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30.05.2025 à 11:45

LA LETTRE DE REGARDS ET POLITIS DU 30 MAI

la Rédaction

2027 : une primaire et deux candidats de gauche
Texte intégral (1196 mots)

Tous les vendredis, les rédactions web de Regards et Politis unissent leurs forces pour vous donner à lire, à écouter et à penser. Des éditos, des articles et des vidéos pour comprendre une actualité de la semaine.

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2027 : une primaire et deux candidats de gauche

par Pierre Jacquemain

Pour la prochaine présidentielle, il n’y a pas forcément besoin d’un candidat unique de la gauche pour l’emporter.

Ce qui se joue au congrès du Parti socialiste n’a rien d’anodin. Deux lignes s’affrontent. L’une plaide pour l’union des gauches et des écologistes pour la présidentielle, hors LFI, l’autre pour une candidature socialiste quoi qu’il en coûte. Même si la mobilisation lors du premier tour du scrutin n’a pas vraiment emballé les foules – quelques 20 000 votants pour 40 000 militants encartés –, le nom du futur premier secrétaire – Olivier Faure le sortant ou Nicolas Mayer-Rossignol son challenger – sera déterminant dans la capacité de la gauche de créer les conditions de sa victoire ou de son propre sabordage. Pour le maire de Rouen et ses petits camarades du texte d’orientation numéro 3 – comme on dit en langage solférinien –, nul besoin d’une primaire puisque les socialistes sont les meilleurs, redomineront bientôt la gauche – après leur 1,7% en 2022 – et ils ont même un candidat pour ça en la personne de Raphaël Glucksmann qui leur a permis de retrouver des couleurs lors des dernières élections européennes. 13,8%, ne nous emballons pas non plus. Suffisant pour imposer leur chouchou à la gauche, croient-ils. Une logique identitaire qui conduirait nécessairement à la prolifération des candidatures à gauche, les insoumis ayant généreusement annoncé qu’il mettait leur candidat à la disposition de la gauche et des écologistes. Autant dire que, dans ces circonstances, les chances qu’un candidat de gauche passe le second tour sont quasi nulles. L’autre option, celle que privilégie l’actuel premier secrétaire du PS, mais aussi Marine Tondelier des écologistes, François Ruffin ou encore Clémentine Autain, c’est une primaire – avec des méthodologies différentes. C’est sans doute la proposition politique la plus raisonnable du moment si la gauche veut espérer reprendre un jour le pouvoir. Il n’y a que rassemblée qu’elle peut espérer être au second tour. La gauche doit donc s’entendre sur un mode de désignation de celui ou celle qui sera le/la mieux placé/e pour incarner la gauche, et donc la rassembler. Pour autant, faut-il un unique candidat de la gauche et des écologistes ? Pas nécessairement. Le sondage Harris publié par Regards montrait que deux candidatures de gauche ne l’empêchaient pas d’être au second tour avec 19% pour un candidat social-démocrate et 8% pour un candidat insoumis. Le pire qui pourrait advenir, c’est que les deux candidats, le social-démocrate et l’insoumis, fassent jeu égal autour des 10-15% les empêchant probablement de se qualifier. Alors, l’un devra se désister pour l’autre. Sinon, les électeurs se tourneront vers le candidat qu’ils jugeront le plus à même de l’emporter pour mieux distancer le second. Vote utile…

Pierre Jacquemain

Les primaires sont ce qu’on veut qu’elles soient

par Pablo Pillaud-Vivien

On les dit sources de divisions, gadgets médiatiques, pièges à ego. Les primaires à gauche n’ont pas bonne presse. Pourtant, ces dernières années, elles ont aussi été des lieux de débat démocratique, d’élaboration de projets et d’émergence de nouvelles figures. Au fond, il ne faut pas nier que c’est là une des pratiques vivantes de la gauche politique.

Un article à lire juste 👉 ici

Congrès du PS : Faure contre Mayer-Rossignol, un duel décisif pour l’avenir de la gauche 

par Lucas Sarafian

Selon les résultats du premier tour du congrès du Parti socialiste, le premier secrétaire sortant affrontera une nouvelle fois le maire de Rouen. Les deux s’opposent sur la stratégie. Le résultat du second tour pourrait éteindre, ou pas, l’espoir de l’union de la gauche en 2027.

Un article à lire juste 👉 ici

Primaire de la gauche : « Il faut que ça décolle sinon on va s’emmerder »

François Ruffin, député Picardie Debout de la Somme, est l’invité de #LaMidinale.

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30.05.2025 à 11:23

Les primaires sont ce qu’on veut qu’elles soient

Pablo Pillaud-Vivien

On les dit sources de divisions, gadgets médiatiques, pièges à ego. Les primaires à gauche n’ont pas bonne presse. Pourtant, ces dernières années, elles ont aussi été des lieux de débat démocratique, d’élaboration de projets et d’émergence de nouvelles figures. Au fond, il ne faut pas nier que c’est là une des pratiques vivantes de la gauche politique.
Texte intégral (637 mots)

On les dit sources de divisions, gadgets médiatiques, pièges à ego. Les primaires à gauche n’ont pas bonne presse. Pourtant, ces dernières années, elles ont aussi été des lieux de débat démocratique, d’élaboration de projets et d’émergence de nouvelles figures. Au fond, il ne faut pas nier que c’est là une des pratiques vivantes de la gauche politique.

La gauche est diverse, c’est un fait. Il faut même le revendiquer comme une richesse. Mais cette diversité n’a de sens que si elle s’affronte, s’exprime, se met en scène. C’est exactement ce que permettent les primaires. Celle du Parti socialiste en 2011, avec ses meetings et ses débats télévisés, a remis le politique au cœur de la campagne. Celle de 2017 a peut-être été minée par l’implosion du PS, mais elle a permis à Benoît Hamon d’énoncer une série de propositions – revenu universel, transition écologique – qui ont marqué durablement le débat public.

Mais c’est sans doute du côté des écologistes qu’on trouve l’exemple le plus convaincant. En septembre 2021, la primaire des Verts – organisée par EELV et ouverte à l’ensemble des citoyens – a été une réussite à plus d’un titre. Participation massive : plus de 100 000 votants. Débat riche, parfois tendu, mais toujours politique. Quatre profils, quatre lignes : Delphine Batho, et sa radicalité décroissante ; Sandrine Rousseau, et son écoféminisme assumé ; Yannick Jadot, sur une ligne écologiste qu’il affirme réaliste ; Éric Piolle, le maire de Grenoble et sa vision municipale de la transformation. C’est cette confrontation-là, franche, respectueuse et ancrée dans des projets, que la gauche devrait retrouver.

