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DISSIDENCES


Recensions et éclairages critiques sur les mouvements révolutionnaires, les gauches radicales et les dissidences artistiques et culturelles.

▸ les 15 dernières parutions

21.07.2024 à 18:25

Leonard Schapiro, Les Révolutions russes de 1917. Les origines du communisme moderne (The Russian Revolutions of 1917), Paris, Flammarion, collection « Nouvelle bibliothèque scientifique », préface de Hélène Carrère d’Encausse, 1987 (édition originale 1984), 336 pages, 125 francs.

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  Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque Leonard Schapiro (1908-1983) est un des historiens majeurs de la Russie soviétique et de l’URSS, tout particulièrement de ses premières années. Si l’on connaît son étude sur Les Bolchéviques et l’opposition (1917-1922), rééditée voici quelques années par Les Nuits rouges (et chroniquée sur notre ancien site par Florent Schoumacher), cet ouvrage, le dernier paru avant son décès, présente le grand intérêt de synthétiser plusieurs décennies de recherches et de réflexions. L’exposé est classiquement chronologique, et débute avec […]
Texte intégral (1057 mots)

 

Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque

Leonard Schapiro (1908-1983) est un des historiens majeurs de la Russie soviétique et de l’URSS, tout particulièrement de ses premières années. Si l’on connaît son étude sur Les Bolchéviques et l’opposition (1917-1922), rééditée voici quelques années par Les Nuits rouges (et chroniquée sur notre ancien site par Florent Schoumacher), cet ouvrage, le dernier paru avant son décès, présente le grand intérêt de synthétiser plusieurs décennies de recherches et de réflexions. L’exposé est classiquement chronologique, et débute avec la recherche des « germes de la révolution », surtout décelables dans la seconde moitié du XIXe siècle, les réformes initiées étant trop ou trop peu nombreuses en l’état, l’institution des zemstvos en particulier ouvrant sur la prise en charge d’éléments de gestion locale et l’expression d’une opposition qui allait se faire croissante.

Dans son décryptage de l’échec ou de la victoire révolutionnaire, 1905 contre février 1917, le rôle de l’armée lui apparaît déterminant. Restée fidèle en 1905, avec en outre une absence de direction oppositionnelle suffisamment solide, elle bascule en 1917 du côté des insurgés (ouvriers, de manière décisive), par suite du discrédit profond du gouvernement (et aux critiques de l’opposition libérale). La période qui s’ouvre alors, marquée comme on le sait par l’existence du double pouvoir entre le soviet de Petrograd et un gouvernement provisoire en suspension sur un vide institutionnel, semble être dominée par une certaine fatalité. L’ordre n°1 du soviet, adressé aux forces armées, légitima d’emblée selon l’auteur le pouvoir du soviet et joua un rôle décisif dans l’effondrement de la discipline militaire, ouvrant dès lors le terrain à la propagande bolchevique. De même, les soulèvements paysans qui suivent février, sans être de nature politique, créent un climat de remise en cause sociale qui allait profiter aux bolcheviques. Si, lors des journées de juillet, ces derniers furent surtout poussés par leur base – et par les anarchistes –, plus volontaristes, l’objectif de prise du pouvoir fut tout du long l’objectif de Lénine, un pouvoir exclusif, de parti unique, qu’il n’était en aucune façon question de partager[1]. Il fut facilité par l’inconsistance du gouvernement provisoire et des autres courants socialistes. Dans son récit de la guerre civile, et de la victoire des bolcheviques à son issue, Leonard Schapiro souligne le soutien par défaut de la population paysanne, le moral supérieur de l’Armée rouge et le rôle de Trotsky, dont il ne brosse pourtant pas un tableau humainement très flatteur.

Tout au long de son texte, Leonard Schapiro laisse ainsi clairement filtrer son point de vue personnel. Indulgent par rapport aux efforts des sphères dirigeantes du tsarisme lorsqu’elles cherchent selon lui à réellement améliorer la situation (avec un Stolypine, par exemple), il tient également à souligner l’action plus radicale que ce que l’on pense souvent déployée par le gouvernement provisoire, attaché à des principes et à un certain réalisme, contrairement aux bolcheviques. Quant à sa perception de la révolution, elle privilégie clairement le chaos engendré par la disparition d’un joug pesant, « (…) l’envie et la haine déchaînées par la révolution chez un peuple pratiquement ignorant, simplement conscient des souffrances et des humiliations qui avaient été son lot depuis des générations. » (p. 134)[2] Dans cette tempête, les bolcheviques jouent avec le feu (plus que prolétarienne, leur révolution est qualifiée de celle du « lumpenproletariat », p. 313), et sont de dangereux manœuvriers « extrémistes » (un terme qui revient régulièrement), dont le renversement aurait même permis d’éviter toute guerre civile, car selon lui, tout risque de retour à l’ordre ancien en 1917 n’était que fantasme[3]. Ce sont clairement les modérés de gauche (mencheviques particulièrement) qui emportent la préférence de Leonard Schapiro, « (…) sur laquelle reposait le seul espoir de régime rationnel pour le pays. » (p. 270). Parmi les autres limites sensibles et plus factuelles de cette approche, il y a les angles morts des structures socio-économiques ou de la culture.

