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05.09.2025 à 12:00

10 septembre avec la base ou 18 septembre avec les syndicats institutionnels ?

Pour décrypter les manoeuvres syndicales autour du 10 septembre

Texte intégral (1043 mots)

Pour décrypter les manoeuvres syndicales autour du 10 septembre

10 septembre avec la base ou 18 septembre avec les syndicats institutionnels ?

La perspective anarchosyndicaliste sur les mobilisations sociales est fondamentalement critique de l'appareil syndical traditionnel, perçu comme une force de modération et de trahison de la base militante. Dans cette optique, l'appel de l'intersyndicale pour le 18 septembre, en réaction à la journée du 10 septembre, n'est pas une simple coïncidence de calendrier, mais une manœuvre délibérée pour étouffer un mouvement de lutte plus radical et auto-organisé.

La manifestation du 10 septembre : le réveil de la base

Le 10 septembre, le mouvement est né en dehors des structures habituelles, à l'appel de collectifs anonymes sur les réseaux sociaux. Ce type de mobilisation, qui cherche à contourner les « corps intermédiaires », est souvent vu comme plus authentique et plus en phase avec le véritable ras-le-bol populaire. Le slogan « bloquons tout » témoigne d'une volonté de ne pas se limiter à une simple « journée de grève » encadrée et sans effet, mais de réellement paralyser le système économique pour faire plier le pouvoir.

De notre point de vue, l'absence de chefs, de porte-parole et de syndicats est un atout, car elle permet une auto-organisation et une action directe. La lutte ne dépend plus de négociations en coulisses ou de la « soumission » à un préavis de grève. C'est l'essence même de la praxis anarchiste : le pouvoir est dans les mains de la base, non dans celles d'une hiérarchie de bureaucrates.

La manœuvre de l'intersyndicale : le contrôle et la trahison

En réponse à cette dynamique de base, l'intersyndicale a dégainé son propre appel pour le 18 septembre. Pour nous anarchistes, cette décision n'est pas un soutien à la colère populaire, mais une tentative de récupération.

Les critiques se focalisent sur plusieurs points :
– Le refus de soutenir la lutte spontanée : au lieu de se joindre à la mobilisation du 10 septembre et d'en renforcer l'élan, les syndicats l'ont ignorée, voire discréditée en la jugeant « trop peu structurée » ou en pointant le risque de « débordements ». Pour les anarchistes, ces « débordements » ne sont que l'expression d'une colère légitime, que les syndicats cherchent à museler au nom de l'ordre social.

– L'encadrement des luttes : En appelant à une journée de grève « classique » le 18 septembre, l'intersyndicale offre au gouvernement un cadre de négociation et de désamorçage. Le but n'est plus de renverser le pouvoir ou de bloquer le pays, mais de faire pression pour obtenir des concessions mineures, ce qui, au final, ne change rien au système d'exploitation. C'est une stratégie de « syndicalisme de concertation » qui dilue la force du mouvement.

– La préservation de leur propre pouvoir : En organisant une mobilisation séparée, les syndicats montrent qu'ils cherchent avant tout à maintenir leur position de « représentants » de la classe ouvrière. Ils s'arrogent le droit de décider du calendrier et des modalités de la lutte, refusant de laisser l'initiative aux travailleurs eux-mêmes. Cela consolide leur rôle d'intermédiaires, qui finissent par devenir des gardiens de l'ordre établi.

En conclusion, la perspective anarchiste voit dans la confrontation entre les dates du 10 et du 18 septembre une démonstration classique de la trahison syndicale. D'un côté, la base qui cherche à s'auto-organiser pour une lutte sans concession ; de l'autre, les syndicats qui tentent de reprendre le contrôle pour négocier un compromis, et ainsi étouffer la radicalité du mouvement.

29/08/2025

CNT-AIT 03

initiative.03@cnt-ait.info https://cntait03.wordpress.com/actualite/

Texte en PDF pour faire circuler dans sa boite : https://cnt-ait.info/wp-content/uploads/2025/08/10-SEPTEMBRE-AVEC-LA-BASE.pdf

RAPPEL : dans le privé, pour se mettre en grève légalement, pas besoin de syndicat et encore moins de préavis (au contraire !) Il suffit d'être deux, et d'avoir des revendications en lien avec la boite (et elles ne manquent pas : salaires, conditions de travail, horaires, …) Pour en savoir plus : https://cnt-ait.info/2023/01/29/comment-faire-greve

Pour aller plus loin : TECHNIQUES DE LUTTES https://cnt-ait.info/2020/06/17/techniques-de-luttes/

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05.09.2025 à 11:00

[10/09] Qu'est-ce qu'on attend ?

Tract diffusé à l'ag parisienne du 28 août :

Texte intégral (1430 mots)

Tract diffusé à l'ag parisienne du 28 août :

Avec le budget proposé en juillet, le gouvernement nous promet une autoroute vers la casse sociale en à peine trois ans. Bayrou justifie ça par la dette, mais quand on y regarde de plus près c'est aussi et surtout pour la guerre : la défense est le seul ministère dont le budget augmente (+3,5 milliards pour 2026).

La militarisation, c'est créer un danger, un ennemi (la Russie par exemple), c'est renforcer le nationalisme (“il faut nous défendre”) et s'en servir pour arroser d'argent l'industrie de l'armement. Et on peut être sûr·e·s que la gauche au pouvoir ne changerait pas ce cap. Déjà, les différents partis de gauche sont loin de remettre en cause la militarisation à marche forcée mise en place par le gouvernement : missiles et fusées ne dérangent pas le PCF – ni la CGT – tant qu'ils sont franco-français, et la LFI ne rechigne pas devant la course à la sécurisation des frontières. Tout au plus la voudraient-ils plus douce, et chercher l'argent chez les riches et non les pauvres. Dans les médias, la politique, l'affichage public, les écoles, les discours militaristes et nationalistes sont hyper présents depuis des années pour nous préparer à se “serrer la ceinture” pour l'effort de guerre : la militarisation justifie alors la casse sociale et la montée des nationalismes.

