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🖋 Lionel Dricot
Développeur, cycliste et auteur de nouvelles.

PLOUM.net


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26.08.2025 à 02:00

Pas de médaille pour les résistants

Ploum

Texte intégral (2218 mots)

Pas de médaille pour les résistants

Si vous voulez changer le monde, il faut entrer en résistance. Il faut accepter d’agir et de se taire. Il faut accepter de perdre du confort, des opportunités, des relations. Et il ne faut espérer aucune récompense, aucune reconnaissance.

Un espionnage pire que tout ce que vous imaginez

Prenez notre dépendance envers quelques monopoles technologiques. Je pense qu’on ne se rend pas compte de l’espionnage permanent que nous imposent les smartphones. Et que ces données ne sont pas simplement stockées « chez Google ».

Tim Sh a décidé d’investiguer. Il a ajouté un simple jeu gratuit sur un iPhone vierge dont tous les services de localisation étaient désactivés. Cela semble raisonnable, non ?

En analysant les paquets, il a découvert la quantité incroyable d’information qui était envoyée par le moteur du jeu Unity. Cela signifie que le concepteur du jeu lui-même ne sait sans doute pas que son jeu vous espionne.

Mais Tim Sh a fait mieux : il a traqué ces données et découvertes où elles étaient revendues. Ce sont des entreprises ayant pignon sur rue qui revendent, en temps réels, les données utilisateurs : position, historique et instantanée, niveau de la batterie et luminosité, connexion internet utilisée, opérateur téléphonique, espace libre disponible sur le téléphone.

Le tout est accessible en temps réel pour des millions d’utilisateurs. Y compris des utilisateurs persuadés de protéger leur vie privée en désactivant les permissions de localisation, en faisant attention voire même en utilisant des containers GrapheneOS : il n’y a en effet aucune malice, aucun piratage, aucune illégalité. Si l’application fonctionne, c’est qu’elle envoie ses données, point à la ligne.

À noter également : les données concernant les Européens sont plus chères. En effet, le RGPD les rend plus difficiles à obtenir. Ce qui est la preuve que la régulation politique fonctionne. Le RGPD est très loin d’être suffisant. Sa seule utilité réelle est de démontrer que le pouvoir politique peut agir.

Nous avons tendance à nous moquer de la petitesse de l’Europe, car nous la mesurons en utilisant les métriques américaines. Nos politiciens rêvent de « licornes » et de monopoles européens. C’est une erreur, la force européenne est opposée à ces valeurs.

Comme le souligne Marcel Sel : malgré tous ses défauts, l’Europe est très imparfaite, mais, peut-être, la structure dans le monde la plus progressiste et qui protège le mieux ses citoyens.

La saturation de l’indignation

Face à ce constat, nous observons deux réactions. Le « jemenfoutisme » et l’indignation violente. Mais, contrairement à ce qu’on pourrait croire, la seconde n’a pas plus d’impact que la première.

Olivier Ertzscheid parle de la saturation de l’indignation. Une indignation permanente qui nous fait perdre toute capacité d’agir.

Je vois beaucoup d’indignation concernant le génocide qu’Israël commet à Gaza. Mais peu ou prou d’actions. Pourtant, une action simple est de supprimer ses comptes Whatsapp. Il est presque certain que les données Whatsapp servent pour cibler des frappes. Supprimer son compte, c’est donc une action réelle. Moins il y aura de comptes Whatsapp, moins les Gazaouis trouveront l’app indispensable, moins il y aura de données pour Israël.

Au lieu de s’indigner, entrez en résistance active. Coupez autant que vous pouvez les cordons. Vous allez perdre des opportunités ? Des contacts ? Vous allez rater des informations ?

C’est le but ! C’est l’objectif ! C’est la résistance, le nouveau maquis. Oui, mais "machin", il est sur Facebook. Quand on entre sa résistance, on y va pas en pantoufle avec toute la famille. C’est le principe même de la résistance : de prendre des risques, d’accomplir des actions que tout le monde ne comprend ou n’approuve pas avec l’espoir de faire changer les choses durablement.

C’est difficile et on ne vous donnera pas une médaille pour cela. Si vous cherchez la facilité, le confort ou si vous voulez de la reconnaissance ou des félicitations officielles, ce n’est pas en résistance que vous devez entrer.