On considérera ce livre sur les révolutions russes, qui date de 40 ans, comme un document historique, à croiser évidemment avec les dernières analyses sur ce sujet (Sumpf, Aunoble, etc.)

[1] Leonard Schapiro voit le moment de la victoire d’Octobre comme un instant isolé, celui où un gouvernement socialiste de coalition aurait pu se mettre en place, si les mencheviques et les socialistes-révolutionnaires ne l’avaient pas refusé par principe.

[2] Il évoque même des « bacchanales de l’anarchie » en décrivant les mutineries de soldats durant la révolution de février (p. 83).

[3] « (…) à moins que l’on n’entende par contre-révolution le rétablissement de l’ordre à l’arrière et celui de la combativité au front. », p. 162, ce qui était le cas de Kornilov, d’accord en cela avec le gouvernement, et dont la tentative de putsch serait avant tout due à une incompréhension mutuelle.

12.07.2024 à 10:34

Alexandre Sumpf, Lénine, Paris, Flammarion, 2023, 640 pages, 26 € pour l’édition papier / 17,99 € pour l’édition numérique.

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Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque Si le centenaire des révolutions russes de 1917 avait suscité une vaste série de publications, dont notre blog avait largement rendu compte, celui de la mort de Lénine s’avère moins vendeur pour les éditeurs : sans parler de rééditions, les parutions se comptent sur les doigts d’une seule main. Parmi elles, une nouvelle biographie, écrite par Alexandre Sumpf, dont on connaît les compétences : l’universitaire a en effet accumulé ces dernières années toute une série de livres souvent passionnants, que […]
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Lénine de Alexandre Sumpf - Editions Flammarion

Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque

Si le centenaire des révolutions russes de 1917 avait suscité une vaste série de publications, dont notre blog avait largement rendu compte, celui de la mort de Lénine s’avère moins vendeur pour les éditeurs : sans parler de rééditions, les parutions se comptent sur les doigts d’une seule main. Parmi elles, une nouvelle biographie, écrite par Alexandre Sumpf, dont on connaît les compétences : l’universitaire a en effet accumulé ces dernières années toute une série de livres souvent passionnants, que ce soit sur le versant russe de la Première Guerre mondiale, sur le cinéma, Raspoutine, l’Okhrana, les révolutions russes bien sûr et également l’histoire de l’URSS (De Lénine à Gagarine).

Après les biographies de Jean-Jacques Marie, qui défendait l’homme politique, et celles, nettement plus à charge, de Robert Service ou Stéphane Courtois – j’ose à peine mentionner celle de Luc Mary, tant elle est à l’opposé du travail historien – Alexandre Sumpf cherche à se positionner à l’écart de ces engagements afin de retrouver le vrai Lénine. Tâche délicate, bien sûr, quand on connaît le caractère clivant et toujours brûlant du siècle des communismes auquel Lénine est forcément lié. Pour cela, il met à profit ses champs de recherche privilégiés : des caricatures ou dessins vulgarisateurs sont ainsi reproduits à plusieurs moments et analysés, ce qui offre des entrées originales. Autre singularité, le refus d’un plan chronologique. Alexandre Sumpf alterne ainsi des chapitres consacrés à l’année 1917, cardinale, et des chapitres portant sur les périodes antérieures, parfois même des chapitres enjambant l’avant et l’après 1917, comme sur certains de ses collaborateurs (dont l’indispensable Sverdlov, souvent négligé) – et collaboratrices, l’auteur insistant à raison sur leur autonomie et la valeur propre de leur travail (il s’agit en l’occurrence de Kroupskaïa, Inessa Armand et les deux sœurs de Lénine, Anna et Maria).

Concernant la jeunesse de Lénine, il la présente comme totalement inscrite dans son temps, refusant l’idée d’un profil atypique. Son engagement révolutionnaire est de la sorte parfaitement logique, et plus que l’exécution de son frère aîné, c’est la famine de 1892 qui l’aurait fait basculer vers le marxisme. À plusieurs reprises, Alexandre Sumpf adopte un ton plus léger, effectuant des parallèles surprenants, ainsi du Petit Nicolas lorsqu’il est question d’évoquer le pilier que constituait l’éducation pour les parents Oulianov. Mettant à profit sa formation d’avocat dans ses capacités oratoires, Lénine fut aussi quelqu’un s’engageant totalement pour sa vision de la révolution, prenant en compte à part entière la question paysanne en Russie. La centralité de la construction d’un parti de cadres est bien saisie[1], et des questions sensibles comme le financement des activités politiques ne sont pas oubliées : la fameuse affaire du braquage de banque ou celle de la captation d’héritage, même si, sur la durée, c’est sans doute les aides financières du SPD qui furent plus conséquentes. Alexandre Sumpf déduit de cette centralité du parti la place déterminante accordée à la prise du pouvoir, au-delà des mots d’ordre plus ponctuels, ce qui tendrait à faire de Lénine un homme régi par une idée fixe, sans le pragmatisme et l’évolution que lui accordait un Marcel Liebman, par exemple.

