Alternatives numériques est un mini-média contributif qui a pour but de faire connaître des alternatives numériques au grand public.
04.11.2024 à 17:00
Héberger son contenu ou dépendre d’une plateforme fermée : quelle différence ?
Louis Derrac
Lire la suite (302 mots)
La différence fondamentale, c’est qui a du pouvoir sur ton contenu ? Qui a le pouvoir de le retirer par exemple, et selon quel cas ?
Voici un petit tableau pour y voir plus clair. Et s’il fallait le préciser : privilégiez autant que possible le web ouvert !
Sur le web ouvert (site hébergé, Mastodon, Pixelfed…) | Sur le web fermé (Youtube, Instagram, X…) |
---|---|
La loi | La loi |
Les conditions générales d’utilisation de la plateforme (dictées souvent par le pays d’origine) | |
Les intérêts économiques, politiques, idéologiques propres à la plateforme | |
Une pression du gouvernement sur la plateforme | |
Une signalisation en masse de ton contenu par des opposants politiques ou militants | |
Un robot (bot) mal programmé | |
Un·e modérateur·ice de mauvaise humeur | |
La fermeture de la plateforme |
Photo de Simone Dalmeri sur Unsplash
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21.10.2024 à 12:32
Local Send, alternative libre et multiplateforme à Airdrop et Quick Share
Louis Derrac
Texte intégral (670 mots)
Pour partager des fichiers (images, sons, pdf, etc.) dans l’écosystème Apple, il y a Airdrop qui fonctionne (très) bien. Mais évidemment, si on a le malheur d’avoir un PC sous Linux ou Microsoft… rien ne va plus. Idem si notre ami⋅e n’est pas équipée d’un appareil de la pomme. Bref, comme toujours chez Apple, c’est bien fait, mais c’est aussi terriblement fermé. Même problème chez Google, où il existe un service, « Quick Share », cantonné cette fois à l’univers Google et Windows. Rien de très interopérable donc, rien de très libre, rien de très… acceptable.
Vous serez donc ravi⋅e⋅s d’apprendre qu’il existe une excellente alternative, multiplateforme sur smartphone ET sur PC, open-source, et ultra-efficace. J’ai nommé Local Send. Chez moi, entre smartphones d’OS différents, entre mon smartphone et mon PC sous Linux, c’est testé et approuvé !
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15.09.2024 à 10:34
« Elles n’ont même pas Windows » – workflow d’une thèse libre
Louis Derrac
Texte intégral (1948 mots)
Un article repris de https://libres.hypotheses.org/387
« Elles n’ont même pas Windows ! » résume une de nos amies (Margaux pour ne pas la citer) pour expliquer notre manière de travailler. Alors, à quoi ressemble une thèse, sans Windows (ni Mac) et faite avec des logiciels libres ?
Cet article est un petit répertoire des différents logiciels qu’on utilise (ou non) dans notre quotidien de la recherche et qui feront l’objet de divers billets sur le carnet.
À part quelques exceptions notables (comme Zotero), les logiciels libres en général et utilisables dans la recherche en particulier sont peu connus. Souvent, un des premiers enjeux est de trouver quel logiciel utiliser. Pour ça, on utilise souvent https://alternativeto.net/ qui permet de trouver les alternatives (libres ou non d’ailleurs) à un logiciel qu’on utilise déjà ou qu’on connaît via des collègues ou ami·es. Il existe également une super base de données de logiciels libres adaptés aux sciences sociales réalisée par Zack Batist sur github : https://github.com/zackbatist/open-SocSci?tab=readme-ov-file.
À l’Université de Lille, on a aussi la chance d’avoir de nombreux logiciels libres hébergés par les serveurs de l’Université, ce qui nous facilite la tâche :
Dans cet article, on va revenir sur les différents logiciels qu’on utilise pour des opérations classiques de la recherche en science politique et plus généralement en sciences sociales : écrire, lire, récolter, retranscrire, analyser.
Au quotidien
Pour commencer si on n’a pas Windows c’est parce qu’on a un autre système d’exploitation libre : Ubuntu (Linux), qui a été installé par le service informatique de la faculté.
Voir notre article : Ubuntu et pourquoi le libre ?
Au quotidien nous utilisons toutes les deux des logiciels libres pour des tâches de travail de bureau relativement banal : traiter nos mails, ouvrir des PDFs, gérer notre temps.