S’arrêter pour penser

Oui, les entreprises sont des poules sans tête qui courent dans tous les sens. Mes années dans l’industrie informatique m’ont permis d’observer que l’immense majorité des employés ne fait strictement rien d’utile. Tout ce que nous faisons, c’est prétendre. Lorsqu’impact il y a, ce qui est extrêmement rare, c’est de permettre à un client de faire « mieux semblant ».

J’ai arrêté de le crier partout, car il est impossible de faire comprendre quelque chose à quelqu’un si son salaire dépend du fait qu’il ne le comprenne pas. Mais force est de constater que tous ceux qui s’arrêtent pour penser arrivent à cette même conclusion.

La merdification des entreprises peut vous toucher de manière la plus imprévue sur un produit que vous appréciez tout particulièrement. C’est mon cas avec Komoot, un outil que j’utilise en permanence pour planifier mes longs trajets à vélo et que j’utilise parfois "on the road", quand je suis un peu paumé et que je veux un itinéraire sûr, mais rapide pour arriver rapidement à destination.

Pour celleux qui ne comprennent pas l’intérêt d’un GPS à vélo, Thierry Crouzet a justement pondu un billet détaillant comment cet accessoire change la pratique du cyclisme.

Mais voilà, Komoot, startup allemande qui se présentait comme un champion de la promotion des voyages à vélo, avec des fondateurs qui promettaient de ne jamais vendre leur bébé a été vendu à un fond d’investissement réputé pour merdifier tout ce qu’il rachète.

Je n’en veux pas aux fondateurs. Je sais bien qu’à partir d’une certaine somme, on remet tous en question nos promesses. Les fondateurs de Whatsapp souhaitaient, à la base, fortement protéger la vie privée de leurs utilisateurs. Ils ont néanmoins vendu leur application à Facebook, car, de leurs propres aveux, on accepte certains compromis à partir d’une certaine somme.

Heureusement, des solutions libres se profilent comme l’excellent Cartes.app qui a pris le problème à bras le corps.

Il manque encore la possibilité d’envoyer facilement un itinéraire vers mon GPS de vélo pour que ce soit utilisable au quotidien, mais le symbole est clair : la dépendance envers des produits merdifiés n’est pas une fatalité !

De la nécessité du logiciel libre

Comme le démontre Gee, les ajouts de fonctionnalités non indispensables ne sont pas neutres. Elles accroissent considérablement le risque de panne et de problème.

Cette simplification ne peut, par essence, que passer par le logiciel libre qui force à la modularité. Liorel donne un exemple très parlant : à cause de sa complexité, Microsoft Excell utilisera pour toujours le calendrier julien. Contrairement à LibreOffice, qui utilise l’actuel calendrier grégorien.

Simplification, liberté, ralentissement, décroissance de notre consommation ne sont que les faces d’une même forme de résistance, d’une même conscientisation de la vie dans sa globalité.

Ralentir et prendre du recul. C’est d’ailleurs ce que m’a violemment offert Chris Brannons, avec son dernier post sur sa capsule Gemini. Et quand je dis le dernier…

Barring unforeseen circumstances or unexpected changes, my last day on earth will be June 13th, 2025.

Chris avait 46 ans et il a pris le temps d’écrire le comment et le pourquoi de sa procédure d’euthanasie. Après ce post, il a pris le temps de répondre à mes emails alors que je l’encourageais à ne pas le faire.

Le symbole du vélo

On ne peut pas s’en foutre. On ne peut pas s’indigner. Il faut alors, avec les quelques millions de secondes qui nous reste à vivre, agir. Agir en faisant ce que l’on pense être le mieux pour soi-même, le mieux pour nos enfants, le mieux pour l’humanité.

Comme rouler à vélo !

Et tant pis si ça ne change rien. Et tant pis si ça nous fait paraître étrange aux yeux de certains. Et tant pis si ça a certains désavantages. Faire du vélo, c’est entrer en résistance !

Symbole de liberté, de simplification, d’indépendance et pourtant extrêmement technologique, le vélo n’a jamais été aussi politique. Comme le souligne Klaus-Gerd Giesen, le Bikepunk est philosophique et politique !

Cela m’amuse d’ailleurs beaucoup quand on présente l’univers de Bikepunk comme un monde d’où a disparu la technologie. Parce que le vélo ce n’est pas de la technologie peut-être ?