Certes, la « primaire populaire » qui suit en 2022 est un semi-échec. Mais elle dit quelque chose de l’époque. En l’absence d’un espace commun à gauche, c’est la société civile qui tente de l’inventer. Elle veut forcer le rassemblement par la base. Cela n’a pas fonctionné, car la logique de parti, d’appareil, et parfois d’ego, l’a emporté. Mais la tentative n’est pas ridicule. Elle témoigne d’une soif de démocratie, d’un besoin de participation, d’une envie de politique.

La primaire n’est pas magique. Elle ne règle pas les conflits de fond. Elle ne fait pas exister une coalition là où il n’y a pas de volonté commune. Mais elle offre au moins un cadre pour que les désaccords soient tranchés démocratiquement, pour que les électeurs et électrices prennent part à la décision, pour que la gauche se regarde et se parle. C’est aussi une réponse à la personnalisation croissante de la vie politique. Plutôt que des candidatures autoproclamées, des leaders qui s’imposent par le fracas ou les médias, la primaire rend le choix collectif. Elle oblige à débattre, à convaincre, à composer.

La gauche pourrait cesser de voir la primaire comme un pis-aller ou un gadget. Pour que ce soit un outil qui ait une efficacité, cela suppose des règles claires, une volonté commune, un calendrier partagé. Mais surtout, cela suppose une culture politique. Celle qui accepte que le désaccord ne soit pas la fin du monde mais le commencement d’un chemin partagé. En 2027, si la gauche veut peser, il lui faudra davantage qu’un bon programme. Il lui faudra un projet qui embarque plus que 30% des votants… et il lui faudra une méthode. Et la primaire, si elle est bien préparée, peut être cette méthode. Non pas une fabrique de sauveurs, mais un lieu de choix, de démocratie, de refondation collective.

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30.05.2025 à 11:21

Congrès du PS : Faure contre Mayer-Rossignol, un duel décisif pour l’avenir de la gauche 

Lucas Sarafian

Selon les résultats du premier tour du congrès du Parti socialiste, le premier secrétaire sortant affrontera une nouvelle fois le maire de Rouen. Les deux s’opposent sur la stratégie. Le résultat du second tour pourrait éteindre, ou pas, l’espoir de l’union de la gauche en 2027.
Texte intégral (1679 mots)

Selon les résultats du premier tour du congrès du Parti socialiste, le premier secrétaire sortant affrontera une nouvelle fois le maire de Rouen. Les deux s’opposent sur la stratégie. Le résultat du second tour pourrait éteindre, ou pas, l’espoir de l’union de la gauche en 2027.

Le congrès du Parti socialiste (PS) est un cycle sans fin. Tous le répétaient : « Il ne faut pas refaire le match du congrès de Marseille. » Râté. Les militants socialistes ont tranché ce mardi 27 mai : le premier secrétaire sortant, Olivier Faure, affrontera au second tour le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, soutenu par une coalition composée du député de l’Eure Philippe Brun, du très médiatique Karim Bouamrane, de la maire Hélène Geoffroy ou de la présidente de la région Occitanie Carole Delga. 

Le député de la Seine-et-Marne face à l’édile de Seine-Maritime : l’affiche est la même qu’au congrès de 2023 où le parti, miné par les tensions et les accusations de triches, avait failli imploser. La  commission de recollement, chargée de régler les conflits liés au vote, convoquée le 28 mai, a communiqué les résultats définitifs dans la nuit de mercredi à jeudi : Olivier Faure est arrivé en tête (42,21 %), devant Nicolas Mayer-Rossignol (40,38 %), suivi de Boris Vallaud (17,41 %). 

Tout s’est joué dans un mouchoir de poche. Il faut également admettre que le corps électoral de ce vote a été particulièrement faible : sur les 39 815 adhérents, seuls un peu plus de 24 701 d’entre eux ont participé au vote. Pour Olivier Faure, cette situation importe peu. Une victoire reste une victoire. La sienne s’explique notamment grâce à ses scores dans des fédérations importantes comme les Bouches-du-Rhône, la Loire-Atlantique, le Nord, La Réunion ou la Seine-Saint-Denis. 

Malgré les bons résultats de l’orientation de « NMR » en Occitanie, en Seine-Maritime ou à Paris, l’édile n’est pas arrivé pas à passer devant le patron du parti. « Nicolas Mayer-Rossignol fait des scores importants dans des bastions qui lui sont acquis, où les militants sont dans une logique de féodalité, comme dans l’Hérault ou l’Occitanie. Alors que le score d’Olivier Faure est important dans la plupart des fédérations, ses résultats sont plus homogènes dans le pays », analyse un proche conseiller du premier secrétaire.  

Divergence stratégique

Les militants socialistes choisiront donc leur Premier secrétaire lors d’un second vote le 5 juin. Sur le fond, les différences idéologiques entre Faure et Mayer-Rossignol sont minimes. Les textes d’orientation des deux qualifiés mettent en avant leur identité pro-européenne, assument une doctrine social-démocrate, annoncent vouloir réinvestir la question du travail, défendre le modèle social français… Seule différence notable : le texte du Rouennais se pose davantage en défenseur des « valeurs de la République » et des principes d’universalisme et de laïcité contre les « logiques sectaires et séparatistes ».

En revanche, sur la stratégie, les dissensions sont majeures. Si les deux motions annoncent clairement vouloir tourner définitivement la page d’une alliance avec La France insoumise (LFI) pour la prochaine présidentielle, les chemins proposés sont bien différents. Olivier Faure, ouvertement favorable à une primaire, plaide pour le lancement d’une « plateforme de la gauche », allant de François Ruffin à Raphaël Glucksmann. Quant à Nicolas Mayer-Rossignol, il souhaite plutôt bâtir une « fédération de la gauche et des écologistes » en se rapprochant d’abord de Place publique.  

Sur la forme, les deux candidats parlent donc d’union de la gauche. Mais leurs perspectives s’opposent. Alors que Nicolas Mayer-Rossignol et ses soutiens veulent tout faire pour qu’un socialiste soit le candidat de la gauche, soutenu par un agrégat de partis d’orientation social-démocrate, social-libérale voire centriste, Olivier Faure tient à ce que le périmètre de cette union soit élargi à cette gauche plus radicale incarnée par François Ruffin, Clémentine Autain, Alexis Corbière ou Sandrine Rousseau. De ce fait, le résultat du congrès aura une conséquence notable sur la physionomie de la gauche en 2027.