- Mails : Thunderbird est un gestionnaire de mail libre, où on peut aussi gérer son agenda, ses contacts, ses tâches et avoir une messagerie instantanée. On l’utilise principalement pour nos mails.
- PDFs : on utilise chacune un logiciel différent pour lire et/ou modifier nos PDFs. Audrey utilise Okular qui permet de surligner, sous-ligner, annoter, signer un PDF. Clothilde quand à elle utilise la visionneuse de documents d’Ubuntu pour lire les PDFs et Xournal++ quand il s’agit de compléter ou signer ce format de document.
- Gestion du temps : pour calculer son temps de travail et s’assurer qu’elle ne fait pas plus de 35h, Clothilde utilise le logiciel Hamster, ce qui lui permet d’avoir une visibilité sur le temps travaillé chaque jours, mais aussi le temps consacré à ses différents projets en cours.
Écrire
Pour écrire nos mémoires de Master 2 nous avons toutes les deux utilisés LibreOffice Writer qui est une équivalent de Word, mais en libre et qui a globalement les mêmes fonctionnalités. C’est un outil qu’on utilise encore régulièrement, mais on a très vite cherché d’autres logiciels de traitements de textes pour plusieurs raisons :
- La principale est que LibreOffice Writer devient plus lent et bug une fois qu’on dépasse la centaine de pages et les centaines de notes de bas de page (avec l’option Zotero dans LibreOffice). Une thèse en science politique faisant a minima le quadruple de pages (et autant pour les notes de bas de page), il nous fallait une solution qui permette de soutenir des documents lourds.
- les gestionnaires de fichiers classiques avec le principe : dossier > sous-dossier > fichier ne nous convenait pas parce qu’on avait besoin d’avoir une vue d’ensemble de nos documents, et que le passage d’un document à un autre nécessitait de passer par une autre interface que celle de LibreOffice Writer, ce qui parfois nous perd dans nos recherches (pourquoi j’ai cliqué sur mon dossier “photos” déjà ?).
On sait que de nombreux·ses doctorant·es en sciences expérimentales écrivent leur thèse en LaTeX, un langage d’écriture utilisable via des éditeurs LaTeX comme TexStudio ou Overleaf (un éditeur LaTeX en ligne qui est open source, mais pas libre : certaines options sont payantes). Mais en attente de formation, on a cherché d’autres options.
Lors d’une discussion, un collègue en rédaction de thèse nous raconte qu’il a passé tous les documents liés à sa thèse sur Scrinever pour la rédaction. Cela lui a permis d’avoir tout sur une même interface (matériaux, rédactions) et aussi de diviser ses chapitres en plusieurs documents qui s’importent en un seul. Seul problème : Scrinever est un logiciel propriétaire et payant.
À la recherche d’alternatives, Clothilde utilise d’abord Obsidian, qui est un logiciel gratuit mais malheureusement propriétaire…
Ensuite, Audrey trouve Zettlr, une véritable pépite que nous utilisons toutes les deux et qui fera l’objet de plusieurs billets sur le carnet ! Sur cette application de prise de notes, le langage d’écriture utilisé est le Mardown, mais il est aussi possible d’intégrer des éléments en LaTeX. Pour une première présentation, on vous conseille l’article d’Aurore Turbiau, docteure en littérature comparée qui a écrit sa thèse grâce à Zettlr.
Lire
Niveau lecture, on utilise toutes les deux Zotero qui est devenu un incontournable de la recherche pour gérer sa bibliographie. On l’utilise à la fois pour enregistrer nos littératures, les citer ensuite facilement et générer automatiquement des bibliographies. Mais aussi de temps en temps pour surligner et annoter les articles ou chapitres de livre, faire nos fiches, étiqueter les documents, etc.
Nos manières de lire ont beaucoup évolué depuis le début du doctorat et on opte toutes les deux, à des degrés différents, de plus en plus pour la lecture sur papier et les fiches papiers.
Récolter
Les matériaux qu’on récolte pour nos recherches sont principalement qualitatives. La collecte d’entretien se fait via un enregistreur et pour les observations via nos carnets de terrain. Pas besoin de logiciels libres ici ! Par contre, ce carnet Hypothèse sera pour nous l’occasion de revenir sur des questions de sécurité des données récoltées notamment avec le chiffrage de nos ordinateurs et moyens de sauvegarde, et plus généralement de parler RGPD et éthique de la recherche.