Au-delà des discours guerriers, le gouvernement actuel continue de manière décomplexée la destruction du peu d' ”acquis sociaux” qu'il ne touchait pas encore pour maintenir un semblant de paix sociale : suppression de deux jours fériés, réforme du RSA et du chômage, coupe dans les dépenses de santé, retraites, etc. Le pouvoir nous chie à la gueule et ne s'en cache pas. Après les loi anti-trans de l'été dernier, la vague de rafles qui a eu lieu dans les transports du début de l'été et les promesses de doubler le nombre de places en CRA d'ici 2027 (et passer le nombre de jours en CRA à 210 jours pour certaines personnes), sans compter le plan prison qui prévoit 18 000 nouvelles places (après en avoir promis 15 000) en taule d'ici 2027, est-ce qu'il nous faut attendre une raison de plus pour commencer à descendre dans la rue, ouvrir notre gueule, et nous bouger ? Leur message est clair : tenez-vous tranquilles et maintenez les rangs de la société raciste et patriarcale. Nous n'en ferons rien.

Même si nous étions loin de nous contenter de ces quelques “acquis sociaux” remis en cause qui de toute façon ne concernent jamais tout le monde, le constat est celui-ci. Depuis cet été, on voit circuler plein d'appels à marquer le coup le 10 septembre : le budget est présenté comme la goutte d'eau qui fait déborder le vase déjà lourd de toutes les réformes récentes et des discours de plus en plus fafs qu'on se tape depuis des années. Si on partage ce ras-le-bol, ce serait quand même dommage qu'un “mouvement social” à la rentrée se limite à des discours prônant la censure du gouvernement. On voit déjà les habituels partis et syndicats se positionner (notamment en faisant leur mea culpa de leur mépris des gilets jaunes), pour pouvoir ensuite servir leurs agendas : on voit les municipales, puis les législatives et la présidentielle se profiler à l'horizon. Pourrait aussi se rejouer le même scénario électoral qui a eu lieu il y a plus d'un an, mettant en avant un fascisme incarné par le RN contre lequel il faut lutter en votant.

Si un mouvement prend forme, ne nous laissons pas avoir : ne soyons ni le faire-valoir des députés de gauche, ni leur marchepied pour les élections. Seul un mouvement incontrôlable et qui valorise tous les moyens d'action sera irrécupérable. Il y a beaucoup plus en jeu que la censure d'un gouvernement et une “victoire” dans les urnes : rebellons-nous contre le travail qui régit nos vies, pas seulement contre les réformes qui le rendent plus pénibles. Qui n'a pas rêvé de crever les pneus de la voiture du patron, ou bien du collègue qui harcèle ? Attaquons l'industrie qui dévaste et tue et pas seulement les lois qui la protègent, comme la belle action anonyme contre Lafarge en Ardèche il y a quelques jours. Luttons contre l'État et contre l'économie en général et pas seulement contre leur budget. L'article « le 10/09 on bloque quoi » sur Indymedia Nantes, par exemple, suggère judicieusement de débrancher les boîtiers fibre présents partout dans la rue.

Nous ne croyons pas en la possibilité de rendre la vie en État démocratique moins pire ou plus vivable. C'est bien la démocratie qui nous a amené·e·s ici, non ? Alors attaquons-la, avec nos moyens. Ceux de l'auto-organisation sans chefs, ni politiciens, ni journalistes. Ceux de la solidarité face à tout type de répression. Ceux de l'action directe.

S'il y a bien eu une sensibilité commune aux derniers mouvements d'ampleur (Gilets Jaunes, émeutes pour Nahel, révoltes en Kanaky), c'est celle de la conflictualité directe et frontale avec l'État : présence répétée et rejoignable dans la rue, débordement des manifs et des cadres imposés, sabotage des infrastructures et des flux (transports, routes, énergies, télécommunications) pour mettre à l'arrêt la normalité, attaques des symboles de l'État (préfectures, commissariats, centres d'impôt), pillage des commerces contre la vie chère, espaces pour se retrouver et discuter autour des barricades et blocages, etc.

Reprenons nos vies en main et faisons exister cette conflictualité en l'articulant avec des pratiques autonomes. Ne laissons pas les partis, les syndicats et les militants zélés récupérer notre colère, ne laissons plus l'État diriger notre quotidien, rompons avec l'isolement et l'impuissance qu'il engendre.

Pour un mouvement créatif et irrécupérable,
Vive la révolte et le sabotage ;
à bas l'État et ses armées.

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05.09.2025 à 10:00

Technofascisme, Une proposition de quitter au plus vite tous les réseaux sociaux

Suite à la réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis en novembre 2024, nombreux ont été les collectifs de gauche – syndicats, associations, médias et revues alternatives, dont Terrestres – à annoncer leur départ du « réseau social » X, mais appelant à s'inscrire sur Bluesky ou Mastodon. Des journalistes du Chiffon et des éditeurs de La Lenteur expliquent dans ce texte en quoi ils jugent cette position insuffisante et pourquoi il faut aller beaucoup plus loin. Pour des raisons de place, il s'agit d'une version écourtée, la version complète – avec une partie sur Elon Musk et le transhumanisme – étant disponible auprès des éditions La Lenteur.

Texte intégral (6111 mots)

Suite à la réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis en novembre 2024, nombreux ont été les collectifs de gauche – syndicats, associations, médias et revues alternatives, dont Terrestres – à annoncer leur départ du « réseau social » X, mais appelant à s'inscrire sur Bluesky ou Mastodon. Des journalistes du Chiffon et des éditeurs de La Lenteur expliquent dans ce texte en quoi ils jugent cette position insuffisante et pourquoi il faut aller beaucoup plus loin. Pour des raisons de place, il s'agit d'une version écourtée, la version complète – avec une partie sur Elon Musk et le transhumanisme – étant disponible auprès des éditions La Lenteur.

