revenir sur la question de la « guerre mondiale » : qu’est-ce qu’une « guerre mondiale », quels sont les risques et quelle forme prendrait-elle ? – et sur la question, inséparable de la précédente, de la situation européenne par rapport à la « guerre mondiale », angle mort ou épicentre.
Les deux guerres mondiales du XX° siècle.
La notion de guerre mondiale dérive des deux guerres mondiales du XX° siècle. Elle est donc inséparable de l’impérialisme, stade du capitalisme où prédominent les grands trusts à la fois internationaux, et en ce sens multinationaux, et appuyés sur des Etats puissants, et en ce sens « nationaux », ces Etats menant un partage et des repartages du monde assurant l’exportation et la fluidité des capitaux, au compte de l’accumulation illimitée et de la circulation accélérée du capital. Les deux guerres mondiales ont été provoquées par la mise en cause du « partage » existant et ont conduit à des repartages.
Elles ont donc été « inter-impérialistes », à condition de préciser que les blocs impérialistes initiaux dans ces guerres, se sont recomposés en cour de route : 1914 commence par l’affrontement de la Triple Entente des impérialismes britannique, français et russe, avec la Triple Alliance dominée par l’impérialisme allemand (et pratiquement tout de suite quittée par le fragile impérialisme italien), mais ce dispositif, qui conduit à un blocage, sera bouleversé par l’intervention de l’impérialisme nord-américain, d’une part, et la révolution russe produisant une dilatation à l’Est de l’impérialisme allemand prélude à son effondrement, d’autre part.
1939 commence par un partage de l’Europe centrale et orientale entre l’impérialisme allemand et l’impérialisme russe agissant à travers la bureaucratie stalinienne, à ce stade sous forme de prédation et d’occupation directe plus que d’exportation de capitaux, partage mis en cause par Berlin en 1941 basculant vers la domination totale du continent (impliquée dès 1940 par l’occupation de la France), ce qui induisit alors de manière accélérée une explosion expansive de l’impérialisme nord-américain à la fois vers l’Europe, contre l’impérialisme allemand, et vers l’Asie, contre l’impérialisme japonais. Les Etats-Unis seront le principal vainqueur, mais par un ordre mondial régulé par eux au moyen du partage de l’Europe avec la domination russo-stalinienne, et de la restauration en second rang des puissances impérialistes d’Europe occidentale, y compris l’Allemagne poussée vers l’Ouest, et du Japon.
Les deux guerres mondiales du XX° siècle se sont, de plus, combinées aux révolutions et ont aussi pour ainsi dire enveloppé des guerres nationales de libération ou de résistance à l’occupation. Le maillon faible russe, dans la première guerre mondiale, a sauté en 1917, et c’est l’irruption de la révolution en Allemagne qui a accéléré la fin de la guerre. Les poussées révolutionnaires suscitées par la barbarie nazie en Europe, ainsi que les révolutions nationales chinoise et indienne, et dans plusieurs pays d’Asie, ont marqué la seconde guerre mondiale et en ont accéléré le dénouement.
Les « guerres mondiales » furent des guerres à l’échelle mondiale, bien qu’on ait, de 1914 à 1941 quand la seconde guerre mondiale se « mondialise » pleinement du fait de Barbarossa et de Pearl Harbour, une transition allant de la guerre européenne aux impacts mondiaux, à la guerre proprement mondiale. Cette transition correspond au passage d’un système impérialiste mondial, étatique et économique, dominé par les puissances européennes, à un système dominé, après 1945, par les Etats-Unis et l’URSS.
Ces deux guerres ne sont pas nettement délimitées par les dates de 1914-1918 et de 1939-1945. Ainsi, les guerres des Balkans précèdent et préparent la première guerre mondiale à partir de 1912, les guerres civiles et les interventions contre-révolutionnaire en Russie, le repartage du Proche et du Moyen Orient avec le traité de Lausanne et l’expulsion des Grecs de Turquie, et encore l’occupation de la Ruhr, prolongent la première guerre mondiale jusqu’en 1923. De même et plus encore, l’agression de la Chine par le Japon dès 1931, celle de l’Ethiopie par l’Italie en 1935, la guerre civile espagnole en 1936-1939, et la reprise de l’expansion allemande (Anschluss, Munich) préparent la seconde guerre mondiale, laquelle sera, une fois « terminée », suivie par le commencement réel de la guerre d’Algérie, par la guerre civile chinoise, l’indépendance et la partition de l’Inde, la Nakba palestinienne, voire le blocus de Berlin puis la guerre de Corée comme dernières étapes avant une stabilisation globale effective. Les guerres « locales » sont donc reliées aux processus mondiaux. Il n’en demeure pas moins qu’il n’y a eu « guerre mondiale » que lorsque les grandes puissances impérialistes se sont battues directement les unes contre les autres.
Ces précisions rapides visent à faire comprendre que la catégorie de « guerre inter-impérialiste », si elle situe bien les éléments causaux initiaux des guerres mondiales, ne saurait en résumer toute l’analyse et la caractérisation concrètes.
La « guerre froide » et l’illusion de l’équilibre de la terreur.
La formule « troisième guerre mondiale » a hanté les décennies d’après 1945, mais elle n’a pas eu lieu. Le système mondial combinant, de manière conflictuelle mais globalement régulée, l’hégémonie financière, monétaire, commerciale, technologique, militaire et donc politique de l’impérialisme nord-américain, avec le repoussoir du bloc « soviétique », a vu des guerres locales sévères – Corée, Vietnam – mais pas d’explosion globale, la tentation d’attaque nucléaire US sur la Chine ayant été repoussée aux Etats-Unis début 1951, et la tentation de provocation nucléaire réciproque URSS/Etats-Unis l’ayant été lors de la crise des missiles prenant Cuba (et la révolution cubaine) en otage, en 1961.
Officiellement c’est donc l’ « équilibre de la terreur », ou la doctrine MAD (Mutual Assured Destruction) qui a évité la troisième guerre mondiale entre les Etats-Unis et l’URSS et leurs alliés respectifs. La réalité est différente : après les destructions de la seconde guerre mondiale, l’accumulation a repris mondialement, léguant les dangers économiques et écologiques démultipliés à la période suivante, et elle a repris dans le cadre de ce système mondial au maintien duquel les deux « camps » avaient intérêt. La « guerre froide » a donc été une coopération contre-révolutionnaire, particulièrement manifeste – et efficace- autour de 1968 où les mouvements révolutionnaires des masses les ont tous deux menacés. La Chine de Mao s’est elle-même intégrée, avec des contradictions, à ce dispositif.
Par conséquent, il est permis de dire qu’en réalité, le risque de guerre mondiale, et de guerre nucléaire, était, malgré les discours dominants, moins élevé pendant la « guerre froide » qu’aujourd’hui.
Cela ne signifie pas pour autant que des dérapages incontrôlés n’ont pas été au bord de se produire, lors de la crise des missiles à Cuba et au début des années 1980 lors de la crise du pouvoir soviétique (successions Brejnev-Andropov-Tchernenko-Gorbatchev), ainsi qu’entre l’URSS et la Chine en 1969, ou entre l’Inde et le Pakistan et potentiellement la Chine, à plusieurs reprises (rappelons que la Chine a l’arme nucléaire depuis 1964, l’Inde 1998, le Pakistan 1999).
