05.12.2025 à 18:30
Mr Mondialisation
À l’occasion de la COP16 sur la biodiversité, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a présenté la mise à jour de sa Liste rouge mondiale des espèces végétales et animales menacées d’extinction. Parmi les données observées : l’état de conservation du hérisson d’Europe s’est considérablement détériorée et près de 40% des arbres […]
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Les chiffres sont alarmants : sur les 166 061 espèces étudiées, 46 337 sont classées menacées par la Liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), récemment mise à jour à l’occasion de la COP16 sur la biodiversité tenue à Cali (Colombie) en novembre. Parmi ces espèces, 41% des amphibiens, 34% des arbres, 12% des oiseaux et 26% des mammifères sont menacés d’extinction au niveau mondial. « C’est également le cas pour 37% des requins et raies, 44% des coraux constructeurs de récifs et 34% des conifères », complètent les auteur·ices du rapport.

La France figure parmi les 10 pays hébergeant le plus grand nombre d’espèces menacées : au total, 2 434 espèces menacées au niveau mondial sont présentes sur son territoire, en métropole et en outre-mer. La Liste rouge de l’organisation est un indicateur privilégié pour suivre l’état de la biodiversité dans le monde.
« Sur la base d’une information précise sur les espèces menacées, son but essentiel est d’identifier les priorités d’action, de mobiliser l’attention du public et des responsables politiques sur l’urgence et l’étendue des problèmes de conservation, et d’inciter tous les acteur·rices à agir en vue de limiter le taux d’extinction des espèces », explique l’organisation.
Pour la première fois, la majorité des arbres du monde ont été ajoutés à la Liste rouge de l’UICN, révélant qu’au moins 16 425 des 47 282 espèces évaluées sont en danger d’extinction. « Les arbres représentent désormais plus d’un quart des espèces présentes sur la Liste rouge de l’UICN, et le nombre d’arbres menacés est plus de deux fois supérieur au nombre total d’oiseaux, de mammifères, de reptiles et d’amphibiens menacés combinés. Des espèces d’arbres sont menacées d’extinction dans 192 pays à travers le monde ».
En première ligne, ce sont les espèces insulaires qui se trouvent le plus en danger. Les auteur·ices du rapport pointent notamment les effets dévastateurs de la déforestation au profit du développement urbain et de l’agriculture, mais aussi l’impact des espèces envahissantes, des ravageurs et des maladies. En outre, « les changements climatiques menacent de plus en plus les arbres, en particulier sous les tropiques, en raison de l’élévation du niveau des mers et des tempêtes plus fortes et plus fréquentes ».
« En tant que composante déterminante de nombreux écosystèmes, les arbres sont fondamentaux à toute vie sur Terre en raison de leur rôle dans les cycles du carbone, de l’eau et des nutriments, la formation des sols et la régulation du climat »
La perte de ces espèces forestières constitue une menace majeure pour des milliers d’autres plantes, champignons et animaux. « En tant que composante déterminante de nombreux écosystèmes, les arbres sont fondamentaux à toute vie sur Terre en raison de leur rôle dans les cycles du carbone, de l’eau et des nutriments, la formation des sols et la régulation du climat ».
De nombreuses communautés rurales et autochtones dépendent également des arbres, « plus de 5 000 espèces sur la Liste rouge de l’UICN étant utilisées comme source de bois pour la construction, et plus de 2 000 comme source de médicaments, de nourriture et de combustibles ».
Pour contrer cette tendance, plusieurs initiatives de protection et la restauration des habitats voient le jour, comme les banques de semences et la collection d’espèces dans les jardins botaniques. « En Colombie, les évaluations de la Liste rouge ont guidé la planification nationale des actions de conservation. Sept espèces de Magnolia considérées « En danger » et « En danger critique » ont été utilisées pour la désignation de cinq nouvelles « Zones clés pour la biodiversité », qui seront utilisées par les gouvernements locaux et nationaux pour éclairer la planification spatiale », félicite le rapport.
En Europe, c’est un symbole de vulnérabilité et de résilience qui se voit menacé. Le hérisson d’Europe (Erinaceus europaeus) est en effet passé de la catégorie « Préoccupation mineure » à « Quasi menacé » sur la Liste rouge. « On estime que les effectifs de l’espèce ont diminué dans plus de la moitié des pays où elle est présente, y compris au Royaume-Uni, en Norvège, en Suède, au Danemark, en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et en Autriche », expliquent les chercheur·euses.