Mais place est également faite à sa vie privée – humble, avec une capacité de travail considérable –, aux lieux qu’il fréquente le plus (le triangle bibliothèques – cafés – imprimeries), et à ses activités non politiques, la chasse, la natation, le vélo, et surtout la randonnée, toutes lui permettant d’évacuer les tensions générées par les polémiques internes au mouvement révolutionnaire (la guerre civile comme mode de vie). Durant les années de militantisme qui précèdent 1917, le livre met à profit les documents de l’Okhrana et même des autres services secrets, qui prouvent l’intérêt porté à Lénine en tant que leader révolutionnaire et danger majeur. Il n’empêche, certaines affirmations (la guerre civile débutant avec la prise de pouvoir en octobre, alors qu’elle a déjà commencé tout au long de l’année) ou oublis (rien sur le rôle de Trotsky dans la préparation du soulèvement) ne peuvent manquer de surprendre, tout comme le choix des mots (opportunisme plutôt que pragmatisme, par exemple). Le plan choisi, d’ailleurs, pour être indéniablement original, privilégie des coupes stratigraphiques sur des thématiques, tranchant dans la chronologie sans forcément pouvoir restituer le contexte général, au risque d’analyser Lénine en vase clos.

Comment comprendre Lénine sans retracer le déroulé de la guerre civile ? Sans restituer les difficultés de la vie quotidienne dans la Russie bolchevique, comme a su le faire Jean-Jacques Marie dans Vivre dans la Russie de Lénine ? Sans parler de manière substantielle des communistes de gauche de 1918, de l’Opposition ouvrière ou de celle du Centralisme démocratique ? Sans retracer les actions menées par la jeune Internationale communiste et sans parler du Congrès des Peuples d’Orient ? Sans restituer le foisonnement créatif qui fut celui des années révolutionnaires ? Néanmoins, Alexandre Sumpf a le mérite de mettre l’accent occasionnellement sur des épisodes moins connus ou des détails signifiants, ainsi de la volonté manifestée par Lénine de connaître au mieux l’état d’esprit de la base dans le cadre des négociations de Brest-Litovsk, de l’exigence de respect de la personnalité nationale des peuples, de la lutte contre l’antisémitisme et le bureaucratisme, ou de la nécessité, pour Lénine, de convaincre les paysans des vertus du modèle coopératif (à l’horizon 1940). Sur le thème si délicat et clivant de la violence une fois les bolcheviques au pouvoir, il nous semble par exemple que le poids du passé (le traumatisme de la répression subie par la Commune de Paris, ou celle des révolutionnaires finlandais) n’est pas suffisamment pris en compte.

Dans la question de la filiation Lénine-Staline, Alexandre Sumpf les rapproche quant à l’utilisation d’une violence aux « accents génocidaires »[2] (p. 376), visant en particulier les cosaques du Don, tout comme sur leur vision « utilitariste » de l’art. Sur la délicate question de Cronstadt et du tournant qu’il constitua, Victor Serge est longuement cité, à juste titre selon nous. Quant au testament, Alexandre Sumpf y voit plutôt la démonstration d’un leader s’estimant irremplaçable et qui préparait justement son retour aux affaires[3]… L’utilisation de témoignages nombreux et variés rend cette biographie extrêmement vivante, mais on peut regretter l’absence totale de notes et de références précises des documents utilisés[4]. Pour autant on peut douter qu’elle parvienne à s’imposer comme LA référence en la matière.

[1] « La forge du parti révolutionnaire (…) a été l’œuvre de sa vie. », p. 158.

[2] Expression pour le moins impropre….

[3] « Ces textes ne constituent pas un testament, au contraire : ils forment un discours de politique générale délivré par un chef qui entend reprendre les rênes de l’État-Parti et sauver la nation communiste d’une nouvelle guerre civile. », (p. 256).

[4] Quelques erreurs ponctuelles sont également à noter : une année de naissance erronée pour Staline (1879 au lieu de 1878, p. 124) ; Riazanov présenté comme « social-démocrate indépendant » (p. 512) alors qu’il est bolchevique depuis 1917 ; une photographie censée être celle de Staline, Lénine et Trotsky, alors que c’est Kalinine qui en constitue le troisième personnage (p. 564).

11.07.2024 à 00:01

Serge Quadruppani, Une histoire personnelle de l’ultra-gauche, Paris, Divergences, 2023, 216 pages, 16 €.

