Dans un livre au petit format mais de grande sensibilité, l’écrivaine, traductrice et chercheuse Luba Jurgenson offrait au lecteur une lecture personnelle de l’invasion de l’Ukraine en février 20221. Elle le faisait débuter par le récit d’un cauchemar : « Le rêve brûlé ». Quoi de plus évocateur en effet que le cauchemar pour signifier le caractère invraisemblable de ce conflit qui a surpris tout le monde – même les plus informés, comme l’autrice, qui a quitté l’Union
Discussion avec : Félix Tréguer est chercheur associé au Centre Internet et Société du CNRS, et depuis 2009 membre de La Quadrature du Net, association dédiée à la défense des droits humains dans le contexte d’informatisation. Il a notamment publié Contre-histoire de l'Internet (Agone, 2023), et Technopolice (Divergences, 2024). Cet échange est animé par Adrien Tallent, coordinateur du numério L'IA aux frontières de l'esprit.
Le 28 mars 2025, un tremblement de terre de magnitude 7, 7 frappe la Birmanie au cœur. L’épicentre en est localisé à l’ouest de la ville de Sagaing, sur la faille géologique nord-sud du même nom, de plus de 300 kilomètres de long, fracturant la marge orientale de la plaine centrale. Elle va de Mandalay, la dernière cité des rois birmans et la seconde agglomération la plus peuplée du pays, à Naypyidaw, la nouvelle capitale des juntes birmanes, et au-delà. Naypyidaw est située sur
À l'époque, ce juge noir conservateur était bien utile au Parti républicain, en tant qu'il représentait l'exemple même de la colourblindness. Or soudain, Thomas mobilise toute une rhétorique critique de la race, de la discimination et du lynchage, à l'appui de sa défense. Cette réaction annonce un basculement qui se manifestera beaucoup plus tard. Vous pouvez retrouver ce texte dans nos archives : Éric Fassin, « Pouvoirs sexuels. Le juge Thomas, la Cour suprême et la société américaine »,
Les débats parlementaires sur l’aide à mourir (nouveau nom donné au suicide assisté et/ou à l’euthanasie) sont en cours et un terme y est omniprésent : celui de liberté1. De manière parfois confuse, il semble employé pour désigner tantôt un principe générique (comme dans « liberté, égalité, fraternité »), tantôt un attribut individuel empirique (l’individu est alors libre en tant qu’il n’est pas manipulé ou matériellement contraint), tantôt un attribut individuel
Le partage de l’ex-Palestine mandataire entre Israël et une Palestine indépendante à inventer parvient durablement dans les regards et les consciences occidentales par les images de la guerre des Six-Jours (1967), notamment celles de Gilles Caron : soldats israéliens stupéfaits de pouvoir se rendre au mur des Lamentations, cadavres de fedayin sur les routes, tanks et avions détruits. Cinq ans plus tard, les plans fixes du balcon du village olympique munichois occupé par des membres de Septembre
Giorgia Meloni, après deux ans et demi d'exercice du pouvoir, jouit d'une popularité que beaucoup de dirigeants européens pourraient lui envier. Dans un pays où le discrédit du personnel politique est traditionnellement élevé, et après des années d'instabilité gouvernementale, comment l'expliquez-vous ? Marc Lazar - Giorgia Meloni jouit en effet d’une popularité élevée, même s’il faut la relativiser. Depuis sa victoire en 2022, les enquêtes d’opinion montrent un pays divisé,
Il est des cinéastes qui passent dans le monde comme un souffle, brefs autant qu’essentiels. Marie Garel-Weiss, disparue trop tôt en ce printemps 2025, est de ceux-là. Trois films en sept ans, c’est à la fois peu et beaucoup. Suffisant pour tracer une ligne claire, dessiner une signature, imposer un regard capable de voir la beauté dans la fêlure, la lumière dans l’ombre portée des existences en équilibre instable. Trois films, salués par la critique et souvent primés, dont un téléfilm
L’injonction du titre prend le contrepied de celle de saint Augustin, qui a traversé les siècles et que tout chrétien a apprise sinon retenue : « Aime et fais ce que tu veux. » (Commentaire de la première épître de Jean, VII, 8) Avec d’autres formules et incantations célébrant le critère exclusif de l’amour en toutes choses, la formule semble exprimer la quintessence de la foi – et de la loi – chrétienne. Pour une part, le livre de Jean-François Bouthors et Paule Zellitch
Né en 1955 à Chicago, berceau du catholicisme social américain, Robert Francis Prevost a prononcé ses vœux solennels au sein de l’Ordre de Saint-Augustin en 1981, avant d’être ordonné prêtre l’année suivante. Il est envoyé pendant une vingtaine d’années au Pérou, où il travaille avec des évêques marqués par le concile Vatican II (1962-1965)1. Cette expérience en Amérique latine, terre de foi et de défis sociaux, a sans doute façonné sa sensibilité aux questions de justice
Un épilogue, après la soirée de clôture officielle du Printemps des arts de Monte-Carlo qui fêtait cette année le centenaire de la naissance de Pierre Boulez, s’est tenu fin avril 2025 au Grimaldi Forum de Monaco avec Les Ballets de Monte-Carlo, dirigés par Jean-Christophe Maillot, et l’Orchestre philarmonique de Monte-Carlo sous la direction de Jesko Sirvend. Le programme éclectique, s’est ouvert sur l’une des premières œuvres expérimentales de Balanchine, chorégraphe cher à
Dans le film de Boris Lojkine sorti à l’automne 2024, L’Histoire de Souleymane, la question du travail de ce demandeur d’asile occupe-t-elle une place importante ? C’est un film bouleversant. Il pointe justement cet impensé du travail dans les migrations. Dans ce film, le personnage de Souleymane ne pense qu’à une chose pendant quarante-huit heures : apprendre par cœur le récit qu’on a imaginé pour lui en vue de son entretien à l’Office français de protection des réfugiés
Si, jusqu’il y a deux jours, l’on m’avait demandé quel était le metteur en scène en vie que je préfère, j’aurais peut-être répondu Paolo Sorrentino, dont La Grande Bellezza (2013) et Youth (2015) m’avaient séduite. Entretemps, j’ai vu son dernier film, Parthenope (2024, sorti en France en mars 2025). Ces trois films ont en commun une cinématographie envoutante où le regard porté sur le monde appartient à un homme âgé qui contemple le passage du temps avec nostalgie, foudroyé
« Les peuples se trouvent avoir été partout naturellement poètes. » Giambattista Vico, La Science nouvelle (1725) Selon les deux commissaires de la 10e édition des Rendez-vous de la philosophie au Maroc, organisée par l’Institut français du Maroc, Driss Ksikes, directeur du centre de recherche Economia, et Camille Riquier, professeur à l’Institut catholique de Paris, l’Europe, qui s’est longtemps crue dépositaire de l’universel, ne peut plus parler au nom de l’humanité.
