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25.03.2025 à 16:43

Histoire : quand la France convoitait les richesses ukrainiennes

Gwendal Piégais, Post-doctorant en histoire contemporaine, University College Dublin

Plus de cent ans avant Donald Trump, la France avait envisagé de conditionner son soutien à l’Ukraine, alors en lutte pour son indépendance face à l’Armée rouge, à des contreparties en ressources naturelles.
Texte intégral (1889 mots)
_Récolte en Ukraine_ (1896), de Mykola Pymonenko. Les importantes ressources naturelles du traditionnel « grenier à blé de l’Europe » ont suscité, à de nombreuses reprises dans l’histoire du pays, les convoitises de ses voisins. Mykola Pymonenko/Wikipedia

L’administration Trump exerce un brutal chantage à la paix sur le président Zelensky : un cessez-le-feu contre des terres rares voire des centrales nucléaires. Pour choquant que nous apparaisse ce troc, il n’a malheureusement rien d’inédit dans l’histoire de l’Ukraine. Il y a plus de cent ans, les riches ressources du pays étaient déjà au cœur de nombreux marchandages entre la jeune République populaire ukrainienne et les puissances occidentales – au premier rang desquelles la France.


Née en novembre 1917 sur les décombres d’un Empire russe ravagé par la Grande Guerre puis par la révolution, la jeune République populaire ukrainienne tente par tous les moyens d’obtenir des soutiens extérieurs dans sa lutte pour sa souveraineté. Elle signe en 1918, à Brest-Litovsk, une paix séparée avec les puissances centrales (Allemagne, Autriche-Hongrie, Empire ottoman, Bulgarie). Surnommé « Paix du pain », ce traité reconnaît l’indépendance et la souveraineté de l’Ukraine en échange du versement à l’Allemagne et à l’Autriche-Hongrie d’un million de tonnes de céréales. Déjà, les ressources naturelles ukrainiennes étaient l’objet d’un marchandage.

Malgré l’armistice de Rethondes, qui rend caduc ce traité, cet épisode n’en reste pas moins représentatif du rapport des puissances européennes à l’Ukraine au moment de sa première indépendance. Cette perception de ce pays comme un grenier à blé ou comme une immense mine à exploiter, les dirigeants de la République populaire ukrainienne tentent justement d’en tirer profit.

Qui donc est ce « général Kharkov » ?

Ils sont bien conscients qu’il faut que l’Ukraine surgisse – a minima mentalement – sur une carte de l’Europe orientale où la Russie, en tant qu’ancienne alliée et partenaire privilégiée de la France et de la Grande-Bretagne, occupe tout l’espace. Rappelons qu’à la conférence de Versailles, le premier ministre britannique Lloyd George s’était tourné vers un de ses collaborateurs pour demander qui donc était ce « général Kharkov », ignorant qu’on évoquait là une ville en Ukraine.


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Mais les territoires ukrainiens occupaient une place de choix dans la géographie économique des entrepreneurs et politiciens français rêvant de sucre, charbon, et blé en abondance, à une époque où les craintes de pénurie et de tensions économiques sont grandes. C’est donc par l’économie et l’industrie que les diplomates ukrainiens tentent de défendre la cause de l’Ukraine.

Carte des revendications ukrainiennes, 1919. Carte des revendications ukrainiennes, « Mémoire sur l’indépendance de l’Ukraine présenté à la Conférence de la Paix par la délégation de la République ukrainienne », 1919

Après le retrait des Allemands et des Austro-Hongrois de la scène ukrainienne, l’Armée rouge progresse vers les rivages de la mer Noire. C’est alors que le directoire ukrainien – avec à sa tête Volodymyr Vynnytchenko, puis Symon Petlioura – prend langue avec la coalition menée par la France, qui a débarqué en décembre 1918 à Odessa et en Crimée pour soutenir les forces antibolchéviques. Les diplomates ukrainiens arrivent à Paris pour présenter leurs revendications à la Conférence de la paix, mais également à Istanbul ou à Athènes pour défendre leur cause auprès des Alliés.

Les intérêts économiques français en Ukraine

Les richesses ukrainiennes sont longuement décrites dans de nombreuses brochures, comme dans ce mémoire transmis au Quai d’Orsay en août 1919, intitulé « Relations économiques entre l’Ukraine et la France » par Woldemar Timochenko. Membre de l’Institut économique de l’Académie des sciences d’Ukraine, il tente de démontrer qu’une bonne part des intérêts économiques français dans l’Empire russe sont en fait positionnés dans les industries métallurgiques et minières ukrainiennes.

Conscient de l’importance des emprunts russes pour l’épargnant français, Timochenko propose de surcroît que l’Ukraine endosse cette dette, au moment où Lénine la répudie. Un règlement de ces créances imposerait à l’Ukraine de verser chaque année une centaine de millions de francs, ce que l’académicien estime possible « en augmentant ses exportations en France ». Timochenko pense ainsi attirer le soutien de la France afin de la lier au destin de l’Ukraine.

Cette entreprise de sensibilisation à la cause ukrainienne, et à l’intérêt que Paris pourrait retirer de son soutien, n’est pas l’apanage de quelques intellectuels ou diplomates. Alors que les forces ukrainiennes affrontent l’Armée rouge, des coopératives et entreprises installées en Ukraine prennent contact avec le ministère français des affaires étrangères pour proposer à la France des « marchandises et des matières premières des régions ukrainiennes ».

L’objectif est d’ouvrir au gouvernement ukrainien une ligne de crédit pour puiser dans les stocks de l’armée française en cours de liquidation afin d’équiper l’armée ukrainienne « en vue d’une lutte efficace contre le bolchevisme. »

Ces démarches ne sont pas sans effet à Paris, puisque le ministère de l’agriculture et du ravitaillement fait savoir au Quai d’Orsay, en septembre 1919, qu’il « attacherait un très grand prix » à recevoir des denrées alimentaires ukrainiennes. L’Ukraine trouve à Paris des interlocuteurs certes favorables, mais sans doute pas aussi pressés qu’elle le souhaiterait.

Car, en Ukraine, les armées de Petlioura affrontent les bolcheviks autant que les armées blanches, mais sont surtout terrassées par le typhus. Lorsque le directoire propose des tonnes de « sucre ou de graines de betteraves » à la France, c’est pour arracher à Paris des « marchandises de première nécessité » telles des chaussures, des vêtements, des médicaments, des pansements.

Une vision coloniale ?

La République populaire ukrainienne n’obtint jamais de la France le soutien escompté, Paris misant dans la région à la fois sur le nouvel État polonais et sur l’Armée des volontaires commandée par le général Denikine, puis par le général Wrangel. Après la défaite définitive des forces antibolcheviques en Crimée en 1920, c’est une Ukraine soviétique et une Pologne ressuscitée qui finissent par prendre le contrôle des territoires revendiqués par la République populaire ukrainienne.