Majorité ou minorité

Une fois de plus, le PS se retrouve scindé en deux camps. « Une très grande majorité des militants qui se sont exprimés défendent notre ligne stratégique, celle de l’union de la gauche et des écologistes avec une plateforme de Ruffin à Glucksmann, assure toutefois Johanna Rolland, maire de Nantes, numéro deux du parti et proche de Faure. La ligne stratégique est tranchée. La ligne, c’est bien l’union de la gauche et des écologistes. » Nicolas Mayer-Rossignol l’atteste pourtant : « La ligne de la direction sortante est minoritaire. Une majorité dans notre parti souhaite un changement sur le fond et sur la méthode. » 

En attendant, les deux camps se posent la même question. Que fera Boris Vallaud ? Se rangera-t-il derrière Olivier Faure ou appellera-t-il à voter pour Nicolas Mayer-Rossignol ? Les soutiens du député des Landes en ont conscience : le report des voix du chef des députés pourrait tout faire basculer. Cette position de troisième homme lui permet de peser sur la suite. « Aucun bloc ne dispose de la majorité absolue dans nos instances, ce que représente Boris Vallaud sera central dans le fonctionnement du parti dans les prochains mois et dans les prochaines années », avance Alexandre Ouizille, sénateur de l’Oise et proche de Vallaud. « Il va peut-être se faire désirer », commente un proche d’Olivier Faure. 

Boris Vallaud, troisième homme

Dans les équipes de Mayer-Rossignol comme de Faure, on multiplie les appels du pied à Boris Vallaud. « Nous appelons à faire synthèse avec Boris Vallaud. Nous sommes d’accord avec lui sur la ligne stratégique et sur le fonctionnement du parti, estime Philippe Brun. Boris Vallaud est un ami, j’ai mené avec lui de nombreux combats, notamment aux côtés d’Arnaud Montebourg. Je sais quelles sont nos convergences. » 

Au contraire, Pierre Jouvet, bras droit du premier secrétaire du parti, considère que Boris Vallaud devrait logiquement rejoindre son ancien camp. Simple question de cohérence politique, selon lui. « Boris Vallaud partage notre orientation, certifie l’eurodéputé. Cela fait sept années qu’il est à nos côtés, il a construit la ligne stratégique que nous portons. Et cette ligne a été validée par les militants. » 

« Les garanties vont lui être données sur la méthode et la représentation des siens dans la direction », promet un stratège fauriste. Olivier Faure pourrait alors accéder aux propositions du député des Landes : la création d’un média socialiste sur le modèle du journal Le Populaire du 20e siècle, le lancement d’une académie « Léon Blum » qui aura pour ambition de former les militants et d’être un pôle de production idéologique. Mais surtout, les soutiens d’Olivier Faure envisagent déjà une direction commune avec le Landais. Dans le camp de Nicolas Mayer-Rossignol, on évoque plus clairement l’idée d’une direction « collégiale »

« Il n’y a pas un millimètre d’écart entre notre ligne et celle de Boris Vallaud », jure néanmoins Johanna Rolland. Dans les faits, le texte d’orientation de Boris Vallaud partage le même périmètre de l’union de la gauche que la motion d’Olivier Faure. « Nous voulons une candidature commune de la gauche, de Raphaël Glucksmann à François Ruffin, seul chemin pour gagner face à l’extrême droite au premier tour », écrit-il dans la vingtaine de pages qui composent sa motion. 

Néanmoins, le député des Landes estime que les socialistes doivent d’abord désigner leur candidat dans leurs rangs avant de « se tourner vers le reste de la gauche, les écologistes et les forces vives de la société civile ». Une démarche qui ressemble plutôt à la volonté d’affirmation socialiste des anti-Faure. La synthèse est encore à trouver. A moins que Boris Vallaud ne se mure dans le silence afin de conserver une autonomie politique tout en évitant de participer à une éventuelle scission du parti. 

Dans le camp Faure, on commence déjà à penser à l’après. « Le congrès se simplifie : c’est Olivier Faure ou le retour d’une ligne politique proche de François Hollande », résume un conseiller fauriste. « Ce résultat, c’est un échec de la stratégie anti-Faure. Cet échec doit permettre de passer à la suite », annonce Pierre Jouvet. La maire de Vaulx-en-Velin (Rhône), Hélène Geoffroy, y croit encore : « Cela fait trois congrès que la ligne d’Olivier ne cesse de s’effriter. Aujourd’hui, elle est minoritaire. C’est une inversion des courbes : celle d’Olivier Faure diminue quand la notre progresse. » En effet, Olivier Faure perd des voix par rapport au congrès de 2023 et sa force au sein du conseil national recule. Pour rêver de prendre de l’espace aux yeux des militants socialistes, Nicolas Mayer-Rossignol l’appelle à débattre à la télé ou ailleurs : « Qui a peur du débat ? Un grand parti doit avoir des débats. » Tentative désespérée de renverser le match ? 

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29.05.2025 à 10:00

Comment être socialiste et de gauche ?

Catherine Tricot

Les socialistes sont peu audibles et restent contestés à gauche. La phase ultime de leur congrès leur redonnera-t-elle une place ? Pas certain.
Texte intégral (727 mots)

Les socialistes sont peu audibles et restent contestés à gauche. La phase ultime de leur congrès leur redonnera-t-elle une place ? Pas certain.

Dans moins de 3 semaines aura lieu à Nancy le congrès du Parti socialiste. Ce mardi, ses militants ont voté dans les sections en glissant un bulletin dans une urne. Comme il y a 3 ans, la motion portée par Olivier Faure et celle avancée par Nicolas Mayer-Rossignol arrivent au coude à coude, autour de 40%. Boris Vallaud ne pourra maintenir sa motion.

Ce premier vote n’a guère fait évènement, bien moins que celui des LR, pourtant devenu un micro parti. Que nous dit ce relatif désintérêt médiatique ? D’abord que la gauche peine à marquer le débat public. Désormais, on n’entend plus que la course aux idées rances. Ensuite que le PS est lui aussi devenu un petit parti. Moins de 30 000 votants. Il est à l’image de la crise générale des partis qui affecte la gauche et la droite. Seuls les mouvements aux contours flous et aux fonctionnements indéterminés restent un peu épargnés par cette crise de l’organisation partisane. Et encore. On s’interroge beaucoup sur l’avenir du macronisme. La vie de LFI n’est pas sans poser questions. 