Depuis son rachat par Elon Musk en 2022, la plateforme numérique Twitter – rebaptisée X à l'occasion – est rapidement devenue une machine de propagande au service de son nouveau propriétaire, de Donald Trump, et d'une idéologie de droite extrême, ouvertement brutale et haineuse, mêlant xénophobie, suprémacisme blanc, exaltation de la puissance conférée par les armes et les technologies, masculinisme, libertarianisme, eugénisme, et transhumanisme.

Quelques appels à déserter ce « réseau social » avaient déjà fusé à l'époque de cette acquisition, mais c'est avec la réélection de Trump en novembre 2024 qu'ils se sont multipliés, suscitant des débats dans le monde entier, y compris en France, de l'extrême-gauche jusqu'au centre. Des citoyens ordinaires, des militants et intellectuels de renom, des collectifs, voire de grands titres de la presse européenne (The Guardian, Mediapart…) ont « quitté X », et appelé les autres à en faire autant, pour signifier leur désaccord avec les choix idéologiques de son propriétaire, et contribuer ainsi à limiter l'influence d'un Musk désormais installé au cœur du pouvoir politique étasunien.

Pour autant, même dans le sillage de la campagne (en ligne) de désertion concertée, « HelloQuitteX », nous ne voyons aucun débat d'envergure émerger sur la pertinence d'utiliser les réseaux sociaux en général. Si nous écrivons ce texte, c'est parce nous sommes aussi frappés par les refus dûment motivés de quitter X que par les départs plus ou moins satisfaits... vers d'autres plateformes, où le ciel serait plus bleu.

Ainsi, nous sommes dépités par la prise de position d'un media comme Reporterre, qui n'imaginait pas, dans un premier temps, continuer d'informer sur la dégradation des milieux naturels et des rapports sociaux sans des tweets réguliers [1]. Alors encore aux manettes de la rédaction, Hervé Kempf – pourtant l'auteur d'analyses percutantes sur le capitalisme transhumaniste – ne fera volte-face que suite au lancement de l'initiative collective « HelloQuitteX  [2] », en appelant à la formation de « réseaux de service public » et d'une « autodéfense numérique populaire », qui sont à nos yeux d'authentiques chimères. Mais nous sommes aussi heurtés par le communiqué des Soulèvements de la terre, qui présente leurs motifs politiques de quitter X en faisant comme si leur « présence » sur Facebook ne posait pas les mêmes problèmes, eu égard à l'évolution idéologique récente de Mark Zuckerberg, et à la contribution de sa plateforme à l'état du monde depuis vingt ans. Des options apparemment différentes, donc, mais une optique commune : continuer d'investir Internet, pour y faire vivre une « sphère de gauche (…) plus puissante que la Fachosphère [3] ».

En 2011, quand l'ensemble des médias et des milieux militants célébraient les « révolutions Facebook » dans le monde arabe, nous faisions partie des sceptiques. L'idée, alors répandue, que les réseaux sociaux favorisaient en eux-mêmes l'émergence de nouvelles aspirations démocratiques et d'une intelligence collective susceptible de faire « dégager » plus facilement les vieux dictateurs, nous semblait dénuée de fondement [4]. Pour autant, nous n'imaginions pas non plus que ces réseaux allaient jouer un rôle crucial dans « la montée en puissance, partout dans le monde, de mouvements (ou régimes) autoritaires, nationalistes et intégristes religieux [5] ».

N'est-il pas temps aujourd'hui de dresser un bilan politique, écologique, humain – de ces dispositifs numériques ? Qu'ont-ils apporté, à qui et à quel prix ? Qu'ont-ils enlevé ou détruit ? Qu'ont-ils transformé ? Même face à des constats sanitaires et écologiques catastrophiques [6], même face à l'évidence du rôle des réseaux sociaux dans la promotion des idées et des ethos d'extrême-droite, il y a un refus obstiné, à gauche, de tirer les conclusions qui s'imposent. À commencer par la plus élémentaire : admettre que ces réseaux impliquent, du seul fait que des milliards de gens en font un usage ordinaire, une concentration du capital et du pouvoir extra-ordinaire.

Le triomphe du Nombre

Les principes de fonctionnement des réseaux sociaux ne datent évidemment pas de la prise de contrôle de X par Elon Musk. Comme le souligne le mathématicien David Chavalarias [7] : « Par construction, les réseaux sociaux – que ce soit Twitter, Facebook, n'importe lequel – sont basés sur l'engagement, c'est-à-dire qu'ils essaient de maximiser le nombre de partages, de likes, etc [8]. » Nous retrouvons là une caractéristique essentielle du mode de production capitaliste, pointée par Marx en son temps : qu'il s'agisse de produire des jouets ou des bombes, le travail, lorsqu'il est destiné à produire en masse, devient une quantité abstraite, un nombre d'heures équivalent à une somme d'argent. De la même façon, un message sur les réseaux sociaux ne vaut pas par sa qualité, mais par la quantité de « réactions » qu'il suscite. Peu importe que ces réactions soient pâmées ou haineuses, lapidaires ou argumentées, qu'elles découlent d'une lecture attentive ou non… C'est le nombre de ces manifestations digitales qui compte, pas leur contenu [9].