La France adopta également une approche transactionnelle dans son soutien aux forces de Denikine qui combattait pour le rétablissement d’une Russie unie, intégrant l’Ukraine. Là encore, le soutien français n’était pas gratuit. Ainsi, plusieurs accords avec Denikine, puis avec Wrangel, prévoyaient que la France offre un soutien matériel accru à l’Armée des volontaires, en échange d’accords commerciaux en faveur de Paris, avec des contreparties industrielles à saisir en Ukraine.

Même dans leurs rapports avec l’ancien allié russe, les diplomates et militaires français restaient pétris d’une vision impériale et, pour certains d’entre eux, coloniale. Le personnel français en contact avec les Ukrainiens comme avec les Russes avait souvent eu, en effet, une expérience antérieure aux colonies.

Alors en mission auprès du général Wrangel, à l’été 1920, le général Mangin – célèbre en France pour sa promotion de la Force noire – ne manque pas de décrire l’Ukraine en des termes qu’il aurait pu employer pour une colonie française. Il vante ainsi tout l’intérêt qu’il y a, pour la France, à saisir « les richesses minérales de ses tréfonds. […] », à exploiter ce pays « très riche mais [qui] attend encore son heure de développement. » Pour bien des diplomates, politiciens et militaires occidentaux de l’époque, l’Ukraine n’attendait pas son État national, mais son digne exploitant.

The Conversation

Gwendal Piégais a reçu des financements du European Research Council.

25.03.2025 à 16:40

Slovaquie : la société civile vent debout face au pouvoir autoritaire et prorusse

Radovan Gura, Maître de conférences en sciences politiques, Univerzita Mateja Bela, Banská Bystrica

Gilles Rouet, Professeur des universités, Directeur, Institut Supérieur de Management – IAE de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines

La société civile slovaque se mobilise pour protester contre la politique illibérale mise en oeuvre par le premier ministre populiste Robert Fico. Elle appelle à sa démission.
Texte intégral (2129 mots)

La Slovaquie est traversée par une crise sociale et politique majeure. Pour protester contre le gouvernement, et plus particulièrement contre le premier ministre, Robert Fico, la société civile se mobilise : manifestations massives, multiplication des pétitions… autant de moyens d’action pour dénoncer les dérives autoritaires de Fico et appeler à sa démission.


Alors que la société slovaque apparaît aujourd’hui profondément divisée, la scène politique du pays se caractérise par une instabilité croissante et une montée en puissance des discours populistes. Plusieurs événements successifs ont attisé les mécontentements et les protestations qui se focalisent désormais sur la personnalité du premier ministre, Robert Fico.

Les élections législatives d’octobre 2023 ont vu s’affronter deux visions radicalement opposées de la politique slovaque : d’un côté, des partis progressistes qui prônent une plus grande intégration européenne et des réformes en profondeur ; de l’autre, des formations populistes et eurosceptiques qui développent un discours nationaliste et identitaire, critique envers l’UE et l’OTAN, et très compréhensif à l’égard de la Russie de Vladimir Poutine. Au premier rang de celles-ci, on retrouve le SMER-SD, le parti social-démocrate et populiste de Robert Fico, qui avait déjà exercé la fonction de premier ministre de 2006 à 2010, puis de 2012 à 2018. En capitalisant sur le mécontentement d’une partie de l’électorat, le SMER-SD a réussi à mobiliser un large soutien, notamment dans les régions les plus défavorisées du pays, et à porter une nouvelle fois son leader à la tête du gouvernement.


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En 2024, l’élection présidentielle, qui s’est soldée par la victoire de Peter Pellegrini, un allié de Robert Fico (le rôle du président est moins important, en matière de pouvoir exécutif, que celui du premier ministre), puis les élections européennes, où le SMER-SD a été légèrement devancé par le parti libéral et pro-UE Slovaquie progressiste, ont encore accentué les divisions. Celles-ci avaient été exacerbées, entre les deux scrutins, par l’attentat qui a failli coûter la vie à Robert Fico, le 15 mai 2024. Les discours de haine et les attaques personnelles se sont ensuite multipliés.

Le pouvoir est actuellement exercé par une coalition gouvernementale très fragile, regroupant des partis aux idéologies parfois divergentes, alors que la Slovaquie doit concilier ses intérêts nationaux avec les exigences de l’Union européenne. S’y ajoute la corruption, un problème endémique qui continue d’éroder la confiance des citoyens dans les institutions et freine le développement du pays.

Mobilisations et pétitions comme moyen de contestation

Lors de ces différentes élections, le SMER-SD a surtout bénéficié du soutien des habitants des zones rurales et des personnes âgées. Ces dernières ont été séduites par son discours populiste sur la protection sociale, le rejet des élites, la critique de l’immigration et la priorité donnée à « la paix aux frontières slovaques » (entendre : le refus d’un alignement sur l’appui de la plupart des pays de l’UE à l’Ukraine en guerre), discours largement relayé par les médias progouvernementaux et sur les réseaux sociaux, y compris par l’usage de fake news.

Face à la montée du populisme et à l’inquiétude liée à la fragmentation de la population, une partie de la société civile slovaque se mobilise depuis les dernières élections législatives pour défendre les valeurs démocratiques et les droits humains, en particulier la protection contre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle.

Des manifestations et des actions citoyennes sont régulièrement organisées pour exprimer le mécontentement de la population et demander des changements. Des dizaines de milliers de personnes se rassemblent chaque semaine, surtout à Bratislava et à Kosice, la deuxième ville du pays. D’abord réunies pour protester contre la suppression du bureau du procureur spécial en charge de la lutte anticorruption, elles ont ensuite dénoncé les attaques du pouvoir contre les médias indépendants et l’alignement de Fico sur Vladimir Poutine dans le dossier ukrainien, avant d’exprimer leur opposition radicale à Robert Fico et à son gouvernement au sens large.

Dans le même temps, de nombreuses initiatives ont été prises pour promouvoir la démocratie, les droits humains et les valeurs européennes. À travers l’organisation de campagnes de sensibilisation et de débats publics, les ONG, mouvements citoyens et médias indépendants jouent actuellement un rôle essentiel dans l’information des citoyens. Le conflit qui a opposé une partie de la société civile au ministère de la culture sur des questions liées à la liberté d’expression et à la protection du patrimoine culturel a mis en évidence les tensions entre les défenseurs des valeurs démocratiques et un gouvernement accusé de vouloir restreindre les libertés individuelles.

En décembre, l’apparition de Robert Fico à la télévision russe et la confirmation de sa présence aux commémorations du Jour de la victoire du mois de mai 2025 à Moscou ont suscité des réactions importantes. Les partis d’opposition appellent à manifester partout en Slovaquie. Malgré le froid hivernal, les manifestations rassemblent plus de 60 000 manifestants à Bratislava et des dizaines de milliers dans les autres villes.