Les guerres comme les révolutions, comme les autres faits sociaux mais de manière particulièrement accentuée, ne dépendent en effet pas que des forces sociales objectives, mais aussi des facteurs subjectifs momentanés et hasardeux, « erreurs humaines » ou bêtise humaine y compris (cela vaut déjà pour la forme prise par le déclenchement de la guerre mondiale en août 1914). Cette importante remarque vaut bien entendu pour aujourd’hui …
Il importe de comprendre que ce n’est pas en tant que telle la « dissuasion » par l’arme atomique, après son emploi par les Etats-Unis sur Hiroshima et Nagasaki en 1945, qui a évité la troisième guerre mondiale crainte comme un échauffement de la guerre froide Etats-Unis/URSS, mais la forme prise, après les destructions de la seconde guerre mondiale, par l’accumulation capitaliste mondiale dans et sur la base d’un ordre mondial relativement régulé, permettant en fin de compte de faire passer les intérêts communs, contre-révolutionnaires, des puissances rivales, au premier plan, ce qui fait que cette période de conflictualité mondiale est avant tout une période de coopération et de partage entre elles. L’existence même de l’ONU et d’un droit international se développant progressivement, en a participé, malgré ses limites et ses blocages.
Dans ce système, les dépenses militaires principalement américaines et soviétiques ont été le volant d’entrainement de la reprise économique mondiale à son départ, celui des « Trente Glorieuses », et ont en outre été étroitement connectées aux innovations technologiques. Après le retournement économique de 1973 par contre, elles continuent dans des technologies nouvelles (« guerre des étoiles ») aux Etats-Unis, mais deviennent un obstacle absolu au passage de l’économie soviétique d’un régime d’accumulation fondée sur le capital fixe centralisé à un capitalisme concurrentiel intégré au marché et aux flux financiers mondiaux.
De 1991 à 2008.
La chute du mur de Berlin et du rideau de fer en 1989 puis l’éclatement de l’URSS dans les 15 républiques qui étaient censées la constituer, en 1991, ont, dans la représentation idéologique et médiatique absolument dominante, constitué la fin d’un des deux camps de la guerre froide, et donc de celle-ci, et même la « fin du communisme ». Tout le système mondial conflictuel mais régulé de l’après 1945 s’est en réalité effondré, ouvrant la voie à l’instabilité et posant les mines de la déstabilisation des Etats-Unis eux-mêmes.
Ce fut une belle, et paradoxale, inversion idéologique agissante que ceci ait d’abord passé, notamment aux Etats-Unis, pour un triomphe dans lequel la domination « pacifique » de ce pays, moyennant quelques règlements de compte sommaires dont le prototype fut donné par la première guerre du golfe en 1991, allait désormais pleinement s’exercer, pour les siècles des siècles (la « fin de l’histoire »).
En réalité, les années 1990 montraient déjà la déstabilisation généralisée montante, et la crise éco-climatique globale galopante.
Les attentats (crimes de masse) du 11 septembre 2001 ont mis fin, dans les représentations dominantes, à cette torpeur et à ces illusions. Mais il ne s’agissait pas d’une attaque impérialiste rivale visant les Etats-Unis, et encore moins de l’expression, même déformée, d’une quelconque guerre populaire de libération : il s’agissait du choc en retour de la manipulation de réseaux financiers-religieux ultra-réactionnaires. Ce choc ne conduisit pas à une atténuation de la volonté étatsunienne de domination mondiale, tout au contraire il l’a rendue ouvertement agressive et guerrière, tous azimuts.
Ce premier tournant déboucha sur le second, avec la crise économique et financière globale de 2008 : c’est à partir de là que l’impérialisme nord-américain entre vraiment en crise, à la fois au plan social interne et dans son rôle mondial. La perte de l’ordre régulé quoique conflictuel de l’après-1945, effective depuis 1989-1991, fait dès lors pleinement sentir ses effets. Ce long décalage rend les convulsions qui, désormais, se succèdent à un rythme accéléré, d’autant plus puissantes et violentes.
C’est, en particulier, à partir de 2008 que s’affirme clairement ce qui s’était en fait mis en place auparavant, mais qui conduit alors à la confrontation quand il s’agit de se répartir les pertes plutôt que les profits : les impérialismes chinois et russe ainsi qu’une série fluctuante d’aspirants impérialismes, sous-impérialismes et autres, « BRICS » et au-delà, débarquent au premier plan.
L’idée selon laquelle la liste des « puissances impérialistes » serait immuable parce que le monde est entièrement saturé de capital est fausse : même avec saturation l’accumulation se poursuit, en intensité autant qu’en extension, par destruction/prédation/innovation, et de nouveaux centres d’accumulation, qui peuvent être qualifiés d’ « impérialistes » dès lors qu’ils doivent exporter leurs capitaux en s’appuyant sur leurs Etats, apparaissent, venant compliquer et bousculer le système, et accroitre les risques de guerres et d’explosions, à toutes les échelles, dont, en définitive, l’échelle mondiale.
2008-2022.
C’est donc dans le contexte de la période de crise ouverte en 2008 et aggravée depuis d’une manière qui tend à l’accélération et s’articule à la crise géo-bio-climatique (révolutions arabes à partir de 2011, Maidan et première phase de la guerre russe contre l’Ukraine en 2013-14, Brexit, première présidence Trump et présidence Bolsonaro au Brésil, Covid, et, je vais y revenir : 24 février 2022, 7 octobre 2023, 21 janvier 2025 …), que la « guerre mondiale » comme conséquence possible, voire probable, de ces développements, est revenue obturer l’horizon.
Cette représentation a, forcément, ses dimensions fantasmatiques, associées aux thématiques apocalyptiques propres à notre époque. Elle traduit le rebond massif des dépenses militaires, toujours reliées, quoi que sans doute moins directement, aux innovations technologiques, alors que ces dépenses avaient fortement baissé en Europe dans les années 1990. Y compris dans le cas français, où l’ « outil militaire » est central et organiquement lié aux institutions de la V° République, la poursuite de nombreuses « Opex » (opérations extérieures surtout africaines, à présent en pleine déconfiture), les réformes autour de 2010, sous Sarkozy, avaient diminué le volume des investissements militaires. Le moment actuel en Europe et singulièrement en Allemagne et en France est, tout au contraire, marqué par les plans astronomiques de relance dans la durée d’investissements militaires croissants. L’économie mondiale est plus que jamais une économie d’armements.
Le principe « dissuasif » selon lequel les guerres majeures entre les plus grandes puissances impérialistes, autrement dit les guerres mondiales, seraient évitées grâce à l’équilibre de la terreur nucléaire, revêt une absurdité plus grande dans la période actuelle que dans la période de la guerre froide dont il provient : la production d’armes de destruction massive, pas seulement nucléaires et thermonucléaires mais chimiques et bactériologiques, et d’armes flirtant avec cette dimension tout en étant réputées employables dans un cadre « conventionnel » (bombes à uranium enrichi, bombes « GBU-57 » employées en Iran par les Etats-Unis les 21-22 juin dernier …), serait supposée éviter la guerre totale précisément dans la mesure où leur emploi est possible, car toute garantie réelle de non-emploi supprimerait la « dissuasion » !
Trois dates clefs.
Le 24 février 2022, l’agression russe généralisée de la Russie contre l’Ukraine a ouvert en Europe une guerre durable, à la fois conventionnelle, potentiellement nucléaire, et innovante. Conventionnelle, avec des tranchées et des lignes de front, d’une gravité sans précédent depuis la fin de la seconde guerre mondiale. « Nucléaire » en ce sens qu’elle est menée à l’abri du chapeau nucléaire russe et dans la menace permanente du recours à l’arme atomique (en ce sens, les récentes déclarations de Trump, même si elles valent ce qu’elles valent, sont les premières menaces étatsuniennes analogues), sans oublier la menace sur les centrales nucléaires et leur prise en otages. « Innovante-technologique », avec notamment le rôle des drones, du renseignement, sur fond d’auto-organisation de la société ukrainienne voire des soldats et soldates.