Cette quantité abstraite est optimisée au moyen d'un tri algorithmique : si votre message ne fait pas réagir en masse, rapidement, il va passer à la trappe. Automatiquement, les messages qui font appel aux émotions (négatives) tendent donc à remplacer ceux qui demandent du temps. Principe de l'audimat télévisuel, désormais assisté par la puissance de calcul des ordinateurs. C'est ainsi que s'étend le règne de la logique quantitative, le renforcement d'un « monde dominé par le Nombre », comme l'écrivait déjà Georges Bernanos au sortir de la Deuxième Guerre mondiale.

À ce principe de gestion quantitative de leur trafic, les plus gros réseaux sociaux adjoignent des règles léonines, obscures et rétroactives : l'invisibilisation de certains propos selon des critères idéologiques, l'espionnage des comportements en ligne, le fichage des internautes. Des règles qui soulèveraient plus d'opposition pour un service de messagerie physique... Ainsi que le résume Chavalarias, tout se passe comme si « la Poste vous disait : "Je peux lire votre courrier, je peux l'ouvrir, je peux le modifier, décider de le distribuer ou pas, et tout le contenu des lettres que vous recevez ou que vous envoyez, j'ai un droit exclusif de l'utiliser comme je veux." » Dans de telles conditions, comment des idées et des courants critiques pourraient-ils devenir hégémoniques dans ces « espaces » ? Comment espérer subvertir, sur les réseaux, un capitalisme dominé par les géants du numérique ?

La parole humiliée

Mais le problème est encore plus profond. L'utilisation massive de plateformes fonctionnant selon les principes rappelés ci-dessus bouleverse notre rapport au monde, aux autres, à nous-mêmes. Depuis l'internaute lambda cherchant à exister sur la toile, jusqu'aux communicants professionnels (journalistes inclus) guettant les dernières nouveautés algorithmiques dans le souci de doper leur audience et leur impact en ligne, tout le monde est devenu « producteur de contenus » dans une économie prédatrice de « l'attention numérique » – en l'occurrence, il serait plus juste de parler d'économie de l'inattention, tant cette dépendance aux réseaux entraîne un étiolement rapide de la faculté à se concentrer sur le moindre sujet. La concurrence pour le temps de cerveau des influençables est acharnée, elle mène fatalement à une surproduction de messages. Il faut publier plus, plus vite. C'est-à-dire publier n'importe quoi, pour occuper le cyberespace.

Sur les écrans, les images finissent de liquider le texte. Or, même si un flux d'images est constitutif de notre esprit animal, notre pensée d'être humain s'incarne avant tout dans le verbe. À mesure que le rythme de production-publication s'accélère, les messages sont de plus en plus brefs ; les images elles-mêmes sont de plus en plus dynamiques, « multimédia », synthétiques. En conséquence de cet aplatissement, les représentations collectives deviennent de plus en plus schématiques.

Dans ce contexte déjà très problématique, l'apparition récente des logiciels de génération automatique de textes, d'images et de sons ne constitue ni une rupture, ni une dérive. Les agents conversationnels, Chat GPT et cie, s'inscrivent dans la continuité des moteurs de recherche, des « systèmes experts » des entreprises, et des chatbots de nombreux sites Internet depuis plusieurs années. Ils sont un résultat du productivisme informationnel que nous venons de décrire, et ne peuvent que l'alimenter. Partant, ils vont approfondir les logiques psychiques, sociales et politiques déjà à l'œuvre avec les réseaux sociaux, c'est-à-dire le déploiement d'une société de l'absence [10] , où le monde est de plus en plus livré à domicile [11] aux individus, et où une place inédite est laissée à la dimension pulsionnelle de nos existences.

Après s'être jetée, à la fin des années 2000, sur les réseaux sociaux et les smartphones, une partie importante de la population se jette désormais sur « l'intelligence artificielle ». Ce sont près de 12 millions de Français qui utiliseraient déjà des agents conversationnels de type Chat GPT, pour y trouver des réponses aux divers problèmes qui se posent à eux dans leur journée [12]. Plus que jamais, nous nous trouvons face au succès spontané de technologies qui cherchent à réduire, au prix de dépenses insensées d'électricité et de métaux rares [13], l'écart entre la réalité et nos projections, entre nos besoins (ou désirs) élémentaires et les moyens de les réaliser. C'est pourtant de cet écart – de l'épaisseur du réel – que naît pour chacun la nécessité et la volonté de transformer sa situation, et le monde. Ainsi, les voix spectrales des agents conversationnels, et autres assistants vocaux, s'annoncent comme une arme redoutable au service de la paresse, de la sédentarité des corps et de l'affaiblissement du goût de la vie – mais aussi du goût de la lutte. Comme une bonne partie de ce que propose l'Internet depuis ses débuts, elles vont dans le sens d'un abandon progressif de soi-même à la machinerie universelle et anonyme, générateur de comportements grégaires et d'une réceptivité accrue aux discours autoritaires.

La prime à la brutalité

Il est grand temps de réaliser que sur les réseaux prétendument sociaux, les extrême-droites sont chez elles. Le problème n'est pas que les « forces progressistes » (syndicats, associations, partis politiques, médias alternatifs...) n'ont pas assez investi Internet et les plateformes ; bien au contraire, elles l'ont fait en premier, pensant que le réseau universel permettrait le triomphe de leurs idées. Mais une fois la majorité des populations connectées, d'autres acteurs s'y sont imposés et ont habilement profité des règles de fonctionnement algorithmique des plateformes, règles favorisant la simplification des questions, la brutalité des propos et le fonctionnement en meute. C'est ce qu'ont compris notamment les services de renseignement et d'influence russes, les entrepreneurs terroristes de l'État islamique, les nationalistes hindous, puis un nombre croissant d'idéologues d'extrême-droite, européens comme américains.