Les études locales ont notamment signalé une nette diminution des effectifs en Bavière (Allemagne) et en Flandre (Belgique), atteignant parfois les 50%. En France, les populations ont diminué d’environ 16 à 33% au cours des dix dernières années.

Le petit mammifère épineux est principalement menacé par la pression humaine croissante qui conduit à la destruction de son habitats ou de ses ressources vitales. La dégradation des habitats ruraux par l’intensification agricole et l’utilisation massive des pesticides, le développement urbain et la construction de nouvelles routes sont principalement pointés du doigts comme causes d’extinction du hérisson.
Pour Chris Carbone, professeur de macroécologie et de conservation à l’Institut de zoologie de ZSL, « des stratégies de conservation visant à atténuer la perte et la fragmentation des habitats ainsi que l’intensification agricole ralentiront le déclin de l’espèce. En créant des corridors d’habitats, en réduisant l’utilisation de pesticides et en promouvant des environnements favorables aux hérissons, nous pourrons leur fournir une protection à long terme ».
Pour l’heure, les scientifiques appellent également les particuliers à adopter des pratiques de jardinage bénéfiques pour la faune locale, en évitant l’usage de pesticides et en favorisant la pousse naturelle des herbes et végétaux, ou encore en créant des passages dans les clôtures pour permettre aux petits mammifères un déplacement plus sûr.
« face à un si grand nombre d’espèces d’arbres menacées, la tâche est énorme, mais elle a déjà commencé ».
Loin d’être suffisante, ces mesures devront impérativement être couplées à des politiques de grandes échelles pour la préservation des espèces et de leur environnement. Les auteur·ices du rapport appellent les gouvernements à adopter des stratégies nationales ambitieuses, soulignant qu’au vu des résultats du rapport, « il n’y a aucune excuse pour ne pas agir ». Pour Jean-Christophe Vié, Directeur général de la Fondation Franklinia, il est clair que « face à un si grand nombre d’espèces d’arbres menacées, la tâche est énorme, mais elle a déjà commencé ».
– Aure Gemiot
Source image d’en-tête : hérisson ©Pixabay
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Maureen Damman
Vous n’avez pas eu le temps de suivre l’actu ? Voici les 10 informations à ne pas manquer cette semaine. 1. YouTube supprime plus de 700 vidéos documentant des violations des droits humains en Palestine YouTube a effacé les chaînes de trois ONG palestiniennes collaborant avec la CPI, entraînant la disparition de plus de 700 […]
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YouTube a effacé les chaînes de trois ONG palestiniennes collaborant avec la CPI, entraînant la disparition de plus de 700 vidéos attestant de crimes commis par l’armée israélienne. Les organisations dénoncent un effacement massif de preuves et une atteinte grave à la liberté d’expression, au moment où leurs contenus étaient déjà fragilisés par les sanctions américaines. (Les-crises)
L’administration Trump a reconnu que ses opérations contre des bateaux en mer supposés narcotrafiquants tuaient des dizaines de personnes dont l’identité n’est pas établie, requalifiées après coup en « belligérants non privilégiés ». Plus de 60 civils auraient péri depuis septembre. Des juristes dénoncent des exécutions extrajudiciaires illégales dans une « guerre non déclarée » contre le narcotrafic, menée sans preuves ni cadre légal solide. (Les crises)
En visite à Paris, Volodymyr Zelensky cherche à maintenir un rôle central dans les négociations, alors que les États-Unis poussent à un accord avec Moscou et que la Russie progresse sur le terrain. Il tente d’éviter que les décisions sur les territoires occupés, les garanties de sécurité ou l’avenir militaire du pays se nouent sans lui, dans un contexte diplomatique de plus en plus contraint. (L’humanité)
Les agressions visant de jeunes femmes japonaises se font plus nombreuses sur l’île d’Okinawa, où la présence militaire américaine reste massive. Les habitants dénoncent une situation devenue insupportable et l’impunité persistante des auteurs, dans un climat déjà lourd de tensions autour des bases et des vols et violences impliquant les troupes américaines. (L’humanité)
Des caisses exigent des documents qui ne figurent pas dans la procédure officielle, comme des actes de mariage, preuves de revenus inexistants, justificatifs sociaux, rendant l’ouverture de l’Aide médicale d’État quasi inaccessible pour les personnes sans papiers. Cette « maltraitance administrative » provoque des ruptures de soins, des dettes hospitalières et parfois des pertes de chance vitales. (Streetpress)