La guerre mondiale et la guerre nucléaire sont revenues d’un coup dans les spectres de l’actualité. Mais le caractère de la guerre côté ukrainien, avec le rôle de l’auto-organisation et des nouvelles technologies caractérisées par leur légèreté, montre qu’une guerre populaire, démocratique, n’a pas besoin, elle, d’armes de destruction massive, armes nucléaires comprises.
Le 7 octobre 2023, la provocation pogromiste du Hamas a donné une impulsion sans doute capitale à la poursuite de l’agression poutinienne et à la seconde élection de Donald Trump aux Etats-Unis, tout en engageant le pouvoir israélien dans une fuite en avant dont l’aboutissement ne peut qu’être génocidaire. Ce n’était pas inéluctable, comme l’a montré le long cessez-le-feu courant du 18 janvier au 18 mars 2025, mais la destruction et la famine organisées à Gaza, depuis, sont le choix délibéré du pouvoir israélien, à l’ombre de Trump. Deux guerres en Europe ou tout près ont donc une logique génocidaire, en Ukraine et en Palestine, mais cette dernière a aussi servi à réactiver les représentations « campistes » ne tenant pas compte des éléments nouveaux, rendant impuissant le « mouvement propalestinien ».
Le 21 janvier 2025, l’investiture de Trump, flanqué du vice-président Vance, et, jusque début juin 2025, du milliardaire fou Musk, a lancé un processus de coup d’Etat et de destruction des libertés publiques aux Etats-Unis, rencontrant une résistance sociale et démocratique croissante, affirmé une alliance, ou plutôt un « axe » fluctuant mais puissant, avec Poutine, et plongé l’Europe et les Etats européens dans une crise existentielle ; Trump a en outre mis à l’ordre-du-jour l’annexion, et donc la guerre ou la soumission, du continent nord-américain (Canada, Groenland, Panama) – la dimension la plus bousculante de ce tournant ! – et il a produit, par les tarifs protectionnistes, un processus, en fait déjà engagé, d’implosion du marché mondial et de la division internationale du travail.
Avec Trump, ce n’est pas seulement l’abandon de l’Europe par Washington qui est à l’ordre-du-jour, mais l’éventualité d’une guerre sur deux fronts, Poutine et Trump/Vance prenant en tenaille le « vieux continent ».
Envisager la guerre mondiale aujourd’hui.
Les deux facteurs globaux qui mettent à l’ordre du jour la guerre mondiale inter-impérialiste sont donc l’aggravation des rivalités inter-impérialistes, dans le cadre de ce qui est aujourd’hui appelé « multipolarité » – multipolarité impérialiste ! – et, d’autre part, le recours à la guerre pour éviter ou dévier la révolution (comme en 1914) : s’il est vrai que le risque de révolution peut différer ou empêcher la guerre, et que des révolutions prolétariennes et démocratiques victorieuses la feraient partir du paysage, il reste certain qu’à un moment donné la guerre elle-même a pour fonction objective de prévenir la révolution, d’autant que la principale guerre contemporaine, de la Russie contre l’Ukraine, est avant tout contre-révolutionnaire, et que cette dimension est bien présente aussi de la part du prétendu « axe de la résistance » Iran/Hezbollah/Hamas/Houthis, comme de la part du pouvoir israélien dans sa fuite en avant génocidaire.
Il nous faut envisager schématiquement comment la guerre mondiale, rapide ou différée, est envisageable du point de vue de Washington surtout, de Beijing et de Moscou. Ce schématisme a ses limites mais il est nécessaire et utile pour fixer les enjeux et clarifier l’analyse. Il est schématique surtout dans la mesure où il tente de se situer du point de vue des trois principales puissances impérialistes actuelles en faisant abstraction des autres, mais c’est là un point crucial : les autres, en l’occurrence, ce sont surtout les vieux impérialismes européens, et leur mise hors-jeu dans la détermination des pires lignes de force mondiales est justement un fait central qui, nous le verrons, ne fait pas que marginaliser l’Europe, mais donne à la lutte des classes et aux combats démocratiques en Europe un caractère en dernière analyse tout à fait central. Enfin, cette schématisation se situe principalement, parmi les trois « grands », du point de vue de Washington, car les Etats-Unis, qui ne sont plus le chef d’orchestre mondial, restent en même temps, déstabilisés, la première puissance impérialiste mondiale. Au plan économique, ils ne sont plus le principal centre de création de survaleur et de capital, mais ils restent le centre logistique des flux de capitaux, financiers aussi bien que matériels.
Fausse actualité du schéma alliance atlantique contre bloc eurasien.
Le premier visage possible de la guerre mondiale pourrait être désigné comme sa forme convenue « traditionnelle » recyclant les représentations de la guerre froide : c’est la guerre entre les Etats-Unis et les anciens « pays communistes », Russie et Chine, flanquées de la Corée du Nord, de l’Iran et de la Biélorussie.
Au plan géostratégique ce serait donc une guerre entre l’espace atlantique et maritime mondial et un bloc eurasiatique. Dans ce cadre, l’OTAN garde son importance et l’Europe, champ de bataille possible, est un point d’appui pour les Etats-Unis qu’ils ont intérêt à garder et donc à protéger. Sur les flancs Sud du bloc eurasiatique, le Japon, la Corée du Sud et Taiwan contiennent la Chine à l’Est, le Vietnam peut s’avérer un pivot allié des Etats-Unis (belle ironie de l’histoire), l’Inde est stratégiquement décisive, Israël contre l’Iran est un pilier clef, et l’Arabie saoudite avec les pétromonarchies doivent être conservées comme alliés. Dans le bloc eurasiatique, les anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale et la Mongolie extérieure forment un vide potentiel dragué par tout le monde mais tout de même principalement susceptible, sous l’égide chinoise plus que russe, d’être intégré au bloc eurasiatique, d’autant que le Pakistan et l’Afghanistan des talibans sont déjà dans l’orbite de Beijing. La Turquie devient un pilier stratégique non seulement face à la mer Noire, mais en direction justement de cette Asie centrale. L’aire arctique, en outre, revêt une importance croissante.
L’Afrique et l’Amérique hors Etats-Unis sont a priori des zones non vitales de la guerre, mais attention, le bloc eurasien entend bien entrainer avec lui le prétendu « Sud global » qui n’a plus rien d’anticolonialiste et est une notion idéologique et politique entièrement impérialiste, conduisant à l’union sacrée. Les dictateurs du Venezuela, du Nicaragua, de Cuba, du Mali, du Burkina, du Niger, de la Guinée … pouvant être mis à contribution.
Disons tout de suite que les récentes gesticulations verbalement nucléaires de Trump ne constituent pas un retour vers cette première hypothèse schématique : bien plus important est l’envoi d’un Steve Witkoff pour « négocier » à Moscou. L’affaiblissement relatif mais structurel de l’impérialisme nord-américain fait qu’il veut foncièrement éviter cette configuration. Il se trouverait face à face aux deux autres principales puissances impérialistes avec deux fronts géographiquement éloignés l’un de l’autre, à savoir l’Europe centrale et orientale et la mer de Chine.
Les leçons de ses échecs cumulés depuis 2003, échecs du déploiement de la « guerre sans fin contre le terrorisme » de G.W. Bush, en Irak et en Afghanistan, renonciation à intervenir en Syrie (sauf l’aide au PKK-PYD) en 2013, difficultés causées par la gestion impossible de la fuite en avant de l’allié israélien … le conduisent à souhaiter au moins une neutralisation de l’aire européenne et proche-orientale pour pouvoir se centrer contre la Chine, son principal rival économique mondial. C’est là sa doctrine officielle, même si les révolutions et les guerres dans le monde arabe puis en Ukraine en ont perturbé l’application, depuis le tournant d’Obama et H. Clinton vers le « pivot Asie-Pacifique », en 2011.