« Pour Ricœur, c’est la grandeur du politique qui fait l’humanité de l’homme. Mais cette grandeur est en même temps exposée au mal, à la domination, à la volonté de puissance. Si bien que réfléchir au politique, c’est être capable de tenir ensemble ces deux dimensions, l’entrelacement inépuisable du mal et de la rationalité. » Vous pouvez retrouver ce texte dans nos archives : Paul Ricœur, « Le paradoxe politique », Esprit, mai 1957.
Dans son précédent roman, Pleine terre (Actes Sud, 2021) Corinne Royer racontait l’histoire d’un agriculteur amoureux de sa terre et de ses bêtes, victime du système administratif et des gendarmes. Une histoire directement inspirée de la réalité et du destin de Jérôme Laronze, éleveur du Clunysois. Avec Ceux du Lac (Seuil, 2024), c’est encore une histoire vraie qui se déploie, cette fois en Roumanie, à quelques kms de Bucarest, dans le delta de Vacaresti. Une famille tzigane qui
Cette année, le Prix du roman d’écologie (PRÉ), dont la revue Esprit est partenaire depuis l’origine en 2018, a été remis à Strasbourg. La métropole alsacienne était en effet, pour une année (avril 2024-avril 2025) capitale mondiale du livre, une distinction de l’Unesco pour les villes dont les programmes promeuvent particulièrement les livres et la lecture. Strasbourg, qui est aussi une municipalité dirigée par une équipe verte, a été la première ville française à en bénéficier,
Les 133 cardinaux réunis en conclave à partir du 7 mai devront élire le « successeur de Pierre ». Auparavant, tous les cardinaux, y compris les non-électeurs (ceux de plus de 80 ans) ont participé aux « congrégations générales », pour évoquer les questions posées aujourd’hui à l’Église, entendre les avis des uns et des autres et trouver le profil de l’homme le plus à même de diriger la « barque de Pierre ». Il ne s’agira pas d’opter, comme le disent constamment
Daniela Padoan - Vous avez beaucoup travaillé sur l’autoritarisme et les nouvelles formes qu’il revêt depuis quelques années. Comment vos recherches ont-elles convergé avec la création de l’observatoire de l’autoritarisme ? Quelles ombres voyez-vous planer sur l’horizon politique européen 1? Jean-Claude Monod - Je me suis volontiers associé à cette initiative car je travaille depuis plusieurs années sur la montée en puissance de l’autoritarisme et sur la façon dont il mine
On pourrait se perdre dans tout ce bleu, et pourtant ce sont des retrouvailles qui s’opèrent. Retrouvailles avec l’intime et l’universel que nous portons, parfois confusément, parfois consciemment, et que la peintre Geneviève Asse fait surgir, comme une urgence de se retrouver, de se relier au monde et à ce qu’il promet de beau et d’espoir paisible. Peindre entre les choses Est-ce parce que, grande résistante, Geneviève Asse s’est élevée contre la noirceur et la haine ? Est-ce
« La justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est tyrannique. »Blaise Pascal Qu’un pouvoir fort cherche à s’émanciper de tout contre-pouvoir, personne ne s’en étonnera. Mais qu’un pouvoir démocratique – et pas n’importe lequel ! – fasse du droit et des juges ses principales cibles en prétendant ouvrir une nouvelle ère post-libérale, voilà qui mérite qu’on y regarde de plus près. La seconde administration Trump, au pouvoir depuis janvier 2025,
« À ces jeunes qui se mobilisent contre le racisme dans la police, Emmanuel Macron n’a rien répondu : il a parlé d’un travail sur la mémoire. La mémoire a été utilisée pour ne pas répondre à la demande sociale. » Discussion avec : • Paul Max Morin, docteur en science politique, chercheur associé à Sciences Po Paris. Spécialiste des politiques mémorielles et des relations franco-algériennes, il a notamment publié Les jeunes et la guerre d’Algérie (PUF, 2022),
De toutes les déclarations dont le président américain Donald Trump a quotidiennement rythmé le monde et nourri ses électeurs en trois mois d’exercice du pouvoir, celle du 14 avril 2025 pourrait rester comme le condensé de la nouvelle violence politique qu’il aura su introduire dans l’histoire humaine. Ce chef d’État avait certes dépassé, depuis longtemps et de très loin, l’imaginaire de vulgarité jamais atteint en politique. On ne citera, pour s’épargner, que son « fucking
J’ai trouvé dans le numéro d’avril d’Esprit un article de M. Thierry Vircoulon sur « La nouvelle crise des Grands lacs ». Il y reprend la thématique qu’il avait déjà développée en février sur le blog Afrikarabia, à savoir l’extractivisme minier comme moteur essentiel de cette crise. Or l’auteur ne peut ignorer que deux tribunes ont été diffusées récemment, par Libération[1] puis par La Croix[2], pour réagir à l’organisation d’un concert de rappeurs congolais
Pour nos contemporains attentifs à l’actualité, la ville de Munich est désormais liée au discours de J. D. Vance lors de la réunion internationale du 14 février 2025 destinée à réfléchir aux dispositions à prendre face à la Russie dans son conflit avec l’Ukraine : le vice-président américain s’est alors livré à une violente diatribe contre les démocraties européennes et à un éloge des valeurs d’extrême droite. Ce faisant, il a ouvertement rompu avec la défense de l’État
