Pour elle, le 7 octobre 2023 "est un jour sans fin qui continue encore aujourd'hui et c'est un cauchemar", mais deux ans après l'attaque sanglante du Hamas sur Israël, Silvia Cunio se bat pour y mettre fin et revoir ses fils, toujours otages dans Gaza.
"Ca suffit vraiment, il faut arrêter cette guerre", dit à l'AFP Mme Cunio, Israélo-Argentine de 64 ans dont le cri teinté de rage et de désespoir avait ému Israël en août.
Ce soir-là, lors d'un rassemblement à Tel-Aviv pour la libération des otages, la mère de David (35 ans) et Ariel (28 ans) Cunio, avait lancé un "Ca suffit!" déchirant qui avait figé la foule.
Lors de l'attaque du 7-Octobre, qui a déclenché la guerre ayant dévasté la bande de Gaza, 251 personnes ont été enlevées. Parmi elles, 47 sont encore retenues à Gaza dont 25 ont été déclarées mortes par l'armée israélienne.
Chaque samedi soir depuis deux ans, des dizaines de milliers d'Israéliens, à Tel-Aviv et à travers tout le pays, se rassemblent pour exiger le retour des otages.
Les portraits de ceux qui sont encore prisonniers à Gaza sont partout, sur les murs, les stations d'autobus, dans les médias.
Dans l'ombre de la guerre qu'Israël mène à Gaza avec l'objectif de "vaincre" le mouvement islamiste palestinien et de ramener les otages, leur sort hante la société israélienne. Leur absence reste une plaie béante.
Mme Cunio a émigré d'Argentine en Israël en 1986 avec son mari. Ils vivaient au kibboutz Nir Oz, théâtre d'un des pires massacres commis le 7-Octobre avec une trentaine de morts et l'enlèvement de 75 personnes.
- "Je cours vers eux" -
Quand elle participe aux rassemblements pour les otages, Mme Cunio est entourée des compagnes de ses fils, ex-captives du Hamas: Sharon Cunio, libérée avec ses jumelles de 3 ans, Emma et Yuli, lors de la première trêve en novembre 2023, et Arbel Yehud, libérée en mars 2025 après plus de 500 jours en captivité.
Les portraits de ses deux fils otages s'affichent aux balcons de la résidence de Kyriat Gat, petite ville à une vingtaine de kilomètres de la bande de Gaza, où vivent une grande partie des survivants de Nir Oz.
Au pied des immeubles, Mme Cunio, vêtue d'un tee-shirt noir avec les photos de David et Ariel, raconte son quotidien depuis deux ans. Elle dit le manque de sommeil, la difficulté à se lever chaque matin et à s'acquitter des tâches journalières.
Elle garde espoir néanmoins. "Tous les jours, j'imagine leur retour, je cours vers eux et je les prends dans mes bras", dit-elle, esquissant un sourire.
Et elle trouve la force de s'occuper de ses sept petits-enfants dont les deux fillettes de David. Elle raconte leurs peurs depuis leurs 52 jours de captivité à Gaza, comment elles "allument toutes les lumières de la maison quand elles rentrent".
En juillet, les petites ont fêté leur cinq ans, dont presque deux sans leur père.
Au contraire de dizaines de milliers d'Israéliens qui ont passé des semaines voire des mois sous les drapeaux depuis le 7-Octobre, les deux autres fils de Mme Cunio ont été exemptés de réserve du fait qu'ils ont des frères otages.
Dans de très nombreuses familles, la multiplication des périodes de réserve est un vrai fardeau, source d'angoisses pour chaque jour où un compagnon, un père, ou un fils se retrouvent au front.
- "Tout peut arriver" -
Plus de 470 soldats israéliens ont été tués dans la campagne militaire sur Gaza depuis le début de l'offensive terrestre dans le territoire palestinien fin octobre 2023.
Selon plusieurs sondages, une forte majorité d'Israéliens souhaite aujourd'hui la fin de la guerre et que le retour des otages soit une priorité.
Avec l'intensification de l'offensive israélienne sur Gaza-ville, Mme Cunio ne cache pas ses craintes: elle dit faire confiance à l'armée mais que "tout peut arriver, les bombardements, les explosions, une balle perdue".
L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP.
Depuis lors, plus de 66.100 Palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza par l'opération militaire israélienne de représailles, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas.
Le ministère, dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU, ne précise pas le nombre de combattants tués mais ses données indiquent que plus de la moitié des morts sont des mineurs et des femmes.
L'annonce lundi par le président américain Donald Trump d'un plan pour mettre fin à la guerre et ramener tous les otages laisse Mme Cunio de marbre, "tant qu'il n'y a pas d'informations concrètes".
Mais elle a un message pour "ceux qui sont au sommet, notre gouvernement": "Il faut qu'ils cessent de torpiller encore et encore les accords" en vue d'une libération des otages.
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© Agence France-Presse
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