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  Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque Pour le grand public, Serge Quadruppani est plus connu pour son travail de traducteur[1] et d’écrivain de romans noirs. Pour les milieux liés à l’extrême-gauche, il y a fort à parier que reviendra en mémoire la dénonciation menée par Didier Daeninckx à la fin du siècle dernier concernant les accointances entre quelques militants ultra-gauches et les milieux négationnistes. Ce témoignage est donc fort utile afin de rappeler certaines réalités, éclairer un parcours personnel singulier et apporter des […]
Texte intégral (1023 mots)

 

Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque

Pour le grand public, Serge Quadruppani est plus connu pour son travail de traducteur[1] et d’écrivain de romans noirs. Pour les milieux liés à l’extrême-gauche, il y a fort à parier que reviendra en mémoire la dénonciation menée par Didier Daeninckx à la fin du siècle dernier concernant les accointances entre quelques militants ultra-gauches et les milieux négationnistes. Ce témoignage est donc fort utile afin de rappeler certaines réalités, éclairer un parcours personnel singulier et apporter des éléments de réflexion sur l’avenir du communisme. Le risque étant de dérouter en partie le lecteur, puisque Une histoire personnelle de l’ultra-gauche mêle texte écrit de nos jours, notes de lecture et articles plus ou moins anciens, rappels historiques et considérations sur l’état actuel du capitalisme et des alternatives qui peinent à s’en extraire.

 

Une chose est sûre, ce n’est pas dans ce petit opuscule que vous trouverez une histoire complète et détaillée de ce qu’on appelle l’ultra-gauche, que l’on peut également qualifier de communisme de gauche. Certes, Serge Quadruppani part des intuitions du jeune Marx pour en souligner toute la fraicheur, fait un détour par Paul Lafargue et son Droit à la paresse, lecture qui l’a beaucoup marqué adolescent, critique la thèse de Kautsky et Lénine selon laquelle la conscience politique serait nécessairement apportée de l’extérieur au prolétariat, pour évoquer ce moment clef de l’histoire de l’ultra-gauche, la polémique entre Lénine et les communistes de conseils, entre autres. De ce courant protéiforme, il retient principalement l’accent mis sur l’auto-organisation de la classe, et ces continuateurs que furent Socialisme ou Barbarie, l’Internationale situationniste et Information et Correspondance Ouvrières (ICO). Si un deuxième moment clef de son historique doit être relevé, c’est 68 et ses effets induits.

 

Mais Une histoire personnelle de l’ultra-gauche donne aussi l’occasion à Serge Quadruppani de parler de lui, de ses origines modestes et de son parcours politique. La directrice d’école maternelle qu’on lui avait donnée comme « marraine » sociale était en effet la sœur de René Lefeuvre, figure essentielle de l’extrême-gauche et fondateur des Cahiers Spartacus. C’est ainsi que l’adolescent se vit ouvrir une porte sur le mouvement ouvrier, ses marges fructueuses, enrichissantes (dont le groupe/librairie de La Vieille Taupe, à ne pas confondre avec sa reprise par le négationniste Pierre Guillaume), mais aussi sur le lit de son mentor. Sans acrimonie, ce qui ne veut pas dire sans colère rentrée, il révèle en effet la relation pédophile qui, adolescent, le lia un temps à cet homosexuel discret. Il fait également le lien entre itinéraire individuel et contexte historique, saluant la force subversive de Mai 68, qui osa s’attaquer à toutes les institutions, mais négligea assurément la question du consentement.

 

Du patrimoine de l’ultra-gauche, véritable « boite à outils », il retient la recherche presque obsessionnelle du sujet révolutionnaire, ce prolétariat appelé à faire advenir l’être-commun, mais critique la « passion de l’impuissance » (p. 16) ainsi que les errements de certains textes publiés par La Banquise, cette revue publiée le temps de quatre numéros dans les années 1980 et qui se retrouva une dizaine d’années plus tard dans le collimateur de Didier Daeninckx. Auto-critique ne signifiant pas reniement, simplement remise en contexte et mises au point très claires et très nettes sur ce qu’il qualifie d’erreurs. Sur la situation et l’avenir actuel du communisme en tant que mouvement, il rejette les limitations données par certains théoriciens d’ultra-gauches aux contours du prolétariat, au profit d’une vision plus large, justifiée selon lui par la crise climatique, accoucheur du fameux « être-commun ».