L’épidémie de Covid en 2020 nous a fait prendre conscience des interdépendances entre les êtres humains, mais aussi avec les animaux, puisqu’il s’agissait d’une zoonose, c’est-à-dire une maladie transmise des animaux vers les hommes. Certains annoncent même que nous sommes entrés dans une ère des épidémies. Qu’est-ce que le planétaire et que fait-il à l’universel ? Patrice Maniglier – L’expérience de la pandémie est une bonne école pour la tâche qui nous attend,
J’ai conscience d’être subjectif dans les lignes qui suivent sur le pape François. « Subjectif » comme il l’a été souvent lui-même, et comme ses adversaires le lui ont plus d’une fois reproché. Un pape ne doit-il pas parler au nom de la Vérité « objective » dont l’Église catholique est dépositaire et le vicaire du Christ le gardien intransigeant ? Le tournant d’un pape qui dit « Je » a été manifeste dès le début de son pontificat. En juillet 2013, quatre mois
Ou l’Europe reste à la remorque des décisions politiques du Président Trump prises sans réelle concertation avec les autres pays membres de l’Otan ou, prenant appui sur ses points de force, l’Europe décide de faire valoir les intérêts de sécurité de l’Ukraine et les siens propres. Pour la plupart des pays membres de l’Otan, il ne peut y avoir de sécurité future en Europe sans une défaite militaire, nette, indiscutable, de la Russie en Ukraine. C’est la condition indispensable
Respecter ses alliances, sans céder au chantage. La ligne de crête sur laquelle le Danemark avance depuis le début de l’année se fait chaque semaine plus ténue. Comment réagir aux pressions exorbitantes des États-Unis sans compromettre une coopération vieille de plus de 75 ans ? Le 22 décembre dernier, Donald Trump annonçait en effet sa volonté d’annexer le Groenland et, depuis, les provocations américaines se sont multipliées. Donald Trump Jr. s’est empressé de venir fouler
« Un homme, écrivait Albert Camus, ça s’empêche ». Ce qu’un individu s’interdit de faire ou de dire nous renseigne davantage sur son caractère que ce qu’il montre et proclame pour mettre en avant son sens moral. À cet égard, la scène où, dans le Bureau ovale de la Maison Blanche, Trump et Vance ont cherché à humilier publiquement Zelenski constitue un cas d’école. Arrogance du fort à l’égard du faible, violence du mépris, intimidation érigée en diplomatie, art du
« En cette fin des années 1990, où l'art contemporain est bousculé par une nouvelle déferlante d'images, Agnès Sinaï déplore la froideur, le cynisme, d'un art qui n'a plus aucun lien avec l'expérience concrète, et qui échoue à proposer une alternative à l'échec à la fois médiatique et politique qu'il entend dénoncer. » Vous pouvez retrouver ce texte dans nos archives : Agnès Sinaï, "L'art contemporain face à l'histoire", Esprit, mars-avril 1997
Primatologue renommé, membre de l’Académie nord-américaine des sciences et de l’Académie royale néerlandaise des arts et des sciences, Franciscus (Frans) de Waal est décédé en mars 2024 à l’âge de 75 ans. Il a consacré sa carrière scientifique à établir les liens de parenté comportementale entre humains et primates. Par des expériences originales et des observations minutieuses, il a démontré que les bonobos et les chimpanzés manifestent des comportements révélant des systèmes
Selon l’approche réaliste, les relations internationales sont anarchiques et il n’y a pas de progrès possible. Le réalisme, la guerre en Ukraine mais aussi notre réveil suite à un certain assoupissement idéaliste sont donc brutaux. Avez-vous le sentiment de jeter un pavé dans la mare ? En proposant une analyse réaliste de la guerre Russie-Ukraine, je jette en effet une sorte de pavé dans la mare, en tout cas en France. Je me situe dans la discipline des relations internationales qui,
Discussion avec : Manon Loisel, responsable du cycle Territoires et Mobilités de l’Institut des hautes études d'aménagement des territoires (Ihedate) et enseignante à Sciences Po Paris. En 2024, elle co-signe avec Nicolas Rio l'ouvrage Pour en finir avec la démocratie participative (Editions Textuel). Matthieu Angotti, spécialiste des politiques sociales et de la vie démocratique locale, ancien directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité. En 2024, il publie Agir ensemble
De façon singulière, la scène-clé du documentaire d’Albert Serra, lauréat de la Coquille d’or au dernier Festival de San Sebastian, se trouve au début, lorsque le héros, le torero Andrés Roca Rey demande à un des membres de sa cuadrilla (ensemble d’hommes accompagnant un matador, notamment ses planteurs de banderille et son picador) : « Comment est-ce qu’il toréait, Tomás ? » Un spectateur novice croira qu’il s’agit du prénom d’un concurrent ou d’un modèle défunt ;
Séisme politico-judiciaire, le jugement du tribunal correctionnel de Paris déclarant neuf anciens eurodéputés et douze assistants parlementaires coupables de détournement de fonds au niveau de l’Europe et les condamnant à des peines d’amende, de prison et à des peines complémentaires d’inéligibilité avec exécution provisoire remet en lumière les liens étroits entre démocratie, État de droit et justice, notamment au regard des commentaires non seulement de personnalités politiques