Le sort de l’autoroute A69 repose entre les mains de magistrats qui avaient déjà donné leur feu vert au chantier. Les opposants demandent leur récusation, estimant que cette configuration compromet l’impartialité du jugement sur la » raison impérative d’intérêt public majeur » censée justifier ce projet très contesté sur le plan écologique. (La Relève et la Peste)
La capitale iranienne ne dispose plus que de réserves d’eau extrêmement faibles, certains barrages n’étant remplis qu’à 11 %. Les autorités multiplient les coupures, recourent à l’ensemencement des nuages et préparent des transferts d’urgence. Le président Pezeshkian avertit que si la situation perdure, évacuer Téhéran pourrait devenir un scénario réaliste. (La Relève et la Peste)
Les livraisons de colis atteignent un milliard d’unités par an en France, générant environ un million de tonnes de CO₂. Le pic de fin d’année aggrave la pression logistique, avec 180 millions de colis traités en deux mois. Si certaines tournées mutualisées peuvent être sobres, l’essor des livraisons rapides, y compris par avion, alourdit fortement l’empreinte écologique du commerce en ligne. Pour donner des ordres de grandeur, l’Ademe propose un simulateur comparant les différentes options. (Reporterre)
La réduction drastique des financements américains fait chuter l’aide internationale de 30 à 40 % par rapport à 2023. L’Onusida alerte sur un risque de millions de nouvelles infections d’ici 2030 si les programmes de prévention, la PrEP et l’accès aux traitements sont affaiblis. Déjà 9,2 millions de personnes vivant avec le VIH restent sans traitement. (Futura-sciences)
Sept activistes, relaxés en 2021 après une action sur le tarmac pour dénoncer l’extension de l’aéroport, sont de nouveau jugés en appel. Le parquet poursuit malgré l’abandon du projet de terminal T4 et dans un contexte où un nouveau plan d’extension est discuté. Les soutiens dénoncent un usage disproportionné de la justice contre des militants climatiques. (Reporterre)
– Mauricette Baelen
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Maureen Damman
Vous n’avez pas eu le temps de suivre l’actu ? Voici les 10 bonnes nouvelles à ne surtout pas manquer cette semaine. 1. Un hôpital de jour dédié aux femmes Un hôpital de jour dédié à la santé de la femme a été ouvert à Besançon, offrant des parcours complets pour des pathologies comme l’endométriose, […]
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Un hôpital de jour dédié à la santé de la femme a été ouvert à Besançon, offrant des parcours complets pour des pathologies comme l’endométriose, la mastectomie, la chirurgie pelvienne ou l’AMP. Les patientes y rencontrent en une journée plusieurs professionnels (sage-femme, sexologue, kinésithérapeute…) pour aborder douleur, rééducation, santé sexuelle ou hygiène de vie. (Alternatives économiques)
La militante autochtone Makasa Looking Horse a obtenu l’abandon du projet de Nestlé visant à augmenter massivement le pompage d’eau dans la région des Six Nations, au Canada. Grâce à une mobilisation communautaire, la multinationale renonce à exploiter davantage les nappes phréatiques locales déjà fragilisées. 3,6 millions de litres par jour étaient pompés pour les revendre, souvent aux mêmes communautés autochtones. (La Relève et la peste)
À la ferme du Grand Laval, dans la Drôme, la présence de castors a transformé le paysage : leurs barrages ont ralenti l’écoulement de l’eau, restauré les zones humides et favorisé le retour d’espèces disparues depuis longtemps, dont les truites. Les agriculteurs observent aussi une meilleure résilience hydrique face aux sécheresses, illustrant le rôle écologique crucial de cet animal ingénieur. (La Relève et la Peste)
Dans la Vienne, la création d’une exploitation géante de 140 000 poules a réveillé une résistance locale, même sous la pluie. Habitants, associations et élus redoutent les nuisances, l’impact sur l’eau et la dégradation du cadre de vie. Ils dénoncent une agriculture industrialisée qui accentue les risques sanitaires et environnementaux, au détriment des petites fermes locales. (Reporterre)
En Loire-Atlantique, des habitants, maires et collectifs se sont opposés à l’ouverture de permis d’exploration minière visant du cuivre, de l’étain ou du tungstène par la startup Breizh Ressources. Les opposants redoutent un projet lourd en pollution, consommation d’eau et artificialisation, dans une région rurale où les sols sont déjà fragiles. L’alliance locale s’élargit pour contrer une installation jugée incompatible avec la transition écologique. (Vert)