D’ailleurs, si vous n’avez pas encore le bouquin, il ne vous reste qu’à courir faire coucou à votre libraire préféré·e et entrer en résistance !

La photo d’illustration m’a été envoyée par Julien Ursini et est sous CC-By. Plongé dans la lecture de Bikepunk, il a été saisi de découvrir ce cadre de vélo rouillé, debout dans le lit de la rivière Bléone, comme un acte de résistance symbolique. Je ne pouvais rêver meilleure illustration pour ce billet.

Je suis Ploum et je viens de publier Bikepunk, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, achetez mes livres (si possible chez votre libraire) !

Recevez directement par mail mes écrits en français et en anglais. Votre adresse ne sera jamais partagée. Vous pouvez également utiliser mon flux RSS francophone ou le flux RSS complet.

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23.07.2025 à 02:00

20 years of Linux on the Desktop (part 4)

Ploum

Texte intégral (2419 mots)

20 years of Linux on the Desktop (part 4)

Previously in "20 years of Linux on the Deskop": After contributing to the launch of Ubuntu as the "perfect Linux desktop", Ploum realises that Ubuntu is drifting away from both Debian and GNOME. In the meantime, mobile computing threatens to make the desktop irrelevant.

The big desktop schism

The fragmentation of the Ubuntu/GNOME communities became all too apparent when, in 2010, Mark Shuttleworth announced during the Ubuntu-summit that Ubuntu would drop GNOME in favour of its own in-house and secretly developed desktop: Unity.

I was in the audience. I remember shaking my head in disbelief while Mark was talking on stage, just a few metres from me.

Working at the time in the automotive industry, I had heard rumours that Canonical was secretly talking with BMW to put Ubuntu in their cars and that there was a need for a new touchscreen interface in Ubuntu. Mark hoped to make an interface that would be the same on computers and touchscreens. Hence the name: "Unity". It made sense but I was not happy.

The GNOME community was, at the time, in great agitation about the future. Some thought that GNOME was looking boring. That there was no clear sense of direction except minor improvements. In 2006, the German Linux Company SUSE had signed a patent agreement with Microsoft covering patents related to many Windows 95 concepts like the taskbar, the tray, the startmenu. SUSE was the biggest contributor to KDE and the agreement was covering the project. But Red Hat and GNOME refused to sign that agreement, meaning that Microsoft suing the GNOME project was now plausible.

An experiment of an alternative desktop breaking all Windows 95 concepts was done in JavaScript: GNOME-shell.

A JavaScript desktop? Seriously? Yeah, it was cool for screenshots but it was slow and barely usable. It was an experiment, nothing else. But there’s a rule in the software world: nobody will ever end an experiment. An experiment will always grow until it becomes too big to cancel and becomes its own project.

Providing the GNOME desktop to millions of users, Mark Shuttleworth was rightly concerned about the future of GNOME. Instead of trying to fix GNOME, he decided to abandon it. That was the end of Ubuntu as Debian+GNOME.

What concerned me was that Ubuntu was using more and more closed products. Products that were either proprietary, developed behind closed doors or, at the very least, were totally controlled by Canonical people.

In 2006, I had submitted a Summer of Code project to build a GTK interface to Ubuntu’s new bug tracker: Launchpad. Launchpad was an in-house project which looked like it was based on the Python CMS Plone and I had some experience with it. During that summer, I realised that Launchpad was, in fact, proprietary and had no API. To my surprise, there was no way I could get the source code of Launchpad. Naively, I had thought that everything Ubuntu was doing would be free software. Asking the dev team, I was promised Launchpad would become free "later". I could not understand why Canonical people were not building it in the open.

I still managed to build "Conseil" by doing web scraping but it broke with every single change done internally by the Launchpad team.

As a side note, the name "Conseil" was inspired by the book "20.000 leagues under the sea", by Jules Vernes, a book I had downloaded from the Gutenberg project and that I was reading on my Nokia 770. The device was my first e-reader and I’ve read tenths of public domain books on it. This was made possible thanks to the power of opensource: FBreader, a very good epub reading software, had been easily ported to the N770 and was easily installable.