En tant qu’élus locaux, nous savons aujourd’hui que la jeunesse, trop souvent invisible dans le débat public, a plus que jamais besoin d’être le sujet d’un grand et nouveau projet d’émancipation. Des villes, des champs ou des banlieues, les jeunes, notamment les « décrocheurs », sont les grandes victimes de la vague de précarisation qui monte dans notre pays depuis un quart de siècle et qui les éloigne également d’un système démocratique, hélas fracturé et inégalitaire,
Dans son roman, L’écriture ou la vie, Jorge Semprun, survivant du camp nazi de Buchenwald, libéré il y a 80 ans, le 11 avril 1945 écrit : Il y aura des survivants, certes. Moi, par exemple. Me voici survivant de service, opportunément apparu devant ces trois officiers d'une mission alliée pour leur raconter la fumée du crématoire, l'odeur de chair brûlée sur l'Ettersberg, les appels sous la neige, les corvées meurtrières, l'épuisement de la vie, l'espoir inépuisable, la sauvagerie
L’apocalypse a lieu sur grand écran, à l’entrée de l’exposition Apocalypse. Hier et demain, avec la dernière scène de Melancholia (Lars van Trier, 2011). Le visiteur est aveuglé par la collision imminente et frontale de la Terre avec une autre planète. Les mots « cataclysme », « apocalypse » et « catastrophe » ont envahi notre vocabulaire. Ils qualifient les tragédies de guerre et les désastres environnementaux, n’hésitant pas à les niveler avec les événements mineurs
« À travers cette lecture d’Aristote, Ricoeur pointe le risque qu'à force de prétendre s’éloigner de la vengeance, on rende la justice encore plus implacable, au nom du fait que c’est la justice. Alors que si l’on acceptait cette part de refoulé, on serait peut-être beaucoup plus prudent dans le maniement des peines. » Vous pouvez retrouver ce texte dans nos archives : Paul Ricœur, Aristote : de la colère à la justice et à l’amitié politique, Esprit, novembre 2022
Nous avions (presque) fini par nous y habituer. Depuis plus de vingt ans, le schisme supposé entre la « démocratie » et « l’État de droit », entre la volonté d’un majorité électorale et les contraintes juridiques liées au respect des droits de l’homme, est devenue une figure obligé de tous les débats publics, bien au-delà des seuls rangs des partis d’extrême-droite. Le 31 mars, peu après 20h, le discours a changé. Au cours de ses douze minutes d’intervention, devant
Avec la réélection de Donald Trump à la Maison Blanche et la nomination d’Elon Musk à la tête du Department of Governement Effeciency (DOGE), l’influence des milliardaires libertariens dans le jeu politique des démocraties occidentales a franchi un nouveau seuil. Cette situation semble donner tort à une hypothèse de Karl Marx, selon laquelle le développement des sociétés par actions allait « socialiser le capital » et précipiter la disparition des entrepreneurs capitalistes1.
La condamnation de Marine Le Pen par le tribunal correctionnel de Paris le 31 mars 2025 a suivi les réquisitions du parquet jusqu’au bout. Outre l’amende et le remboursement infligés au parti et à Marine Le Pen pour avoir utilisé des assistants parlementaires européens dans les fonctions nationales de sa cheffe, un véritable système qui nourrissait le parti jusqu’à représenter le double de la masse salariale du parti national, Marine Le Pen a été condamnée à une peine de prison
Nous y sommes. Notre quotidien a rejoint ce qui, il y a encore peu, relevait de la science-fiction. L’intelligence artificielle (IA) est dans nos smartphones, au cœur de l’actualité technologique et même géopolitique. Les prophéties fusent : la fin de l’humanité est-elle en marche ? Serons-nous remplacés dans notre travail, réduits à des prestataires algorithmés ? Ce bouleversement technologique est à n’en pas douter un bouleversement anthropologique. Cerner sa singularité
Ma découverte de la pensée de Mounier remonte assez loin dans le temps. J’avais une quinzaine d’années, et en classe de seconde, j’étais tombé un peu par hasard sur un de ses textes, publié par une revue à destination des adolescents. Il s’agissait, si ma mémoire est bonne, d’un extrait de L’affrontement chrétien1. Et ce fut littéralement un saisissement, un choc, une révélation. Ces mots non seulement me parlaient mais ils me convoquaient et me mobilisaient par l’énergie
« Les uns imaginent que la paix est un bien que l’on garde sans bouger, méritant par cette sagesse une exception d’infortune. […] Ils voient la France comme une sorte de zone morte qui pourrait rester fixe quand tourbillonneraient autour les civilisations. » Ces mots sont ceux d’Emmanuel Mounier, le fondateur de la revue Esprit, dans un article intitulé « Lendemains de trahison », écrit peu après la signature des accords de Munich, en septembre 1938. Et il ajoute : « Si des
L’Observatoire de l’autoritarisme (Osservatorio Autoritarismo) est né à l’initiative de l’association culturelle et politique Libertà e Giustizia (Liberté et Justice) et de la maison d’édition Castelvecchi, en collaboration avec des professeurs et des étudiants de nombreuses universités italiennes, qui s’accordent sur la nécessité de créer des espaces d’analyse, de dialogue et de comparaison sur la transformation de la démocratie en Italie, dans un contexte européen et mondial.