 

Car « Au cours des combats qu’elle mena dans les siècles précédents le nôtre, la classe ouvrière s’est retrouvée dépositaire d’un trésor plus ancien qu’elle, un trésor de possibilités pour toute l’humanité, que nous devons apprendre à piller, à présent que les ouvriers sont toujours là, mais que la classe ouvrière, comme « classe qui doit abolir toutes les classes », est définitivement absente. » (p. 125-126). Nulle surprise, dès lors, à voir Serge Quadruppani critiquer la tendance excessivement scientiste de l’ultra-gauche et à privilégier la complexité des causes et la pluralité des possibles, aussi bien passés que futurs. « (…) aux yeux des révolutionnaires, ce qui aurait pu être devrait être aussi important que ce qui est, pour tenter d’apercevoir ce qui sera. » (p. 132). Après Le Brise-glace, Mordicus et l’expérience associative de La Bonne descente, Serge Quadruppani abandonnera l’ultra-gauche, mais pas l’engagement et le militantisme. Écrivant désormais pour lundi matin, il se qualifie d’ultra-gauche anarcho-autonome, retenant l’éthique de l’anarchisme et l’expérience capitale de l’opéraïsme, avec en ligne de mire la fin de l’exploitation capitaliste. Vaste programme !

 

Jean-Guillaume Lanuque

[1] Il a entre autres traduit les six premiers volumes du passionnant cycle de l’inquisiteur Eymerich de Valerio Evangelisti, ainsi que de nombreux polars italiens.

10.07.2024 à 17:10

Wu Ming, Proletkult, Paris, Métailié, collection « Bibliothèque italienne », 2022 (édition originale en 2018), traduction par Anne Echenoz, 352 pages, 22 € pour l’édition papier / 9,99 € pour l’édition numérique.

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Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque C’est à l’occasion du centenaire de la révolution russe que le collectif d’auteurs italiens Wu Ming, à qui l’on doit entre autres L’œil de Carafa (sous le pseudonyme parallèle de Luther Blisset) ou L’étoile du matin (autour de T.E. Lawrence et J.R.R. Tolkien), avait publié Proletkult, une vision de la révolution bolchevique un pas de côté. Le personnage choisi comme narrateur est en effet aussi singulier que captivant, puisqu’il s’agit d’Alexandre Bogdanov. Ce dernier avait déjà par le […]
Texte intégral (821 mots)

Un compte rendu de Jean-Guillaume Lanuque

C’est à l’occasion du centenaire de la révolution russe que le collectif d’auteurs italiens Wu Ming, à qui l’on doit entre autres L’œil de Carafa (sous le pseudonyme parallèle de Luther Blisset) ou L’étoile du matin (autour de T.E. Lawrence et J.R.R. Tolkien), avait publié Proletkult, une vision de la révolution bolchevique un pas de côté. Le personnage choisi comme narrateur est en effet aussi singulier que captivant, puisqu’il s’agit d’Alexandre Bogdanov. Ce dernier avait déjà par le passé retenu l’attention des auteurs de fiction, ainsi de Philippe Videlier (« Les échecs de Lénine » dans Le Jardin de Bakounine et autres nouvelles de l’Histoire[1]) ou de Luc Pleudon (la nouvelle « J’étais, je suis, je serais » dans l’anthologie Dimension Merveilleux scientifique).

Nous sommes à la veille des célébrations du dixième anniversaire de la révolution, et Bogdanov, devenu directeur d’un institut de transfusion sanguine, est confronté à une jeune femme, Denni, qui affirme venir d’une autre planète, Nacun. Elle se dit également fille de Léonid Volok, un camarade de Bogdanov qui participa au fameux cambriolage de la banque de Tiflis (Géorgie) le 13 juin 1907 en compagnie d’un certain Koba (alias Staline), braquage destiné à alimenter les caisses des bolcheviques. L’occasion pour le révolutionnaire marginalisé de revivre son passé par le biais de divers flash-backs tout en s’interrogeant sur cette pathologie étrange qui touche la jeune Denni… Le travail de documentation est solide, tant le roman est irrigué des propres conceptions de Bogdanov, mais également des dissensions internes aux bolcheviques. L’épisode de la divergence philosophique avec Lénine, qui poussa ce dernier à écrire son essai Matérialisme et empiriocriticisme, est ainsi largement exposé.

Plus largement, Proletkult offre une réflexion sur le bilan de la révolution. Les rencontres de Bogdanov avec certains de ses anciens camarades, bien que relativement didactiques, le confrontent à diverses justifications : Litvinov insiste sur la dimension géopolitique de l’affrontement (avec l’espoir placé dans les progrès de la révolution en Asie), Lounatcharski sur les audaces de la création culturelle, et Kollontaï sur les progrès obtenus pour les droits des femmes. Wu Ming semble finalement endosser la vision prêtée à Bogdanov : la révolution n’a pas tenu ses promesses car elle n’a pas su forger une culture nouvelle, véritablement prolétarienne, qui aurait permis de briser en profondeur les cadres anciens. C’est là ce qui caractérisait en particulier le mouvement du Proletkult, justement. La révolution s’est enkystée dans des dogmes, là où le mouvement demeurait vital, à l’image de la tectologie, ou science de l’organisation des choses, promue par Bogdanov.