Une autre forme de protestation a pris une ampleur inédite en Slovaquie : pétitions et lettres ouvertes se sont multipliées, s’adressant au gouvernement slovaque et s’attaquant à la personnalité même de Robert Fico.

Magda Vasaryova, ancienne secrétaire d’État aux affaires étrangères et ambassadrice en République tchèque, dénonce ainsi, dans une pétition publiée début novembre 2024, les agissements du premier ministre :

« Nous protestons contre ses démarches volontaristes qui depuis longtemps discréditent la République slovaque auprès des alliés et des États coopérants […]. Aucun pouvoir obtenu lors d’élections libres ne peut être transformé en une tentative de gouverner à vie au mépris des règles d’un État démocratique. »

Une deuxième pétition est initiée par des psychiatres et psychologues qui s’alarment du comportement du premier ministre, « caractérisé par un style de plus en plus autoritaire, la manipulation des faits, le mensonge, la diffamation » :

« Votre comportement politique et vos positions proclamées polarisent la société et […] génèrent frustration et mécontentement. Il semble que l’agressivité et l’explosivité émotionnelle dans vos apparitions publiques soient devenues plus prononcées après la tentative d’assassinat dont vous avez été victime. […] Nous espérons que vous développerez votre capacité d’introspection et que vous aurez la possibilité de corriger votre comportement politique, y compris d’envisager de quitter la haute politique. »

D’autres pétitions et lettres ouvertes réunissent des milliers de signataires – universitaires, entrepreneurs, investisseurs, membres d’associations. Elles traduisent leur indignation vis-à-vis de la gestion des affaires publiques et de la politique étrangère et leur inquiétude face aux attaques verbales contre les ONG et les associations citoyennes qui « rappellent les anciens régimes totalitaires (fascistes et communistes), qui ont suivi des étapes similaires pour établir un ordre politique non démocratique ».

En réaction, les soutiens du gouvernement s’emparent eux aussi de ce nouveau moyen de mobilisation. Ils diffusent leurs propres pétitions, comme celle du 27 janvier 2025, qui dénonce les ONG financées par des « forces étrangères », accusées de remettre en cause la « souveraineté nationale », la « démocratie » et la « stabilité politique » – les manifestations étant, selon eux, organisées « sous l’influence de forces étrangères ».

Quelles perspectives pour le gouvernement Fico ?

En janvier 2025, la Slovaquie a été la cible d’une série de cyberattaques de grande ampleur. Des infrastructures critiques comme les services du cadastre ou la Compagnie générale d’assurance maladie ont été touchés, à différents degrés de gravité.

Robert Fico y a vu un complot visant à aggraver les tensions et à déstabiliser la République slovaque. Il a dénoncé une tentative de coup d’État grâce à un plan d’occupation de bâtiments gouvernementaux, de blocage des routes et d’organisation de grèves nationales. Pour lui, les responsables de ces cyberattaques ne sont autres que les représentants de l’opposition, d’ONG financées par l’étranger, d’une grande partie des médias antigouvernementaux slovaques et d’agents étrangers – ceux-là mêmes qui participeraient aux désordres en Géorgie ou qui auraient provoqué le soulèvement populaire en Ukraine en 2014.

En outre, le gouvernement slovaque continue de s’isoler sur la scène européenne, notamment en raison de ses prises de position vis-à-vis de l’Ukraine ou de l’État de droit. Les tensions peuvent encore s’aggraver si le gouvernement persiste dans ses réformes autoritaires et/ou si l’économie continue de stagner. L’UE peut aussi décider d’intensifier sa pression sur le gouvernement et de lancer des procédures contre Bratislava pour atteinte à l’État de droit. Et sans changement de ligne de la part du pouvoir, la mobilisation citoyenne se poursuivra.

La crise politique et sociale actuelle est telle qu’elle pousse une partie du corps social à se mobiliser selon des modalités anciennes (les manifestations) et plus récentes (les pétitions en ligne). À travers ces mobilisations, la société civile s’attaque non seulement à une ligne idéologique contestée, mais aussi à la personnalité et au comportement d’un seul homme, le premier ministre. Sa démission, attendue comme en 2018 – elle était alors intervenue après le scandale national provoqué par l’assassinat par balles d’un journaliste qui enquêtait sur la corruption du pouvoir, ainsi que de sa fiancée – ne suffirait toutefois pas à résoudre tous les problèmes…

The Conversation

Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.

24.03.2025 à 16:23

L’armée française face à la guerre du futur : sommes-nous prêts ?

Laurent Vilaine, Docteur en sciences de gestion, ancien officier, enseignant en géopolitique à ESDES Business School, ESDES - UCLy (Lyon Catholic University)

Si la France souhaite que son armée demeure puissante et autonome, une hausse significative du budget de la défense s’impose  ; mais ce ne sera pas suffisant en soi.
Texte intégral (2643 mots)

La France est une puissance militaire crédible et reconnue. Mais son armée ne pourrait pas résister longtemps à un conflit de haute intensité. Dans le contexte actuel – retour de la guerre en Europe, affaiblissement de l’OTAN, imprévisibilité de l’administration Trump –, Paris a décidé d’accroître significativement ses dépenses de défense.


L’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022, nous a rappelé que la paix n’est pas une situation normale, même après tant de décennies de paix sur le continent. Par ailleurs, le retour à la Maison Blanche de Donald Trump en janvier 2025 apparaît comme le possible début d’un renversement d’alliances : d’alliés ancrés dans l’OTAN, les États-Unis semblent s’être rétrogradés au statut de simple partenaire de l’Europe. A minima, la posture de Trump réduit de facto le caractère dissuasif de l’OTAN, la Russie n’étant plus persuadée que Washington, protecteur de l’Europe depuis 1945 soit prêt, le cas échéant, à s’engager militairement pour la défense du Vieux Continent.

Dans ce contexte, la défense française ne peut plus demeurer immobile et l’exécutif français doit pleinement prendre en compte la nouvelle situation géopolitique et la nouvelle donne opérationnelle (guerre de haute intensité sur le territoire européen) sur un plan national, mais également sur un plan européen. Entre atouts évidents mais aussi lacunes structurelles et nécessité d’une plus grande autonomie face à l’affaiblissement de l’OTAN, où en est réellement notre appareil militaire ?

Un modèle d’armée complet et une force crédible

La France reste une puissance militaire reconnue en Europe, avec une armée dotée d’un large spectre de capacités.

Contrairement à certains pays qui ont fait le choix de spécialiser leurs forces, la France conserve un modèle d’armée complet, comprenant une force nucléaire avec une capacité de dissuasion stratégique océanique (sous-marins nucléaires lanceurs d’engins), aérienne et aéronavale ; une armée de terre expérimentée, capable d’opérer en milieux complexes et maîtrisant la coopération interarmes (infanterie, blindée, artillerie) et interarmées (notamment entre l’armée de terre et l’aviation) ; une marine puissante, avec un porte-avions (le Charles-de-Gaulle) ; une flotte de sous-marins d’attaque et des frégates modernes ; et une force aérienne réactive, capable d’opérer rapidement grâce aux Rafale, aux drones et à une logistique de projection éprouvée.