Les résultats édifiants de cette évolution se trouvent dans un reportage récent du Monde diplomatique sur les campagnes et les petites villes d'Allemagne de l'Est, où l'auteur constate la banalisation d'une sous-culture masculiniste, à base d'images virilistes et de références explicites au régime nazi et son idéal de pureté raciale. Le journaliste explique :

À cette toile militante s'ajoute la toile numérique : très tôt l'extrême droite a massivement investi dans une communication calibrée sur les réseaux sociaux les plus usités chez les jeunes, en particulier TikTok mais aussi Instagram, Snapchat, Whatsapp et Youtube. La Junge Alternative jongle habilement avec l'algorithme de TikTok pour susciter un maximum de viralité, quel que soit le degré de véracité des messages – on sait que les plus clivants suscitent souvent le plus de clics, notamment ceux qui touchent à la question migratoire. (…) Le résultat se mesure en termes de visibilité mais aussi de centralité : isolée dans le jeu politique institutionnel, l'AfD n'incarne pas aux yeux des jeunes sympathisants ce parti extrémiste dont on se méfie. On ne se cache plus d'y adhérer (…). Adolescents et post-adolescents ne sont pas nécessairement convaincus par ses thèses : beaucoup ont simplement envie d'« en être », d'intégrer un groupe de jeunes attirant, qui a ses habitudes, ses codes vestimentaires, son langage, son humour, ses dirigeants charismatiques, sa réputation, ses filles blondes au regard bleu assuré et ses garçons aux cheveux très courts. « Aujourd'hui, c'est trop cool ou tout à fait normal d'afficher des slogans d'extrême-droite dans son garage ou dans sa chambre », affirme M. Ocean Hale Meissner, un jeune activiste anti-AfD de la petite ville de Döbeln en Saxe [14].

Même type de constats, à propos de l'affaire Andrew Tate, anglo-américain crapuleux accusé dans plusieurs pays de trafic d'êtres humains, de viols et d'abus sexuels, capable de déclarer publiquement « Je suis un homme qui bat les femmes, alors attention à vous, parce que vous êtes les prochaines », et pour la libération duquel Donald Trump est intervenu personnellement :

Au Royaume-Uni, Andrew Tate a un écho considérable auprès des adolescents : 84 % des 13-15 ans ont déjà entendu parler de lui. Des études ont montré que la hausse des violences faites aux femmes dans le pays était liée à la radicalisation des jeunes en ligne sous l'influence de personnes comme Andrew Tate. Les accusations de viol ne font pas baisser la côte de popularité de ces masculinistes, au contraire : la communauté d'Andrew Tate est restée solidaire derrière lui, criant au complot. Des rassemblements ont même été organisés, notamment à Athènes, pour demander la libération de « Top G » [un de ses surnoms]. Au niveau international, Andrew Tate était l'homme le plus googlé au monde en 2022 [15].

Rétrécissement du monde commun et repli sur soi

Face à des régressions d'une telle ampleur, il convient, pour savoir que faire, de se demander d'abord comment on a pu en arriver là. Ni la persistance d'une matrice raciste et patriarcale dans les sociétés du monde entier, ni l'habileté d'un certain nombre de communicants et d'intellectuels d'extrême-droite ne sont des explications suffisantes à nos yeux. Pour comprendre ce qui nous arrive, il est indispensable de s'intéresser à la Grande transformation numérique qui bouleverse en profondeur (et de plus en plus vite) les psychés, les rapports humains et les manières d'être au monde depuis une vingtaine d'années. Ce que nos camarades du journal Le Postillon nomment « le grand refroidissement technologique », dont ils comparent la gravité à celle du réchauffement climatique : « le fait qu'avec l'invasion des technologies, le monde devient de plus en plus "froid", distant, robotique, désincarné, ce qui ne peut que renforcer le repli sur soi, l'individualisme, la montée des tensions et donc au final des partis d'extrême-droite [16]. »

Comme il y a un siècle, le succès de mouvements qui assument un autoritarisme et une brutalité décomplexés ne peut pas être dissocié d'une évolution sociale générale, des effets du capitalisme industriel sur la situation économique des populations mais aussi sur les esprits et sur la texture du monde vécu. Ainsi, tout ce que Hannah Arendt avait décrit dans Les Origines du totalitarisme comme propice au développement de comportements totalitaires – l'isolement au travail et dans la vie quotidienne, la perte du monde commun dans une société de masse, le brouillage des faits dans l'affrontement des propagandes –, tout cela, on le retrouve en pire dans la société sans contact, où une grande partie des gens travaillent en ligne, s'informent en ligne, consomment et paient en ligne, utilisent les services de l'État en ligne, etc. L'addiction collective à Internet, aux réseaux sociaux et aux jeux vidéo, est à la fois un produit et un facteur aggravant de l'isolement profond de millions de personnes, qu'elles soient pauvres ou non ; de la désertification des centre-villes ; de la disparition des guichets de services publics, aussi bien que des bars et des épiceries.

C'est pourquoi Boris Grésillon, le reporter du Monde diplomatique en Allemagne de l'Est, ne se contente pas, pour expliquer la popularité de l'AfD chez les adolescents, de déplorer l'habileté de sa stratégie sur les réseaux sociaux. À la fin du passage précédemment cité, il ajoute : « L'emprise des mouvements d'extrême droite a été facilitée par la fermeture de lieux de culture et de sociabilité, ainsi que par la disparition de bon nombre d'associations et de maisons des jeunes, autant de microstructures susceptibles de proposer une alternative à l' Alternative [für Deutschland] [17]. »

Dans la continuité des intuitions d'un Pier Paolo Pasolini dès les années 1970, le renouveau du fascisme doit être compris comme un aboutissement de la matrice productiviste et consumériste des sociétés industrielles. À plus court terme, nous le voyons comme un résultat de la marchandisation et de la numérisation foudroyantes des deux décennies écoulées, qui ont accouché d'un monde où les êtres humains se trouvent massivement isolés dans leur foyer et sur leurs écrans lumineux, dépendants d'algorithmes pour leur sociabilité comme pour leur information. Un monde où les subjectivités, les désirs et les émotions collectives sont manufacturées en série par le marketing et les industries culturelles.