« Cet événement imparfait, tordu, raté même, que nous sommes sur le point de célébrer et qui est la meilleure chose qui soit sortie de la plus grande guerre de tous les temps. Nous ne l’aimons pas mais c’est ce que nous avons. Et c’est un fait unique. » (p. 176). La présence de Léonid Volok, personnage issu de l’imagination de Bogdanov, de Denni et les informations qu’elle donne sur la vie sur la planète Nacun (à la place de Mars), répondent à deux finalités complémentaires : une mise en abyme avec les propres fictions d’Alexandre Bogdanov, L’étoile rouge et sa suite, L’ingénieur Menni[2], et la confrontation d’une révolution déchue avec son pendant victorieux. Victorieux, certes, mais toujours en mouvement, contrainte de faire face à de nouveaux défis, la lutte contre un environnement qui se dégrade et l’interrogation sur une éventuelle colonisation de la planète Terre… Le dénouement du roman, qui croise la véritable mort de Bogdanov, s’avère particulièrement touchant.

[1] Voir sa recension sur ce même blog : https://dissidences.hypotheses.org/4364

[2] Voir leur analyse sur ce blog : https://dissidences.hypotheses.org/4587 Wu Ming commet toutefois une petite erreur en parlant de science-fiction, l’expression ne voyant le jour qu’en 1929, aux États-Unis, sous la plume d’Hugo Gernsback.

18.02.2024 à 18:21

Clifford D. Conner, Marat. Savant et tribun (Jean Paul Marat : tribune of the French Revolution), Paris, La Fabrique éditions, traduction d’Etienne Dobenesque, 2021 (2012 pour l’édition en langue anglaise), 232 pages, 15 €.

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Un compte-rendu de Jean-Guillaume Lanuque Clifford D. Conner s’était fait connaître en France par sa passionnante Histoire populaire des sciences, éditée chez L’Echappée[1]. Ce que l’on sait moins, c’est qu’il s’est aussi intéressé à Jean-Paul Marat, par le biais de deux biographies : une première dans les années 1990, plutôt centrée sur sa carrière scientifique, une seconde dans les années 2010, davantage axée sur les dimensions politique et journalistique du personnage. C’est ce second travail qui a été traduit par les éditions de La […]
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Un compte-rendu de Jean-Guillaume Lanuque

Clifford D. Conner s’était fait connaître en France par sa passionnante Histoire populaire des sciences, éditée chez L’Echappée[1]. Ce que l’on sait moins, c’est qu’il s’est aussi intéressé à Jean-Paul Marat, par le biais de deux biographies : une première dans les années 1990, plutôt centrée sur sa carrière scientifique, une seconde dans les années 2010, davantage axée sur les dimensions politique et journalistique du personnage. C’est ce second travail qui a été traduit par les éditions de La Fabrique. L’occasion de dissiper la légende noire de Marat, que l’on résume souvent à des clichés, un homme obsédé par les exécutions, quand n’est pas valorisée la figure de sa meurtrière (voir par exemple l’essai de Michel Onfray sur Charlotte Corday).

D’emblée, Clifford Conner le présente comme un meneur révolutionnaire majeur. Suivant un plan classiquement chronologique, il rappelle ses origines suisses, son enfance paisible également. Marat poursuivit ses études en France, à Bordeaux puis à Paris, avant de partir une dizaine d’années à l’étranger (en Angleterre, principalement). Devenu médecin, il écrivit d’abord des écrits philosophiques, puis politiques : Les chaînes de l’esclavage est son plus célèbre pamphlet, dans lequel il critique les inégalités sociales et défend déjà la nécessité de l’action révolutionnaire. De retour en France, il se constitue une clientèle surtout aristocratique, et finit même par intégrer la Maison du Comte d’Artois (le futur Charles X) de 1777 à 1783. Parallèlement, il mène des expériences de science physique, sur lesquelles la biographie ne s’approfondit malheureusement pas. Tout juste sait-on qu’elles concernent surtout l’optique, dans une approche critique de Newton. C’est d’ailleurs une des causes du fossé croissant entre Marat et l’Académie des sciences, plus orthodoxe et conservatrice en la matière. La pertinence de l’approche de Marat a pourtant ultérieurement été reconnue.