Le pivot Asie-Pacifique et la théorie de l’évitement, autant que possible, du fait d’avoir deux guerres majeures à mener, ou deux fronts mondiaux à gérer, sont en partie inspirés par le coût de la gestion des deux occupations de l’Irak et de l’Afghanistan. Involontairement, cette orientation exprime bien le déclin relatif des Etats-Unis, car leur rôle mondial central depuis 1945 venait précisément de leur victoire dans la guerre sur deux fronts, à peu près les mêmes d’ailleurs, contre l’Allemagne et contre le Japon, qu’avait été pour eux la seconde guerre mondiale.
L’hypothèse « atlantisme versus eurasisme » ne correspond donc pas aux lignes de fractures réelles sur lesquelles s’organise actuellement la marche à la guerre mondiale, parce que Washington n’en veut pas, mais elle a une importance heuristique, si l’on peut dire, considérable, car son évitement dicte sa politique.
Du pivot Asie-Pacifique à l’axe Trump/Poutine.
La mise en œuvre effective du centrage sur l’aire Asie-Pacifique a besoin, en dernière analyse, d’une alliance russe : là est la force de la ligne trumpienne du point de vue des intérêts impérialistes étatsuniens.
Idéalement, la ligne trumpienne conduit au second visage schématique possible de la guerre mondiale, opposant Etats-Unis et Chine avec une Russie neutre ou pro-américaine. Séparer la Russie de la Chine devient alors un enjeu premier, et il faut pour cela lui livrer l’Ukraine et, potentiellement, l’Europe centrale et orientale, ceci conduisant à un délaissement étatsunien, pour le moins, envers l’Europe et envers l’OTAN. Sur les flancs Sud de l’Eurasie, l’Inde reste un pivot décisif en tant qu’allié contre la Chine, et l’Iran un ennemi à vaincre ou neutraliser. Les verrous ou points d’appui antichinois au Sud et à l’Est sont grosso modo les mêmes que dans la première hypothèse, alors qu’en Europe celle-ci en prend le contrepied radical. On aura reconnu là les grandes lignes de la politique étrangère trumpienne, pas si erratique et émotionnelle qu’on le raconte souvent.
Mais cette orientation sous-tendait déjà bien des aspects de la politique de Joe Biden. Ce qu’aucun des dirigeants impérialistes rivaux n’avait prévu, c’était la résistance ukrainienne : tous croyaient, avec Poutine, que l’Ukraine tomberait en trois jours. Biden avait anticipé, dans ce cas, un ensemble de sanctions économiques et financières coupant la Russie du marché mondial et la livrant en fait, tel un fruit mûr et même faisandé, à la Chine, ainsi détournée du Pacifique vers l’Asie intérieure et fort encombrée de ce « cadeaux » instable et dangereux.
Rien ne s’est passé comme prévu, et la raison première en est la lutte par en bas du peuple ukrainien, et le sentiment de soutien à sa lutte dans l’ensemble du monde ex-soviétique, et y compris le début de recomposition d’un véritable internationalisme à l’échelle mondiale, que nous ne devons pas enjoliver mais qu’il ne faut pas sous-estimer non plus.
Dans l’état de fait résultant de la levée en masse du peuple ukrainien, faisant échouer le plan russe et conduisant à une guerre longue, les Etats-Unis et les puissances européennes se sont trouvés contraints à un soutien militaire mesuré à l’Ukraine, visant à prolonger la situation, à ne pas produire d’effondrement russe conduisant à des convulsions révolutionnaires, et à verrouiller à l’Ukraine la pulsion expansionniste russe. Trump à partir de là est passé ouvertement à la constitution d’une alliance avec la Russie.
Trois raisons fondamentales expliquent l’intérêt majeur de l’impérialisme nord-américain à l’alliance russe. La première est celle que j’ai déjà mentionnée : militairement, les Etats-Unis préfèrent n’avoir affaire qu’à une seule superpuissance contre eux et non pas à deux liguées entre elles, et voudraient pouvoir se concentrer sur le front pacifique.
Mais s’ajoute à cela une seconde raison dont il faut bien saisir la dimension : les impérialismes européens, devenus secondaires après 1945, sont perçus comme encombrants, superfétatoires, éventuellement coûteux s’il faut les protéger ou les maintenir à flot, tout en restant des concurrents dangereux, y compris parfois en matière militaro-territoriale – c’est particulièrement le cas de la France avec sa « dissuasion » et ses Zones Economiques Exclusives liées à la préservation de ses « outremers ». En matière économique, le concurrent sérieux est l’Allemagne. Une domination russe de l’Europe centrale et orientale complétée par une neutralisation de l’Allemagne et une « remise au pas » de la France ne serait pas du tout un mauvais plan du point de vue des intérêts les plus généraux de l’impérialisme nord-américain.
La troisième raison, étroitement reliée à la seconde, consiste dans la convergence idéologique entre les néofascismes trumpien et poutinien, résultat des contradictions internes des deux puissances, convergence concentrée dans le cas de Trump et de la bande de nervis tous plus ou moins prorusses qu’il a installés à la tête de l’armée et du renseignement, et qui, chez lui, remonte à la fin des années 1980, quand l’exportation des capitaux « soviétiques », sous forme mafieuse, prend en main le crédit à la mafia immobilière de la côte Est (Trump), ainsi qu’à des officines financières de haute volée (Epstein).
La combinaison de la seconde cause, visant à abaisser l’Europe, et de la troisième, celle de la convergence néofasciste, signifie pour l’Europe des gouvernements de type Orban, Fico, Meloni, et signifierait union des droites Retailleau-Bardella parrainée par Stérin en France, aile la plus antimigrants de la CDU et AfD avec connexion avec le BSW en Allemagne. L’extrême-droite et l’union des droites en Europe, sans oublier leurs antennes dans la post-gauche populo-campiste, est l’expression politique la plus poussée de la décadence profonde des impérialismes européens et de leur soumission à l’axe Trump/Poutine. Mais cette tendance ronge aussi les gouvernements néolibéraux, socio-libéraux ou ordo-conservateurs actuellement en place en France, Royaume-Uni, Allemagne, qui, pris à la gorge, dessinent une résistance à l’axe Trump/Poutine puis la sabotent par leurs politiques antisociales et antidémocratiques et leur ardent désir de ne pas couper les ponts avec Washington, même quand Washington leur crache dessus.
Crise des orientations étatsuniennes.
Mais à présent, après quelques mois seulement de mise en œuvre frénétique de l’orientation trumpienne, celle-ci entre en crise car ses résultats ne sont nullement au rendez-vous.
Le problème n’est pas tant, comme le disent les médias, que Trump n’a pas arrêté la guerre en Ukraine « en un jour » comme il le répétait dans ses meetings de campagne. Sur ce point, c’est l’Ukraine le problème : il faudrait pour Trump qu’elle capitule. Mais il n’y est pas arrivé, bien qu’il ait fortement aggravé la situation militaire et probablement joué un rôle dans l’inspiration des tentatives illibérales de Zelensky en matière de lutte contre la corruption, qui ont rencontré la résistance du peuple et de la jeunesse.
Or, pendant ce temps, la Russie, loin de se décoller de la Chine, voit sa dépendance économique, monétaire, et aussi militaire (avec ici le facteur supplémentaire de la Corée du Nord), envers elle s’aggraver de jour en jour. L’attaque de Netanyahou contre l’Iran et l’intervention de Trump ont mis en évidence la passivité russe envers la défense de l’Iran, mais ne semblent pas avoir dévissé, là non plus, la Russie de la Chine.
