14.11.2024 à 13:31
Des animaux découpés vivants dans un abattoir de Savoie
Mr Mondialisation
L214 publie ce jeudi 14 novembre des images provenant de l’abattoir de Maurienne à Saint-Étienne-de-Cuines (Savoie), dirigé notamment par le président d’Interbev Auvergne-Rhône-Alpes. Reportage. L214 porte plainte pour actes de cruauté et mauvais traitements sur 10 manquements graves identifiés au cours des 10 jours d’abattage filmés entre le 29 août et le 1er octobre 2024. […]
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L214 publie ce jeudi 14 novembre des images provenant de l’abattoir de Maurienne à Saint-Étienne-de-Cuines (Savoie), dirigé notamment par le président d’Interbev Auvergne-Rhône-Alpes. Reportage.
L214 porte plainte pour actes de cruauté et mauvais traitements sur 10 manquements graves identifiés au cours des 10 jours d’abattage filmés entre le 29 août et le 1er octobre 2024.
L214 demande à Annie Genevard, nouvelle ministre de l’Agriculture, de fermer l’établissement et de réaliser un audit généralisé des abattoirs en France.
À l’abattoir de Maurienne, des moutons (béliers, brebis et agneaux) et des bovins (bœufs, vaches et veaux) sont abattus encore sensibles et conscients, et certains sont découpés alors qu’ils sont encore vivants.
À l’affalage (sortie de la contention après l’étourdissement) ou après la saignée, les animaux présentent des signes de conscience caractéristiques dont des mouvements de redressement une fois suspendus. La plupart se débattent violemment.
« S’ensuit une découpe primaire au couteau sur des animaux encore vivants, alors qu’à ce stade ils devraient être morts ».
S’ensuit une découpe primaire au couteau sur des animaux encore vivants (mouvements de la patte arrière), alors qu’à ce stade ils devraient être morts.
D’autres graves infractions ont été relevées dans cette enquête :
- il n’est procédé à aucun contrôle de l’état d’inconscience après l’étourdissement ;
- il n’y a jamais recours à l’étourdissement d’urgence ;
- les moutons voient leurs congénères se faire tuer ;
- des moutons sont manipulés avec brutalité (torsion de la queue, moutons retournés sur le dos dans le restrainer…) ;
- le box de contention pour les veaux et le restrainer pour les moutons ne permettent pas une contention suffisante.
Cet abattoir fournit des magasins Super U, Intermarché et E.Leclerc du département, et des boucheries locales. La viande est aussi vendue en direct dans les élevages où ont été élevés les animaux tués dans cet abattoir.
L’établissement appartient au Syndicat du pays de Maurienne regroupant 5 communautés de communes. Il est géré par la profession agricole (coopératives et éleveurs) et des bouchers. On compte parmi ses dirigeants Lionel Rittaud, président d’Interbev Auvergne-Rhône-Alpes (interprofession de la viande) et artisan-boucher propriétaire de la boucherie Rittaud.
« « Ces agneaux là-bas, ils sont trop mignons, […] vaut mieux pas trop les regarder ». Ces mots entendus à l’abattoir de Maurienne, rapporte Bérénice Riaux, chargée des enquêtes de L214, ont été prononcés par la vétérinaire en charge de la protection animale, et rattachée à la préfecture de Savoie. Ils révèlent à quel point nos pratiques sont en opposition avec nos valeurs.
Cet abattoir est le quatrième que nous épinglons en l’espace d’un an. À chaque fois, nous constatons des animaux en grande souffrance, et à chaque fois, nous relevons des infractions ayant de graves conséquences sur eux. Des images qui indignent la plupart des citoyens et des consommateurs. La souffrance des animaux dans les abattoirs ne devrait plus être sujet à débat. Il est grand temps que le gouvernement établisse un plan d’action visant une réduction du nombre d’animaux tués. »
L214 interpelle la nouvelle ministre de l’Agriculture
L214 demande à Annie Genevard de conduire un audit interne dans les établissements français d’abattage d’animaux pour faire un état des lieux des conditions d’abattage. L’association demande à ce que les rapports d’inspection issus de cet audit soient rendus publics.
Par ailleurs, L214 demande à la ministre et à François Ravier, préfet de la Savoie, la fermeture immédiate de l’abattoir de Maurienne.
L214 appelle les éleveurs à se porter partie civile
L214 porte plainte pour actes de cruauté et mauvais traitements commis par un professionnel auprès de la procureure de la République du tribunal judiciaire d’Albertville. Ce mercredi 13 novembre, l’association lui a remis 3 h 30 d’images de preuves.
Les éleveurs clients de l’abattoir, qui ne pourront qu’être choqués par ces méthodes d’abattage, peuvent se porter partie civile. Pour toute question sur cette affaire ou sur la procédure en justice entamée par L214, ils peuvent contacter l’association à l’adresse abattoir-maurienne@L214.com.
Que dit la réglementation ?
Un animal doit être inconscient au moment de la saignée.