À Paris, les principaux bailleurs sociaux comme Paris Habitat, RIVP et Elogie‑Siemp ont décidé de geler les loyers pour 2026, une mesure qui concernera 225 000 foyers. Ce gel intervient dans un contexte de forte hausse des charges, et vise à soulager les locataires du parc social déjà plus que fragilisés. (L’humanité)
Un projet d’élevage industriel de saumons sur la commune de Morcenx-la-Nouvelle en Gironde provoque une mobilisation inédite depuis la réforme des retraites : habitants, pêcheurs et associations écologistes s’inquiètent d’un site très énergivore, consommateur d’eau et producteur de rejets azotés. Les opposants dénoncent un modèle d’aquaculture intensive contraire aux impératifs climatiques et à la protection des milieux. (Vert)
Le Parlement européen approuve l’interdiction des PFAS – les « polluants éternels« , dans les jouets commercialisés dans l’UE. La réglementation doit aussi s’étendre à d’autres produits grand public susceptibles d’exposer les enfants à ces substances persistantes, associées à des risques immunitaires, hormonaux et cancérigènes. Une étape clé vers la réduction de l’exposition aux PFAS. (Que-choisir)
9. L’Italie punit enfin (vraiment) le féminicide
Le Parlement italien adopte une loi faisant du féminicide un crime à part entière dans le code pénal, désormais passible de la réclusion à perpétuité. Le texte vise à répondre à l’augmentation des violences machistes et à mieux qualifier les meurtres commis contre des femmes en raison de leur genre. (Courrier International)
Selon l’observatoire Pelagis, la pause hivernale imposée à certains types de pêche a permis une baisse de 60 % du nombre de dauphins échoués et des captures accidentelles. Les premières données laissent entrevoir l’efficacité de ces restrictions saisonnières, alors que les associations réclament depuis plusieurs années un arrêt temporaire pour protéger les cétacés du golfe de Gascogne. (France bleu)
– Mauricette Baelen
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Mr Mondialisation
Dans l’agriculture moderne, la monoculture – cultiver une seule plante sur de vastes parcelles – est devenue la norme absolue. Pourtant, ce modèle génère de graves problèmes environnementaux, incompatibles avec les défis climatiques actuels. Popularisée au cours du XXe siècle, la pratique de la monoculture est avant tout un moyen de maximiser les rendements et donc […]
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Popularisée au cours du XXe siècle, la pratique de la monoculture est avant tout un moyen de maximiser les rendements et donc les profits. Et si d’un point de vue financier, elle a sans doute fait ses preuves, elle n’a en revanche pas été pensée pour sa durabilité et sa soutenabilité face à la gestion des terres, de l’eau ou encore de la biodiversité. Pire, elle participe même d’un danger certain sur le futur de l’alimentation humaine. Mr Mondialisation vous présente cinq raisons d’en finir avec ce modèle néfaste et dépassé.
D’un point de vue environnemental, les monocultures constituent bel et bien une calamité à de multiples égards. Il s’agit en premier lieu d’un danger réel pour la biodiversité. D’abord, parce que par essence, elle limite le nombre d’espèces végétales présentes sur un territoire et avec elle, une faune associée. Un phénomène qui s’applique d’ailleurs particulièrement aux forêts qui sont aujourd’hui souvent gérées comme de vulgaires champs.
Le fait de cultiver uniquement des plantes similaires ensemble, entrave les protections naturelles que peuvent normalement trouver des plantations mêlées. D’autant plus que l’uniformité génétique augmente la vulnérabilité envers les maladies et les parasites, mais aussi face aux aléas climatiques (sécheresses, fortes pluies, vagues de chaleur, tempêtes…). De plus, la standardisation prive les insectes pollinisateurs de plusieurs sources de nourriture en dehors des périodes de floraison, toutes identiques.
Pour compenser ces problèmes, les paysan·nes et agriculteur·rices sont souvent amené·es à recourir massivement à des produits chimiques, ce qui accélère l’érosion de la biodiversité et pollue les milieux aquatiques et les nappes phréatiques.
En outre, le système des monocultures est plus gourmand en ressources, d’abord parce qu’il consomme plus d’espace, ce qui entraîne un besoin supplémentaire en énergie (pétrole, machines lourdes, stockage industriel, etc.), en eau, en engrais et en produits phytosanitaires (64 % des terres du monde sont déjà contaminées à des seuils significatifs). De ce fait, il engendre donc de la déforestation – et avec, le déplacement de peuples autochtones – pour s’étendre toujours plus. Dans la même veine, les haies, les prairies et les zones naturelles se voient aussi limitées par ce procédé.