A ce stade, tout se passe comme si l’orientation trumpienne avait profité un maximum à la Russie sans affaiblir l’axe géostratégique qu’elle forme à présent avec la Chine. L’axe Trump/Poutine fonctionne et menace l’Ukraine et l’Europe, mais il ne contribue pas au « pivot Asie-Pacifique » tenu pourtant pour le seul décisif à Washington, dans l’establishment traditionnel comme dans la camarilla trumpienne.
La crise de cette orientation arrive donc nécessairement, et passe par les crises et les spasmes de Donald Trump et de son « administration ». Pire, elle se combine avec la montée de la résistance démocratique du peuple américain et avec la crise au sommet dans la nébuleuse trumpienne (rupture de Musk, affaire Epstein, distanciation des MAGA « purs et durs », le tout avec J.D. Vance en embuscade).
Les « colères de Trump contre Poutine », comme disent les médias, et son coup de sang contre le bouffon Medvedev, expriment tout cela. L’espoir – fondamentalement vain – d’un retour de Trump à un atlantisme traditionnel en réalité mort et enterré, anime, dans ce contexte, bien des chefs d’Etat européens encore aujourd’hui … tels les morts enterrant leurs morts …
Il peut en effet y avoir des foucades, et même des foucades dangereuses où l’éventualité du fou ou de l’idiot appuyant au mauvais endroit et au mauvais moment sur un mauvais bouton, peut survenir, mais il ne peut plus y avoir de retour pur et simple à l’atlantisme d’« avant », réunissant puissances européennes et Etats-Unis dans le cadre d’une alliance stable et solide.
La troisième hypothèse : les hégémons cohabitent … pour un temps.
En fait, s’est déjà dessinée la troisième hypothèse, si celle de la guerre mondiale « convenue » entre « Est » et « Ouest » et celle de la guerre mondiale Etats-Unis/Chine avec pivot russe et pivot indien isolant la Chine, sont écartées : l’apparente non-guerre par partage hégémonique.
Cette troisième hypothèse a en effet transparu, dès la campagne électorale de Trump, dans diverses déclarations de celui-ci (et déjà lors de sa première présidence) selon lesquelles Taiwan et la Corée du Sud, voire le Japon, coûtent cher à « l’Amérique », un peu comme l’Europe est censée lui coûter. L’éventualité de l’abandon de Taiwan et du front de la mer de Chine existe chez Trump, qui avait aussi, rappelons-le – ce fut même le principal exploit diplomatique de sa première présidence – tenté un rapprochement avec la Corée du Nord, lequel avait échoué.
Mais le contenu d’un apaisement avec la Chine, ou d’une limitation du bellicisme à la guerre commerciale déjà menée (les droits de douane imposés à la Chine sont au jour d’aujourd’hui de 30%, moins que les 39% appliqués à la Suisse, mais avec le risque, d’ici le 12 août, qu’ils repartent fortement à la hausse), a été donné sur un tout autre terrain, lorsque Trump et Vance ont préconisé l’annexion du Canada et du Groenland, ainsi que la reprise du canal de Panama, cette dernière annonce visant la Chine. Avec, en prime, le symbole de la débaptisation du golfe du Mexique, c’est une prétention à l’hégémonie territoriale sur tout le continent nord-américain qui s’est soudain manifestée là, et que les chefs d’Etat du reste du monde ont pris au sérieux, pas comme le gag grossier qu’elle aurait été sous le premier mandat de Trump (qui avait d’ailleurs déjà, alors, proposé d’acheter le Groenland).
Associée à la main tendue à Poutine, la saisie du grand nord arctique américain pourrait même aller de pair avec l’occupation des pays baltes par la Russie, dans une sorte de grand partage dont on peut imaginer – nul doute que les dirigeants des Etats l’imaginent – l’extension mondiale : l’Amérique aux Etats-Unis, le continent européen à la Russie, l’Asie-Pacifique à la Chine. Bien entendu, les « détails » scabreux ne manquent pas (quid de l’Afrique ? du Japon ? etc.), mais les grandes lignes d’un partage hégémonique, susceptible de faire leur place à tel ou tel « BRICS+ », sont théoriquement bien là.
Cette vision dystopique de trois hégémons totalitaires – car ils seraient tous les trois totalitaires – rejoint celle du fameux roman de Georges Orwell, 1984 (paru en 1949) où l’Océania, centrée sur les Etats-Unis (les îles britanniques, l’Afrique australe et l’Australie/Nouvelle-Zélande étant ses têtes de pont hors Amériques), l’Eurasia centrée sur la Russie, et l’Estasia centrée sur la Chine, se partagent le monde, avec une zone disputée en guerre permanente (Afrique, angles de l’Asie), mais sans guerre mondiale.
Mais chez Orwell, il s’agit d’empires totalitaires décadents et stables, installés dans la misère et le mensonge. La dynamique de l’accumulation illimitée et de la circulation accélérée du capital qui fournit son carburant aux processus hégémoniques n’est pas stable, mais expansive, surtout quand la tendance à la baisse des taux de profit et la crise écologique stressent l’accumulation. Le partage hégémonique ne serait donc qu’une transition vers … la guerre mondiale, à nouveau.
La possibilité d’un apeasement momentané des Etats-Unis avec la Chine peut se dessiner. Les discussions sur les tarifs commerciaux sont aléatoires, mais Trump dit viser une rencontre au sommet avec Xi Jinping. Le problème est que ce dernier n’est guère visible depuis plusieurs mois, et que Beijing bruisse de rumeurs sur la crise dans les sommets. Le soutien à la Russie avec les risques qu’il comporte et ses coûts qui, comme l’avait sans doute anticipé l’administration Biden avant le 24 février 2022 même si ce n’est pas dans les proportions supposées, sont pour l’heure sans doute plus élevés que ses profits ; le caractère incontrôlable par Beijing du régime nord-coréen qui a formé son propre axe avec Moscou, indépendant de Beijing ; le tout alors que la résistance sociale, certes dispersée, est massive en Chine : tous ces facteurs nourrissent cette crise au sommet que la pression tarifaire des Etats-Unis peut accélérer.
En outre, la sœur de Kim-Jong-Un, Kim Yo Jong, dont le rôle symbolique et diplomatique est important dans le régime nord-coréen, vient d’annoncer que la porte à des négociations directes avec les Etats-Unis pourrait se rouvrir, alors que la Corée du Sud est toujours traitée en ennemi ; et le président taiwanais Lai-Ching-te s’est vu annuler un passage officieux par les Etats-Unis au cour d’un voyage international. Ces faits vont dans le sens de l’apaisement avec la Chine.
En même temps, la récente poussée d’hostilités terrestres mais aussi maritimes entre la Thaïlande et le Cambodge s’est arrêtée et les deux Etats ont remercié … le président américain. Dans cette affaire, on peut comparer, dans une certaine mesure car la portée en est quand même moindre, le pied-de-nez fait à la Chine, tuteur du Cambodge et allié de la Thaïlande, à ce qu’elle-même avait réalisé en parrainant l’accord Iran/Arabie saoudite en mars 2023.
Enfin, les Etats-Unis, avec semble-t-il l’implication de J.D. Vance, viennent de prendre des contacts à la fois avec la junte birmane, que soutient Beijing, et avec la KIA, armée nationaliste kachin en guerre avec elle, dont le territoire, au Nord du Myanmar, est frontalier du Yunnan chinois et également adjacent à l’Arunachal Pradesh et au Nagaland en Inde. Ces contacts portent sur la production et le transport des terres rares lourdes, celles qui ont le plus d’applications militaires, et dont la Chine détenait le quasi-monopole.