Article 4 du règlement 1099/2009
« L’animal est maintenu dans un état d’inconscience et d’insensibilité jusqu’à sa mort. »
Article R 214-71 du Code rural et de la pêche maritime
« La saignée doit commencer le plus tôt possible après l’étourdissement et en tout état de cause avant que l’animal ne reprenne conscience. »
Un animal doit être mort au moment de la découpe.
Annexe III du règlement 1099/2009
« 3.2 L’habillage ou l’échaudage ne sont pratiqués qu’après vérification de l’absence de signe de vie de l’animal. »
– L214
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La lente descente aux enfers des prisons belges
Mr M.
Prisons surpeuplées et délabrées, manquements graves aux normes d’hygiène, accès insuffisant aux services de base et aux soins médicaux,… Amnesty International dénonce une fois de plus les conditions de vie déplorables des détenus en Belgique. Alors que les membres du personnel carcéral et les syndicats se mobilisent en faveur d’une réforme majeure du système pénitentiaire, […]
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Prisons surpeuplées et délabrées, manquements graves aux normes d’hygiène, accès insuffisant aux services de base et aux soins médicaux,… Amnesty International dénonce une fois de plus les conditions de vie déplorables des détenus en Belgique. Alors que les membres du personnel carcéral et les syndicats se mobilisent en faveur d’une réforme majeure du système pénitentiaire, les autorités tardent à prendre des mesures pour améliorer leurs conditions de détention.
« Ils sont parfois trois, enfermés toute la journée dans une cellule prévue pour deux, d’à peine 2,50 m sur 3,50 m », relate Philippe Hensmans, ancien directeur de la section belge francophone d’Amnesty International et bénévole au sein d’un comité de surveillance du Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire (CCSP). Loin de l’image populaire de « l’hôtel cinq étoiles », le quotidien au sein des prisons belges est marqué par le manque de personnel, un surpeuplement carcéral, le manque d’hygiène et des actes de violence récurrents.
Quand les prisons débordent
Le territoire belge compte à ce jour 39 établissements pénitentiaires, « soit 10 773 places pour les 12 130 détenus, selon les données du SPF Justice au 15 mai 2024 », explique Guylaine Germain dans un article du Fil, la revue trimestrielle publiée par Amnesty International Belgique Francophone (AIBF).
Au printemps 2023, le taux de surpopulation était encore supérieur pour atteindre les 17%. 250 détenus dormaient alors sur des matelas posés à même le sol. À ce jour, plus de 280 « lits » supplémentaires sont encore installés dans les cellules du pays, rapporte Amnesty.
Parmi les détenus, « 30% sont des prévenus (soit des personnes qui n’ont pas encore été définitivement jugées et donc présumées innocentes, ndlr.), qui peuvent attendre longtemps avant de passer en jugement. Cela illustre le retard que la justice a pu accumuler dans le traitement des dossiers », assène encore Philippe Hensmans.
Une politique d’incarcération stricte
L’ancienne politique pénale, qui permettait aux condamnés à des peines de moins de trois ans de les purger sous bracelet électronique, a été révisée sous l’impulsion de Vincent Van Quickenborne, ancien ministre de la Justice. Désormais, même les courtes peines doivent être exécutées en prison, ce qui accroît considérablement le nombre de détenus. Didier Breulheid, délégué permanent à la CSC, explique dans une interview accordée à RTL :
« Le gouvernement actuel a décidé de mettre en place la loi d’application des courtes peines, donc on a beaucoup plus de détenus dans nos prisons qui n’y étaient pas avant »
Il précise que cette loi devait être accompagnée de la création de 15 maisons de détention, des établissements à petite échelle où les détenus bénéficieraient d’un accompagnement personnalisé et de plus de libertés. À ce jour, seuls 2 centres de ce type sont en activité, un chiffre bien loin des promesses initiales.
« La prison est infestée de punaises de lit »
Favorisée par cette politique pénitentiaire stricte, la surpopulation carcérale conduit à de nombreux problèmes : « À Mons, la prison est infestée de punaises de lit », explique Bastien, avocat, qui s’y rend fréquemment pour rendre visite à ses clients. « À cause de la surpopulation, il y a des matelas au sol dans les cellules. Il y a des rats, des souris. À la prison de Forest, les détenus faisaient leurs besoins dans des seaux hygiéniques », illustre encore Eliott, un confrère, dans les pages de la RTBF.
« Ce sont des situations anormales ! », s’alarme Pierre Sculier, président d’avocats.be. « Il y a aussi le problème des toilettes sans paravent pour protéger l’intimité, ce qui entraîne des problèmes intestinaux ou même de constipation ».
D’autres risques sanitaires sont à déplorer : les épidémies de gales et de tuberculose font souvent leur apparition au sein des prisons. Durant les fortes chaleurs estivales, l’aération est loin d’être suffisante. « De nombreuses prisons du pays développent ainsi des soucis de salubrité: champignons, moisissures, humidité… », relève Amnesty.