Enfin, l’armée française est la seule armée en Europe à disposer d’une expérience opérationnelle quasi continue. Ces trente dernières années, l’engagement de la France en Bosnie, au Kosovo, dans le cadre des opérations au Sahel (Barkhane), ou encore en Syrie, a permis de roder les unités aux opérations extérieures (OPEX). Ce vécu leur donne une incomparable capacité d’adaptation face à des environnements hostiles.


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Des budgets en hausse, mais des défis financiers majeurs

Pour autant, au regard de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, et face au spectre de nouvelles attaques que le régime de Moscou pourrait lancer une fois son appareil militaire reconstitué dans les années à venir, les capacités de l’armée française demeurent insuffisantes.

En réponse aux nouvelles menaces, la France a adopté, le 13 juillet 2023, une loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 qui prévoit un budget de 413 milliards d’euros sur sept ans. Il s’agit d’un effort notable visant à moderniser les forces armées françaises et à garantir leur résilience face aux conflits de haute intensité.

Cette LPM est l’expression d’une augmentation significative des dépenses militaires : elle annonce une hausse progressive du budget annuel de la défense, qui atteindra 69 milliards d’euros en 2030, contre environ 44 milliards d’euros en 2022. L’objectif est de renforcer trois axes majeurs.

Premièrement, la guerre en Ukraine a fait apparaître une évidence : la France ne dispose pas de stocks de munitions suffisants pour tenir une confrontation de haute intensité au-delà de quelques jours. La LPM prévoit donc une augmentation des stocks de munitions conventionnelles, incluant les obus de 155 mm. La modernisation de l’artillerie se poursuit avec l’achat de nouveaux canons Caesar qui sont, par ailleurs, un véritable succès à l’exportation, compte tenu de leur précision extraordinaire, largement médiatisée depuis 2022. Les capacités de guerre électronique incluant des outils de brouillage seront elles aussi renforcées pour contrer les nouvelles menaces.

Deuxièmement, la LPM prévoit également une augmentation de la disponibilité des équipements, des infrastructures et de l’entraînement des forces. Cela inclut le maintien des chars Leclerc modernisés et une amélioration de l’entraînement des troupes, avec un accroissement des exercices interarmées et interalliés.

L’innovation technologique et la modernisation de la dissuasion sont également un pan important de la dernière LPM. Cette dernière prévoit le développement, conjointement avec l’Allemagne du Système de combat aérien du futur (Scaf) – un système d’armes aériennes interconnectées pour remplacer le Rafale –, ainsi que le renforcement, dont le caractère indispensable est devenu évident avec la guerre en Ukraine, de la flotte de drones de combat et de surveillance, qui intégrera des systèmes autonomes avancés.

Les Échos, « Trois choses à savoir sur le Scaf, le futur avion de chasse européen » (2023).

En outre, le programme de sous-marins nucléaires de nouvelle génération se poursuit, de même que le développement du nouveau missile intercontinental M51.3, garantissant la crédibilité de la dissuasion française.

Un effort encore insuffisant pour une autonomie complète

La montée en puissance de l’armée française est réelle, mais plus qualitative que quantitative. L’augmentation du volume d’unités, de chars et d’avions de combat n’est pas encore à l’ordre du jour, alors que les armées polonaise et allemande, elles, se sont clairement donné cet objectif.

En outre, plusieurs défis majeurs demeurent. Même en cas de volonté de montée en capacités, ce que le président Macron a laissé sous-entendre quand il a récemment évoqué une augmentation significative de notre part du PIB consacrée à la défense, la capacité industrielle à répondre aux besoins pose question.

Notre outil industriel doit être adapté pour produire plus d’armes et de munitions : plusieurs années seront nécessaires pour augmenter notre capacité de manière substantielle. En outre, la France n’est pas souveraine en matière de composants critiques (technologies numériques et semi-conducteurs). Autre fragilité industrielle : les divergences entre États membres au sujet de projets communs comme le Scaf et le char du futur franco-allemand MGCS, ce qui ralentit leur mise en œuvre. En effet, les industriels rencontrent des difficultés à converger sur un schéma d’allocation des briques du projet selon une logique de répartition par nationalités.

L’incertitude sur l’engagement des États-Unis

Historiquement, la France a toujours défendu une position de relative indépendance vis-à-vis de l’OTAN. Mais avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, la question de la crédibilité de l’OTAN devient encore plus pressante.

Le président américain a déjà déclaré que les États-Unis ne garantiraient plus automatiquement la défense des pays européens en cas d’agression et laissé entendre que ces derniers devaient assumer seuls leur défense, sous peine de ne plus bénéficier du parapluie militaire américain, les exhortant à consacrer plus de 5 % de leur PIB à la défense. Un niveau qu’aucun pays, y compris la Pologne et les États-Unis eux-mêmes, n’est parvenu à atteindre.

Part des dépenses militaires dans le PIB des pays membres de l’OTAN en 2014, et leurs estimations en 2024. Mandy Spaltman/The European Correspondant

Parallèlement, l’attitude conciliante de Donald Trump vis-à-vis de Vladimir Poutine inquiète particulièrement les États d’Europe centrale et orientale, qui comptaient jusqu’ici sur l’OTAN pour leur protection.

La France, l’Europe et l’industrie de défense

La France et l’Europe peuvent-elles se défendre seules ?

La seule modernisation et la montée capacitaire de quelques armées européennes (française, allemande, polonaise…) en ordre dispersé ne peut suffire. Face à cette situation, une montée en puissance de la coopération militaire européenne devient impérative.

Dans cette optique, plusieurs axes de renforcement sont envisagés. Il apparaît nécessaire d’accélérer l’intégration des armées européennes en renforçant les coopérations bilatérales et en multipliant les exercices communs ; et de développer des fonds de défense mutualisés, pour permettre aux États européens d’investir ensemble dans des équipements stratégiques, comme l’a proposé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

Ces politiques seraient de nature à établir une politique d’armement plus intégrée afin d’éviter la dispersion des programmes militaires et de garantir une meilleure interopérabilité des forces. La France, par son poids militaire, doit jouer un rôle central dans cette vision, mais elle ne pourra porter seule l’autonomie stratégique européenne. Des partenaires comme l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne devront également prendre leurs responsabilités pour bâtir une défense commune efficace.

Il reste que face à ce besoin d’autonomie stratégique, des interrogations demeurent : certains pays ne seront-ils pas tentés d’amadouer Donald Trump en lui promettant d’acheter davantage de matériels américains ?

De nombreux pays européens sont déjà dépendants des États-Unis en matière d’armement, en termes d’achat de matériel, d’utilisation et de maintenance. Cette dépendance va durer. Néanmoins, pour les achats futurs, ces pays devront s’interroger sur la viabilité d’une telle dépendance.