« Écrire est un engagement, forcément. Écrire de la musique dite contemporaine, à un moment où les musiques de variétés monopolisent l’espace médiatique, c’est une prise de position politique. » Bruno Mantovani, compositeur, chef d’orchestre et directeur artistique du Printemps des Arts de Monte-Carlo. On en parle dans cet épisode- Laurent Bayle, Pierre Boulez aujourd'hui, Odile Jacob, 2025.
Lévi-Strauss vient avec une attitude assez ouverte et prudente : il est d’accord pour dialoguer avec les philosophes, mais il les prévient d’emblée qu’il ne va pas tout à fait jouer leur jeu. Vous pouvez retrouver cette table ronde dans nos archives : Claude Lévi-Strauss, Réponses à quelques questions, Esprit, 1963.
Le 1er décembre 1991, en Ukraine, eut lieu le référendum entérinant l’indépendance du pays. Le « oui » l’emporta à plus de 90 %. Au Parlement, à Kyiv, l’indépendance avait déjà été votée1. Désormais, la base populaire confirmait massivement sa volonté d’être libre. Avec l’indépendance, la Crimée est dotée d’un statut d’autonomie au sein de l’Ukraine souveraine. Dans le nouvel État, les Tatars de Crimée jouissent d’un organe, le Medjlis, qui « représente
Pour les cinéphiles de moins de trente ans, Lars Von Trier s’appréhenda par trois scandales. En 2011, ses propos cannois sur sa compréhension de Hitler choquèrent d’autant plus que Melancholia était un film apollinien et apolitique qui n’interpellait le spectateur qu’esthétiquement. En 2014, Nymphomaniac ne se voyait analysé que par des polémiques sur des scènes sexuelles non simulées et sa nécessaire interdiction (ou pas) aux mineurs, ce qui effaçait toutes ses recherches formelles
Il aura suffi d’une phrase, d’une comparaison historique, dans le cadre d’un échange sur notre relation houleuse avec l’Algérie d’aujourd’hui, pour qu’un journaliste chevronné se retrouve poussé à une forme d’exil médiatique. Jean-Michel Aphatie, figure familière des matinales de RTL, a osé rappeler une vérité dérangeante : « Chaque année, en France, on commémore ce qui s’est passé à Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais on en
Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche représente un changement géopolitique majeur, avec de profondes implications pour l’Europe en général et pour les Balkans occidentaux en particulier. Cette région, marquée par des conflits non résolus et des régimes hybrides, risque la déstabilisation. Le politologue américain Joseph Nye, connu pour son concept de soft power, a qualifié la politique étrangère de Trump de politique « transactionnelle, à somme nulle1 », qui met l’accent
Comment une seule histoire peut-elle en contenir autant ? La pandémie de Covid a mis à l’épreuve les sociétés et les gouvernements de telle façon que nous savons tous que nous n’en avons pas fini avec elle. En 2024, en France, le Covid a encore causé trois fois plus de décès que la grippe, à 95% chez les plus de 65 ans. Pourtant il ne fait plus partie de nos discussions ou de nos débats médiatiques depuis des mois. L’Ukraine, Poutine, Gaza, Trump et Elon Musk ont pris la place
Cet échange, animé par Matthieu Febvre-Issaly, a eu lieu dans le cadre du séminaire de philosophie de la justice à l’Ecole nationale de la magistrature (ENM).
Votre journal d’un écrivain en temps de guerre répond à une commande suisse puis allemande. Comment votre ouvrage a-t-il été accueilli en Allemagne, où l’effort pour reconnaître l’histoire criminelle du pays conduit parfois à des excès de vigilance face aux critiques d’Israël ? Le livre a été bien accueilli quand il est sorti en Allemagne à l’été 2024. Curieusement, alors que je m’étais préparé à des questions difficiles, on m’a surtout interrogé sur le côté intime
Les relations internationales ont leurs hasards de calendrier, et c’est le cas de la séquence électorale allemande de 2025, avec pour arrière-plan les chamboulements de l’ordre mondial par Washington. C’est le 6 novembre 2024, quelques heures après l’annonce de l’élection de Donald Trump aux États-Unis, que le chancelier Olaf Scholz déclare qu’il proposera un vote de confiance au Bundestag. Son intervention marque l’éclatement de la coalition tripartite au pouvoir et annonce
Au lendemain du renversement des nationalistes du PiS par une coalition libérale pro-européenne emmenée par Donald Tusk, la Pologne apparaissait comme un exemple, un « renfort de l’Europe1 ». Sa victoire rendait possible le renversement d’un pouvoir illibéral. Et sa nomination en janvier 2025, à la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne (UE), apparaissait pour beaucoup, un an plus tard, comme une étape, « un moment » qui faisait de la Pologne un moteur de l’Union,
« À Lyon, depuis le 7 octobre 2023, la tension ou l’absence de relations entre juifs et musulmans a indirectement impacté les relations islamo-chrétiennes. Le groupe de responsables religieux du G9 [qui réunit les neuf responsables des autorités chrétiennes, juives, musulmanes de Lyon] est aujourd’hui au point mort, malgré l’intention de le relancer. », explique Michel Younès, doyen de la faculté de théologie de l’université catholique de Lyon. Le G9 a été institué sous
En décembre 2024, Bernard Perret a publié un texte sur le site de la revue Esprit intitulé « Que veulent les socialistes ? ». Sa question était double : le Parti socialiste (PS) doit-il persévérer dans la Nouvelle Union populaire, écologique et socialiste (Nupes) ou bien participer à des coalitions de circonstances, fidèles à la tradition de la gauche de gouvernement ? Et le programme de la Nupes, qu’il s’agirait d’imposer face à l’extrême droite et au « bloc central »,
Selon certains discours, notre situation politique résulterait du complot de forces obscures contre la « démocratie »2. S’agit-il d’un renouveau des complots pour renverser la monarchie au moment de la Révolution française ? Pour beaucoup de personnes d’extrême droite, la contre-révolution doit continuer, y compris de manière clandestine, parce que les forces toxiques de la Révolution française continuent de saper les bases du pays, de la famille, du travail et du lien social.