« 85 % des terres du monde seraient d’ailleurs en voie de dégradation. »
Enfin, l’érosion des sols (qui peut réduire le rendement de moitié) et la baisse de fertilité sont également un effet secondaire de cette manière de faire. Une conséquence très largement sous-estimée, mais pas moins sérieuse : selon la FAO, 85 % des terres du monde seraient d’ailleurs en voie de dégradation.
1,7 milliard de personnes sont déjà touchées par un déclin de productivité, et ce n’est que le début. Et le plus inquiétant réside sans doute dans le fait que tous ces problèmes écologiques – symptômes de l’agriculture industrielle – sont tous interconnectés et s’aggravent les uns les autres.
Les dangers écologiques cités précédemment mettent déjà, en soi, une épée de Damoclès au-dessus de la tête des citoyen·nes, puisque les rendements peuvent s’effondrer à tout moment. Pire encore, l’économie mondialisée a poussé certains pays à non seulement promouvoir la monoculture, mais aussi à se spécialiser dans un seul type de production.
En étant centré·es sur cet unique objectif – tout en ayant massivement recours aux échanges commerciaux – certains États placent directement en péril leur souveraineté alimentaire. Importer des aliments qui pourraient être produits localement a un coût environnemental et fragilise l’autonomie des populations, qui risquent la famine en cas de crise. Cette vulnérabilité est particulièrement forte dans les petits États insulaires, souvent spécialisés dans les cultures d’exportation plutôt que dans la production destinée à nourrir leurs habitants
Si l’être humain est capable d’exploiter près de 6000 plantes comestibles, il n’en utilise en réalité qu’à peine 200 pour sa consommation réelle. Plus inquiétant encore, seules neuf d’entre elles représentent 66 % des récoltes dans le monde.
Ce manque de diversité constitue d’abord une menace sanitaire, tant les cultures restent exposées aux maladies et aux ravageurs. Plus fondamentalement, c’est ce modèle agricole lui‑même qui fait figure de danger à long terme, puisqu’il n’est pas soutenable. Le principe des monocultures accroît aussi les risques de pénuries futures et, par ricochet, de famine ou d’insécurité alimentaire.
Alors qu’elle va à l’opposé de toute logique environnementale et sanitaire, la pratique de la monoculture répond surtout à une volonté de profit à court terme. Parfait symbole du néolibéralisme et du capitalisme, elle épuise les ressources le plus vite possible pour en tirer un maximum d’argent sans même se soucier d’une orientation à long terme.
Or l’agriculture existe pour répondre à un besoin vital de l’être humain : se nourrir. Elle devrait donc reposer d’abord sur le droit de chacun·e à subsister, plutôt que sur une logique purement marchande. Dans cette perspective, les terres les plus fertiles devraient être reconnues comme un bien commun.
Néanmoins, les monocultures favorisent plutôt son exploitation massive par des compagnies géantes et des fonds d’investissement qui accaparent tout, comme on peut le voir aux États-Unis. Dans le monde, 70 % des terres sont déjà détenues par 1 % des professionnels du secteur. Une véritable machine à précarité pour les petites fermes qui sont forcées à s’endetter pour perpétuer ce modèle et produire suffisamment pour survivre.
De plus, ce système standardisé engendre une dépendance accrue aux semences brevetées et aux intrants chimiques appartenant souvent aux mêmes groupes, à l’image du tristement célèbre Bayer-Monsanto. Il devient alors de plus en plus compliqué de s’extraire de ce type de fonctionnement.
Le fonctionnement du vivant, en particulier celui de la terre, repose sur des savoirs immémoriaux. Ces savoirs continuent de s’enrichir grâce aux progrès scientifiques. Pourtant, en s’obstinant dans une méthode aussi peu durable que la monoculture, le capitalisme contribue à faire oublier des faits tangibles.
Cette standardisation est devenue la norme pour la plupart des professionnel·les du secteur, comme s’il s’agissait de la seule façon de faire. Or, ce modèle est totalement incompatible avec une exploitation à long terme et met en péril la souveraineté alimentaire mondiale à venir.
Si l’humanité a su coexister harmonieusement avec les espèces qui l’entourent pendant des millénaires, la logique capitaliste imposée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale a rompu avec les lois physiques fondamentales. La monoculture incarne cette soumission violente du vivant à un moule pour lequel il n’est pas fait : une impasse financière lourde de dangers.
On ne pourrait pas se contenter de critiquer le modèle actuel s’il n’existait pas d’alternatives sérieuses aux monocultures. De nombreux·ses paysan·nes et scientifiques ont déjà mis en place des systèmes différents : agroécologie, permaculture, coopératives, circuits courts – tous bien plus résilients face au dérèglement climatique.