Nous récoltons aussi des divers documents par le biais de recherches en ligne, et de revues de presse. Pour ranger ces documents, on utilise Zotero, dans lequel il est possible d’insérer les PDFs et de compléter les métadonnées (auteur, titre, date, etc).
Enfin, Audrey travaille aussi sur des archives. Pour cela, elle utilise Tropy, logiciel libre créé par l’équipe de Zotero. Grâce à Tropy, on peut organiser ses archives, remplir les métadonnées (quelles archives, nom du carton, etc) et annoter ses documents. C’est un super outil, on vous en reparlera !
Retranscrire
Niveau retranscription des données et notamment des entretiens, on a eu l’occasion de tester plein de systèmes différents depuis nos premières expériences de recherche en Master.
En première année de thèse, on a découvert Whisper, un outil open source de retranscription automatique de la parole via une intelligence artificielle. C’est une véritable pépite qui change en grande partie le travail de retranscription. Disponible dans ShareDocs sur la plateforme Huma-num, il suffit de télécharger le ou les audio(s) dans le dossier correspondant et on reçoit un mail quand ces derniers sont retranscrits au format texte. Il faut bien-sûr repasser derrière pour faire une relecture du document, mais cela nous facilite grandement le travail ! Pour en savoir plus sur l’utilisation de Whisper via Huma-num, vous pouvez lire cet article du sociologue Aden Gaide : https://agepouvoir.hypotheses.org/494
Avant cela, on avait testé d’autres outils comme Parlatype. Il s’agit d’un lecteur audio spécifique pour la retranscription avec des raccourcis claviers qui permettent de faire stop/play ou de rembobiner l’audio de quelques secondes sans quitter notre document LibreOffice Writer. On avait aussi utilisé un petit script pour transcrire automatiquement depuis un audio en local via Vosk. C’était beaucoup moins performant que Whisper (version large) et il n’y avait pas d’interface. Du coup, il fallait passer par des lignes de commande, ce qui peut être un frein pour certain·es.
Analyser
Pour finir, on utilise des logiciels d’analyse de nos données, qualitatives et quantitatives.
Pour les données qualitatives, Clothilde a commencé à utiliser un CAQDAS (Computer-assisted qualitative date analysis software) soit un logiciel, ici libre, d’aide à l’analyse qualitative des données : Qualcoder.
Pour les données quantitatives (et surtout un peu de cartographie), Audrey utilise Rstudio, logiciel libre qui permet d’écrire en R, langage de programmation orienté statistiques.
Reprise de l’article diffusé en CC BY NC. Audrey Safa, Clothilde Saunier (10 septembre 2024). « Elles n’ont même pas Windows » – workflow d’une thèse libre. Tout problème a son logiciel libre. Consulté le 15 septembre 2024 à l’adresse https://libres.hypotheses.org/387
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04.06.2024 à 10:37
Où trouver des contenus (images, vidéos, livres, etc.) sous licence libre
Louis Derrac
Texte intégral (907 mots)
Il existe tellement de sites alternatifs, souvent sous licence libre, souvent accessibles gratuitement (pensez au don), qui ne proposent ni publicité ni contenu publireporté. En voici quelques-uns. N’hésitez pas à compléter en commentaire s’il en manque des essentiels.
Même si c’est « gratuit » et libre, pensez à créditer les auteurs, c’est le minimum que l’on peut faire pour les remercier. Un don est également envisageable si vous utilisez souvent la ressource.
Encyclopédies et dictionnaires
- Wikipedia
- Le Littré (XMLittré v2)
- Wiktionnaire et ses applications Android
Les banques de livres sous licence libre
- Bibebook : Une banque de 1 700 livres édités de très grande qualité au format numérique. Possibilité de les télécharger en un seul pack
- Ebooksgratuits : Un autre annuaire de livres libres de droits
- Project Gutemberg : Le Projet Gutenberg offre plus de 54.000 livres électroniques en accès libre: choisissez entre les formats gratuits ePub, Kindle, le téléchargement ou la lecture en ligne
- Standard Ebooks : un annuaire de livres anglais.