Les gardiens de prison à bout
Une situation difficile à supporter pour le personnel pénitentiaire, qui se trouve dans l’impossibilité de prendre en charge chaque détenu dignement, donnant lieu à davantage de conflits entre les prisonniers et envers les gardiens. En 2023, plusieurs grèves se succèdent au sein des prisons du pays pour dénoncer une « situation intenable ». Philippe Hensmans assène :
« En avril 2023 à Nivelles, on m’a déclaré 8 gardiens pour 250 détenus. Impossible d’accéder aux services minimums ».
Selon l’Institut fédéral des droits humains, des traitements inhumains, assimilés à de la torture, en ont découlé.
En octobre de la même année, le Conseil de l’Europe a réitéré ses critiques au sujet des problèmes structurels du système carcéral belge et de l’absence de recours efficaces. « Il a exhorté les autorités à prendre des mesures rapides et durables pour réduire le nombre de personnes détenues et améliorer les conditions de détention », rappelle le rapport d’Amnesty.
Changer de regard sur le rôle de la prison
Entre temps, peu de choses ont changé. Avocats, syndicats et défenseurs des droits des détenus militent pour une autre politique carcérale : incarcérer le moins possible, si ce n’est pas du tout pour certains. « Les solutions sont connues, mais on ne les applique pas », regrette Marc Nève, directeur du CCSP, qui cite notamment les travaux d’intérêt général, la surveillance électronique ou par un assistant de justice, la liberté conditionnelle, les quotas pour la préventive ou des mécanismes de justice restaurative tels qu’exposés dans le film Je verrai toujours vos visages.
« Dans l’imaginaire collectif, on professe que seule la prison est une vraie peine. La Belgique annonce toujours ouvrir de nouveaux établissements mais cette course à toujours plus ne va pas. La prison ne sert à rien, elle aggrave même la situation. Il faut d’autres initiatives pour diminuer la détention, mais il n’y a aucune réflexion au niveau politique », regrette l’avocat.
– L.A.
Photo de couverture de Ron Lach
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La mangrove disparaît de 1% chaque année
Mr M.
La mangrove, forêt entre terre et mer bordant les littoraux tropicaux, abrite une biodiversité précieuse et unique. Grignotée par la crevetticulture, les coupes de bois, la pollution et le dérèglement climatique, elle est désormais en danger. François Fromard, chercheur au Laboratoire Écologie fonctionnelle et environnement (ECOLAB), contribue à mettre en lumière ce maillon de l’équilibre […]
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La mangrove, forêt entre terre et mer bordant les littoraux tropicaux, abrite une biodiversité précieuse et unique. Grignotée par la crevetticulture, les coupes de bois, la pollution et le dérèglement climatique, elle est désormais en danger. François Fromard, chercheur au Laboratoire Écologie fonctionnelle et environnement (ECOLAB), contribue à mettre en lumière ce maillon de l’équilibre planétaire.
Une mangrove est une forêt composée d’espèces ligneuses : les palétuviers, capables de prospérer les pieds dans l’eau salée. Elle se développe le long des littoraux de régions tropicales et intertropicales, globalement entre les latitudes + 30 et – 30, et se forme au niveau de l’estran, la partie du littoral située entre les limites des plus hautes et des plus basses marées.
« Il existe tout un tas d’autres conditions environnementales qui expliquent sa formation, mais ce sont les modalités générales nécessaires à son développement », explique François Fromard, l’un des 43 chercheurs et spécialistes mobilisés pour la réalisation du livre Mangrove, une forêt dans la mer.
Une biodiversité singulière
La mangrove est l’un des 14 grands biomes terrestres définis par WWF. « Quand on observe les littoraux tropicaux et intertropicaux, indique François Fromard, on se rend compte que 75 % sont couverts de mangroves. Elles constituent une zone d’interface entre les milieux maritimes et terrestres. » La mangrove est au carrefour d’échanges divers, d’énergie, de nutriments, et le berceau d’une biodiversité bien particulière : des poissons « gros yeux » pouvant respirer hors de l’eau, des crabes ingénieurs et une multitude de bactéries indispensables au recyclage de la matière organique.
« Peu d’espèces, au fil de l’évolution, se sont adaptées aux contraintes fortes propres aux mangroves, notamment aux grandes variations de salinité, poursuit le chercheur. Ce qui les caractérise, c’est donc à la fois une faible biodiversité végétale mais, en même temps, une capacité d’adaptation extrême de ces espèces. »
Les mangroves jouent aussi un grand rôle nourricier et représentent des sources de revenus essentielles pour un certain nombre de populations humaines, dépendante notamment de sa richesse en poissons, en crabes, en crevettes. Les êtres humains font aussi feu de son bois, en use pour bâtir ses habitations ou ses embarcations.