Une bonne nouvelle dans toute cette incertitude : le futur chancelier allemand Friedrich Merz semble se rapprocher des positions du président Macron en faveur d’une souveraineté européenne en matière de défense.

Un tournant stratégique à ne pas manquer

La France reste une puissance militaire crédible, avec des forces bien entraînées et un appareil technologique avancé. Mais l’armée française serait incapable de résister plus de quelques jours à un conflit de haute intensité. Avec une OTAN affaiblie et une politique américaine pour le moins agressive vis-à-vis du Vieux Continent, la France et l’Europe doivent impérativement renforcer leurs capacités militaires propres, autant sur le plan qualitatif que quantitatif. L’augmentation du budget de la défense, que l’on peut constater dans plusieurs pays européens, est un bon signe de la prise de conscience nécessaire à une telle évolution. Cependant, il sera nécessaire d’aller plus loin pour garantir une autonomie stratégique réelle, quand bien même des choix budgétaires douloureux devront être opérés.

L’armée française est-elle prête ? Elle l’est pour des engagements limités et rapides, mais elle doit accélérer sa transformation, en concertation étroite avec ses partenaires européens, pour garantir sa souveraineté en cas de conflit majeur.

La proposition du ministre français de la défense de porter à terme le budget de la défense à 100 milliards d’euros par an est un signal fort.

The Conversation

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24.03.2025 à 16:16

Le Mali, le Niger et le Burkina Faso quittent la Francophonie : rupture définitive ou crise passagère ?

Prof. Roger K. Koudé, Titulaire de la Chaire UNESCO « Mémoire, Cultures et Interculturalité » Professeur de Droit international à l’Institut des droits de l’homme de Lyon (IDHL) Université Catholique de Lyon, UCLy (Lyon Catholic University)

Les trois pays sahéliens, qui ont tous trois joué un rôle important dans l’histoire de l’OIF, viennent d’annoncer leur départ de la Francophonie.
Texte intégral (2025 mots)

Contrecoup de la dégradation des relations entre la France et ces trois États, dirigés par des militaires arrivés au pouvoir au cours de ces dernières années grâce à des putschs, le Mali, le Niger et le Burkina Faso sortent de l’Organisation internationale de la Francophonie. Un coup d’éclat d’autant plus marquant que tous trois en ont été des acteurs majeurs au cours de sa longue histoire.


À quelques heures de la célébration annuelle de la Journée internationale de la Francophonie, trois États africains du Sahel (le Niger, le Burkina Faso et le Mali) se retirent presque simultanément de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

Le retrait de ces trois États, tous membres de l’Alliance des États du Sahel (AES), semble s’inscrire dans la continuité de la dégradation des relations entre ces pays et la France, depuis la prise de pouvoir par les militaires, successivement au Mali en 2020, au Burkina Faso en 2022 et au Niger en 2023.


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Si, dans sa lettre adressée aux ambassadeurs de son pays, le 17 mars dernier, le secrétaire général du ministère nigérien des affaires étrangères indique sobrement que « le gouvernement nigérien a décidé souverainement du retrait du Niger de l’Organisation internationale de la Francophonie », ce à quoi la porte-parole de la Francophonie a réagi en estimant que l’Organisation était le « dommage collatéral d’une situation géopolitique qui la dépasse », le retrait du Mali est, en revanche, soutenu par une accusation directe à l’égard de l’Organisation, exprimée dans la note verbale du ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République du Mali, adressée au ministère de l’Europe et des affaires étrangères de la République française, le 18 mars 2025 :

« L’OIF, au lieu d’accompagner le Mali dans la réalisation des aspirations légitimes de son peuple, s’est illustrée par l’application sélective des sanctions et le mépris de la souveraineté du Mali. »

S’agit-il, pour ces trois États, d’une rupture de fond avec la Francophonie ou d’une crise diplomatique passagère liée essentiellement à la dégradation des relations entre ces pays du Sahel et la France, qui se trouve être le pays hôte du siège de l’OIF ? De même, le timing choisi, à savoir l’approche de la Journée internationale de la Francophonie que l’on célèbre annuellement dans tout l’espace francophone, est-il vraiment fortuit ou doit-on y déceler un message quelconque ? Ce triple retrait risque-t-il d’avoir quelque incidence dans d’autres pays francophones du continent africain qui, faut-il le rappeler, est l’épicentre et le cœur battant de la Francophonie ?

Le Niger, État fondateur et berceau de la Francophonie institutionnelle

Avec le retrait du Niger, la Francophonie perd non seulement l’un de ses membres fondateurs mais aussi, dans une certaine mesure, le pays d’où elle tire ses origines : il convient de rappeler que c’est à Niamey, sous l’impulsion du président nigérien de l’époque, Hamani Diori, l’un des pères de la Francophonie institutionnelle, que l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), dont l’OIF est l’héritière, a vu le jour, le 20 mars 1970.

Les relations entre la France et le Niger, suspendu de l’Organisation francophone depuis le coup d’État militaire du 26 juillet 2023 n’ont cessé de se dégrader jusqu’au retrait du 17 mars 2025. Un départ que la porte-parole de l’OIF Oria K. Vande Weghe a jugé regrettable lors d’une intervention sur RFI, tout en laissant entendre que la coopération avec Niamey ne prenait pas nécessairement fin pour autant :

« La volonté de la secrétaire générale, ce sera de solliciter l’avis des États pour voir dans quelle mesure l’OIF peut rester engagée auprès des populations de ces pays-là. On a des projets en cours. Le retrait du Niger des instances de la Francophonie, est-ce que cela doit nécessairement pénaliser les populations auxquelles nous sommes attachées ? L’Organisation internationale de la Francophonie a à cœur les communautés francophones, y compris dans les pays non membres. Donc, il n’y a pas de raison que ça cesse pour le Niger. »

Le Mali, autre symbole fort de la Francophonie institutionnelle

Si la note verbale précitée du ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale du Mali accuse l’OIF de s’être « illustrée par l’application sélective des sanctions », le même document contient un rappel historique qui ne manque pas d’intérêt et souligne même l’attachement du Mali aux valeurs et aux idéaux promus par la Francophonie :

« La République du Mali, membre fondateur de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), devenue par la suite l’Organisation internationale de la Francophonie, a contribué, de manière significative, à la construction et au renforcement de cette organisation. Le Mali a, à maintes occasions, démontré son attachement aux valeurs et idéaux promus par la Francophonie. »

Un tel rappel historique et cette convergence de vues soulignée, relativement aux valeurs et idéaux promus par la Francophonie, sont indéniablement une ouverture pour l’avenir des relations entre l’OIF et Bamako qui est le berceau de la Déclaration devenu le texte normatif de référence de la Francophonie. En effet, la Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000 dote l’organisation internationale des moyens d’action en cas de rupture de la légalité démocratique ou de violations graves des droits humains dans un État membre.