Les partis sont repliés comme jamais sur la vie de l’Assemblée et tendus vers la seule conquête d’un pouvoir politique qui, chaque jour, semble en peine de comprendre et de peser sur le cours des choses. Pourtant, même de façon désolante, le trumpisme enseigne que la politique peut, même si la seule volonté ne remplace pas la société. Et c’est tant mieux. En dehors de LFI et du RN, qui affirme encore une authentique ambition politique ? Pour ces deux courants, leur force ne tient pas à la quantité de leurs propositions, ni à leur qualité, mais à la cohérence et la force de leur projet. 

On serait en peine de le relever du côté des socialistes. Conscient que « le socialisme est orphelin d’une idée forte », Boris Vallaud propose de « démarchandiser la vie » car, «  (…) Le tout-marché dissout la société, capte le temps, les liens, l’espace public, les ressources naturelles ». Les deux autres leaders socialistes proposent un processus politique « un laboratoire des territoires » autour des pratiques des élus locaux pour Nicolas Mayer-Rossignol ; « une plateforme commune de la gauche » non mélenchoniste chez Olivier Faure. Il est frappant que les questions de contenus et celle de la dynamique politique soient ainsi dissociés. Tous les courants sont unis pour rompre avec LFI. Qui peut croire que faire reculer le tout-marché ou généraliser les expérimentations locales peut se faire sans les militants engagés dans de multiples combats et qui votent LFI ? La force, voire la crédibilité, d’une proposition tient dans l’articulation du projet traduit dans un programme avec une stratégie politique cohérente. S’il manque un maillon, cela semble creux ou insincère.  

Il y a peu, les socialistes étaient rejetés des manifestations. On leur faisait reproche d’avoir lourdement trahi leur promesse et d’avoir engendré le macronisme auquel nombre d’anciens dirigeants et ministres s’étaient ralliés. On soutiendra ici que ce ne fut pas un accident de l’histoire. Faute d’un solide projet alternatif au social-libéralisme inégalitaire et autoritaire, au productivisme destructeur et au passé colonial qui continuent de les hanter (Mitterrand, le dernier empereur, par Pascal Blanchard), les socialistes ne pouvaient que glisser et tomber dans cette impasse. Ils savent qu’ils doivent en sortir. Un projet alternatif reste à élaborer. Il ne pourra faire l’impasse sur les luttes et rapports de force à construire : cela suppose une nouvelle approche de l’engagement et de la mobilisation de la société. Les socialistes n’ont toujours pas fait ce travail.

Il n’y a pas qu’une façon d’être de gauche, surtout en ces temps de nécessaire refondation des projets politiques. Les socialistes n’ont pas reconstruit la leur. 

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29.05.2025 à 09:54

LA LETTRE DU 29 MAI

la Rédaction

Finances publiques et protection sociale : gauche, où es-tu ?
Texte intégral (1005 mots)

Finances publiques et protection sociale : gauche, où es-tu ?

par Bernard Marx

Le premier ministre annonce une énième cure d’austérité. Mais qu’a à répondre le Nouveau Front populaire ?

L’agenda politique du bloc de gouvernement ne se limite donc pas à la course vers l’extrême droite sur le terrain de l’immigration, de l’islamophobie et de la mise en cause de l’État de droit.  Sur BFMTV-RMC, François Bayrou a annoncé qu’il proposera aux Français au début du mois de juillet un plan de retour à l’équilibre des finances publiques sur 3 ou 4 ans (soit 200 milliards d’euros puisque le déficit actuel des finances publiques tourne autour de 6% ). En clair, une austérité de haute intensité et de longue durée, dont une réforme du financement de la protection sociale via un transfert sur la TVA .

L’argumentaire du premier ministre tient en 3 affirmations pilonnées depuis des années :

  1. La situation financière est insoutenable et tend à devenir hors de contrôle. « Une situation dégueulasse qu’on laisse s’accumuler, depuis des années » et qui sera payée par ceux qui travaillent et par leurs enfants et petits-enfants. Pierre Moscovici en rajoute : rapport de la Cour des Comptes à l’appui, il alerte sur un risque de défaut de paiement de la Sécurité sociale dans 2 ans.
  2. La France est un pays où la production nationale est des plus faibles et où, contrairement aux autres pays, la production nationale par personne ne progresse plus.
  3. Le financement de la protection sociale repose trop sur le travail.

Conclusion toute thatchérienne : « Nous ne pouvons pas échapper » à « un rééquilibrage des dépenses publiques et des dépenses sociales ». On appréciera le tour de bonneteau linguistique :  pas question d’augmenter les recettes. Il faut s’attaquer aux dépenses, rien qu’aux dépenses, ajouter de nouvelles exonérations de cotisations sociales et transférer sur l’impôt de consommation.

La préconisation est claire : il faut poursuivre et amplifier la politique de l’offre, menée depuis plusieurs décennies, et qui a mené dans le mur financier dont nous nous approchons gravement selon le premier ministre.  

Malgré les dires du gouvernement, de la droite et de l’extrême droite, du patronat et des médias dominants, espérons que les Français feront le diagnostic de l’absurdité de persister dans cette stratégie désastreuse.

Mais cela ne suffira pas.  

Il est temps, il est grand temps que la gauche revienne dans le débat. Face au budget Barnier, la gauche politique et d’importantes forces sociales, intellectuelles et citoyennes avaient ensemble marqué des points. Mais depuis, quelle débâcle ! Il faut que cela cesse. Il y a urgence. Sinon c’est le désastre assuré avant même 2027.

Bernard Marx

MIRACLE DU JOUR

Enfin un vote à l’Assemblée nationale sur la réforme des retraites !

Le président des députés communistes Stéphane Peu a déposé une proposition de résolution qui entend revenir sur le « recul de l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans et [sur] l’augmentation de la durée de cotisation portée à 43 annuités dès 2027. » Il sera débattu le jour de la niche parlementaire du groupe le 5 juin prochain. Bon, c’est non-contraignant mais quand même, cela permettra de réaffirmer que l’opposition à cette réforme-phare d’Emmanuel Macron continue de structurer le champ politique – et à coaliser largement contre elle.

P.P.-V.

ON VOUS RECOMMANDE…


Sebastião Salgado est décédé à 81 ans. Le photographe était en 2021 l’invité de TV5 Monde : il y livrait une vision du monde ouverte et joyeuse, résolument en lutte pour la préservation du vivant et l’harmonie des humains avec la nature. Une poésie douce et amoureuse qui chavire quand on voit le monde en feu qui nous entoure aujourd’hui.