I tried to maintain Conseil for a few months before giving up. It was my first realisation that Canonical was not 100% open source. Even technically free software was developed behind closed doors or, at the very least, with tight control over the community. This included Launchpad, Bzr, Upstard, Unity and later Mir. The worse offender would later be Snap.

To Mark Shuttleworth’s credit, it should be noted that, most of the time, they were really trying to fix core issues with Linux’s ecosystem. In retrospective, it looks easy to see those moves as "bad". But, in reality, Canonical had a strong vision and keeping control was easier than to do everything in the open. Bzr was launched before git existed (by a few days). Upstard was created before Systemd. Those decisions made sense at the time.

Even the move to Unity would later prove to be very strategical as, in 2012, GNOME would suddenly depend on Systemd, which was explicitly developed as a competitor to Upstart. Ubuntu would concede defeat in 2015 by replacing Upstart with Systemd and in 2018 by reinstating GNOME as the default desktop. But those were not a given in 2010.

But even with the benefit of doubt, Canonical would sometimes cross huge red lines, like that time where Unity came bundled with some Amazon advertisement, tracking you on your own desktop. This was, of course, not really well received.

The end of Maemo: when incompetence is not enough, be malevolent

At the same time in the nascent mobile world, Nokia was not the only one suffering from the growing Apple/Google duopoly. Microsoft was going nowhere with its own mobile operating system, WindowsCE and running like a headless chicken. The director of the "Business division" of Microsoft, a guy named Stephen Elop, signed a contract with Nokia to develop some Microsoft Office feature on Symbian. This looked like an anecdotical side business until, a few months after that contract, in September 2010, Elop leaves Microsoft to become… CEO of Nokia.

This was important news to me because, at 2010’s GUADEC (GNOME’s annual conference) in Den Haag, I had met a small tribe of free software hackers called Lanedo. After a few nice conversations, I was excited to be offered a position in the team.

In my mind at the time, I would work on GNOME technologies full-time while being less and less active in the Ubuntu world! I had chosen my side: I would be a GNOME guy.

I was myself more and more invested in GNOME, selling GNOME t-shirts at FOSDEM and developing "Getting Things GNOME!", a software that would later become quite popular.

Joining Lanedo without managing to land a job at Canonical (despite several tries) was the confirmation that my love affair with Ubuntu had to be ended.

In 2010, Lanedo biggest customer was, by far, Nokia. I had been hired to work on Maemo (or maybe Meego? This was unclear). We were not thrilled to see an ex-Microsoft executive take the reins of Nokia.

As we feared, one of Elop’s first actions as CEO of Nokia was to kill Maemo in an infamous "burning platform" memo. Elop is a Microsoft man and hates anything that looks like free software. In fact, like a good manager, he hates everything technical. It is all the fault of the developers which are not "bringing their innovation to the market fast enough". Sadly, nobody highlighted the paradox that "bringing to the market" had never been the job of the developers. Elop’s impact on the Nokia company is huge and nearly immediate: the stock is in free fall.

One Nokia developer posted on Twitter: "Developers are blamed because they did what management asked them to do". But, sometimes, management even undid the work of the developers.

The Meego team at Nokia was planning a party for the release of their first mass-produced phone, the N8. While popping Champaign during the public announcement of the N8 release, the whole team learned that the phone had eventually been shipped with… Symbian. Nobody had informed the team. Elop had been CEO for less than a week and Nokia was in total chaos.

But Stephen Elop is your typical "successful CEO". "Successful" like in inheriting one of the biggest and most successful mobile phone makers and, in a couple of years, turning it into ashes. You can’t invent such "success".

During Elop's tenure, Nokia's stock price dropped 62%, their mobile phone market share was halved, their smartphone market share fell from 33% to 3%, and the company suffered a cumulative €4.9 billion loss

It should be noted that, against all odds, the Meego powered Nokia N9, which succeeded to the N8, was a success and was giving true hope of Meego competing with Android/iOS. N9 was considered a "flagship" and it showed. At Lanedo, we had discussed having an N9 bought by the company for each employee so we could "eat our own dog food" (something which was done at Collabora). But Elop announcement was clearly underderstood as the killing of Meego/Maemo and Symbian to leave room to… Windows Phone!