Le réalisateur coréen Bong Joon-ho, auréolé de ses Oscars et de sa Palme d’or pour le film Parasite (2019), n’a pas renoncé, avec Mickey 17, à faire de la politique-fiction. Cela n’a pas échappé à son puissant distributeur hollywoodien Warner Bros. En effet, une partie de l’intrigue met en scène une super-héroïne noire et justicière (Naomi Ackie) qui se confronte à un dictateur blanc fascisant ; en pleine campagne électorale entre Harris et Trump, les comparaisons auraient
Les États-Unis ont toujours eu l’art de se mettre en scène dans des œuvres épiques qui mêlent destins collectifs, itinéraires singuliers et angoisses sur la vocation d’une nation en quête d’identité. La pièce de théâtre Angels in America, écrite par Tony Kushner en 1991, participe de ce genre. Elle représente un maelström de destinées qui s’entrechoquent à la faveur d’une double déflagration : l’apparition du sida au mitan des années 1980 et le choc causé par la mise
Je m’exprime ici en tant qu’ancien député membre de la commission de la Défense nationale et des forces armées, vice-président groupe amitié France Ukraine, auteur en 2024 d’une résolution signée par 150 députés pour la confiscation des avoirs russes gelés et leur affectation à la défense européenne et au soutien à l’Ukraine. J’interviens enfin en tant qu’ancien secrétaire national d’un parti à la fois résolument pacifiste et pro-européen. Une première précision
On parle souvent à la place des enfants […]. Et puis parfois, quand ils basculent dans des rouages de violence ou d’oppression, on ne prend même plus le temps de faire semblant de leur poser la question, on fait les choix à leur place. Tamara Al Saadi, metteuse en scène
Nous vivons dans des sociétés qui se comprennent à travers la sexualité (…). Et c’est à travers la question du viol que nous interrogeons la justice, la réparation et la mémoire collective. Cette évolution est essentielle pour comprendre les débats d’aujourd’hui. Vous pouvez retrouver ce texte dans nos archives : Frédéric Worms, "Penser la violation : relations morales et protection publique", Esprit, février 2000.
En 2009, Arbab, un homme grand et mince de 35 ans, conduisait un pick-up dans la province du Darfour Nord, au sein d’un convoi rebelle entré au Soudan depuis le Tchad. À l’exception d’un petit cercle sur le pare-brise au travers duquel on pouvait voir la route, le véhicule était couvert de boue, jurant avec son uniforme parfaitement propre. Le convoi tentait de rester inaperçu des avions de chasse de l’armée soudanaise (ou SAF, Forces armées soudanaises), qui le bombardaient néanmoins
Vous avez grandi dans l’État de Géorgie à l’époque du mouvement des droits civiques. Est-ce là que vous avez compris que vous étiez de gauche ? Même si je l’ignorais à l’époque, parce que mes parents ne voulaient pas me faire peur, nous avons reçu des menaces de la part du Klu Klux Klan, parce que ma mère était très engagée dans le mouvement des droits civiques. Ce mouvement a fourni les principes de mes engagements politiques ultérieurs. Quand j’étais encore petite, ces
Le 28 décembre 2024, les autorités afghanes ont ajouté une nouvelle mesure liberticide concernant les femmes : celles-ci ne doivent plus se tenir dans une pièce ayant une fenêtre donnant sur une autre maison ou une rue. Pourquoi ? « Le fait de voir des femmes travaillant dans des cuisines, dans les cours ou collectant de l’eau dans des puits peut engendrer des gestes obscènes », précise le document des talibans. Déjà, les petites filles ne peuvent suivre des cours au-delà de l’école
Souleymane Bachir Diagne, dans De langue à langue, vous proposez de mettre l’hospitalité de la traduction à l’épreuve de la domination coloniale1. Comment peut-on passer de la violence à l’hospitalité de la traduction ? Souleymane Bachir Diagne – Le fait que nous soyons à Fès me donne l’occasion, non seulement remercier ceux qui ont organisé cette rencontre et le public présent, mais également de dire combien je me réjouis de pouvoir, pour la première fois, avoir une conversation
« Je décidai donc d’aller travailler “sur le terrain”, en essayant de monter les projets les plus justes possibles au regard de tout ce que j’avais appris. » La passion commence avec les ponts. On peut d’ailleurs découvrir quelques un de vos croquis en couverture intérieure, accompagnés de vos calculs. « La définition de l’architecture telle que j’avais appris à la rêver avant et pendant mes études était simple : bâtir du vide. » Mais on comprend très vite que l’architecture
Les Damnés, un film de Roberto Minervini, est sorti en salle le 12 février 2025. Il avait été présenté au Festival de Cannes en 2024 dans la catégorie Un certain regard. Le cinéaste italien installé en Amérique est peu connu d’un large public, ce qui est son choix délibéré. Le film raconte un épisode de la guerre de Sécession, de 1862, lorsqu’un groupe de volontaires patrouille dans les régions de l’Ouest, dans le Montana. Le but de leur mission n’est pas clair, et c’est