On se trompe probablement en voulant combattre les idées d'extrême-droite comme autant de mauvaises solutions à discréditer. Beaucoup, à gauche, pensent encore qu'il faut leur faire barrage pour qu'elles ne rentrent pas dans les têtes, comme on ferait barrage à une nuée d'oiseaux malfaisants. Or, la situation politique présente n'est pas seulement le résultat d'une offensive idéologique : elle est aussi et surtout le fruit d'une désintégration sociale, d'un réaménagement des rapports humains par l'argent et la technologie, qui cultivent les affects les plus déplorables chez les habitants de la terre, comme l'a parfaitement décrit Pacôme Thiellement [18] : insécurité, dépendance, impuissance, rage et mépris de soi, cynisme, voyeurisme.

Mais alors, que faire ?

On nous dit : « votre critique du numérique est (globalement, partiellement ou entièrement) juste, mais il faut tenir compte de la situation politique grave. Nous ne pouvons pas déserter un terrain, celui des réseaux sociaux et d'Internet, où l'extrême-droite est à l'offensive, où elle tend à devenir hégémonique. Il faut être présent et contre-attaquer. »

Non : les extrême-droites ne reculeront pas sans que le monde change, sans que les sociétés (re)prennent une autre texture ; les discours de haine, d'intolérance, d'appels à la violence et aux guerres civiles ne seront pas refoulés sans que crève la bulle numérique qui enferme de plus en plus d'humains. Prétendre combattre ces phénomènes identitaires sur le terrain des formats courts, des clashes en ligne et des vidéos à adrénaline, est une illusion, et peut même aggraver la situation d'éclatement de la société que nous connaissons.

Nous savons bien que notre notre appel à quitter au plus vite tous les réseaux sociaux ne peut que susciter gêne et étonnement au vu des habitudes prises par beaucoup. Mais une nouvelle fois, nous ne pouvons que mettre en garde : s'il n'y a pas aujourd'hui une prise de conscience conséquente, si l'on ne saute pas du train maintenant, ce sera encore plus nécessaire et encore plus difficile, dans deux ans, dans cinq ans, dans dix ans…

Nous n'avons aucune recette-miracle à proposer pour faciliter cette tâche politique et culturelle urgente de désintoxication numérique pour toutes et tous. Que faire, sinon engager la réflexion de manière honnête, individuellement et collectivement ? Aller le plus loin possible dans le retrait de la sphère numérique – aussi loin que les contraintes (entre autres financières) pesant sur les personnes, les associations ou les entreprises le permettent. En faire une tâche prioritaire, existentiellement et politiquement. Et en parallèle, investir toutes les initiatives susceptibles de retisser, de rapiécer le monde réel, de lui redonner une consistance permettant de desserrer l'étau numérique dans lequel tant de gens se sentent pris – ou se complaisent. Réapprendre à faire circuler des idées dans le monde réel, aussi abîmé et désertifié soit-il : aller chercher les jeunes (et les moins jeunes), dans la rue, sur les murs, dans les transports en commun, sur les rond-points, devant les lycées, les stades et les centres commerciaux… Rejoindre les oppositions existantes à la numérisation des services publics, des écoles et des universités [19].

On prête à Étienne de La Boétie ces mots : « ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux ». À l'heure du technofascisme, la maxime de notre servitude volontaire peut se décliner ainsi : « ils ne sont si puissants que parce que nous sommes rivés à nos écrans. » Cela crève les yeux, mais jusqu'ici, rien ne bouge.

Pour finir, citons le regretté Sebastiàn Cortès :

Pour nous, l'expression « antifascisme radical » voudrait donc dire qu'on ne résout un problème qu'en empêchant qu'il se pose à nouveau, c'est-à-dire en l'éradiquant à sa source, pour qu'il n'ait plus jamais la possibilité matérielle et idéologique d'exister. […] L'équation est simple : le fascisme vient de l'industrialisme, tout comme la consommation naît de la production. N'agir que sur le fascisme sans s'attaquer à sa racine, c'est comme se livrer à la consommation « équitable » ou à la redistribution des richesses sans s'inquiéter des conditions de production ; c'est oublier que ce qui existe en aval naît en amont. Et c'est bien en amont qu'il faut attaquer le germe du fascisme.

Ce totalitarisme prend actuellement – depuis quinze à vingt ans – la forme des nouvelles technologies de l'information et de la communication, du numérique, de l'omniprésence de l'ordinateur dans toutes les activités humaines, de l'overdose d'informations inutiles que tout un chacun avale chaque jour, de la gestion managériale antihumaine dans les entreprises comme dans la société, de l'autonomisation généralisée qui « remplace » le travail humain et pousse ainsi nombre de travailleurs dont la dignité est niée et de chômeurs ainsi créés vers le Front national et autres groupuscules fascistes, etc [20].

Ces lignes ont été écrites il y a dix ans exactement. N'attendons pas dix années supplémentaires pour en tirer les conséquences.

par Matthieu AMIECH, Gary LIBOT et Valentin MARTINIE

Photographies de Gilles Delmas.


[1] Voir le texte « Pourquoi Reporterre ne quitte pas X », 3 décembre 2024.

[2] « Reporterre quitte X », 17 janvier 2025.

[3] Selon l'expression de Pierre Plottu et Maxence Macé, les auteurs de Pop fascisme. Comment l'extrême-droite a gagné la bataille culturelle sur Internet (Divergences, 2024).

[4] Voir Groupe MARCUSE, La Liberté dans le coma. Essai sur l'identification électronique et les motifs de s'y opposer, La Lenteur, 2019 (première édition, 2012), p. 44.