The Nokia N9 was available in multiple colours (picture by Bytearray render on Wikimedia)
The Nokia N9 was available in multiple colours (picture by Bytearray render on Wikimedia)

Well, Elop promised that, despite moving to Windows Phone, Nokia would release one Meego phone every year. I don’t remember if anyone bought that lie. We could not really believe that all those years of work would be killed just when the success of the N9 proved that we did it right. But that was it. The N9 was the first and the last of its kind.

Ironically, the very first Windows Phone, the Lumia 800, will basically be the N9 with Windows Phone replacing Meego. And it would receive worse reviews that the N9.

At that moment, one question is on everybody's lips: is Stephen Elop such a bad CEO or is he destroying Nokia on purpose? Is it typical management incompetence or malevolence? Or both?

The answer comes when Microsoft, Elop’s previous employer, bought Nokia for a fraction of the price it would have paid if Elop hasn’t been CEO. It’s hard to argue that this was not premeditated: Elop managed to discredit and kill every software-related project Nokia had ever done. That way, Nokia could be sold as a pure hardware maker to Microsoft, without being encumbered by a software culture which was too distant from Microsoft. And Elop goes back to his old employer as a richer man, receiving a huge bonus for having tanked a company. But remember dear MBA students, he’s a "very successful manager", you should aspire to become like him.

Les voies du capitalisme sont impénétrables.

As foolish as it sounds, this is what the situation was: the biggest historical phone maker in the world merged with the biggest historical software maker. Vic Gundotra, head of the Google+ social network, posted: "Two turkeys don’t make an eagle." But one thing was clear: Microsoft was entering the mobile computing market because everything else was suddenly irrelevant.

Every business eyes were pointed towards mobile computing where, ironically, Debian+GNOME had been a precursor.

Just when it looked like Ubuntu managed to make Linux relevant on the desktop, nobody cared about the desktop anymore. How could Mark Shuttleworth makes Ubuntu relevant in that new world?

(to be continued)

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I’m currently turning this story into a book. I’m looking for an agent or a publisher interested to work with me on this book and on an English translation of "Bikepunk", my new post-apocalyptic-cyclist typewritten novel which sold out in three weeks in France and Belgium.

I’m Ploum, a writer and an engineer. I like to explore how technology impacts society. You can subscribe by email or by rss. I value privacy and never share your adress.

I write science-fiction novels in French. For Bikepunk, my new post-apocalyptic-cyclist book, my publisher is looking for contacts in other countries to distribute it in languages other than French. If you can help, contact me!

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23.05.2025 à 02:00

Reducing the digital clutter of chats

Ploum

Texte intégral (1490 mots)

Reducing the digital clutter of chats

I hate modern chats. They presuppose we are always online, always available to chat. They force us to see and think about them each time we get our eyes on one of our devices. Unlike mailboxes, they are never empty. We can’t even easily search through old messages (unlike the chat providers themselves, which use the logs to learn more about us). Chats are the epitome of the business idiot: they make you always busy but prevent you from thinking and achieving anything.

It is quite astonishing to realise that modern chat systems use 100 or 1000 times more resources (in size and computing power) than 30 years ago, that they are less convenient (no custom client, no search) and that they work against us (centralisation, surveillance, ads). But, yay, custom emojis!

Do not get me wrong: chats are useful! When you need an immediate interaction or a quick on-the-go message, chats are the best.

I needed to keep being able to chat while keeping the digital clutter to a minimal and preserving my own sanity. That’s how I came up with the following rules.

Rule 1: One chat to rule them all

One of the biggest problems of centralised chats is that you must be on many of them. I decided to make Signal my main chat and to remove others.

Signal was, for me, a good compromise of respecting my privacy, being open source and without ads while still having enough traction that I could convince others to join it.

Yes, Signal is centralised and has drawbacks like relying on some Google layers (which I worked around by using Molly-FOSS). I simply do not see XMPP, Matrix or SimpleX becoming popular enough in the short term. Wire and Threema had no advantages over Signal. I could not morally justify using Whatsapp nor Telegram.

In 2022, as I decided to use Signal as my main chat, I deleted all accounts but Signal and Whatsapp and disabled every notification from Whatsapp, forcing myself to open it once a week to see if I had missed something important. People who really wanted to reach me quickly understood that it was better to use Signal. This worked so well that I forgot to open Whatsapp for a whole month which was enough for Whatsapp to decide that my account was not active anymore.