Un rempart face aux aléas climatiques
Confrontées aux vents et aux vagues, les mangroves remplissent à merveille leur rôle de rempart côtier. « Lorsqu’elles sont intactes, c’est-à-dire pas détériorées par des coupes de bois ou des constructions humaines, elles sont comme des écrans qui permettent de casser l’énergie des vents, des vagues et protègent en partie les habitations qui se trouvent derrière », remarque le scientifique. Une mangrove adulte, en bon état, atténue de près de 20 % l’énergie des vagues et des vents.
« Dans certaines régions d’Indonésie, affectées par de puissants cyclones dans les années 90, des chercheurs ont observé que les zones où les dégâts étaient les moins importants correspondaient à celles où les mangroves étaient restées intactes », illustre François Fromard. Une mangrove ne protège pas intégralement des évènements extrêmes, mais elle offre donc une certaine résistance face à leurs ravages potentiels.
La mangrove constitue également un moyen efficace d’atténuer la présence de carbone dans l’atmosphère. Elle a la capacité d’absorber et de stocker une quantité importante de CO2 et contribue ainsi à la lutte contre le changement climatique. Elle permet aussi, par ailleurs, de filtrer et retenir un certain nombre de polluants organiques, azotés, phosphorés…
« Dans une certaine mesure, elle fonctionne un peu comme une éponge et contribue à dépolluer les eaux qu’elle borde »
Un imaginaire puissant
Les sociétés humaines éprouvent à la fois un attrait et une répulsion pour les mangroves. « L’aspect même de la mangrove est un peu mystérieux. Elle n’est pas forcément facile d’accès, son eau est turbide, vaseuse, boueuse, les moustiques sont légion. Dans certaines régions, elles inquiètent, représentent un lieu hostile, à éviter. Dans d’autres, elles sont considérées comme un lieu de culte, un endroit protecteur, un écosystème qui offre d’importantes ressources. »
À Mayotte, une légende raconte même que les Moina Issa, des esprits à l’apparence de petites femmes, vivent dans les mangroves et les protègent. Elles ont une main plus petite que l’autre, se déplacent en bondissant et peuvent exaucer les vœux de quiconque leur apporte des offrandes. A contrario, elles peuvent abattre le malheur sur tout individu irrespectueux envers la mangrove.
Trésor en péril
Cet écosystème, source d’inspiration et riche en services rendus, semble pourtant moins étudié et exposé à la lumière médiatique que le récif corallien. « La mangrove fait moins parler d’elle, c’est vrai, reconnaît François Fromard. D’un point de vue scientifique, les recherches sur les récifs coralliens sont beaucoup plus anciennes et avancées. Pourtant, quand on s’intéresse à la répartition mondiale des coraux et à celle des mangroves, elles se superposent presque parfaitement, de façon assez étonnante. Elles ont, dans les grandes lignes, les mêmes exigences climatiques : elles demandent des régions chaudes, des eaux plutôt calmes. »
Surtout, comme les coraux, elles sont en péril. Chaque année, près d’1 % de la surface mondiale occupée par la mangrove disparaît. La principale raison de ce recul des mangroves est le développement tentaculaire de la crevetticulture, surtout en Asie du Sud-Est ou en Amérique du Sud. Des mangroves y sont défrichées et troquées contre des bassins où sont élevées des crevettes.
« L’élevage fonctionne pendant trois, quatre ou cinq ans, puis les rendements baissent, explique François Fromard. Le bassin est alors abandonné et un autre est créé à côté. Ainsi de suite. Peu à peu, la mangrove perd du terrain. » Au niveau du Delta du Mékong, au sud du Vietnam, elles ont quasiment intégralement disparu sous l’effet du développement de la crevetticulture.
« L’urbanisation et les coupes de bois ont aussi un effet désastreux pour les mangroves. À Madagascar, où l’essentiel des forêts primaires a été détruit, c’est désormais la mangrove qui est utilisée pour produire du charbon de bois. »
Les pertes sont considérables, notamment en matière de biodiversité, d’équilibre des littoraux côtiers, de stockage de carbone. Les services écosystémiques rendus par la mangrove disparaissent avec elle, et les côtes qui en sont dépourvues se retrouvent à la merci de l’érosion.
Préserver les mangroves, maillon de l’équilibre planétaire, apparaît alors comme un enjeu de gouvernance essentiel. « Il arrive que des pays décrètent qu’une mangrove est protégée, observe François Fromard. Parfois, cela fonctionne, mais dans certains États, les protections sont très théoriques et ne fonctionnent pas. Bien souvent, aussi, le statut des mangroves n’est pas très clair : relèvent-elles du domaine publique ? Du domaine privé ? Doivent-elles être gérées par des forestiers ? » Ce flou juridique et administratif les rendent vulnérables, car plus difficiles à protéger ou restaurer.
« L’information, l’éducation et la compréhension du fonctionnement et du rôle des mangroves pourraient également contribuer à leur sauvegarde, tout comme le développement de structures, de mesures de gestion, de protection des mangroves existantes et le reboisement, la replantation de mangroves détruites », souffle François Fromard.