L’ensemble de ces faits mis bout à bout (voir à ces sujets le blog du camarade Andrea Ferrario, en italien) permettent de dire que la situation de l’impérialisme chinois est beaucoup moins solide qu’on ne le dit généralement (conflit Thaïlande/Cambodge, situation au Myanmar) et que des éléments d’apaisement, de collaboration géostratégique, existent. Et donc, qu’il aurait intérêt, lui aussi, du moins dans un premier temps, à chercher à s’insérer dans une ligne de partage du monde et de coopération conflictuelle. Surtout – c’est pour lui une pierre de touche – si Taiwan lui est livrée, ce qu’il préfèrerait obtenir par la pression et la collaboration interne du Guomindang, que par une guerre.
Répétons-le, l’hypothèse non de la guerre mondiale rapide, mais de la multipolarité des hégémons impérialistes, n’est pas une hypothèse où il n’y aurait pas de guerre mondiale. Celle-ci en reste l’horizon, et lorsque j’énumérais, sommairement, les « détails scabreux », zones de partage difficile et autres, ci-dessus, il faut leur rajouter la question centrale de l’Europe. En effet, le point commun à l’hypothèse 2 (où l’axe Trump/Poutine piège la Chine, ce qui n’est absolument pas le cas au moment présent) et à l’hypothèse 3 du Yalta global des hégémons, c’est l’asservissement de l’Europe.
Cet asservissement commencerait par l’écrasement génocidaire de l’Ukraine, et se poursuivrait par la mainmise russe sur la Baltique et sur les Balkans, ce qui implique, pour le moins, l’écrasement de la révolution en Serbie : son président Vucic, soutenu par l’UE et Macron, essaie de s’y employer. Cette mainmise russe requiert l’abdication de la Pologne et la « finlandisation » de l’Allemagne. La France devrait donc être mise au pas. Le processus politico-militaire ainsi dessiné passe, je l’ai dit, par l’extrême-droite et les diverses formules d’union des droites. Royaume-Uni et Irlande, séparés du continent, pourraient former la tête de pont de l’Océania – pardon, des Etats-Unis.
Ce qui fait que ceci n’est pas de la science-fiction est que l’asservissement de l’Europe correspond à l’intérêt commun des trois hégémons impérialistes, quels que soient par ailleurs leurs antagonismes (seule l’hypothèse d’une collaboration de revers UE/Chine, surtout Allemagne/Chine, peut tenir contre cette perspective, si et seulement si les politiques américaine et russe y contraignaient la Chine).
La question européenne.
L’asservissement de l’Europe ne consiste pas seulement dans la mise au pas des impérialismes européens. Ce sont les peuples qui sont visés. Cet asservissement commence maintenant, par quatre piliers, qui pour tout véritable internationaliste, sont indissociables, c’est-à-dire qu’ils appellent une lutte combinée :
- La guerre génocidaire de Poutine contre l’Ukraine,
- La guerre génocidaire de Netanyahou contre la Palestine,
- L’offensive raciste contre les « migrants », en Amérique du Nord et en Europe.
- La destruction de l’Etat de droit.
Evidemment, les gouvernements européens qui ne sont pas déjà d’extrême-droite ou d’union droite/extrême-droite, ont déjà pavé la voie à ces éléments de destruction et d’asservissement. Ainsi, en France, Macron a amorcé la dérive illibérale conduisant à la destruction de l’Etat de droit. Mais ce n’est pas un fasciste pour autant : le régime adapté à la pleine soumission à Trump et Poutine n’est pas le sien.
L’Etat de droit est une forme juridico-constitutionnelle de l’Etat bourgeois qui engrange un certain nombre d’acquis démocratiques issus de la lutte des classes : une déclaration des droits fondamentaux dont la garantie doit demeurer quelle que soit la majorité politique, lesquels intègrent aujourd’hui l’égalité des individus des deux sexes, la liberté d’orientation sexuelle et la garantie de protection de la vie privée, ainsi que la protection des communs et du vivant ; une institution judiciaire indépendante du pouvoir en place comme du pouvoir législatif ; une séparation des pouvoirs garantissant l’autonomie du législatif ; l’habeas corpus et les garanties juridiques de protection des personnes ; les libertés politiques, d’expression, d’organisation, de manifestation, de pétition ; la laïcité de l’Etat et de l’école, fondement de la liberté de pensée et des libertés religieuses ; les franchises universitaires ; la garantie d’existence de médias pluriels indépendants ; la garantie d’existence de syndicats indépendants ; la reconnaissance de la notion de consensus scientifique, interdisant un soi-disant pluralisme dans l’enseignement des sciences. Cette liste contient tout ce que les Trump et les Vance veulent explicitement et très consciemment détruire.
Si les oligarques américains, russes et chinois n’aiment pas l’Europe, ce n’est pas en raison de son passé colonial, mais en raison de cet ensemble de droits et de garantie, le continent d’où a rayonné le capitalisme ayant aussi été, du même coup, celui d’où a rayonné l’aspiration à la démocratie et la révolution prolétarienne.
Il importe donc de distinguer ce qui est défense civilisationnelle véritable, c’est-à-dire défense démocratique, et défense des intérêts impérialistes, en Europe. Le cas français est décisif. La dissuasion nucléaire française et les possessions d’outremer assurant de larges (et, en fait, surdimensionnées pour la France) Zones Economiques Exclusives, sont des attributs de l’impérialisme français, non des conquêtes sociales et démocratiques. La défense de celles-ci requiert la rupture avec la forme institutionnelle autoritaire et présidentielle de la V° République.
Mais les Etats européens sont pris à la gorge, et pris en sandwich, par l’axe Trump/Poutine. Ils ont des velléités de défense que leurs gouvernements abandonnent. Le paradigme de ces abandons, c’est le prétendu accord commercial entre la Commission de l’UE et Trump. Celui-ci soulève l’ardente nécessité d’institutions communes réellement démocratique, ce que n’est pas l’Union Européenne. Comme est soulevée celle, que je ne développerai pas dans cet article, d’une alternative européenne à l’OTAN.
Il appartient donc, de toute urgence, aux courants révolutionnaires et démocratiques dans le mouvement ouvrier, écologiste, féministe, de mettre en avant une politique internationale et militaire pour l’Europe. Voila le premier test mondial de la refondation d’un internationalisme véritable.
Cette politique internationale et militaire démocratique comporte quelques volets principaux qui s’imposent.
D’abord, armer l’Ukraine maintenant. Plus haut, j’ai signalé que la guerre telle que la mènent les Ukrainiens montre ce que pourrait être une guerre pour la démocratie dans laquelle l’initiative d’en bas et les technologies légères jouent tout leur rôle. Sans exclure la stratégie et la tactique traditionnelle des corps d’armée, elle n’a pas recours aux armes de destruction massive notamment nucléaires. Elle demande donc un budget important dans l’immédiat mais à échéance de quelques années beaucoup moins élevé que celui des lois de programmation militaire actuelles de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni, calibrées non pour défendre l’Ukraine et le continent contre les forces fascistes du XXI° siècle, mais pour défendre les intérêts de puissances impérialistes sur le déclin tout en satisfaisant les trusts de l’armement, voire en achetant … aux Etats-Unis, comme Ursula von der Leyen l’a promis à Trump !
Tout aussi immédiatement, sauver les Palestiniens. Une intervention armée humanitaire, brisant le blocus, ne serait pas aujourd’hui une intervention impérialiste, car elle serait au contraire un défi à l’axe Trump/Poutine, un coup direct à Netanyahou, et un facteur d’affaiblissement du Hamas. Seuls des démocraties peuvent se permettre une telle intervention, seuls des gouvernements démocratiques représentant la majorité peuvent la mener sans arrière-pensées.