Comment penser un avenir de la nature qui ne soit pas compromis par la frénésie humaine ? Comment décrire l’être humain d’aujourd’hui comme être à la fois vivant, naturel et social, sans les barrières qui, il y a encore peu, séparaient ce qui était alors considéré comme un ensemble de règnes autonomes ou d’univers différents ? Ces interrogations sont les nôtres aujourd’hui. Nous sentons et savons qu’il nous est impossible de refermer l’homme sur ses seuls traits humains,
En moins d’un siècle, le nom de Munich aura été associé deux fois à un basculement du continent européen. Non pas un basculement dans l’inconnu, car en 1938 comme aujourd’hui, l’événement marque l’accélération de mouvements de fond, au moins autant qu’une rupture. Mais un basculement hors des règles de la politique et de la diplomatie telles qu’elles existent encore, au profit du coup de force. La comparaison historique s’arrête là : en 1938, les dirigeants européens
Depuis la naissance de la Fresque du climat il y a quelques années, le dispositif pédagogique contemporain des fresques se multiplie sous des formes diverses, proposant des thématiques toujours renouvelées et formant ainsi une mosaïque d’initiatives « citoyennes » dont la visée est de sensibiliser les individus aux enjeux de notre siècle. À l’école, en entreprise, dans l’administration publique, tout le monde s’y met, apparemment dans la joie et la bonne humeur1. Les promoteurs
Vers la fin de sa vie en 1826, Thomas Jefferson, principal rédacteur de la Déclaration d’indépendance (1776) et troisième président des États-Unis (1801-1809), aurait déclaré sa tristesse devant le monde démocratique qu’il voyait naître et qui ne répondait plus « aux rêves révolutionnaires [ceux de la Révolution américaine] d’une république classique, fondée sur l’élitisme de la vertu ». Quatre décennies après la Révolution américaine, il voyait advenir sous ses
Iris (Laure Calamy) est heureuse. Un mari (Vincent Elbaz) formidable, deux filles parfaites, un cabinet dentaire florissant avec une assistante (Suzanne de Baecque) dévouée. Tout va bien, tout va très bien, répond-elle à son kinésithérapeute qui lui pose question sur question (enfants, famille, école, travail, pas de constipation, pas de stress, elle « n’a pas à se plaindre »). Et avec son mari lui demande-t-il ? Tout va bien aussi. Son amie à une réunion de parents d’élèves :
Lors d’une conférence de presse tenue le 7 janvier 2025, Donald Trump a suggéré un changement de dénomination du golfe du Mexique en « golfe de l’Amérique ». En réponse, la présidente mexicaine a adopté une posture de provocation amusée et a suggéré de revenir à la désignation des États-Unis par un nom utilisé sur les cartes espagnoles au xviie siècle : America Mexicana. A-t-elle eu raison de plaisanter ? En tout cas, sa tentative de tourner en dérision le souhait du président
Le 20 mai 1944, un samedi, Beria, commissaire du peuple d’URSS pour les affaires intérieures, informe par télégramme Staline que le processus de « mutation » des Tatars de Crimée vers leur « lieu d’accueil » peut être considéré comme achevé1. Beria veut parler des quelques 250 000 Tatars de Crimée2 (femmes, enfants, vieillards, et ceux parmi les hommes ne servant pas dans l’Armée rouge) qui roulent, parqués dans des wagons à bestiaux, vers une destination inconnue. Le voyage
Sortie de la tyrannie nazie, de la Seconde Guerre mondiale, des crimes contre l’humanité et du génocide des Juifs, l’Europe imagina ne plus vivre une pareille tragédie. L’unité réalisée à l’Ouest, étendue à l’Est après la chute du Mur de Berlin et la fin du système soviétique, triomphait. L’histoire tragique s’éloignait, l’avenir du continent semblait sans nuage. Déjà pourtant une alerte avait retenti en 1991, lourde de sombres présages, mais finalement rejetée dans
« On dit que nous ne faisons pas souffrir le coupable pour le faire souffrir ; il n’en est pas moins vrai que nous trouvons juste qu’il souffre ». Le constat posé, à la fin du XIXe siècle, par Émile Durkheim - qui ajoutait que « peut-être avons-nous tort, mais que là n’est pas la question1 » - n’a rien perdu de sa sinistre lucidité dans la France de 2025. Après la polémique déclenchée, en juillet 2022, par l’organisation d’une séance de karting à la prison de Fresnes,
En croisant les perspectives de Didier Ostré et de Joëlle Zask, cette rencontre organisée par le groupe Esprit Marseille interroge les enjeux économiques, sociaux et écologiques du "nourrir", entre souveraineté alimentaire, mutations du commerce et rôle démocratique des marchés. Cette discussion, animée par François Crémieux, membre du comité de rédaction d’Esprit, a eu lieu dans les locaux de la maison d'édition Le Bruit du Monde dans le cadre d'une rencontre du Groupe Esprit Marseille.