- LibriVox – Free public domain audiobooks
Les banques d’images sous licence libre
- Les banques d’images sont celles que l’on retrouve le plus sur Internet. Cherchez sur un moteur et vous en trouverez plein. Voici néanmoins les deux meilleures selon moi :
- Unsplash : des tonnes de photos magnifiques, sur énormément de catégories. Un must.
- Pixabay : Pas mal d’images assez « business », donc bonne alternative libre à Shutterstock. Attention certaines images seraient faussement en licence libre. À vérifier.
- Visual Hunt : un autre très bon site
- CC search : le métamoteur de l’organisation Creative Commons. On y trouve de tout y compris beaucoup de photos amateurs, donc forcément, c’est moins quali que les autres banques de professionnels (mais plus naturelles peut-être)
Les banques de vidéos libres de droits
- Pexels Video : des vidéos d’ambiance plutôt courtes, pas mal pour des animations de site, moins peut-être pour des montages.
- Pixabay Vidéos : un peu de tout sur Pixabay, dont des séquences qui peuvent servir aux montages. Il y a du très quali et du moins quali.
Les banques de sons sous licence libre
- La Sonothèque : alors ici ce sont vraiment des bruitages (type une porte de réfrigérateur qui s’ouvre et se ferme) pour des montages.
- Free Music Archive
- Au bout du fil
- Filmmusic.io
- Freesound is a collaborative database of Creative Commons Licensed sounds. Browse, download and share sounds.
Les banques d’illustrations, icônes, assets sous licence libre
- Opengameart
- Creative Commons search
- Clip Safari : des tonnes d’image clip arts
- CocoMaterial : the Open Source hand-drawn illustration library with 2 373 images
- Flaticon
- Openclipart. Since 2004, Now with 172495 clipart.
- Openverse : Explore more than 600 million creative works
Autres
Cuisine libre : Site contributif sans cookie, sans pistage, et avec des recettes en CC BY
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04.06.2024 à 10:31
Quelques ressources pour protéger sa vie privée et sa sécurité
Louis Derrac
Lire la suite (352 mots)
Voici quelques ressources essentielles pour commencer à protéger sa vie privée et sa sécurité. N’hésitez pas à contribuer en proposant des ressources (grand public, pas de contenus experts) dans les commentaires, je les rajouterai à l’article. Merci !
Sites complets
- Privacy Guides (EN) : The guide to restoring your online privacy..
- switching.software (EN) : Des alternatives éthiques aux grands logiciels, faciles à utiliser et qui font gaffe aux questions de vie privées
- Gofoss : Adoptez les logiciels libres et ouverts, protégez votre vie privée, maîtrisez vos données.
- Prism Break : Refusez les programmes de surveillance des données comme PRISM, XKeyscore et Tempora.
- Hygiène numérique
- Nothing2hide : Guide de protection numérique
Contenus (articles, livres, etc.)
- Guide d’Autodéfense Numérique de Boum
- Libertés numériques. Guide de bonnes pratiques à l’usage des DuMo
- Services libres et hébergeurs de services libres
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04.06.2024 à 10:27
Réinventer l’exploration du web
Louis Derrac
Texte intégral (2654 mots)
Cet article est une reprise de Pour revenir à l’esprit du web, soyons (beaucoup) plus curieux !, publié sur louisderrac.com
Hier, mon site a enregistré 4 fois plus de visites que d’habitude. Le responsable de ce pic, mon cours de culture numérique, qui avait été partagé sur Facebook. Ça arrive de temps en temps, et ça fait toujours plaisir.
Ce qui m’a intrigué cette fois, c’est le « comportement1 » des visiteurs sur mon site. La quasi-totalité est arrivée sur la page de mon cours de culture numérique, où je partage mes supports de cours, des activités, une bibliographie/sitographie et une curation de ressources2. C’est une page utile et qui commence d’ailleurs à être bien référencée.
Mais malgré cet intérêt apparent pour mon travail, quasiment aucun de ces visiteurs n’a parcouru le reste de mon site. Que ce soit mes différents articles, mon autre cours d’économie numérique, mes formations de culture numérique, pourtant tous partagés dans la même logique et traitant de sujets connexes. Guère plus n’a quitté mon site pour se diriger vers un autre, en utilisant un des nombreux liens externes que je propose. Et aucun, absolument aucun, n’a eu la curiosité de se renseigner sur l’auteur (donc moi héhé) en se dirigeant sur la page à propos, pourtant accessible directement depuis le menu du site.