ÇA SE PASSE SUR REGARDS.FR

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28.05.2025 à 17:29

« Bientôt, nous enseignerons qu’il y a eu un génocide à Gaza »

Collectif Aggiornamento

Le Collectif Aggiornamento, composé d’enseignants du primaire au supérieur, principalement d’histoire-géographie, défenseur.ses de l’enseignement des sciences sociales et des pratiques pédagogiques émancipatrices, publie
Texte intégral (1095 mots)

Dans une tribune, le Collectif Aggiornamento, composé d’enseignants du primaire au supérieur, principalement d’histoire-géographie, défenseur.ses de l’enseignement des sciences sociales et des pratiques pédagogiques émancipatrices, s’inscrit dans le combat pour le soutien au peuple palestinien.

Depuis un an et demi, le gouvernement israélien déverse des bombes sur la bande de Gaza, vise et tue des dizaines de Gazaoui·es chaque jour, au mépris de toutes les règles élémentaires du droit international. L’urgence humaine absolue dans laquelle se trouvent les Gazaoui·es ne soulève aucune indignation officielle. Responsables politiques et personnalités publiques continuent de tergiverser pour justifier l’injustifiable. Notre gouvernement rechigne encore à hausser le ton face au gouvernement israélien et participe à la répression du mouvement de solidarité avec la Palestine. Après le ministère de l’intérieur, c’est désormais au tour de l’Éducation nationale, depuis que le rectorat de Dijon a considéré qu’une minute de recueillement en solidarité avec un peuple décimé relève d’un « manquement à l’obligation du respect de neutralité » (sic).  Une de nos collègues, à Sens, a en effet été suspendue à titre conservatoire à la fin du mois de mars pour avoir permis à ses élèves, dans sa classe, d’observer une minute de silence en mémoire des habitant·es de la bande de Gaza. 

Mais que signifie exactement une posture de «neutralité» vis-à-vis des morts de Gaza ? Et comment la distinguer de la froideur face à la souffrance d’hommes, de femmes, et d’enfants innocent·es ? Faut-il se taire ? Préférer le silence de l’indifférence aux silences de l’empathie ?  Qui a la prérogative de choisir les morts qui ont droit à l’expression de notre solidarité et de notre humanité ? Que l’école soit un lieu de recueillement collectif, personne ne le conteste vraiment, mais ce recueillement peut-il être confisqué par l’institution ? Que faire, en tant qu’enseignant.e, de la volonté d’une classe qui exprime son désir de ne pas ignorer le génocide en cours à Gaza ? Que faire de la morale la plus élémentaire face aux injonctions d’un pouvoir incapable de mettre en conformité les valeurs universelles derrière lesquelles il se drape avec la réalité de ses actions? 

Depuis le 7 octobre 2023, nous faisons face à des questions d’élèves qui cherchent à comprendre, à poser les mots justes sur l’horreur dont ils sont les témoins : d’abord celle des crimes atroces du Hamas et aujourd’hui celle de l’insatiable soif de vengeance et de conquête coloniale d’un gouvernement israélien fanatisé par des ministres qui réalisent leur rêve messianique d’éradication du peuple palestinien et d’annexion totale de la Palestine. 

Mais il serait trop tôt pour parler de génocide nous disent certain·es, qui somment d’attendre « le travail des historien·nes » pour statuer ? C’est un parti-pris discutable, alors que nombre d’expert·es utilisent, de plus en plus souvent, de plus en plus clairement, ce concept au sujet de Gaza. Des juristes reconnu·es comme Monique Chemiller-Gendreau, professeure émérite de droit public et de sciences politiques, ou Clémence Bectarte, avocate spécialisée en droit pénal international et membre de la Fédération internationale des droits humains (FIDH), mais aussi des ONG comme Amnesty Internationale ou encore l’UNICEF font toutes et tous le même constat : le risque et l’intention génocidaires sont là. Des historiens eux-mêmes, tel Omer Bartov ou Amos Goldberg, valident ce terme. Mais invoquer l’histoire, c’est se placer dans une posture d’attente bien commode,  et renoncer à toute forme de justice au présent, alors que, selon la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, nommer un génocide implique d’agir immédiatement pour l’empêcher ou l’interrompre. 

En attendant que la France s’engage sur cette voie, l’Éducation Nationale continue de demander aux enseignant.es de prendre à bras le corps les « questions vives » qui traversent la société, tout en restant imperméables à certains malheurs du monde. Mais les établissements scolaires ne sont pas étanches aux débats et aux guerres !  Il ne sert à rien de vouloir laisser à leur porte les sujets jugés trop sensibles. Sur Gaza comme sur l’Ukraine, nos élèves sont abreuvé·es, en continu, d’images et de propos parfois contradictoires, typiques des propagandes de guerre. Bien au contraire, c’est en laissant entrer leurs questions dans nos classes qu’on rend possible leur objectivation ; c’est en partant des faits pour les mettre en perspective qu’on apaise des colères. Comment pourrions-nous faire notre métier sans recueillir le désarroi et les révoltes de nos élèves pour en faire des paroles et des questions, sans clarifier leurs informations par des mises en contexte, sans examiner les faits, sans construire des éléments d’analyse à partir des expertises dont nous disposons ? A ce titre, il est important de laisser entrer la Palestine dans les classes, comme objet d’étude et comme objet civique, et de garantir la liberté d’expression de nos élèves à son sujet.

Nous qui enseignons l’histoire, la géographie et l’EMC, sommes convaincu·es d’une chose : un jour viendra où nous enseignerons le génocide des Palestinien·nes de Gaza, comme nous le faisons déjà pour les Herero.es, les Arménien·nes, les Juif·ves, les Tsiganes et les Tutsi·es. Nous aurons alors le devoir, en toute « neutralité », non seulement d’expliquer par quelles étapes, avec quelles décisions politiques, et en vertu de quelles représentations déshumanisantes le peuple palestinien a rejoint la terrible liste des peuples victimes de génocide, mais aussi de permettre ce qui nous est interdit aujourd’hui : accueillir l’émotion spontanée de nos élèves sans attendre les levées de drapeaux. Quand nous aurons toutes les autorisations, quel regard portera-t-on sur celles et ceux qui ont été sanctionné·es tandis que nous assistions au génocide muselé·es et impuissant.es ? Nous ne voulons pas attendre que la Palestine n’existe plus que dans les manuels scolaires pour la faire exister dans nos classes, dans nos cours, comme dans les paroles ou les silences choisis de nos élèves.