La note verbale portant retrait de l’État malien de l’OIF préserve donc une certaine marge pour d’éventuelles discussions futures ; reste à voir quels seraient alors les éléments à partir desquels de telles discussions pourraient incidemment être engagées.

Quid du Burkina Faso ?

Si, pour le moment, rien de particulier ne filtre du retrait du Burkina Faso, intervenu en même temps que celui du Niger, il est presque certain que la problématique soit sensiblement la même que celle des deux autres États du Sahel.

En effet, cet État sahélien, qui est également un membre fondateur de la Francophonie et qui en fut longtemps l’un des piliers, a une grande proximité idéologique avec ses voisins malien et nigérien.

Cette proximité idéologique est en grande partie liée à la prise de pouvoir par l’armée dans ce pays également, à leur opposition commune à l’ancienne puissance coloniale (la France, donc), au retrait concerté de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), dont ils sont aussi des États membres fondateurs, et à la volonté de développer à l’international de nouveaux partenariats ; ce qui va se traduire notamment par un net rapprochement avec la Fédération de Russie.

La récurrence du phénomène de retrait des États des organisations internationales

Le retrait d’un État d’une organisation internationale, tout comme son adhésion, est un phénomène classique qui relève de son imperium, autrement dit de sa souveraineté-liberté. Ce phénomène s’est d’ailleurs régulièrement manifesté dans les relations internationales, y compris au cours de ces dernières années ou décennies.

Ainsi en est-il précisément du retrait effectif des trois États sahéliens du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, le 29 janvier 2025, comme celui du Royaume-Uni de l’Union européenne, depuis le 31 janvier 2020, ou comme celui du Burundi de la Cour pénale internationale (CPI), qui a pris effet à partir du 17 octobre 2017, celui du Royaume du Maroc de l’Union africaine en 1984 et de son retour dans la même organisation en 2017, ou encore celui des États-Unis de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) en 2017 et de leur retour dans la même organisation en 2023, etc.

Il n’est donc pas impossible que les trois États africains du Sahel qui viennent de se retirer de l’Organisation internationale de la Francophonie réintègrent un jour cette même organisation dont ils sont historiquement, nous l’avons souligné, des membres fondateurs ainsi que des piliers et des symboles importants.

Si l’idée que la Francophonie serait une victime collatérale « d’une situation géopolitique qui la dépasse » peut être jugée fondée, l’Organisation francophone peut aussi éventuellement en tirer les enseignements nécessaires et prendre des dispositions relatives à des situations de cet ordre qui, malheureusement, ne manquent pas dans les organisations internationales.

Reste alors l’accusation récurrente et épineuse du « deux poids-deux mesures » à laquelle les organisations internationales sont en réalité presque toutes confrontées et qui se trouve au cœur du retrait des trois pays sahéliens qui estiment infondées les critiques exprimées à leur égard par l’OIF depuis que des militaires y ont pris le pouvoir. En effet, de telles accusations ont été régulièrement formulées à l’égard des Nations unies, de la Cour pénale internationale, de l’Union africaine (y compris au sujet de la situation politique des États africains du Sahel au cours de ces dernières années) ou encore de la Cedeao dont le Burkina Faso, le Mali et le Niger se sont aussi retirés tout récemment, etc.

On l’aura compris : les retraits et retours d’États dans des organisations internationales sont des affaires relativement courantes, en quelque sorte inévitables, du fait même du fonctionnement de ces grandes institutions qui peinent parfois à convaincre l’ensemble de leurs membres de la justesse et de l’équité de leurs déclarations.

The Conversation

Prof. Roger K. Koudé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

23.03.2025 à 16:56

La mondialisation rendra-t-elle la guerre des tarifs douaniers inefficace ?

Myriam Ben Saad, Associate professor, Kedge Business School

Avec l’émergence d’une guerre tarifaire sans précédent, assiste-t-on au bouleversement des chaînes de valeur mondiales ? Avec quels perdants et quels gagnants ?
Texte intégral (2085 mots)
Ouvriers indiens dans une usine de fabrication de téléphones. Bientôt amenée à disparaître au profit des États-Unis ? PradeepGaurs/Shutterstock

Depuis la chute du mur de Berlin, la mondialisation a le vent en poupe. Selon l’adage, chaque pays apporte sa pierre à l’édifice d’un produit fabriqué. Avec l’émergence d’une guerre tarifaire sans précédent, assiste-t-on au bouleversement des chaînes de valeur mondiales ? Avec quels perdants et quels gagnants ?


Les nouvelles mesures tarifaires de Donald Trump frappent de plein fouet les chaînes de valeurs mondialisées. Elles pénalisent notamment les producteurs français d’alcool avec des taxes à hauteur de 200 %, mais également l’ensemble des maillons économiques interdépendants. L’idée : inciter à produire aux États-Unis.

Ces soubresauts mettent en lumière l’importance des chaînes de valeur mondiales. Ces dernières ont profondément transformé les dynamiques de production et d’échange en fragmentant la fabrication des biens à travers plusieurs pays. Cette organisation optimise les coûts et la spécialisation, mais elle lance également des défis. Du smartphone assemblé en Asie, avec des composants en provenance de divers régions du monde, à l’automobile fabriquée avec des pièces provenant de plusieurs continents, la production internationale est désormais hautement fragmentée.

Si ces chaînes de valeur influencent la compétitivité des échanges, qui supporte réellement ces taxes et à quel moment du processus de production ?

Tarifs douaniers mondiaux sur l’agriculture, sur la manufacture et sur les ressources naturelles. UNCTAD

Plusieurs taxes

Il existe plusieurs types de taxes. Prenons l’exemple du smartphone. Ce produit très sophistiqué est soumis à plusieurs types de taxes, principalement des droits de douane à l’importation. Ces taxes peuvent être proches de 0 % dans l’Union européenne. Elles augmentent dans certains pays comme l’Inde, atteignant 10 à 20 %. Ces différences de droits de douane sont dues à des objectifs économiques et commerciaux distincts. L’Inde utilisent le droit de douane pour protéger et encourager la production locale et réduire la dépendance aux importations. La TVA est généralement autour de 20 % pour ce produit.

Sans oublier les barrières non tarifaires (BNT). Elles comprennent essentiellement les normes techniques et les certifications, les barrières sanitaires et de sécurité, les normes sur le recyclage, les interdictions des substances dangereuses. Ces barrières non tarifaires compliquent la fluidité des échanges, fragmentent les chaînes de valeurs et poussent vers leur régionalisation.

Aval et amont de la chaîne de valeur

Les droits de douane ne sont pas une taxe uniforme appliquée de manière égale à tous les pays ou à toutes les étapes de la chaîne de valeur. Ils varient considérablement en fonction de la nature du bien échangé. Chaque maillon de la chaîne, qu’il s’agisse de l’extraction des matières premières, de l’assemblage ou de l’exportation des produits finis, présente des coûts différents et des bénéfices variés.