« elle [l’agriculture alternative] augmenterait la biodiversité associée de 25 %, la qualité de l’eau de 50 %, celle des sols de 11 % et le contrôle des maladies et des parasites de 63 %. »
Certaines études montrent par ailleurs que ce type d’agriculture ne ferait pas chuter les rendements – au contraire – elle pourrait même être plus rentable d’un point de vue économique – certaines recherches évoquent des bénéfices de plus de 2800 % sur 20 ans. Mieux, elle augmenterait la biodiversité associée de 25 %, la qualité de l’eau de 50 %, celle des sols de 11 % et le contrôle des maladies et des parasites de 63 %.
Il ne s’agit plus d’exploiter la terre comme un simple bien, mais de la préserver comme une alliée vivante, essentielle à notre survie collective. Dans cette perspective, un modèle durable et respectueux pourrait garantir l’autonomie alimentaire de tous les peuples.
Pour y parvenir, il faudra relocaliser les productions afin de garantir l’autonomie de chacun·e, tout en réduisant drastiquement les intrants chimiques. Les polycultures, avec leur résilience et leur résistance naturelles, s’imposent alors comme une solution idéale.
C’est aussi l’occasion d’intensifier les rendements sur des surfaces réduites, préservant ainsi des espaces naturels vitaux pour la biodiversité. De tels systèmes demandent certes plus de temps et de main-d’œuvre, ce qui implique de revaloriser le métier pour attirer davantage de personnes – d’autant que la réduction de la durée du temps de travail s’impose. Une voie vers une société post-capitaliste, plus écologique et démocratique.
– Simon Verdière
Source image d’en-tête : Ferme intensive et usage de la dynamique (1911) ©Wikimedia Commons
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Mr Mondialisation
Lancé en 2021, le Plant Based Treaty est un mouvement international aujourd’hui soutenu par plusieurs centaines de milliers d’individus, des villes, des scientifiques et d’autres organisations. Fondé autour de 40 mesures, il propose de s’engager pour la cause environnementale, en particulier par le biais de la thématique cruciale de nos modes de production alimentaire. Présentation […]
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Le Plant Based Treaty veut répondre à tous les enjeux écologiques de notre temps, et notamment, la sauvegarde de la biodiversité, des sols et du climat. Pour ce faire, il remet en question l’élevage au profit d’une agriculture plus végétale afin de limiter et réparer en partie les dégâts infligés à la planète par le fonctionnement actuel.
Au-delà du sujet primordial et philosophique du bien-être animal, l’élevage touche aussi particulièrement à la question écologique. En effet, que l’on évoque la biodiversité, la pollution et la gestion de l’eau, la conservation des sols et des écosystèmes et bien évidemment le dérèglement climatique, la production animale joue un rôle majeur.
Selon l’ONU, elle est d’ailleurs responsable de pas moins de 12 % des émissions de gaz à effet de serre, un chiffre très important, surtout que la consommation de viande à l’échelle mondiale ne cesse de progresser.
Selon les estimations de Mordor Intelligence, une entreprise spécialisée dans l’analyse des marchés, la viande rapporterait aux alentours de 487 milliards de dollars par an. Et elle devrait atteindre les 637 milliards d’ici 2029. On comprend donc pourquoi bon nombre de lobbies professionnels (dont le principal en France se nomme Interbev) de ce secteur œuvrent pour la continuité.
La démarche de Plant Based Treaty s’inscrit quant à elle dans le même processus, mais avec l’idée inverse : la production d’une alimentation végétale. Si cette initiative, lancée par l’association canadienne Animal Save Movement, est motivée par une conviction animaliste, elle n’en reste pas moins fondée sur une réalité scientifique d’intérêt général, et non sur l’appât du gain.
Car si l’humanité souhaite pouvoir continuer à habiter cette planète dans des conditions décentes et si elle veut pérenniser la survie de son espèce, elle n’aura pas d’autres choix que changer profondément son modèle alimentaire.
De ce fait, le Plant Based Treaty s’inspire de l’accord de Paris pour le climat et vient le compléter avec plusieurs mesures d’urgence. Il invite, par exemple, les décideurs à réorienter les financements publics vers la nourriture végétale qui doit aussi être recommandée dans les écoles. En outre, le texte évoque également la nécessité de repenser les modes de productions agricoles dans leur intégralité et notamment de rompre avec les monocultures, la déforestation et les processus qui épuisent et polluent les sols.
Dans le même temps, le traité encourage à renoncer à la création de nouvelles structures destinées à l’alimentation carnée. Ainsi, il appelle à ne plus construire de lieux d’élevage, d’abattoirs et à ne convertir aucune exploitation végétale vers l’animale.