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28.05.2025 à 11:37

LA LETTRE DU 28 MAI

la Rédaction

Comment être socialiste et de gauche ?
Texte intégral (1439 mots)

Comment être socialiste et de gauche ?

par Catherine Tricot

Les socialistes sont peu audibles et restent contestés à gauche. La phase ultime de leur congrès leur redonnera-t-elle une place ? Pas certain.

Dans moins de 3 semaines aura lieu à Nancy le congrès du Parti socialiste. Ce mardi, ses militants ont voté dans les sections en glissant un bulletin dans une urne. Comme il y a 3 ans, la motion portée par Olivier Faure et celle avancée par Nicolas Mayer-Rossignol arrivent au coude à coude, autour de 40%. Boris Vallaud ne pourra maintenir sa motion.

Ce premier vote n’a guère fait évènement, bien moins que celui des LR, pourtant devenu un micro parti. Que nous dit ce relatif désintérêt médiatique ? D’abord que la gauche peine à marquer le débat public. Désormais, on n’entend plus que la course aux idées rances. Ensuite que le PS est lui aussi devenu un petit parti. Moins de 30 000 votants. Il est à l’image de la crise générale des partis qui affecte la gauche et la droite. Seuls les mouvements aux contours flous et aux fonctionnements indéterminés restent un peu épargnés par cette crise de l’organisation partisane. Et encore. On s’interroge beaucoup sur l’avenir du macronisme. La vie de LFI n’est pas sans poser questions. 

Les partis sont repliés comme jamais sur la vie de l’Assemblée et tendus vers la seule conquête d’un pouvoir politique qui, chaque jour, semble en peine de comprendre et de peser sur le cours des choses. Pourtant, même de façon désolante, le trumpisme enseigne que la politique peut, même si la seule volonté ne remplace pas la société. Et c’est tant mieux. En dehors de LFI et du RN, qui affirme encore une authentique ambition politique ? Pour ces deux courants, leur force ne tient pas à la quantité de leurs propositions, ni à leur qualité, mais à la cohérence et la force de leur projet. 

On serait en peine de le relever du côté des socialistes. Conscient que « le socialisme est orphelin d’une idée forte », Boris Vallaud propose de « démarchandiser la vie » car, «  (…) Le tout-marché dissout la société, capte le temps, les liens, l’espace public, les ressources naturelles ». Les deux autres leaders socialistes proposent un processus politique « un laboratoire des territoires » autour des pratiques des élus locaux pour Nicolas Mayer-Rossignol ; « une plateforme commune de la gauche » non mélenchoniste chez Olivier Faure. Il est frappant que les questions de contenus et celle de la dynamique politique soient ainsi dissociés. Tous les courants sont unis pour rompre avec LFI. Qui peut croire que faire reculer le tout-marché ou généraliser les expérimentations locales peut se faire sans les militants engagés dans de multiples combats et qui votent LFI ? La force, voire la crédibilité, d’une proposition tient dans l’articulation du projet traduit dans un programme avec une stratégie politique cohérente. S’il manque un maillon, cela semble creux ou insincère.  

Il y a peu, les socialistes étaient rejetés des manifestations. On leur faisait reproche d’avoir lourdement trahi leur promesse et d’avoir engendré le macronisme auquel nombre d’anciens dirigeants et ministres s’étaient ralliés. On soutiendra ici que ce ne fut pas un accident de l’histoire. Faute d’un solide projet alternatif au social-libéralisme inégalitaire et autoritaire, au productivisme destructeur et au passé colonial qui continuent de les hanter (Mitterrand, le dernier empereur, par Pascal Blanchard), les socialistes ne pouvaient que glisser et tomber dans cette impasse. Ils savent qu’ils doivent en sortir. Un projet alternatif reste à élaborer. Il ne pourra faire l’impasse sur les luttes et rapports de force à construire : cela suppose une nouvelle approche de l’engagement et de la mobilisation de la société. Les socialistes n’ont toujours pas fait ce travail.

Il n’y a pas qu’une façon d’être de gauche, surtout en ces temps de nécessaire refondation des projets politiques. Les socialistes n’ont pas reconstruit la leur. 

Catherine Tricot

TRUMPERIE DU JOUR

Un avion et un golf sinon rien

Au moment où le Vietnam est frappé de droits de douane de 46% par les Etats-Unis, la famille Trump débarque avec un projet immobilier et un golf de 18 trous pour 1,5 milliard d’investissement. Les autorités vietnamiennes sont sommées de libérer 900 hectares cultivés. On comprend que les négociations sur les droits de douane sont intimement liées aux intérêts privés de la famille Trump. Ce nouveau passe-droit intervient après « le cadeau » d’un avion par le Qatar. Une journaliste audacieuse de Fox News s’est même émue de la corruption du président… Force à elle.

C.T.

ON VOUS RECOMMANDE…


Marcel Ophuls vient de décéder. En 1971, il fut le réalisateur d’un très important documentaire « Le chagrin et la pitié », longtemps interdit sur les antennes de télé françaises. Ce film (visible sur de nombreuses plateforme de VOD) a brisé le mythe gaullien d’une France résistante. Il a changé le regard hexagonal sur les années d’Occupation et résonnait avec les travaux de l’historien américain Robert Paxton sur la France de Vichy. Il a ouvert la voie à la reconnaissance, 25 ans plus tard, par Chirac, de la collaboration de l’État français avec l’occupant. L’excellent documentaire sur Arte restitue l’importance du film, rappelle son accueil et révèle l’hostilité de Simone Veil et de François Mitterrand. 

ÇA SE PASSE SUR REGARDS.FR

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28.05.2025 à 11:04

Loi Duplomb : l’avenir de l’agriculture ne se fera pas sans les agriculteurs

Pablo Pillaud-Vivien

En débat à l’Assemblée nationale après avoir été voté au Sénat, le texte Duplomb révèle les impasses écocidaires de la droite et le manque de lien de la gauche avec les agriculteurs.
Texte intégral (677 mots)

En débat à l’Assemblée nationale après avoir été voté au Sénat, le texte Duplomb révèle les impasses écocidaires de la droite et le manque de lien de la gauche avec les agriculteurs.

« Lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur» : tel serait l’objet central de la proposition de loi du sénateur Les Républicains, Laurent Duplomb. Dans sa version sortie de la Haute Chambre, le texte prévoit de réintroduire certains pesticides (dont les néonicotinoïdes, interdits en 2018), la possibilité d’épandage par drones et la construction facilitée de mégabassines. Il est aussi proposé l’affaiblissement de l’indépendance de l’Anses, autorité en charge d’examiner les demandes d’autorisation des produits phytopharmaceutiques.