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Les pays qui se trouvent aux premières étapes de la chaîne, par exemple, ceux qui exportent des matières premières ou des produits peu transformés, peuvent subir des taxes élevées sur les biens qu’ils importent pour la transformation. À l’inverse, les pays qui se trouvent plus près de la fin de la chaîne, là où les produits sont finalisés et exportés, peuvent être confrontés à des taxes supplémentaires sur les biens qu’ils cherchent à exporter. Cela peut nuire à leur compétitivité internationale.

Matières premières, composants et produits finis

Les BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud et maintenant plusieurs autres pays – sont souvent positionnés sur les premières étapes de la chaîne : extraction, production de matières premières ou assemblage de composants simples. Ils peuvent être les plus exposés à des droits de douane élevés sur les intrants nécessaires à leur production. Ces pays peuvent être désavantagés si les produits finis qu’ils exportent sont frappés de taxes supplémentaires.

Les pays développés, du G7 et du G8, bénéficient généralement d’une position privilégiée sur les étapes plus avancées de la chaîne. Ils peuvent néanmoins subir les conséquences de l’augmentation des droits de douane, notamment sur les composants qu’ils importent pour l’assemblage de produits finis. Les droits de douane peuvent également affecter les pays développés lorsqu’ils tentent d’exporter des biens sophistiqués, limitant ainsi leur accès à de nouveaux marchés.

Chaîne de valeur d’une voiture Volvo S40. Académie d’Aix-Marseille

L’industrie automobile est fortement impactée par les droits de douane à différentes étapes de la chaîne de valeur. L’importation d’acier en Allemagne depuis l’Inde subit une taxe de 10 %, augmentant le coût de production. Les composants électroniques chinois sont frappés par un droit de 5 % à l’exportation, ce qui alourdit la facture pour les constructeurs allemands.

Enfin, si les États-Unis appliquent un droit de 20 % sur les voitures importées d’Allemagne, cela renchérit leur prix pour les consommateurs états-uniens et réduit leur compétitivité face aux véhicules produits localement.

Effet boule de neige

Nos travaux ont apporté un éclairage sur la manière dont les droits de douane affectent différemment les pays en fonction de leur position dans la chaîne de valeur mondiale. Plus une économie exporte des biens à forte valeur ajoutée, plus il est exposé à des barrières tarifaires.

Les pays qui exportent des produits de haute technologie ou à forte valeur ajoutée – composants électroniques, véhicules ou machines spécialisées – sont souvent les plus vulnérables aux barrières commerciales. Ces produits nécessitent des chaînes de valeur complexes, impliquant des étapes multiples de production réparties entre plusieurs pays. Les droits de douane ont un effet boule de neige, perturbant plusieurs maillons de la chaîne. Ils entraînent une hausse des coûts pour les producteurs. Les pays exportateurs de biens sophistiqués se retrouvent pénalisés par des taxes plus élevées, ce qui freine leur compétitivité sur les marchés mondiaux.

Vers une régulation plus équitable

Une réflexion plus approfondie sur la manière de réguler les droits de douane pourrait permettre une meilleure répartition des bénéfices au sein des chaînes de valeur mondiales.

Cette régulation pourrait se traduire par des politiques différenciées en fonction du niveau de développement du pays. Autrement dit, différencier les droits de douane pour les pays en développement afin de les aider à se positionner dans des chaînes de valeur à haute valeur ajoutée tout en protégeant les industries locales.

Et également encourager des pratiques écologiques et sociales responsables à travers des réductions de droits de douane pour les pays respectant des normes strictes de durabilité.

Ainsi une régulation équitable est nécessaire pour réduire les inégalités entre pays, encourager les pays vulnérables à se positionner sur les chaînes de valeur mondiales et promouvoir un commerce durable et responsable. Il s’agirait de trouver un équilibre entre la protection des industries locales et le maintien de la compétitivité des marchés mondiaux.

The Conversation

Myriam Ben Saad ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

23.03.2025 à 16:53

Dissolution ou transformation ? L’avenir du PKK au Kurdistan irakien

Iris Lambert, PhD candidate in political sciences and international relations, Sciences Po

Après plus de quarante ans de lutte armée contre l’État turc, le PKK a accepté un cessez-le-feu et envisage sa dissolution. Le mouvement est basé au Kurdistan irakien, et c’est là que se jouera son avenir.
Texte intégral (2515 mots)

Dès le lancement de sa lutte armée contre le gouvernement turc en 1984, la guérilla du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a installé ses bases dans les montagnes du Kurdistan irakien. Avec les années, c’est là que le conflit armé s’est principalement délocalisé, provoquant nombre de déplacements forcés et de victimes civiles. À l’heure de l’ouverture d’un nouveau processus de paix entre la Turquie et le PKK, c’est aussi, en bonne partie, dans la partie irakienne du Kurdistan que se joue l’avenir de l’organisation.


Le 27 février dernier, Abdullah Öcalan, 75 ans, fondateur et leader du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), emprisonné sur l’île turque d’Imrali depuis 1999, a appelé son organisation à mettre en place un cessez-le-feu puis à se dissoudre.

Cette déclaration historique nourrit l’espoir de voir s’achever un conflit qui a fait plus de 40 000 morts en quatre décennies.

De la Turquie au Kurdistan irakien

Au crépuscule du 15 août 1984, trente-six hommes armés sortent du hameau abandonné de Mivroz, au creux des reliefs rocheux et escarpés du nord de l’Irak, traversent la frontière turque et, en quelques heures seulement, atteignent le village d’Eruh. Dans la nuit tombante, un groupe de combattants prend d’assaut la caserne militaire de la bourgade, tandis qu’un autre entre dans la mosquée pour déclamer un message via les haut-parleurs. Que les villageois ne prennent pas peur, annoncent les soldats : ils sont là pour les libérer du « fascisme colonial turc » et pour faire advenir « une société démocratique » fondée sur « l’indépendance nationale » kurde.

Ces militants du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), près de six ans après la fondation de l’organisation en 1978, déclarent ce jour-là, officiellement, le début de la lutte armée contre le gouvernement turc.

Le PKK est un organisme politique armé né en Turquie de l’association de militants kurdes souhaitant lutter contre le gouvernement d’Ankara (au départ, le but est d’obtenir l’indépendance du Kurdistan entier, mais au cours des années 2000, cet objectif évolue pour privilégier l’autogestion localisée au sein même des États, conformément aux préceptes du « confédéralisme démocratique » développé par Ocalan). Toutefois, sa lutte s’est rapidement délocalisée dans les pays voisins, à l’image de cette première offensive orchestrée par le PKK depuis les montagnes du Kurdistan irakien. Aussi, c’est peut-être là, entre autres, que pourrait se jouer le futur de l’organisation : dissolution ou transformation ?