Le « mouvement propalestinien » tel qu’il résulte d’années de campisme et de fétichisme antisioniste risque fort de se cabrer contre une telle perspective, donc de s’opposer à l’aide effective aux Palestiniens …
Un gouvernement démocratique en France ou dans une autre puissance européenne prenant ces deux initiatives, ukrainienne et palestinienne, produirait un coup de tonnerre mondial, et susciterait une vague mondiale de soutien parmi les peuples, et de menaces de la part des hégémons impérialistes, lesquels de toute façon veulent en finir avec l’Europe.
Il faut donc, et c’est le troisième point militaire clef après l’Ukraine et la Palestine, préparer un réarmement européen contre Trump et contre Poutine. Il ne doit pas consister en armes de destruction massive, et donc l’offre macronienne de « dissuasion » nucléaire française à tout le continent n’est pas une protection pour celui-ci. Par contre, il doit être combiné à la solidarité avec les peuples en lutte contre Trump et Poutine, dont les peuples américain et russe. Contre Trump, la question de garanties militaires conjointes avec le Canada et le Groenland est posée immédiatement.
Contre cette politique militaire prolétarienne et démocratique, le gauchisme campiste est le premier obstacle. D’ores et déjà, des mots d’ordre s’opposant à toute intervention pour briser le blocus de Gaza circulent dans ces milieux, au motif que la France est impérialiste, que c’est le « sionisme » qui doit être dénoncé, et pas les Palestiniens sauvés. Des formules creuses telles que « La seule intervention légitime, c’est celle des peuples », servent à couvrir le refus d’une solidarité effective afin de continuer à cultiver le pré carré « propalestinien ».
Mais l’intervention des peuples contraignant les gouvernements à envoyer des navires de guerre protéger des convois de nourriture, est légitime, elle pose la question du pouvoir et ouvre le combat pour des gouvernements démocratiques représentant la majorité et répondant aux urgences, les urgences militaires et internationalistes comme les urgences sociales et écologiques – au cas où les connaisseurs en textes programmatiques d’antan n’auraient pas compris, je précise : vous pouvez traduire « gouvernements démocratiques » par « gouvernements ouvriers et paysans » dans la langue d’autrefois !
Le déclin des impérialismes européens et le long décentrage de l’Europe dans la lutte des classes à l’échelle mondiale conduit à cet apparent mais fécond paradoxe qu’aujourd’hui, les contradictions intenables qui affectent l’Europe prise entre Trump et Poutine offrent aux révolutionnaires du XXI° siècle la possibilité, et donc la responsabilité, de poser la question du pouvoir aussi, voire surtout, par le canal des revendications militaires internationalistes. Par cette voie, l’Europe n’indiquerait pas au monde le chemin de la guerre mondiale inter-impérialiste, mais celui de la révolution prolétarienne et démocratique, dont la dimension militaire est et sera incontournable, permettant de nous sauver, le monde, la culture humaine et nos enfants avec nous, de la guerre mondiale comme catastrophe imminente, et de vivre au-delà de l’effondrement bioclomatique.
Vincent Présumey, les 4-5 août 2025.
05.08.2025 à 17:25
Les progrès de l’union des droites : l’exemple de la dérive de la démocratie chrétienne allemande.
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Texte intégral (793 mots)
En ce début du mois d’août, la « Taz » (journal en ligne comparable au « Guardian » britannique) rapporte que Saskia Ludwig, députée du parti chrétien-démocrate allemand (la CDU), s’est rendue en Hongrie à l’invitation d’un réseau de droites « illibérales » pour participer à la « MCC Feszt » (1). Ludwig y a publiquement remis en cause le « pare-feu », terme qui désigne en Allemagne le refus principiel de toute collaboration avec l’extrême-droite, représentée aujourd’hui par l’AfD. Avec la montée continue de cette dernière depuis sa création en 2013, la tentation se fait de plus en plus forte pour la CDU de se rapprocher de ce parti qui recycle ouvertement des symboles et slogans nazis.
Même en Allemagne de l’est, cependant, où l’AfD est très puissante, tous les partis ont jusqu’ici refusé de former une coalition avec elle, y compris lors des dernières élections régionales, où la poussée a été très forte en Thuringe. Mais Ludwig estime que cette mise au rebut prendra fin au plus tard lors des élections du Land de Mecklembourg-Poméranie à l’automne 2026. Contactée par la Taz, la CDU ne s’est pas exprimée quant à la participation de Saskia Ludwig au MCC Feszt. Cette absence de condamnation est significative et indique que le tabou est près d’être brisé.
L’extrême-droitisation de la CDU s’était accélérée depuis que ce parti conservateur avait réussi à faire voter à l’aide des voix de l’AfD des lois restrictives vis-à-vis de l’immigration quelques semaines avant les nouvelles élections au Bundestag de février dernier. Depuis, le nouveau chancelier, Friedrich Merz (CDU), a pris position contre l’interdiction de l’AfD au moment où la cour suprême (« Bundesverfassungsgericht », littéralement : tribunal constitutionnel confédéral) classait officiellement ce parti comme étant d’extrême-droite, ouvrant la voie à une procédure d’interdiction. Alors que la coalition CDU-SPD s’était mise d’accord sur la nomination d’une nouvelle juge au tribunal constitutionnel, début juillet, une campagne de diffamation aux accents de croisade anti-woke a été menée à la fois par l’AfD et des députés de la CDU, – reprochant à la candidate Frauke Brosius-Gersdorf d’être d’extrême-gauche, et caricaturant en autres, de conserve avec des prélats catholiques, ses positions sur l’avortement. Brosius-Gersdorf avait également eu le malheur d’évoquer l’éventualité d’une interdiction de l’AfD.
Cette campagne de dénigrement a été amplifiée par la chaîne d’extrême-droite « Nius », récemment fondée sur le modèle de Fox News par l’ancien président de « Bild », le premier titre de la presse de boulevard en Allemagne. A l’aide des portails anti-avortement, de la plateforme X, et en utilisant la plateforme de mobilisation CitizenGo, une pétition contre la nomination de Brosius-Gersdorf a réuni en quelques jours 120 000 signatures. A la mi-juillet, 50 à 60 députés CDU, prenant argument des multiples lettres, pétitions et courriels qu’ils auraient reçus, ont décidé de ne pas respecter l’accord avec les sociaux-démocrates et de mêler leurs voix à celles de l’AfD pour rejeter, avec succès, la nomination de la juge.
Ce qu’on peut constater, c’est que les coalitions au Bundestag se font de plus en plus instables. La dernière grande coalition (CDU-SPD lors du dernier mandat de Merkel) avait été marquée par de grosses tensions internes au sein du SPD (l’aile gauche ayant poussé – sans succès – à la sortie de ladite grande coalition – qu’on appelle « GroKo » outre-Rhin). Cependant, cela n’avait pas affecté la stabilité du gouvernement. La coalition tricolore qui a suivi a été malmenée en interne par les libéraux (FDP) jusqu’à leur sortie prématurée qui a déclenché des élections anticipées. Alors que la GroKo nouvellement mise en place était censée être gage de stabilité par son centrisme, des trublions indisciplinés de la CDU contaminés par la « Nouvelle (Extrême-)Droite » mettent l’attelage avec les sociaux-démocrates en difficulté après seulement quatre mois de gouvernement commun. Il serait inédit qu’une GroKo éclate avant terme, mais c’est devenu une possibilité. Pas de gouvernement avec un parti perméable au néofascisme ! Sortie immédiate du SPD de la GroKo ! Gouvernement SPD – Die Linke – Verts (Rot-rot-grün) !
(1) Un festival « culturel » de la droite extrême « enracinée ». Photo illustrant cet article.
RV, le 05/08/2025, mise à jour du 06/08/2025.
03.08.2025 à 18:11
Oui, il faut rompre militairement le blocus de Gaza !
aplutsoc2
Texte intégral (1373 mots)
Introduction – Notre point de vue.