Il propose également de protéger les terres et les océans des productions industrielles, notamment en refusant l’extension des fermes existantes, mais aussi en stoppant les déforestations et les attaques envers les peuples autochtones et leurs savoirs ancestraux.
En outre, le texte insiste sur la nécessité de réparer du mieux possible les dégâts causés par des décennies d’agriculture industrielle. Pour y parvenir, il prône le reboisement et l’instauration de zones marines protégées.
Enfin, il demande aux États de subventionner les paysans qui appliqueront ces principes afin de les inciter à contribuer à la sauvegarde des écosystèmes. Par ailleurs, les terres d’élevage qui seront libérées par un passage à la production végétale devraient permettre de créer de nouveaux espaces pour la vie sauvage et ainsi favoriser la biodiversité.
En quatre ans, l’appel a reçu de nombreux soutiens à travers le monde, que ce soit au niveau individuel, mais aussi de la part de villes, organisations, scientifiques, politiciens et même de célébrités. Ainsi, des métropoles importantes ont rallié le texte, comme Los Angeles, Belfast, Amsterdam, ou Édimbourg. En France, il a déjà été signé par des associations politiques comme REV (fondé par Aymeric Caron) et le parti animaliste. Certaines stars internationales ont également rejoint le mouvement comme Paul McCartney, Moby, ou Joaquin Phoenix.
Et même si adhérer à ce texte n’a rien de contraignant, il envoie cependant un message fort aux individus et aux États. Il propose d’ailleurs des ressources pour faire une transition vers l’alimentation végétale et invite à interpeller les élus et les communes et à faire campagne sur cette question. Si la démarche vous intéresse, il vous est d’ores et déjà possible de soutenir le traité en le signant ici.
– Simon Verdière
Photo de couverture : Plant Based Treaty
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Mr Mondialisation
Qu’est-ce que l’héroïsme ? De prime abord, cette notion peut sembler renvoyer à la mise en scène narcissique d’une personne. Cette notion est volontiers accaparée par la suprématie blanche et masculine pour asseoir son statut social et ses valeurs dites supérieures. Par opposition, l’héroïsme peut inspirer du rejet du côté des militant·es dits progressistes. Faut-il […]
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Héroïques est le titre de la nouvelle revue Fsociété, actuellement en prévente, dont l’objectif est de « renverser la rhétorique du héros bourgeois, blanc, occidental, qui aime se contempler en tant que sauveur du monde et des cultures qu’il méprise. »

Les définitions courantes du racisme ne rappellent pas toujours que la hiérarchie raciale utilisée aujourd’hui a été construite par les Européens et qu’elle plaçait les personnes blanches en haut de l’échelle. Dans cette perspective, le racisme est un système historique qui vise principalement les personnes non blanches. C’est pourquoi, selon cette approche, on ne peut pas parler de « racisme anti-blanc » comme d’un système de domination comparable. Cette mise au point permet de répondre à l’argument selon lequel parler de racisme serait en soi raciste : cet argument ignore l’histoire et le fonctionnement réel de ce système.
De la même manière, la culture occidentale parvient à s’approprier l’acte héroïque et à le monopoliser dans l’imaginaire collectif. On pense particulièrement au « complexe du sauveur blanc » (white saviourism en anglais), qui désigne le sentiment de devoir de l’homme blanc occidental de venir en aide aux populations du tiers-monde (en particulier africaines et asiatiques), en s’exposant héroïquement et en revendiquant par la même une supériorité culturelle.
Lutter contre le complexe du sauveur blanc ne revient pas à abandonner les cultures étrangères, mais au contraire à respecter leurs savoirs et leurs pratiques, sans chercher à imposer un mode de vie occidental. L’aide humanitaire ne peut se faire sans politisation ni lutte décoloniale. Sans quoi elle ne fait que reproduire les inégalités sociales qui profitent à l’Occidental désireux de conserver l’image du « sauveur blanc », et la gratification sociale qui s’en suit.

Nous avons demandé à plusieurs abonné·es Fsociété ce qu’ils pensent du concept d’héroïsme. Plusieurs internautes ont exprimé une certaine forme de réticence, soit vis-à-vis de sa connotation bourgeoise, soit pour sa dimension individuelle, ou encore pour son usage en inadéquation avec l’idée d’un militantisme collectif.