Olga Medvedkova, dans Dire non à la violence russe1, propose une réflexion philosophique et éthique face à la brutalité de l'invasion, s'appuyant sur des figures comme Freud, Arendt et Fromm pour nourrir une résistance morale. Elena Volochine, quant à elle, dans Propagande : l'arme de guerre de Vladimir Poutine2, scrute l’instrumentalisation de la vérité par le régime russe et son emprise sur l’imaginaire collectif.Cette rencontre est animée par Véronique Nahoum-Grappe, anthropologue
Face à la montée en puissance et à la multiplication des attaques hybrides de la Russie en mer baltique, en Roumanie, au Danemark, en Allemagne, en Moldavie et en Géorgie notamment, le moment est venu pour l’Occident de prendre acte que la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine ne constitue qu’une partie d’un projet beaucoup plus vaste ayant pour objectif la fragmentation et l’affaiblissement durable de l’Occident. Dans un tel contexte, tout scénario de gel du conflit,
Écrivain souvent qualifié de « balzacien », Aurélien Bellanger est connu pour ses ouvrages teintés de réalisme documentaire, sortes de fresques sociales qui décrivent la société française sous une forme romanesque1. Les Derniers Jours du Parti socialiste n’échappe pas à cette règle, les six parties qui composent le roman mettant en scène une galerie de personnages, d’institutions ou d’événements tirés de la vie politique française récente et aisément reconnaissables.
Les courants d’opinion autrichiens foncièrement attachés à la démocratie libérale et à la construction européenne, pourtant majoritaires, n’osaient plus y croire. Pour une large part tétanisée, ces forces démocratiques s’étaient faites à l’idée de ne pas pouvoir empêcher l’arrivée au pouvoir de Herbert Kickl, l’intransigeant chef du FPÖ (« Parti de la Liberté »). Il y a encore quatre semaines, les Conservateurs du ÖVP (« Parti du Peuple »), semblaient décidés
Le 10 janvier 2025, soit dix jours avant l’investiture de Donald Trump, le fondateur de l’entreprise PayPal, Peter Thiel publiait dans les pages du Financial Times, une tribune intitulée « Le temps de la vérité et de la réconciliation1 ». Un mois plus tard, le 14 février 2025, le vice-président des États-Unis, JD Vance, prononçait à Munich un discours dans le cadre de la Conférence sur la sécurité en Europe, devant un parterre médusé et avare d’applaudissements. Ces deux textes
Dans un monde qui tend à se structurer par les rapports de force, où la course en avant technologique ne cesse de s’accélérer, où des « artistes », bien formés à l’autopromotion, s’emploient, pour mieux faire parler d’eux, à chevaucher le dragon de l’intelligence artificielle qu’ils présentent comme un « amplificateur d’inspiration » ou une « ressource créatrice », il y a des expositions qui font un bien fou. Des expositions qui nous ramènent à la racine de l’acte
De 2016 à nos jours, le triomphe de Trump et du trumpisme fut facilité par ce que l’historien Bernard Lepetit définissait comme la « causalité accidentelle1 ». Un autre choix de candidat, en 2016, que Hillary Clinton, qui incarnait assurément la « Clinton-fatigue », un impeachment ex post facto en 2021 de Trump, après les émeutes de ses partisans devant et dans le Congrès, une décision de la Cour suprême confirmant la légalité de la décision de certains États qui voulaient
Le 5 octobre 2011, le comité de l’Académie royale des sciences de Suède décidait d’attribuer le prix Nobel de chimie à Daniel Shechtman pour la mise en évidence des quasi-cristaux. Bouleversant l’un des paradigmes fondateurs de la cristallographie, cette découverte a inauguré des recherches expérimentales et théoriques. La contribution du lauréat demeurant incontestée, l’annonce de cette haute distinction était attendue depuis longtemps. Pour autant, cette attribution s’est
On peut affirmer sans trop craindre être démenti que Trump ne serait pas au pouvoir aujourd’hui sans les pertes d’emploi massives subies par certaines régions industrielles des États-Unis (le plus souvent dans des états démocrates ou blue states). De même, et avec des preuves tangibles, il n’y aurait jamais eu des pertes d’emploi et des fermetures d’usine de cette envergure sans les importations massives venues tout particulièrement de Chine. Un article de 2021 publié par trois
Le chef-d’œuvre de la compétition du Festival des 3 Continents, en 2024, était un long métrage documentaire indien, le troisième réalisé par Prabhash Chandra. Hearth and Home filme, en une trentaine de plans fixes, le quotidien d’un homme d’une soixantaine d’années qui prend soin, nuit et jour, de sa mère, qui en a plus de quatre-vingt-dix. La caméra, toujours à distance de l’action, capte dans de longs plans fixes, les gestes tendres, rapides et parfois agacés de cet homme
Depuis Jean-Luc Godard avec À bout de souffle en 1960, le prix Jean Vigo signale les réalisateurs originaux, prometteurs, parfois virtuoses. Et bien souvent il fait mouche (Maurice Pialat pour L’Enfance nue en 1969 ou Bruno Dumont en 1997 pour La Vie de Jésus ou, plus récemment, Jean-Charles Hue avec Mange tes morts : Tu ne diras point en 2014 et Jean-Bernard Marlin avec Shéhérazade en 2018). Le cru 2024 est plus qu’à la hauteur, avec l’arrivée dans le paysage cinématographique français