Aplutsoc salue la prise de position récente de plusieurs dirigeants et élus écologistes, que nous reproduisons ci-dessous d’après La Tribune de ce 3 août 2025. Notre position : deux génocides menacent deux peuples, les Palestiniens et les Ukrainiens, et appellent une politique militaire démocratique déterminée, armant l’Ukraine pour battre les troupes russes maintenant et affrontant Israël pour stopper immédiatement le crime de masse à Gaza (sans oublier l’exigence de libération des otages, qui n’est pas et n’a jamais été le but de guerre de Netanyahou). Cette position appelle des gouvernements autres que les gouvernements actuels en Europe, France comprise, des gouvernements de défense sociale, démocratique et écologique contre Trump et Poutine, mais la revendication militaire doit être immédiate. De ce point de vue, l’appel des écologistes permet de poser les vraies questions en ce qui concerne les Palestiniens.
Document
« Après être devenu le cimetière de dizaines de milliers de civils, Gaza est en passe de devenir le cimetière de l’ordre international, de ses droits et normes, et désormais de notre commune humanité.
Aux bombardements, à la destruction de la quasi-totalité des habitations, des écoles, des hôpitaux, à l’écocide, aux massacres quotidiens, s’ajoute désormais un énième crime de guerre : la famine comme arme du génocide.
L’armée israélienne continue de conduire une opération macabre : la destruction d’un peuple désarmé en redoublant de cruauté et de sadisme. Presque chaque jour, les rares sites de distributions alimentaires sont le théâtre de massacres de civils. Plus de 1.000 Palestiniens assassinés, dans des points censés avoir été sécurisés, dans l’attente de maigres vivres, pour survivre.
Les rares membres du personnel médical encore sur place et en vie voient des enfants disparaître et mourir de faim sous leurs yeux, et ils ne peuvent absolument rien y faire. Nous voyons tous les jours des bébés amputés sans anesthésie, des enfants brûlés vifs, des civils innocents massacrés.
Toutes les structures de survie des Palestiniens sont anéanties, y compris les hôpitaux et l’accès aux médicaments. L’armée israélienne ordonne des déplacements massifs incessants – il y a encore seulement quelques jours – confinant plus de 2 millions de Palestiniens, sur moins de 12% du territorie de Gaza (source ONU). Nous ne pouvons rester sans action concrète et urgente face à ce génocide.
Des niveaux records de malnutrition aiguë (source MSF), s’ajoutant aux près de 60.000 Palestiniens tués dont 18.000 enfants, plus du double blessés. Et ces chiffres sont probablement sous-estimés. Il y a quelques jours encore, un ministre israélien déclarait :
« L’armée doit trouver des moyens plus douloureux que la mort pour les civils à Gaza. Les tuer ne suffit pas. » Démonstration glaçante de la rhétorique génocidaire du gouvernement israélien, contre laquelle s’élève dans tous les pays des voix puissantes réclamant la paix et la protection du peuple palestinien. Au sein même de la société israélienne, des voix s’élèvent contre le génocide en cours.
L’annonce tardive de la reconnaissance de l’État de Palestine par le président Macron est essentielle. Elle nous oblige à agir et à sortir de la France et l’union européennes de ses tergiversations complices. Il faut être conséquents, il faut agir, vite, maintenant.
Soyons clairs : ce qui menace, si nous n’agissons pas d’ici là, c’est qu’en septembre les Gazaouis aient été décimés.
Il est urgent que le président de la République et le gouvernement prennent toute la mesure de la situation : l’arrêt de la Cour International de Justice évoquant dès janvier 2024 un risque plausible de génocide nous engageait déjà. Nous aurions dû prévenir, nous ne l’avons pas fait. Nous devons désormais œuvrer activement et fermement pour protéger les Gazaouis.
Nous avons donc une demande claire, à la hauteur de l’urgence lorsque l’on sait que le génocide en cours et la famine écrasent brutalement le peuple palestinien.
Nous demandons qu’au regard de l’urgence et de la gravité de la situation, des navires de la Marine nationale soient déployés sans attendre sur les côtes de Gaza dans le but d’apporter des vivres, des médicaments, produits de première nécessité.
Déjà en novembre 2023, la France envoyait le Tonnerre et le Dixmude, deux porte-hélicoptères amphibies afin de soulager les hôpitaux de Gaza. Cette opération doit être répétée et amplifiée. Des moyens conséquents doivent être déployés pour permettre que les navires dépêchés sur place puissent apporter une aide humanitaire et médicale conséquente à une enclave qui manque de tout.
Le parachutage d’aide alimentaire est une méthode peu efficace et dangereuse, il est donc indispensable de pouvoir garantir l’ouverture complète de l’aide humanitaire et son acheminement de manière sécurisée pour les Gazaouis. La France doit être le moteur d’une coalition internationale pour lever le blocus humanitaire, dans le respect des traités internationaux et en lien avec les instances des nations unies.
Nous en appelons solennellement au Président Macron : la décision d’un déploiement effectif et efficace de navires de la marine pour livrer de l’aide humanitaire vous revient. Si vous n’agissez pas, vous êtes complice. Complice du génocide, des enfants affamés, des milliers de morts faute de soins, d’un peuple massacré. Votre inaction restera dans l’histoire.
Assumez une décision historique qui permettra de mettre un terme à un blocus illégal, et d’arrêter le génocide en cours. Assumez de reconnaître l’État de Palestine sans attendre septembre, et de faire campagne pour rallier le plus de pays européens possibles en renouant avec notre histoire. Assumez d’être à l’initiative d’une coalition à même de mettre fin au drame humanitaire. Assumez de demander des sanctions contre le gouvernement israélien, d’arrêter la livraison d’armes et d’exiger l’arrêt de l’accord d’association de l’Europe avec Israël.
Une pression résolue, concertée et ferme contre le gouvernement israélien peut remplir notre seul objectif : un cessez-le-feu permanent, pour en finir avec le génocide en cours.
De timides déclarations diplomatiques ne résoudront plus rien. Seuls des actes résolus et forts viendront à bout de la barbarie. Dans le cas contraire, votre initiative diplomatique et politique constatera un champ de ruines qu’est devenu Gaza, et l’effacement de tout un peuple.
Les futures générations s’y rendront et pourront dire « voilà, sur les bords de la Méditerranée, où Gaza s’élevait. C’était avant le génocide du peuple palestinien, au XXIe siècle, au vu et au su de tous ». «
Signataires :
- Marine Tondelier, Secrétaire nationale des Écologistes
- Aïssa Ghalmi, Secrétaire national adjoint des Écologistes
- Cyrielle Châtelain, présidente du groupe Écologiste et social à l’Assemblée nationale
- Guillaume Gontard, président du groupe Écologiste – solidarité et territoires au Sénat
- David Cormand, eurodéputé écologiste
- Persos A à L
- Carmine
- Mona CHOLLET
- Anna COLIN-LEBEDEV
- Julien DEVAUREIX
- Cory DOCTOROW
- Lionel DRICOT (PLOUM)
- EDUC.POP.FR
- Marc ENDEWELD
- Michel GOYA
- Hubert GUILLAUD
- Gérard FILOCHE
- Alain GRANDJEAN
- Hacking-Social
- Samuel HAYAT
- Dana HILLIOT
- François HOUSTE
- Tagrawla INEQQIQI
- Infiltrés (les)
- Clément JEANNEAU
- Paul JORION
- Michel LEPESANT
- Frédéric LORDON
- Persos M à Z
- Henri MALER
- Christophe MASUTTI
- Jean-Luc MÉLENCHON
- Romain MIELCAREK
- MONDE DIPLO (Blogs persos)
- Richard MONVOISIN
- Corinne MOREL-DARLEUX
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