Trésor des littoraux, la mangrove doit garder les pieds dans l’eau.
– Alexandre-Reza Kokabi
Photo de couverture de Aristedes Carrera sur Unsplash
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En Italie, des féministes occupent un planning familial abandonné
Mr M.
Dans l’Italie de Giorgia Meloni, les droits des femmes sont sérieusement menacés, particulièrement en ce qui concerne l’accès à l’avortement. Un rétropédalage inquiétant qui s’oppose à l’autodétermination des femmes. Face aux violences de genre et aux politiques réactionnaires, le mouvement féministe et transféministe italien tente de reprendre la main par l’occupation d’un planning familial. Difficultés […]
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Dans l’Italie de Giorgia Meloni, les droits des femmes sont sérieusement menacés, particulièrement en ce qui concerne l’accès à l’avortement. Un rétropédalage inquiétant qui s’oppose à l’autodétermination des femmes. Face aux violences de genre et aux politiques réactionnaires, le mouvement féministe et transféministe italien tente de reprendre la main par l’occupation d’un planning familial.
Difficultés d’accès à l’IVG
Si la loi de 1978 ayant assuré la dépénalisation de l’avortement n’est pas directement remise en cause, la plupart des régions rendent de plus en plus difficile l’accès à l’IVG, du fait de la prise de pouvoir de celles-ci par la coalition des droites (Forza Italia) et des extrême-droites (Fratelli d’Italia et Lega). Les régions sont en effet « autonomes et compétentes en matière de santé publique » en Italie d’après Politis.
Une aubaine pour le gouvernement Meloni qui met progressivement et concrètement en péril les droits des femmes. Selon la gynécologue Marina Toschi, les gouvernants « ne peuvent pas supprimer la loi, alors ils rendent l’avortement impossible ». De plus, les structures publiques des consultori (équivalent du pluriel italien de planning familial, consultorio au singulier) sont en net déclin dans le pays, contraintes de fermer une à une faute de financement par les pouvoirs publics.
En Vénétie, où l’on retrouve les villes de Venise et Padoue, les fonds monétaires sont prioritairement attribués aux familles anti-choix (terme plus révélateur de son impact social par rapport à celui de « pro-vie ») selon Politis, plutôt que de financer des politiques de soutien aux familles.
À Padoue, on ne retrouve plus que 4 espaces de planning familial, soit 1 pour 52 000 habitants. La loi de 1975 stipule pourtant qu’un consultorio doit recouvrir une population de 20 000 habitants.
Pour Marina Toschi, ce soutien financier aux femmes enceintes « n’est pas pour l’enfant, c’est pour empêcher l’avortement » ; dans un pays où l’éducation et les informations sur l’IVG sont presque inexistantes, où beaucoup d’hôpitaux ne proposent pas cette pratique, où les procédures pour avorter sont complexes, et où conséquemment de nombreuses femmes avortent illégalement. En Vénétie, 70% des gynécologue invoquent la clause de conscience et refusent d’administrer des services d’avortement, selon Non Una Di Meno. Un pays où l’IVG est légal n’est pas synonyme d’accès sûr et libre à ce droit, l’Italie en est la preuve.
En France, l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution représente une protection supplémentaire. Mais la formation du nouveau gouvernement Barnier vient menacer à nouveau sérieusement ce droit. Au-delà d’être illégitime démocratiquement après la victoire du NFP aux élections législatives, ce gouvernement voulu par Emmanuel Macron est composé d’au moins 5 ministres anti-IVG et homophobes selon Caroline De Haas, militante féministe et fondatrice de NousToutes.
Occupation d’un consultorio abandonné
Dans ce contexte, l’occupation d’un ancien planning familial (fermé en 2019) par le mouvement féministe Non Una Di Meno à Padoue, est plus que symbolique. En effet, ce type d’espace représentait autrefois une grande avancée pour le féminisme, mais aussi un lieu de soutien, de solidarité, et d’accompagnement médical pour les femmes.
Cette occupation souligne la volonté de reprise de contrôle sur les droits des femmes et l’accès aux soins, alors que l’extrême-droite et les injonctions néolibérales mènent à bien leur projet d’écrasement des minorités et la destruction des services publics au nom de la sacro-sainte croissance.
Selon Alessia, que nous avons interviewée aux côtés d’Eva (toutes deux militantes féministes à Padoue), le planning familial accueillait des personnes de zones très amples et populaires, ne se limitant pas à son seul quartier. C’était un lieu « où l’on pouvait exercer son propre droit, avant tout celui de la santé ». Elle précise que la – bonne – santé ne signifie pas seulement l’absence de maladie, mais englobe aussi l’accès au bien-être, aussi bien individuel que collectif et relationnel.