Au début de 1789, il publie un pamphlet réformiste, dans lequel il exprime sa confiance dans le roi tout en manifestant un vif intérêt pour le peuple, mélange de modérantisme politique et de radicalisme social qui lui vaut d’être inquiété par la police. Selon Conner, « Si Marat a cette place unique dans l’histoire, c’est parce qu’il a été le défenseur le plus opiniâtre et résolu de l’égalité sociale dans la Révolution française. » (p. 73), ce que l’on peut d’ailleurs discuter en mettant en perspective un autre personnage clef, Jacques Roux (voir la biographie de Walter Markov publiée par Libertalia[2]). C’est en septembre de la même année que débute la parution de L’Ami du peuple, le journal qui allait le rendre célèbre en tant que porte-parole des petites gens, « l’œil du peuple » ainsi que Marat se qualifiait lui-même. Clifford Conner explique d’ailleurs que le journal a eu un effet direct sur la mobilisation des femmes parisiennes lors des journées d’octobre. S’ensuit d’ailleurs une tentative d’arrestation à l’initiative des autorités municipales, la première d’une longue série, ce qui pousse Marat à opter pour la clandestinité. Les réseaux qu’il s’était constitués lui furent à cet égard d’une aide précieuse. Il finit par s’exiler un temps en Angleterre jusqu’en mai 1790, la suspension de son journal étant remplacée par l’écriture d’un pamphlet où il appelait à la venue d’un dictateur public afin de relancer le processus révolutionnaire.

Ce qui caractérise les articles de L’Ami du peuple, c’est un esprit critique incisif, qui n’hésite pas à tancer le peuple et à manier une écriture incendiaire pour le faire réagir, non sans succomber parfois à des phases de découragement. Il s’en prend ainsi et successivement à la Fête de la fédération et sa fausse harmonie sociale, aux officiers responsables de la répression des mutinés de Nancy, à Mirabeau qu’il accuse d’être employé par le roi au moment de sa mort, au roi lui-même dont il soupçonne la fuite à venir. Ces quelques exemples permettent de comprendre la réputation de prophète dont on l’a parfois doté – quand bien même il conviendrait de recenser la totalité de ses avertissements afin de voir si la proportion de ceux qui se sont révélés justes est si conséquente. Face à la marche à la guerre de 1792, il avertit sur les dangers de celle-ci et sur les trahisons à venir des généraux. Ce n’est que la victoire insurrectionnelle du 10 août qui lui permet de sortir enfin de la clandestinité, le ton de son journal se faisant plus confiant à l’égard du nouveau pouvoir. Élu à la Convention, Marat manifeste un réel souci de légalité révolutionnaire, changeant le titre de sa publication en Journal de la République française. Il n’en demeure pas moins un député indépendant, mais s’allie avec la Montagne, front uni entre les sans-culottes et la petite bourgeoisie, selon Clifford Conner.

En butte à des offensives répétées des Girondins dans l’enceinte même de l’assemblée, il finit par être accusé devant le tout jeune Tribunal révolutionnaire qu’il appelait de ses vœux, mais en sort sous les acclamations ! Plus étonnant, face aux revendications exprimées par les Enragés, il s’y oppose par souci d’unité et parce qu’il considère que la Convention peut être l’instrument de la révolution sociale, pour peu qu’elle soit purgée des Girondins. Il est d’ailleurs à la manœuvre pour l’insurrection de mai-juin, mais sa démission de la Convention, qu’il présente comme un moyen de ne pas braquer la province contre Paris, s’accompagne d’un retrait de la vie politique. Il passe les dernières semaines de sa vie chez lui, à travailler pour son journal. Prenant et passionnant, le récit de Clifford Conner souffre toutefois d’une faiblesse, celle de s’appuyer quasi exclusivement sur une bibliographie datée (Georges Lefebvre et George Rudé en particulier).

[1] Voir la critique sur notre blog : https://dissidences.hypotheses.org/474

[2] Voir la critique sur notre blog : https://dissidences.hypotheses.org/9248

18.02.2024 à 18:11

Frédérique Matonti, Comment sommes-nous devenus réacs ?, Paris, Fayard, collection « Raison de plus », 2021, 208 pages, 18 € pour l’édition papier / 12,99 € pour l’édition numérique.

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Un compte-rendu de Jean-Guillaume Lanuque Le titre choisi pour le dernier essai de Frédérique Matonti vaut profession de foi. Elle se penche en effet sur la « droitisation » de la société, ou disons d’une partie de ses « élites », pour mieux la critiquer. Son objectif : retracer certaines étapes clef ayant mené à la victoire d’une hégémonie (au sens gramscien du terme) conservatrice, sensible selon elle dans la campagne gouvernementale contre l’islamo-gauchisme ou dans les invités récurrents de la plupart des chaines […]
Texte intégral (1113 mots)

Un compte-rendu de Jean-Guillaume Lanuque

Le titre choisi pour le dernier essai de Frédérique Matonti vaut profession de foi. Elle se penche en effet sur la « droitisation » de la société, ou disons d’une partie de ses « élites », pour mieux la critiquer. Son objectif : retracer certaines étapes clef ayant mené à la victoire d’une hégémonie (au sens gramscien du terme) conservatrice, sensible selon elle dans la campagne gouvernementale contre l’islamo-gauchisme ou dans les invités récurrents de la plupart des chaines d’information en continu (Charlotte d’Ornellas, Eugénie Bastié, Barbara Lefebvre…). Pour cela, Frédérique Matonti effectue plusieurs carottages dans les dernières décennies, pour mieux souligner le contraste avec les années 1960 et 1970, où prédominait assez largement dans les sphères intellectuelles un discours du social.