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Le Kurdistan irakien, plus qu’une base arrière pour le PKK

De fait, bien plus qu’une simple base arrière, le Kurdistan irakien accueille depuis les années 1980 non seulement les troupes du PKK, mais également ses quartiers généraux retranchés dans les Monts Qandil, réputés imprenables et situés dans l’est, près de la frontière avec l’Iran. Cette présence de la guérilla sur le sol irakien est d’abord le fruit de la supériorité militaire de l’armée turque qui est parvenue, à mesure que le conflit s’embrasait, à repousser les unités du PKK hors de son territoire.

Des sympathisants du PKK se rassemblent pour célébrer Newroz, le Nouvel an kurde, dans les monts Qandil (2024). I. Lambert, Fourni par l'auteur

Très tôt, Abdullah Ocalan scelle des accords avec les groupes armés locaux, eux-mêmes aux prises avec Bagdad : avec le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) dès 1983, puis avec l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) en 1988. Ces alliances de circonstance vacilleront l’une après l’autre, entraînant des affrontements armés sanglants entre les différentes factions au cours des années 1990.

Vers la même période, le PKK trouve un terrain d’entente avec Saddam Hussein, alors à la tête de l’Irak, qui autorise la guérilla à maintenir ses bases militaires à la frontière turque en échange d’informations sur les mouvements des rebelles du PDK.

Pourtant, en parallèle, les autorités de Bagdad laissent le champ libre à Ankara pour mener des frappes sur les positions du PKK dans un périmètre de 5 kilomètres à l’intérieur du territoire irakien.

Aujourd’hui, le conflit s’est de facto déporté au Kurdistan irakien. Si le PKK continue sporadiquement de frapper directement en Turquie – par exemple, à l’automne 2024, un commando-suicide avait attaqué le siège des industries de défense turque –, la majeure partie des combats opposant la guérilla aux forces armées turques se déroulent dans les monts Matine et les monts Gara, situés dans le nord de l’Irak.

Portraits de combattants du PKK décédés affichés dans la Maison des Martyrs du camp de Makhmour en Irak (2025). I. Lambert, Fourni par l'auteur

Depuis le printemps 2022, le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan est engagé dans une offensive dite « Claw-Lock » qui vise à établir un « corridor de sécurité » à la frontière turco-irakienne, ainsi qu’à sécuriser le passage d’une future « route du développement » devant relier le port irakien de Bassora, dans le golfe arabo-persique, à la Turquie puis à l’Europe à horizon 2028. Les affrontements et les bombardements turcs ont provoqué de nombreux déplacements forcés et près de 78 morts civils dans le Kurdistan irakien depuis 2022, d’après l’ONG Airwars.

Depuis peu, après une série de négociations avec Ankara, les autorités irakiennes ont officiellement interdit l’organisation du PKK sur leur sol.

Le temps des négociations

Les conséquences d’une éventuelle cessation des hostilités entre le PKK et la Turquie pourraient donc en premier lieu se faire sentir au Kurdistan irakien, où plusieurs milliers de civils espèrent pouvoir retourner dans leurs villages. À la suite de la déclaration historique d’Abdullah Ocalan, le PKK a annoncé depuis sa base de Qandil un cessez-le-feu unilatéral s’appliquant à ses « forces principales en Turquie » mais aussi « à toutes les structures, ainsi qu’aux équipes spéciales de fedai (escadrons suicides), aux YPS (unités de défense civile), aux MAK (unités du martyr Aziz Güler) et aux autres unités d’autodéfense ».

Néanmoins, la possibilité d’une véritable dissolution continue de dépendre, d’après le groupe, d’une éventuelle libération de son leader et de l’instauration en Turquie de « politiques démocratiques et de bases légales » devant assurer la mise en place du processus de paix. Des exigences pour l’heure jugées inacceptables par Ankara, qui a exigé le 6 mars dernier une dissolution « immédiate et sans condition » du PKK.

Les représentants des partis kurdes qui se partagent le pouvoir au sein du Gouvernement régional du Kurdistan (GRK, l’entité autonome fédérale du nord de l’Irak) jouent un rôle certes périphérique mais néanmoins important pour le futur du PKK, de ses combattants et de ses sympathisants dans la région.

Cette mission d’intermédiaire entre la guérilla et les autorités turques avait déjà été endossée, dans les années 1990, par le leader historique de l’UPK, Jalal Talabani, ce qui avait permis d’aboutir à la première déclaration de cessez-le-feu unilatéral de la part de la guérilla en 1993. Récemment, une délégation de députés turcs (issus du parti kurde Parti démocratique des peuples, DEM) en charge en leur nom propre, mais avec l’aval d’Ankara, du dialogue avec Abdullah Ocalan a rencontré à plusieurs reprises les chefs du PDK et de l’UPK, ainsi que le président du GRK Nechirvan Barzani, pour faire avancer les discussions sur le sort d’Ocalan et l’avenir du PKK.

Si le rôle exact que jouent les autorités kurdes irakiennes dans les négociations reste difficile à discerner, un processus de paix entre le gouvernement turc et le PKK pourrait également jouer sur le traitement des sympathisants de la guérilla au Kurdistan irakien. C’est que depuis quelques années, et notamment à la suite d’une forme d’âge d’or du PKK dans la région après l’engagement de ses combattants contre l’État islamique, les militants s’inscrivant dans la mouvance pro-PKK ont été férocement criminalisés en Irak. Les partis politiques adhérant à l’idéologie d’Abdullah Ocalan ont été interdits, à l’image du Kurdistan Society Freedom Movement (Tevgera Azadî) qui s’est vu interdire d’activité en août 2024, les assassinats ciblés se sont démultipliés et de nombreux activistes et journalistes ont été arrêtés.

Outre l’espoir d’un allègement de leur traitement souhaité par les organisations civiles sympathisantes du PKK, certaines sources liées aux autorités du Kurdistan irakien ont fait valoir la possibilité que le GRK offre l’asile politique aux cadres supérieurs du PKK qui ne pourraient bénéficier d’une amnistie en Turquie dans le cadre du processus du paix. Reste à savoir quelle serait la forme que pourrait prendre cet accueil, et si les activités politiques du parti pourraient elles aussi s’adapter à ces nouvelles configurations. On l’aura compris : aujourd’hui comme hier, c’est aussi dans les montagnes du Kurdistan irakien que se joue l’avenir du PKK.

Reste à savoir ce qu’une potentielle dissolution du PKK pourrait signifier pour l’Administration autonome du Nord et de l’Est de la Syrie (AANES), à dominante kurde, qu’Ankara accuse d’être affiliée au PKK. À la suite des déclarations d’Ocalan, Mazlum Abdi, le chef des file des Forces démocratiques Syriennes (FDS), la branche armée de l’AANES, a déclaré que ses troupes en Syrie n’étaient pas concernées par l’appel au désarmement, tout en rappelant la nécessité d’un cessez-le-feu dans la région.

The Conversation

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