Création de la Consultoria
L’ancien planning familial a été occupé le 8 mars 2024 par Non Una Di Meno Padoue lors de la grève transféministe. Le mouvement italien a alors expliqué ce choix :
« Cela fait des années que cet espace a été abandonné par les institutions, laissant un vide dans le quartier et dans toutes la zone sud-ouest de Padoue. Les conséquences de la casse sanitaire se reflètent aujourd’hui sur nos corps de manière violente, nous laissant sans prévention ni soins médicaux. »
Elles ajoutent qu’au-delà de la désertification strictement médicale, « les femmes se voient priver de lieux de discussion et d’écoute, de confrontation et d’auto-formation sur la sexualité, le consentement et l’affectivité ». Les consultori devraient donc être des lieux sûrs ouverts à tous·tes, où l’on pourrait parler d’avortement, d’autodétermination et de liberté de choix, d’après le mouvement.
Autre symbole important, c’est l’extension féministe de l’espace du planning familial, sur le fond comme sur la forme. En effet, le nom choisi pour ce lieu féministe : La Consultoria est en réalité la renomination au féminin (comme symbole de l’activisme féministe) du mot consultorio.
D’après Eva, l’objectif de la Consultoria n’est pas de se substituer aux consultori, mais de s’en inspirer, les relancer et les faire évoluer. Le but est de « créer un espace alternatif, une conception alternative du féminin et des femmes », mais encore un lieu d’expérimentation et de confrontation. Pour Alessia, la création de la Consultoria et sa déclinaison féministe entrent dans une logique de « réappropriation d’un récit sur la santé publique », de dénonciation des conditions des femmes, mais aussi de politisation :
« qui mieux que nous [les femmes] pour connaître notre propre corps ? »
La puissance de l’occupation de l’espace public
Un espace physique était devenu nécessaire pour l’un des mouvements sociaux les plus importants de la ville, n’ayant pas eu de siège fixe durant plusieurs années. Dans un précédent article, nous parlions de l’importance de l’occupation de l’espace public. Cette forme d’action est en effet un excellent moyen de faire de la politique, de propager une forme de réalité divergente par rapport à celle imposée – et par ailleurs abstraite – par le contrôle de l’administration.
« Sorella facciamoci spazio » (Sœur faisons-nous un espace)
Cette phrase résonnait comme une évidence au sein du mouvement. Si la création de la Consultoria est un grand pas en avant, Alessia met en garde sur le risque de s’enfermer à l’intérieur de cet espace : les activités au nouveau siège de Non Una Di Meno doit s’ajouter à l’occupation des places et de la rue, et non s’y substituer ; comme une plus-value aux forces déjà présentes.
L’espace de la Consultoria permet aussi au mouvement d’être plus accessible, visible et permet de proposer plus d’activités qu’auparavant, en plus de la théorie et de l’auto-formation.
La Consultoria propose aujourd’hui des assemblées, des formations, des moments de socialisation, d’information, d’accompagnement ; elle accueille aussi des personnes expertes : une gynécologue et une thérapeute du plancher pelvien sont récemment passées pour transmettre des outils. Pour Alessia, ce sont des instruments d’autodétermination, qui permettent aux femmes de pouvoir rétorquer leur expertise lorsqu’un médecin les infantilise.
De même, pour Eva, la Consultoria est un « laboratoire de construction ». Bien que les militantes ne cherchent pas à se substituer aux pratiques médicales et ne prennent pas d’initiatives gynécologiques par exemple, elles considèrent que le partage de savoirs est toujours un cercle vertueux.
Histoire Non Una Di Meno
Non Una Di Meno (« Pas une de moins » en italien) est un mouvement féministe, transféministe et intersectionnel, dont la branche italienne est née en 2016. Celui-ci se bat contre toutes les formes de violence de genre, et contre tous les visages qui assument le maintien du patriarcat dans la société dans laquelle nous vivons.
Le mouvement reprend la forme de Ni Una Menos né en Argentine en 2015, et qui s’est élargi à l’international. À l’origine, la poètesse mexicaine Susana Chávez déclarait : « Pas une femme de moins, ni une morte de plus » ; dénonçant les féminicides survenus dans sa ville natale de Ciudad Juárez, où la poétesse est morte pour la même raison : être une femme.
Les mobilisations féministes de mai 2015 font suite à divers épisodes de violences patriarcales et au féminicide de l’adolescente de 14 ans, Chiara Paez, dans la province argentine de Santa Fe. Ces crimes ont conduit quelques semaines plus tard à la création de Ni Una Menos.
À bas le patriarcat !
Pour Alessia, la naissance de Non Una di Meno est la conséquence de la violence patriarcale que subissent les femmes et les minorités de genre, y compris à l’intérieur des mouvements sociaux : centres sociaux, espaces multisports, associations de la société civile, etc.
Même lorsque ces espaces défendent des valeurs antifascistes et féministes, des comportements machistes et misogynes se produisent ; avec peu de réactions, autocritiques ou visibilité donnée à ces agissements de la part des camarades. Pour Alessia, ces phénomènes surviennent à cause des normes sociales qui nous ont habitués à ces types de comportement.