En y réfléchissant, je me suis rendu compte que ce comportement de visite était systématique. Comme je ne m’en formalise pas, je ne l’avais simplement pas relevé. Si je le fais maintenant, c’est que cela a fait écho à la conclusion que j’ai donnée lors de ma dernière formation. J’y encourageais, comme à chaque fois, mes interlocuteurs à être curieux et critiques3 dans leur rapport à leurs écosystèmes numériques. Et à encourager leurs propres interlocuteurs à faire de même.
Car le web a bien changé depuis ses débuts. Et nous, nous avons peut-être cédé à la facilité offerte par certaines plateformes, et perdu de notre curiosité. Prenons deux exemples, la recherche sur le web et l’accès à l’information.
Rechercher sur le web : de la sérendipité aux moteurs de réponse
J’étais trop jeune pour connaître l’émergence du web, celui des débuts. Lorsque les premiers portails et moteurs de recherche se lançaient pour donner du sens au nombre croissant de sites web. Et que ces derniers affichaient fièrement des listes de liens pour diriger les internautes vers d’autres pages de leurs sites, mais aussi vers des sites amis.
C’était l’époque de la sérendipité, une période où l’exploration du web était un voyage plein de surprises. Concrètement, un internaute naviguait de lien en lien sans connaître précisément sa destination finale. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’autant de métaphores issues des vocabulaires marin et spatial structurent la perception d’Internet (surfer, naviguer, un site internet, etc.)4.
Le développement des moteurs de recherche, couplé à la folle démocratisation du web, a peu à peu supplanté la sérendipité et toutes les autres formes d’exploration et d’orientation : le web sémantique5, les folksnomies6, ou encore les portails et leur stratégie d’indexation par catégories7.
Par manque de curiosité (et de temps), nous consommons au lieu d’explorer
Si l’on cherchait une comparaison dans le monde réel, on pourrait dire que depuis que nous orientons avec des GPS toujours plus efficaces, nous nous perdons beaucoup moins. Nous n’avons d’ailleurs plus le temps et l’envie de nous perdre, que ce soit dans nos villes ou dans nos campagnes. Alors la consommation prend le pas sur l’exploration.
C’est pareil sur le web, et les moteurs de recherche, Google en tête, l’ont bien compris. C’est tout le sens de leur stratégie consistant à passer du moteur de recherche au moteur de réponse. Concrétisant ainsi un objectif poursuivi de longue date : être le début et la fin de toute quête d’information.
Prenez quelques requêtes classiques, et vous verrez comment Google s’arrange pour vous proposer une réponse parfaite. Il n’y a plus besoin d’être curieux et de chercher, il ne reste qu’une réponse à consommer (et dans le cas de Google, sans doute une publicité sur laquelle cliquer).
Reprenons le contrôle du web en retrouvant le plaisir de l’exploration
Dominique Boullier, dans son incontournable sociologie du numérique, liste un certain nombre de pratiques personnelles d’orientation qui sont autant de possibilités de changer sa façon d’explorer et de consommer le web. Je les reprends à ma sauce :
- Revenir à la sérendipité, se laisser porter par les liens. Cela reste une méthode d’exploration et de recherche efficace, en plus d’être une invitation au voyage (virtuel).
- Se créer ses habitudes grâce aux favoris, aux marque-pages (ou bookmarks) proposés par chaque navigateur internet.
- Chercher dans les catégories d’un annuaire ou d’un site structuré, comme Wikipedia. Wikipedia est un site parfait pour la sérendipité. Vous pourriez y passer des heures en sautant de lien en lien. Et chaque article de Wikipedia propose une série de liens externes.
- Faire confiance aux recommandations de vos communautés virtuelles et à leurs curations (sur Delicious, Scoopit, Seenthis, ou sur des réseaux sociaux). Mais attention à vos biais de confirmation !
Accéder à l’information : des flux RSS aux infomédiaires
Si les « infomédiaires8» sont aujourd’hui aussi prépondérants, c’est parce que la plupart d’entre nous ont perdu l’habitude, la curiosité ou l’intérêt d’accéder à des sites d’informations directement. Ou ne s’en donne plus le temps. C’est particulièrement criant chez les jeunes, qui accèdent très majoritairement aux médias par cette intermédiation des plateformes numérique.