Selon Odile Maurin (interrogée sur Bluesky), l’héroïsme n’est pas banal : « c’est quand quelqu’un donne réellement sa vie pour les autres. » La lutte sociale, la défense des plus démunis, devraient donc aller de soi et ne nécessitent pas une telle mobilisation courageuse et sacrificielle : « agir en conscience, ce n’est pas être héroïque, c’est simplement être en conformité avec soi-même. »
Ce qui déplaît également dans le concept d’héroïsme, c’est sa dimension religieuse. Pour Léa Mesnil, l’héroïsme est valorisé et construit par une vision occidentale « essentiellement monothéiste ». D’autres préfèrent délaisser ce terme à la bourgeoisie.
BikingDog (Bluesky) choisirait par exemple les termes de courage ou d’abnégation, « par envie de liberté, de créativité et d’espoir pour le futur ». Il considère en effet que le héros bien qu’admiré par le peuple, s’en extrait : il est le modèle à suivre, un individu exceptionnel, que l’on aurait tendance à idéaliser, à romantiser. Alors que le véritable « héros », ou plutôt le courageux selon l’internaute, n’a pas besoin de lumière :
« Ceux qui étaient applaudis lors de l’épidémie de Covid, ils n’ont pas besoin de figurer dans les romans ni même dans les journaux : ils sont partout et sont reconnus par leur entourage, ils sont la maille du tissu social, pas un écusson arboré ou envié par autrui. »
L’acte héroïque est-il exceptionnel, réservé à une élite, un désir narcissique, ou bien ordinaire ? Si l’on décide de céder ses dimensions de domination et de distinction sociale à la classe bourgeoise, alors il convient de le délaisser et le connoter péjorativement.
L’autre option est celle de la réappropriation par les publics dominés, mais aussi sa redéfinition autour des valeurs d’altruisme, de dévouement aux causes sociales et à l’intérêt général. G.R.K. (Bluesky) a choisi d’illustrer quelques exemples d’héroïnes et de héros, qui ne cherchent aucune reconnaissance ou validation, mais qui luttent pour autrui jusqu’à « mettre en péril leur intégrité, tant physique que psychologique ou financière » :
Ces bénévoles qui organisent des maraudes nocturnes et subissent « quotidiennement des injustices, exactions, brimades et autres humiliations, tant physiques que psychologiques et souvent administratives, par les milices d’un État dorénavant fasciste. » Ces écologistes qui mettent leur vie en danger contre le projet d’autoroute A69. Ces militant·es qui « ne lâchent rien pour préserver le peu d’acquis sociaux qui restent aux handicapé·es et aux malades ». Les exemples sont ainsi nombreux, peu médiatisés ou, quand ils le sont, discrédités, parfois même criminalisés.

Ce qui revient le plus parmi les abonné·es, c’est l’idée que l’héroïsme devrait être avant tout collective. Sa dimension trop individuelle impliquerait une dérive narcissique, une volonté de se mettre en avant et d’être bien vu. Selon Etienne Fontan, « le vrai héroïsme est collectif et ancré dans la lutte quotidienne, loin des récits bourgeois qui tentent de se l’approprier ».
Alors que pour Isidro (Bluesky), il s’agit également d’être attentif au narratif guerrier et viriliste de l’héroïsme : « si l’on veut opposer la rhétorique bourgeoise du héros, souvent guerrier, souvent mâle, alors l’héroïsme n’est pas individuel mais collectif ».
La dimension individuelle repose également sur une certaine passivité, dans l’attente qu’un être providentiel résolve tous les maux de la société, mais repose aussi sur le mythe capitaliste où l’individu ayant le pouvoir serait sain, doté de bonnes intentions et « représente une solution de transformation du monde » (dixit Le poisson noir sur Bluesky).
En somme, la perception de l’héroïsme semble ambivalente, entre le rejet d’une bourgeoisie qui se distingue et s’accapare les valeurs d’héroïsme dans l’objectif d’accroître leur domination ; et la volonté de mettre en avant ces publics dominés qui luttent pour le bien commun.
Dans le nouveau numéro Fsociété Héroïques, en prévente jusqu’au 19 décembre, vous trouverez plusieurs articles sur le thème du militantisme et le parti pris d’une redéfinition de l’héroïsme en faveur des dominé·es et des activistes. Est également inclus un jeu Labyrinthe participatif sur le thème de la Flottille pour la liberté. Plusieurs articles sont en accès libre sur Mr Mondialisation :
– Benjamin Remtoula (Fsociété).
Photo de couverture : Dimanche 7 juillet 2024, un rendez-vous avait été donné par les soutiens du #NFP pour se retrouver place de la République à Paris. Reportage @tiphaine_real pour Mr Mondialisation
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