Not having Whatsapp is probably the best thing which happened to me regarding chats. Suddenly, I was out of tenths or hundreds of group chats. Yes, I missed lots of stuff. But, most importantly, I stopping fearing missing them. Seriously, I never missed having Whatsapp. Not once. Thanks Meta for removing my account!

While travelling in Europe, it is now standard that taxi and hotels will chat with you using Whatsapp. Not anymore for me. Guess what? It works just fine. In fact, I suspect it works even better because people are forced to either do what we agreed during our call or to call me, which requires more energy and planning.

Rule 2: Mute, mute, mute!

Now that Signal is becoming more popular, some group chats are migrating to it. But I’ve learned the lesson : I’m muting them. This allows me to only see the messages when I really want to look at them. Don’t hesitate to mute vocal group chats and people with whom you don’t need day-to-day interaction.

I’m also leaving group chats which are not essential. Whatsapp deletion told me that nearly no group chat is truly essential.

Many times, I’ve had people sending me emails about what was told on a group chat because they knew I was not there. Had I been on that group, I would probably have missed the messages but nobody would have cared. If you really want to get in touch with me, send me an email!

Rule 3: No read receipts nor typing indicators

I was busy, walking in the street with my phone in hands for directions. A notification popped up with an important message. It was important but not urgent. I could not deal with the message at that moment. I wanted to take the time. One part of my brain told me not to open the message because, if I did, the sender would see a "read receipt". He would see that I had read the message but would not receive any answer.

For him, that would probably translate in "he doesn’t care". I consciously avoided to open Signal until I was back home and could deal with the message.

That’s when I realised how invasive the "read receipt" was. I disabled it and never regretted that move. I’m reading messages on my own watch and replying when I want to. Nobody needs to know if I’ve seen the message. It is wrong in every aspect.

Signal preferences showing read receipts and typing indicator disabled
Signal preferences showing read receipts and typing indicator disabled

Rule 4: Temporary discussions only

The artist Bruno Leyval, who did the awesome cover of my novel Bikepunk, is obsessed with deletion and disappearance. He set our Signal chat so that every message is deleted after a day. At first, I didn’t see the point.

Until I understood that this was not only about privacy, it also was about decluttering our mind, our memories.

Since then, I’ve set every chat in Signal to delete messages after one week.

Signal preferences showing disappearing messages set to one week
Signal preferences showing disappearing messages set to one week

This might seem like nothing but this changes everything. Suddenly, chats are not a long history of clutter. Suddenly, you see chats as transient and save things you want to keep. Remember that you can’t search in chats? This means that chats are transient anyway. With most chats, your history is not saved and could be lost by simply dropping your phone on the floor. Something important should be kept in a chat? Save it! But it should probably have been an email.

Embracing the transient nature of chat, making it explicit greatly reduce the clutter.

Conclusion

I know that most of you will say that "That’s nice Ploum but I can’t do that because everybody is on XXX" where XXX is most often Whatsapp in my own circles. But this is wrong: you believe everybody is on XXX because you are yourself using XXX as your main chat. When surveying my students this year, I’ve discovered that nearly half of them was not on Whatsapp. Not for some hard reason but because they never saw the need for it. In fact, they were all spread over Messenger, Instagram, Snap, Whatsapp, Telegram, Discord. And they all believed that "everybody is where I am".

In the end, the only real choice to make is between being able to get immediately in touch with a lot of people or having room for your mental space. I choose the latter, you might prefer the former. That’s fine!

I still don’t like chat. I’m well aware that the centralised nature of Signal makes it a short-term solution. But I’m not looking for the best sustainable chat. I just want fewer chats in my life.

If you want to get in touch, send me an email!

I’m Ploum, a writer and an engineer. I like to explore how technology impacts society. You can subscribe by email or by rss. I value privacy and never share your adress.

I write science-fiction novels in French. For Bikepunk, my new post-apocalyptic-cyclist book, my publisher is looking for contacts in other countries to distribute it in languages other than French. If you can help, contact me!

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16.05.2025 à 02:00

Petit manifeste low-tech

Ploum

Texte intégral (1730 mots)

Petit manifeste low-tech

Ce samedi 17 mai, je pédalerai vers Massy en compagnie de Tristan Nitot pour parler "low-tech" et dédicacer Bikepunk lors du festival Parlons Vélo.