A l’Assemblée nationale, la gauche était à pied d’oeuvre pour modifier la future loi. Plus de 2000 amendements avaient ainsi été déposés par le groupe Ecologiste et social et les insoumis notamment. Pour parer l’éventualité d’un texte complètement remanié, la droite l’a rejeté par 49.3 (alors qu’elle était pour !) pour s’en remettre en commission mixte paritaire à la première initiale. Les principaux syndicats d’agriculteurs, la FNSEA, les Jeunes Agriculteurs notamment, sont largement favorables au texte Duplomb et travaillent activement avec la droite politique pour peser dans le débat. La Coordination rurale aussi, même si elle est moins à la manoeuvre en ce moment. Seule la Confédération paysanne, classée à gauche, s’y oppose.

Les questions de souveraineté sont au centre du débat politique. Notre alimentation en est l’un des piliers. A gauche, les programmes sont clairs en la matière, que ce soit chez les écologistes ou chez les insoumis : il faut que la France se dote d’un projet alternatif en matière agricole. Les Français comme les agriculteurs le savent : leur survie passent par la qualité de leur production, écologiquement soutenable, dans un cadre économique qui assure au travail une juste rémunération. Dont acte. Mais là où le bât blesse, c’est que l’organisation de la lutte de gauche dans ce secteur relève davantage du registre des idées que du mouvement social.

Lors des élections syndicales de janvier dernier, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs ont perdu la majorité des suffrages, mais conserve leur domination avec 46,7% des suffrages recueillis. La Coordination rurale, qui a axé sa campagne sur une dénonciation de la co-gestion avec l’Etat, a obtenu 29,9% des voix. La Confédération paysanne, proche de la gauche, stagne à 20,5%.

Si la gauche veut avoir voix au chapitre agricole, elle a besoin des agriculteurs. Or, aujourd’hui, comme depuis trop longtemps, ce n’est plus vraiment le cas : agronomes et scientifiques sont davantage convoqués que celles et ceux qui travaillent la terre. Voire ils sont mis en opposition.

Le modèle d’agrobusiness, qui découpe les terres arables en grandes exploitations pour une toujours plus forte rentabilité, tend à devenir majoritaire. Selon l’INSEE, les très grandes exploitations valorisent désormais 36 % du territoire agricole et sont en augmentation constante. Dans le même temps, les mobilisations pour dénoncer les difficultés à vivre se multiplient sans que les « plans » gouvernementaux n’apportent de réponse valable et pérenne.

Bien sûr, la mécanisation comme l’introduction des pesticides et des engrais ont permis une amélioration considérable des conditions de travail des agriculteurs. Evidemment aussi, la dépendance aux investissements s’est accru et le recourt aux pesticides peut générer des maladies et aggraver la crise écologique. Rationaliser en offrant un avenir à la filière agricole, en harmonie avec les êtres humains et avec la nature, est donc une nécessité urgente. Le faire avec les agriculteurs, c’est-à-dire les premiers concernés mais aussi les travailleurs du secteur, en est un prérequis.

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27.05.2025 à 11:33

LA LETTRE DU 27 MAI

la Rédaction

Loi Duplomb : l’avenir de l’agriculture ne se fera pas sans les agriculteurs
Texte intégral (1327 mots)

Loi Duplomb : l’avenir de l’agriculture ne se fera pas sans les agriculteurs

par Pablo Pillaud-Vivien

En débat à l’Assemblée nationale après avoir été voté au Sénat, le texte Duplomb révèle les impasses écocidaires de la droite et le manque de lien de la gauche avec les agriculteurs.

« Lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur» : tel serait l’objet central de la proposition de loi du sénateur Les Républicains, Laurent Duplomb. Dans sa version sortie de la Haute Chambre, le texte prévoit de réintroduire certains pesticides (dont les néonicotinoïdes, interdits en 2018), la possibilité d’épandage par drones et la construction facilitée de mégabassines. Il est aussi proposé l’affaiblissement de l’indépendance de l’Anses, autorité en charge d’examiner les demandes d’autorisation des produits phytopharmaceutiques.

A l’Assemblée nationale, la gauche était à pied d’oeuvre pour modifier la future loi. Plus de 2000 amendements avaient ainsi été déposés par le groupe Ecologiste et social et les insoumis notamment. Pour parer l’éventualité d’un texte complètement remanié, la droite l’a rejeté par 49.3 (alors qu’elle était pour !) pour s’en remettre en commission mixte paritaire à la première initiale. Les principaux syndicats d’agriculteurs, la FNSEA, les Jeunes Agriculteurs notamment, sont largement favorables au texte Duplomb et travaillent activement avec la droite politique pour peser dans le débat. La Coordination rurale aussi, même si elle est moins à la manoeuvre en ce moment. Seule la Confédération paysanne, classée à gauche, s’y oppose.

Les questions de souveraineté sont au centre du débat politique. Notre alimentation en est l’un des piliers. A gauche, les programmes sont clairs en la matière, que ce soit chez les écologistes ou chez les insoumis : il faut que la France se dote d’un projet alternatif en matière agricole. Les Français comme les agriculteurs le savent : leur survie passent par la qualité de leur production, écologiquement soutenable, dans un cadre économique qui assure au travail une juste rémunération. Dont acte. Mais là où le bât blesse, c’est que l’organisation de la lutte de gauche dans ce secteur relève davantage du registre des idées que du mouvement social.

Lors des élections syndicales de janvier dernier, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs ont perdu la majorité des suffrages, mais conserve leur domination avec 46,7% des suffrages recueillis. La Coordination rurale, qui a axé sa campagne sur une dénonciation de la co-gestion avec l’Etat, a obtenu 29,9% des voix. La Confédération paysanne, proche de la gauche, stagne à 20,5%.

Si la gauche veut avoir voix au chapitre agricole, elle a besoin des agriculteurs. Or, aujourd’hui, comme depuis trop longtemps, ce n’est plus vraiment le cas : agronomes et scientifiques sont davantage convoqués que celles et ceux qui travaillent la terre. Voire ils sont mis en opposition.

Le modèle d’agrobusiness, qui découpe les terres arables en grandes exploitations pour une toujours plus forte rentabilité, tend à devenir majoritaire. Selon l’INSEE, les très grandes exploitations valorisent désormais 36 % du territoire agricole et sont en augmentation constante. Dans le même temps, les mobilisations pour dénoncer les difficultés à vivre se multiplient sans que les « plans » gouvernementaux n’apportent de réponse valable et pérenne.