Nommer et rendre visible les violences produites par les hommes est indispensable pour dénoncer un système patriarcal intégré par tous les hommes. Les violences sexistes et sexuelles (VSS) touchent absolument tous les milieux, toutes les classes sociales, tous les secteurs d’activité, tous les partis politiques, et sont commises en grande majorité par des hommes.
Le patriarcat est donc un phénomène total et un système inculqué à chaque homme (mais aussi intégré par les femmes). Seul un processus continu de déconstruction peut remédier à cela.
En France, des VSS existent également au sein de partis de gauche, des groupes militants et associatifs. Par exemple, les violences sexuelles commises par l’Abbé Pierre, d’après 20 témoignages. Ce personnage a été idéalisé au vu de ses combats pour défendre les personnes marginalisées. Pourtant, l’homme a abusé de personnes dans le besoin, mineurs inclus. Il a profité de sa position de force, selon la journaliste Isabelle De Gaulmin, mais aussi de la complicité de l’Église restée silencieuse.
Féminicide de Giulia
La ville de Padoue a particulièrement été secouée par le féminicide de Giulia Cecchettin le 11 novembre 2023, à l’âge de 22 ans, commis par son ancien compagnon. La jeune fille était portée disparue avant que son corps ne soit retrouvé dans un ravin une semaine plus tard.
Selon Eva, l’assassinat de l’étudiante de l’Université de Padoue a littéralement changé le cadre de l’activisme féministe et le discours des citoyen·nes : « Nous somme passées de petites assemblées à de grandes assemblées au sein de l’Université », constate-t-elle.
Dès l’annonce du féminicide du Giulia, de nombreuses manifestations se sont succédés à Padoue, dont une réunissant 15 000 personnes selon Il Manifesto). Puis, le 25 novembre 2023, lors de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, un demi-million de manifestant·es à Rome a été dénombré.
« Quand Giulia a disparu, avant même de retrouver son corps, nous savions, nous avions toutes le pressentiment de ce qu’il s’était passé »
Ce pressentiment n’est pas anodin : Cela révèle les peurs que vivent les femmes au quotidien du fait que ces violences se succèdent.
Le féminicide de trop
Pour Alessia, le meurtre de Giulia est la goutte d’eau qui fait déborder un vase déjà bien trop plein (120 féminicides recensés en Italie en 2023) : « Giulia était potentiellement la proche de n’importe qui d’entre nous ». Surtout, l’auteur du crime, Filippo, lui aussi jeune étudiant à l’Université de Padoue, pouvait être le proche de n’importe qui.
Selon Alessia, les médias mainstream définissent les vies du meurtrier et de la victime comme « normales », un adjectif que n’utilise pas les militantes. Mais leur profil de jeunes étudiants blancs issus des classes moyennes, montre que les violences de genre peuvent arriver à n’importe qui et être commise par tout profil d’homme, pas seulement à la marginalité, comme voudraient le faire croire les idées reçues et les discours racistes. Aucune femme n’est à l’abri des violences du patriarcat.
Fait inédit : le père et la sœur de Giulia ont de suite communiqué de manière claire et lucide, en invitant à la mobilisation et en dénonçant ce féminicide comme le fruit du patriarcat et de la possessivité masculine.
Alessia salut par ailleurs le courage d’Elena Cecchettin, sœur de la défunte, pour son passage en direct sur Rete 4 (chaîne de télé privée italienne présentant une ligne éditoriale favorable à l’extrême-droite) et le ciblage de son discours à l’encontre des dominations patriarcales. Les attaques des forces d’extrême-droite, dont la Lega, ne se sont pas faites attendre, d’après Alessia.
De plus, Eva considère que les massives mobilisations pour Giulia permettent aux femmes de ne plus être vues comme « l’habituelle fille qui exagère », comme une « folle » ou bien une « hystérique », lorsqu’elles disent avoir peur qu’un garçon les violente. La militante ajoute :
« Ce féminicide nous a profondément touché, dans nos cœurs, en particulier dans la communauté universitaire. […] Cela nous touche tous·tes, nous réalisons que nous pouvons perdre ainsi la vie à padouE, ce féminicide est la réalité de nos vies. »
Eva raconte s’être mise à penser à toutes ses copines qui ont eu des problèmes de jalousie avec leurs compagnons : « Giulia était n’importe laquelle de mes copines, ou moi-même, c’est une camarade. Il ne s’agit plus d’une nouvelle du téléjournal que l’on regarderait de loin », dit-elle avec effroi et responsabilité.
Créer un langage féministe
D’après Alessia, « les camarades qui ont organisé Non Una Di Meno ont été d’emblée très claires sur les concepts comme le consentement, le respect, l’éducation et les différences ». Elle ajoute que l’une des forces du mouvement est sa capacité à nommer les choses par la diffusion d’un langage spécifique. En effet, c’est en nommant et en donnant un cadre aux violences de genre, que l’on parvient à les inscrire dans les consciences collectives : « si nous ne pensons pas une forme de domination introspectivement, alors celle-ci n’existe pas ».