Attention, ce qui va suivre divulgâche une partie de ce que je dirai samedi midi à Massy. Si vous venez, arrêtez de lire ici, on se retrouve demain !

Qu’est-ce que la low-tech ?

Le terme low-tech nous fait intuitivement sentir une opposition contre l’excès technologique (le "high tech") tout en évitant l’extrémisme technophobique. Un terme qui enthousiasme, mais qu’il me semble important d’expliciter et dont je propose la définition suivante.

Une technologie est dite « low-tech » si les personnes interagissant avec cette technologie savent et peuvent en comprendre son fonctionnement.

Savoir comprendre. Pouvoir comprendre. Deux éléments essentiels (et difficiles à distinguer pour le Belge que je suis).

Savoir comprendre

Savoir comprendre une technologie implique d’avoir la possibilité de construire un modèle intellectuel de son fonctionnement interne.

Il est bien évident que tout le monde n’a pas la capacité de comprendre toutes les technologies. Mais il est possible de procéder par niveau. La majorité des automobilistes sait qu’une voiture à essence brûle le carburant qui explose dans un moteur, explosion qui entraine des pistons qui font tourner les roues. Le nom est un indice en soi : un moteur à explosion !

Si je n’en comprends pas plus sur le fonctionnement d’un moteur, j’ai la certitude qu’il existe des personnes qui comprennent mieux, souvent dans mon entourage direct. Au plus la compréhension est fine, au plus les personnes deviennent rares, mais chacun peut tenter de s’améliorer.

La technologie est simple sans être simpliste. Cela signifie que sa complexité peut être appréhendée graduellement. Et qu’il existe des experts qui appréhendent une technologie particulière dans sa globalité.

Par opposition, il est aujourd’hui humainement impossible de comprendre un smartphone moderne. Seuls quelques expert·e·s dans le monde maitrisent chacun·e un point particulier de l’objet : du dessin de l’antenne 5G au logiciel retouchant automatiquement les photos en passant par le chargement rapide de la batterie. Et aucun d’entre eux ne maitrise la conception d’un compilateur nécessaire à faire tourner le tout. Même un génie passant sa vie à démonter des smartphones serait dans l’incapacité totale de comprendre ce qui se passe à l’intérieur d’un engin que nous avons tous en permanence soit dans une poche, soit devant notre nez !

L’immense majorité des utilisateurs de smartphones n’ont pas le moindre modèle mental de son fonctionnement. Je ne parle pas d’un modèle erroné ou simpliste : non, il n’y en a pas du tout. L’objet est « magique ». Pourquoi affiche-t-il quelque chose plutôt qu’un autre ? Parce que c’est « magique ». Et comme pour la magie, il ne faut pas chercher à comprendre.

La low-tech peut être extrêmement complexe, mais l’existence même de cette complexité doit être compréhensible et justifiée. Une complexité transparente encourage naturellement les esprits curieux à se poser des questions.

Le temps de comprendre

Comprendre une technologie prend du temps. Cela implique une relation longue, une expérience qui se crée tout au long d’une vie, qui se partage, qui se transmet.

Par opposition, la high-tech impose un renouvellement, une mise à jour constante, des changements d’interface et de fonctionnalité permanents qui renforcent l’aspect « magique » et entraine le découragement de celleux qui tentent de se construire un modèle mental.

La low-tech doit donc nécessairement être durable. Pérenne. Elle doit s’enseigner et permettre une construction progressive de cet enseignement.

Cela implique parfois des efforts, des difficultés. Tout ne peut pas toujours être progressif : à un moment, il faut se lancer sur son vélo pour apprendre à garder l’équilibre.

Pouvoir comprendre

Historiquement, il semble évident que toute technologie a la possibilité d’être comprise. Les personnes interagissant avec la technologie étaient forcées de réparer, d’adapter et donc de comprendre. Une technologie était essentiellement matérielle, ce qui implique qu’elle pouvait être démontée.

Avec le logiciel apparait un nouveau concept : celui de cacher le fonctionnement. Et si, historiquement, tout logiciel est open source, l’invention du logiciel propriétaire rend difficile, voire impossible, de comprendre une technologie.