Bien sûr, la mécanisation comme l’introduction des pesticides et des engrais ont permis une amélioration considérable des conditions de travail des agriculteurs. Evidemment aussi, la dépendance aux investissements s’est accru et le recourt aux pesticides peut générer des maladies et aggraver la crise écologique. Rationaliser en offrant un avenir à la filière agricole, en harmonie avec les êtres humains et avec la nature, est donc une nécessité urgente. Le faire avec les agriculteurs, c’est-à-dire les premiers concernés mais aussi les travailleurs du secteur, en est un prérequis.

Pablo Pillaud-Vivien

DROITARD DU JOUR

Contre la dette, Bayrou nous ressort ses vieilles recettes (qui ne marchent pas)

C’est une sorte de marronnier de la droite : François Bayrou (premier ministre pour ceux qui auraient oublié) a annoncé ce matin un plan pluriannuel de redressement des finances publiques. Exit le référendum sur le sujet qu’il avait proposé il y a un mois et qu’Emmanuel Macron avait poliment envoyé balader. Et dans son interview sur BFMTV-RMC, de ressortir les mêmes billevesées que d’habitude : protéger les entreprises, revoir les dépenses publiques et mettre en place une TVA sociale… Vous savez cette taxe profondément inégalitaire puisque tout le monde la paie à égalité sur les produits de consommation, peu importe son niveau de richesse ? Bayrou veut demander « un effort à tous les Français »… sauf que, n’en déplaise au premier ministre, on n’est pas tous égaux dans le travail et dans la vie. Pour certains (c’est-à-dire les plus riches), vas-y François, tu peux y aller et taxer tout ce que tu veux. Mais n’oublie pas que d’autres (les plus pauvres) galèrent déjà sévèrement : mettre tous les Français à égalité devant une TVA réévaluée, c’est donc profondément inégalitaire. Mais ce qu’il y a de plus terrible, c’est que dans le moment, c’est cette vieille droite aux recettes réactionnaires qui occupe tout l’espace politique. On a besoin d’air là, vite la gauche !

P.P.-V.

ON VOUS RECOMMANDE…


Il est des films puissants qui disent mieux la France que beaucoup de discours politiques. Les Misérables de Ladj Ly est de ceux-là : il raconte les mythes et les légendes d’un présent complexe, redonne une ampleur au cinéma de fiction français. Mieux : il nous aide à croire que demain est possible. Un film à voir, revoir et rerevoir sur Arte.

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27.05.2025 à 11:31

La gauche a-t-elle le luxe de la division ?

Catherine Tricot

La gauche est divisée... Merci, on est au courant. Pourtant elle n'a pas le choix que de s'unir pour gouverner. Assumer ces désaccords, trancher les lignes et définir un projet commun, c'est l'objet d'une primaire sincère.
Texte intégral (682 mots)

par Catherine Tricot

La gauche est divisée… Merci, on est au courant. Pourtant elle n’a pas le choix que de s’unir pour gouverner. Assumer ces désaccords, trancher les lignes et définir un projet commun, c’est l’objet d’une primaire sincère.

L’élection haut la main de Bruno Retailleau nous informe que désormais, le danger est double : LR et RN. Au soir de son élection, le nouveau président des LR déclarait que son ennemi, c’était la gauche et qu’il voulait revenir au clivage gauche/droite après avoir affirmé son accord avec le RN sur l’immigration et la sécurité. Les Etats-Unis nous montrent qu’un président peut venir d’un parti qui s’appelle « républicain » et mettre en cause gravement la République. La gauche ne peut être tranquille et doit préparer une alternative solide au RN et à la droite radicalisée.

Dans ces circonstances, la gauche peut-elle envisager de se passer d’une partie d’elle-même ? Certainement pas. Depuis des années, la gauche au grand complet peine à dépasser les 30% d’électeurs. Elle est très affaiblie dans certains territoires et catégories sociales. Comment imaginer changer la vie sans le monde populaire, seulement avec les habitants des grandes métropoles ? La gauche a besoin d’élargir ses bases, sociales et politiques, sûrement pas de dresser des murs en son sein. 

La gauche est-elle divisée ? Oui. L’est-elle plus qu’en 1936 ou en 1981 ? Pas certain. Les résultats de Jean-Luc Mélenchon en 2017 comme en 2022 montrent que les électeurs de gauche sont largement d’accord pour tirer un trait sur le social-libéralisme et sur la politique de l’offre. Dans le même temps, certaines divisions se sont estompées, comme sur l’Europe, sur l’Otan. Il en reste de nombreuses. Elles relèvent de désaccords sur la société, le changement, la politique. Un exemple : l’égalité est au cœur des valeurs de toute la gauche. Pour les uns, cela donne des ambitions de redistribution ; pour les autres, des raisons de changement structurel. Ces différences n’empêchent pas de lutter ensemble pour des mesures qui font progresser l’égalité. On peut être d’accord sur un programme de législature et conserver des désaccords d’orientation politique. Sinon, les gauches ne formeraient qu’un seul et même parti. Ceux qui pointent l’existence de différences de visions ont raison. Ils se trompent s’ils pensent que cela interdit de s’allier. 

Quel avenir aurait-elle si elle ne surmontait pas ses divisions ? Raphaël Glucksmann a tort de penser qu’avoir un candidat commun à la présidentielle serait une feinte.  Ce serait le cas si les désaccords n’étaient pas assumés et circonscrits. Le 2 juillet, Lucie Castets a invité toute la gauche à discuter. Ces rencontres ne peuvent déboucher sur un programme commun, quand bien même existe le programme du NFP. La proposition d’une primaire ne peut se réduire à choisir un.e candidat.e parmi ceux qui sont d’accord avec « le programme ». Elle doit permettre de trancher entre les priorités et les logiques de fond. Il est indéniable que de choisir pour représenter la gauche Glucksmann ou Ruffin, Mélenchon ou Autain ne découlera pas sur la même proposition politique. Celui ou celle qui sera désigné aura toute légitimité pour arbitrer et travailler à rassembler toute les gauches et les écolos. 

D’ici 2027, il reste suffisamment de temps pour que les candidat.es exposent leur projet, qu’ils soient soumis au vote de nous tous qui avons voté NFP. Un tel processus de choix politique, sincère et rassembleur, est le seul à même de faire face à la menace. 

Catherine Tricot

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