[5] Matthieu Amiech, L'Industrie du complotisme. Réseaux sociaux, mensonges d'État et destruction du vivant, La Lenteur, 2023, p. 32.

[6] Voir Guillaume Pitron, L'Enfer numérique. Voyage au bout d'un like, Les Liens qui Libèrent, 2021 ; et Jonathan Haidt, Génération anxieuse. Comment les réseaux sociaux menacent la santé mentale des jeunes, Les Arènes, 2025.

[7] Par ailleurs co-initiateur de la campagne « HelloQuitteX » et auteur de Toxic data, comment les réseaux sociaux manipulent nos opinions. Si l'essayiste rappelle comment ses derniers fragilisent nos régimes parlementaires, il ne remet pas fondamentalement en question leur déferlement.

[8] Extrait d'une interview de David Chavalarias sur la chaîne Youtube Limit, 21 avril 2024.

[9] Voir Giuliano da Empoli, Les Ingénieurs du chaos, Gallimard, 2023 (première édition, 2019), p. 84.

[10] Ce terme est employé par la très modérée fondation Jean Jaurès, dans son rapport « Réhumaniser la société de l'absence » (décembre 2024), dont nous recommandons la lecture.

[11] Expression de Günther Anders dans son analyse des débuts de la radio et de la télévision, dans L'Obsolescence de l'homme. Sur l'âme humaine à l'époque de la deuxième révolution industrielle, Paris, Éditions de l'Encyclopédie des nuisances, 2002 [1956], p. 117 à 187.

[12] Source : Médiamétrie, « L'année Internet 2024 », communiqué de presse du 13 février 2025.

[13] Voir Célia Izoard, « L'esprit qui dévorait la matière. L'IA, une technologie insatiable », Écologie & politique, n°69, 2024, p. 73-84.

[14] Boris Grésillon, « Quand l'extrême-droite cible la jeunesse », Le Monde diplomatique n°850, janvier 2025.

[15] « Andrew Tate, Donald Trump et les autres : le masculinisme comme projet politique », , 11 mars 2025.

[16] Lire « L'éléphant (du déferlement technologique) dans la pièce (de l'anti-fascisme) », texte de la rédaction du Postillon (dans le n°74, hiver 2024-2025), complémentaire de celui-ci.

[17] Boris Grésillon, op. cit.

[18] Pacôme Thiellement, Infernet, Massot/Blast, 2023.

[19] Voir Ecran total, Manifeste contre la numérisation et la gestion de nos vies, à paraître pendant l'été 2025.

[20] Sebastiàn Cortés, Antifascisme radical ? Sur la nature industrielle du fascisme, Éditions CNT-RP, 2015, p. 16-17 et 39-40.

Cet article reprend et prolonge l'éditorial « Il ne faut pas seulement quitter X mais refonder des communautés politiques hors-réseau », du journal Le Chiffon n°16, printemps 2025.
Pour commander la version intégrale en brochure (à prix libre) écrivez à :
La Lenteur
Le Batz,
81140 St-Michel de Vax

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05.09.2025 à 09:30

Parce que y'en a marre !

Parce que nous avons 1000 raisons de nous révolter…
À PARTIR DU 10 SEPTEMBRE, ON BLOQUE TOUT !

Texte intégral (526 mots)

Parce que nous avons 1000 raisons de nous révolter…
À PARTIR DU 10 SEPTEMBRE, ON BLOQUE TOUT !

PARCE QUE Y'EN A MARRE

De toujours courir après l'argent, de devoir accepter des tafs de misère payés des miettes, de quémander, honteux.se, des aides sociales, tandis que d'autres s'enrichissent sur notre dos.

Parce que y'en a marre que la vie soit si chère, de payer des loyers à de riches propriétaires, de tout devoir acheter depuis l'eau qu'on boit jusqu'à bientôt l'air qu'on respire !

Parce que y'en a marre de vivre entassé.e.s dans des villes de béton, et dans une planète bientôt inhabitable.

Parce que y'en a marre que la police tue, et contrôle parce que pauvre, marginal.e, noir.e ou sans-papier.

Parce que y'en a marre des frontières, où meurent chaque jour des personnes venues chercher une vie meilleure.

Parce que lorsque tu te rebelles, ou que tu te débrouilles sans suivre leurs règles, c'est souvent la prison qui te rattrape.

Parce que y'en a marre de toujours entendre dans les médias des discours racistes, et réactionnaires.

Parce que y'en a marre des drapeaux, des nationalismes, et des guerres qui en découlent.

Parce que y'en a marre de se faire harceler, soumettre, tuer parce que femme, trans ou homosexuel.le.

Parce qu'on en a marre des chefs, au travail comme au gouvernement.

Parce qu'aucune élection, aucun Élu ne nous délivrera de nos chaînes mieux que nous-mêmes.

Parce que nous avons 1000 raisons de nous révolter…
À PARTIR DU 10 SEPTEMBRE,
ON BLOQUE TOUT !

Affiche mise (sobrement) en page
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05.09.2025 à 09:00

Naissance des Carnets du 10S

Appel à contribution pour l'écriture et la diffusion d'un journal de bord du 10 septembre et au-delà !

Texte intégral (888 mots)

Appel à contribution pour l'écriture et la diffusion d'un journal de bord du 10 septembre et au-delà !

C'EST QUOI CE MACHIN « CARNET DU 10 S » ?

Le début d'une aventure commune.

Le 10 septembre, on ne sait pas ce qui se passera. Peut-être rien, peut-être beaucoup. L'histoire nous le dira.

Une idée toute bête.

Cette histoire, qu'elle soit courte, sans fin, médiocre ou extraordinaire, que nous autres barbares civilisés partions à l'assaut de ce monde ou que celui-ci nous réprime avec force, il s'agit de l'écrire, d'où on est, maintenant et sans attendre.