Le logiciel propriétaire n’a pu être inventé que grâce à la création d’un concept récent, au demeurant absurde, appelé « propriété intellectuelle ».

Cette propriété intellectuelle ayant permis la privatisation de la connaissance dans le logiciel, elle est ensuite étendue au monde matériel. Soudainement, il devient possible d’interdire à une personne de tenter de comprendre la technologie qu’elle utilise au quotidien. Grâce à la propriété intellectuelle, des fermiers se voient soudain interdits d’ouvrir le capot de leur propre tracteur.

La low-tech doit être ouverte. Elle doit pouvoir être réparée, modifiée, améliorée et partagée.

De l’utilisateur au consommateur

Grâce à la complexification, aux changements incessants et à l’imposition d’un régime strict de « propriété intellectuelle », les utilisateurs ont été transformés en consommateurs.

Ce n’est pas un hasard. Ce n’est pas une évolution inéluctable de la nature. Il s’agit d’un choix conscient. Toutes les écoles de commerce enseignent aux futurs entrepreneurs à se construire un marché captif, à priver autant que possible leur client de liberté, à construire ce qu’on appelle dans le jargon une "moat" (douve qui protège un château) afin d’augmenter la « rétention des utilisateurs ».

Les termes eux-mêmes deviennent flous pour renforcer ce sentiment de magie. On ne parle par exemple plus de transférer un fichier .jpg vers un ordinateur distant, mais de « sauvegarder ses souvenirs dans le cloud ».

Les marketeux nous ont fait croire qu’en supprimant les mots compliqués, ils simplifieraient la technologie. C’est évidemment le contraire. L’apparence de simplicité est une complexité supplémentaire qui emprisonne l’utilisateur. Toute technologie nécessite un apprentissage. Cet apprentissage doit être encouragé.

Pour une approche et une éthique low-tech

L’éthique low-tech consiste à se remettre au service de l’utilisateur en lui facilitant la compréhension de ses outils.

La high-tech n’est pas de la magie, c’est de la prestidigitation. Plutôt que de cacher les « trucs » sous des artifices, la low-tech cherche à montrer et à créer une utilisation en conscience de la technologie.

Cela n’implique pas nécessairement une simplification à outrance.

Prenons l’exemple d’une machine à laver le linge. Nous comprenons tous qu’une machine de base est un tambour qui tourne dans lequel est injecté de l’eau et du savon. C’est très simple et low-tech.

On pourrait arguer que l’ajout de capteurs et de contrôleurs électroniques permet de laver le linge plus efficacement et plus écologiquement en le pesant et adaptant la vitesse de rotation en fonction du type de linge.

Dans une optique low-tech, un boitier électronique est ajouté à la machine pour faire exactement cela. Si le boitier est retiré ou tombe en panne, la machine continue à fonctionner simplement. L’utilisateur peut choisir de débrancher le boitier ou de le remplacer. Il en comprend l’utilité et la justification. Il construit un modèle mental dans lequel le boitier ne fait qu’appuyer sur les boutons de réglage au bon moment. Et, surtout, il ne doit pas envoyer toute la machine à la casse parce que la puce wifi ne fonctionne plus et n’est plus mis à jour ce qui a bloqué le firmware (quoi ? Ma machine à laver dispose d’une puce wifi ?).

Pour une communauté low-tech

Une technologie low-tech encourage et donne l’occasion à l’utilisateur à la comprendre, à se l’approprier. Elle tente de rester stable dans le temps, se standardise. Elle ne cherche pas à cacher la complexité intrinsèque partant du principe que la simplicité provient de la transparence.

Cette compréhension, cette appropriation ne peut se faire que dans l’interaction. Une technologie low-tech va donc, par essence, favoriser la création de communautés et les échanges humains autour de cette même technologie.

Pour contribuer à l’humanité et aux communautés, une technologie low-tech se doit d’appartenir à tou·te·s, de faire partie des communs.

J’en arrive donc à cette définition, complémentaire et équivalente à la première :

Une technologie est dite « low-tech » si elle expose sa complexité de manière simple, ouverte, transparente et durable tout en appartenant aux communs.

Je suis Ploum et je viens de publier Bikepunk, une fable écolo-cycliste entièrement tapée sur une machine à écrire mécanique. Pour me soutenir, achetez mes livres (si possible chez votre libraire) !

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