Ainsi, sur la question de l’immigration, elle oppose les choix de la gauche au pouvoir – non-respect de la promesse mitterrandienne du droit de vote accordé aux immigrés pour les élections municipales, contrôle accru de l’immigration allant à rebours de la volonté d’intégration – et les luttes parties de la base, SOS Racisme ou la Marche pour l’égalité et contre le racisme. Dans ce contexte, La Défaite de la pensée, d’Alain Finkielkraut, paru en 1987, est un repère crucial : il y dresse une opposition rigide entre les Lumières et leur universalisme d’un côté, le multiculturalisme et le relativisme de l’autre ; entre la culture populaire, illégitime, et la culture noble et légitime. Partant, c’est le “jeunisme” et le métissage qui sont aussi dans sa ligne de mire. Moins connu, Voyage au centre du malaise français de Paul Yonnet en 1993 postule un racisme et un antisémitisme nourris par ceux qui le combattent.

Autre parution marquante et significative, La Pensée 68 de Luc Ferry et Alain Renaut, exemple paradigmatique de la haine à l’égard de 68. Frédérique Matonti rappelle à cette occasion que contrairement à ce qu’avance l’ouvrage en s’en prenant aux sciences humaines et sociales de l’époque, les idées ne font pas les événements, ni pour la Révolution française, ni pour les Années 68. De même, l’accent mis sur le « gauchisme » culturel au détriment du Mai ouvrier aura une longue postérité, en particulier lors de la campagne présidentielle de Sarkozy en 2007. Un des développements les plus intéressants a trait à la construction d’une dichotomie entre deux gauches, l’une plus « sociétale » et déconnectée des classes populaires, l’autre plus sensible aux revendications de cette dernière… en particulier sur la lutte contre l’immigration. Frédérique Matonti démontre bien que cette dichotomie résulte de la construction d’un épouvantail étatsunien, celui du « politiquement correct » et du « sexuellement correct » par le camp conservateur, relayé en France au début des années 1990 par des personnalités comme François Furet, Annie Kriegel, Pascal Bruckner ou Philippe Raynaud, puis par Elisabeth Badinter, Mona Ozouf ou Claude Habib. Elle y voit, outre une manifestation de l’anti-féminisme, une peur des minorités d’origine étrangère vis-à-vis de la culture occidentale. Cela lui permet également de souligner les timidités de la gauche plurielle d’alors, que ce soit sur le PACS ou la loi sur la parité, tous deux fort limités (voir à cet égard L’incroyable histoire du PACS).

Chapitre particulièrement sensible, celui qui débute avec l’affaire du voile de Creil en 1989. Frédérique Matonti replace utilement ce sujet dans l’histoire de la laïcité, estimant que la position du ministre Jospin à l’époque se situe dans la tradition de Jaurès et Briand, concepteurs de la loi de 1905 et adversaires d’un anticléricalisme républicain. Elle rappelle également que jadis avec le catholicisme, aujourd’hui avec l’islam, une tendance à inférioriser les femmes existe, à ne les voir qu’instrumentalisées par des hommes religieux. Toutefois, sa perception d’une laïcité dure dont la plupart (mais pas tous, loin de là, ce qu’elle omet …) des défenseurs actuels visent l’islam, pour être juste, n’en néglige pas moins la possibilité d’une laïcité radicale, visant par exemple l’ensemble des écoles religieuses…

Pour expliciter ce basculement conservateur ou réactionnaire dans son ensemble, une pluralité de phénomènes sont invoqués : l’apparition d’intellectuels médiatiques dont les premiers représentants seraient les « nouveaux philosophes » ; l’évolution de l’université, aboutissant à une réduction des postes encourageant l’investissement de certains diplômés dans des essais éditoriaux et désarmant dans le même temps les universitaires, de plus en plus mobilisés par les projets et les demandes de financement ; la concurrence croissante des chaines de télévision, stimulant la provocation, et le contrôle croissant des groupes industriels sur les médias ; sans oublier l’action de certains réseaux, celui constitué autour de la revue Le Débat étant particulièrement ciblé avec Marcel Gauchet.

Spécialiste des intellectuels communistes, Frédérique Matonti a explicitement fait le choix de centrer son essai sur les évolutions des idées, ce qui mériterait bien sûr d’être complété par d’autres approches : l’évolution du contexte géopolitique et économique (l’offensive dite néo-libérale), les mutations démographiques de la population française, le rôle du cadre de l’Union européenne, sans oublier un angle mort de son approche, celui des évolutions contrastées de l’extrême gauche ou de la gauche radicale, plus ou moins poreuse à certaines tendances de fond (je pense entre autres à la place de la religion). De même, sa conclusion manque quelque peu d’audace, espérant une victoire d’une nouvelle gauche unie ressuscitant un État providence…

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