D’ailleurs, la militante insiste sur l’importance de l’infusion du vocabulaire féministe dans la progression du mouvement : « Non Una Di Meno n’a pas surgit le 25 novembre dernier (2023), c’est le fruit de huit années où tant de femmes et de personnes queer ont commencé à nommer dans l’espace public ces types de violences ».
Cela a permis à ces personnes de mettre en lumière les violences patriarcales, dans une société qui voudrait les rendre coupables. À peine quelques années en arrière, il aurait été reproché aux victimes de féminicide de l’avoir « bien cherché » . Mais la donne semble avoir progressivement changé selon Alessia :
« Le travail de Non Una Di Meno a été celui de démanteler tous ces stéréotypes en créant un langage qui parvient à créer un imaginaire de libération vis-à-vis du système patriarcal. »
Pour Eva, le vocabulaire féministe atteint même le discours mainstream ; une terminologie que l’on commence à voir apparaître dans les médias de masse. Non Una Di Meno parvient à concilier son discours radical avec sa pénétration dans les discours de masse, malgré le risque de récupération par le système capitaliste.
Le revers de la médaille de l’occupation de l’espace public par les féministes, mais encore par les communautés LGBTQI+, est la recrudescence d’une onde de misogynie et d’homophobie en opposition :
« Les forces fascistes se veulent de plus en plus féroces parce qu’elles ont peur de l’avancée de notre discours politique. »
Alessia reste d’ailleurs attentive sur le fait que combattre le fascisme ne suffit pas à gagner sur les questions du féminisme, de l’avortement, de la santé ou encore des droits humains. En effet, des partis politiques, prétendument proches des idées de gauche, votent en faveur de l’effort de guerre, selon la militante. Ces partis ont, par exemple, attendu de longs mois avant de prendre position contre le génocide en Palestine. L’impérialisme et le féminisme ne font pas bon ménage.
Dégradation du système de santé
Ce qui nous a marqué en premier lieu lors de notre rencontre avec les militantes de la Consultoria, c’est leur capacité et leur volonté de penser l’intersectionnalité des luttes, de comprendre l’imbrication entre les violences de genre, de classes sociales ou encore de race. Par exemple, si la dégradation du secteur de la santé touche avant tout les femmes, notamment en ce qui concerne les difficultés d’accès à l’avortement, Alessia critique en amont les logiques néolibérales qui affecte les populations les plus vulnérables.
Selon la militante, les logiques criminelles de casse de la santé publique s’aggravent progressivement depuis plus de 20 ans. La logique du profit conduit à la privatisation du secteur, aux listes d’attente interminables, au renvoi du patient le plus tôt possible chez lui (parce qu’il est coût pour l’hôpital qui fonctionne désormais comme une entreprise), à la fermeture des consultori (4 sur les 12 dernières années à Padoue), ou encore à des coupes budgétaires, etc.
Le consultorio, né sur les ondes féministes des années 70, représentait ainsi une institution avant-gardiste très différente de la santé publique, avec une vision collective et une prospective non seulement sanitaire, mais aussi psychologique et sociale. Des espaces centrés sur la santé de genre, la logopédie pour les enfants, la parentalité, des services de psychologie ou encore de gynécologie.
Désormais, ces lieux d’entraide sont directement attaqués par les politiques gouvernementales, lorsqu’ils ne sont pas abandonnés. En effet, le gouvernement Meloni a adopté le 23 avril 2024 une mesure autorisant les organisations anti-avortement à accéder aux consultori, une stratégie qui vient contrer idéologiquement l’autodétermination des femmes.
Pour Eva, le consultorio devrait être un espace d’aide pour tous types de problèmes, comme un premier point d’accès. Quant à Alessia, elle s’inquiète des conséquences de la centralisation de la santé. En Vénétie par exemple, les grands hôpitaux centralisent la santé alors que les petites présences territoriales ferment peu à peu. Cela représente une double peine pour les personnes vivant en périphéries et délaissés par le système.
Conclusion
En somme, la Consultoria occupée par Non Una Di Meno est révélatrice de la volonté d’autodétermination des femmes et des minorités. La progression du mouvement et des valeurs transféministes sont le fruit d’un travail de longue haleine, et de la diffusion d’un langage permettant de révéler l’existence des violences de genre dans les consciences. Les mobilisations suite au féminicide de Giulia sont à la fois l’expression d’un trop plein et d’une menace constante et quotidienne pour les femmes.
L’occupation de l’espace public est d’autant plus cruciale que le gouvernement néo-fasciste italien oppose une force tout à fait contraire aux droits des femmes et des minorités de genre. Les espaces de santé publique se dégradent voire disparaissent, en particulier les consultori ; alors que l’accès à l’IVG est peu à peu piétiné par les décideurs politiques, et ce dans l’irrespect de la loi de 1978 garantissant – en théorie – le droit à l’avortement.
– Benjamin Remtoula (Fsociété)
Photo de couverture de Luca Profenna.
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