Ce sera donc une histoire en commun, sur papier (disponible en ligne pour la diffusion), qui puisse s'échanger de main en main, qu'on dépose ici ou là. Que ça parle à toutes celles et ceux qui y participent, que ça donne des idées à d'autres… Il s'agit de partager nos impressions, échanger nos points de vue, discuter, débattre et nourrir notre rage commune contre l'existant.
Comme chacune et chacun sait, l'histoire n'est pas écrite à l'avance. L'idée est de l'écrire nous-même au fil du temps, de la révolte. De le faire ensemble par l'intermédiaire de ces carnets du 10S. L'objectif est que tout le monde puisse participer à son écriture, y mette son grain de sel en proposant textes, impressions, témoignages, comptes rendus, plans sur la comète, photos, dessins, analyses, propositions, coups de gueules et déclarations d'amour…

Pour que cela fonctionne, il faut qu'un maximum de monde y participe, plus il y aura de contributions, mieux ce sera, alors à vos stylos-claviers. (l'adresse de contact mail figure dans le premier numéro à télécharger en fin d'article)

Maintenant c'est à vous ! C'est à nous !

OK MAIS VOUS ÊTES QUI EN FAIT ?

Quelques marmottes en révolte contre la teneur nauséabonde de ce monde.
Contre les poussées autoritaires, les replis xénophobes et identitaires, les industries écocidaires.

On va la faire courte, nous ne sommes pas A-politique. On considère que tout est politique. Mais qu'il faut au plus vite sortir du cadre étriqué dans lequel nous enferment les débats politiques classiques et les partis électoralistes qui n'ont d'autre but que de se faire élire pour décider à notre place.

Parce que le pouvoir finit toujours par opprimer, nous pensons qu'il doit rester tout en bas, partagé entre toutes et tous, ou alors être zigouillé et réduit en cendre.

Nous pensons qu'il faut nous organiser collectivement loin de toute hiérarchie et donneur d'ordre. Qu'il est plus que temps que l'entraide, le partage et la solidarité prennent la place de la compétition, du fric et de l'exploitation. Que pour cela il faudra qu'on reprenne en main l'ensemble des choix sur nos vies. Et clairement, au point où nous en sommes, nous sentons bien que ça ne se fera pas sans heurts face à de puissants intérêts divergents.

Nous avons besoin de réfléchir, de nous organiser et d'agir. Nous aimerions faire des carnets du 10S un outil qui permette d'accompagner tout ça…

REVENIR AU PAPIER ?

Oui, contrairement à l'usage répandu de nos jours, cette initiative veut vivre aussi en dehors des réseaux gloutons numériques. Histoire de philosophie sans doute…

Même si nous souhaitons garder et privilégier le format papier, en pratique nous utilisons le réseau internet… Il faut parfois savoir cultiver ses contradictions.


Signé quelques marmottes...
https://lescarnetsdu10s.noblogs.org/

carnet du 10S numéro 1
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04.09.2025 à 20:00

Les tâches immédiates du mouvement du 10 septembre

Le mouvement du 10 septembre doit se doter de maisons du peuple au plus vite, et compléter le mot d'ordre « tout bloquer » par « tout prendre ».

Texte intégral (550 mots)

Le mouvement du 10 septembre doit se doter de maisons du peuple au plus vite, et compléter le mot d'ordre « tout bloquer » par « tout prendre ».

Un mouvement profond porte presque tous les secteurs de la population à vouloir un changement de la vie. C'est un mouvement révolutionnaire, auquel il ne manquait à l'époque des gilets jaunes que la conscience de ce qu'il avait déjà accompli pour posséder réellement cette révolution, et auquel ne manque désormais plus que la conscience de ce qu'il peut accomplir.

1. Sans bouger le petit doigt, le mouvement du 10 septembre a mis Bayrou sur un siège éjectable. En multipliant les assemblées de base, forme de mobilisation la plus banale et pacifique, il a fait claquer des genoux les renseignements. Rien n'est écrit, mais il y aura un lendemain.

2. La stratégie de Macron est une stratégie de la tension qui ne laisse aucune place à la désescalade, et quasiment aucune au dialogue. C'est aussi pour ça, et pas seulement par culture de l'horizontalité, qu'aucune figure populaire organiquement liée aux mouvements contestataires n'arrive à émerger, au-delà de quelques opportunistes vite oubliés. Tant mieux.

3. Du reste, à qui s'adresser ? Le temps des délégations et du dialogue social est derrière nous. Il reste d'un côté le monologue du pouvoir, grandiloquent et officiel, et de l'autre le bavardage populaire, toujours plus bruyant.

4. Viendra un moment où le second, ne supportant plus les insultes et les inepties du premier, le fera taire. Alors, plus personne ne pourra parler à la place du peuple. Mais pour cela, il lui faudra des lieux qui agissent à la fois comme des bases arrières et comme une force symbolique ; des espaces conquis au système politique actuel pour y faire germer une autre démocratie, directe, et avec elle un autre pouvoir, celui du peuple.

5. Quels lieux ? Pas l'Élysée, trop centralisateur, presque monarchique, sans équivalence dans le pays. Il y a naturellement les places publiques, envahies de commerces, sur lesquelles la police se tient prête à débarquer. Il y aurait aussi les parcs, comme ailleurs dans le monde, qui prendront de plus en plus d'importance avec le dérèglement climatique. Enfin, il y a les mairies, échelle universelle de toutes les révolutions, à laquelle le peuple se projette et s'associe le plus facilement et le plus logiquement, car c'est celle à laquelle il vit.

Ce qui manque au mot d'ordre de « tout bloquer », c'est sans doute celui de « tout reprendre ». Si seulement nous avions l'occasion, avant le 10 septembre, de partir à l'assaut coordonné de nos futures maisons du peuple...

Des septembristes

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