Là encore, le web a changé. Nous sommes passés des flux RSS aux infomédiaires. Les flux RSS9 représentent une possibilité technique d’accéder sans intermédiaire à ses sites d’information préférés. Jusqu’à sa fermeture en 2013, Google Reader était l’un des lecteurs de flux RSS les plus populaires. Le service a finit par être fermé car son existence était contraire à la stratégie, à l’idéologie et au modèle économique du géant de la recherche. Cette décision a consterné la communauté du web10, et plusieurs alternatives ont pris la relève : Feedly, Inoreader, etc.
Il y a pourtant une différence fondamentale entre accéder directement à un site d’information, ou par le truchement d’un infomédiaire. Dans le premier cas, vous êtes en contrôle total. Vous choisissez vos sources d’information (et parfois vous faites le ménage), puis vous accédez à tous les articles publiés. Dans le deuxième, vous n’avez pas de contrôle : l’algorithme choisit les sources et les articles qui vous sont présentés. Ces choix, dont les critères précis sont totalement opaques, privilégient les articles les plus susceptibles de créer de l’engagement.
Reprenons le contrôle de notre information
Il existe bien des façons de reprendre le contrôle de notre accès à l’information, et de moins dépendre des infomédiaires pour construire notre vision du monde. Voici quelques pistes :
- À défaut de vous convertir aux flux RSS (encore que ça ne requiert aucune compétence particulière), vous pouvez sélectionner vos sites d’information préférés et les visiter vous-même selon votre routine d’information. Vous pourrez ainsi découvrir leur façon à chacun d’organiser et de hiérarchiser l’information.
- Le mail fait son grand retour avec les newsletters ! Alors profitez-en, c’est un autre excellent moyen de recevoir de l’information, directement depuis ses sources préférées. J’avais pour ma part proposé une liste de sites et de newsletters technocritiques.
- De nombreux médias se mettent aussi au podcast, là aussi avec des conseils de lecture pour aller plus loin.
Soyons (beaucoup) plus curieux !
Cet article est parti du cas personnel que constitue mon site et la manière dont les visiteurs le consultent, le consomment. Bien sûr, ce n’était qu’un prétexte, et je ne me formalise absolument pas que mes visiteurs quittent mon site sans l’avoir exploré.
Mais je pense que c’est l’occasion de redire à quel point il est important, malgré les facilités que nous offrent les grandes plateformes numériques, de garder du contrôle sur notre exploration du web, sur notre accès à l’information, et sur notre goût de l’exploration, de l’inconnu, de l’aventure.
Savez-vous que lors d’une requête sur Google, 60% des internautes cliquent sur les trois premiers résultats ? 60% ! Imaginez le pouvoir que nous conférons à l’algorithme de Google en nous limitant à ces trois premiers résultats. Soyons plus curieux que ça, il y a certainement des choses intéressantes dans les résultats suivants !
Plus de 90% des français utilisent Google pour rechercher sur le web. Pour beaucoup d’internautes, Google EST le web11. La preuve, beaucoup tapent Google… dans le moteur de recherche Google lui-même ! Là aussi, soyons plus curieux. Il existe d’autres façons d’accéder au web, d’autres moteurs de recherche, mais aussi des portails, des sites auxquels on peut accéder directement parce qu’on connaît son adresse, etc. Il faut éduquer les jeunes publics à toutes ces facettes.
Lorsque nous accostons sur un site internet, explorons-le comme on explorerait une ile déserte. Si l’article ou le contenu partagé est intéressant, découvrons son auteur, son autrice, ne serait-ce que pour savoir d’où et pourquoi ils parlent. Voyons quels liens hypertextes, quels autres aventures virtuelles ils nous proposent. Et si ce territoire inconnu nous attire, pourquoi ne pas nous accorder le droit et le temps d’aller l’explorer ?
PS : et alors que j’apportais les dernières modifications à cet article, voilà que m’est apparu ce dossier pédagogique de l’ENSSIB et l’INSPE Lyon : Former à s’informer : développer l’esprit critique ! Le monde est bien fait, merci Educavox pour le partage !
Photo à la une de Ali Kazal sur Unsplash
L’article Réinventer l’exploration du web est apparu en premier sur Alternatives numériques.
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